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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/140/1995

ATA/161/2000 du 21.03.2000 ( TPE ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : AMENAGEMENT DU TERRITOIRE; CONSTRUCTION ET INSTALLATION; AMENDE; REMISE EN L'ETAT; DELAI ABSOLU; DELAI DE PRESCRIPTION; TPE
Normes : LPG.1 al.2; LCI.137 al.6
Résumé : Amende infligée pour inobservation d'un ordre de cesser les travaux. En raison de la suspension de la procédure (pourparler entre le recourant et le département), la prescription absolue de cinq ans est atteinte et l'amende annulée. Confirmation de l'ordre de remise en état.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 21 mars 2000

 

 

 

dans la cause

 

 

Monsieur Z___________

représenté par M. H.Z___________, son fils

 

 

 

contre

 

 

 

 

DEPARTEMENT DE L'AMENAGEMENT, DE L'EQUIPEMENT ET DU LOGEMENT

 



EN FAIT

 

 

1. M. Z___________ est propriétaire de la parcelle No ___________, feuille ___ du cadastre de la commune de Presinge, d'une surface de 3 831 m2, au chemin __________.

 

Cette parcelle se trouve en zone agricole et elle est comprise dans les surfaces d'assolement au sens de l'article 20 alinéas 1 et 3 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin l987 (LaLAT - L 1 30).

 

2. M. Z___________ a cédé la jouissance de ce terrain à son fils, prénommé H., lequel n'est pas agriculteur.

 

3. Le 6 novembre l991, un inspecteur de la police des constructions du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement (ci-après : le département ou DAEL) a constaté que des aménagements et des travaux de plantation étaient en cours sur ladite parcelle.

 

4. Par décision du 8 novembre l991, le département a ordonné la suspension immédiate des travaux.

 

5. Malgré cela, l'autorité a constaté le 14 juillet l993 que M. Z___________ avait, sans autorisation, comblé le fossé longeant le chemin des Jonchets, créé une fosse en maçonnerie avec une amenée d'eau ainsi qu'un chemin d'accès en gravier pour développer une activité liée à la culture d'arbustes et de plantes en pot.

 

6. Une nouvelle décision de suspension de travaux a été prise le 16 juillet l993.

 

7. Le 19 octobre l993, le département a prié M. Z___________ de déposer une demande d'autorisation de construire, ce qui a été fait le 21 mars l994.

 

8. Lors d'un nouveau contrôle opéré le 14 décembre l994, l'autorité a constaté que M. Z___________ n'avait pas respecté les ordres de suspension de travaux. L'intéressé avait même entrepris de nouveaux travaux, tels la construction d'une serre et le remblayage d'un fossé, qui ne correspondaient pas aux plans déposés dans le cadre de la demande d'autorisation de construire précitée.

 

9. Par deux décisions du 13 janvier l995, le département a d'une part, refusé l'autorisation sollicitée et d'autre part, infligé à M. Z___________ une amende de CHF 5'000.- en application de l'article 137 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril l988 (LCI - L 5 05) pour avoir entrepris des travaux sans autorisation et refusé de respecter les ordres de suspension de travaux.

 

10. Par deux actes datés du 10 février l995, M. Z___________ a recouru contre la première décision auprès de la commission de recours instituée par la loi sur les constructions et les installations diverses (devenue depuis la commission cantonale de recours en matière de constructions, ci-après : la commission) et contre la seconde auprès du Tribunal administratif en concluant à leur mise à néant.

 

11. Par courrier du 16 février l995, le tribunal de céans a imparti au recourant un délai au 28 février pour qu'il lui fasse parvenir un recours correspondant aux exigences de l'article 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre l985 (LPA - E 5 10).

 

12. Le 24 février l995, le recourant a demandé la suspension de la procédure, compte tenu des pourparlers en cours avec le département. Celui-ci ayant donné son accord à ladite suspension, une décision en ce sens a été rendue le 14 mars l995, puis le 14 mai l996, le 5 juin l997, le 2 décembre l998.

 

13. Le 29 octobre l999, le département a sollicité la reprise de la présente cause au vu de la décision, devenue définitive, rendue le 29 juin l999 par la commission : après avoir effectué un transport sur place, celle-ci avait confirmé le refus de l'autorisation de construire sollicitée, les aménagements prévus - et déjà réalisés - étant sans rapport avec la culture du sol.

 

14. Par décision du 2 novembre l999, la reprise de la procédure a été ordonnée. Un délai au 15 décembre l999 a été imparti au département pour qu'il se détermine sur le fond.

 

15. Dans le délai précité, le département a conclu à l'irrecevabilité du recours, M. Z___________ n'ayant jamais envoyé au tribunal de céans un acte conforme aux exigences légales, comme il en avait pourtant été requis.

 

Si la recevabilité dudit recours était néanmoins admise, celui-ci devait être rejeté, qu'il s'agisse de l'ordre de remise en état ou de l'amende de CHF 5'000.-, les travaux n'étant pas autorisables et le recourant pratiquant la politique du fait accompli.

 

 

EN DROIT

 

 

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Les aménagements auxquels le recourant ou son fils ont procédé ne sont pas autorisables car ils ne sont pas conformes à la zone agricole et ne pourraient faire l'objet d'une dérogation au sens de l'article 24 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700), comme la commission l'a constaté par décision du 29 juin l999, devenue définitive (ATF 117 I b 502; 116 I b consid. 2 et les arrêts cités; ATA F. et R. et WWF du 28.7.1998; ATA S. du 9 février 1999).

 

De plus, la procédure a démontré que les ordres de suspension de travaux et de remise en état n'ont pas été respectés, le recourant pratiquant la politique du fait accompli. En conséquence, l'ordre de remise en état du 13 janvier l995 sera confirmé, car les travaux requis peuvent

être effectués sans trop de difficultés et sans frais exorbitants (ATA C. du 25 août l992, in SJ 1993, pp. 579 et 580).

 

3. S'agissant de l'amende, le tribunal doit examiner d'office si elle est prescrite (ATA M. et B. du 22 avril l997; R. du 20 juillet l993).

a. Les amendes administratives sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des amendes ordinaires pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister (ATA du 18 février 1997 en la cause C.; Pierre MOOR, Droit administratif: les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, Berne 1991, ch. 1.4.5.5, p. 95-96; Peter NOLL et Stefan TRECHSEL, Schweizerisches Strafrecht: allgemeine Voraussetzungen der Strafbarkeit, AT I, 4ème édition, Zurich 1994, p. 30).

 

En droit cantonal, l'article 1 alinéa 2 de la loi pénale genevoise du 20 septembre 1981 (LPG - E 4 05) renvoie expressément aux dispositions générales du code pénal : il y a lieu ainsi de faire application des règles contenues dans ces dispositions, comme la juridiction de céans l'a fait en matière d'exploitation d'un établissement public (ATA du 7 janvier 1997 en la cause W.; Philippe GRAVEN, L'infraction pénale punissable, 2ème édition, Berne 1995, ch. 23B, p. 29), sous réserve des exceptions prévues en matière contraventionnelle par le législateur cantonal qui a exclu l'application des articles 13, 14 (aujourd'hui aboli), 15 (idem), 48, 49, 50, 57 et 103 du code pénal du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0; cf. art. 24 LPG). Cette solution est la seule compatible avec la jurisprudence du Tribunal fédéral qui a estimé que les sanctions pénales et administratives prises en application du droit cantonal étaient soumises à la prescription annale des art. 109 CP et 17 LPG - qui l'étend à la peine également -, faute d'une base légale expresse de droit cantonal prévoyant d'autres délais (ATF n.p. du 26 février 1991 en la cause B.).

 

b. Selon l'article 137 alinéa 6 LCI, introduit par une loi du 17 septembre 1992, la poursuite des contraventions se prescrit par trois ans; la prescription absolue étant de cinq ans, les articles 71 et 72 du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (RS 311.0) s'appliquant par analogie. Selon la jurisprudence, l'inobservation de dispositions analogues en matière de droit des constructions ne constitue pas un délit continu, car l'absence de remise des lieux en un état conforme à l'ordre légal ne fait pas partie des éléments constitutifs de la norme. La prescription court dès que les actes interdits par la loi ont été entièrement exécutés (Schweizerische Juristen-Zeitung 73 - 1977, No 35, p. 82).

 

c. En conséquence, force est d'admettre que l'amende de CHF 5'000.- infligée au recourant le 13 janvier l995 est prescrite de façon absolue depuis le 13 janvier 2000.

Elle doit donc être annulée.

 

4. Le recours sera ainsi partiellement admis.

 

Un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant, qui obtient pour partie gain de cause en raison du seul écoulement du temps.

 

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

à la forme :

 

déclare recevable le recours interjeté le 10 février l995 par M. Z___________ la décision du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement du 13 janvier l995;

 

au fond :

 

l'admet partiellement;

 

annule l'amende de CHF 5'000.-;

 

confirme l'ordre de remise en état de la parcelle;

 

met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-;

dit que conformément aux articles 97 et suivants de la loi fédérale d'organisation judiciaire, le présent arrêt peut être porté, par voie de recours de droit administratif, dans les trente jours dès sa notification, par devant le Tribunal fédéral; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il est adressé en trois exemplaires au moins au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14; le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyen de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

communique le présent arrêt à Monsieur H. Z___________, représentant M. Z___________, et au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement.

 


Siégeants : M. Schucani, président, Thélin, Mmes Bonnefemme-Hurni, Bovy et M. Paychère, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

le secrétaire-juriste: le président :

 

O. Bindschedler Ph. Thélin

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

M. Oranci