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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/11717/2024

ACPR/582/2024 du 07.08.2024 ( JMI ) , REJETE

Descripteurs : PROFIL D'ADN;TRIBUNAL DES MINEURS;REPRÉSENTATION LÉGALE
Normes : CPP.255.al1.leta; PPMin.38; PPMin.39

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/11717/2024 ACPR/582/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 7 août 2024

 

Entre

A______, domiciliée ______, France, agissant en personne,

recourante,

contre l'ordonnance d'établissement d'un profil ADN rendue le 23 mai 2024 par le Juge des mineurs,

et

LE JUGE DES MINEURS, rue des Chaudronniers 7, 1204 Genève, case postale 3686, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié à une date inconnue, parvenu au Tribunal des mineurs le 18 juin 2024, qui l'a transmis à la Chambre de céans, A______ recourt contre l'ordonnance du 23 mai 2024, notifiée le 5 juin 2024, par laquelle le Juge des mineurs a ordonné l'établissement du profil d'ADN de son fils, B______.

La recourante demande l'annulation de cette décision.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 13 mai 2024 vers 01h30, la police a été requise à la rue 1______ no. ______ à C______ [GE] pour un individu qui venait de forcer la porte d'entrée d'un parking privé avec un tournevis et prenait des photos d'un deux-roues. À la vue du requérant, l'individu avait quitté les lieux et était monté dans un véhicule utilitaire foncé se trouvant non loin du parking, côté conducteur. À l'arrivée de la patrouille de police, le fourgon en question, de marque D______/2______ [modèle], était stationné à l'entrée d'un parking extérieur à la route 3______ no. ______ à E______ [GE]. Le conducteur, qui n'avait de cesse de regarder dans ses rétroviseurs et gesticuler, avait lors tenté de quitter les lieux au volant du fourgon mais, dans sa manœuvre, avait percuté un lampadaire à l'arrière puis un arbre à l'avant, avant de prendre la fuite à pied, sans obtempérer aux sommations des policiers lui demandant de s'arrêter. Il avait été interpellé par la suite par la brigade des chiens, étant précisé qu'un autre individu avait été vu par la police en train de prendre la fuite mais n'avait pas pu être arrêté. Une casquette et une veste avaient été retrouvées par le chien à deux endroits différents lors de la fuite des individus.

Des prélèvements avaient été effectués sur et dans le fourgon, immatriculé dans le canton de Vaud mais portant sur le pare-brise un certificat d'assurance avec l'inscription d'une plaque d'immatriculation française 4______. Il était en outre équipé de matériel de type pince monseigneur, pied de biche et sangle d'attache.

Après vérifications, les plaques d'immatriculation vaudoises apposées sur le fourgon avaient été volées, tout comme le fourgon.

Le motocycle stationné dans le parking extérieur de la route 3______ avait le guidon déverrouillé et la boîte à gant droite ouverte.

Auditionné par la police dans la foulée, l'individu appréhendé a déclaré s'appeler F______ avant d'indiquer se prénommer G______. Confronté au fait que cette identité, après vérification, ne correspondait à rien, l'intéressé a finalement admis s'appeler B______, né le ______ 2007 et ressortissant français. Il a reconnu avoir circulé sans permis en Suisse au volant d'un véhicule de location et avoir pris la fuite au moment de son interpellation. Il contestait avoir forcé la porte du garage; c'était la personne qui était avec lui. Un dénommé H______ lui avait dit de se rendre à l'adresse de C______, sous peine de représailles, et d'obéir à un dénommé I______, qui viendrait le chercher. Il a contesté avoir volé des motocycles durant la soirée ou auparavant. Par contre, il était exact qu'il devait faire des repérages. Il était venu en Suisse sans pièce d'identité.

b. Le 14 mai 2024, B______ a été prévenu par le Juge des mineurs de violation de domicile, tentative de vol, vol, empêchement d'accomplir un acte officiel et violation par négligence de la loi sur les étrangers.

Il a confirmé ses précédentes déclarations. Il ignorait que le fourgon avait été volé et c'était I______ qui avait amené les plaques. Il a contesté avoir approché des motos stationnées sur le parking extérieur à E______. Il regrettait ses actes.

c. À teneur du rapport de renseignements du 4 juin 2024, le fourgon D______/2______ [modèle] avec les plaques d'immatriculation vaudoises était connu des autorités françaises et aurait déjà servi, avec d'autres plaques, pour divers méfaits sur leur territoire. Le mode opératoire était de voler des fourgons pour ensuite dérober des deux-roues. Ces opérations étaient effectuées majoritairement par des mineurs, se faisant passer pour des victimes en audition en affirmant avoir été recrutés de force alors qu'en réalité, ils étaient actifs dans l'organisation.

d. Après analyses, trois profils ADN masculins ont été mis en évidence à l'issue des prélèvements effectués sur et dans le fourgon ainsi que sur les plaques d'immatriculation, dont celui du prévenu notamment sur les plaques avant et arrière et leur support.

C. Dans sa décision querellée, le Juge des mineurs ordonne l'établissement du profil d'ADN de B______, au motif que "la police a prélevé des traces biologiques susceptibles d'être comparées avec un profil d'ADN" (art. 255 al. 1 CPP).

D. a. Dans son recours, A______ s'oppose à l'établissement du profil d'ADN de son fils aux motifs qu'il a reconnu ses erreurs, s'est fait menacer par des adultes ayant de l'emprise sur lui et n'a pas le profil d'un délinquant. Il voulait poursuivre ses études et elle-même s'engageait "à ce que cela ne se reproduise jamais".

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

 

 

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 91 al. 4, 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP cum art. 3 al. 1 et 39 al. 1 PPMin) – la date d'expédition du pli contenant l'acte de recours étant inconnue, faute d'enveloppe figurant au dossier, de sorte qu'il est impossible de déterminer si ledit pli est parvenu (par pli simple ou recommandé) à la Poste suisse dans le délai de 10 jours à compter de la notification de l'ordonnance querellée, soit le 15 juin au plus tard (art. 91 al. 2 CPP) –, concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP cum art. 3 al. 1 et 39 al. 1 PPMin) et émaner de la représentante légale du mineur, laquelle est partie à la procédure et a qualité pour recourir (art. 382 al. 1 CPP cum art. 18 let. b, 38 al. 1 let. b et 3 PPMin; cf. aussi M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER (éds), Strafprozessordnung / Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 2ème éd., Bâle 2014, n. 2 ad art. 39).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             3.1. Selon l'art. 255 al. 1 let. a CPP, l'établissement d'un profil d'ADN peut être ordonné sur le prévenu pour élucider le crime ou le délit sur lequel porte la procédure.

3.2. L'ordonnance de prélèvement d'un échantillon d'ADN permet de récolter du matériel biologique sur une personne en vue de l'établissement d'un profil d'ADN. La police peut ordonner et effectuer le prélèvement non invasif d'échantillons (art. 255 al. 2 let. a CPP; ATF 141 IV 87 consid. 1.3.2; cf. Message du Conseil fédéral du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure pénale,
FF 2005 1057 ss, ch. 2.5.5 p. 1223; arrêt du Tribunal fédéral 1B_568/2021 du 22 février 2022 consid. 3.1.2). 

3.3. L'art. 255 CPP ne permet pas le prélèvement routinier d'échantillons d'ADN et leur analyse, ce que concrétise l'art. 197 al. 1 CPP. Selon cette disposition, des mesures de contrainte ne peuvent être prises que si des soupçons suffisants laissent présumer une infraction (let. b), si les buts poursuivis ne peuvent pas être atteints par des mesures moins sévères (let. c) et si elles apparaissent justifiées au regard de la gravité de l'infraction (let. d). Les antécédents doivent également être pris en compte. Cependant, l'absence d'antécédents n'exclut pas en soi l'établissement d'un profil d'ADN (ATF 147 I 372 précité consid. 2.1; ATF 145 IV 263 consid. 3.4; arrêts du Tribunal fédéral 1B_230/2022 du 7 septembre 2022 consid. 2.2 et 7B_152/2023 du 2 juillet 2024 consid. 2.1.1).

3.4. En l'espèce, l'établissement du profil d'ADN a été ordonné par le Juge des mineurs sur la base de l'art. 255 al. 1 CPP pour élucider les infractions sur lesquelles portent la présente procédure, soit principalement de violation de domicile, tentative de vol et vol.

Des prélèvements ont été effectués par la police sur le fourgon, à l'intérieur de celui-ci et sur les plaques d'immatriculation (volées) apposées sur ledit véhicule. Or, le profil du prévenu a pu être mis en évidence notamment sur lesdites plaques avant et arrière ainsi que sur leur support, ce qui semble contredire la version de l'intéressé selon laquelle il ignorait que le fourgon était volé et que ce serait le dénommé I______ qui aurait amené les plaques.

L'acte entrepris se justifie ainsi pour les besoins de l'enquête visant à circonscrire le rôle et l'implication du prévenu.

Les arguments avancés par la recourante ne sont pas pertinents ici et devront, le cas échéant être soulevés devant l'autorité de jugement.

4. Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée et le recours, rejeté.

5. La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront arrêtés à CHF 300.- pour tenir compte de sa situation financière qui ne paraît pas favorable (art. 428 al. 1 CPP cum art. 3 al. 1 PPMin et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 300.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante et au Juge des mineurs.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Selim AMMANN, greffier.

 

Le greffier :

Selim AMMANN

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/11717/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

215.00

Total

CHF

300.00