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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/955/2017

ATA/1100/2017 du 18.07.2017 ( TAXE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/955/2017-TAXE ATA/1100/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 18 juillet 2017

 

dans la cause

 

A______
représentée par Me Pascal Pétroz, avocat

contre


ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

 



EN FAIT

1) A______ (ci-après : la fondation) est une fondation de prévoyance inscrite au registre du commerce du canton de Zurich.

Elle est propriétaire de la parcelle n° 1______, cadastre de la commune de B______, à l’adresse ______, place C______, sur laquelle est édifié le centre commercial de cette cité.

2) Le 6 septembre 2016, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC) a transmis à la fondation les déclarations de la taxe de promotion du tourisme
(ci-après : la taxe) concernant les années 2013 à 2016.

3) Le 26 octobre 2016, la fondation a remis lesdites déclarations, datées et signées, à l’AFC. En sa qualité de bailleresse de locaux commerciaux, elle ne bénéficiait d’aucune retombée directe ou indirecte du tourisme et n’était pas assujettie à cette taxe.

Elle se limitait à céder l’usage de locaux à ses locataires, lesquels exploitaient des enseignes commerciales. Il n’y avait dès lors ni avantages directs ni avantages indirects. En particulier, elle n’exerçait pas une activité de « centre commercial ».

4) Le 12 janvier 2017, l’AFC a adressé à la fondation quatre bordereaux concernant la taxe des années 2013, 2014, 2015 et 2016.

Il était retenu que l’activité, qui avait commencé le 1er novembre 2013, était celle « centres commerciaux » avec un effectif de une à cinq personnes, dans la zone touristique B. Le coefficient de pondération était 0,5. Pour les mois de novembre et décembre 2013, la taxe était de CHF 250.- alors que, en 2014, 2015 et 2016, elle s’élevait à CHF 1'500.- par année.

5) Les 26 janvier et 15 février 2017, la fondation a saisi l’AFC de quatre réclamations contre les bordereaux précités, reprenant et développant les éléments figurant dans les courriers du 26 octobre 2016.

Elle ne retirait aucun avantage direct ou indirect du tourisme, n’exerçait pas l’activité de centre commercial et n’employait pas de personnel.

6) Le 16 février 2017 et 2 mars 2017, l’AFC a rejeté les réclamations et maintenu les taxes des années concernées.

La promotion touristique entraînait une fréquentation plus grande des visiteurs extérieurs du canton dans les catégories visées par la loi, lesquelles en retiraient des bénéfices économiques.

7) Le 16 mars 2017, la fondation a saisi la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) de quatre recours concernant respectivement la taxe 2013, 2014, 2015 et 2016, reprenant et développant tant ses explications que ses conclusions antérieures.

Ces quatre causes ont été jointes par décision du 21 mars 2017.

8) Le 12 avril 2017, l’AFC a conclu au rejet des recours. Les centres commerciaux étaient assujettis à la taxe. Cette dernière frappait les entreprises qui exerçaient une activité économique ou commerciale bénéficiant des retombées directes ou indirectes du tourisme. Tel était le cas des centres commerciaux, lesquels bénéficiaient du tourisme d’achat et de loisirs. La fondation bénéficiait de ces retombées à travers la location de ses arcades au centre commercial D______. Elle exerçait une activité commerciale en sa qualité de propriétaire qui louait les locaux en question et réalisait des bénéfices de ce chef. Le principe de la double imposition ne s’appliquait pas, et cela même si les locataires de la fondation devaient, eux aussi, régler cette taxe.

Il n’était pas possible que la fondation gère les arcades sans aucun personnel. Elle devait choisir les locataires, conclure les baux, encaisser les loyers, ce qui nécessitait au moins un employé.

9) Le 12 mai 2017, la fondation a exercé son droit à la réplique. Les éléments retenus par l’AFC ne s’appliquaient pas au centre commercial D______, mais seulement à des grands centres commerciaux, tels que celui de la E______ ou de F______. Ces derniers menaient des campagnes de publicité, avaient leur propres sites internet et étaient présents sur les réseaux sociaux, ce qui n’était pas le cas de la fondation. Elle ne retirait rien de plus du fait de louer ses arcades regroupées ensemble plutôt que de manière autonome.

10) Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées le 12 mai 2017.

EN DROIT

 

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 36 de loi sur le tourisme du 24 juin 1993 - LTour - I 1 60).

2) a. Selon les art. 17 al. 1 let. d, 19 et 25 al. 1 LTour, il est perçu une taxe de promotion du tourisme auprès des entreprises exerçant une activité économique ou commerciale bénéficiant directement ou indirectement du tourisme.

L'art. 25 al. 2 LTour délègue au Conseil d'État la compétence de déterminer l'assujettissement et la taxe de base applicables à chaque activité économique, en se fondant sur l'importance des retombées de tourisme et la rentabilité des affaires pour l'activité économique considérée ainsi que sur l'importance touristique du secteur géographique où s'exerce l'activité en question.

b. Le canton de Genève est divisé en deux zones, soit le secteur A, situé principalement au centre-ville et autour de l’aéroport, et le secteur B, qui regroupe le reste du canton.

c. Parmi les items de la liste des activités assujetties au paiement de la taxe quel que soit leur localisation figure les « centres commerciaux » (art. 24 al. 1 et art. 26 al. 3 ch. du règlement d’application de la loi sur le tourisme du 22 décembre 1993 - RTour - I 1 60.01).

3) La fondation conteste exercer l’activité de « centre commercial » et de ce fait être soumise à la taxe.

a. La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Dans le cas où plusieurs interprétations sont possibles, le juge recherche la véritable portée de la norme en la dégageant de sa relation avec d'autres dispositions légales et de son contexte (interprétation systématique), du but recherché, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique), ainsi que de la volonté du législateur telle qu'elle ressort des travaux préparatoires (interprétation historique). Le sens que prend la disposition dans son contexte est également important. Lorsqu'il est appelé à interpréter une loi, le Tribunal fédéral adopte une position pragmatique en suivant une pluralité de méthodes, sans soumettre les différents éléments d'interprétation à un ordre de priorité (ATF 140 V 485 consid. 4.1 ; ATF 140 V 227 consid. 3.2 et les arrêts cités).

b. La notion de « centre commercial » désigne un bâtiment qui comprend, sous un même toit, un ensemble de commerces de détail logés dans des galeries couvertes qui abritent les clients des intempéries. Un tel centre est conçu pour rendre agréable et favoriser l'acte d’achat. Il inclut souvent des grands magasins et/ou un hypermarché, qui en sont les locomotives ainsi qu’un parc de stationnement et est situés dans une zone urbaine ou à proximité (voir les sites internet http://www.granddictionnaire.com/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=1198718 et fr.wikipedia.org/wiki/Centre_commercial, consultés le 12 juillet 2017).

c. En l’espèce, l’immeuble dont est propriétaire la fondation répond très exactement à cette définition. Il englobe, dans un bâtiment unique flanqué d’un grand parking, deux magasins de grandes surfaces, une poste, une boulangerie, une épicerie, une pharmacie, un centre médical, un kiosque, un coiffeur, un pressing, un opticien, un agent d’assurances ainsi que trois établissements de restauration.

La fondation soutient qu’aucun de ses employés n’est affecté à la gestion de ce bien immobilier. Cet élément n’est toutefois pas pertinent, dès lors qu’il apparaît qu’elle en a confié la gestion à une régie immobilière. De même, l’absence de promotion de l’identité du centre par la fondation ressortit à un choix de gestion et de marketing de cette dernière qui ne permet pas de considérer que l’intéressée n’exerce pas une activité de centre commercial. En effet, elle exploite, par la perception de loyers, ce bâtiment, lequel est conçu pour attirer des chalands désirant acquérir des biens ou des services.

Au vu de ces éléments, c’est à juste titre que l’autorité intimée a retenu que la fondation, propriétaire d’un centre commercial qu’elle met en location, exerce une activité soumise à la perception de la taxe.

4) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté et tant les quatre bordereaux de taxes de promotion du tourisme que les quatre décisions rejetant les oppositions de la fondation seront confirmés.

En conséquence, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA). Il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure
(art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable les recours interjetés le 16 mars 2017 par A______ contre les décisions sur opposition de l’administration fiscale cantonale des 16 février 2017 et 2 mars 2017 ;

au fond :

les rejette ;

met à la charge de A______ un émolument de CHF 1'500.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi

communique le présent arrêt à Me Pascal Pétroz, avocat de la recourante ainsi qu’à l’administration fiscale cantonale.

Siégeants : Mme Junod, présidente, MM. Thélin, Dumartheray, Verniory et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :