Décisions | Chambre pénale de recours
ACPR/879/2025 du 27.10.2025 ( MP ) , REJETE
| république et | canton de Genève | |
| POUVOIR JUDICIAIRE P/25656/2024 ACPR/879/2025 COUR DE JUSTICE Chambre pénale de recours Arrêt du lundi 27 octobre 2025 | ||
Entre
A______, actuellement détenu à la prison de Champ-Dollon, représenté par Me B______, avocat,
recourant,
contre l’ordonnance de refus d’exécution anticipée de mesure rendue le 22 septembre 2025 par le Ministère public,
et
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.
EN FAIT :
A. Par acte expédié le 3 octobre 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 22 septembre 2025, expédiée par pli simple, par laquelle le Ministère public a refusé l’exécution anticipée d’une mesure de placement dans un établissement pour jeunes adultes (art. 61 CP).
Le recourant conclut, sous suite d’indemnité en faveur de son avocat d’office, à l’annulation de l’ordonnance précitée et à ce que l’exécution anticipée de la mesure de placement dans un établissement pour jeunes adultes soit ordonnée.
B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :
a. A______, ressortissant irakien né le ______ 2002, a été arrêté le 7 novembre 2024 et placé en détention provisoire, régulièrement prolongée au 7 décembre 2025.
b. Il est prévenu de :
- brigandage aggravé (art. 140 CP), extorsion et chantage aggravé (art. 156 CP) et dommages à la propriété (art. 144 CP), pour avoir, à Genève, à tout le moins entre début octobre et le 7 novembre 2024, menacé C______ – qu'il avait rencontré via l'application D______ en utilisant l’identité "E______" – et son ami F______ de leur faire du mal et de tout casser chez eux, et violenté C______, dans le but que ceux-ci lui remettent de l'argent, notamment : en menaçant F______ avec un long couteau en le posant à plat sur son torse ; en assénant à C______ un coup de poing sur la tempe ; et en pointant une arme de poing sur C______ et F______, sur la tempe du second;
- infraction à l'art. 33 LArm pour avoir, à Genève, le 7 novembre 2024, à 15h00, lors de son interpellation, été porteur d'une arme de poing [de marque] G______ 6.35 chargée, mais non chambrée;
- infraction à l'art. 19a LStup pour avoir, à Genève, le 7 novembre 2024, à 15h00, lors de son interpellation, été porteur de 7.2 grammes de résine de cannabis destinée à sa consommation personnelle;
- vol (art. 139 CP), voire brigandage (art. 140 CP), pour avoir, à Genève, à une date indéterminée en novembre 2024, mis dans un coin, crié sur et insulté un individu non-identifié, avant de lui dérober sa sacoche, laquelle contenait une arme de poing, un téléphone, des airpods, et un porte-monnaie;
- brigandage aggravé (art. 140 CP), extorsion et chantage aggravé (art. 156 CP), séquestration et enlèvement (art. 183 ch. 1 CP), violation de domicile (art. 186 CP) et tentative d'utilisation frauduleuse d'un ordinateur (art. 147 cum 22 CP) pour avoir, à Genève, dans la nuit du 10 au 11 octobre 2024, de concert avec H______ et un individu non identifié, pénétré sans droit et contre la volonté de l'ayant-droit au domicile de I______, à J______ [GE], avant de menacer et violenter ce dernier, qui est handicapé physiquement, notamment à l'aide d'une machette de boucher et en saisissant son téléphone, afin de le forcer à rester dans sa chambre, et de lui dérober et de se faire remettre des objets et valeurs patrimoniales, en particulier une carte bancaire et un code avec lesquels ses comparses ont tenté d'effectuer des retraits bancaires au bancomat, sans succès, avant de menacer I______ de représailles s'il ne lui remettait pas une somme de CHF 4'000.- avant 17h00;
- infraction à l'art. 19 al. 1 LStup pour avoir, à Genève, le 26 avril 2024, tenté de remettre, par le biais d'un colis reçu à la prison de Champ-Dollon, 6.28 grammes de haschich à K______;
- dommages à la propriété (art. 144 CP) pour avoir, à Genève, le 5 décembre 2024, dans les locaux du Vieil hôtel de police sis boulevard Carl-Vogt 17-19, alors qu'il attendait dans la salle d'audition, endommagé le plafond en y inscrivant son surnom à l'aide d'une cigarette;
- contrainte sexuelle (art. 189 CP), viol (190 CP), encouragement à la prostitution (art. 195 CP), transmission indue d’un contenu non public à caractère sexuel (art. 197a CP), et exercice illicite de la prostitution (art. 199 CP cum 8ss LProst) pour avoir, à Genève :
o durant la nuit du 3 au 4 juillet 2024, dans sa chambre à son domicile au M______ [GE], après un rapport sexuel consenti, profité du sommeil de L______, puis de l'effet de surprise, de l'emprise qu'il avait sur ce dernier et de sa force physique pour lui caresser le corps, lui pénétrer l'anus avec un doigt et lui lécher l'anus sans son consentement,
o à tout le moins durant le mois de juillet 2024, poussé L______ à se prostituer, dans le but d’en tirer un avantage patrimonial, soit 50% des profits, notamment en le menaçant, et en profitant de l'emprise affective qu'il avait sur celui-ci et de la peur qu'il lui inspirait,
o entre une date indéterminée et le 7 novembre 2024, encouragé et/ou surveillé l'activité de prostitution de plusieurs jeunes hommes, notamment L______, en leur dictant les lieux où il devait pratiquer, les tarifs, et les pratiques, s'octroyant une grande partie des montants perçus, et sans s'être annoncé préalablement auprès de la police (BTPI),
o entre le 1er juillet et le 7 novembre 2024, date de son interpellation, transmis à des tiers, dont C______, des photographies à caractère sexuel que lui avait envoyées L______ à titre privé, sans le consentement de ce dernier;
- vol d'importance mineure (art. 139 CP cum art. 172ter CP), vol (art. 139 CP), violation de domicile (art. 186 CP), dommages à la propriété (art. 144 CP), empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 CP) et infractions aux articles 33 al. 1 LArm et 97 al. 1 let. b et d LCR pour avoir, à Genève, entre avril et décembre 2023, dérobé divers objets, détenu sans droit un spray de défense CS et une matraque télescopique, cambriolé l’école primaire de N______, brisé des vitres de voitures pour y dérober des objets et endommagé des rétroviseurs, empêché les policiers de procéder à son interpellation en prenant la fuite, ne pas avoir déposé son permis d'élève conducteur pour la catégorie B à l'Office cantonal des véhicules après son retrait décidé le 14 février 2023 pour une durée d'un mois et donné des renseignements inexacts à l'Office cantonal des véhicules.
c. S’agissant des faits au préjudice de C______ et F______, A______ a déclaré, lors de l’audience du 16 décembre 2024, qu’il tenait un couteau à la main lors des faits, mais ne l’avait pas mis sur la gorge d’une des victimes, ni ne l’avait mis à plat sur son torse, ni n’avait touché personne avec. Il avait un couteau "pour mettre des coups de pression" (PP C-239). Avec l’arme de poing, il avait certes visé les victimes, mais elle n’était pas chargée, ce que les victimes avaient, selon lui, vu (PP C-241).
Après avoir contesté les faits au préjudice de I______, A______ est revenu sur ses déclarations et a admis avoir été présent au domicile du précité lors du brigandage. Au cours de l’audience du 19 juin 2025, il a toutefois déclaré qu’un premier individu était entré dans l’appartement avec deux autres acolytes, et que lui-même était intervenu dans un second temps, lorsque le premier individu était parti. Le plaignant a persisté à déclarer qu’il n’y avait eu qu’un seul individu, armé d’un couteau, qui l’avait mis en joue et revêtait selon lui le rôle le leader (PP C-958 et 962). Lorsque le Procureur a fait remarquer à A______, au sujet de la vidéo prise du plaignant au moment des faits – que le prévenu a finalement reconnu avoir filmée –, qu’il avait changé quatre fois de version depuis le début de l’instruction et lui a demandé pourquoi la dernière serait la bonne, il a répondu : "Parce que là je me suis dit je vais passer à la vérité, tout simplement" (PP C-959).
A______ a écrit des lettres d’excuses aux trois victimes des brigandages.
Il conteste les faits dénoncés par L______. En substance, il n’avait jamais entretenu de relation intime avec le précité, qui s’était prostitué de son plein gré. Les photographies à caractère sexuel avaient été envoyées à des clients avec le consentement de l’intéressé.
d. À teneur de l’extrait du casier judiciaire suisse, A______ a été condamné à trois reprises pour vol simple et infraction à la LCR (28 août 2023), incendie intentionnel avec dommage de peu d’importance (11 octobre 2023) ainsi que délit contre la LStup et consommation de stupéfiants (1er novembre 2023).
e. Dans l’avant-dernière ordonnance de prolongation de la détention provisoire, du 4 juillet 2025, le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a retenu l’existence de charges suffisantes et graves, ainsi que des risques de collusion et réitération.
Le juge a retenu que le risque de collusion demeurait important, y compris sous la forme de représailles vis-à-vis du coprévenu H______ et des plaignants C______, F______, I______ et L______, malgré les audiences de confrontation et l'admission, par A______ des menaces à l’égard de I______, C______ et F______ au moyen d'un couteau et/ou d'une arme de poing. Les victimes étaient toutes les quatre des personnes fragiles et avaient très peur de lui. Il convenait par conséquent d'éviter que A______ ne puisse les contacter dans le but d'influencer leurs déclarations et ne compromette ainsi la recherche de la vérité. Le fait que le prévenu fut soupçonné d'avoir menacé les victimes à plusieurs reprises – menaces qu'il admettait en tous les cas en partie – renforçait l'intensité du risque de collusion.
Ce risque était également concret à l'égard de ses comparses et d'éventuels autres victimes non encore identifiées, étant précisé que A______ avait tenté de faire effacer les données de son compte Snapchat en demandant à K______, également détenu à Champ-Dollon, de faire passer un message à H______ lors d'un entretien téléphonique [du 27 novembre 2024].
f. Dans la dernière ordonnance de prolongation de la détention provisoire, du 6 octobre 2025, le TMC a retenu que le risque de collusion demeurait tangible pour les motifs développés dans la précédente ordonnance, du 4 juillet 2025.
Contrairement à ce que plaidait le prévenu, ce risque n'était aucunement amoindri par l'avancement de l'enquête, dès lors que cette dernière n'avait eu de cesse de permettre la découverte de nouvelles victimes et infractions. Ce risque était particulièrement concret vu la fragilité psychique des victimes et pourrait perdurer jusqu'à l'audience de jugement au vu des déclarations encore partiellement contradictoires des parties et la crainte que les plaignants avaient du prévenu. Les aveux partiels de ce dernier n'atténuaient pas le risque.
g. Dans l’expertise psychiatrique du 19 août 2025, les experts ont conclu que A______ souffrait d’un trouble modéré de la personnalité, d’une dépendance au cannabis, d’un trouble du jeu de hasard et d’un trouble du développement intellectuel léger. Il présentait un risque élevé de récidive d’actes de violence générale, d’actes contre les biens et d’infractions à la LStup. Un suivi psychiatrique et psychothérapeutique intégré ainsi que des mesures socio-professionnelles étaient susceptibles de diminuer le risque de récidive. Un placement en établissement pour jeunes adultes était la mesure indiquée.
h. Par lettres des 8 et 19 septembre 2025 de son défenseur, A______ a requis l’exécution anticipée de la mesure, soit un placement dans un établissement pour jeunes adultes (art. 61 CP). Il était pleinement disposé à bénéficier d’une telle prise en charge. On ne pouvait lui opposer un risque de récidive, car le placement préconisé était de nature à diminuer un tel risque. Au vu du stade très avancé de la procédure et des conclusions "limpides" des experts, rien ne s’opposait à un tel placement. Compte tenu des délais de placement particulièrement longs, relevés par l’expert, il apparaissait indispensable que le Service de réinsertion et du suivi pénal soit saisi du dossier dans les meilleurs délais.
C. Dans la décision querellée, le Ministère public a refusé l’exécution anticipée de la mesure, en raison du risque de collusion très important et concret, tel que retenu par le TMC, y compris sous la forme de représailles à l’égard des plaignants C______, F______, I______ et L______, malgré les audiences de confrontation. Bien que A______ ait admis d’avoir menacé les trois premiers au moyen d’un couteau et/ou d’une arme de poing, les victimes étaient toutes les quatre des personnes fragiles, qui avaient très peur de lui.
Le risque de collusion était également concret à l’égard du coprévenu H______ et de ses comparses restés non identifiés, pour les raisons retenues par le TMC dans son ordonnance du 4 juillet 2025.
Le risque de collusion perdurait à ce jour et le régime de l’exécution de mesure de placement dans un établissement pour jeunes adultes (art. 61 CP) ne permettait pas de le pallier.
D. a. Dans son recours, A______ conteste les conclusions du Ministère public. Il énumère les audiences de confrontation auxquelles il a participé, au cours desquelles il avait reconnu une large partie des faits reprochés, en particulier les brigandages au préjudice de I______, C______ et F______, ainsi que l’implication de son coprévenu H______. S’il contestait les faits dénoncés par L______, il avait été confronté au précité. En outre, son domicile avait été perquisitionné à deux reprises, son téléphone avait été saisi et analysé. Il s’était déterminé à de nombreuses reprises au sujet des preuves recueillies. Une mesure de séparation avait été mise en place à la prison de Champ-Dollon, le 13 décembre 2024 entre lui et H______ et rien n’indiquait qu’il aurait tenté de la contourner. Le précité avait été libéré le 1er avril 2025 avec des mesures de substitution jugées suffisantes pour pallier le risque de collusion.
Le raisonnement du Ministère public était gravement contraire aux principes tirés de la doctrine et de la jurisprudence relatifs à l’art. 236 al. 1 CPP, pour les raisons suivantes :
L’instruction était désormais à un stade très avancé, qui excluait un risque de collusion. Les actes d’enquête essentiels et principaux ayant été réalisés, il était invraisemblable qu’il puisse entraver la poursuite de l’instruction. Après onze mois de détention provisoire, retenir la possibilité d’une collusion avec d’éventuels comparses non identifiés relevait de la conjecture. De simples hypothèses ne pouvaient satisfaire aux exigences strictes posées par le droit fédéral en matière de risque de collusion.
Le risque de collusion était par principe exclu dès que le prévenu avait fait des aveux crédibles et probants, ce qui était son cas puisqu’il avait reconnu "une large partie" des faits reprochés, en particulier les brigandages, et avait présenté des excuses écrites aux plaignants. Il ne voyait pas dans quel but il exercerait des pressions sur ceux-ci, puisqu’il avait admis les faits. L’absence de reconnaissance des faits dénoncés par L______ n’était pas suffisante pour retenir un risque de collusion ni justifier son maintien en détention provisoire.
La crainte exprimée par les plaignants à son égard et la fragilité invoquée par le Ministère public ne pouvaient constituer un fondement suffisant pour établir un risque de collusion.
La conversation téléphonique du 27 novembre 2024 entre K______ et H______, lors de laquelle le premier avait demandé au second de désactiver son compte Snapchat [celui du recourant], en mentionnant un mot de passe, ne saurait être assimilée à une tentative d’exercer une pression sur un plaignant ou sur une autre partie à la procédure, ce d’autant que son téléphone était saisi et avait été analysé par la police.
Le Ministère public se contentait d’affirmer un risque abstrait, sans mentionner aucun acte déterminé qui justifierait le refus d’exécution anticipée de la mesure, ni identifier un acte d’instruction précis encore à réaliser qui serait exposé à une tentative d’entrave.
Les conclusions de l’expertise psychiatrique étaient limpides en concluant qu’il devait bénéficier d’un placement au sens de l’art. 61 CP.
b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.
EN DROIT :
1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 90 al. 2, 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP; M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER (éds), Strafprozessordnung - Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 2ème éd., Bâle 2014, n. 12 ad art. 393) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).
2. La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et
5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.
3. Le recourant reproche au Ministère public d'avoir refusé sa demande d'exécution anticipée de sa peine.
3.1. Selon l'art. 236 CPP, la direction de la procédure peut autoriser le prévenu à exécuter de manière anticipée une peine privative de liberté ou une mesure entraînant une privation de liberté si le stade de la procédure le permet et que le but de la détention provisoire ou de la détention pour des motifs de sûreté ne s’y oppose pas (al. 1). Dès l’entrée du prévenu dans l’établissement, l’exécution de la peine ou de la mesure commence et le prévenu est soumis au régime de l’exécution (al. 4).
La modification de l’alinéa 1 de l’art. 236 CPP est entrée en vigueur le 1er janvier 2024 (RO 2023 68). Il découle de sa nouvelle teneur que si le but de la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté est mis en danger par le régime d’exécution ordinaire, l’exécution anticipée de peine ne peut pas être autorisé. Cette condition doit être examinée au moment de l’autorisation et non au stade de la mise en œuvre de l’exécution proprement dite. L’exécution anticipée de peine ne peut ainsi être accordée que si elle peut être exécutée sans restriction selon le régime d’exécution ordinaire (arrêts du Tribunal fédéral 7B_1289/2024 du 30 janvier 2025 consid. 2.2.1 ; 7B_1075/2024 du 27 janvier 2025 consid. 3.5 destiné à la publication).
Selon cette nouvelle législation, l’exécution anticipée de peine est donc en principe exclue en cas de risque de collusion (arrêts du Tribunal fédéral 7B_1289/2024 du 30 précité consid. 2.2.1 ; 7B_1075/2024 précité consid. 3.5 destiné à la publication).
3.2. Selon la jurisprudence, des indices concrets d'un risque de collusion peuvent résulter en particulier du comportement adopté par le prévenu dans la procédure pénale, de ses caractéristiques personnelles, de sa position et de son rôle dans l'infraction, comme aussi de ses relations avec les personnes qui l'accusent. Entrent également en considération la nature et l'importance des déclarations, respectivement des moyens de preuves susceptibles d'être menacés, la gravité des infractions en cause et le stade de la procédure (ATF 137 IV 122 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 7B_729/2025 du 18 août 2025 consid. 2.2).
Plus l’instruction se trouve à un stade avancé et les faits sont établis avec précision, plus les exigences relatives à la preuve de l’existence d’un risque de collusion sont élevées (ATF 137 IV 122 consid. 4.2). Un examen particulier s’impose après la clôture de l’instruction, quand l’acte d’accusation a été rédigé, lorsque les débats du tribunal de première instance ont été fixés ou lorsque ceux-ci ont eu lieu. En effet, le motif de détention avant jugement au sens de l’art. 221 al. 1 let b CPP tend avant tout à assurer le bon déroulement de l’instruction. Il protège cependant également l’établissement des faits par les autorités judiciaires, notamment dans le cadre – certes limité – de l’administration des preuves durant les débats (ATF 132 I 21 consid. 3.2.2).
Or, l’administration immédiate des preuves qui, lors de la procédure préliminaire, ont été administrées en bonne et due forme doit également être réitérée durant les débats. La connaissance directe d’un moyen de preuve n’est nécessaire que lorsqu’elle est susceptible d’influer sur le sort de la procédure, ce qui est le cas si la force du moyen de preuve dépend de la manière décisive de l’impression suscitée au moment de sa présentation, notamment quand des déclarations constituent l’unique moyen de preuve – à défaut de tout autre indice – et qu’il existe une situation de "déclarations contre déclarations" (ATF 140 IV 196 consid. 4.4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_816/2024 du 22 juillet 2025 consid. 1.1).
3.3. En l’espèce, le recourant est prévenu de nombreuses infractions, qu’il a en partie reconnues. Bien qu’il considère être passé aux aveux, il reste toujours des zones d’ombre et des éléments contestés, comme l’usage qui a été fait des armes lors des faits dénoncés par C______ et F______, de sa présence ou non lors de la première partie du brigandage au préjudice de I______, ainsi que des actes sexuels dénoncés par L______, la prostitution forcée ou non de ce dernier et l’envoi à des tiers, avec ou sans son consentement, de photographies à caractère sexuel.
Or, ces éléments de preuve relèvent d’une situation de "déclarations contre déclarations", de sorte que, contrairement à ce que soutient le recourant, il existe un risque de collusion avec les plaignants. Ce risque est d’autant plus important que le recourant a modifié ses déclarations à plusieurs reprises durant l’instruction, faisant ainsi redouter que s’il venait à entrer en contact avec les plaignants, il ne leur fasse changer de version afin qu’elle coïncide avec la sienne ou qu’il parvienne à présenter une nouvelle déclaration commune avec les intéressés. Ce risque est d’autant plus à craindre que les plaignants paraissent fragiles, donc facilement manipulables. Il existe donc un risque bien concret que le recourant porte atteinte à la manifestation de la vérité.
Si l’instruction est désormais à un stade avancé, le risque de collusion n’est pas exclu pour autant, car il est important que les plaignants puissent déposer devant le Tribunal sans avoir subi de pressions de la part du recourant, sur les éléments contestés par ce dernier. Enfin, les infractions reprochées sont graves (notamment brigandages, extorsions, infractions contre l’intégrité sexuelle) et les contradictions ne concernent pas des éléments de détail.
C’est ainsi à bon droit que le Ministère public, se fondant sur les décisions du TMC, a retenu un risque de collusion. L’existence d’un tel risque faisant obstacle à l’exécution anticipée de la peine, conformément à l’art. 236 al. 1 CPP, peu importe que l’expertise psychiatrique ait conclu au bien-fondé d’une mesure en faveur du recourant, ni que les délais pour un placement dans un établissement pour jeunes adultes soient importants.
La décision querellée étant fondée pour les motifs qui précèdent, point n’est besoin d’examiner les griefs du recourant portant sur les autres éléments de la décision du Ministère public (risque de collusion avec des tiers non identifiés, demande par personnes interposées de l’effacement de son compte Snapchat).
4. Infondé, le recours doit être rejeté.
5. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 800.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).
6. Le défenseur d’office conclut à une indemnité de CHF 1'500.- correspondant à 10 heures de travail par l’avocate-stagiaire (CHF 110.-/h.) et 2 heures par un avocat associé (CHF 200.-/h.), pour un recours portant sur 14 pages dont 7 de discussion juridique. Au vu de l’issue du recours et de l’absence de complexité de la cause, l’indemnité sera ramenée à CHF 960.-, plus TVA à 8.1 %, correspondant à 6 heures de travail d’un avocat-stagiaire et 1 heure 30 d’un avocat associé.
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Rejette le recours.
Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 800.-.
Alloue à Me B______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 1'037.80, (TVA à 8.1% incluse) (art. 135 CPP).
Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son défenseur, et au Ministère public.
Siégeant :
Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Catherine GAVIN et
Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.
| Le greffier : Julien CASEYS |
| La présidente : Daniela CHIABUDINI |
Voie de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).
| P/25656/2024 | ÉTAT DE FRAIS |
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COUR DE JUSTICE
Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).
| Débours (art. 2) | | |
| - frais postaux | CHF | 10.00 |
| Émoluments généraux (art. 4) | | |
| - délivrance de copies (let. a) | CHF | |
| - délivrance de copies (let. b) | CHF | |
| - état de frais (let. h) | CHF | 75.00 |
| Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13) | | |
| - décision sur recours (let. c) | CHF | 800.00 |
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| Total | CHF | 885.00 |