Décisions | Chambre civile
ACJC/1263/2024 du 11.10.2024 sur OTPI/444/2024 ( SDF ) , MODIFIE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/10599/2024 ACJC/1263/2024 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU VENDREDI 11 OCTOBRE 2024 |
Entre
Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'une ordonnance rendue par la 3ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 11 juillet 2024, représenté par Me Agnieszka RACIBORSKA, avocate, ARavocat, route des Jeunes 4, 1227 Les Acacias,
et
Madame B______, domiciliée ______, intimée, représenté par
Me Katarzyna KEDZIA RENQUIN, avocate, Keppeler Avocats, rue Ferdinand-
Hodler 15, case postale 6090, 1211 Genève 6.
A. Par ordonnance OTPI/444/2024 du 11 juillet 2024, remise en mains propres à A______ le même jour, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures provisionnelles dans le cadre d'une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale, a débouté A______ de sa conclusion en changement d'école de sa fille C______ (chiffre 1 du dispositif), réservé la décision du Tribunal sur les autres conclusions prises sur mesures provisionnelles par les parties (ch. 2), réservé la décision du Tribunal quant au sort des frais judiciaires de l'ordonnance (ch. 3), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 5).
B. a. Par acte expédié le 17 juillet 2024 au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a formé appel contre cette ordonnance, dont il sollicite l'annulation du chiffre 1 du dispositif.
Sur mesures superprovisionnelles, il a conclu à ce qu'il soit autorisé à inscrire sa fille C______ dans l'établissement scolaire primaire de D______ pour la rentrée scolaire 2024/2025.
Sur le fond, il a conclu à ce que l'audition de la mineure C______ soit ordonnée, à ce qu'il soit autorisé à inscrire la prénommée dans l'établissement scolaire primaire de D______ pour la rentrée scolaire 2024/2025 et à ce que B______ soit déboutée de toutes ses conclusions, avec suite de frais judiciaires et dépens.
A l'appui de ses conclusions, A______ a déposé de nouvelles pièces.
b. Par arrêt ACJC/939/2024 du 19 juillet 2024, la Cour, statuant sur mesures superprovisionnelles, a autorisé A______ à effectuer les démarches nécessaires afin d'inscrire sa fille C______ dans l'établissement scolaire de D______ à E______ (GE) et limité dans cette mesure, en tant que de besoin, l'autorité parentale de B______ sur sa fille C______ (chiffre 1 du dispositif), imparti à B______ un délai de 10 jours dès réception de l'arrêt pour répondre à l'appel déposé par A______ contre l'ordonnance OTPI/444/2024 rendue le 11 juillet 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/10599/2024 (ch. 2), réservé la suite de la procédure (ch. 3), et dit qu'il serait statué sur les frais liés à la décision dans l'arrêt au fond (ch. 4).
c. Par réponse expédiée le 31 juillet 2024 au greffe de la Cour, B______ s'en est rapportée à justice sur le fond de la procédure et a conclu à ce que les frais soient partagés par moitié entre les parties et les dépens compensés.
d. A______ a répliqué par acte du 21 août 2024.
Il a produit une nouvelle pièce.
e. Les parties ont été avisées le 10 septembre 2024 par le greffe de la Cour de ce que la cause était gardée à juger.
C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :
a. A______, né le ______ 1980, de nationalité suisse, et B______, née le ______ 1979, de nationalité suisse, se sont mariés le ______ 2012 au F______ (GE).
Deux enfants sont issus de cette union, soit C______, née le ______ 2012 à Genève, et G______, née le ______ 2019 à Genève.
b. Les parties se sont séparées en février 2024. B______ a quitté le domicile conjugal sis à H______ (France) avec G______ pour s'installer provisoirement chez ses parents, puis dans un appartement à Genève.
De son côté, le 20 février 2024, A______ s'est installé avec C______ dans un appartement sis rue 1______ no. ______ à E______. C______ était alors scolarisée en 7P à l'école de I______, à Genève.
c. Depuis le 24 mai 2024, C______ est suivie par une psychologue du Centre J______ à raison d'une fois par semaine.
d. Par acte déposé au greffe du Tribunal le 8 mai 2024, B______ a formé une requête de mesures protectrices de l'union conjugale, concluant notamment à ce que la garde exclusive de C______ soit, "en l'état", attribuée à A______.
e. Lors de l'audience devant le Tribunal du 10 juillet 2024, A______ a sollicité le prononcé de mesures superprovisionnelles tendant à ce que le Tribunal autorise le changement d'école de la fille aînée des parties. Il a exposé que C______ habitait actuellement chez lui et que celle-ci souhaitait intégrer l'établissement qui était proche de son domicile, soit l'école de D______. Il a produit à cet égard des captures d'écran de messages écrits par sa fille. Il a indiqué que C______ était actuellement scolarisée à l'école de I______, située à côté du domicile de ses grands-parents maternels chez lesquels elle déjeunait auparavant à midi, ce qui n'était toutefois plus le cas depuis le mois de mars 2024.
B______ a allégué avoir des doutes quant au fait que leur fille souhaitait véritablement changer d'établissement scolaire et qu'elle pensait que celle-ci avait été influencée par son père. Elle a précisé qu'elle n'avait plus de contacts avec sa fille depuis le mois de février 2024. Selon elle, il était dans l'intérêt de leur fille de terminer son école primaire dans son établissement actuel, dans lequel elle était suivie par l'infirmière scolaire. Elle a encore expliqué que C______ était allée à l'école du K______ de la 1P à la 4P, qu'elle avait débuté la 5P à l'école du L______ puis qu'elle avait rejoint l'école de I______ en cours de 5P et jusqu'en 7P.
A l'issue de l'audience, le Tribunal a indiqué qu'il rendrait une décision sur la question de l'école d'C______.
D. Dans l'ordonnance querellée, le Tribunal a constaté que C______ était à l'école de I______ depuis un peu moins de trois années scolaires et qu'elle vivait désormais chez son père. Il a considéré que l'intérêt de la prénommée ne commandait pas qu'elle soit scolarisée dans une école proche du domicile de ce dernier, mais plutôt qu'elle termine sa scolarité primaire dans l'établissement qu'elle connaissait déjà, où se trouvaient ses camarades et l'infirmière scolaire.
E. Les faits nouveaux et pertinents suivants résultent par ailleurs de la procédure d'appel :
a. A teneur de messages échangés entre C______ et son père le 11 juillet 2024 d'une part, et entre C______ et sa mère le 14 juillet 2024 d'autre part, la mineure se disait très déçue de la décision rendue par le Tribunal le 11 juillet 2014. Elle s'était réjouie d'aller dans sa nouvelle école qui se trouvait en face de la maison, ce qui lui aurait permis de dormir davantage le matin, de faire moins de trajets, de rentrer à la maison à midi afin de passer du temps avec le chien plutôt que de manger au restaurant scolaire dont elle n'appréciait pas la nourriture, et, enfin, de se reposer un peu après l'école avant d'aller à ses entraînements de football.
b. Par courriel du 12 août 2024 adressé aux deux parents, la direction de l'établissement primaire D______ a confirmé avoir pris bonne note, suite à l'arrêt de la Cour du 19 juillet 2024, que C______ avait été autorisée à changer d'école. Par conséquent, il était confirmé que leur fille serait scolarisée en 8P à l'école de D______ dès le 19 août suivant.
1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions de première instance sur mesures provisionnelles, dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 1 let. b et al. 2 CPC).
L'appel, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance d'appel dans les dix jours à compter de la notification de la décision attaquée, s'agissant de mesures provisionnelles qui sont soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. d, 311 al. 1 et 314 al. 1 CPC).
Formé en temps utile et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1 et 314 al. 1 CPC), dans une cause de nature non patrimoniale dans son ensemble, l'appel est donc recevable, sous la réserve de ce qui suit (consid. 3 infra).
1.2 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), sa cognition étant toutefois limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb, JdT 2002 I 352; arrêt du Tribunal fédéral 5A_762/2013 du 27 mars 2014 consid. 2.2).
1.3 La présente cause est soumise aux maximes d'office et inquisitoire illimitée dès lors qu'elle concerne l'enfant mineure des parties (art. 296 al. 1 et al. 3 CPC), de sorte que la Cour n'est liée ni par les conclusions des parties sur ce point (art. 296 al. 3 CPC) ni par l'interdiction de la reformatio in pejus (ATF 129 III 417 consid. 2.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_843/2018 du 12 février 2020 consid. 5.2).
2. L'appelant a produit des pièces nouvelles et allégué des faits nouveaux devant la Cour.
2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).
Lorsque la cause concerne des enfants mineurs et que le procès est soumis à la maxime inquisitoire illimitée (art. 296 al. 1 CPC), les parties peuvent en revanche présenter des nova en appel même si les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC ne sont pas réunies (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).
2.2 En l'espèce, les pièces nouvelles produites par l'appelant sont en lien avec la question du changement d'école de la mineure.
A ce titre, ces pièces sont recevables, ce qui n'est pas contesté, ainsi que les faits qu'elles comportent. Ceux-ci ont été intégrés dans la partie "En fait" ci-dessus dans la mesure utile.
3. 3.1 L'appelant reproche au Tribunal de ne pas l'avoir autorisé à inscrire sa fille C______ dans l'école obligatoire proche de son nouveau domicile, alors que tel était le souhait de celle-ci.
Dans sa réplique, il a précisé que la rentrée de sa fille à l'école de D______ s'était bien passée et que C______ était ravie, notamment, d'avoir retrouvé plusieurs camarades qu'elle connaissait déjà.
3.2 L'intimée affirme pour sa part qu'elle serait prête à respecter la volonté de sa fille en rapport avec un changement d'école si un doute ne subsistait pas quant au réel souhait de l'enfant, dont il était à craindre qu'elle ne soit instrumentalisée par son père. Elle persistait à croire que le bien-être de l'enfant commandait qu'elle termine sa scolarité primaire au sein de l'établissement qu'elle fréquentait depuis plusieurs années.
3.3 Selon l'art. 58 al. 1 de la loi genevoise sur l'instruction publique (LIP;
RS-GE C 1 10), sous réserve des alinéas 2 à 5 (qui ne sont pas pertinents en l'espèce), les élèves sont scolarisés dans l’établissement correspondant au secteur de recrutement du lieu de domicile ou à défaut du lieu de résidence des parents. Les élèves dont les parents ne partagent pas le même lieu de domicile ou de résidence sont scolarisés à leur lieu de domicile ou de résidence principal (art. 24 al. 2 du Règlement de l’enseignement primaire [REP; RS-GE C 1 10.21].
3.4. A la suite de l'arrêt de la Cour rendu sur mesures superprovisionnelles, C______ a fait sa rentrée scolaire, il y a de cela près de deux mois, à l'école de D______ à E______.
Dans cette mesure, le litige apparait désormais dépourvu d'objet.
A toutes fins utiles, il sera encore constaté ce qui suit : depuis la séparation des parties, la résidence principale de l'enfant C______ se trouve chez son père, rue 1______ no. ______ à E______. Or, comme cela a été relevé dans l'ordonnance de la Cour du 19 juillet 2024, indépendamment des préférences personnelles des parties à la procédure ou de leur fille, il résulte de la loi sur l'instruction publique que celle-ci devait être inscrite dans l'école proche de son lieu de résidence principale, étant précisé qu'il n'existait plus de motif justifiant de faire exception à ce principe puisqu'il a été rendu vraisemblable que C______ ne déjeunait plus à midi chez ses grands-parents dans le quartier de M______ [GE].
4. 4.1 Lorsque l’instance d’appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais fixés par l’autorité inférieure (art. 318 al. 3 CPC).
En l’occurrence, le Tribunal a réservé le sort des frais de première instance à la décision finale et n’a pas alloué de dépens. Cette décision n’étant pas critiquée par les parties et étant conforme à la loi (art. 104 al. 1 et 3, 106 al. 2 et 107 al. 1 let. c CPC), il n’y a pas lieu de la revoir. Les chiffres 3 et 4 du dispositif de l’ordonnance querellée seront partant confirmés.
4.2 Les frais judiciaires de la procédure d’appel, comprenant l’émolument de décision sur mesures superprovisionnelles, seront arrêtés à 500 fr. (art. 31 et 37 RTFMC) et mis à la charge de l'intimée qui a succombé sur mesures superprovisionnelles, la procédure au fond étant désormais sans objet (art. 106 al. 1 et 107 al. 1 let. e CPC). Ce montant sera compensé à due concurrence avec l'avance versée par l'appelant, le solde lui étant restitué. L'intimée sera condamnée à payer 500 fr. à l'appelant à titre de remboursement des frais judiciaires d'appel.
Pour les mêmes motifs, l'intimée sera condamnée à payer à l'appelant la somme de 500 fr. à titre de dépens d'appel (art. 105 al. 2, art. 106 al. 1 CPC; art. 86 RTFMC).
* * * * *
La Chambre civile :
Déclare sans objet l'appel interjeté par A______ contre l’ordonnance OTPI/444/2024 du 11 juillet 2024.
Confirme l'ordonnance entreprise pour le surplus.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires d'appel à 500 fr., compensés à due concurrence par l'avance de frais effectuée par A______, et les met à la charge de B______.
Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer à A______ le solde de son avance.
Condamne B______ à payer à A______ 500 fr. à titre de remboursement des frais judiciaires d'appel.
Condamne B______ à payer à A______ la somme de 500 fr. à titre de dépens d'appel.
Siégeant :
Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Paola CAMPOMAGNANI, Madame Stéphanie MUSY, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.