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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/21216/2025

ACPR/878/2025 du 27.10.2025 sur OPMP/8507/2025 ( MP ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : PROFIL D'ADN;COMPÉTENCE RATIONE LOCI
Normes : CPP.257
Par ces motifs

république et

canton de Genève

 

POUVOIR JUDICIAIRE

 

P/21216/2025 ACPR/878/2025

 

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 27 octobre 2025

 

Entre

A______, représenté par Me Dina BAZARBACHI, avocate, Etude BAZARBACHI LAHLOU & ARCHINARD, rue Micheli-du-Crest 4, 1205 Genève,

recourant,

 

contre l’ordonnance d’établissement d’un profil d’ADN contenue dans l’ordonnance pénale rendue le 18 septembre 2025 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.

 


 

Vu :

-       l’ordonnance pénale du 18 septembre 2025, notifiée le jour même, par laquelle le Ministère public a déclaré A______ coupable de faux dans les certificats étrangers (art. 252 et 255 CP), d’entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI) et de délit contre la loi sur les stupéfiants (art. 19 al. 1 let. b et d LStup), et l’a condamné à une peine privative de liberté de 90 jours, sous déduction de deux jours de détention avant jugement, l’établissement du profil d’ADN du précité ayant également été ordonné à cette occasion (ch. 5 du dispositif);

-       le courrier du conseil de A______ daté du 25 septembre 2025, mais déposé le
29 suivant au greffe universel du Pouvoir judiciaire, par lequel l’intéressé a formé opposition contre cette ordonnance pénale;

-       le recours formé par A______, déposé le 29 septembre 2025 au greffe universel du Pouvoir judiciaire, contre la décision contenue dans l’ordonnance pénale du
18 septembre 2025, par laquelle le Ministère public a ordonné l’établissement de son profil d’ADN; 

-       l’ordonnance sur opposition tardive du 7 octobre 2025, par laquelle le Ministère public a transmis la procédure au Tribunal de police, tout en concluant à l’irrecevabilité de l’opposition formée par A______, au motif que celui-ci n’avait pas respecté le délai de dix jours prévu par l’art. 354 al. 1 CPP.

Attendu que :

-       dans son ordonnance pénale du 18 septembre 2025, le Ministère public a ordonné l’établissement du profil d’ADN de A______ sur le fondement de l’art. 257 CPP, considérant qu’il existait des indices concrets laissant présumer que celui-ci pourrait commettre d’autres crimes ou délits, en particulier en raison de ses antécédents;

-       dans son recours, A______ déplore que le Ministère public ait ordonné l'établissement de son profil d'ADN, ceci alors qu’il était fort probable qu’une telle mesure eût déjà été ordonnée en mai 2025 – au vu d’une précédente condamnation prononcée à cette date –, qui plus est sans mentionner les voies de recours. De telles mesures étaient ordonnées de manière systématique, à chaque interpellation, sur la base d’une Directive du Procureur général, sans tenir compte d'éventuels prélèvements passés. Si les profils d'ADN étaient certes soumis à effacement après un certain délai, il ne se justifiait guère, sous l'angle du principe de la proportionnalité, d'ordonner derechef à son égard une telle mesure, dont les frais devraient être mis à sa charge et à celle du contribuable genevois. Son profil d'ADN pourrait de toute façon être conservé pendant dix ans au minimum après l'entrée en force du jugement (art. 16 LADN), étant précisé qu'un nouveau délai de dix ans pouvait être prononcé par l'autorité de jugement après l'expiration du délai d'effacement (art. 17 LADN). Il ne se justifiait ainsi aucunement d'ordonner un nouvel établissement de son profil d'ADN, ce d'autant que celui-ci ne changeait pas "au cours de la vie d'un être humain". Une telle mesure était "arbitraire", "inutile" et portait atteinte à sa liberté personnelle et à son droit d'être protégé contre l'emploi abusif des données le concernant (art. 8 CEDH et 13 al. 2 Cst.). L'ordonnance pénale du 18 septembre 2025 omettait en outre de préciser le délai d'effacement du profil d'ADN, en violation de l'art. 353 al. 1 let. fbis CPP, rendant ainsi lettre morte
l'art. 17 LADN.

Considérant que :

-       la Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés
(art. 90 al. 2, 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent;

-       le recours a été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 90 al. 2,
385 al. 1 et 396 al. 1 CPP) et émane du prévenu, partie à la procédure
(art. 104 al. 1 let. a CPP). Reste à déterminer s’il concerne une décision sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 CPP);

-       selon l’art. 393 al. 1 let. a CPP, le recours est notamment recevable contre les ordonnances et les autres actes de procédure du ministère public ayant pour objet le prélèvement d’échantillons et l’établissement d’un profil d’ADN (art. 255 al. 1 CPP), pour autant qu’ils ne relèvent pas de la compétence du tribunal des mesures de contrainte, comme dans le cas d’enquêtes de grande envergure (art. 256 CPP), vu la procédure d’autorisation devant cette autorité, ou de celle du tribunal, comme dans le cas de personnes condamnées (art. 257 CPP), auxquels cas le recours est irrecevable (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER (éds), Strafprozessordnung / Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 3ème éd., Bâle 2023, n. 10 ad art. 393 ; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 15 ad art. 393);

-       le recours est également irrecevable contre les ordonnances ou les autres actes de procédure du ministère public ayant pour objet, notamment l’ordonnance pénale
(art. 352 CPP), contre laquelle seule l’opposition (art. 354 al. 1 CPP) est recevable, ou encore le maintien d’une ordonnance pénale frappée d’opposition
(art. 355 al. 3 CPP) et la saisine subséquente du tribunal de première instance, l’ordonnance pénale tenant alors lieu d’acte d’accusation (art. 356 al. 1 CPP), lequel n’est pas sujet à recours (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., n. 17 ad art. 393);

-       conformément à l’art. 257 CPP, le tribunal peut, dans le jugement qu’il rend, ordonner le prélèvement d’un échantillon et l’établissement d’un profil d’ADN sur une personne condamnée pour un crime ou un délit si des indices concrets laissent présumer qu’elle pourrait commettre d’autres crimes ou délits. La compétence pour ordonner l’établissement d’un profil d’ADN sur la base de l’art. 257 CPP appartient au tribunal, respectivement au ministère public dans la procédure de l’ordonnance pénale. Le prononcé y relatif, en tant qu’effet accessoire du jugement, doit figurer dans le dispositif de celui-ci (art. 81 al. 4 let. e CPP) (M. NIGGLI / M. HEER /
H. WIPRÄCHTIGER (éds), Strafprozessordnung / Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 3ème éd., Bâle 2023, n. 5 ad art. 257; FF 2019 6405 ss);

-       selon l’art. 352 al. 1 CPP, le ministère public rend une ordonnance pénale si, durant la procédure préliminaire, le prévenu a admis les faits ou que ceux-ci sont établis et que, incluant une éventuelle révocation d’un sursis ou d’une libération conditionnelle, il estime suffisante l’une des peines suivantes : une amende (let. a), une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus (let. b) ou une peine privative de liberté de six mois au plus (let. d);

-       à teneur de l’art. 354 al. 1 let. a CPP, le prévenu peut former opposition contre l’ordonnance pénale devant le ministère public, par écrit et dans les dix jours;

-       conformément à l’art. 355 al. 1 CPP, en cas d’opposition, le ministère public administre les autres preuves nécessaires au jugement de l’opposition (al. 1). L’alinéa 3 de cette disposition prévoit qu’après l’administration des preuves, le ministère public décide de maintenir l’ordonnance pénale (let. a), de classer la procédure (let. b), de rendre une nouvelle ordonnance pénale (let. c), ou de porter l’accusation devant le tribunal de première instance (let. d);

-       selon l’art. 356 CPP, lorsqu’il décide de maintenir l’ordonnance pénale, le ministère public transmet sans retard le dossier au tribunal de première instance en vue des débats. L’ordonnance pénale tient lieu d’acte d’accusation (al. 1). Le tribunal de première instance statue sur la validité de l’ordonnance pénale et de l’opposition
(al. 2);

-       en l’espèce, dans la mesure où le Ministère public a ordonné l’établissement du profil d’ADN de A______ sur le fondement, non pas de l’art. 255 CPP, mais de
l’art. 257 CPP, c’est à juste titre qu’il l’a fait dans le cadre de l’ordonnance pénale prononcée à l’encontre de ce dernier, et non pas dans le cadre d’une décision séparée sujette à recours. Par voie de conséquence, seule la voie de l’opposition est ouverte contre l’ordre de prélèvement décidé dans le cadre de l’ordonnance pénale précitée;

-       partant, le recours de A______ sera déclaré irrecevable;

-       le recourant, qui succombe, supportera les frais de la procédure envers l'État, arrêtés à CHF 500.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Déclare le recours irrecevable.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 500.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant soit pour lui, son conseil, et au Ministère public.

Le communique pour information au Tribunal de police.

 

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente ; Madame Catherine GAVIN et Monsieur Vincent DELALOYE, juges ; Monsieur Sandro COLUNI, greffier.

 

Le greffier :

 

Sandro COLUNI

 

La présidente :

 

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/21216/2025

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

415.00

Total

CHF

500.00