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Décisions | Chambre civile

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C/18974/2021

ACJC/1091/2024 du 10.09.2024 sur JTPI/2004/2024 ( OS ) , MODIFIE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/18974/2021 ACJC/1091/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 10 SEPTEMBRE 2024

 

Entre

L'enfant mineur A______, représenté par sa mère B______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 9 février 2024, représenté par Me C______, avocat,

et

Monsieur D______, domicilié ______, intimé.


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/2004/2024 du 9 février 2024, reçu par B______ le 20 février 2024, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure simplifiée, a notamment maintenu l'autorité parentale conjointe sur l'enfant A______, né le ______ 2018 (ch. 1 du dispositif), attribué à B______ la garde exclusive de celui-ci (ch. 2), réservé à D______ un droit de visite progressif qui s'exercera dans un premier temps, à raison du mardi soir après l'école au mercredi 18h30 une semaine sur deux, et, en alternance, du samedi 11h00 au dimanche 18h30; dès que la situation le permettra et en fonction de l'accord du curateur, le droit de visite s'exercera du mardi soir après l'école au mercredi soir à 18h30, une semaine sur deux et, en alternance, un week-end sur deux du vendredi soir après l'école au lundi matin à l'école ainsi que la moitié des vacances scolaires et jours fériés (ch. 3), ordonné l'instauration d'une curatelle d'organisation et de surveillance du droit de visite, charge au curateur d'évaluer l'élargissement des visites en fonction de l'évolution de la situation (ch. 6), dit que l'entretien convenable de A______ se montait à 146 fr. 30, allocations familiales déduites (ch. 7), renoncé en l'état à fixer à la charge de D______ une contribution à l'entretien de A______ (ch. 8), réparti entre les parties, par moitié chacune, les frais judiciaires en 1'400 fr. et les a provisoirement laissés à la charge de l'Etat de Genève (ch. 9), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 10) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 11).

B. a. Le 21 mars 2024, A______, représenté par sa mère, a formé appel de ce jugement, concluant préalablement à ce que la Cour de justice ordonne au SEASP d'établir un rapport d'évaluation. Principalement, il a conclu à ce que la Cour annule les chiffres 1, 3 et 7 à 9 du dispositif du jugement querellé, attribue à sa mère l'autorité parentale exclusive, dise que le montant de son entretien convenable est de 146 fr. 30 jusqu'à 10 ans et de 346 fr. 30 par la suite, condamne D______ à verser en mains de B______, à titre de contribution à son entretien, 150 fr. jusqu'à 10 ans et 350 fr. de 10 ans jusqu'à la majorité, voire au-delà en cas d'études sérieuses et suivies mais jusqu'à 25 ans au maximum, sous réserve de faits nouveaux, réserve à D______ un droit de visite s'exerçant du samedi 11h00 au dimanche 18h30, étant précisé que la prise en charge et le retour de l'enfant se feront au domicile de B______, dise que, dès que la situation le permettra, et en fonction de l'accord du curateur, le droit de visite sera élargi et s'exercera en outre du mardi soir après l'école au mercredi 18h30, une semaine sur deux, étant précisé que la prise en charge et le retour de l'enfant se feront au domicile de sa mère, le tout avec suite de frais et dépens.

b. D______ n'a pas répondu à l'appel dans le délai qui lui a été imparti pour ce faire par la Cour.

c. Les parties ont été informées le 1er juillet 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a. B______, née le ______ 1988, originaire de E______ (VD) et D______, né le ______ 1987, de nationalité marocaine, sont les parents de A______, né le ______ 2018 à F______ (GE).

b. Le 31 juillet 2018, les parents de A______ ont fait une déclaration concernant l'autorité parentale conjointe et le nom de celui-ci.

c. Les parents vivent séparés depuis le mois de février 2019.

d. Par acte déposé au greffe du Tribunal de première instance le 29 septembre 2021, déclaré non concilié et introduit le 23 juin 2023, A______, représenté par sa mère a formé une action alimentaire.

En dernier lieu, et sur les questions encore litigieuses en appel, il a conclu à ce que le Tribunal attribue à sa mère l'autorité parentale exclusive, réserve à D______ un droit aux relations personnelles s'exerçant d'entente entre les parties, et notamment du vendredi au samedi, une fois par semaine, dise que le montant de son entretien convenable, allocations familiales déduites est de 1'210 fr. jusqu'à 10 ans, de 1'410 fr. de 10 ans à 15 ans et de 1'610 fr. de 15 ans jusqu'à la majorité, voire au-delà s'il poursuit une formation professionnelle ou des études sérieuses et condamne D______ à verser ces montants en mains de B______ avec effet rétroactif au 29 septembre 2020.

e. D______ a pour sa part conclu en dernier lieu, sur les questions encore litigieuses, à ce que le Tribunal maintienne l'autorité parentale conjointe, lui réserve un droit de visite s'exerçant du mardi soir après l'école au mercredi soir à 18h30, une semaine sur deux et, en alternance, un week-end sur deux, soit du vendredi soir après l'école au lundi matin à l'école, ainsi que la moitié des vacances scolaires et jours fériés, fixe l'entretien convenable de l'enfant à 144 fr. 45 et le dispense de verser une contribution d'entretien.

f. Il ressort des déclarations des parties devant le Tribunal que celles-ci ont, après la séparation, convenu d'un droit de visite s'exerçant du samedi 11h00 au dimanche soir, entre 18h00 et 19h00, mais que ce droit n'est pas régulièrement exercé, pour des raisons dont les parents se rendent mutuellement responsables. Plusieurs épisodes de violence étaient survenus entre les parents de A______ pendant la vie commune mais la situation s'était améliorée après la séparation. Le dialogue entre les parents restait cependant difficile.

B______ souhaitait obtenir l'autorité parentale exclusive car elle estimait que le père était instable; celui-ci s'était montré violent verbalement et physiquement à son égard à de nombreuses reprises. Il était adéquat avec l'enfant, même s'il lui arrivait de lui "mettre une correction". A______ lui disait qu'il restait à la maison devant la télévision et les jeux vidéo quand il était chez son père. Celui-ci avait du mal à se réveiller, ce qui mettait en danger la sécurité de l'enfant.

D______ a pour sa part souligné qu'il était "contre les jeux vidéo", mais que A______ se débrouillait très bien à ces jeux pour son âge. Il se promenait souvent dehors avec l'enfant. B______ lui faisait fréquemment des reproches concernant la prise en charge de l'enfant.

g. La situation financière des parties est la suivante :

g.a B______ est à charge de l'Hospice général. Elle a allégué avoir débuté une formation à l'école hôtelière de Genève, mais l'avoir interrompue en raison de problème personnels.

Elle vit actuellement auprès de sa famille, mais expose chercher un appartement. Elle a allégué des charges de 3'040 fr. par mois (montant de base OP : 1'350 fr. ; part au loyer (estimation) : 1'440 fr. (80 % de 1'800 fr.) ; assurance-maladie : 160 fr. 05; assurance-ménage (estimation) : 20 fr. ; transport : 70 fr.).

g.b D______ est à charge de l'Hospice général.

Il a exposé avoir fait une formation de charpentier. Il avait travaillé de 2014 à 2016 sur un chantier pour le compte de l'entreprise architecture G______ Sàrl, mais avait été victime d'un accident de travail. Il s'était ainsi retrouvé au chômage et n'avait ensuite pas retrouvé un travail. Il avait déposé une demande AI pour obtenir des mesures de réadaptation. Il n'a cependant pas indiqué quelle avait été l'issue de cette demande. Il souhaitait se reconvertir dans la vente par exemple et avait commencé un apprentissage d'employé de commerce qu'il n'avait pas terminé car cela ne lui avait pas plu. Comme il n'avait pas un profil qui correspondait à l'emploi qu'il recherchait, et qu'il ne pouvait plus travailler dans le bâtiment à cause de ses problèmes de dos, il était difficile pour lui de trouver un emploi.

En 2020, D______ a bénéficié d'une "synthèse d'orientation" rédigée par les Etablissements publics pour l'intégration. Il en ressort qu'il dispose d'une expérience professionnelle couvrant plusieurs métiers de la construction et des services. Son accident de travail avait entraîné une limitation à l'effort au niveau du genou et du bras droit dans les ports de charge de plus de 20 kg. La voie qui semblait lui convenir le mieux était celle des métiers de la restauration. Des stages dans ce domaine lui avaient dès lors été proposés.

D______ a produit des certificats médicaux datés d'octobre 2021 desquels il ressort qu'il souffrait à l'époque de lombalgies chroniques. Il a suivi pour cela un traitement d'ostéopathie et de physiothérapie en 2023. Le 2 février 2022 et le 27 novembre 2023, son médecin généraliste a établi deux certificats ayant la même teneur, indiquant que D______ était dans l'incapacité de reprendre son travail en raison de problèmes médicaux chroniques qui lui demandaient une prise en charge de longue durée. Une évolution positive était espérée dans les mois à venir.

D______ allègue avoir des charges en 2'760 fr. environ, payées par l'Hospice général pour l'essentiel, soit 1'200 fr. d'entretien OP, 1'175 fr. de loyer, 275 fr. 90 d'assurance maladie, 70 fr. 25 de frais d'électricité et 41 fr. 70 des frais de transport. Il avait des dettes pour un montant total de 76'191 fr. 80.

g.c Le Tribunal a retenu, sans que cela soit remis en cause en appel, que les charges de l'enfant étaient de 146 fr. 30, après déduction des allocations familiales en 311 fr., soit 400 fr. de montant de base OP, 12 fr. 30 d'assurance maladie et 45 fr. de frais de transports.

h. Lors de l'audience du Tribunal du 13 décembre 2023, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions. B______ a sollicité un rapport d'évaluation sociale.

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile de trente jours et selon la forme prescrite par la loi contre une décision susceptible d'appel (art. 311 et 308 CPC).

1.2 Dans la mesure où elle n'est pas liée à une procédure matrimoniale, la demande visant à régler les droits parentaux est soumise à la procédure simplifiée (art. 295 CPC).

La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). Les maximes d'office et inquisitoire illimitée régissent la procédure, de sorte que la Cour établit les faits d'office et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 296 al. 1 et 3 CPC), ni par l'interdiction de la reformatio in pejus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_757/2013 du 14 juillet 2014 consid. 2.1).

2. Le Tribunal a considéré qu'il n'était pas nécessaire de demander un rapport d'évaluation au SEASP car tous les éléments requis pour statuer figuraient au dossier. Il convenait de maintenir l'autorité parentale conjointe car l'intimé s'était toujours impliqué dans la vie de son fils et la collaboration des parents avait jusque-là été possible dans l'intérêt de l'enfant.

Il convenait en outre de faire droit à la requête de l'intimé tendant à l'élargissement du droit de visite, dans la mesure où l'intérêt de l'enfant justifiait d'encourager le souhait du père de s'investir davantage dans le quotidien de celui-ci. Compte tenu des craintes exprimées par la mère et des circonstances, cet élargissement devait se faire progressivement.

La mère de l'enfant, en sa qualité de représentante de celui-ci, fait valoir que l'intimé est instable psychologiquement et que son rythme de vie est peu organisé ce qui empêche la collaboration entre les parents. L'autorité parentale conjointe n'était ainsi pas dans l'intérêt l'enfant qui pouvait "potentiellement se trouver pris dans un conflit de loyauté aigu". L'élargissement du droit de visite prévu par le Tribunal était prématuré; l'enfant n'avait que 6 ans et la modification brusque des modalités des visites auxquelles il était habitué était susceptible de mettre en péril son équilibre. L'on ignorait en outre dans quelle mesure l'intimé serait capable d'assumer la prise en charge de l'enfant pour un droit de visite élargi.

2.1.1 En matière d'attribution des droits parentaux, le bien de l'enfant constitue la règle fondamentale, les intérêts des parents devant être relégués au second plan (ATF 142 III 617 consid. 3.2.3).

Selon la jurisprudence, l'autorité parentale conjointe est désormais la règle, indépendamment de l'état civil des parents et il n'est qu'exceptionnellement dérogé à ce principe, lorsqu'il apparait que l'attribution de l'autorité exclusive à l'un des parents est nécessaire pour le bien de l'enfant. L'attribution de l'autorité parentale exclusive à l'un des parents doit rester une exception étroitement limitée. Une telle exception est en particulier envisageable en présence d'un conflit important et durable entre les parents ou d'une incapacité durable pour ceux-ci de communiquer entre eux à propos de l'enfant, pour autant que cela exerce une influence négative sur celui-ci et que l'autorité parentale exclusive permette d'espérer une amélioration de la situation. De simples différends, tels qu'ils existent au sein de la plupart des familles, d'autant plus en cas de séparation ou de divorce, ne constituent pas un motif d'attribution de l'autorité parentale exclusive, respectivement de maintien d'une autorité parentale exclusive préexistante (arrêt du Tribunal fédéral 5A_119/2022 du 7 novembre 2022 consid. 3.1 ;
ATF 141 III 472 consid. 4 et 4.7).

2.1.2 Le père ou la mère qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde ainsi que l'enfant mineur ont réciproquement le droit d'entretenir les relations personnelles indiquées par les circonstances (art. 273 al. 1 CC).

Il faut choisir la solution qui, au regard des données de l'espèce, est la mieux à même d'assurer à l'enfant la stabilité des relations nécessaires à un développement harmonieux des points de vue affectif, psychique, moral et intellectuel
(ATF 136 I 178 consid. 5.3).

2.2 En l'espèce, l'autorité parentale conjointe a été instaurée à la demande des deux parents de A______, peu après la naissance de celui-ci.

Les éléments figurant au dossier ne permettent pas de retenir que cette autorité parentale conjointe mettrait actuellement en danger l'équilibre de l'enfant. Le seul fait que l'intimé soit, selon les dires de B______, instable, ou que son rythme de vie ne soit que très peu organisé, n'est pas suffisant à cet égard. Les difficultés de communication entre les parents n'atteignent de plus pas un degré suffisant pour déroger au principe de l'autorité parentale conjointe.

Aucun indice concret ne conduit à retenir que l'enfant serait placé, du fait de l'autorité parentale conjointe, dans un conflit de loyauté, comme sa mère l'affirme, sans fournir cependant d'élément attestant du risque concret d'un tel conflit.

La décision du Tribunal de maintenir l'autorité parentale conjointe sur A______ sera par conséquent confirmée.

En ce qui concerne le droit de visite, il résulte de la procédure que les parties ont convenu, après leur séparation en 2019, que l'intimé verrait A______ une fois par semaine, du samedi 11h00, au dimanche 18h30.

Ce droit de visite n'a cependant pas pu être exercé régulièrement. Les parents, dont la communication est mauvaise, ne s'accordent pas sur les raisons de cette irrégularité.

Compte tenu de ces difficultés, et du jeune âge de A______, il paraît prématuré, alors que l'intimé ne parvient actuellement pas à prendre en charge l'enfant pour l'intégralité du droit de visite actuellement en place, d'élargir d'ores et déjà celui-ci à un jour et une nuit supplémentaire tous les 15 jours.

L'intimé, qui n'a pas déposé de réponse à l'appel, n'a donné que peu d'information sur les possibilités d'accueil de l'enfant; l'on ignore notamment s'il sera concrètement à même de s'en occuper dans de bonnes conditions en semaine, en plus des week-end déjà fixés.

Il est ainsi à craindre que ce changement immédiat des modalités du droit de visite suscite de nouveaux conflits entre les parents, sans que les bénéfices que l'enfant pourrait en retirer ne le justifient.

La proposition formulée par B______, consistant à maintenir pour le moment le droit de visite en vigueur depuis un certain temps, tout en réservant un élargissement au vu de l'évolution de la situation semble adéquate.

Le droit de visite fixé par le jugement querellé sera par conséquent modifié dans le sens des conclusions prises au nom de l'enfant par sa mère devant la Cour.

3. Le Tribunal a retenu que l'intimé avait perdu son emploi en raison d'un accident dont les conséquences l'empêchaient de retrouver un travail dans son secteur d'activité. Cette situation perdurant depuis plusieurs années, il convenait de renoncer à lui imputer un revenu hypothétique. Le déficit de la mère ne résultait pas du temps qu'elle consacrait à son enfant, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de tenir compte d'une contribution de prise en charge.

La représentante de l'enfant fait valoir que l'intimé n'a pas démontré qu'il lui était impossible de réaliser un revenu. Il n'avait jamais versé de contribution à l'entretien de son fils et se maintenait volontairement dans une situation précaire afin d'éviter de devoir le faire. Un revenu hypothétique situé entre 4'250 fr. et 4'675 fr. devait lui être imputé au vu du calculateur "salarium" correspondant au salaire moyen dans la branche des transports et/ou de la logistique.

3.1.1 L'enfant agit contre son père ou sa mère afin de lui réclamer l'entretien pour l'avenir et pour l'année qui précède l'ouverture de l'action (art. 279 al. 1 CC).

Les père et mère doivent pourvoir à l'entretien de leur enfant et assumer les frais de son éducation, de sa formation et des mesures prises pour le protéger. L'entretien est assuré par les soins et l'éducation ou, lorsque le mineur n'est pas sous la garde de ses père et mère, par des prestations pécuniaires (art. 276 al. 1 et 2 CC).

La contribution doit correspondre aux besoins de l'enfant ainsi qu'à la situation et aux ressources de ses père et mère (art. 285 al. 1 CC).

Pour fixer la contribution d'entretien, le juge doit en principe tenir compte du revenu effectif des parties. Il peut toutefois imputer à celles-ci un revenu hypothétique supérieur. Il s'agit d'inciter la personne à réaliser le revenu qu'elle est en mesure de se procurer et dont on peut raisonnablement exiger d'elle qu'elle l'obtienne afin de remplir ses obligations (ATF 137 III 118 consid. 2.3;
137 III 102 consid. 4.2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_876/2016 du 19 juin 2017 consid. 3.1.2).

Lorsque le juge entend tenir compte d'un revenu hypothétique, il doit examiner successivement deux conditions. Il doit d'abord déterminer si l'on peut raisonnablement exiger d'une personne qu'elle exerce une activité lucrative ou augmente celle-ci, eu égard, notamment à sa formation, à son âge et à son état de santé. Le juge doit ensuite établir si la personne a la possibilité effective d'exercer l'activité ainsi déterminée et quel revenu elle peut en obtenir, compte tenu des circonstances subjectives susmentionnées, ainsi que du marché du travail (ATF 137 III 102 consid. 4.2.2.2; 128 III 4 consid. 4c/bb). C'est pourquoi on lui accorde un certain délai pour s'organiser à ces fins (ATF 129 III 417 consid. 2.2; 114 II 13 consid. 5; arrêt du Tribunal fédéral 5A_651/2014 du 27 janvier 2015 consid. 3.1 et les références citées).

3.1.2 Selon l'art. 301a let. c CPC, la décision qui fixe les contributions d’entretien indique le montant nécessaire pour assurer l’entretien convenable de chaque enfant.

L'entretien convenable de 301a let. c CPC ne doit être mentionné dans le dispositif que dans les situations de déficit (arrêt du Tribunal fédéral 5A_729/2022 du 24 mai 2024 consid. 6.2)

3.2 En l'espèce, la mère de l'enfant relève avec raison que l'intimé n'a pas établi qu'il était incapable de travailler. Les documents médicaux figurant au dossier ne démontrent pas que l'intimé souffre de problèmes de santé qui l'empêchent de manière durable de réaliser un revenu. En particulier, le certificat daté de novembre 2023, qui correspond mot pour mot au certificat établi en février 2022, est imprécis et peu convaincant. En tout état de cause, il ne mentionne qu'une incapacité de travail de quelques mois.

Il ressort par ailleurs de l'évaluation des Etablissements pour l'intégration que l'intimé a effectué des stages dans le domaine de la restauration et qu'il a toutes les capacités nécessaires pour trouver un poste lui convenant dans ce domaine. Il convient dès lors de retenir que, en faisant les efforts que l'on pourrait attendre de lui, l'intimé serait à même de trouver un emploi à 100% dans le domaine de la restauration.

Selon le calculateur de salaire du Secrétariat d'Etat à l'économie de la Confédération suisse, cette activité serait susceptible de lui procurer un salaire net de 4'200 fr. brut par mois, correspondant à une rémunération nette de 3'500 fr. environ, selon le calculateur de charges sociales de la Fédération des entreprises romandes.

L'intimé ne pouvait ignorer, dès le dépôt de l'action alimentaire, que la question de sa capacité de gain se poserait. Cela étant, compte tenu du fait qu'il été en arrêt de travail pendant plusieurs mois en cours de procédure et qu'il n'a pas eu d'emploi fixe depuis plusieurs années, il convient de lui laisser un délai supplémentaire de quelques mois pour trouver un emploi dans le domaine de la restauration. Le revenu hypothétique de 3'500 fr. lui sera par conséquent imputé dès le 1er janvier 2025.

Les charges incompressibles de l'intimé sont de 2'800 fr. environ, de sorte que son solde disponible dès cette date sera de 700 fr. environ.

Les charges actuelles de l'enfant sont de 150 fr. arrondis, soit 400 fr. d'entretien OP, 13 fr. d'assurance maladie et 45 fr. de TPG, sous déduction de 311 fr. d'allocations familiales. Lorsque A______ aura atteint l'âge de 10 ans, le montant de l'entretien OP passera à 600 fr., portant ses charges incompressibles à 350 fr.

Il résulte de ce qui précède que les contributions requises par l'appelant, en 150 fr. jusqu'à l'âge de 10 ans, puis 350 fr. par la suite, sont adéquates et qu'il peut être fait droit à ses conclusions sur ce point, sous réserve du fait qu'il n'y a pas lieu à ce stade de limiter d'ores et déjà la durée de la contribution d'entretien pour la période postérieure à l'âge de 25 ans.

Il n'y a par contre pas lieu de modifier le chiffre 7 du dispositif du jugement querellé, puisque l'entretien convenable de l'enfant sera couvert dès le 1er janvier 2025, de sorte qu'il n'y aura plus de situation de déficit justifiant l'application de l'art. 301a let. c CPC.

4. Il ressort de ce qui précède que le dossier contient tous les éléments pertinents permettant à la Cour de statuer sur l'appel, étant précisé qu'il a pour l'essentiel été fait droit aux conclusions de l'appelant.

Il n'y a dès lors pas lieu de donner suite aux conclusions préalables de celui-ci, tendant à ce qu'un rapport soit établi par le SEASP.

5. Lorsque l'instance d'appel réforme en tout ou en partie le jugement entrepris, elle se prononce aussi sur les frais de première instance (art. 318 al. 3 CPC).

Les frais sont mis à la charge de la partie qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Le tribunal peut toutefois s'écarter des règles générales et répartir les frais selon sa libre appréciation, en particulier lorsque le litige relève du droit de la famille (art. 107 al. 1 let. c CPC).

En l'espèce, il n'y a pas lieu de modifier la fixation et la répartition des frais de première instance effectuée par le Tribunal.

Les frais judiciaires d'appel seront fixés à 1'000 fr. (art. 32 et 35 RTFMC) et mis à la charge des parties pour moitié chacune, compte tenu de la nature familiale du litige (art. 107 al. 1 let. c CPC). Dès lors que l'appelant plaide au bénéfice de l'assistance judiciaire, sa part en 500 fr. sera provisoirement laissée à la charge de l'Etat de Genève, qui pourra en demander le remboursement ultérieurement (art. 122 al. 1 let. b et 123 al. 1 CPC; art. 19 RAJ). L'intimé sera, quant à lui, condamné à verser 500 fr. à l'Etat de Genève, au titre des frais judiciaires.

Pour les mêmes motifs, l'appelant conservera à sa charge ses dépens d'appel, étant rappelé que l'intimé n'a pas répondu à l'appel.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A______ contre le jugement JTPI/2004/2024 rendu le 9 février 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/18974/2021.

Au fond :

Annule les chiffres 3 et 8 du dispositif de ce jugement et, statuant à nouveau :

Réserve à D______ un droit de visite sur A______, né le ______ 2018, lequel s'exercera du samedi 11h00 au dimanche 18h30, étant précisé que la prise en charge et le retour de l'enfant se feront au domicile de B______.

Dit que, dès que la situation le permettra, et en fonction de l'accord du curateur, le droit de visite sera élargi et s'exercera en outre du mardi soir après l'école au mercredi 18h30, une semaine sur deux, étant précisé que la prise en charge et le retour de l'enfant se feront au domicile de sa mère.

Condamne D______ à verser en mains de B______, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, à titre de contribution à l'entretien de A______, 150 fr. du 1er janvier 2025 jusqu'à ce que l'enfant atteigne l'âge de 10 ans et 350 fr. de 10 ans jusqu'à la majorité, voire au-delà en cas d'études sérieuses et suivies.

Confirme le jugement querellé pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'000 fr. et les met à la charge des parties à raison d'une moitié chacune.

Dit que la part des frais de A______, qui plaide au bénéfice de l'assistance juridique, est provisoirement supportée par l'Etat de Genève.


 

Condamne D______ à verser à l'Etat de Genève 500 fr. au titre des frais judiciaires d'appel.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.