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Décisions | Assistance juridique

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AC/2207/2024

DAAJ/3/2025 du 13.01.2025 sur AJC/5079/2024 ( AJC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/2207/2024 DAAJ/3/2025

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU LUNDI 13 JANVIER 2025

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Madame A______, domiciliée c/o M. B______, ______ [GE],

représentée par Me C______, avocate,

 

contre la décision du 20 septembre 2024 de la vice-présidence du Tribunal civil.

 

 


EN FAIT

A.           a. Le 23 août 2024, A______ (ci-après : la recourante), représentée par Me C______, avocate, a déposé au greffe de l'assistance juridique (ci-après : le GAJ) une demande d'assistance juridique "accompagnée des pièces justificatives y relatives", soit les relevés d'avril à juin 2024 du compte courant de la recourante auprès de [la banque] D______.

La recourante a répondu négativement à la question de savoir si elle disposait d'un ou de plusieurs comptes bancaires – nonobstant la production desdits relevés - et n'a pas donné de réponses aux questions 8 à 10 du formulaire (procès civil ou administratif en cours ou à venir, conseil juridique ou uniquement prise en charge des frais juridiques, description du procès en indiquant notamment le nom de la partie adverse, les motifs et conclusions et, en cas de divorce, le revenu mensuel net, 13ème salaire et gratifications compris, et état de fortune de l'époux).

Elle a mentionné percevoir un salaire mensuel de 4'552 fr. 50 comme auxiliaire de santé, sans préciser s'il incluait ou non un treizième salaire, tandis qu'il ressortait de son relevé bancaire de juin 2024 une rémunération à hauteur de 5'392 fr. 70. Elle a également indiqué la perception d'allocations familiales et sa charge de loyer, sans aucune autre charge mensuelle. Elle n'a pas remis, comme requis à la page 4 du formulaire, une copie de sa pièce d'identité, ni ses trois dernières fiches de salaires.

b. Le 27 août 2024, le GAJ a adressé un courrier à la recourante, lui impartissant un délai au 17 septembre 2024 pour produire les pages 3 (chiffres 7 à 10) et 4 (montant des primes d'assurance-maladie LAMAL et des impôts) du formulaire d'assistance juridique dûment complétées et fournir toutes les pièces relatives à sa situation financière ainsi que tous les documents relatifs au litige.

Par communication du même jour, le GAJ a transmis à Me C______ une copie de ce courrier.

Aucune réponse n'est intervenue au terme du délai imparti.

B.            Par décision du 20 septembre 2024, notifiée le 26 septembre 2024, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'assistance juridique de la recourante, au motif que sa requête était lacunaire.

Selon cette décision, le GAJ n'avait pas l'obligation d'interpeller à nouveau la recourante afin qu'elle la complète, puisqu'elle était représentée par un conseil. Or, ladite demande ne permettait pas à l'Autorité de première instance de se déterminer sur les mérites de la cause, ni sur la situation financière de la justiciable.

C.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 7 octobre 2024 à la Présidence de la Cour de justice.

La recourante conclut à l'annulation de la décision du 20 septembre 2024 et à l'octroi de l'assistance juridique, avec suite de frais à la charge de l'Etat.

Son conseil fait notamment valoir qu'elle n'a pas reçu le courrier du 27 août 2024 impartissant un délai à la recourante pour compléter la requête.

b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.

EN DROIT

1.             1.1. La décision entreprise est sujette à recours auprès de la présidence de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 121 CPC et art. 21 al. 3 LaCC), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

2. La mandataire de la recourante ne remet pas en cause la réception du courrier du GAJ du 27 août 2024, la priant de "trouver en annexe copie du courrier concernant" la recourante, soit uniquement les pages nos 3 et 4 de la formule d'assistance juridique, avec mise en évidence (surlignage) des points à compléter, mais sans l'indication d'un délai, dont elle n'avait appris l'existence que lors de la lecture de la décision litigieuse.

Elle reproche à l'Autorité de première instance de ne lui avoir accordé aucun délai supplémentaire pour s'exécuter, même très bref, après avoir constaté l'absence de réponse de la recourante, respectivement de son conseil. A son sens, la décision entreprise est excessivement formaliste et contrevient au principe d'équité, selon lequel toute personne doit avoir accès à la justice.

2.1. Selon l'art. 29 al. 1 Cst., toute personne a notamment droit, dans une procédure judiciaire, à ce que sa cause soit traitée équitablement.

2.1.1. Selon l'art. 117 CPC, une personne a droit à l'assistance judiciaire si elle ne dispose pas de ressources suffisantes (let. a) et si sa cause ne paraît pas dépourvue de toute chance de succès (let. b).

L'octroi de l'assistance juridique est notamment subordonné à la condition que le requérant soit dans l'indigence (art. 29 al. 3 Cst. et 117 let. a CPC).

La condition de l'indigence est réalisée si la personne concernée ne peut assumer les frais du procès sans entamer les moyens nécessaires à son entretien et à celui de sa famille (ATF 144 III 531 consid. 4.1; 141 III 369 consid. 4.1). Il faut pour cela examiner la situation financière de la partie requérante dans son ensemble (charges, revenus et fortune) au moment de la requête (ATF 135 I 221 consid. 5.1). La part des ressources excédant ce qui est nécessaire à la couverture des besoins personnels doit être comparée, dans chaque cas, aux frais prévisibles de la procédure pour laquelle l'assistance judiciaire est demandée. Le soutien de la collectivité publique n'est en principe pas dû, au regard de l'art. 29 al. 3 Cst., lorsque cette part disponible permet d'amortir les frais judiciaires et d'avocat en une année au plus, pour les procès relativement simples, et en deux ans pour les autres (ATF 141 III 369 consid. 4.1; 135 I 221 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_483/2022 du 7 septembre 2022 consid. 5.1).

Il incombe au requérant d'indiquer de manière complète et d'établir autant que faire se peut ses revenus, sa situation de fortune et ses charges (art. 119 al. 2 CPC et 7 al. 2 RAJ; ATF 135 I 221 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 2C_585/2015 du 30 novembre 2015 consid. 5).

Les ressources effectives des personnes qui ont à l'égard du requérant une obligation d'entretien doivent être prises en compte (ATF 119 Ia 11 consid. 3a), le devoir de l'Etat d'accorder l'assistance judiciaire à un plaideur impécunieux dans une cause non dénuée de chances de succès étant subsidiaire à l'obligation d'entretien qui résulte du droit de la famille (ATF 138 III 672 consid. 4.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_404/2022 du 17 octobre 2022 consid. 4.3.3 et les références citées).

2.1.2. Applicable à la procédure portant sur l'octroi ou le refus de l'assistance judiciaire, la maxime inquisitoire est limitée par le devoir de collaborer des parties (arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et les références citées).

Ce devoir de collaborer ressort en particulier de l'art. 119 al. 2 CPC qui prévoit que le requérant doit justifier de sa situation de fortune et de ses revenus et exposer l'affaire et les moyens de preuve qu'il entend invoquer. L'autorité saisie de la requête d'assistance judiciaire n'a pas à faire de recherches approfondies pour établir les faits ni à instruire d'office tous les moyens de preuve produits. Elle ne doit instruire la cause de manière approfondie que sur les points où des incertitudes et des imprécisions demeurent, peu importe à cet égard que celles-ci aient été mises en évidence par les parties ou qu'elle les ait elle-même constatées (arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et les références citées).

Le juge doit inviter la partie non assistée d'un mandataire professionnel dont la requête d'assistance judiciaire est lacunaire à compléter les informations fournies et les pièces produites afin de pouvoir vérifier si les conditions de l'art. 117 CPC sont remplies. Ce devoir d'interpellation du tribunal, déduit des art. 56 et 97 CPC, vaut avant tout pour les personnes non assistées et juridiquement inexpérimentées. Il est en effet admis que le juge n'a pas, de par son devoir d'interpellation, à compenser le manque de collaboration qu'on peut raisonnablement attendre des parties pour l'établissement des faits, ni à pallier les erreurs procédurales commises par celles-ci. Or, le plaideur assisté d'un avocat ou lui-même expérimenté voit son obligation de collaborer accrue dans la mesure où il a connaissance des conditions nécessaires à l'octroi de l'assistance judiciaire et des obligations de motivation qui lui incombent pour démontrer que celles-ci sont remplies. Le juge n'a de ce fait pas l'obligation de lui octroyer un délai supplémentaire pour compléter sa requête d'assistance judiciaire lacunaire ou imprécise (arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et les références citées).

Le fait de ne pas accorder un délai supplémentaire à la partie assistée pour compléter sa demande n'est pas constitutif de formalisme excessif (arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et les références citées).

Lorsque le requérant assisté ne satisfait pas suffisamment à ses incombances, la requête peut être rejetée pour défaut de motivation ou de preuve du besoin (arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et les références citées).

2.2. En l'espèce, la recourante, assistée d'un conseil, a soumis le 23 août 2024 au GAJ une demande d'assistance juridique lacunaire. Elle n'a pas rempli une partie du questionnaire (notamment chiffres 7 à 10) de sorte que ni sa situation financière, ni le litige pour lequel l'assistance juridique était requise n'étaient déterminables. De plus, certaines réponses n'étaient pas fiables. La recourante a répondu qu'elle ne possédait aucun compte bancaire mais a produit des relevés d'un compte auprès de D______ et a mentionné le montant du salaire mensuel, sans préciser l'éventuelle perception d'un treizième salaire.

Or, il pouvait être attendu de la recourante, accompagnée par une mandataire professionnellement qualifiée, de la remise d'emblée au GAJ, le 23 août 2024, d'une demande d'assistance juridique dûment complétée et accompagnée de toutes les pièces requises.

Cela étant, le GAJ a ensuite fixé à la recourante un délai au 17 septembre 2024 pour compléter son dossier. Le courrier du GAJ du 27 août 2024 était accompagné des pages nos 3 et 4 du formulaire avec mise en évidence (surlignage) des points à compléter. La production des pièces relatives à la situation financière de la recourante et au litige était sollicitée.

Or, ni la recourante, ni son conseil, n'ont donné aucune suite à ce courrier, ni sollicité une prolongation du délai.

A cet égard, le conseil de la recourante affirme que la communication du GAJ du 27 août 2024 à son attention n'était pas accompagnée de la copie du courrier destiné à sa cliente, de sorte qu'elle aurait ignoré l'échéance au 17 septembre 2024. Seules les pages 3 et 4 du formulaire étaient jointes.

Or, force est de constater que le message de transmission du GAJ destiné à l'avocate indiquait "veuillez trouver en annexe copie du courrier concernant Madame A______". En constatant que l'envoi ne contenait pas copie du courrier annoncé, le conseil de la recourante, avocat expérimenté et parfaitement au fait quant aux règles applicables, aurait dû interpeller le GAJ ou sa cliente pour se faire remettre une copie de cette correspondance.

En tout état de cause, le courrier du GAJ du 27 août 2024 était suffisamment explicite avec le surlignage des rubriques du formulaire à compléter pour que la recourante et son conseil comprennent qu'il convenait de compléter la demande d'assistance juridique. Cela est d'autant plus vrai que l'avocate connaît le processus d'octroi de l'assistance juridique.

C'est, dès lors, à tort que la recourante se plaint d'un formalisme excessif, car le respect des formes est justifié par des intérêts dignes de protection, en particulier par l'égalité de traitement entre justiciables.

Infondé, le recours sera, dès lors, rejeté.

3.  Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 7 octobre 2024 par A______ contre la décision rendue le 20 septembre 2024 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/2207/2024.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Étude de Me C______ (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF indéterminée.