Décisions | Chambre civile
ACJC/65/2025 du 16.01.2025 sur JTPI/15215/2024 ( SDF )
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/3886/2024 ACJC/65/2025 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU JEUDI 16 JANVIER 2025 |
Entre
Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par la 18ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 29 novembre 2024, représenté par Me Stéphanie FRANCISOZ GUIMARAES, avocate, BRS Berger Recordon & de Saugy, boulevard des Philosophes 9, 1205 Genève,
et
Madame B______, domiciliée ______, intimée, représentée par Me Sandrine LUBINI, avocate, LUBINI AVOCATS, rue de la Cité 3, 1204 Genève.
Attendu, EN FAIT, que par jugement du 29 novembre 2024, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a notamment condamné A______ à verser à B______, à titre de contribution d'entretien en sa faveur, 1'950 fr. dès le 1er avril 2024 (ch. 2 du dispositif) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 8);
Que par acte déposé à la Cour de justice le 19 décembre 2024, A______ a formé appel contre ce jugement; qu'il a conclu à l'annulation des ch. 2 et 8 précités et cela fait, à ce qu'il soit dit que les époux ne devaient aucune contribution d'entretien, subsidiairement à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement à verser une contribution de 200 fr. par mois à l'entretien de B______;
Que préalablement, il a conclu à la suspension du caractère exécutoire du ch. 2 du dispositif du jugement attaqué; qu'il a soutenu à cet égard qu'il avait été condamné à tort au versement d'une contribution d'entretien; que le montant de l'arriéré représentait 17'550 fr.; qu'il ne disposait d'aucune fortune lui permettant de s'acquitter de ce montant; que B______ couvrait par ailleurs ses charges alors qu'il ne disposait lui-même d'aucun solde, ce qui l'empêchait de s'acquitter du montant fixé par le Tribunal;
Qu'invitée à se déterminer, B______ a conclu au rejet de la requête d'effet suspensif; que le paiement de la contribution d'entretien n'entamait pas le minimum vital de son époux, lequel n'avait effectué aucun versement depuis la séparation des parties;
Considérant, EN DROIT, que l'appel n'a pas d'effet suspensif lorsqu'il a pour objet des décisions portant sur des mesures provisionnelles (art. 315 al. 4 let. b CPC);
Que selon l'art. 315 al. 5 CPC, l'exécution des mesures provisionnelles peut toutefois être exceptionnellement suspendue si la partie concernée risque de subir un préjudice difficilement réparable; que le préjudice difficilement réparable peut être de nature factuelle; il concerne tout préjudice, patrimonial ou immatériel, et peut même résulter du seul écoulement du temps pendant le procès; que le dommage est constitué, pour celui qui requiert les mesures provisionnelles, par le fait que, sans celles-ci, il serait lésé dans sa position juridique de fond et, pour celui qui recourt contre le prononcé de telles mesures, par les conséquences matérielles qu'elles engendrent (ATF 138 III 378 consid. 6.3 et les références);
Que s'agissant du paiement de sommes d'argent, il appartient à la partie recourante qui requiert la restitution de l'effet suspensif de démontrer qu'à défaut de son prononcé elle serait exposée à d'importantes difficultés financières ou qu'elle ne pourrait pas obtenir le remboursement du montant payé au cas où elle obtiendrait gain de cause au fond (ATF 138 III 333 consid. 1.3.1; 137 III 637 consid. 1.2);
Que, toutefois, le Tribunal fédéral accorde généralement l'effet suspensif pour le paiement des arriérés de pensions (arrêts du Tribunal fédéral 5A_954/2012 du 30 janvier 2013 consid. 4; 5A_783/2010 du 8 avril 2011 let. D);
Que, saisie d'une demande d'effet suspensif, l'autorité de recours doit faire preuve de retenue et ne modifier la décision de première instance que dans des cas exceptionnels; qu'elle dispose cependant d'un large pouvoir d'appréciation permettant de tenir compte des circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF 138 III 565 consid. 4.3.1, 137 III 475 consid. 4.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_201/2023 du 28 avril 2023 consid. 3.3; 5A_853/2021 du 8 novembre 2021 consid. 5.1; 5A_792/2018 du 6 février 2019 consid. 3.2.2);
Qu'en l'espèce, l'appelant conteste sa situation financière telle que retenue par le Tribunal; qu'il soutient, pour l'essentiel, que le Tribunal aurait dû apprécier celle-ci d'une manière différente de celle retenue; que cela étant, il ne peut être retenu à ce stade, prima facie, que le jugement du Tribunal est d'emblée manifestement erroné, à tel point que le montant de la contribution d'entretien entamerait son minimum vital; que l'appelant indique que l'intimée est endettée, de sorte que le remboursement des montants qu'il aurait indument versé serait impossible; qu'il allègue toutefois être lui-même également endetté à hauteur de 39'218 fr., de sorte qu'en cas de rejet de l'appel, l'intimée serait, elle aussi, susceptible de ne pas pouvoir obtenir le versement des contributions d'entretien qui auraient dû être versées durant la procédure et ainsi de subir, le cas échéant, un préjudice similaire à celui de l'appelant;
Qu'en définitive, prima facie, il ne paraît pas d'emblée manifeste que la situation telle qu'elle a été retenue par le Tribunal serait erronée et que le paiement de la contribution à l'entretien de l'intimée entamerait le minimum vital de l'appelant; que sa requête tendant à suspendre le ch. 2 du dispositif du jugement attaqué concernant la contribution d'entretien courante sera rejetée;
Que pour le surplus, le montant de l'arriéré de contributions n'est pas négligeable; que l'intimée n'a pas allégué ou rendu vraisemblable que le paiement de l'arriéré à l'issue de la procédure d'appel uniquement, dans l'hypothèse où l'appel serait rejeté, lui causerait un préjudice difficilement réparable; que les arriérés de contributions ne sont pas destinés à couvrir les besoins courants de l'intimée et que cette dernière peut dès lors vraisemblablement attendre de connaître l’issue de la procédure d’appel pour réclamer, le cas échéant, leur paiement;
Que dès lors, il sera fait droit à la conclusion de l’appelant sur effet suspensif pour la période du 1er avril 2024 au 30 novembre 2024 uniquement;
Qu'il sera statué sur les frais et dépens liés à la présente décision avec l'arrêt au fond (art. 104 al. 3 CPC).
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La Chambre civile :
Statuant sur requête de suspension du caractère exécutoire du jugement entrepris:
Admet la requête formée par A______ tendant à suspendre le caractère exécutoire du ch. 2 du dispositif du jugement JTPI/15215/2024 rendu le 29 novembre 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/3886/2024 pour la période du 1er avril 2024 au 30 novembre 2024.
La rejette pour le surplus.
Dit qu'il sera statué sur les frais liés à la présente décision dans l'arrêt au fond.
Siégeant :
Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.
Le président : Laurent RIEBEN |
| La greffière : Jessica ATHMOUNI |
Indication des voies de recours :
La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (ATF 137 III 475 consid. 1 et 2), est susceptible d'un recours en matière civile (art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005; LTF - RS 173.110), les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 93/98 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.