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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/931/2012

DCSO/187/2012 du 14.05.2012 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : Requisition de poursuite. Commandement de payer. Créancier.
Normes : LP.67.1; LP.69.2
Résumé : Même si le commandement de payer apparaît au nom d'une succursale dépourvue de la personnalité juridique, il n'y a en l'espèce aucun risque de confusion.
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/931/2012-CS DCSO/187/12

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU LUNDI 14 MAI 2012

 

Plainte 17 LP (A/931/2012-CS) formée en date du 23 mars 2012 par M. G______, élisant domicile en l'étude de Me Alexandra LOPEZ, avocate.

* * * * *

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du 14 mai 2012 à :

- M. G______
c/o Me Alexandra LOPEZ, avocate
Rue Ferdinand-Hodler 15
Case postale 360
1211 Genève 17

- F______ INC.
c/o M. Jean-Marc SCHLAEPPI, agent d'affaires breveté
Rue du Simplon 18
Case postale 1137
1800 Vevey 1

- Office des poursuites.

 


EN FAIT

A. a. Le 5 décembre 2011, F______ INC. a requis une poursuite à l'encontre de M. G______ en recouvrement des sommes de 4'747 fr. 10 plus intérêts à 5 % dès le 5 décembre 2011 au titre de "3 factures du 20.01.2011 au 15.02.2011", 586 fr. au titre de "frais de retard", 210 fr. au titre de "frais divers", et 175 fr. 75 au titre d' "intérêts jusqu'au 04.12.2011".

Sous la rubrique "Créancier", la réquisition de poursuite mentionne ce qui suit: "F______ Inc., rue A______, G______, p.a. I______ AG, E______ xx, 8xxx S______".

b. Le 17 janvier 2012, le commandement de payer, poursuite n° 11 xxxx61 C, établi le 6 janvier 2012 sur la base de la réquisition précitée, a été notifié à M. G______. Ce dernier a formé opposition audit acte.

Sous la rubrique "Créancier", le commandement de payer mentionne ce qui suit: "F______ EUROPE, G______, P.A. I______, 8xxx S______".

c. Par courrier du 8 mars 2012, le conseil de M. G______ s'est adressé à l'Office des poursuites de Genève (ci-après: l'Office) pour lui indiquer que "le bureau de G______ de F______ INC. n'est qu'une succursale d'une société anonyme américaine, de sorte qu'elle n'a pas la personnalité juridique". L'Office était requis "d'une part, [de] constater la nullité de l'acte de poursuite (…) en application de l'article 22 LP et conformément à la jurisprudence publiée dans l'ATF 120 III 11 et, d'autre part, [de] procéder à la radiation de la poursuite".

Un extrait Internet du registre du commerce de Genève relatif à F______ INC., W______ (USA) BRANCHE OFFICE G______, succursale de F______ EUROPE, INC., société anonyme de l'Etat de D______, USA, était joint audit courrier.

d. Par courrier du 15 mars 2012, l'Office a informé le conseil de M. G______ qu'il procédait à la rectification de l'identité du créancier, dès lors qu'il apparaissait que le précité ne pouvait douter de l'identité du créancier.

B. a. Par acte du 23 mars 2012, M. G______ a formé plainte contre le courrier de l'Office du 15 mars 2012.

Il conclut, sous suite de frais et dépens, à ce que la décision de l'Office de rectifier l'identité du créancier dans le cadre de la poursuite n° 11 xxxx61 C soit annulée, à ce qu'il soit dit et constaté que le commandement de payer notifié dans le cadre de cette poursuite et tout acte subséquent sont nuls et non avenus, et à ce qu'il soit en conséquence ordonné à l'Office de radier la poursuite
n° 11 xxxx61 C.

A l'appui de ses conclusions, M. G______ fait valoir en substance qu'il ignorait, y compris à réception du commandement de payer, que son cocontractant n'était qu'une succursale d'une société américaine, qui seule détenait la qualité pour procéder à la réquisition de poursuite. Ce n'était qu'après avoir mandaté un avocat, qui avait dû procéder à des recherches, qu'il avait appris que la poursuivante était une succursale dépourvue de la personnalité juridique et qu'en cette qualité, elle ne pouvait être partie à la procédure de poursuite. M. G______ estime avoir été induit en erreur par l'identité de son poursuivant et qu'une telle erreur lèse incontestablement ses intérêts, dès lors que tout débiteur a le droit de connaître précisément l'identité de son prétendu créancier.

M. G______ a notamment produit trois factures de transport des 20 janvier, 3 février et 15 février 2011, une facture de droits et taxes du 15 février 2011, trois notes de crédit des 15 février, 11 mars et 24 mai 2011, un rappel du 28 février 2011, un 2ème rappel du 14 mars 2011, ainsi qu'un 3ème rappel du 28 mars 2011. Lesdits documents émanent tous de "F______ INC., Rue A______ x, G______ – Suisse".

b. Dans son rapport du 25 avril 2012, l'Office considère que sa décision est conforme à la jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 120 III 11, JT 1996 II 169).

c. F______, INC. ne s'est pas déterminée dans le délai imparti à cet effet.

EN DROIT

1. 1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre des mesures non attaquables par la voie judiciaire (art. 17 al. 1 LP).

Les mesures sujettes à plainte au sens de l'art. 17 LP sont des mesures individuelles et concrètes ayant une incidence sur la poursuite en cours, qu'elles font avancer en déployant des effets externes aux organes de l'exécution forcée agissant dans l'exercice de la puissance publique (cf. Jeandin, Poursuite pour dettes et faillite, La plainte, FJS n° 679, p. 6; Gilliéron, Commentaire, n. 9 ss ad art. 17).

En l'espèce, la décision querellée, qui rectifie les qualités de la créancière poursuivante, constitue manifestement une décision sujette à plainte au sens susrappelé, que le plaignant, débiteur, a qualité pour attaquer par cette voie.

1.2 La plainte contre une mesure de l'Office doit être déposée dans les dix jours suivant celui où le plaignant a eu connaissance de la décision attaquée (art. 17 al. 2 LP).

En l'espèce, la décision querellée a été reçue par le 16 mars 2012 par le conseil du plaignant. Déposée le 23 mars 2012, soit en temps utile, et respectant pour le surplus les exigences de forme prescrites par la loi (art. 9 al. 1 LaLP), la plainte est recevable.

2. 2.1 Une réquisition de poursuite doit énoncer notamment le nom et le domicile du créancier et, le cas échéant, de son représentant (art. 67 al. 1 ch. 1 LP); ces mentions sont reprises dans le commandement de payer (art. 69 al. 2 ch. 1 LP). Il importe que la désignation du poursuivant soit "claire et certaine, non équivoque et excluant tout doute sur son identité" (Gilliéron, Commentaire, n. 18 ad art. 67; Kofmel Ehrenzeller, BaK SchKG-I, n. 18 et 28 ad art. 67; ATF 120 III 60 consid. 2). Si la réquisition de poursuite est imprécise ou lacunaire, l'Office doit inviter le poursuivant à la compléter.

Les mentions prévues à l'art. 67 al. 1 ch. 1 LP fixent la qualité de créancier-poursuivant pour le reste de la procédure. La validité de l'ensemble de la poursuite et de tous les actes ultérieurs dépendra de la validité du commandement de payer (Stoffel/Chabloz, Voies d'exécution, 2ème éd., n. 30 p. 102).

Le poursuivant peut être une personne physique ou morale existante, une société en nom collectif, une société en commandite, une communauté de propriétaires par étage, une masse en faillite ou en liquidation concordataire. La capacité d'être partie fait donc défaut à la communauté héréditaire, à la société simple, à la copropriété, à la succursale, ou encore au fonds de placement (Ruedin, in CR-LP, n. 11 s. ad art. 67 LP).

Est en principe nulle de plein droit la poursuite requise par une entité dépourvue de capacité d'être partie, parce qu'elle ne jouit pas de la personnalité juridique ou par une personne morale inexistante (ATF 120 III 11, JT 1996 II 169 consid. 1b et les réf. citées; Gilliéron, Commentaire, n. 12 ad art. 22 LP). Toutefois, selon la jurisprudence, la désignation inexacte, voire totalement fausse, ou incomplète d'une partie n'entraîne pas la nullité de la poursuite – à moins qu'elle ne soit de nature à induire en erreur le poursuivi et à léser ses intérêts, notamment en l'empêchant de faire opposition, et qu'un tel risque se soit produit (cf. DCSO/502/2005 du 31 août 2005, consid. 3 et les réf. citées). Autrement dit, la désignation inexacte entraîne simplement, en cas de besoin, la rectification ou le complètement des actes de poursuite; il en va ainsi notamment lorsqu'une succursale se voit attribuer la qualité de créancière, alors qu'en réalité seule la société à laquelle elle appartient est visée (ATF 120 III 11, JT 1996 II 169; Gilliéron, Commentaire, n. 19 ad art. 67 LP).

2.2 En l'espèce, il est constant que l'on est en présence d'une poursuite dont le commandement de payer apparaît au nom d'une succursale, soit d'une entité dépourvue de personnalité juridique.

Ce nonobstant, l'on ne saurait retenir l'existence d'un risque de confusion. L'on ne voit pas comment la désignation incriminée aurait pu être de nature à créer une équivoque sur l'identité de la poursuivante. La dénomination "F______, INC." ne peut en effet se rapporter qu'à une seule et même société commerciale, à savoir la société anonyme sise au D______ (USA). Le plaignant devait ou du moins pouvait aisément le savoir. Une simple consultation du site Internet du registre du commerce faite par son conseil a du reste suffi pour éclaircir ce point. Le plaignant n'a donc subi aucun préjudice du fait de la désignation, dans la réquisition de poursuite et le commandement de payer subséquent, de l'adresse de la succursale genevoise de la société américaine. Sauf à faire preuve de formalisme excessif, une telle désignation inexacte ne peut avoir pour effet de rendre la poursuite nulle. A cela s'ajoute que le plaignant a pu faire opposition.

Compte tenu de ce qui précède, c'est à bon droit que l'Office a procédé à la rectification querellée, conformément à la jurisprudence susrappelée.

Mal fondée, la plainte doit être rejetée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucun dépens dans cette procédure (62 al. 2 OELP). Conformément à ces dispositions, la présente décision est rendue sans frais ni dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 23 mars 2012 par M. G______ contre la décision rendue par l'Office des poursuites dans le cadre de la poursuite
n° 11 xxxx61 C.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Monsieur Grégory BOVEY, président; Monsieur Philipp GANZONI et Monsieur Christian CHAVAZ, juges assesseurs; Madame Paulette DORMAN, greffière.

 

Le président :

Grégory BOVEY

 

La greffière :

Paulette DORMAN

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.