Décisions | Chambre civile
ACJC/1070/2022 du 23.08.2022 sur JTPI/2247/2022 ( OO ) , MODIFIE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/27362/2018 ACJC/1070/2022 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile du MARDI 23 AOÛT 2022 |
Entre
Madame A______, domiciliée ______[GE], appelante d'un jugement rendu par la 5ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 23 février 2022, comparant par Me Alexander TROLLER, avocat, Lalive SA, rue de la Mairie 35, case postale 6569, 1211 Genève 6, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,
et
Monsieur B______, domicilié ______[GE], intimé, comparant par Me Romain CANONICA, avocat, Canonica Valticos de Preux & Ass., rue Pierre-Fatio 15, case postale 3782, 1211 Genève 3, en l'étude duquel il fait élection de domicile.
A. Par jugement JTPI/2247/2022 du 23 février 2022, reçu par A______ le 28 février 2022, le Tribunal de première instance a, statuant sur reddition de compte, ordonné à B______ de produire les documents et relevés attestant du financement, par l'époux, de la villa de C______ (chiffre 1.a. du dispositif), du financement des travaux réalisés en 2005 par D______ pour le toit de la villa de C______ (ch. 1.b.), de la valeur vénale de la villa de C______ (ch. 1.c.), du nombre et de la valeur de ses actions E______, valeur de réalisation, respectivement valeur au jour du jugement (ch. 1.d.), de tous ses comptes bancaires détenus à l'étranger et notamment le compte 1______ auprès de F______, valeur au 23 novembre 2018 (ch. 1.e.), de la titularité de la police d'assurance G______ ainsi que sa date de distribution (ch. 1.f.), de ses investissements auprès de H______ / I______ (ch. 1.g.), de ses investissements auprès de J______, notamment en lien avec les contrats n° 2______, 3______, 4______ et 5______ (ch. 1.h.), de l'avis de dépôt du 24 mai 2016 (ch. 1.i.), du décompte des frais de O______ et P______ en internat pour 2018/2019 et de leur financement (ch. 1.j.), du décompte de leur frais d'entretien depuis leur entrée à l'université (ch. 1.k.) et ses déclaration fiscale et avis de taxation 2018 (ch. 1.l.). ![endif]>![if>
Le Tribunal a également imparti à B______ un délai au 23 mars 2022 pour exécuter le chiffre 1 du dispositif du jugement (ch. 2), réparti les frais judiciaires – arrêtés à 1'000 fr. – à raison de la moitié à la charge de chacune des parties, condamnant par conséquent B______ et A______ à payer chacun 500 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire (ch. 3), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 4), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5) et réservé la suite de la procédure (ch. 6).
B. a. Par acte expédié le 10 mars 2022 au greffe de la Cour de justice, A______ appelle de ce jugement. Elle conclut, avec suite de frais judiciaires et dépens, à l'annulation de celui-ci en ce qu'il refuse ou omet d'ordonner à B______ de produire les documents et relevés attestant de son investissement dans les actions et options du K______ de L______ et du gain réalisé (conclusion v.), de l'encaissement par B______ de versements mensuels de M______, estimés à 5'050 fr. de janvier 2002 à décembre 2010, de l'utilisation par B______ de 78'000 EUR retirés du compte de A______ auprès du N______ (conclusion xii.), du décompte des frais de scolarité de O______ et P______ depuis leur entrée à l'université et des justificatifs de paiement connexes (conclusion xiii.), du décompte récapitulatif et des relevés détaillés mentionnés par B______ dans son complément à la demande unilatérale en divorce du 29 janvier 2021, section C, Ad. 16 (conclusion xiv.) et de la prétendue instruction de feu Q______ à B______ concernant l'utilisation des 20'000 GBP légués par testament à O______ et P______ (conclusion xvii.). Elle conclut également à ce que la Cour ordonne à B______, sous la menace de la peine prévue par l'art. 292 CP, de produire les documents et relevés listés ci-dessus et confirme le chiffre 1 du dispositif du jugement précité. ![endif]>![if>
Subsidiairement, elle conclut à ce que la Cour renvoie la cause au Tribunal pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
b. Dans sa réponse, B______ conclut à la confirmation du jugement entrepris sous suite de frais judiciaires et dépens.
Il produit de nouvelles pièces, à savoir un communiqué de presse du 6 décembre 2018 et un contrat de travail du 25 août 2013.
c. A______ n'ayant pas fait usage de son droit de réplique, les parties ont été informées par pli du greffe de la Cour du 12 mai 2022 de ce que la cause était gardée à juger.
C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier : ![endif]>![if>
a. Les époux B______, né le ______ 1967, et A______, née ______[nom de jeunne] le ______ 1964, tous deux de nationalité britannique, se sont mariés le ______ 1999 à R______ (Emirats Arabes Unis).
b. De cette union sont issus deux enfants, soit O______, né le ______ 1999 et P______, née le ______ 2001, aujourd'hui tous deux majeurs.
c. Le 23 novembre 2018, B______ a déposé une demande en divorce fondée sur la durée de séparation des époux. Il a notamment conclu à ce que le régime matrimonial des époux soit liquidé.
d. Lors de l'audience du 14 décembre 2020, A______ a déposé un courrier expédié au conseil de son époux le 28 juillet 2020 et par lequel elle sollicitait que lui soient communiqués, référence faite à l'article 170 CC, divers documents.
e. A l'issue de l'audience, le Tribunal a, notamment, imparti à B______ un délai pour compléter sa demande s'agissant du régime matrimonial et pour se déterminer sur la requête de renseignements du 28 juillet 2020.
f. Par acte du 29 janvier 2021, B______ a complété sa demande et s'est en outre prononcé sur la production des pièces sollicitées par son épouse. Il a notamment expliqué avoir investi 135'000 EUR en actions E______. Il n'avait conservé aucune documentation relative à l'investissement à court terme des 78'000 EUR appartenant à son épouse, montant qui avait au demeurant été employé pour l'entretien de la famille. Il réclamait à son épouse la moitié des frais d'entretien et de scolarité des enfants qu'il avait avancés. Il s'engageait à produire un décompte des frais de scolarité des enfants (internat) ainsi que de leurs frais d'entretien depuis leur entrée à l'université, soit l'année scolaire 2019/2020 (cf. section C, Ad. 14 de son mémoire). Il tenait également à disposition du Tribunal un décompte récapitulatif des dons d'argent reçus ainsi que les relevés détaillés des comptes ouverts aux noms des enfants du couple, sur lesquels les fonds qui leur étaient destinés avaient été versés (cf. section C, Ad. 16).
g. Dans sa réponse, A______ a conclu, à titre préalable, en dernier lieu et sur les points encore litigieux en appel, à ce que le Tribunal ordonne à B______, sous la menace de l'article 292 CP, de produire les documents et relevés attestant de son investissement dans les actions et options du K______ (ci-après : K______) de L______ et du gain réalisé, de ses comptes bancaires sur lesquels il avait reçu des versements mensuels de 5'050 fr. entre janvier 2002 et décembre 2010, de l'utilisation qu'il a fait des 78'000 EUR retirés du compte qu'elle détenait auprès du N______ et de l'instruction reçue de Q______ concernant l'utilisation du montant de 20'000 GBP légué à O______ et P______. Elle a conclu également à la production du décompte mentionné par B______ dans le complément à la demande en divorce du 29 janvier 2021, section C, Ad 14 et du décompte récapitulatif mentionné dans ledit complément à la demande en divorce, section C, Ad. 16.
Sur le fond, A______ a notamment conclu, en dernier lieu, à la condamnation de son époux à lui verser 569'962 fr. 60 à titre de liquidation du régime matrimonial, sous réserve d'amplification. Elle n'a pris aucune conclusion en versement d'une contribution à son entretien.
Dans la motivation de son écriture, elle a expliqué que les montants de certains acquêts de son époux lui étaient inconnus, raison pour laquelle elle sollicitait une reddition de compte qu'elle fondait sur l'article 170 CC. Elle a allégué notamment que B______ avait obtenu une prime d'arrivée sous forme d'actions et options du K______ de L______ devant permettre de financer partiellement son investissement dans les actions et options du K______. L______ détenant l'intégralité de la société E______, laquelle avait été vendue à la société S______ en août 2018, A______ était en droit de prétendre à la moitié dudit investissement et du gain réalisé à titre de remploi d'acquêts. Elle avait également connaissance du fait que son époux avait perçu 5'050 fr. par mois entre janvier 2002 et novembre 2013 sur un compte bancaire à l'étranger et non déclaré, de sorte qu'elle sollicitait la production des relevés dudit compte. A ce propos, elle a produit des échanges de courriels entre B______ et son employeur de 2013 faisant état de négociations et mentionnant un paiement "offshore" de 50'000 EUR par année. S'agissant des 78'000 EUR retirés par son époux de son propre compte auprès du N______, son époux les avait placés au N______. Elle les avait accumulés en majeure partie avant le mariage et ignorait la manière dont cette somme avait été dépensée. Elle sollicitait ainsi les justificatifs de leur utilisation. Elle a produit un échange de courriels des 21 et 23 août 2010 entre B______ et le second établissement bancaire à teneur duquel il sollicitait un placement plus rentable de l'argent "de son épouse". En ce qui concerne le legs de 20'000 GBP aux enfants, le testament de Q______ précisait que l'argent devait être utilisé principalement pour les études de O______ et P______, mais que la décision finale reviendrait à leurs parents. B______ ayant décidé seul de l'usage de cette somme, A______ sollicitait l'instruction qu'aurait reçu B______ de la part de son père à ce propos ainsi que le décompte récapitulatif des dons d'argent qu'il s'était engagé à produire (cf. section C, Ad. 16 du complément du 29 janvier 2021).
h. Les parties ont répliqué, respectivement dupliqué, persistant dans leurs conclusions, y compris sur reddition de compte.
B______ a encore déposé spontanément des déterminations sur les allégués complémentaires de son épouse le 3 novembre 2021. Il a notamment expliqué que les actions et options du K______ de L______ correspondaient aux actions E______ qu'il détenait. Elles ne constituaient pas une prime d'arrivée mais devaient être achetées. Ayant eu l'occasion de racheter les actions d'un directeur sortant, il n'avait pas eu besoin d'en acquérir de nouvelles. Ces actions n'avaient aucun rendement et n'avaient pas été vendues au jour du dépôt de la demande en divorce. Elles étaient, en tout état, déclarées aux impôts. S'agissant des 5'050 fr. mensuels, ils étaient versés sur son compte auprès de la banque T______, lequel était déclaré. Il a produit les relevés dont il disposait, à savoir ceux de 2011 à 2013. Concernant le legs aux enfants, il avait affecté l'argent aux études de ceux-ci conformément au souhait de leur grand-père. Il a produit un décompte des frais de scolarité et d'entretien des enfants pour l'année 2019/2020.
i. Lors de l'audience de débats d'instruction du 8 novembre 2021, les parties se sont déclarées d'accord pour que la cause soit gardée à juger sur reddition de compte à l'issue de l'audience. Elles ont dès lors plaidé sur ce point. B______ a conclu au rejet des conclusions de son épouse à l'exception de la conclusion relative au décompte des frais de scolarité et d'entretien de O______ et P______ depuis leur entrée à l'université, pour autant que ces éléments soient pertinents. A______ a persisté dans l'intégralité de ses conclusions.
Au terme de l'audience, le Tribunal a gardé la cause à juger sur reddition de compte.
D. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a tranché individuellement les demandes de renseignements de A______, partant du principe que celles-ci étaient fondées sur le droit matériel et non procédural. S'agissant des documents relatifs à l'encaissement des 5'050 fr. par mois entre janvier 2002 et décembre 2010 et aux 78'000 EUR retirés du compte de A______, le Tribunal les a rejetées, relevant, d'une part, que B______ contestait l'existence de comptes offshores et, d'autre part, qu'il avait produit les relevés en sa possession qu'il jugeait suffisants pour étayer ses allégations. Concernant les documents en lien avec le legs aux enfants, le premier juge a également rejeté cette conclusion, relevant que les sommes appartenaient à ceux-ci, lesquels étaient majeurs, de sorte que A______ ne disposait d'aucune légitimité à obtenir ces documents. Le Tribunal a admis la demande s'agissant de la production du décompte des frais d'entretien des enfants depuis leur entrée à l'université, B______ s'étant engagé à les produire et ne s'étant pas exécuté. Il a toutefois refusé d'ordonner la production du décompte des frais de scolarité des enfants nonobstant l'engagement précité, relevant que ce document n'était pas en lien avec des prétentions de l'épouse. Enfin, le Tribunal ne s'est prononcé ni sur la production des documents relatifs à l'investissement de B______ dans les actions et options du K______ de L______ et du gain réalisé ni sur le décompte récapitulatif mentionné par B______ dans son complément à la demande en divorce du 29 janvier 2021, section C, Ad. 16.![endif]>![if>
1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC), ainsi que les décisions de première instance sur les mesures provisionnelles (let. b). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (al. 2).
1.1.1 La requête en production de pièces peut se fonder sur le droit matériel (art. 170 CC) ou sur le droit de procédure (art. 150 ss CPC), ce que les circonstances du cas d'espèce permettent de déterminer, étant rappelé qu'une telle requête formée dans le cadre d'une procédure déjà pendante n'est pas forcément de nature procédurale (arrêts du Tribunal fédéral 5A_918/2014 du 17 juin 2015 consid. 1 et 5A_635/2013 du 28 juillet 2014 consid. 3.4, 4.1, 5.2 et 6.1; ACJC/450/2022 du 15 mars 2022 consid. 1.1.2 ; ACJC/1175/2017 du 21 septembre 2017 consid. 1.2; ACJC/727/2015 du 19 juin 2015 consid. 1.2).
Le droit aux renseignements et pièces fondé sur l'art. 170 al. 2 CC est un droit matériel que l'époux peut faire valoir préjudiciellement, soit dans sa demande en divorce, à l'appui d'une prétention au fond (liquidation du régime matrimonial ou fixation des contributions d'entretien après divorce), soit dans sa requête de mesures protectrices ou de mesures provisionnelles pour la durée de la procédure de divorce, à l'appui des mesures sollicitées. Il peut aussi être invoqué à titre principal, dans une procédure indépendante soumise à la procédure sommaire (art. 271 let. d CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_918/2014 précité consid. 4.2.1). Le juge doit se prononcer après un examen complet en fait et en droit et sa décision a autorité de chose jugée matérielle. La décision rendue est finale et la voie de l'appel est ouverte (arrêts du Tribunal fédéral 5A_918/2014 précité consid. 1 et 5A_635/2013 du 28 juillet 2014 consid. 3.4, 4.1, 5.2 et 6.1; ACJC/450/2022 du 15 mars 2022 consid. 1.1.2; ACJC/1175/2017 du 21 septembre 2017 consid. 1.2; ACJC/727/2015 du 19 juin 2015 consid. 1.2).
Ces décisions se distinguent des ordonnances de preuve relatives à la production de titres et à la fourniture de renseignements fondées sur le droit de procédure et régies par les art. 150 CPC, qui elles, ne peuvent en principe faire l'objet d'un recours que dans le cadre du recours principal dirigé contre la décision finale (arrêt du Tribunal fédéral 5A_421/2013 du 19 août 2013, publié in FamPra.ch 2013 p. 1032).
Le droit à la communication de renseignements et de pièces d'un époux contre son conjoint (art. 170 CC) est de nature pécuniaire mais le demandeur est toutefois dispensé d'en chiffrer exactement la valeur litigieuse (arrêt du Tribunal fédéral 5A_918/2014 précité consid. 1).
1.1.2 En l'espèce, devant le Tribunal, l'appelante a expressément invoqué l'application de l'art. 170 CC. Sa demande de production de pièces a été formulée préjudiciellement, en vue d'étayer sa prétention en liquidation du régime matrimonial. Nonobstant le fait qu'elle ait pu chiffrer un seuil à ce propos, il ressort de la motivation de ses écritures de première instance que les montants de certains acquêts ne sont pas déterminés. La demande de renseignement ne s'inscrit en outre pas dans le cadre de mesures provisionnelles de divorce et n'a pas non plus été formée dans une procédure indépendante. Elle a fait l'objet de débats d'instruction propres devant le Tribunal, après deux échanges d'écritures, et les parties ont plaidé sur cette question. Dans la décision entreprise, le Tribunal a procédé à un examen complet en fait et en droit des prétentions en renseignement des parties, au regard des exigences de l'art. 170 CC.
Dans ces conditions particulières, il faut admettre que la décision entreprise est effectivement une décision finale fondée sur le droit matériel, au sens des principes rappelés ci-dessus, et non une simple ordonnance de preuve, susceptible d'être modifiée ultérieurement (cf. art. 154 CPC).
Compte tenu de la nature et de l'étendue de la demande de renseignements en cause, ainsi que de l'importance alléguée du patrimoine de l'intimé, le seuil de la valeur litigieuse minimale est atteint. Rendue par voie de procédure ordinaire, applicable au procès en divorce, ladite décision peut en conséquence faire l'objet d'un appel dans un délai de trente jours dès sa notification.
1.2 Formé dans ce délai (cf. art. 142 al. 1 CPC) et selon la forme prescrite (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC), l'appel est en l'espèce recevable.
1.3 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). Elle ne traite en principe que les griefs soulevés dans la motivation écrite contre la décision de première instance (art. 311 al. 1 et 312 al. 1 CPC), à moins que les vices juridiques soient évidents (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêts du Tribunal fédéral 4A_380/2016 du 1er novembre 2016 consid. 3.3.3; 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5).
En l'espèce, l'appelante sollicite que l'ordre donné à l'intimé de produire les pièces et les renseignements requis soit prononcé sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP. Or, l'appelante ne motive pas la conclusion précitée dans son appel, de sorte qu'elle apparaît d'emblée irrecevable faute de motivation.
2. L'intimé produit de nouvelles pièces en appel.
2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas l'être devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).
2.2 En l'espèce, les pièces produites par l'intimé ne correspondent pas aux pièces qui lui ont été demandées sur reddition de compte, de sorte qu'il y a lieu d'examiner leur recevabilité dans le cadre de la procédure d'appel. La cause ayant été gardée à juger sur reddition de compte le 8 novembre 2021 et les pièces produites établies le 6 décembre 2018 et 25 août 2013, soit antérieurement à la date précitée, elles sont tardives et partant irrecevables.
3. L'appelante prend une conclusion nouvelle en appel tendant à la production des justificatifs de paiement en lien avec les frais de scolarité de O______ et P______ depuis leur entrée à l'université.
3.1 Le juge d'appel statue d'office sur la recevabilité des conclusions modifiées (art. 60 CPC; ATF 142 III 48).
Aux termes de l'art. 317 al. 2 CPC, la demande ne peut être modifiée que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 CPC sont remplies (let. a) et si la modification repose sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux (let. b). L'art. 227 al. 1 CPC autorise la modification de la demande si la prétention nouvelle ou modifiée relève de la même procédure et présente un lien de connexité avec la dernière prétention (let. a) ou, à défaut d'un tel lien, si la partie adverse consent à la modification de la demande (let. b).
3.2 En l'espèce, l'appelante requiert en appel, en sus du décompte des frais de scolarité des enfants depuis leur entrée à l'université, les justificatifs de paiement connexes, ce qu'elle n'avait pas réclamé en première instance alors qu'elle était en mesure de le faire. Tardive, cette modification des conclusions est irrecevable.
4. L'appelante reproche au Tribunal de ne pas avoir fait droit à l'intégralité de ses conclusions en reddition de compte à l'encontre de l'intimé.
4.1 Selon l'art. 170 CC, chaque époux peut demander à son conjoint qu'il le renseigne sur ses revenus, ses biens et ses dettes (al. 1). Le juge peut astreindre le conjoint du requérant ou des tiers à fournir les renseignements utiles et à produire les pièces nécessaires (al. 2).
4.1.1 Le devoir de renseignements peut être imposé par le juge pour autant que le requérant rende vraisemblable l'existence d'un intérêt digne de protection (ATF 132 III 291 consid. 4.2; Leuba/Meier/Papaux Van Delden, Droit du divorce, 2021, n. 2242; Deschenaux/Steinauer/Baddeley, Les effets du mariage, 3ème éd., 2017, n. 268).
Un intérêt digne de protection existe notamment lorsque des considérations tenant à l'entretien ou au partage du patrimoine de l'époux requis peuvent être invoquées, tel que le calcul des prétentions pécuniaires dans la liquidation du régime matrimonial (arrêt du Tribunal fédéral 5A_918/2014 du 17 juin 2015 consid. 4.2.2; Leuba/Meier/Papaux Van Delden, op. cit., n. 2242; Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 268).
Le droit de demander des renseignements sur la situation financière de son conjoint, au sens de l'art. 170 CC, n'est pas illimité. L'étendue de ce droit comprend tous les renseignements utiles et les pièces demandées nécessaires et adéquates pour permettre à l'époux requérant d'évaluer la situation et, le cas échéant, de faire valoir ses prétentions; elle s'apprécie selon les circonstances données et le but des informations requises (art. 170 al. 2 CC; ATF 118 II 27 consid. 3a p. 28 s.; arrêts du Tribunal fédéral 5A_819/2017 du 20 mars 2018 consid. 5.3.2; 5A_918/2014 précité consid. 4.2.3). Dans ce cadre, le juge procède à une pesée des intérêts, entre celui du requérant à obtenir les renseignements et celui de l'autre à ne pas les donner (ATF 136 I 178 consid. 5.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_819/2017 précité consid. 5.3.2; 5A_918/2014 précité consid. 4.2.3). Les demandes de renseignements chicanières ou manifestant une pure curiosité sont exclues (ATF 132 III 291 consid. 4.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_918/2014 précité consid. 4.2.2; Leuba/Meier/Papaux Van Delden, op. cit., n. 2242; Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 268).
L'époux sollicité doit démontrer que son refus est justifié car la demande de son conjoint est abusive. Les allégations des parties permettent au juge de déterminer le droit à l'information du demandeur, ainsi que l'étendue et le contenu des renseignements à fournir par le conjoint (Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 277). L'intérêt de l'époux demandeur à obtenir les informations prime, en principe, les motifs du débiteur récalcitrant; les arguments justifiant le refus de renseigner, de même que l'abus allégué doivent être appréciés avec sévérité par le juge (Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 278).
Selon l'art. 170 CC, les renseignements portent sur les revenus, biens et dettes. Par revenus, il faut entendre la rémunération que touche l'époux pour son travail (salaire, traitement, honoraires, commissions, tantièmes, etc.), sur le rendement de ses immeubles et de ses capitaux (carnets et comptes d'épargne ou de dépôt, actions, parts sociales, obligations, bons de caisse ou de jouissance, etc.) et sur le revenu de ses activités accessoires, de même que sur l'usage qu'il fait de ses revenus (Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 269a). On entend par biens, les avoirs de prévoyance et de libre passage, les immeubles, les avoirs acquis au moyen des revenus, les prêts consentis, l'argent, l'or ou les œuvres d'art déposés dans une banque ou chez un autre dépositaire, les participations dans des sociétés, le contenu de coffres, les trusts constitués ou alimentés pendant le mariage, les droits envers des assurances, etc. (Deschenaux/Steinauer/Baddeley, op. cit., n. 269b).
4.1.2 La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) le devoir pour le juge de motiver sa décision, afin que le justiciable puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et exercer son droit de recours à bon escient. Pour répondre à ces exigences, le juge doit mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 138 I 232 consid. 5.1). Ainsi, les parties doivent pouvoir connaître les éléments de fait et de droit retenus par le juge pour arriver au dispositif (Tappy, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 7 ad art. 238 CPC).
Une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 2 Cst. si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 133 III 235 consid. 5.2; 126 I 97 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 9C_3/2011 et 9C_51/2011 du 8 juin 2011 consid. 4.1).
Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation doit en principe entraîner l'annulation de la décision attaquée indépendamment des chances de succès du recourant sur le fond (ATF 127 V 431 consid. 3d/aa; arrêt du Tribunal fédéral 8C_104/2010 du 20 septembre 2010 consid. 3.2). Par exception au principe de la nature formelle du droit d'être entendu, la jurisprudence admet qu'une violation de ce dernier principe est considérée comme réparée lorsque l'intéressé jouit de la possibilité de s'exprimer librement devant une autorité de recours disposant du même pouvoir d'examen que l'autorité précédente et pouvant ainsi contrôler librement l'état de fait et les considérations juridiques de la décision attaquée (ATF 133 I 201 consid. 2.2; 129 I 129 consid. 2.2.3; 127 V 431 consid. 3d/aa; 126 V 130 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 8C_104/2010 précité ibidem).
4.2 En l'espèce, il y a lieu d'examiner séparément chaque demande de l'appelante refusée ou, cas échéant, omise par le Tribunal.
4.2.1 En ce qui concerne les documents en lien avec l'investissement par l'intimé dans les actions et options du K______ de L______ et du gain réalisé, le Tribunal n'a pas expressément statué sur cette demande. Cela dit, il a ordonné à l'intimé de produire tout document et relevé relatif au nombre et à la valeur des actions E______. L'intimé allègue que dites actions correspondent aux actions et options du K______ de L______, ce que l'appelante conteste. Chacune des parties ayant produit des pièces pour étayer sa thèse, il n'est pour l'instant pas clair de savoir si les actions et options du K______ sont effectivement celles de E______. Dans la mesure où il subsiste un doute à cet égard, il convient de retenir que l'appelante dispose d'un intérêt digne de protection à obtenir des clarifications et pièces complémentaires à ce propos. Ordre sera par conséquent donné à l'intimé de produire les documents requis par l'appelante.
4.2.2 S'agissant des comptes bancaires sur lesquels l'intimé aurait perçu des versements mensuels de 5'050 fr. entre janvier 2002 et décembre 2010, l'intimé a produit ses relevés du compte T______ entre janvier 2011 et décembre 2013 sur lequel il avait perçu ces montants. Il apparaît que les discussions entre l'intimé et son employeur à propos de paiements "offshore" sont intervenues en 2013, de sorte qu'il n'est pas rendu vraisemblable que l'intimé en aurait perçu durant la période dont la production des relevés est sollicitée par l'appelante. Par ailleurs, l'appelante ne prétendant pas à une contribution d'entretien en sa faveur, elle ne dispose pas d'un intérêt digne de protection à obtenir d'autres documents que ceux déjà versés au dossier par l'intimé. C'est dès lors à juste titre que le Tribunal a refusé d'ordonner la production des documents relatifs à l'encaissement par l'intimé de versements mensuels estimés à 5'050 fr. de janvier 2002 à décembre 2010.
4.2.3 En ce qui concerne les documents relatifs à l'utilisation des 78'000 EUR prétendument retirés par l'intimé du compte détenu par l'appelante auprès du N______, il n'est pas établi que cette somme ait été transférée sur un compte qui n'était pas au nom de l'appelante. Au contraire, l'intimé a indiqué dans son courriel au N______ du 23 août 2010 qu'il s'agissait de l'argent "de [s]on épouse". Il est donc probable que l'appelante ait accès à ces documents directement auprès de l'établissement bancaire, de sorte qu'elle ne dispose pas d'un intérêt digne de protection à les obtenir de la part de l'intimé. C'est donc à juste titre que le Tribunal a refusé d'ordonner à l'intimé de les produire.
4.2.4 Concernant l'instruction qu'aurait reçu l'intimé de la part du père de l'appelante à propos du legs de 20'000 GBP aux enfants des parties, c'est à juste titre que le Tribunal n'y a pas donné suite. En effet, l'appelante n'est pas la bénéficiaire du legs, de sorte que celle-ci n'a aucune prétention contre son époux qui serait en lien avec la liquidation du régime matrimonial, ce d'autant plus que les enfants sont majeurs. L'appelante ne dispose dès lors pas d'un intérêt digne de protection à l'obtention d'un quelconque renseignement à cet égard.
4.2.5 S'agissant du décompte des frais de scolarité des enfants depuis leur entrée à l'université (cf. section C, Ad. 14 du complément à la demande unilatérale en divorce du 29 janvier 2021), il apparaît que l'intimé a déjà produit ce document. En effet, les enfants sont entrés à l'université à la rentrée 2019/2020 et le décompte versé à la procédure par l'intimé fait état des frais d'entretien et de scolarité des enfants pour l'année scolaire précitée.
Par conséquent, par substitution de motifs, le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
4.2.6 Enfin, en ce qui concerne le décompte récapitulatif mentionné dans le complément à la demande en divorce, section C, Ad. 16, force est d'admettre que l'appelante dispose d'un intérêt digne de protection à l'obtention de ce décompte dans la mesure où il s'agit des dons en espèces versés par sa famille aux parties et aux enfants, et donc, potentiellement, de biens propres de l'appelante, qu'elle serait en droit de réclamer dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial. Par ailleurs, l'intimé a allégué tenir à disposition du Tribunal un tel décompte mais ne l'a pas versé au dossier.
Dès lors, il y a lieu de donner suite à la demande de renseignement de l'appelante à ce sujet. Un délai sera fixé à l'intimé au 30 septembre 2022 pour s'exécuter.
4.3 Compte tenu de ce qui précède, le jugement entrepris sera complété dans le sens précité.
5. 5.1 Lorsque l'autorité d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de la première instance (art. 318 al. 3 CPC).
Les parties ne critiquent pas la quotité des frais de première instance, laquelle est conforme au règlement fixant le tarif des frais en matière civile (RTFMC; E 1 05 10). La modification du jugement entrepris ne commande par ailleurs pas de revoir la répartition effectuée par le premier juge, compte tenu de la nature du litige et du fait qu'aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause (art. 106 al. 2 et 107 al. 1 let. c CPC). Le montant et la répartition des frais de première instance seront par conséquent confirmés.
5.2 Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 1'000 fr. (art. 30 et 35 RTFMC) et compensés avec l'avance de frais de même montant fournie par l'appelante, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). Pour des motifs d'équité liés à la nature et à l'issue du litige (art. 106 al. 2 et 107 al. 1 let. c CPC), ces frais seront répartis à parts égales entre les parties. L'intimé sera par conséquent condamné à verser 500 fr. à l'appelante à titre de remboursement des frais judiciaires d'appel (art. 111 al. 2 CPC).
Compte tenu de la nature familiale du litige, chaque partie conservera à sa charge ses propres dépens d'appel (art. 107 al. 1 let. c CPC).
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La Chambre civile :
A la forme :
Déclare recevable l'appel interjeté le 10 mars 2022 par A______ contre le jugement JTPI/2247/2022 rendu le 23 février 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/27362/2018.
Au fond :
Complète le chiffre 1 du dispositif du jugement entrepris en ce sens qu'ordre est donné à B______ de produire les documents et relevés attestant :
m. de l'investissement, par B______, dans les actions et options du K______ de L______ et du gain réalisé.
n. du décompte récapitulatif mentionné par B______ dans son complément à la demande unilatérale en divorce du 29 janvier 2021, section C, Ad. 16.
Fixe un délai à B______ au 30 septembre 2022 pour la production de ces pièces.
Confirme le jugement entrepris pour le surplus.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'000 fr., les répartit par moitié entre les parties et les compense avec l'avance de frais de même montant fournie par A______ qui reste acquise à l'Etat de Genève.
Condamne B______ à verser 500 fr. à A______ à titre de remboursement des frais judiciaires d'appel.
Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.
Siégeant :
Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.
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Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.