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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/25055/2023

ACPR/782/2024 du 29.10.2024 sur ONMMP/1776/2024 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;DOMMAGES À LA PROPRIÉTÉ(DROIT PÉNAL);VOL(DROIT PÉNAL)
Normes : CPP.310; CP.139; CP.144

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/25055/2023 ACPR/782/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 29 octobre 2024

 

Entre

A______, domicilié ______, agissant en personne,

recourant,

 

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 23 avril 2024 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte déposé le 13 mai 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 23 avril 2024, notifiée le 3 mai 2024, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte contre B______.

Sans prendre de conclusions formelles, le recourant s'oppose à cette ordonnance, considérant que la mise en cause s'était bel et bien rendue coupable de vol et de dommages à la propriété, et demande qu'il soit procédé à l'audition de témoins qu'il énumère.

b. Le recourant a été dispensé de verser les sûretés (art. 383 CPP).

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. À l'appui de sa plainte du 16 octobre 2023, complétée le 18 suivant, A______ a exposé qu'il avait, du 15 juin 2020 au 1er juillet 2023, sous-loué à B______ l'appartement sis rue 1______ no. ______, à C______ [GE], qu'il occupait avec son épouse.

Au moment de reprendre possession de son appartement, le 1er juillet 2023, il avait constaté que l'appartement se trouvait dans un état déplorable et qu'il manquait de nombreux meubles. Les rideaux avaient été enlevés et remplacés par ceux de B______. Un grand coquelicot, que son épouse avait peint sur un des murs de l'appartement, avait par ailleurs été arraché et les murs grossièrement repeints. Il avait par ailleurs dû jeter le frigo, la cuisinière, le congélateur ainsi que la machine à laver le linge, lesquels se trouvaient dans un état "épouvantable".

Il a transmis des photographies prises par ses soins, avant et après la sous-location, ainsi que l’état des lieux de sortie constaté par un huissier judiciaire le 5 juillet 2023. Aucun état des lieux d’entrée n'avait été effectué avec B______ dans la mesure où cette dernière avait indiqué que tout était en ordre.

b. Entendue par la police en qualité de prévenue le 3 novembre 2023, B______ a contesté les faits reprochés. Elle avait demandé en vain un état des lieux à son arrivée. A______ lui avait dit qu’elle pourrait refaire la peinture et changer les meubles si elle le souhaitait, ce qu'elle avait donc fait. Invitée à se déterminer sur le rapport de l'huissier, elle a reconnu avoir causé, par négligence, la trace de brûlure constatée sur une des photos. Il se pouvait également que ses enfants fussent à l'origine des traces sur le parquet, lequel se trouvait toutefois dans un état fort délabré au moment de l'aménagement. En outre, de nombreux dégâts étaient déjà présents au moment de son entrée dans l'appartement et certains objets présentaient des défauts, notamment le frigo et le lave-vaisselle. Elle n'avait pas volé de meubles. Deux personnes avaient, avant elle, sous-loué l'appartement et les meubles en question avaient été soit jetés, soit donnés à des amis du plaignant. Il n'y avait pas eu d'état des lieux lors de la restitution de l'appartement.

c. Il ressort du rapport de la police du 9 novembre 2023 qu'une perquisition du nouvel appartement de B______ a eu lieu le 3 précédent. Aucun meuble signalé par A______ comme volé n’a été retrouvé à cette occasion.

C. Dans sa décision querellée, le Ministère public relève que les versions des parties sont contradictoires et qu'il n'existe aucun élément objectif au dossier, tel qu’un état des lieux d’entrée et un inventaire de l’appartement au début de la sous-location, de sorte qu'il ne pouvait être tenu pour établi que B______ avait dérobé des meubles et des objets. En outre, les faits s'étaient déroulés dans le cadre d'un litige civil et il n'appartenait pas à l'autorité pénale d'intervenir, les parties étant à cet égard invitées à faire valoir leurs éventuelles prétentions selon les voies de droit prévues par le droit civil.

D. a. À l'appui de son recours, A______ persiste dans sa plainte. Selon lui, le Ministère public pouvait procéder à d'autres actes d'instruction, tels que l'audition de D______ ou celles des voisines et amies proches de la mise en cause, ainsi que de leurs époux respectifs, lesquels seraient susceptibles de fournir des renseignements utiles sur l'état de l'appartement ou encore la présence de tel ou tel meuble au moment où B______ en avait pris possession le 15 juin 2020. Il produit divers documents, notamment une copie du contrat de sous-location, une lettre expliquant les circonstances de la sous-location et des photos de "l'état des lieux d'entrée", lesquelles seraient aptes à démontrer la propreté de son appartement au moment de l'entrée en jouissance, d'une part, et la soustraction par B______ de certains des meubles qui s'y trouvaient, d'autre part.

b. La cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du plaignant qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

1.2. Les pièces nouvelles produites devant la juridiction de céans sont également recevables, la jurisprudence admettant la production de faits et de moyens de preuve nouveaux en deuxième instance (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2022 du 17 novembre 2022 consid. 2.2).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant fait grief au Ministère public de ne pas être entré en matière sur les vols et dommages à la propriété dénoncés alors que l'accomplissement de certains actes d'instruction aurait selon lui permis d'apporter la preuve de leur commission.

3.1.       À teneur de l'art. 310 al. 1 CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis (let. a), qu'il existe des empêchements de procéder (let. b) ou que les conditions mentionnées à l'art. 8 CPP imposent de renoncer à l'ouverture d'une poursuite pénale (let. c).

Au moment de statuer sur l'ouverture éventuelle de l'instruction, le ministère public doit examiner si les conditions d'exercice de l'action publique sont réunies, c'est-à-dire si les faits qui sont portés à sa connaissance sont constitutifs d'une infraction pénale et si la poursuite est recevable. Il suffit que l'un des éléments constitutifs de l'infraction ne soit manifestement pas réalisé pour que la non-entrée en matière se justifie (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 8 ad art. 310).

Des motifs de fait peuvent justifier la non-entrée en matière. Il s'agit des cas où la preuve d'une infraction, soit de la réalisation en fait de ses éléments constitutifs, n'est pas apportée par les pièces dont dispose le ministère public. Il faut que l'insuffisance de charges soit manifeste. De plus, le ministère public doit examiner si une enquête, sous une forme ou sous une autre, serait en mesure d'apporter des éléments susceptibles de renforcer les charges contre la personne visée. Ce n'est que si aucun acte d'enquête ne paraît pouvoir amener des éléments susceptibles de renforcer les charges contre la personne visée que le ministère public peut rendre une ordonnance de non-entrée en matière. En cas de doute sur la possibilité d'apporter ultérieurement la preuve des faits en question, la non-entrée en matière est exclue (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 9 ad art. 310).

Une non-entrée en matière s'impose par ailleurs lorsque le litige est de nature purement civile (ATF 137 IV 285 consid. 2.3 p. 287).

3.2.       L'art. 139 ch. 1 CP punit du chef de vol quiconque, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se l’approprier.

3.3.       L'art. 144 al. 1 CP réprime le comportement de quiconque, sans droit, endommage, détruit ou met hors d’usage une chose appartenant à autrui ou frappée d’un droit d’usage ou d’usufruit au bénéfice d’autrui.

Sur le plan subjectif, la réalisation de cette infraction requiert l'intention de son auteur. En d'autres termes, ce dernier doit avoir la conscience et la volonté, au moins sous la forme du dol éventuel, de s'en prendre à la chose d'autrui et d'en changer l'état. Les dommages à la propriété, lorsque commis par négligence, ne sont ainsi pas punissables (ATF 116 IV 143, consid. 2.b; ATF 115 IV 26, consid. 3.a).

L'art. 267 al. 1 du code des obligations (CO) impose au locataire de restituer, en fin de bail, la chose dans l’état qui résulte d’un usage conforme au contrat.

3.4.1. S'agissant tout d'abord d'un éventuel vol commis par B______, aucun élément au dossier ne permet d'accréditer une telle thèse ou à tout le moins de fonder des soupçons suffisants justifiant une mise en accusation. En effet, la précitée conteste avoir emporté le moindre meuble, expliquant que deux personnes avaient sous-loué l'appartement avant elle et que les meubles en question avaient été soit jetés, soit donnés à des amis du recourant. Aucun meuble appartenant à celui-ci n'a par ailleurs été retrouvé lors de la perquisition du 3 novembre 2023 dans le nouveau domicile de la mise en cause. À cela s'ajoute qu'aucun état des lieux en bonne et due forme n'a été établi, que ce soit lors de l'entrée en jouissance ou lors de la restitution de l'appartement, ce qui aurait permis de constater l'éventuelle absence de certains meubles et objets.

Les photos produites par le recourant ne sauraient remplacer un état des lieux d'entrée en bonne et due forme. Elles ne sont pas datées et, l'eussent-elles été, qu'on ne pourrait en tirer la moindre conclusion quant à un éventuel vol, sa date de survenance et l'identité de son auteur.

Enfin, on ne voit pas en quoi – le recourant ne l'établit aucunement – l'audition des personnes citées serait utile, dès lors que celles-ci pourraient tout au plus indiquer que tel ou tel meuble se trouvait dans l'appartement à un moment donné, mais non d'affirmer qu'il aurait disparu alors que la mise en cause y habitait et encore moins qu'une telle disparition serait le fait de celle-ci.

Au vu de ce qui précède, c'est à bon droit que le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur cette infraction, faute d'éléments probants et de prévention pénale suffisante à l'endroit de B______.

3.4.2. S'agissant ensuite des dommages dénoncés, si la mise en cause a certes reconnu avoir pu causer des dégâts dans l'appartement sous-loué, aucun élément du dossier ne permet de tenir pour établi qu'elle l'aurait fait intentionnellement, y compris sous la forme du dol éventuel, étant à cet égard rappelé que la négligence n'est pas punissable.

Par ailleurs et comme l'a relevé le Ministère public, le litige porte sur l'exécution d'un contrat, en l'occurrence l'exécution d'un contrat de bail à loyer, et plus particulièrement sur la restitution de l'objet loué à l'échéance du bail dans un état qui résulte d'un usage conforme au contrat (art. 267 al. 1 CO), soit un litige de nature purement civile.

Il est ainsi parfaitement loisible au recourant de saisir les autorités civiles compétentes si elle l'estime nécessaire et ne l'a pas déjà fait.

En conclusion, dans la mesure où l'un des éléments constitutifs de l'infraction de dommages à la propriété n'est manifestement pas réalisé et au vu de la nature essentiellement civile du litige, c'est à bon droit, là encore, que le Ministère public a considéré qu'une non-entrée en matière s'imposait également.

4.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée et, partant, le recours rejeté.

5.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 800.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 800.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant et au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Madame Françoise SAILLEN AGAD et Monsieur Vincent DELALOYE, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/25055/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

800.00

Total

CHF

885.00