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Décisions | Sommaires

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C/5605/2025

ACJC/1476/2025 du 21.10.2025 sur JTPI/11554/2025 ( SML ) , RENVOYE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/5605/2025 ACJC/1476/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 21 OCTOBRE 2025

 

Entre

A______ SÀRL, sise ______ [GE], recourante contre un jugement rendu par la 23ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 15 septembre 2025,

et

B______ SARL, sise ______ [GE], intimée.


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/11554/2025 rendu le 15 septembre 2025, communiqué pour notification aux parties par plis recommandés du 19 septembre 2025, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure sommaire, a prononcé la mainlevée provisoire de l’opposition formée par A______ SÀRL au commandement de payer, poursuite n° 1______ (ch. 1 du dispositif) et statué sur les frais (ch 2 et 3).

B. Le 16 octobre 2025, A______ SÀRL a formé recours contre ce jugement, qu’elle dit avoir reçu le 7 octobre 2025, et en a sollicité l'annulation.

Elle a fait valoir que son associée gérante était en incapacité médicale totale du 1er au 30 septembre 2025 et qu’elle n’avait donc pas pu se présenter à l’audience du 15 septembre 2025, ni retirer le pli recommandé contenant la convocation à cette audience, lequel avait été retourné à l'expéditeur avec la mention « non réclamé ». Elle avait reçu le jugement par pli simple le 7 octobre 2025.

C. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier.

a. Le 7 mars 2025, B______ SÀRL a requis du Tribunal le prononcé de la mainlevée provisoire de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n°1______, notifié le 30 mai 2024 à A______ SÀRL.

b. Une citation à comparaître pour une audience devant se tenir le 15 septembre 2025 a été envoyée à A______ SÀRL le 13 août 2025.

Le pli, revenu "non réclamé", a été réexpédié à son destinataire par le Tribunal par courrier simple le 27 août 2025.

c. Lors de l'audience du Tribunal du 15 septembre 2025, B______ SÀRL a persisté dans ses conclusions. A______ SÀRL n’était ni présente, ni représentée.

Le même jour le Tribunal a rendu le jugement querellé.

EN DROIT

1. 1.1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 309 let. b ch. 7 et 319 let. a CPC; art. 174 al. 1, art. 194 al. 1 LP).

Le recours doit être interjeté dans le délai de dix jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 321 al. 1 et 2 CPC).

1.1.2 Les citations, les ordonnances et les décisions sont notifiées par envoi recommandé ou d'une autre manière contre accusé de réception
(art. 138 al. 1 CPC).

L'acte est réputé notifié, en cas d'envoi recommandé, lorsque celui-ci n'a pas été retiré : à l'expiration d'un délai de sept jours à compter de l'échec de la remise, si le destinataire devait s'attendre à recevoir la notification (art. 138 al. 3 let. a CPC).

La notification fictive d'un pli recommandé ne s'applique à l'échéance du délai de garde de sept jours que dans l'hypothèse où le destinataire devait, vraisemblablement, s'attendre à recevoir une communication d'une autorité
(arrêt du Tribunal fédéral
5A_454/2012 du 22 août 2012 consid. 4.2.1 et les références citées). Ce devoir existe dès que le destinataire est partie à une procédure ayant cours (ATF 130 III 396 consid. 1.2.3 = JdT 2005 II 87). Ainsi, c'est seulement à partir de la litispendance que naît une relation procédurale contraignant les parties à se comporter selon les règles de la bonne foi, c'est-à-dire, notamment, à veiller à ce que les actes officiels concernant la procédure puissent leur être notifiés (ATF 138 III 225 consid. 3.1 = JdT 2012 II 457).

En matière de droit des poursuites, le Tribunal fédéral a jugé que l'instance de mainlevée consécutive à l'interruption de la procédure de poursuite par l'effet d'une opposition constitue une nouvelle procédure. Le débiteur ne doit pas s'attendre, en raison de la seule notification d'un commandement de payer et de l'opposition qu'il a formée à cet égard, à une procédure de mainlevée ni à la notification de décisions dans ce contexte. C'est pourquoi la fiction de notification ne joue pas de rôle pour le premier envoi notifié au débiteur en relation avec la mainlevée (ATF 138 III 225 consid. 3.1 = JdT 2012 II 457; 130 III 396 consid. 1.2.3 = JdT 2005 II 87; arrêts du Tribunal fédéral 5A_710/2010 du 28 janvier 2011 consid. 3.1; 5A_552/2011 du 10 octobre 2011 consid. 2.1).

Les règles de la citation, permettant aux parties d'assister à l'audience, visent à garantir au débiteur son droit d'être entendu, institué par les art. 29 al. 2 Cst. et 53 CPC (ATF 131 I 185 consid. 2.1 et la jurisprudence citée; arrêt du Tribunal fédéral 5A_37/2010 du 21 avril 2010 consid. 3.1; BOHNET, in Code de procédure civile commenté, 2019, n. 34 ad art. 133 CPC).

Le droit d'être entendu accorde aux parties le droit de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à leur détriment, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves et de se déterminer à leur propos
(ATF 136 I 265 consid. 3.2; 135 II 286 consid. 5.1; 129 II 497 consid. 2.2).

L'atteinte causée par le défaut d'une citation valablement notifiée est d'une gravité telle qu'elle ne peut pas être réparée devant l'instance de recours; si cette atteinte est réalisée, la cause doit être renvoyée à l'autorité de première instance (ATF 138 III 225 consid. 3.3 et les références).

La nullité doit être constatée d'office, en tout temps et par l'ensemble des autorités étatiques; elle peut aussi être constatée en procédure de recours
(ATF 137 III 217 consid. 2.4.3; 132 II 342 consid. 2.1; 122 I 97 consid. 3a), y compris en dépit de l'irrecevabilité éventuelle du recours (arrêt du Tribunal fédéral 7B.20/2005 du 14 septembre 2005 consid. 1.3 non publié aux ATF 131 III 652).

1.2 En l'espèce, la partie recourante n'a pas retiré le pli recommandé contenant la citation à comparaître à l'audience du Tribunal. Aucun élément ne permet de retenir qu'elle en a eu connaissance. Il ne peut être opposé à la recourante qu'elle devait s'attendre à recevoir des communications de la part du Tribunal à la suite de l'opposition qu'elle avait formée, puisque la procédure de mainlevée d'opposition constitue une nouvelle procédure. La fiction de notification de
l'art. 138 al. 3 let. a CPC n'était dès lors pas applicable.

Le droit d'être entendue de la partie recourante a ainsi été violé puisqu'elle n'a pas été valablement convoquée à l'audience du 15 septembre 2025 et qu'elle a ainsi été privée de la possibilité de faire valoir ses arguments devant le Tribunal.

Cette violation ne peut pas être réparée dans le cadre du présent recours puisque la Cour ne dispose pas d'un pouvoir d'examen complet.

Il résulte de ce qui précède que la décision querellée doit être annulée, ce que la Cour peut constater d'entrée de cause (art. 253 CPC), sans préjudice de la recevabilité du recours, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'examiner plus avant la tardiveté éventuelle de celui-ci.

La cause sera dès lors retournée au Tribunal, qui a choisi la procédure orale (art. 253 CPC), pour qu'il cite valablement les parties à comparaître afin que la partie recourante puisse, le cas échéant, faire valoir ses arguments.

2. En l'espèce, compte tenu des circonstances, il sera renoncé à percevoir des frais judiciaires de recours (art. 7 RTFMC).

Il ne sera pas alloué de dépens, la recourante comparant en personne et n'ayant pas justifié avoir effectué de démarches justifiant leur allocation
(art. 95 al. 3 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Annule le jugement JTPI/11554/2025 rendu le 15 septembre 2025 par le Tribunal de première instance dans la cause C/5605/2025‑23 SML.

Renvoie la cause au Tribunal de première instance pour nouvelle instruction et décision.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires ni alloué de dépens de recours.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, présidente; Monsieur Jean REYMOND, Madame Stéphanie MUSY, juges; Madame Barbara NEVEUX, greffière.

 

La présidente :

Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ

 

La greffière :

Barbara NEVEUX

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.