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Décisions | Chambre civile

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C/14368/2024

ACJC/219/2025 du 13.02.2025 sur JTPI/15852/2024 ( SDF ) , ADMIS

Normes : CPC.265
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/14368/2024 ACJC/219/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU JEUDI 13 FEVRIER 2025

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], appelant d'un jugement rendu par la 9ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 10 décembre 2024 et cité sur mesures superprovisionnelles et provisionnelles, représenté par Me Tamim MAHMOUD, avocat, rue Monnier 1, case postale 205, 1211 Genève 12,

et

Madame B______, domiciliée ______ [GE], intimée et requérante sur mesures superprovisionnelles et provisionnelles, représentée par Me Cyril AELLEN, avocat, AAA Avocats SA, rue du Rhône 118, 1204 Genève.

 


Attendu, EN FAIT, que par jugement du 10 décembre 2024, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a notamment attribué à B______ la garde exclusive de l'enfant C______, née le ______ 2019 (ch. 1 du dispositif) et octroyé à A______ un droit de visite qui s'exercera, à défaut d'accord entre les parties, à raison d'un week-end sur deux et durant la moitié des vacances scolaires (ch. 3);

Que le Tribunal a relevé qu'il était établi que A______ ne vivait plus dans le logement de la famille depuis juillet 2024 et qu'il logeait dans un chalet lui appartenant situé à D______ (France); il revenait au logement de la famille de temps à autre pour voir sa fille C______;

Que par acte expédié à la Cour de justice le 23 décembre 2024, A______ a formé appel contre ce jugement; que compte tenu de la requête d'assistance judiciaire formée par l'intéressé, l'appel n'a pas encore été transmis à B______;

Que par acte déposé à la Cour le 12 février 2025, B______ a formé une requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles tendant à ce qu'il soit ordonné à A______ d'évacuer sans délai de sa personne et de ses biens le domicile conjugal sis no. ______, rue 1______, [code postal] Genève, à ce qu'elle soit autorisée à recourir à l'aide de la force publique pour assurer l'exécution de cette injonction et, sur mesures provisionnelles uniquement, à ce que le domicile conjugal lui soit attribué;

Qu'elle a exposé que son mari s'était montré violent avec elle tant physiquement que psychologiquement durant le mariage et qu'elle avait sollicité l'assistance du centre LAVI à plusieurs reprises depuis 2018; qu'elle avait requis le prononcé de mesures protectrices de l'union conjugale, sollicitant à cette occasion l'attribution du domicile conjugal; que A______ avait indiqué dans le cadre de cette procédure ne plus y vivre, de sorte que le Tribunal en avait inféré qu'il renonçait à l'attribution dudit domicile en sa faveur et n'avait pas mentionné ce point dans son jugement; que depuis la mi-janvier 2025, A______ était revenu au domicile conjugal et lui avait indiqué qu'il était chez lui et que c'était à elle de partir, le cas échéant; qu'il s'en était pris verbalement à elle et qu'il l'avait menacée de s'en prendre physiquement à elle; qu'à la suite d'une séance de médiation, il avait accepté de retourner dans son chalet pour le week-end des 8 et 9 février ainsi que le début de la semaine suivante; qu'il avait néanmoins indiqué qu'il reviendrait à la fin de la semaine dans le logement conjugal; qu'un tel retour serait préjudiciable à sa propre santé et à la stabilité de leur fille de cinq ans; qu'une attestation du centre LAVI du 7 février 2025 produite avec la requête fait état de ce que B______ avait été reçue le jour même dans un état de détresse et de peur notable, s'approchant d'un état de stress aigu;

Considérant, EN DROIT, que le tribunal peut ordonner les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte ou risque de l'être et que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (art. 261 al. 1 CPC); qu’en cas d’urgence particulière, notamment s’il y a risque d’entrave à leur exécution, le tribunal peut ordonner des mesures provisionnelles immédiatement, sans entendre la partie adverse (art. 265 al. 1 CPC);

Que le requérant doit notamment rendre vraisemblable qu'il s'expose, en raison de la durée nécessaire pour rendre une décision définitive, à un préjudice qui ne pourrait pas être entièrement supprimé même si le jugement à intervenir devait lui donner gain de cause; qu'en d'autres termes, il s'agit d'éviter d'être mis devant un fait accompli dont le jugement ne pourrait pas complètement supprimer les effets; qu'est difficilement réparable le préjudice qui sera plus tard impossible ou difficile à mesurer ou à compenser entièrement (arrêt du Tribunal fédéral 4A_611/2011 du 3 janvier 2012 consid. 4.1);

Que le juge doit procéder à la pesée des intérêts en présence, c'est-à-dire à l'appréciation des désavantages respectifs pour chacune des parties selon que la mesure requise est ou non ordonnée (Hohl, Procédure civile I, n° 1780);

Qu'en l'espèce, le Tribunal n'a pas statué sur la question de l'attribution du domicile conjugal; que le cité séjournait durant la procédure de première instance de mesures protectrices de l'union conjugale dans un chalet situé en France voisine; qu'il n'est dès lors pas sans solution de logement; que la garde de l'enfant des parties, âgée de cinq ans, a été confiée à la requérante, qui doit donc pouvoir bénéficier du domicile conjugal; que celle-ci est en droit d'y séjourner sans craindre pour sa santé physique ou psychologique; qu'il est également dans l'intérêt de l'enfant ne pas être confrontée au conflit parental et de pouvoir rester au domicile conjugal avec sa mère qui en a la garde;

Qu'au vu de ce qui précède, il apparaît, sur la base des allégations de la requérante, que si le cité séjournait au domicile conjugal, elle serait vraisemblablement susceptible de subir un dommage plus important que le cité s'il devait vivre ailleurs durant la procédure d'appel, puisqu'il dispose d'un logement dans lequel il a déjà longuement séjourné; que l'admission de la requête n'aurait par ailleurs pas d'effet irréversible; que la situation présente une certaine urgence puisqu'à teneur des explications, plausibles, de la requérante, le cité aurait indiqué qu'il reviendrait vivre au domicile conjugal d'ici la fin de la semaine courante;

Que la requérante n'a pas conclu, sur mesures superprovisionnelles, à l'attribution du domicile conjugal, mais uniquement à ce que l'évacuation du cité soit ordonnée; qu'il apparaît cependant que ce dernier ne séjourne pas actuellement, selon la requérante, dans le domicile conjugal puisqu'après s'y être trouvé au début de l'année, il est retourné, vraisemblablement de manière provisoire, dans son chalet de D______; que son évacuation ne peut dès lors, en l'état, pas être ordonnée et l'exécution de ladite évacuation ne pourrait être exécutée; que cela étant, en présence d'un enfant mineur, la Cour n'est pas liée par les conclusions des parties; qu'il est par ailleurs nécessaire, dans l'intérêt de l'enfant, de statuer sur la question de l'attribution du domicile conjugal qui n'a pas été réglée par le Tribunal alors que les parties avaient chacune conclu à son attribution devant le premier juge et que cette question est susceptible de susciter un conflit entre elles; qu'il s'impose dès lors de régler cette question pour la durée de la procédure d'appel;

Qu'au vu de ce qui précède, sur mesures superprovisionnelles, il sera fait droit à la requête en ce sens que le domicile conjugal sera attribué à la requérante;

Que cela étant, dans l'hypothèse où le cité aurait réintégré le domicile conjugal depuis le dépôt de la requête, l'évacuation du cité sera néanmoins prononcée en tant que de besoin et la requérante sera autorisée à faire exécuter cette mesure avec l'aide de la force publique;

Qu'un un délai de dix jours dès notification de la présente ordonnance sera imparti au cité pour répondre par écrit à la requête;

Que le sort des frais sera renvoyé à la décision sur mesures provisionnelles (art. 104 al. 3 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Statuant sur mesures superprovisionnelles :

Attribue à B______ la jouissance exclusive du domicile conjugal sis rue 1______ no. ______, [code postal] Genève.

Ordonne, en tant que de besoin, l'évacuation de A______ dudit domicile conjugal et autorise B______ à recourir à la force publique pour faire exécuter cette mesure.

Impartit à A______ un délai de dix jours dès notification de la présente ordonnance pour répondre par écrit à la requête de mesures provisionnelles.

Dit qu'il sera statué sur les frais de la présente décision avec la décision sur mesures provisionnelles.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Paola CAMPOMAGNANI et Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

S'agissant de mesures superprovisionnelles, il n'y a pas de voie de recours au Tribunal fédéral (ATF 137 III 417 consid. 1.3).