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Décisions | Chambre civile

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C/21085/2022

ACJC/1370/2024 du 05.11.2024 sur OTPI/67/2024 ( SDF ) , MODIFIE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/21085/2022 ACJC/1370/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 5 NOVEMBRE 2024

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'une ordonnance rendue par la 4ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 19 janvier 2024, représentée par Me Ninon PULVER, avocate, NP & VS Avocates, rue des Alpes 15, case postale, 1211 Genève 1,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, comparant en personne.

 

 


EN FAIT

A.              Par ordonnance OTPI/67/2024 du 19 janvier 2024, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures provisionnelles dans le cadre d'une action en divorce opposant les époux A______ et B______, a levé la mesure visant à ce que les relations personnelles entre C______ et son père soient exercées au Point Rencontre (chiffre 1 du dispositif), fixé le droit de visite entre C______ et son père à une semaine sur deux le vendredi de 16h00 à 20h00 et l’autre semaine, le dimanche de 12h00 à 18h00 (ch. 2), maintenu la curatelle d’organisation et de surveillance des relations personnelles, ainsi que la curatelle d’assistance éducative (ch. 3), dit que ce droit de visite serait progressivement élargi pour aboutir à un week-end sur deux du vendredi soir au dimanche soir, une nuit dans la semaine ainsi que durant la moitié des vacances scolaires, charge pour le curateur d’évaluer cet élargissement en fonction de l’évolution de la situation (ch. 4), transmis le jugement au Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après : le Tribunal de protection) pour la mise en place de ces mesures (ch. 5), exhorté les parties à continuer leur travail de médiation auprès de D______ (ch. 6), réservé la décision finale du Tribunal quant au sort des frais judiciaires (ch. 7), dit qu’il n'était pas alloué de dépens (ch. 8) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 9).

B.              a.a Par acte expédié au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour) le 15 janvier 2024, A______ a formé appel contre ladite ordonnance, sollicitant l'annulation des chiffres 1, 2 et 4 de son dispositif.

Elle a conclu, sous suite de frais judiciaires et dépens d'instance (lesquels devaient comprendre une participation aux honoraires de son conseil, à raison de 4'000 fr.), à ce que la Cour fixe un droit de visite entre C______ et son père à raison d’une semaine sur deux, le vendredi de 16h00 à 18h00, et l’autre semaine de 12h00 à 15h00 (sans précision quant au jour de la visite), en présence d’un éducateur, dise que l’intervenant devait être un représentant du Service de protection des mineurs (ci-après : SPMi) ou de E______, maintienne le droit de visite actuel tant que les susdites modalités n’auraient pas été mises en place, nomme un curateur de représentation en faveur de C______ et dise que le droit de visite entre C______ et son père serait progressivement élargi, à raison d’une semaine sur deux, le vendredi de 16h00 à 20h00, et l’autre semaine, de 12h00 à 18h00, en présence d’un éducateur, selon les recommandations du SPMi et du curateur de représentation.

Subsidiairement, elle a conclu à ce que la Cour fixe un droit de visite entre C______ et son père à raison d'une semaine sur deux, le vendredi de 16h à 20h, et l'autre semaine, de 12h à 18h, en présence d'un éducateur, reprenant pour le reste ses autres conclusions principales.

Elle a produit une pièce nouvelle, soit le compte-rendu des visites du Point Rencontre du 15 janvier 2024.

a.b Préalablement, elle a requis l'octroi de l'effet suspensif à son appel, ce à quoi s'est opposé B______.

Par arrêt du 26 février 2024, la Cour de justice a admis la suspension du caractère exécutoire des chiffres 1, 2 et 4 du dispositif de l’ordonnance entreprise.

c. Dans sa réponse du 23 février 2024, B______ a conclu à la confirmation de l’ordonnance et s’est opposé à la nomination d’un curateur de représentation à la mineure.

d. A______ a expédié à la Cour une réplique spontanée le 11 mars 2024, persistant dans les conclusions de son appel.

e. B______ a dupliqué le 22 mars 2024, persistant également dans ses conclusions.

Il a produit une pièce nouvelle, soit le compte-rendu des visites du Point Rencontre du 11 mars 2024.

f. Par plis séparés du 12 avril 2024, les parties ont été avisées de ce que la cause était gardée à juger.

C.              Les éléments suivants résultent de la procédure :

a. A______, née le ______ 1984, de nationalité ukrainienne, et B______, né le ______ 1961, de nationalité espagnole, se sont mariés le ______ 2013 à F______ (GE).

Ils sont les parents de C______, née le ______ 2015 à Genève.

b. Les époux se sont séparés en septembre 2018.

C______ vit depuis lors avec sa mère.

c. Aux termes du jugement de mesures protectrices de l’union conjugale JTPI/12942/2019 rendu le 18 septembre 2019 par le Tribunal, la garde de la mineure C______ a été attribuée à A______, tandis qu’un droit de visite sur l’enfant a été réservé à B______, celui-ci devant s’exercer, à défaut d'accord contraire des parents, à raison d'un week-end sur deux du vendredi soir au dimanche soir, une nuit dans la semaine ainsi que durant la moitié des vacances scolaires. Le Tribunal a également exhorté le couple à poursuivre la thérapie familiale entreprise auprès de G______ [Centre de consultations familiales].

Ce jugement reposait notamment sur un rapport du Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale (ci-après : SEASP) du 5 juin 2019, à teneur duquel l'enfant allait bien, était en bonne santé et son développement était bon.

La réglementation des droits parentaux et des relations personnelles n'a pas été remise en cause en appel; seules les contributions d'entretien ont fait l'objet d'un appel et été réexaminées par la Cour dans son arrêt ACJC/331/2020 du 24 février 2020.

d. La contribution versée par B______ à l’entretien de la mineure a varié dans le temps.

Par jugement JTPI/7988/2020 du 23 juin 2020, le Tribunal, statuant sur nouvelles mesures protectrices de l'union conjugale, et d'accord entre les parties, a fixé ladite contribution d'entretien à 2'145 fr. par mois dès le 1er juillet 2020, allocations familiales non comprises. Il n'a en revanche pas modifié ce qui était prévu par mesures protectrices de l'union conjugale s'agissant des droits parentaux.

e. Le 8 avril 2022, B______ a saisi le Tribunal de protection d’une requête sollicitant que le droit de visite sur sa fille soit respecté.

À l'appui de sa requête, il a notamment fait valoir que A______ était partie en Ukraine avec leur fille et son compagnon le 12 février 2022 et ne répondait plus à ses appels. Il n’avait pas parlé à sa fille C______ depuis le 26 mars 2022 et craignait, qu’à son retour, la mère ne s’installe avec l’enfant chez son compagnon en France et qu’il n’ait plus accès à sa fille.

f. Le Tribunal de protection a alors ordonné l’établissement d’un rapport d’évaluation sociale.

Dans son rapport du 18 novembre 2022, le SEASP a indiqué qu'il était conforme à l'intérêt de la mineure de réserver à son père les relations personnelles suivantes : une nuit par semaine, du mercredi à 15h00 au jeudi à 8h00, un week-end sur deux, du vendredi à 16h00 au dimanche 20h00, ainsi que la moitié des vacances scolaires.

À teneur de ce rapport, les parents s'accordaient à dire que dès le retour de C______ et de sa mère d'Ukraine, le droit de visite avait repris comme précédemment. Le père allait chercher sa fille mercredi à 16h30 à son cours de dessin et la raccompagnait à l'école le jeudi à 8h. C______ était également avec son père un week-end sur deux du vendredi 16h au dimanche 20h.

A______ avait exposé au SEASP que C______ était suivie par un logopédiste car elle connaissait des difficultés de prononciation et mélangeait l'ordre des mots. L'enfant souffrait également de problèmes de concentration. Si le père estimait que sa fille n'avait pas de problème qui méritait un suivi psychologique, il a toutefois admis qu'elle avait "un peu de retard" ainsi que "des problèmes de concentration".

Le SEASP avait échangé avec l'enseignante de l'enfant, qui avait indiqué que son élève était peu autonome, ne parlait pas aux autres enfants de la classe, ne participait pas et ne posait aucune question. C______ avait des lacunes importantes dans tous les domaines, notamment en lecture et mathématiques ("numérotation"). L'enseignante se faisait énormément de soucis pour son élève, qui paraissait peu présente en classe, avait souvent le regard dans le vide et ne savait jamais ce qu'on attendait d'elle.

Le SEASP avait également pris contact avec le médecin interne à l'Office médico-pédagogique (ci-après : OMP), qui s'était chargé d'effectuer un bilan psychologique sur C______, à la demande de la mère, sur avis de l'école et de la logopédiste. Selon le médecin de l'OMP, l'enfant était "dans l'évitement et la répression de tous les aspects affectifs". Celle-ci semblait, de plus, dans un état de vigilance permanente, probablement dû à des séquelles de traumatismes, que ce soit par l'exposition à la violence conjugale ou aux violences vécues en Ukraine. C______ était envahie par ces difficultés qui avaient un impact sur son développement, notamment au niveau du langage. Concernant sa relation avec ses parents, l'enfant se trouvait dans un conflit de loyauté important. Selon le médecin, un suivi psychologique apparaissait dès lors indispensable, de même qu'un travail de coparentalité.

Malgré les difficultés objectivées par les professionnels, le SEASP a considéré que la mère avait mis en place le suivi nécessaire, de sorte qu'aucune mesure de protection n'apparaissait nécessaire.

g. Le droit de visite du père sur l'enfant proposé par le SEASP (soit une nuit par semaine, du mercredi à 15h00 au jeudi à 8h00, un week-end sur deux, du vendredi à 16h00 au dimanche 20h00, ainsi que la moitié des vacances scolaires) a été autorisé par décision du Tribunal de protection du 1er décembre 2022.

h. Le 20 décembre 2022, l'OMP a rendu un bilan psychologique concernant C______.

À teneur de ce bilan, C______ était exposée depuis sa petite enfance à une situation familiale très instable et à un conflit parental très présent. L'enfant présentait des symptômes anxieux et traumatiques avec un impact important au niveau psychoaffectif. L'insécurité affective subie par l'enfant entraînait d'importants retards du développement (difficultés psychomotrices, retard du langage oral et écrit suivi par un logopédiste, diminution de la concentration, repli, énurésie nocturne, besoin de la présence d'un adulte de référence pour s'endormir notamment). L'OMP a encore souligné que le maintien d'un contexte conflictuel qui prenait des allures de violence entre les deux parents représentait un risque majeur pour le développement de l'enfant, qui était déjà fortement affecté "dans son monde psychoaffectif".

L'OMP a dès lors préconisé un travail de coparentalité et une psychothérapie individuelle au bénéfice de l'enfant, en raison de troubles émotionnels de l'enfance avec des composantes dysharmoniques et traumatiques.

i. Dans un rapport complémentaire du 23 décembre 2022 adressé au Tribunal de protection, le SEASP a fait état d'une brutale dégradation des relations parentales, suite à un incident survenu le 20 novembre 2022. Ce jour-là, C______ était chez son père avec lequel elle devait se rendre, en fin de matinée, à un évènement pour les réfugiés d'Ukraine, organisé notamment par la mère. Ne les voyant pas arriver, en début d'après-midi, A______ s'était alors rendue au domicile de son époux. En voyant l'état dans lequel se trouvait le logement ("saleté"), et constatant que sa fille portait une culotte mouillée, elle avait voulu prendre des photographies, ce qui avait provoqué une dispute entre les parents. Selon A______, son époux l'aurait alors bousculée, ce qui aurait traumatisé l'enfant, qui ne souhaitait plus dormir chez son père. La mère disait encourager sa fille depuis deux ans à voir son père mais, constatant le mal-être de celle-ci, elle préférait désormais l'écouter et n'était plus d'accord de forcer l'enfant à se rendre chez son père. Son épouse ne lui permettant pas d'exercer son droit de visite, B______ avait alors fait appel à la police le 23 novembre.

Le 2 décembre 2022, une nouvelle dispute avait éclaté entre les parents à l'école. Après une longue négociation, et avec l'aide du SEASP, B______ avait finalement renoncé à ce que C______ passe la nuit chez lui.

Le 14 décembre 2022, un travail de coparentalité avait débuté auprès de H______. Lors de la première séance, les tensions parentales étaient très importantes.

Compte tenu de ce qui précède, le SEASP a recommandé d'instaurer une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles et d'ordonner un bilan psychologique ainsi qu'un suivi si nécessaire.

j. Les parties ont été invitées à se déterminer à ce sujet par le Tribunal de protection.

Par déterminations du 27 février 2023, A______ a relevé plusieurs problèmes concernant l'exercice du droit de visite par le père (C______ voulait uniquement regarder la télévision, elle ne participait pas à ses activités, ne se douchait pas, ne portait pas de sous-vêtements, revenait exténuée de chez son père; A______ se déplaçait souvent au domicile de son époux pour doucher, cuisiner et habiller l'enfant; B______ incitait l'enfant à mentir en lui disant de se cacher lorsque la mère arrivait au domicile pour que celle-ci ne voie pas que l'enfant était devant la télévision; C______ était très frustrée et épuisée, elle continuait de dormir avec son père, quand bien même elle disposait de sa propre chambre, afin de pouvoir continuer à regarder la télévision jusqu'à épuisement, elle n'avait pas le droit de téléphoner à sa mère; B______ ne parvenait pas à se faire respecter et imposer des règles à sa fille). Si certains de ces problèmes présentaient peu de gravité, A______ était néanmoins inquiète par la possibilité que C______ passe plusieurs jours de suite chez son père car cela impliquait qu'elle ne se laverait pas, reviendrait à la maison totalement exténuée et ne respecterait plus les règles. L'enfant s'était déjà présentée à l'école sans culotte.

A______ estimait par conséquent qu'une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles n'était pas utile, de même qu'un bilan psychologique pour C______ puisqu'elle en avait déjà effectué un. Il était en revanche dans l'intérêt de l'enfant que son père puisse bénéficier d'une action éducative en milieu ouvert (AEMO) ou subsidiairement qu'une curatelle d'assistance éducative soit instaurée et que le droit de visite soit modifié, en ce sens que jusqu'à ce que la situation soit "apaisée" et que le père parvienne à s'occuper de sa fille, les nuitées chez le père seraient supprimées "ou alors qu'il ramène C______ à sa mère plus tôt dans la soirée, afin que cette dernière ait le temps de faire manger la mineure, la prépare pour le lit et que cette dernière se lave".

Par déterminations du même jour, B______ s'est déclaré d'accord avec les mesures proposées par le SEASP. Il a notamment précisé que depuis l'évènement du 20 novembre 2022, la situation s'était apaisée et que C______ avait dormi à plusieurs reprises chez lui (bien que moins souvent que prévu). Il disposait à présent d'un logement plus grand, où C______ avait sa propre chambre. Père et fille étaient par ailleurs partis en vacances en Espagne en fin d'année. Selon lui, il était également dans l'intérêt de leur fille de rappeler à la mère ses devoirs parentaux, notamment celui de ne pas perturber les relations de l'enfant avec son père.

k. En parallèle à la procédure pendante devant le Tribunal de protection, A______ a saisi le Tribunal, le 26 octobre 2022, d'une demande en divorce unilatérale non motivée, concluant notamment à ce que le Tribunal lui attribue la garde sur C______ et octroie un droit de visite à B______ d'un week-end sur deux du vendredi soir au dimanche soir, une nuit dans la semaine, ainsi que durant la moitié des vacances scolaires.

l. Par décision du 15 mars 2023, le Tribunal de protection, s’estimant compétent pour poursuivre la mesure de protection en faveur de la mineure compte tenu de sa saisine préalable au divorce, a instauré une curatelle de surveillance et d'organisation des relations personnelles en faveur de C______ et ordonné un suivi psychologique de cette dernière.

m. Le 18 avril 2023, le SEASP a rendu un nouveau rapport à l'attention du Tribunal de protection, l'informant de nouveaux éléments préoccupants et délétères au bon développement de l'enfant.

Le travail de coparentalité était interrompu en raison des tensions entre les parents. Le dernier entretien, qui avait eu lieu au début du mois de mars, s'était très mal déroulé en raison de l'agressivité des parties qui rendait la poursuite des séances impossible. En l'état, trois éducateurs intervenaient à domicile, dont l'activité n'était toutefois pas "cohérente" faute de désignation du curateur d'organisation et de surveillance des relations personnelles et en l'absence de curatelle d'assistance éducative. L'organisation des droits de visite se révélait, de plus, compliquée. Selon la mère, l'enfant ne souhaitait plus se rendre chez son père, lequel faisait régulièrement appel à la police pour faire respecter son droit de visite.

Il résultait par ailleurs des propos tenus par A______ et de la visite effectuée au domicile de B______ que ce dernier présentait d'importantes lacunes éducatives et avait de la difficulté à se remettre en question, à se mettre à la place de l'autre et à avoir conscience de l'impact de ses propos.

En outre, celui-ci ne mesurait pas l'importance de poser un cadre et des limites à son enfant. En conséquence, quand elle se trouvait chez son père, C______ ne faisait pas ses devoirs, avait peu d'activités, passait beaucoup de temps devant la télévision et dormait avec son père. L'enfant souffrait toujours de problèmes d'énurésie et ne bénéficiait pas d'un suivi psychologique.

Il apparaissait dès lors urgent qu'en sus de la curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles, une curatelle d'assistance éducative soit instaurée sans délai. En outre, au vu des difficultés énoncées et du dysfonctionnement dans les relations familiales qui s'aggravaient, le SEASP s'interrogeait sur l'opportunité d'une expertise du groupe familial.

n. Par décision sur mesures superprovisionnelles du 21 avril 2023, le Tribunal de protection a ordonné l'instauration d'une curatelle d'assistance éducative.

o. Par déterminations adressées le 5 mai 2023 au Tribunal de protection, B______ a conclu à la levée de la curatelle d'assistance éducative, estimant avoir pris les mesures nécessaires.

Le même jour, A______ s'est déterminée sur le rapport du SEASP du 18 avril 2023 et, au vu des éléments extrêmement inquiétants exprimés dans ce rapport, elle a requis le prononcé de mesures superprovisionnelles et provisionnelles, concluant à ce qu'un droit de visite plus limité soit octroyé au père, celui-ci devant s'exercer les mercredis après-midi de 16h30 à 19h et, un week-end sur deux, les vendredis soirs de 16h à 19h, les samedis de 10h à 19h et les dimanches de 10h à 18h. Elle a par ailleurs informé le Tribunal de protection que C______ bénéficiait désormais d'un suivi thérapeutique.

Par ordonnance du 15 mai 2023, le Tribunal de protection, statuant sur mesures superprovisionnelles, a rejeté la requête formée par A______ en limitation du droit de visite du père, estimant que la situation n'était pas "suffisamment critique" pour justifier de ne pas respecter le droit d'être entendu du père ni même proportionné, de réduire le droit de visite, ainsi que d'en supprimer les nuits pour pallier les vraisemblables difficultés éducatives du père, dès lors qu'à ce stade de la procédure, la curatelle d'assistance éducative instaurée par le Tribunal sur mesures superprovisionnelles apparaissait suffisante pour y remédier. De plus, le père disait avoir lui-même mis en place une action préventive en milieu familial (APMF).

Le Tribunal de protection a pour le surplus communiqué, pour raison de compétence, copie de la procédure pendante devant lui au Tribunal, saisi de la procédure de divorce.

p. Le 1er juin 2023, A______ a déposé une demande en divorce motivée assortie de conclusions sur mesures provisionnelles.

Sur mesures provisionnelles, elle a notamment conclu à ce que la garde de l'enfant lui soit confiée, à ce qu'un droit de visite, devant s'exercer, sauf accord contraire, les mercredis après-midi de 16h30 à 19h ainsi qu'un week-end sur deux, les vendredis soir de 16h à 19h, les samedis de 10h à 19h et les dimanche de 10h à 18h, soit accordé au père, et à ce que les curatelles d'organisation et de surveillance des relations personnelles et d'assistance éducative, mises en place par le Tribunal de protection, soient maintenues.

q. Par réponse du 5 juillet 2023, B______ a notamment conclu, sur mesures provisionnelles, à ce que les relations personnelles sur sa fille C______ soient maintenues telles qu'elles avaient été fixées dans le cadre des mesures protectrices, soit à raison d'un week-end sur deux du vendredi à la sortie de l'école au dimanche soir, ainsi que le mercredi à la sortie du cours de gymnastique au jeudi matin. Il a conclu également à ce que la mesure de curatelle d'assistance éducative prononcée par le Tribunal de protection le 21 avril 2023 soit révoquée, à ce qu'il soit fait interdiction à A______ de se rendre à la sortie de l'école et à la sortie des activités de C______ lors de son droit de visite et à ce qu'il soit fait interdiction à A______ d'organiser des activités sur ses droits de visite, sous menace de la peine de l'article 292 CP.

r. Le 3 juillet 2023, le SPMi a transmis un rapport au Tribunal de protection, dans le cadre duquel il a requis la modification des relations personnelles entre C______ et son père, qui était préavisée, à raison d'une visite hebdomadaire en modalité "1 pour 1" au Point Rencontre et a préconisé que les parents soient exhortés à reprendre le suivi de coparentalité.

Dans son rapport, le SPMi a établi un récapitulatif des derniers contacts avec les deux parents, lesquels mettaient en évidence la gravité du conflit parental. Le service avait également rencontré C______ en entretien, laquelle avait confié que son père était méchant car "il veut tuer maman" et qu'elle accepterait de voir son père uniquement en présence d'un adulte, afin que cette personne puisse la protéger (selon ses propres mots : "cette personne est là pour me protéger").

Il était également question d'un enregistrement audio, où l'on entendait B______ menacer et insulter A______ à plusieurs reprises ("tu es une merde", "tu n'as pas peur de mourir?", "tu penses que je vais rester comme ça", "si j'étais violent, tu serais morte sale pute", "je te dis juste si tu apprécies ta vie, laisse C______ tranquille"), et où les parents font régulièrement référence à l'épisode du début de guerre en Ukraine (la mère reprochant au père de n'avoir rien fait lorsqu'elle et sa fille étaient coincées en Ukraine alors que la guerre avait éclaté, tandis que le père exprimait son impuissance face à cette situation), épisode qui semblait être, selon le SPMi, une grande blessure pour chacun des parents ainsi que l'élément déclencheur ou aggravant du conflit parental. À l'écoute de l'enregistrement, le SPMi avait compris que l'échange avait eu lieu en présence de tiers (adultes et enfants) et en particulier de C______.

Selon le SPMi, l'essentiel à ce stade était que le lien père-fille puisse être maintenu, raison pour laquelle le service recommandait des visites en modalité "1 pour 1" au Point Rencontre pour permettre à C______ de se sentir à nouveau en confiance avec son père.

s. Le Tribunal de protection a autorisé cette modification sur mesures superprovisionnelles du 11 juillet 2023, avant de transmettre la procédure au Tribunal pour raison de compétence.

t. Le 28 juillet 2023, le SPMi a informé le Tribunal de protection que le Point Rencontre ne disposait actuellement d'aucune place en modalité "1 pour 1" de façon hebdomadaire. Les visites allaient donc débuter "à quinzaine" dans l'attente qu'une place hebdomadaire se libère. La première visite aurait lieu le dimanche 30 juillet 2023.

u. Dans ses déterminations du 31 août 2023 relatives aux mesures précitées, A______ a fait siennes les conclusions du SPMi et indiqué que, globalement, la mineure se sentait mieux depuis le prononcé des mesures superprovisionnelles.

Quant au travail de coparentalité, elle n'en voyait pas l'utilité à ce stade et estimait que B______ devait entreprendre un suivi psychothérapeutique au préalable.

v. Dans ses déterminations du même jour, B______ s'est opposé aux mesures prises par le Tribunal de protection, sollicitant le maintien des relations personnelles telles que fixées dans le cadre des mesures protectrices de l'union conjugale. Il a également conclu à ce qu'il soit fait interdiction à A______ de se rendre à la sortie de l'école et à la sortie des activités de C______ lorsqu'il exerce son droit de visite et qu'il soit fait interdiction à A______ d'organiser des activités sur le temps de ses droits de visite, sous menace des peines de l'art. 292 CP.

Il a notamment fait valoir que les moments de tension entre les parties avaient toujours lieu lorsque celles-ci se trouvaient au même endroit au même moment et que ce n'était pas en restreignant les contacts entre C______ et son père que le conflit parental allait s'apaiser et qu'a fortiori l'enfant irait mieux, "bien au contraire d'ailleurs", puisque la mesure mise en place "rev[enait], en réalité, à faire de [lui] un étranger pour sa fille".

w. Les époux ont déposé des écritures de réplique le 29 septembre 2023 et de duplique le 27 octobre 2023, dans le cadre desquelles elles ont repris pour l'essentiel leurs conclusions sur mesures provisionnelles.

x. Lors de l'audience du 1er novembre 2023, les parties ont exposé au Tribunal qu'elles allaient prendre contact avec les organismes D______ ou I______ dans le but d'entreprendre un suivi et essayer d'obtenir un "accompagnant J______" (Fondation J______) qui assisterait B______ dans le cadre d'un droit de visite plus élargi que celui qui était en vigueur.

y. Lors de l'audience suivante du 15 novembre 2023, les parties ont annoncé qu'elles allaient entreprendre une médiation auprès de D______, le premier rendez-vous étant fixé au 8 décembre 2023.

Elles se sont par ailleurs entendues pour que le droit de visite continue à être exercé au Point Rencontre jusqu'à la fin de l'année, mais à raison de deux heures minimum si possible, A______ s'engageant par ailleurs à amener l'enfant les 24 et 31 décembre 2023 au Point Rencontre pour que père et fille puissent se voir. Dès janvier 2024, les visites auraient lieu au domicile du père, une semaine sur deux, le vendredi de 16h à 20h et l'autre semaine, le dimanche de 12h à 18h, en présence d'un intervenant de la J______.

z. Dans un compte-rendu concernant la période du 30 juillet au 5 novembre 2023, le Point Rencontre a indiqué que sur les neuf visites prévues, une seule avait été annulée par le SPMi. Les huit autres avaient eu lieu à raison d'une visite par quinzaine, le dimanche de 15h30 à 16h30, puis, de manière hebdomadaire dès le 22 octobre 2023.

La visite du 10 septembre avait presque été interrompue en raison du comportement de B______. En effet, celui-ci avait posé des questions inadéquates à sa fille (quand est-ce qu'elle irait à la piscine avec lui), avait refusé de se centrer sur C______, n'avait pas su gérer ses émotions (celui-ci était "devenu tout rouge" et avait haussé le ton) et avait adopté une attitude "revancharde" à l'égard de sa fille (repoussant la carte que celle-ci lui remettait dans le cadre d'un jeu en lui répondant qu'il jouerait avec elle quand elle aurait 18 ans, après que celle-ci lui ait répondu qu'elle irait à la piscine avec lui quand elle aurait 18 ans). Le père s'était finalement calmé et, avec l'accord de C______, la visite s'était poursuivie de manière plus sereine.

De manière plus générale, il ressort de ce compte-rendu que C______ continuait de faire preuve de méfiance à l'égard de son père : elle ne lui disant pas toujours bonjour et/ou au revoir, ou lui adressant des reproches (par exemple, de mentir). Après un certain temps d'adaptation (pendant lequel l'enfant sollicitait davantage l'intervenante que ce soit par le regard ou en l'incluant dans les activités partagées avec son père), père et fille parvenaient, en règle générale, à partager des moments complices, autour d'un jeu notamment. L'intervenante était toutefois intervenue à plusieurs reprises pour recadrer les discussions lorsque le conflit parental ou des sujets d'adulte de manière plus générale étaient abordés.

aa. Lors d'une dernière audience sur mesures provisionnelles du 20 décembre 2023, la question de la désignation d'un curateur de représentation pour C______ dans le cadre de la procédure de divorce a été abordée. A______ n'était pas opposée à une telle mesure, tandis que B______ a exprimé son désaccord, estimant que la situation se compliquait chaque fois qu'un intervenant supplémentaire était désigné.

À l'issue de l'audience, le Tribunal a gardé la cause à juger sur mesures provisionnelles.

bb. Le 15 janvier 2024, le Point Rencontre a établi un compte-rendu des visites ayant eu lieu entre le 12 novembre et le 31 décembre 2023, dont le contenu a été repris dans la partie en fait de l'ordonnance attaquée et produit par A______ à l'appui de son appel.

Il en résulte que toutes les visites prévues (huit) avaient été exercées. Durant la période concernée, C______ n'avait pas systématiquement salué son père (cinq fois sur huit au début des visites, et quatre fois sur huit à la fin des visites). Père et fille étaient parvenus à jouer ensemble et avaient échangé des sourires et des rires. Néanmoins, l’aide de l’intervenante présente avait parfois été nécessaire afin de recentrer C______ sur le fait qu’elle devait prendre du plaisir et non s’occuper des problèmes des grandes personnes.

cc. Le 11 mars 2024, le Point Rencontre a établi un compte-rendu des visites ayant eu lieu entre le 7 janvier et le 25 février 2024, que B______ a produit dans le cadre de la procédure d'appel.

Il en résulte que toutes les visites prévues (huit) avaient eu lieu. Durant la période concernée, père et fille avaient pu partager des moments complices. C______ demeurait toutefois ambivalente à l'égard de son père, lui adressant des remarques tantôt accusatrices, tantôt douces.

Lors de la visite du 11 février 2024, l'enfant avait demandé à l'intervenante si elle pourrait voir son père dehors à l'avenir. Celle-ci lui avait alors indiqué qu'elle pouvait formuler cette demande à ses deux parents, ce à quoi C______ avait répondu qu'elle attendrait ses 18 ans pour le faire.

Lors de la dernière visite, l'enfant s'était montrée tantôt fermée, tantôt sèche et agressive dans les propos adressés à son père, et ce à plusieurs reprises. Lorsque l'intervenante lui avait demandé si elle voulait s'exprimer et dire quelque chose à son père, C______ avait répondu qu'elle ne souhaitait pas venir au Point Rencontre.

D.              Dans l'ordonnance entreprise, le Tribunal a considéré que la situation entre les parties s'était tendue depuis que l’épouse avait déposé une demande en divorce et que c’est dans ce contexte que le Tribunal de protection avait rendu plusieurs décisions, dont la dernière sur mesures superprovisionnelles le 11 juillet 2023, modifiant les relations personnelles entre C______ et son père pour les fixer à raison d’une visite hebdomadaire au Point Rencontre en modalité "1 pour 1".

À teneur des comptes-rendus du Point Rencontre, les visites entre C______ et son père s’étaient toutefois bien déroulées. Il ressortait également de la procédure que le père n’avait pas démérité vis-à-vis de sa fille et que c’était plutôt le conflit parental qui avait débordé sur leur relation au point de la rendre difficile. Les parents avaient entrepris une médiation auprès de D______, laquelle devait les aider à dialoguer, à travailler sur leur coparentalité pour restaurer un climat de confiance à l’avenir et apaiser les craintes de la mère. Les parties avaient par ailleurs trouvé un accord en audience pour que le droit aux relations personnelles entre C______ et son père soit à nouveau élargi, pour être exercé au domicile du père, une semaine sur deux le vendredi de 16h00 à 20h00 et l’autre semaine le dimanche de 12h00 à 18h00, ceci en présence d’un intervenant du SPMi.

Dans ces circonstances, le Tribunal a décidé de lever la mesure visant à ce que le droit de visite soit exercé au Point Rencontre, afin que les relations personnelles reprennent au domicile du père. Si le droit de visite fixé serait d'abord exercé de manière limitée, celui-ci devait progressivement être élargi jusqu’à ce qu’il redevienne ce qu’il était lors du prononcé des mesures protectrices de l’union conjugale. Le Tribunal a par ailleurs maintenu la curatelle d’organisation et de surveillance des relations personnelles, notamment pour assister les parties dans cet élargissement progressif du droit de visite, ainsi que la curatelle éducative, charge au Tribunal de protection d'en évaluer la pertinence à l'avenir en fonction de l'évolution de la situation. Les parents étaient également exhortés à continuer leur travail de médiation.

En revanche, le Tribunal a estimé que la présence d’un intervenant du SPMi pendant l’exercice du droit de visite par le père était disproportionnée. Selon le premier juge, il n’existait aucun motif qui justifie un tel appui auprès d’un père qui se montrait aimant et attaché à sa fille et semblait adopter un comportement adéquat avec elle lorsqu’il exerçait son droit de visite.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions de première instance sur mesures provisionnelles, dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 1 let. b et al. 2 CPC).

Interjeté dans le délai (art. 142 al. 1, 145 al. 1 let. b CPC et 314 al. 1 CPC) et selon la forme prescrits par la loi (art. 130 et 131 CPC), dans une affaire non pécuniaire puisque portant sur les droits parentaux (arrêt du Tribunal fédéral 5A_130/2018 du 11 avril 2018 consid. 1 1), l’appel est recevable.

Il en va de même de la réponse de l'intimé ainsi que des écritures spontanées des parties, déposées en temps utile avant que la cause n'ait été gardée à juger.

1.2 Les mesures provisionnelles étant soumises à la procédure sommaire, l'autorité peut se limiter à la vraisemblance des faits et à l'examen sommaire du droit, en se fondant sur les moyens de preuve immédiatement disponibles, tout en ayant l'obligation de peser les intérêts respectifs des parties (ATF 139 III 86 consid. 4.2; 131 III 473 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_916/2019 du 12 mars 2020 consid. 3.4).

1.3 Conformément à l'art. 296 al. 1 et al. 3 CPC, la présente cause est soumise aux maximes d'office et inquisitoire illimitée en tant qu'elle concerne le sort de l'enfant mineure des parties (ATF 147 III 301 consid. 2.2). La Cour n'est donc liée ni par les conclusions des parties ni par l'interdiction de la reformatio in peius (ATF 129 III 417 consid. 2.1.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_841/2018; 5A_843/2018 du 12 février 2020 consid. 5.2).

2. Les parties ont produit des pièces nouvelles en appel.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

Lorsque la procédure est soumise à la maxime inquisitoire illimitée, les parties peuvent présenter des novas en appel même si les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC ne sont pas réunies (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

2.2 En l'espèce, les pièces produites en appel par les parties sont recevables, dès lors qu'elles sont en lien avec le sort de leur fille mineure.

3. L'appelante conclut à la désignation d'un curateur de représentation en faveur de sa fille.

3.1 Selon l'art. 299 al. 1 CPC, le tribunal ordonne si nécessaire la représentation de l'enfant et désigne un curateur expérimenté dans le domaine de l'assistance et en matière juridique. L'al. 2 de cette norme précise que le tribunal examine s'il doit instituer une curatelle, en particulier lorsque les parents déposent des conclusions différentes relatives à l'attribution de l'autorité parentale ou du droit de garde ou des questions importantes concernant leurs relations personnelles avec l'enfant (let. a), de même que si l'autorité de protection de l'enfant ou l'un des parents le requièrent (let. b).

Cette disposition pose un principe général en vertu duquel le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation: il examine la question d'office et met en œuvre une représentation si nécessaire. La notion de nécessité est plus large que celle de "justes motifs" qui prévalait antérieurement. La nécessité tient au principe fondamental qui gouverne toute procédure matrimoniale, à savoir parvenir à une décision finale qui prenne en compte de façon adéquate le bien de l'enfant (Jeandin, Commentaire romand CPC, 2019, n° 4 ad art. 299 CPC).

3.2 En l'espèce, bien que cette question ait été abordée par le Tribunal lors de l'audience du 20 décembre 2023, c'est pour la première fois en appel que l'appelante sollicite qu'un curateur de représentation soit nommé en faveur de sa fille. Dans la mesure où cet aspect du litige est régi par la maxime d'office, il sera entré en matière sur ce point, sans qu'il ne soit nécessaire de statuer sur la recevabilité de cette conclusion, la Cour n'étant pas liée par les conclusions des parties.

En l'occurrence, les parties ont pris des conclusions divergentes s'agissant de l'exercice du droit de visite. Toutefois, à ce stade de la procédure, il n'est pas nécessaire de désigner un curateur de représentation de l'enfant, la situation et les intérêts de celle-ci étant suffisamment discernables sur la base des éléments du dossier, en particulier des récents comptes-rendus du Point Rencontre et des rapports du SPMi et du SEASP.

Par ailleurs, s'il est vrai que le conflit parental est très important, les parties parviennent à discuter dans l'intérêt de leur enfant lorsqu'elles sont appuyées par les différents intervenants sur ce dossier (que ce soit les autorités judiciaires ou les professionnels intervenant dans le cadre des curatelles mises en place), démontrant une certaine capacité à collaborer et un apaisement dudit conflit à cet égard.

Le bien-être de l'enfant semble, de plus, suffisamment sauvegardé par les différentes mesures de protection déjà mises en place.

L'instauration d'une curatelle de représentation ne se justifie en conséquence pas. L'appelante sera déboutée de sa conclusion en ce sens.

4. L’appelante reproche au Tribunal d’avoir octroyé à l'intimé un droit de visite sur sa fille de manière non accompagnée.

4.1 L'art. 273 al. 1 CC prévoit que le père ou la mère qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde ainsi que l'enfant mineur ont réciproquement le droit d'entretenir les relations personnelles indiquées par les circonstances.

Le droit aux relations personnelles est considéré à la fois comme un droit et un devoir des parents, mais aussi comme un droit de la personnalité de l'enfant, qui doit servir en premier lieu l'intérêt de celui-ci; dans chaque cas, la décision doit donc être prise de manière à répondre le mieux possible à ses besoins, l'intérêt des parents étant relégué à l'arrière-plan (ATF 142 III 617 consid. 3.2.3; 141 III 328 consid. 5.4; 131 III 209 consid. 5; arrêt du Tribunal fédéral 5A_177/2022 du 14 septembre 2022 consid. 3.1.1). Le rapport de l'enfant avec ses deux parents est essentiel et peut jouer un rôle décisif dans le processus de sa recherche d'identité (ATF 130 III 585 consid. 2.2.2; 127 III 295 consid. 4a; arrêt du Tribunal fédéral 5A_699/2021 du 21 décembre 2021 consid. 6.1).

4.1.2 Si les relations personnelles compromettent le développement de l’enfant, le droit d’entretenir ces relations peut être retiré ou refusé en tant qu’ultima ratio (art. 274 al. 2 CC ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_95/2023 du 17 juillet 2023 consid. 4.2.1 ; 5A_177/2022 du 14 septembre 2022 consid. 3.1.1 ; 5A_699/2021 du 21 décembre 2021 consid. 6.1 et la jurisprudence citée).

Si le préjudice engendré pour l’enfant par les relations personnelles peut être limité par la mise en œuvre d’un droit de visite surveillé ou accompagné, le droit de la personnalité du parent concerné, le principe de la proportionnalité, mais également le sens et le but des relations personnelles, interdisent la suppression complète du droit auxdites relations (ATF 122 III 404 consid. 3c ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_177/2022 du 14 septembre 2022 consid. 3.1.1 ; 5A_68/2020 du 2 septembre 2020 consid. 3.2). L’une des modalités particulières à laquelle il est envisageable de subordonner l’exercice du droit de visite, par une application conjointe des art. 273 al. 2 et 274 al. 2 CC, peut ainsi consister en l’organisation des visites, avec ou sans curatelle de surveillance, dans un lieu protégé spécifique, tel un Point Rencontre ou une autre institution analogue (arrêts du Tribunal fédéral 5A_177/2022 du 14 septembre 2022 consid. 3.1.1 ; 5A_962/2018 du 2 mai 2019 consid. 5.2.2 ; 5A_478/2018 du 10 août 2018 consid. 5.2.2 et les réf. cit.).

Comme le retrait ou le refus du droit aux relations personnelles selon l’art. 274 CC, l’établissement d’un droit de visite surveillé nécessite des indices concrets de mise en danger du bien de l’enfant (arrêt du Tribunal fédéral 5A_501/2022 du 21 juin 2023 consid. 3.2.2).

En matière de garde et d'exercice du droit aux relations personnelles, des changements trop fréquents peuvent être préjudiciables à l'intérêt de l'enfant. Par conséquent, lorsque la décision de mesures provisionnelles statue sur la garde ou modifie celle-ci, le bien de l'enfant commande, dans la règle, de maintenir les choses en l'état et de laisser celui-ci auprès de la personne qui lui sert actuellement de référence (arrêt du Tribunal fédéral 5A_792/2018 du 6 février 2019 consid. 3.2.2).

4.2 En l’espèce, le Tribunal a, sur mesures provisionnelles de divorce, élargi le droit de visite octroyé au père, lequel devait s'exercer de manière surveillée depuis une décision rendue sur mesures superprovisionnelles par le Tribunal de protection le 11 juillet 2023.

En l'occurrence, l'enfant est demeurée auprès de sa mère, qui en a la garde exclusive depuis la séparation des parties en septembre 2018. Durant un certain temps, père et fille se sont vus régulièrement, l'intimé profitant, depuis le jugement sur mesures protectrices du 18 septembre 2019, d'un large droit de visite (exercé à raison d'un week-end sur deux, du vendredi soir au dimanche soir, ainsi qu'une nuit dans la semaine), jugé conforme à l'intérêt de C______ dans un rapport du SEASP 18 novembre 2022, malgré le constat de certains problèmes chez l'enfant, probablement liés à son exposition au conflit parental notamment, laquelle se trouvait dans un conflit de loyauté important, et maintenu par décision du Tribunal de protection du 1er décembre 2022.

Il résulte toutefois du dossier que la situation de l'enfant s'est rapidement détériorée en raison du conflit parental et des lacunes éducatives du père.

En effet, il résulte du bilan psychologique du 20 décembre 2022 que le développement de l'enfant était compromis par le conflit parental, celle-ci souffrant d'importants retards dans son développement en raison de l'insécurité affective dans laquelle elle se trouvait. Les évènements survenus en novembre et décembre 2022 entre les parents ont confirmé les difficultés des parties à ne pas impliquer leur fille dans leurs disputes conjugales.

En parallèle, les lacunes parentales du père ont pu être objectivées par le SEASP dans son rapport du 18 avril 2023 et par le SPMi dans son rapport du 3 juillet 2023. Il en résulte ainsi que l'intimé n'a pas conscience de ses défaillances parentales, et refuse de les admettre, et que celles-ci ont un certain impact sur le développement de C______. En effet, celui-ci s'est montré violent à l'égard de sa mère en sa présence (étant rappelé que les insultes et les menaces constituent de la violence) et semble être incapable d'assumer son rôle de parent à l'égard de sa fille dans la vie quotidienne.

Malgré la mise en place d'un certain nombre de mesures pour protéger l'enfant, notamment la réalisation d'un bilan psychologique, l'organisation d'un suivi psychologique, ainsi que l'instauration d'une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles et d'une curatelle d'assistance éducative, la situation de l'enfant a continué de se péjorer, de sorte qu'il a été nécessaire de restreindre le droit de visite octroyé au père, celui-ci continuant d'adopter un comportement inadéquat à l'égard de sa fille en l'impliquant dans le conflit conjugal et ne lui offrant aucun cadre ni stabilité émotionnelle.

Depuis le prononcé des mesures superprovisionnelles du 11 juillet 2023, la situation semble s'être apaisée. En effet, dans le cadre du droit de visite surveillé, père et fille parviennent à partager des moments de complicité.

Les parties se sont par ailleurs accordées, lors de l'audience du 15 novembre 2023, sur un élargissement du droit de visite, la mère acceptant que celui-ci ait lieu au domicile du père. L'accord des parties impliquait toutefois la présence d'un intervenant de la J______, soit un tiers professionnel, afin de procéder de la meilleure manière possible et d'éviter de mettre en péril le bon développement de C______, solution qui n'a pas été retenue par le premier juge qui a estimé qu'il n'existait aucun motif justifiant un tel appui auprès d'un père qui se montrait aimant et attaché à sa fille et qui semblait adopter un comportement adéquat avec elle lors de l'exercice de son droit de visite.

Il résulte néanmoins des derniers comptes-rendus du Point Rencontre que la situation reste fragile. En effet, l'intimé continue de tenir à l'égard de l'enfant des propos inadéquats concernant la mère et la procédure et ne parvient pas à la protéger du conflit conjugal. L'intervention d'un tiers professionnel demeure nécessaire pour recadrer la discussion lorsque des sujets inappropriés sont abordés par le père et/ou par l'enfant. De plus, l'enfant continue de se montrer méfiante à l'égard de son père et ne parvient à baisser sa garde qu'après un certain temps d'adaptation.

Le contenu des écritures en appel de l'intimé dénote également une absence de prise de conscience ou de remise en question quant aux problèmes précités, celui-ci réduisant la pertinence d'un droit de visite surveillé au Point Rencontre aux seuls cas de violences physiques ou d'alcoolisme. Il est ainsi à craindre que l'intimé ne soit pas, en l'état, capable ni de préserver son enfant ni de prendre la mesure du préjudice que son attitude est susceptible de lui porter, sans l'intervention d'un professionnel.

Un élargissement aussi important que celui ordonné par le premier juge semble dès lors prématuré. Il apparaît en effet important que l'intimé et sa fille continuent de bénéficier de l’assistance nécessaire pour construire une relation sereine, où parent et enfant ont chacun leur place et assument leur rôle respectif.

Il ne sera toutefois pas fait droit aux conclusions prises par l'appelante, plus ou moins équivalentes à celles ayant fait l'objet de l'accord des parties du 15 novembre 2023, dans la mesure où le SPMi ne propose pas un tel service, étant rappelé qu'in casu, la Cour n'est pas liée par les conclusions des parties et que seul l'intérêt de l'enfant est déterminant. Quant à E______, si cet organisme propose un service d'accompagnement spécifique du droit de visite, il n'est en revanche pas possible de s'assurer, à ce stade, que les modalités (très précises) souhaitées pourraient être assurées.

Compte tenu de l'ensemble des circonstances d'espèce, il sera par conséquent procédé à un élargissement du droit de visite, lequel demeurera toutefois surveillé, afin que l'on puisse s'assurer que le bien-être de la mineure est préservé. Ainsi, le curateur d'organisation et de surveillance des relations personnelles sera chargé de mettre en place avec E______ ou un organisme similaire une visite de l'enfant au domicile de son père, pour une durée de deux heures par semaine, en présence d'un tiers professionnel.

Dans l'attente d'obtenir une disponibilité auprès d'un tel organisme, père et fille continueront de se voir à raison d'une visite hebdomadaire d'une heure au Point Rencontre en modalité "1 pour 1".

Cette solution présente l'avantage de préserver le bien-être de l'enfant, tout en soulageant celle-ci de l'inconfort qu'elle éprouve en rencontrant son père dans un cadre non familier (C______ s'étant plaint à plusieurs reprises du fait de voir son père au Point Rencontre) et en encourageant les efforts déployés par chacun.

Dans la mesure où les mesures provisionnelles n'ont pas vocation à durer, il n'y a pas lieu de réglementer, à ce stade, le droit de visite de l'intimé au-delà-de ce qui précède.

Les chiffres 1, 2 et 4 du dispositif de l'ordonnance entreprise seront par conséquent annulés et il sera statué dans le sens qui précède.

5. 5.1 Lorsque l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de première instance (art. 318 al. 3 CPC).

En l'espèce, le Tribunal a réservé le sort des frais de la décision querellée à la décision à rendre sur le fond, conformément à l'art. 104 al. 3 CPC. Ce point sera confirmé sans qu'il y ait lieu de statuer à nouveau sur les frais de première instance.

5.2 Les frais judiciaires de la procédure d'appel, y compris la décision rendue sur effet suspensif, seront fixés à 1'000 fr. (art. 31 et 37 RTFMC) et mis à la charge des parties à raison d'une moitié chacune, compte tenu de l'issue et de la nature familiale du litige (art. 107 al. 1 let. c CPC).

Dans la mesure où l'appelante plaide au bénéfice de l'assistance juridique, sa part des frais judiciaires sera provisoirement supportée par l'Etat (art. 122 al. 1 let. b CPC), étant rappelé que le bénéficiaire de l'assistance juridique est tenu au remboursement des frais judiciaires mis à la charge de l'Etat dans la mesure de l'art. 123 CPC (art. 19 RAJ). L'intimé sera pour sa part condamnée à verser 500 fr. à l'Etat de Genève à titre de frais judiciaires d'appel.

Pour les mêmes motifs, les parties supporteront leurs propres dépens (art. 107 al. 1 let c. CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 5 février 2024 par A______ contre l'ordonnance OTPI/67/2024 rendue le 19 janvier 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/21085/2022.

Au fond :

Annule les chiffres 1, 2 et 4 de son dispositif et cela fait, statuant à nouveau :

Réserve à B______ un droit de visite sur sa fille C______ devant s'exercer à raison d'une visite hebdomadaire de deux heures au domicile du père, en présence d'un intervenant de E______ ou d'un organisme similaire, étant précisé que, dans l'attente d'une disponibilité au sein de E______ ou d'un autre organisme, le droit de visite continuera de s'exercer au Point Rencontre à raison d'une visite hebdomadaire en modalité "1 pour 1".

Charge le curateur d'organisation et de surveillance des relations personnelles de mettre en place un service d'accompagnement spécifique du droit de visite à domicile avec E______ ou un autre organisme similaire.

Confirme l'ordonnance entreprise pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'000 fr. et les met à la charge des parties par moitié chacune.

Dit que la part des frais à charge de A______ est provisoirement supportée par l'Etat de Genève.

Condamne B______ à verser à l'Etat de Genève 500 fr. à titre de frais judiciaires d'appel.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame
Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges;
Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.