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Décisions | Chambre civile

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C/18339/2023

ACJC/1262/2025 du 16.09.2025 sur JTPI/12453/2024 ( OO ) , MODIFIE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/18339/2023 ACJC/1262/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 16 SEPTEMBRE 2025

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par la 12ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 14 octobre 2024, représentée par Me Geneviève CARRON, avocate, rue du Mont-de-Sion 12,
1206 Genève,

et

Monsieur B______, domicilié ______, Portugal, intimé, représenté par
Me Vincent CERUTTI, avocat, Schmidt & Associés, rue du Vieux-Collège 10,
1204 Genève.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/12453/2024 du 14 octobre 2024, reçu le 16 du même mois par A______, le Tribunal de première instance, a prononcé le divorce de la précitée et de B______ (ch. 1), dit qu'aucune contribution d'entretien n'était due par l'un ou l'autre des époux en faveur de son conjoint (ch. 2), attribué à A______ la jouissance exclusive du domicile conjugal avec les droits et obligations résultant du bail (ch. 3), condamné B______ à verser 81'667 fr. à A______ au titre de liquidation du régime matrimonial (ch. 4), ordonné le partage par moitié des avoirs de prévoyance professionnelle accumulés par les époux durant le mariage (ch. 5), arrêté les frais judiciaires à 1'000 fr., les a compensés avec l'avance de frais fournie par A______, les a mis à la charge des parties à raison de moitié chacun et condamné B______ à verser à A______ 500 fr. (ch. 6), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 7) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 8).

B. a. Par acte expédié le 15 novembre 2024 au greffe de la Cour de justice, A______ a formé appel de ce jugement, sollicitant l'annulation du chiffre 4 de son dispositif. Cela fait, elle a conclu à ce que B______ soit condamné à lui verser 239'247 fr. au titre de liquidation du régime matrimonial, sous suite de frais et dépens.

b. Dans sa réponse du 2 février 2025, B______, agissant en personne, a conclu au rejet de l'appel.

c. Dans sa réplique du 3 mars 2025, A______ a persisté dans ses conclusions.

d. Par duplique du 17 mars 2025, B______, représenté par un conseil, s'est déterminé sur la réplique, persistant dans ses conclusions.

Il a produit des pièces nouvelles et allégué des faits nouveaux.

e. Le 28 mars 2025, A______ s'est encore déterminée sur la duplique de son adverse partie et a persisté dans ses conclusions.

f. Par avis du greffe de la Cour du 14 avril 2025, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______, née [A______] le ______ 1964, à C______ (Portugal) ressortissante portugaise, et B______ né le ______ 1955 à D______ (Portugal), ressortissant portugais, se sont mariés le ______ 2003 à Genève.

b. Ils n'ont pas conclu de contrat de mariage.

c. Un enfant, E______, désormais majeur, est issu de leur union. B______ est également le père de F______, née d'une précédente union, dont la date de naissance est inconnue.

d. Les parties vivent séparées depuis le 1er mars 2019. A______ est restée vivre dans l'appartement conjugal. B______ a quitté la Suisse en 2021 pour s'installer au Portugal.

e. Par jugement JTPI/4845/2019 du 1er avril 2019, le Tribunal, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a notamment prononcé la séparation de biens des époux avec effet au 1er avril 2019.

f. Par acte déposé au greffe du Tribunal le 6 septembre 2023, A______ a formé une demande unilatérale en divorce, qu'elle a complétée le 11 mars 2024 (cf. let. C. h infra). Elle a conclu en dernier lieu s'agissant du point encore contesté en appel à ce que le Tribunal condamne B______ à lui verser 239'247 fr. à titre de liquidation du régime matrimonial.

A titre préalable, elle a requis que le Tribunal ordonne à B______ de produire divers documents bancaires, l'estimation des biens immobiliers sis au Portugal dès le 1er avril 2017 et les estimations de ses deux véhicules de marque G______ et de sa moto [de marque] H______ à la date du 1er avril 2017 et qu'il mette en place, si nécessaire, une commission rogatoire au Portugal pour obtenir les renseignements relatifs aux deux biens immobiliers de B______.

A l'appui de ses conclusions, elle a fait valoir que B______ était titulaire de plusieurs comptes bancaires. Il n'avait pas été possible de déterminer le montant des avoirs des parties à la date du mariage en 2003, ni "l'appartenance" du montant de 225'000 fr. faisant l'objet de la taxation d'office en 2018. Elle proposait ainsi d'effectuer le calcul relatif au partage des avoirs à la date du 31 décembre 2017 et réclamait un montant de 167'383 fr. à ce titre ([(404'610 fr. avoirs bancaires de monsieur + 69'844 fr. avoirs bancaires de madame) /2]
– 69'844 fr.) (cf. let. D. d infra).

S'agissant des deux biens immobiliers sis au Portugal appartenant à B______, A______ a soutenu avoir investi des fonds dans l'immeuble de D______, acquis par son époux avant le mariage, pour le rendre habitable. L'immeuble de I______ avait, par ailleurs, été acquis par B______ durant le mariage, de sorte qu'il convenait d'en partager le bénéfice. Elle estimait que sa part, plus-value comprise, s'élevait à un montant global de 50'000 fr. pour les deux biens, sans produire de calcul à l'appui de sa conclusion.

B______ avait acquis durant le mariage deux véhicules G______ et une moto H______, en utilisant le produit de la vente de sa propre voiture. Elle a estimé la valeur desdits biens à 23'000 fr. et réclamé la moitié, soit 11'500 fr.

Enfin, B______ avait transféré sans son accord 18'000 euros à sa fille, F______, soit 20'718 fr. au taux de change de l'époque (1 EUR pour 1,117 CHF). Ce montant devait ainsi être réuni aux acquêts. Elle en réclamait la moitié, soit 10'359 fr.

g. Par ordonnance du 27 septembre 2023 envoyée à B______ par courrier recommandé, le Tribunal a transmis la demande en divorce à ce dernier, lui a imparti un délai au 23 octobre 2023 pour élire un domicile de notification en Suisse et l'a convoqué à une audience le 17 novembre 2023.

Le courrier en question a été retourné au Tribunal avec la mention "refusé" et renvoyé à B______, pour information, par pli simple le 8 novembre 2023.

h. Lors de l'audience de conciliation du 17 novembre 2023, B______ n'était ni présent ni représenté.

A l'issue de cette audience, le Tribunal a imparti un délai à A______ pour compléter sa demande et chiffrer ses conclusions, ce qu'elle a fait par écritures du 11 mars 2024 (cf. let. C.f supra).

i. Par courriers simple et recommandé du 26 mars 2024, le Tribunal a transmis à B______ l'écriture de A______ du 11 mars 2024 et l'a convoqué à une audience le 2 mai 2024.

Le courrier recommandé a été distribué le 4 avril 2024.

j. Lors de l'audience de comparution personnelle des parties du 2 mai 2024, B______ n'était ni présent ni représenté.

k. Par ordonnance du 6 mai 2024, envoyée à B______ par courrier recommandé, le Tribunal a imparti à ce dernier un délai au 24 juin 2024 pour répondre par écrit à la demande en divorce et élire un domicile de notification en Suisse. A défaut de réponse dans le délai imparti, la procédure suivrait son cours sans qu'il ne soit tenu compte du défaut; une décision finale serait rendue si la cause était en état d'être jugée.

Ce courrier a été distribué le 14 mai 2024.

l. Par courrier recommandé du 15 août 2024, le Tribunal a convoqué B______ a une audience le 12 septembre 20254. Le courrier en question a été retourné au Tribunal avec la mention "non-réclamé".

m. Lors de l'audience de plaidoiries finales du 12 septembre 2024, à l'issue de laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger, B______ n'était ni présent ni représenté.

D. La situation personnelle et financière des parties se présente comme suit s'agissant des points contestés en appel:

a. B______ est propriétaire d'un immeuble de 300 m2 situé à D______ (Portugal), dont la valeur fiscale a été estimée à 49'501.55 euros en 2018 par les autorités fiscales et douanières portugaises.

Selon l'avis de taxation de l'AFC pour 2017, ce bien est occupé par B______ depuis 1979.

La valeur d'acquisition du bien est inconnue de la Cour. A______ a allégué que l'immeuble ne comportait que murs et fenêtres quand il avait été acquis par B______.

Dans sa demande en divorce, A______ a allégué que les époux avaient dépensé ensemble 30'000 fr. pour effectuer des travaux d'électricité, raccordement, volets, stores, cuisine, salon et muret mitoyen de la propriété. Dans son écriture du 11 mars 2024, postérieure à l'audience du 17 novembre 2023, à laquelle B______ ne s'est pas présenté, elle a complété sa demande en divorce et allégué que les époux auraient chacun dépensé au moins 30'000 fr. pour lesdits travaux. Elle a offert de prouver ces allégués par audition des parties. A______ n'a pas allégué la valeur du bien au moment de l'investissement, ni la date de celui-ci.

Dans son écriture du 11 mars 2024, elle a estimé la valeur vénale actuelle du bien à 200'000 euros et a produit à l'appui de cette allégation des extraits de site internet sur lesquels figurent des maisons à vendre à D______, dont les prix se situent entre 200'000 euros et 300'000 euros pour une surface moyenne de 300 m2.

b. B______ est aussi propriétaire d'un immeuble sis à I______ (Portugal), dont la valeur fiscale a été estimée à 50'892.10 euros en 2018 par les autorités fiscales et douanières portugaises.

Selon l'avis de taxation de l'AFC pour 2017, B______ occupe ce bien depuis 2013.

Le prix d'acquisition du bien ne figure pas sur les documents produits. A______ a allégué qu'il aurait été acquis par B______ pour un montant de 10'000 euros. Elle a indiqué ne pas disposer des documents d'acquisition, de sorte qu'il convenait d'ordonner à B______ de les produire.

c. A______ a allégué que B______ était propriétaire de deux véhicules G______ ainsi que d'une moto H______ acquis durant le mariage. Elle a offert de prouver cette allégation par audition des parties et produit des photographies. Elle a estimé la valeur de ces véhicules à un montant global de 23'000 fr. au 1er avril 2019.

d. Selon les avis de taxation de l'AFC, la fortune mobilière de B______ s'élevait à 404'634 fr. au 31 décembre 2017 et à 213'209 fr. au 31 décembre 2018.

e. Selon les avis de taxation de l'AFC, la fortune mobilière de A______ s'élevait à 69'905 fr. au 31 décembre 2017 et à 49'875 fr. au 31 décembre 2018.

f. Il ressort encore de la taxation 2018 des époux que l'AFC a ajouté un montant de 225'000 fr. sous le libellé "autre fortune". L'administration fiscale a indiqué que faute de réponse à la demande de renseignements et de justificatifs dans le délai imparti, elle avait fixé ce montant d'office sur la base de tous les indices concluants dont elle avait connaissance en application de l'art. 37 al. 1 LPFisc (taxation d'office).

g. Le 18 octobre 2017, B______ a viré un montant de 18'000 euros à F______ depuis un compte bancaire chez J______. A______ a allégué que ce virement avait été effectué sans son accord.

E. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a retenu que A______, qui supportait le fardeau de la preuve, n'avait ni démontré ni rendu vraisemblable l'existence et la valeur vénale des véhicules appartenant prétendument à B______. Il en allait de même s'agissant des investissements qu'elle aurait effectués dans la maison de D______. La date et le prix d'acquisition du terrain de I______ n'étaient pas établis par pièce et l'estimation de la valeur en 2019 correspondait à une valeur fiscale et non à une valeur vénale. Il n'était pas possible de retenir que le montant de 18'000 euros que B______ avait transféré à F______ devait être considéré comme une libéralité à réunir aux acquêts, faute d'informations quant aux circonstances du transfert. La fortune immobilière serait appréciée au 31 décembre 2018, dès lors que la séparation de biens était intervenue au 1er avril 2019. Le montant de 225'000 fr. ajouté d'office par l'AFC serait toutefois déduit. La fortune des deux époux s'élevant à 263'084 fr. (213'209 fr. + 49'875 fr.), A______ avait droit à 81'667 fr. ([263'084 fr./ 2] – 49'875 fr.) à titre de liquidation du régime matrimonial.

EN DROIT

1. 1.1 Le jugement entrepris ayant été communiqué aux parties avant le 1er janvier 2025, la présente procédure d'appel demeure régie par l'ancien droit de procédure (art. 404 al. 1 et 405 al. 1 CPC), sous réserve des dispositions d'application immédiate énumérées à l'art. 407f CPC.

1.2 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance, dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

En l'espèce, le litige porte sur la liquidation du régime matrimonial. Compte tenu des conclusions prises en dernier lieu devant le premier juge, la valeur litigieuse est largement supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.3 Interjeté dans le délai utile de trente jours, (art. 142 al. 1, 143 al. 1 et 311 al. 1 CPC), selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 CPC) et auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), l'appel est recevable.

1.4 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC).

La maxime des débats et le principe de disposition sont applicables aux questions relatives à la liquidation du régime matrimonial (art. 55 al. 1, 58 al. 1 et 277 al. 1 CPC).

2. L'intimé a allégué des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles avec sa duplique d'appel.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

2.2 En l'espèce, les pièces produites par l'intimé datent de 2018-2019, de sorte qu'elles sont antérieures à la clôture de la procédure probatoire de première instance, et l'intimé n'expose pas les motifs pour lesquels il n'a pas comparu en première instance. Ces pièces sont dès lors irrecevables, de même que les allégués qui s'y rapportent.

3. L'appelante reproche au premier juge d'avoir erré dans le règlement de la liquidation du régime matrimonial. Elle soutient que vu le défaut de l'intimé en première instance, elle n'était pas tenue de prouver les faits allégués dans sa demande, lesquels auraient dû être admis par le Tribunal, faute de contestation et/ou de doutes sur les faits allégués.

Elle reproche également au premier juge de n'avoir pas suffisamment motivé son refus de prendre en considération le montant de 225'000 fr. et fait valoir une violation de son droit d'être entendue.

3.1.1 Les parties allèguent les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions et produisent les preuves s'y rapportant (art. 55 al. 1 CPC).

Lorsque la maxime des débats est applicable (art. 55 al. 1 CPC), il incombe aux parties, et non au juge, de rassembler les faits du procès. Les parties doivent alléguer les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions (fardeau de l'allégation subjectif), produire les moyens de preuve qui s'y rapportent (art. 55 al. 1 CPC) et contester les faits allégués par la partie adverse, le juge ne devant administrer, en vertu de l'art. 150 al. 1 CPC, les moyens de preuve que sur les faits pertinents et contestés (ATF 144 III 519 consid. 5.1).

La maxime des débats à elle seule ne contraint pas la partie qui a la charge de la preuve d’assigner, au stade procédural de l’allégation déjà, une valeur à chaque bien qui joue un rôle dans la liquidation du régime matrimonial. Si la partie chargée de la preuve ne connaît pas la valeur d’une certaine position des actifs ou passifs et ne peut pas non plus la déterminer par elle-même, elle peut requérir le tribunal d’ordonner une expertise à cette fin, afin que le tribunal administre la preuve du fait pertinent et que de cette manière, elle puisse être connue. Il ne résulte pas autre chose du devoir, imposé aux parties par l’art. 55 al. 1 CPC, de requérir et d’offrir les moyens de preuve qui se rapportent aux allégués de faits qu’elles doivent prouver, dont l’omission a pour conséquence que le tribunal considèrera leurs allégués de faits comme non prouvés (fardeau de la preuve) (arrêt du Tribunal fédéral 5A_346/2015 du 27 janvier 2017 consid. 5.3).

3.1.2 Selon l'art. 147 CPC, une partie est défaillante lorsqu'elle omet d'accomplir un acte de procédure dans le délai prescrit ou ne se présente pas lorsqu'elle est citée à comparaître (al. 1); la procédure suit son cours sans qu'il ne soit tenu compte du défaut, à moins que la loi n'en dispose autrement (al. 2); le tribunal rend les parties attentives aux conséquences du défaut (al .3).

3.1.3 En procédure ordinaire, la demande (art. 221 al. 1 let. d et e CPC) et la réponse (art. 221 al. 2, 1ère phrase CPC) doivent contenir les allégations de fait et l'indication, pour chaque allégation, des moyens de preuve proposés. La réponse doit également exposer quels faits allégués dans la demande sont reconnus ou contestés (art. 222 al. 2, 2ème phrase CPC). L'administration des preuves ne porte en effet que sur les faits contestés (art. 150 al. 1 CPC).

Aux termes de l'art. 223 CPC, si la réponse n’est pas déposée dans le délai imparti, le tribunal fixe au défendeur un bref délai supplémentaire (al. 1). Si la réponse n’est pas déposée à l’échéance du délai, le tribunal rend la décision finale si la cause est en état d’être jugée. Sinon, la cause est citée aux débats principaux (al. 2).

La cause est en état d'être jugée (art. 223 al. 2 CPC) lorsque le tribunal dispose de toutes les bases de décision pour statuer sur le bien-fondé ou le mal-fondé de la prétention invoquée ou pour rendre une décision de non-entrée en matière. Cela suppose, pour l'admission des conclusions, que le demandeur ait motivé sa demande de manière concluante, c'est-à-dire qu'il ait allégué tous les faits juridiquement pertinents dont résulte la prétention invoquée. La cause n'est pas en état d'être jugée, notamment, lorsque les allégués du demandeur ne sont pas clairs, ou sont contradictoires, imprécis ou manifestement incomplets, de sorte qu'il y a lieu d'exercer le devoir d'interpellation du juge (art. 56 CPC), ou lorsque le juge a des doutes sérieux sur l'exactitude d’un fait allégué par le demandeur et demeuré non contesté, de sorte qu'il doit en administrer la preuve d'office selon l'art. 153 al. 2 CPC. Les doutes peuvent par exemple résulter du fait que la présentation du demandeur est contredite par les pièces produites. Le tribunal décide, en exerçant son pouvoir d'appréciation, sur le caractère sérieux des doutes, qui nécessite une certaine intensité (arrêt du Tribunal fédéral 5A_545/2021 du 8 février 2022 consid. 4.2). Le fait d’être en état d’être jugé se rapporte ainsi au fondement en fait de la demande, mais non à son bien-fondé en droit. A cet égard, le juge reste libre de son jugement (ACJC/701/2016 du 20 mai 2016 consid. 3.1). Un arrêt au fond est rendu en faveur du requérant lorsqu’il établit, au regard des règles de droit applicables, les allégations de fait nécessaires, qu’il a soulevé le moyen de manière circonstanciée et qu’il n’existe aucun doute sérieux quant à l’exactitude de sa présentation des faits (Willisegger, BSK ZPO, 4. Auflage, 2024, n. 23 ad art. 223 CPC).

Le concept de forclusion selon l’art. 223 al. 2 CPC est en relation avec le fardeau, pour le défendeur, de contester les faits allégués par le demandeur et le fardeau qui en résulte, pour ce dernier, de les prouver. Dans le procès soumis à la maxime de disposition, le défendeur doit spécifier dans la réponse quels faits allégués par le demandeur il reconnaît ou conteste (art. 222 al. 2 CPC). Comme seuls les faits pertinents contestés – ou ceux non contestés, mais pour lesquels le juge nourrit des doutes sérieux (art. 153 al. 2 CPC) - sont objets de la preuve (art. 150 al. 1 CPC), faute de contestation le demandeur est en principe libéré du fardeau de la preuve des faits qu’il a allégués pour fonder sa prétention. Le défendeur qui ne présente pas de réponse court dès lors le risque que le juge rende une décision finale en se fondant sur les seuls faits allégués par le demandeur. Telle est la conséquence concrète consacrée par l’art. 223 al. 2 CPC, pour le cas où le défendeur ne présente pas de réponse malgré la fixation du délai de grâce (arrêt du Tribunal fédéral 4A_381/2018 du 7 juin 2019 consid. 2.3; Bastons Bulletti in CPC Online, newsletter du 11 septembre 2019).

3.1.4 Aux termes de l'art. 277 CPC, la maxime des débats s’applique à la procédure concernant le régime matrimonial et les contributions d’entretien après le divorce (al. 1). Si nécessaire, le tribunal requiert des parties la production des documents manquants pour statuer sur les conséquences patrimoniales du divorce (al. 2).

L'art. 277 al. 2 CPC ne concerne que les pièces qui sont nécessaires à la preuve des faits allégués et n'impose pas au juge d'obligation d'interpeller les parties sur d'éventuelles insuffisances de leurs allégations (arrêt du Tribunal fédéral 5A_18/2018 du 16 mars 2018; Tappy, CR CPC, 2ème éd., 2019, n. 10 ad art. 277 CPC).

3.1.5 Selon l'art. 56 CPC, le tribunal interpelle les parties lorsque leurs actes ou déclarations sont peu clairs, contradictoires, imprécis ou manifestement incomplets et leur donne l'occasion de les clarifier ou de les compléter.

Le devoir d'interpellation du juge constitue une atténuation de la maxime des débats, selon laquelle les parties doivent en principe alléguer les faits constituant le cadre du procès. Le but de l'art. 56 CPC est ainsi d'éviter qu'une partie ne soit déchue de ses droits parce que ses allégués de fait et ses offres de preuves sont affectés de défauts manifestes. De jurisprudence constante, le devoir d'interpellation du juge ne doit pas servir à réparer des négligences procédurales (ATF 146 III 413 consid. 4.2 et les arrêts cités). Pour les parties représentées par un avocat, il n'a qu'une portée très limitée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_502/2019 du 15 juin 2020 consid. 7.1 et l'arrêt cité).

L'interpellation est limitée par le cadre du procès; le juge ne doit ainsi pas rendre les parties attentives à des faits qu'elles n'ont pas pris en considération, ni les aider à mieux présenter leur cause, ni leur suggérer des arguments pertinents (ATF 146 III 413 consid. 4.2; 142 III 462 consid. 4.3). Il n'y a pas non plus de devoir d'interpellation du juge lorsqu'une partie n'offre simplement aucune preuve à l'appui d'un allégué important. L'appréciation de la force probante d'un moyen de preuve offert relève de l'appréciation des preuves et ne peut dès lors pas être l'objet du devoir d'interpellation du juge (arrêts du Tribunal fédéral 4A_444/2013 du 5 février 2014 consid. 6.3.2; 5A_115/2012 du 20 avril 2012 consid. 4.5.2).

3.1.6 Le droit d'être entendu est garanti aux art. 29 al. 2 Cst et 53 CPC. La jurisprudence a déduit de l'art. 29 al. 2 Cst. le devoir pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 142 III 433 consid. 4.3.2; 141 IV 249 consid. 1.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_19/2020 du 18 mai 2020 consid. 6). Il n'y a violation du droit d'être entendu que si l'autorité n'a pas satisfait à son devoir minimum d'examiner et de traiter les problèmes pertinents (ATF 135 III 670 consid. 3.3.1; 133 III 235 consid. 5.2 et les arrêts cités). L'essentiel est que la décision indique clairement les faits qui sont établis et les déductions juridiques qui sont tirées de l'état de fait déterminant (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 135 II 145 consid. 8.2). En revanche, l'autorité se rend coupable d'un déni de justice formel si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 142 III 433 consid 4.3 et les références citées).

Si la partie lésée a la possibilité d'exercer son droit d'être entendue dans le cadre de son appel, où l'autorité jouit d'un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC), la violation est réparée. L'appelant ne peut alors pas se contenter de se plaindre de cette violation : il doit exercer son droit d'être entendu (arrêt du Tribunal fédéral 5A_925/2015 du 4 mars 2016 consid. 2.3.3.2 n.p. in ATF
142 III 195 et les références citées).

3.1.7 Le régime de la participation aux acquêts (art. 181 CC) comprend les acquêts et les biens propres de chaque époux (art. 196 CC).

Les acquêts d'un époux comprennent notamment le produit de son travail, les sommes versées par des institutions de prévoyance en faveur du personnel, les revenus de ses biens propres ou les biens acquis en remploi de ses acquêts (art. 197 al. 2 CC). Sont biens propres de par la loi les effets d'un époux exclusivement affectés à son usage personnel, les biens qui lui appartiennent au début du régime ou qui lui échoient ensuite par succession ou à quelque autre titre gratuit, les créances en réparation d'un tort moral et les biens acquis en remploi des biens propres (art. 198 CC). Tout bien d'un époux est présumé acquêt, sauf preuve du contraire (art. 200 al. 3 CC).

Pour déterminer le bénéfice de chaque époux (art. 210 CC), les acquêts et les biens propres de chaque époux sont disjoints dans leur composition au jour de la dissolution du régime (art. 207 al. 1 CC). La composition des actifs et passifs des comptes d'acquêts est définitivement arrêtée à cette date (ATF 123 III 289; arrêt du Tribunal fédéral 5A_222/2010 du 30 juin 2010 consid. 6.3.1). Après la dissolution, il ne peut en effet plus y avoir formation de nouveaux acquêts ou accroissement de ceux-ci, ni modification du passif du compte d'acquêts (ATF 136 III 209 consid. 5.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_339/2015 du 18 novembre 2015 consid. 10.3).

Le régime est notamment dissous au jour du contrat adoptant un autre régime (art. 204 al. 1 CC). La dissolution met fin au régime et ouvre la voie à la liquidation de celui-ci. Les biens à partager sont estimés à leur valeur vénale au moment de la liquidation (art. 211 et 214 al. 1 CC; Steinauer/Fountoulakis, CR CC, 2ème éd., 2023, n. 3 ad art. 204 CC).

L'art. 211 CC présente un caractère dispositif, ce qui laisse la possibilité aux époux de convenir, au moment de la liquidation du régime et sans avoir à respecter une forme particulière, d'une autre manière d'estimer leurs biens (Guillod, Cpra Droit matrimonial, 2016, n. 4 ad art 211 CC).

Selon l'art. 206 al. 1 CC, lorsqu’un époux a contribué sans contrepartie correspondante à l’acquisition, à l’amélioration ou à la conservation de biens de son conjoint qui se retrouvent à la liquidation avec une plus-value, sa créance est proportionnelle à sa contribution et elle se calcule sur la valeur actuelle des biens; en cas de moins-value, il peut en tout cas réclamer le montant de ses investissements.

Selon l'art. 208 al. 1 ch. 1 CC, sont réunis aux acquêts, en valeur les biens qui en faisaient partie et dont l’époux a disposé par libéralités entre vifs sans le consentement de son conjoint dans les cinq années antérieures à la dissolution du régime, à l’exception des présents d’usage.

La notion de libéralités entre vifs désigne toutes les aliénations de biens faites à des tiers à titre gratuit (c’est-à-dire sans contrepartie) qui ont pour conséquence de diminuer les acquêts ou d'empêcher une augmentation de ceux-ci, à l'exception des présents d'usage (ATF 138 III 689 consid. 3.3; JdT 2013 II 261). Il y a par exemple libéralités au sens de l'art. 208 CC quand un époux verse une somme d'argent à un tiers, en dehors de toute obligation légale et dans une proportion qui dépasse un présent d'usage (Burgat, Cpra Droit matrimonial, 2016, n. 7-8 ad art. 208 CC).

La doctrine considère que lorsqu'un conjoint effectue des prélèvements importants sur ses acquêts, sans parvenir à fournir d'explication crédible sur l'utilisation des montants prélevés, et sans prouver le consentement du conjoint pour l'utilisation des fonds, il se justifie d'admettre que les conditions de l'art. 208 al. 1 ch. 2 CC sont remplies, dans la mesure où il s'agit de diminutions déloyales de la fortune (Burgat, op. cit., n. 21 ad art. 208 CC).

Chaque époux a droit à la moitié du bénéfice de l'autre (art. 215 al. 1 CC).

3.2.1 En l'espèce, il est acquis que les parties, qui n'avaient pas conclu de contrat de mariage, étaient soumises au régime légal de la participation aux acquêts (art. 181 CC) jusqu'au jugement de mesures protectrices de l'union conjugale du 1er avril 2019, prononçant la séparation de biens des époux avec effet au 1er avril 2019. Ledit régime est donc dissous avec effet à la date précitée (art. 204 al. 1 CC).

3.2.2 Le Tribunal a débouté l'appelante de plusieurs de ses prétentions en liquidation du régime matrimonial, au motif que cette dernière n'avait pas produit de pièces probantes à l'appui de ses allégations.

Or, au vu du défaut de l'intimé en première instance, qui n'est pas remis en cause en appel, il convenait de statuer en se fondant sur les allégations de l'appelante, dispensées de preuve, faute d'avoir été contestées par l'intimé, pour autant que la cause était en état d'être jugée, étant encore rappelé que seuls les moyens de preuve doivent être indiqués dans la demande, les faits n'ayant pas à être prouvés d'entrée de cause mais uniquement s'ils sont contestés.

Il convient donc de vérifier pour chaque prétention en liquidation du régime matrimonial de l'appelante si sa demande satisfait aux obligations prévues par le code de procédure civile.

3.2.3 L'appelante requiert de participer au bénéfice de l'intimé s'agissant du bien immobilier situé à I______, Portugal.

Elle a établi que ledit bien immobilier existait et qu'il avait été acquis par l'intimé durant le mariage, dès lors qu'il ressort de la taxation 2017 qu'il est occupé par ce dernier depuis 2013. Elle a, en outre, allégué une valeur d'acquisition de 10'000 euros (présumé acquêt, sauf preuve du contraire) et sollicité du premier juge qu'il ordonne à l'intimé de produire les documents d'acquisition, dont elle ne disposait pas. Elle a également requis la mise en œuvre d'une commission rogatoire au Portugal pour déterminer la valeur vénale du bien au moment de la liquidation du régime matrimonial. L'appelante a ainsi satisfait au devoir imposé par les art. 55 et 221 al. 1 CPC d'alléguer les faits pertinents et de requérir et d'offrir les moyens de preuve pour chaque allégation qu'elle devait prouver.

Au vu du défaut de l'intimé, il convenait donc de statuer sur la base des allégations non contestées de l'appelante, à condition de disposer des éléments nécessaires pour ce faire. A cet égard, les documents relatifs au montant d'acquisition de 10'000 euros ne pouvaient être recueillis par le Tribunal auprès de l'intimé vu le défaut de ce dernier. Ledit montant ne parait, en tout état, pas invraisemblable ou douteux au vu des pièces produites, soit en particulier de la fortune mobilière de l'intimé, de sorte qu'il peut être retenu. La valeur vénale du bien à la liquidation du régime matrimonial est inconnue de la Cour, aucune expertise n'ayant été ordonnée pour son estimation. Il apparaît toutefois que dans son écriture du 11 mars 2024 complétant sa demande, l'appelante a apparemment pris en compte (dès lors qu'elle n'a pas exposé son calcul) la valeur fiscale du bien en 2018, soit juste avant la liquidation du régime de la participation aux acquêts, pour définir sa participation au bénéfice. L'utilisation de ladite valeur fiscale est acceptable, dès lors que l'art. 211 CC est de nature dispositive et que la situation de l'intimé, qui a fait défaut, n'en est pas défavorablement impactée, la valeur fiscale d'un bien étant communément inférieure à sa valeur vénale.

Au vu de ce qui précède, il convenait de statuer sur le bien immobilier de I______ dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge.

L'appelante a ainsi droit à la moitié du bénéfice de l'intimé s'agissant de ce bien, soit 22'840 fr. (20'446.05 euros) ([50'892.10 euros de valeur fiscale à la liquidation du régime/ 2] – 5'000 euros de prix d'acquisition), au vu du taux de change au moment de la liquidation du régime matrimonial (1 EUR pour 1,117 CHF).

3.2.4 En ce qui concerne le bien immobilier situé à D______, Portugal, l'appelante a sollicité une part à la plus-value de ce bien, alléguant qu'elle a contribué à son amélioration en y investissant pour y réaliser des travaux.

Elle a établi par pièces l’existence dudit bien ainsi que son acquisition par l’intimé avant le mariage, dès lors que ce dernier l’occupe depuis 1979 selon l'avis de taxation 2017 de l'AFC. L'appelante a offert de prouver l'allégué relatif à son investissement par audition des parties, qui est un moyen de preuve admissible (168 al. 1 let. f CPC). Il n'existe, en outre, pas de motifs sérieux donnant à penser que cette allégation ne serait pas véridique. En effet, l'appelante a d'emblée allégué dans sa demande en divorce, soit avant de savoir que l'intimé ferait défaut, que l'immeuble à D______ était un bien propre de l'intimé dans lequel elle avait investi. Aucun élément du dossier ne vient, par ailleurs, contredire cette allégation; en particulier, l'appelante a démontré s'être constituée des acquêts durant le mariage, sa fortune mobilière s'élevant à environ 70'000 fr. en 2017 et 50'000 fr. en 2018. Il apparait ainsi qu'elle disposait des moyens financiers pour investir dans le bien immobilier de son époux.

Cela étant, l'appelante n'a pas allégué le moment de l'investissement, ni la valeur du bien à cette date, se contentant d’indiquer que l’immeuble ne se composait alors que de murs et fenêtres. Il est rappelé à cet égard que l'appelante, qui était assistée d'un conseil, a, par ailleurs, pu compléter sa demande en divorce lors d'une seconde écriture, étant rappelé que le devoir d'interpellation du juge ne sert pas à réparer des négligences procédurales.

Il en résulte qu'il ne peut être procédé au calcul du montant de la créance proportionnelle de l'appelante au sens de l'art. 206 CC. Seul le montant de son investissement sera donc accordé à cette dernière, ce qui parait, en tout état, correspondre à ses conclusions, compte tenu de l'absence de calcul et du montant global de 50'000 fr. réclamé pour les deux biens immobiliers, part à la plus-value incluse (selon la compréhension de la Cour 30'000 fr. pour le bien à D______ et 20'000 fr. pour le bien à I______).

Concernant ledit montant, l’appelante a initialement allégué dans sa demande en divorce que les parties avaient investi ensemble 30'000 fr. dans les travaux de l'immeuble de D______. Par la suite, dans son mémoire complémentaire du 11 mars 2024, déposé après avoir pris connaissance du défaut de l’intimé, elle a allégué que chaque partie avait dépensé 30'000 fr. En l’absence d'explications ou d'éléments justifiant un doublement de cet investissement entre les deux écritures, un montant de 15'000 fr., soit la moitié de 30'000 fr., sera retenu au titre de l’investissement de l’appelante.

3.2.5 L'appelante a encore allégué que l'intimé était propriétaire de trois véhicules acquis durant le mariage, dont il convenait de partager la valeur à la liquidation du régime matrimonial.

Elle a produit des photographies de deux desdits véhicules, offert de prouver cette allégation par audition des parties et requis du Tribunal qu'il ordonne à l'intimé de produire les documents relatifs à l'estimation de leur valeur actuelle, satisfaisant ainsi son devoir d'allégation. Il n'existe, en outre, pas de motifs sérieux de douter de cette allégation, qui a été formulée par l'appelante avant de connaître le défaut de l'intimé. Cette dernière a allégué une valeur actuelle de 23'000 fr. pour les trois véhicules, qui ne paraît pas invraisemblable au regard des pièces produites et des marques desdits véhicules.

Le montant de 11'500 fr. (23'000 fr./ 2) sera ainsi accordé à l'appelante à ce titre dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial des époux.

3.2.6 L'appelante sollicite la réunion aux acquêts d'un montant de 18'000 euros, que l'intimé a transféré à sa fille et réclame la moitié de ce montant, soit 10'359 fr. (compte tenu du taux de change de 1 EUR pour environ 1,151 CHF au jour du transfert).

L'appelante a prouvé l'existence du transfert de 18'000 euros (présumé acquêt) en 2017, soit dans le délai péremptoire de cinq ans précédant la dissolution du régime en 2019. Au vu du montant du transfert, il ne peut être conclu qu'il s'agissait d'un présent d'usage ou d'une contribution d'entretien versée par l'intimé en faveur de sa fille. L'appelante a, en outre, allégué qu'elle n'avait pas consenti à ce transfert, ce qui n'a pas été contesté au vu du défaut de l'intimé, à qui il aurait appartenu de prouver le consentement de cette dernière (arrêt du Tribunal fédéral 5A_667/2019 du 7 avril 2020 consid. 4.1.2).

Il sera donc retenu que le montant de 18'000 euros a été versé à la fille de l'intimé avant la séparation des parties, sans le consentement de l'appelante, laquelle peut dès lors prétendre à sa réunion aux acquêts.

Par conséquent, un montant de 9'000 euros (18'000 euros/ 2), soit 10'359 fr. compte tenu du taux de change au jour du transfert, sera retenu à ce titre en faveur de l'appelante.

3.2.7 L'appelante reproche enfin au Tribunal de ne pas avoir motivé les raisons pour lesquelles il n'a pas pris en compte le montant de 225'000 fr., ajouté d'office par l'AFC dans la taxation 2018 des parties, faisant valoir une violation de son droit d'être entendue.

En l'espèce, le premier juge a indiqué qu'il déduisait 225'000 fr. des avoirs bancaires des époux, ce montant ayant été ajouté d'office par l'AFC. Il a ainsi exposé le motif de cette déduction, sans toutefois développer le raisonnement. Cela demeure néanmoins suffisant au regard de la jurisprudence précitée s'agissant des exigences relatives au droit d'être entendu.

En tout état, cette façon de procéder n'est pas critiquable dans la mesure où la taxation d'office ne reflète pas nécessairement la réalité des actifs effectivement détenus par les parties, même si le montant ajouté correspond à des fonds détenus antérieurement, comme le plaide l'appelante. Les fonds évoluent en effet au fil du temps et la taxation d'office peut générer une représentation inexacte de la situation financière qui ne correspond pas à la réalité. Qui plus est, l'appelante ne saurait se prévaloir du manque de clarté entourant ce montant, alors même qu’elle s’est abstenue de fournir les informations requises à l’AFC, malgré son obligation de le faire.

Infondé, le grief est rejeté.

3.2.8 Au vu de ce qui précède, l'appelante a droit à un montant de 59'699 fr. (22'840 fr. + 15'000 fr. + 11'500 fr. + 10'359 fr.) au titre de liquidation du régime matrimonial en sus du montant de 81'667 fr. accordé à ce titre en première instance, soit un total de 141'366 fr.

Le grief est ainsi partiellement fondé et le chiffre 4 du dispositif du jugement querellé sera modifié dans le sens ce de qui précède.

4. Les frais de la procédure d'appel seront arrêtés à 4'000 fr. (art. 30 et 35 RTFMC) et compensés avec l’avance de frais versée par l'appelante, qui reste acquise à l’Etat (art. 111 al. 1 CPC)

Compte tenu de la nature et de l'issue du litige, l'appelante ayant partiellement obtenu gain de cause, ces frais judiciaires seront répartis à raison de trois-quarts à la charge de l'intimé et d'un quart à celle de l'appelante (art. 95, 104 al. 1, 105, 106 al. 2 et 107 al. 1 let. c CPC). L'intimé sera, en conséquence, condamné à verser à ce titre la somme de 3'000 fr. à l'appelante.

Chaque partie supportera ses propres dépens (art. 107 al. 1 let. c. CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 15 novembre 2024 par A______ contre le jugement JTPI/12453/2024 rendu le 14 octobre 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/18339/2023.

Au fond :

Annule le chiffre 4 du dispositif de ce jugement et statuant à nouveau sur ce point :

Condamne B______ à verser le montant de 141'366 fr. à A______ au titre de liquidation du régime matrimonial.

Confirme le jugement pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de l'appel à 4'000 fr., dit que ceux-ci sont compensés à due concurrence par l'avance de frais versée par A______, qui reste acquise à l'Etat de Genève et mis à raison de 3'000 fr. à la charge de B______ et de 1'000 fr. à celle de A______.

Condamne B______ à verser à A______ la somme de 3'000 fr. à titre de paiement de sa part des frais judiciaires.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.

 

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.