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C/22909/2022

ACJC/549/2024 du 01.05.2024 sur JTPI/4419/2023 ( SML ) , JUGE

Normes : LP.80
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/22909/2022 ACJC/549/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MERCREDI 1ER MAI 2024

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, recourante contre un jugement rendu par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 13 avril 2023, représentée par Me Agrippino RENDA, avocat, route des Acacias 6, case postale 588, 1211 Genève 4,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, représenté par Me Daniel MEYER, avocat, rue Ferdinand-Hodler 7, 1207 Genève.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/4419/2023 du 13 avril 2023, reçu par A______ le 21 avril 2023, le Tribunal de première instance, statuant contradictoirement, a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée par cette dernière au commandement de payer, poursuite n° 1______ à concurrence de 3'740 fr. et 18'370 fr. avec intérêts à 5 % dès le 10 octobre 2022 (ch. 1 du dispositif), condamné A______ à payer à B______ 400 fr. au titre des frais judiciaires (ch. 2 et 3), ainsi que 915 fr. au titre de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

Le Tribunal a notamment retenu que B______ avait produit un arrêt de la Cour de justice ACJC/242/2023 du 10 février 2023, rendu sur mesures protectrices de l'union conjugale, qui constituait un titre exécutoire, justifiant le prononcé la mainlevée de l'opposition formée par A______ au commandement de payer précité.

B. a. Le 1er mai 2023, cette dernière a formé recours contre ce jugement, concluant à ce que la Cour l'annule et rejette la requête de mainlevée déposée par B______, avec suite de frais et dépens.

Elle a fait valoir comme unique grief que les parties avaient déposé un recours au Tribunal fédéral contre l'ACJC/242/2023 du 10 février 2023 et que l'effet suspensif avait été requis. Le jugement querellé était dès lors arbitraire "au sens des art. 9 et 29 de la Constitution fédérale".

Elle a produit des pièces nouvelles.

b. Le 30 juin 2023, B______ a conclu principalement au rejet du recours, avec suite de frais et dépens.

c. Par arrêt du 27 juillet 2023, la Cour a ordonné la suspension de la procédure de recours jusqu'à droit jugé par le Tribunal fédéral sur les recours formés contre l'arrêt de la Cour du 10 février 2023 (cause 5A_278/2023).

d. Par arrêt du 4 décembre 2023, rendu dans la cause précitée, le Tribunal fédéral a confirmé l'arrêt de la Cour susmentionné.

e. Par arrêt du 5 février 2024, la Cour a ordonné la reprise de la procédure et imparti aux parties un délai pour déposer des déterminations.

f. Le 14 mars 2024, A______ a conclu préalablement à ce que la Cour ordonne une comparution personnelle des parties, "afin de faire un point global de la situation". Sur le fond, elle a persisté dans ses précédentes conclusions et produit des pièces nouvelles.

Elle a fait valoir qu'elle avait versé différents montants à son époux au titre de contributions d'entretien entre le 17 avril 2023 et le 6 février 2024 et qu'elle ne lui devait plus rien.

g. Le 20 mars 2024, B______ a admis que deux versements, l'un de 4'020 fr. effectué le 17 avril 2023 et l'autre de 5'980 fr. daté du 6 février 2024 pouvaient être déduits de la créance poursuivie. Les autres versements étaient postérieurs au prononcé de la mainlevée et ne concernaient pas la présente procédure.

A______ restait ainsi lui devoir 12'110 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 10 octobre 2022 pour la période faisant l'objet de la poursuite litigieuse.

h. Les parties ont été informées le 23 avril 2024 de ce que la cause était gardée à juger par la Cour.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a. Par jugement du 10 mai 2022 (JTPI/6118/2022) rendu dans la cause C/2______/2020, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a condamné A______ à payer en mains de B______ 745 fr. par mois au titre de contribution à l'entretien de leur fils C______, pour la période du 1er décembre 2021 au 30 novembre 2022 (ch. 10 du dispositif) et 3'800 fr. par mois au titre de contribution à l'entretien de B______, pour la période du 1er décembre 2021 au 30 novembre 2022, puis 1'900 fr. dès le mois de décembre 2022 (ch. 11).

b. A______ a formé appel de ce jugement.

Par arrêt du 21 septembre 2022 (ACJC/1227/2022), la Cour de justice a admis la requête formée par A______ tendant à suspendre le caractère exécutoire des chiffres 10 et 11 du dispositif du jugement précité en tant qu'ils portaient sur la période du 1er décembre 2021 au 10 mai 2022.

c. Le 26 octobre 2022, B______ a fait notifier à A______ un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur 4'229 fr. 50 avec intérêts à 5 % dès le 15 juin 2022, correspondant à l'arriéré de contribution d'entretien en faveur de C______ pour la période du 11 mai 2022 au 31 octobre 2022 ainsi que sur 21'574 fr. avec intérêts à 5 % dès le 15 juin 2022, au titre de contribution à son entretien pour la même période.

A______ y a fait opposition.

d. Par requête expédiée le 14 novembre 2022, B______ a requis du Tribunal le prononcé de la mainlevée définitive de cette opposition.

e. Lors de l'audience du Tribunal du 6 mars 2023, B______ a produit un arrêt de la Cour de justice du 10 février 2023, rendu dans la cause C/2______/2020, notifié aux parties le 1er mars 2023, aux termes duquel les contributions d'entretien dues par A______ pour l'entretien de C______ étaient réduites à 680 fr. par mois du 1er décembre 2021 au 30 novembre 2022 et celles dues pour l'entretien de B______, à 3'340 fr. par mois du 1er décembre 2021 au 30 novembre 2022, puis à 1'300 fr. dès le mois de décembre 2022. Il a modifié ses conclusions en ce sens que la mainlevée de l'opposition était requise à hauteur de 3'740 fr. s'agissant de la contribution due à l'enfant et à hauteur 18'370 fr. s'agissant de la contribution due en sa faveur.

A______ s'est opposée à la mainlevée, exposant que l'arrêt de la Cour du 10 février 2023 n'était pas définitif et qu'un recours au Tribunal fédéral avec demande d'effet suspensif serait déposé.

Le Tribunal a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a et 309 let. b ch. 3 CPC). Selon l'art. 251 let. a CPC, la procédure sommaire est applicable aux décisions rendues en matière de mainlevée d'opposition.

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire (art. 251 let. a CPC).

Le recours a été formé dans le délai et la forme prévus par la loi, de sorte qu'il est recevable.

1.2 Le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par le recourant (Hohl/De Poret Bortolaso/Aguet, Procédure civile, Tome II, 2ème édition, Berne, 2010, n. 2307).

Par ailleurs, la maxime des débats s'applique et la preuve des faits allégués doit être apportée par titre (art. 55 al. 1, 255 let. a a contrario et 254 CPC). En outre, la maxime de disposition s'applique, de sorte que le tribunal ne peut accorder à une partie plus que ce qui est demandé (art. 58 al. 1 CPC).


2. Les parties ont produit plusieurs pièces nouvelles.

2.1 A teneur de l'art. 326 al. 1 CPC, les conclusions, allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours.

Les faits qui sont immédiatement connus du Tribunal, notamment parce qu'ils ressortent d'une autre procédure entre les mêmes parties, peuvent cependant être pris en considération même en l'absence d'allégation ou d'offre de preuve correspondante. Il s'agit en effet de faits notoires qui n'ont pas à être prouvés et ne peuvent pas être considérés comme nouveaux [de sorte qu'ils échappent à l'interdiction de l'art. 99 al. 1 LTF] (arrêt du Tribunal fédéral 5A_252/2021 du 8 novembre 2021 consid. 2.3; ATF 143 II 224 consid. 5.1).

2.2 En l'espèce, conformément à ce qui précède, il convient de retenir que l'arrêt rendu le 4 décembre 2023 par Tribunal fédéral dans la cause 5A_278/2023 opposant les mêmes parties est un fait notoire qui échappe à l'interdiction des nova et est dès lors recevable.

Les autres pièces nouvelles produites par les parties sont irrecevables, à l'instar des allégués qui s'y rapportent.

3. 3.1.1 Aux termes de l'art. 80 al. 1 LP, le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition.

Lorsque l’instance d’appel modifie le jugement querellé, l’arrêt rendu tranche le fond du litige et se substitue à la décision de première instance; c’est l’arrêt rendu par l’instance d’appel qui – dans les deux hypothèses visées à l’art. 318 al. 1 let. a et b CPC – qui devient le titre à exécuter (Jeandin, Commentaire romand, 2019, n. 3 art. 318 CPC).

En vertu de l'art. 81 al. 1 LP, lorsque la poursuite est fondée sur un jugement exécutoire rendu par un tribunal, le juge ordonne la mainlevée définitive de l'opposition, à moins que l'opposant ne prouve par titre que la dette a été éteinte ou qu'il a obtenu un sursis postérieurement au jugement, ou qu'il ne se prévale de la prescription.

3.1.2 Une décision acquiert force exécutoire au moment où elle entre en force de chose jugée, ce qui se produit au moment où elle ne peut plus être attaquée par une voie de recours qui, de par la loi, a un effet suspensif, ce qui n'est pas le cas du recours au Tribunal fédéral. Les décisions des autorités cantonales supérieures sont ainsi en principe exécutoires dès leur prononcé (Abbet/ Veuillet, La mainlevée de l'opposition, 2022, n. 49 et 66, ad art. 80 LP).

3.2 En l'espèce, le seul grief formé par la recourante dans son recours est le fait que le Tribunal se serait fondé sur une décision qui n'était pas exécutoire pour prononcer la mainlevée de l'opposition formée au commandement de payer litigieux.

Ce grief est infondé puisque, au moment du prononcé du jugement du 13 avril 2023, l'arrêt de la Cour du 10 février 2023 était exécutoire. En effet, le Tribunal fédéral n'avait pas encore conféré l'effet suspensif aux recours des parties formés contre cet arrêt.

En tout état de cause, l'arrêt de la Cour du 10 février 2023 est maintenant définitif et exécutoire, puisqu'il a été confirmé par arrêt du Tribunal fédéral du 4 décembre 2023.

Le recours est dès lors infondé.

Il sera par contre tenu compte du fait que l'intimé a réduit ses conclusions, en application de l'art. 58 al. 1 CPC.

Le jugement querellé sera donc modifié en ce sens que la mainlevée de l'opposition formée par la recourante au commandement de payer litigieux sera prononcée à hauteur de 12'110 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 10 octobre 2022.

4. Compte tenu de ce qui précède, il n'y a pas lieu d'ordonner de comparution personnelle des parties, cette mesure d'instruction n'étant pas susceptible d'avoir une influence sur l'issue du litige.

5. La modification, mineure, du jugement querellé, admise par l'intimé, ne justifie pas que le sort des frais et dépens fixés par le Tribunal soit revu (art. 318 al. 3 CPC).

La recourante, qui succombe pour l'essentiel, sera condamnée aux frais et dépens de la procédure de recours (art. 106 CPC).

Les frais judiciaires de recours seront arrêtés à 600 fr. et compensés avec l'avance du même montant versée par la recourante, acquise à l'Etat de Genève (art. 48 et 61 OELP; 111 CPC).

Une indemnité de 800 fr. sera allouée à l'intimé au titre de dépens de recours, débours et TVA inclus (art. 84, 85, 88, 89 et 90 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 1er mai 2023 par A______ contre le jugement JTPI/4419/2023 rendu le 13 avril 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/22909/2022–19 SML.

Au fond :

Annule le chiffre 1 du dispositif de ce jugement et, statuant à nouveau sur ce point :

Prononce la mainlevée définitive de l'opposition formée par A______ au commandement de payer, poursuite n° 1______, à concurrence de 12'110 fr. avec intérêts à 5 % dès le 10 octobre 2022.

Confirme le jugement querellé pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Condamne A______ à supporter les frais judiciaires de recours, arrêtés à 600 fr. et compensés avec l'avance versée, acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à B______ 800 fr. au titre de dépens de recours.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Monsieur Ivo BUETTI, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

 

 

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.