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Décisions | Assistance juridique

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AC/3235/2022

DAAJ/110/2024 du 26.09.2024 ( AJC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/3235/2022 DAAJ/110/2024

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU JEUDI 26 SEPTEMBRE 2024

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Madame A______, domiciliée c/o Hôtel B______, ______, représentée par Me C______, avocat,

 

contre la décision du 15 juillet 2024 de la vice-présidence du Tribunal civil.

 


EN FAIT

A.           a. A______ (ci-après : la recourante), née le ______ 1990, de nationalité tunisienne, et D______, né le ______ 1983, de nationalité jordanienne, se sont mariés le ______ 2019 à E______ (Tunisie).

b. Ils se sont séparés à la fin du mois de février 2020. La séparation a été organisée par mesures protectrices de l'union conjugale prononcées le 4 octobre 2021 par le Tribunal (JTPI/12490/2021) et partiellement modifiées par la Cour de justice le 1er mars 2022 (ACJC/296/2022), décisions par lesquelles une contribution d'entretien lui a été accordée.

A______ a été mise au bénéfice de l'assistance juridique dans le cadre de cette procédure.

c. Par acte déposé au greffe du Tribunal de première instance, D______ a formé une demande unilatérale en divorce, assortie d'une requête de mesures provisionnelles tendant à la suppression de la contribution à l'entretien de A______, requête qui a été rejetée par ordonnance OTPI/424/2024 rendue le 26 juin 2023, faute d'un changement des circonstances.

d. Par décision du 10 novembre 2022, l'assistance juridique a été octroyée à A______ pour sa défense dans la procédure de divorce.

e. Par jugement JTPI/7123/2024 rendu le 10 juin 2024, le Tribunal de première instance a, notamment, prononcé le divorce de A______ et de D______, et dit qu'aucune contribution d'entretien post-divorce n'était due.

Ledit Tribunal a considéré que le mariage devait être qualifié de très courte durée, dès lors que les parties s'étaient mariées le ______ 2019 en Tunisie et s'étaient séparées le 25 février 2020, soit moins de onze mois plus tard, et que, durant cette période, les parties n'avaient véritablement vécu ensemble que quatre mois (A______ n'ayant rejoint son ex-époux en Suisse que le 7 juin 2019, étant ensuite repartie près de quatre mois seule en Tunisie et étant revenue en Suisse que quelques jours avant la séparation).

En outre, le mariage n'avait pas eu pour conséquence d'imposer à A______ un déracinement culturel. En effet, bien qu'elle avait quitté son pays d'origine dans la seule perspective de rejoindre son mari en Suisse et qu'elle avait ainsi démissionné de son poste d'infirmière en anesthésie à E______ [Tunisie], elle pourrait aisément se réinsérer dans la vie professionnelle de son pays d'origine, compte tenu de sa licence appliquée en sciences de la santé obtenue à E______ (non reconnue en Suisse), de son âge (33 ans) et de son expérience professionnelle, ayant travaillé dans une clinique à E______ en qualité d'infirmière en anesthésie de janvier 2018 à fin mars 2019. Elle avait en outre pu bénéficier en Suisse de deux expériences professionnelles en qualité d'auxiliaire de santé et d'aide-soignante, qui, bien que brèves, pourraient favoriser sa réinsertion professionnelle. De plus, dans la mesure où elle était en mesure de suivre actuellement des études à la Haute école F______, elle n'était pas empêchée d'exercer une activité professionnelle au vu de son état de santé.

Ainsi, sa réinsertion était tout à fait envisageable, de sorte qu'il pouvait être considéré que ses perspectives professionnelles étaient les mêmes, avant et après le mariage et qu'il ne se justifiait dès lors pas de lui octroyer une contribution d'entretien.

B.            a. Le 26 juin 2024, A______ a sollicité l'extension de l'assistance juridique afin de former appel contre le jugement de divorce précité.

b. Par courrier du greffe de l'assistance juridique du 27 juin 2024, A______ a été invitée à préciser quels points du dispositif elle entendait contester et à développer les motifs de l'appel envisagé, ainsi que les moyens de preuve; elle y a répondu le 10 juillet suivant en produisant son appel déposé le jour même et en précisant qu'elle s'appuyait sur les éléments versés à la procédure de divorce, notamment la procédure de séparation, afin de justifier ses prétentions en entretien fondées sur son déracinement culturel, lequel apparaissait plus que tangible selon elle.

Dans ledit acte d'appel, elle a allégué que le Tribunal de première instance avait mal apprécié les faits sous l'angle du déracinement culturel. En effet, elle était retournée en Tunisie en date du 5 octobre 2019 pour le mariage de sa sœur et était censée y rester deux semaines. Toutefois, elle n'avait pas pu rentrer en Suisse, car son époux ne lui avait pas fait parvenir en Tunisie sa carte de légitimation, qui avait été délivrée à son époux le 18 octobre 2019. Elle avait donc été contrainte de demeurer en Tunisie jusqu'au mois de janvier 2020 et avait dû se rendre à l'Ambassade suisse en Tunisie afin d'y obtenir un visa. Le premier juge aurait ainsi dû tenir compte des circonstances de la durée de ce séjour et non apprécier cette période comme facteur d'intégration dans son pays d'origine. En outre, son ex-époux s'était domicilié en Jordanie le 24 février 2020, sans l'en informer. Bien qu'il lui avait ensuite proposé de le rejoindre le 29 février 2020 - ce qu'elle n'avait pas fait -, un divorce avait été prononcé par les autorités jordaniennes le 1er mars 2020 et son ex-époux s'est remarié en Jordanie le ______ 2020. Selon elle, il se serait domicilié en Jordanie uniquement pour la répudier et se remarier, car il s'était à nouveau domicilié en Suisse par la suite afin d'obtenir une carte de légitimation pour sa nouvelle épouse. Elle s'était ainsi retrouvée sans ressources de façon abrupte, contrainte de solliciter l'aide sociale d'urgence et de se trouver un logement, ce qui démontrait ainsi le lien de dépendance la liant à son ex-époux. Le fait que ce dernier ait lui-même entrepris les démarches pour faire travailler son épouse ne faisait que confirmer son entière dépendance envers lui. Cette dépendance ressortait également du fait que son ex-époux avait effectué toutes les démarches administratives pour qu'elle puisse venir en Suisse et bénéficier d'une carte de légitimation. Elle avait abandonné son indépendance économique en Tunisie pour venir en Suisse, où son diplôme n'était pas reconnu et où elle ne connaissait personne. Son ex-époux l'avait maintenue dans un contrôle total, tant sur les plans relationnels, financiers qu'administratifs, allant jusqu'à lui interdire de disposer d'un compte bancaire et à lui chercher lui-même un emploi.

c. Par décision du 15 juillet 2024, notifiée le 18 juillet suivant, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'extension d'assistance juridique précitée, aux motifs que le raisonnement du jugement de divorce litigieux ne prêtait pas le flanc à la critique et que les chances de succès de son appel semblaient faibles.

Elle a considéré que le mariage n'avait pas provoqué un déracinement culturel. En effet, le fait que A______ n'avait pu rentrer en Suisse qu'en janvier 2020 après le mariage de sa sœur en octobre 2019 n'avait aucune influence pour déterminer l'existence d'un déracinement culturel. De même, le fait que son ex-époux se soit occupé des démarches pour lui trouver un emploi ne démontrait pas un déracinement culturel, A______ ayant été en mesure par la suite, de trouver, par elle-même, un stage dans le cadre de la formation qu'elle avait débutée en septembre 2021 à la Haute école F______. Enfin, bien qu'elle ait quitté son emploi en Tunisie pour se marier et rejoindre son ex-époux en Suisse, elle était en mesure de trouver un même emploi qu'auparavant dans son pays d'origine.

C.           a. Par acte déposé le 29 juillet 2024, A______ a recouru auprès de la Présidence de la Cour de justice contre cette décision, concluant, sous suite de frais et dépens, à ce que la décision entreprise soit annulée, à ce qu'elle soit admise au bénéfice de l'assistance juridique avec effet au 26 juin 2024, à ce que son conseil soit désigné en qualité d'avocat et à ce l'assistance juridique lui soit, en tout état, accordée dans le cadre de la présente procédure de recours.

Elle a sollicité, préalablement, l'apport de la procédure AC/1______/2022.

Elle a produit des pièces nouvelles, à savoir les décisions rendues sur mesures protectrices (JTPI/2490/2021 et ACJC/296/2022), les décisions de l'assistance juridique y relatives et la copie d'un courrier adressé à son ex-époux par la Cour de justice le 12 juillet 2024.

b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations et la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             1.1. La décision entreprise est sujette à recours auprès de la présidence de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 121 CPC et art. 21 al. 3 LaCC), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

2.             Aux termes de l'art. 326 al. 1 CPC, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours.

En l'occurrence, la recevabilité des pièces produites par la recourante peut rester indécise, dès lors ces pièces et les allégués de faits y relatifs ne sont pas déterminants pour l'issue du litige.

3.             Il n'y a pas lieu d'ordonner l'apport du dossier d'assistance juridique de la recourante, l'autorité précédente l'ayant d'ores et déjà remis à la Cour de céans.

4.             La recourante requiert l'octroi de l'assistance judiciaire pour la procédure de recours.

Cette demande aurait dû être formulée auprès de la présidence du Tribunal civil (art. 1 al. 1 RAJ), de sorte que cette conclusion est irrecevable (DAAJ/7/2024 du 20 février 2024).

5.             5.1. La recourante reproche, en premier lieu, à la vice-présidence du Tribunal civil d'avoir procédé à un examen excessif concernant l'existence d'un déracinement culturel, en s'arrogeant les compétences dévolues à l'autorité d'appel et se substituant au juge du fond, alors qu'elle ne disposait pas de l'ensemble des pièces pertinentes, notamment les décisions rendues dans la procédure de mesures protectrices. Selon la recourante, le raisonnement consistant à déterminer l'existence d'un déracinement culturel exigerait un pouvoir d'appréciation dont cette autorité ne jouirait pas et nécessiterait une analyse minutieuse intégrant des aspects subjectifs liés au vécu individuel de la personne s'en prévalant.

5.1.1 Reprenant l'art. 29 al. 3 Cst., l'art. 117 CPC prévoit que toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès.

Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter; en revanche, une demande ne doit pas être considérée comme dépourvue de toute chance de succès lorsque les perspectives de gain et les risques d'échec s'équilibrent à peu près ou lorsque les premières sont seulement un peu plus faibles que les seconds. Ce qui est déterminant est de savoir si une partie, qui disposerait des ressources financières nécessaires, se lancerait ou non dans le procès après une analyse raisonnable. Une partie ne doit pas pouvoir mener un procès qu'elle ne conduirait pas à ses frais, uniquement parce qu'il ne lui coûte rien (ATF 142 III 138 consid. 5.1; ATF 128 I 225 consid. 2.5.3).

Pour déterminer les chances de succès d'un recours, le juge peut prendre en considération la décision de première instance, en comparant celle-ci avec les griefs soulevés. De la sorte, l'examen sommaire des chances de succès auquel il doit procéder est simplifié. Cet examen ne doit toutefois pas conduire à ce qu'une partie voit quasiment rendu impossible le contrôle d'une décision qu'elle conteste (arrêt du Tribunal fédéral 5A_572/2015 du 8 octobre 2015 consid. 4.1).

La situation doit être appréciée à la date du dépôt de la requête et sur la base d'un examen sommaire (ATF 142 III 138 consid. 5.1; 133 III 614 consid. 5).

L'absence de chances de succès peut résulter des faits ou du droit. L'assistance sera refusée s'il apparaît d'emblée que les faits pertinents allégués sont invraisemblables ou ne pourront pas être prouvés (arrêt du Tribunal fédéral 4A_614/2015 du 25 avril 2016 consid. 3.2).

5.1.2. En l'espèce, la recourante ne saurait être suivie lorsqu'elle prétend que l'autorité précédente a outrepassé son pouvoir d'examen. En effet, il appartenait à cette instance, dans le cadre de son examen des chances de succès de l'appel contre le jugement de divorce déposé par la recourante, de confronter d'une manière sommaire le raisonnement du juge du divorce et les griefs soulevés par cette dernière, ce qu'elle a fait dans le respect de son pouvoir d'examen.

Ce grief sera, dès lors, écarté.

5.2. La recourante fait, en second lieu, valoir que son appel contre le jugement de divorce n'est pas dénué de chances de succès et que le mariage a influencé sa situation en raison de son déracinement culturel, dès lors que le Tribunal de première instance n'a pas tenu compte du fait qu'elle avait été arrachée à son environnement socio-culturel d'origine pour rejoindre son ex-époux, que ce dernier en avait profité pour imposer une mainmise économique et administrative sur tous les pans de sa vie sociale et privée, la plaçant dans un lien de dépendance et une soumission totale durant la vie conjugale. Le Tribunal de première instance avait, par ailleurs, faussement interprété son séjour en Tunisie comme un facteur d'intégration, alors qu'elle avait été contrainte d'y séjourner plus longtemps que prévu en raison des agissements de son ex-conjoint. Ce dernier n'avait pas hésité à la répudier en Jordanie, sans l'en informer et en la laissant dans le dénuement économique le plus complet. Au vu de ses arguments substantiels attestant d'un profond bouleversement de ses conditions d'existence générées par le mariage, il ne pouvait d'emblée être considéré que son appel apparaissait "ne pas tenir debout".

Elle relève, par ailleurs, qu'une contribution d'entretien lui a été accordée tant sur mesures protectrices que sur mesures provisionnelles, malgré l'opposition de son ex-conjoint, qui plaidait la faible durée de la vie commune et le faible impact du mariage sur sa situation, et qu'elle avait également été mise au bénéfice de l'assistance juridique dans le cadre de ces procédures.

5.2.1. Aux termes de l'art. 125 al. 1 CC, si l'on ne peut raisonnablement attendre d'un époux qu'il pourvoie lui-même à son entretien convenable, y compris à la constitution d'une prévoyance vieillesse appropriée, son conjoint lui doit une contribution équitable. Dans son principe, comme dans son montant et sa durée, l'obligation d'entretien doit être fixée en tenant compte des éléments énumérés de façon non exhaustive à l'art. 125 al. 2 CC (ATF 138 III 289 consid. 11.1.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_465/2016 du 19 janvier 2017 consid. 7.2.1).

Cette disposition concrétise deux principes: d'une part, celui de l'indépendance économique des époux après le divorce, qui postule que, dans toute la mesure du possible, chaque conjoint doit désormais subvenir à ses propres besoins; d'autre part, celui de la solidarité, qui implique que les époux doivent supporter en commun non seulement les conséquences de la répartition des tâches convenue durant le mariage (art. 163 al. 2 CC), mais également les désavantages qui ont été occasionnés à l'un d'eux par l'union et qui l'empêchent de pourvoir à son entretien (ATF 137 III 102 consid. 4.1.1; 132 III 598 consid. 9.1).

Une contribution pourrait être due si le mariage a eu un impact décisif sur la vie de l'époux créancier et a concrètement influencé la situation financière de ce dernier ("lebensprägend"). Dans cette hypothèse, on admet en effet que la confiance placée par l'époux créancier dans la continuité du mariage et dans le maintien de la répartition des rôles, convenue librement par les époux, mérite objectivement d'être protégée (ATF 141 III 465 consid. 3.1; 135 III 59 consid. 4.1). Lors de cet examen, plusieurs critères peuvent plaider en faveur ou en défaveur d'une présomption du caractère "lebensprägend", notamment la durée du mariage, la présence d'enfants et la répartition des tâches durant le mariage, le déracinement culturel de l'un des conjoints ou tout autre motif créant une position de confiance digne de protection, notamment une maladie durable (arrêt du Tribunal fédéral 5A_623/2012 du 28 janvier 2013 consid. 5.1).

Le mariage provoque un déracinement culturel ou linguistique ouvrant le droit à une contribution d'entretien en cas de séparation lorsque l'époux demandeur en contribution a quitté son environnement culturel en vue ou en raison du mariage et qu'il dépend de son conjoint dans son nouvel environnement. Tel n'est pas le cas lorsque le conjoint déraciné peut, après la séparation, retourner dans son pays d'origine, s'y réintégrer facilement et y retrouver un emploi lui permettant d'assurer son autonomie et son niveau de vie (arrêts du Tribunal fédéral 5A_876/2016 du 19 juin 2017 consid. 4.2, 5A_844/2014 du 23 avril 2015 consid. 5).

Un mariage doit en tout cas être considéré comme ayant marqué l'existence de l'époux lorsque, sur la base d'un projet de vie commun, l'un des époux a renoncé à son indépendance économique au profit de l'entretien du ménage et de la garde des enfants et qu'il ne lui est plus possible, après de longues années de mariage, d'exercer son ancienne activité ou d'exercer une autre activité lucrative offrant des perspectives économiques équivalentes, alors que l'autre époux a pu se concentrer sur son avancement professionnel compte tenu de la répartition des tâches conjugales (ATF 148 III 161 consid. 4.2).

Un tel mariage ne donne toutefois pas automatiquement droit à une contribution d'entretien. Selon la jurisprudence, le principe de l'autonomie prime le droit à l'entretien, ce qui se déduit directement de l'art. 125 CC (ATF 141 III 465 consid. 3.1). Un époux ne peut prétendre à une pension que s'il n'est pas en mesure de pourvoir lui-même à son entretien convenable (ATF 147 III 249 consid. 3.4.4; 141 III 465 consid. 3.1;
134 III 145 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_444/2021 du 9 mars 2022 consid. 3.1).

5.2.2. In casu, le fait que la recourante se soit vue octroyer une contribution à son entretien sur mesures protectrices de l'union conjugale (non modifiée sur mesures provisionnelles faute de changement de circonstances) et qu'elle ait, dans ce cadre, été mise au bénéfice de l'assistance juridique ne lui est d'aucun secours, dès lors que l'examen de l'obligation d'entretien entre époux diffère en mesures protectrices et en divorce. En effet, dans le cadre du divorce, se pose la question de savoir si le mariage a concrètement influencé la situation financière de ce dernier (notamment en raison d'une déracinement culturel), question qui n'a pas été examinée dans les procédures précédentes.

Pour le surplus, le raisonnement de l'autorité précédente est exempt de toute critique, en tant qu'il considère que le fait que la recourante n'ait pas pu rentrer en Suisse après le mariage de sa sœur en octobre 2019, mais seulement en janvier 2020, n'a aucune influence pour déterminer si le mariage a provoqué un déracinement culturel, cette période litigieuse ne représentant que deux mois sur les onze mois de vie commune des anciens conjoints.

Il en va de même s'agissant des manœuvres et de la mainmise alléguées de son époux sur tous les aspects de sa vie (notamment des démarches de ce dernier pour lui trouver lui-même un emploi), de sa répudiation et du dénuement dans lequel la séparation l'aurait laissée, dans la mesure où elle a été en mesure de trouver par elle-même deux expériences professionnelles en qualité d'auxiliaire de santé et d'aide-soignante dans le cadre de la formation qu'elle a entreprise dès septembre 2021 à la Haute école F______.

Enfin, la recourante ne formule aucun grief à l'encontre du raisonnement de l'instance précédente consistant à dire – à raison – que bien qu'elle ait quitté son emploi en Tunisie pour se marier et rejoindre son ex-époux en Suisse, elle est en mesure de trouver un même emploi qu'auparavant dans son pays d'origine, au vu de son diplôme, de son âge, de son expérience professionnelle et de la formation – dans son domaine d'activité – qu'elle suit actuellement en Suisse.

5.3 Au vu de ce qui précède, la vice-présidence du Tribunal civil était ainsi fondée à retenir que, de prime abord, il ne pouvait être considéré que le mariage avait provoqué un déracinement culturel et qu'en conséquence, les chances de succès de l'appel déposé par la recourante apparaissaient faibles, et à refuser l'assistance juridique pour ce motif.

Partant, le recours, infondé, sera rejeté.

6.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Compte tenu de l'issue du litige, il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 29 juillet 2024 par A______ contre la décision rendue le 15 juillet 2024 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/3235/2022.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Étude de Me C______ (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.