Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites
DCSO/297/2010 du 08.07.2010 ( PLAINT ) , REJETE
En droit
DÉCISION
DE LA COMMISSION DE SURVEILLANCE
DES OFFICES DES POURSUITES ET DES FAILLITES
SIÉGEANT EN SECTION
DU JEUDI 8 JUILLET 2010
Cause A/1871/2010, plainte 17 LP formée le 26 mai 2010 par K______ SA, élisant domicile en l'étude de Me Mike HORNUNG, avocat, et M. S______, élisant domicile en l'étude de Me Douglas HORNUNG, avocat, à Genève.
Décision communiquée à :
- K______ SA
domicile élu : Etude de Me Mike HORNUNG, avocat
Place du Bourg-de-Four 9
1204 Genève
- M. S______
domicile élu : Etude de Me Douglas HORNUNG, avocat
Rue du Général-Dufour 20
1204 Genève
- Office des faillites
Faillite n° 2004 xxxx65 N
A.a. Par jugement du 19 octobre 2004, le Tribunal de première instance a prononcé la faillite de D______ SA.
Les productions de Z______ SA et de M. S______ ont été admises à l'état de collocation, en 3ème classe, à hauteur de, respectivement, 780'835 fr. 25 et de 800'164 fr. 60.
L'état de collocation a été déposé le 23 février 2005, puis déposé à nouveau les 18 mai et 28 septembre 2005.
A.b. Par courrier du 2 mars 2005, M. S______, par l'entremise de son conseil, Me Douglas Hornung, a requis l'Office des faillites (ci-après : l'Office) de porter à l'inventaire une prétention en responsabilité contre les anciens administrateurs, Mme O______ et M. S______, et l'organe de révision, F______ SA.
A teneur de l'inventaire, l'Office a inscrit une prétention litigieuse en responsabilité à hauteur du passif contre M. S______ (ch. 13), Mme O______ (ch. 14) et M. V______ (ch. 15), tous trois ex-administrateurs, et contre H_____ SA (ch. 16), ex-réviseur.
Par circulaire datée du 13 mars 2006, l'Office a proposé aux créanciers de renoncer à agir au nom de la masse en faillite contre, notamment, les quatre organes susmentionnés. Un délai au 24 mars 2010 leur était imparti pour faire connaître leur détermination et demander, le cas échéant, la cession des droits de la masse.
Dans le délai imparti, plusieurs créanciers colloqués en 1ère classe, anciens employés de la faillie, ainsi que Z_____ SA et M. S______ ont sollicité la cession des droits inventoriés sous ch. 13 à 16.
Par décision du 20 septembre 2006, l'Office leur a cédé lesdits droits et imparti un délai de deux ans pour les faire valoir.
Par acte déposé auprès du Tribunal de première instance le 30 juillet 2007, les cessionnaires, dont Z_____ SA et M. S______, ont formé une action en responsabilité (754 CO) dirigée contre Mme O______, M. S______ et F______ SA. Cette procédure est actuellement pendante.
A.c. Le 26 avril 2010, Me Mike Hornung, conseil de K______ SA, - nouvelle raison sociale de Z_____ SA (selon inscription au Registre du commerce publiée dans la FOSC du 9 septembre 2009 - a écrit à l'Office pour le prier de bien vouloir rectifier, d'une part, la position 16 de l'inventaire et, d'autre part, l'acte de cession afin qu'ils mentionnent O______ SA en lieu et place de H______ SA, cette dernière ayant succédé à la première. Me Mike Hornung relevait que, renseignement pris auprès de son confrère, Me Douglas Hornung, ce dernier avait précisément désigné O______ SA dans son courrier du 2 mars 2005.
Par lettre datée du 12 mai 2010, l'Office a répondu que la faillite de D______ SA ayant été clôturée par jugement du 4 juin 2008 l'inventaire ne pouvait plus être modifié, pas plus que la cession des droits de la masse intervenue le 20 septembre 2006 sans que sa teneur ne soit contestée.
B. Par acte posté le 26 mai 2010, K______ SA et M. S______ ont porté plainte contre la décision de l'Office reçue le 17 mai 2010. Ils concluent à son annulation et, cela fait, à ce que l'Office soit invité à rectifier la position 16 de l'inventaire dans la faillite de D______ SA et l'acte de cession du 20 septembre 2006 de manière à ce qu'ils mentionnent F______ SA en lieu et place de H______ SA. Les plaignants soutiennent que la décision de l'Office est arbitraire dans sa motivation et dans son résultat. Ils font valoir que l'inventaire contient une erreur de transcription imputable à l'administration de la faillite et qu'en l'état actuel de la cession du 20 septembre 2006, les cessionnaires n'ont pas la qualité pour agir contre F______ SA qui, parmi les défendeurs, apparaît comme seule susceptible de pouvoir assumer une condamnation pécuniaire si l'action en paiement devait être admise.
Dans son rapport, l'Office admet que, contrairement à ce qui lui avait été demandé le 2 mars 2005 par le conseil de M. S______, il n'a pas porté à l'inventaire une prétention dirigée contre F______ SA, mais contre H______ SA, soit l'organe de révision de la faillie qui lui a succédé. Il soutient toutefois que sa compétence, en tant qu'administration de la faillite, s'éteint avec la clôture de celle-ci, sous réserve de l'art. 269 LP dont les conditions ne sont pas réalisées en l'espèce. L'Office conclut au rejet de la plainte.
C. Selon les données du Registre du commerce, l'inscription de D______ SA a été radiée d'office le 3 juillet 2008 (date de publication dans la FOSC), la procédure de faillite ayant été clôturée ; F______ SA était organe de révision jusqu'au 2 juillet 2004 (date de publication dans la FOSC), date à laquelle H_____ SA lui a succédé.
1. Sauf dans les cas où la loi prescrit la voie judiciaire, il peut être porté plainte à l'autorité de surveillance lorsqu'une mesure de l'Office est contraire à la loi ou ne paraît pas justifiée en fait. La plainte doit être déposée dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 LP ; art. 10 al. 1 et 13 LaLP).
En tant que débiteurs de la faillie, les plaignants ont qualité pour agir par cette voie.
Leur plainte satisfait aux exigences de forme et de contenu prescrites par la loi (art. 13 LaLP).
2.a. Le juge de la faillite prononce la clôture de la faillite sur la base du rapport final de l'administration de la faillite. La clôture de la faillite n'est prononcée que dans la mesure où le juge constate que l'ensemble des opérations de liquidation sont terminées (art. 268 al. 2 LP). Une exception prévaut pour les prétentions de la masse qui ont été cédées en vertu de l'art. 260 al. 1 LP (cf. art. 83 al. 2 et 95 OAOF).
Le juge de la faillite a l'obligation d'informer les offices des poursuites et des faillites, le registre du commerce ainsi que le registre foncier de la clôture de la faillite (art. 176 al. 1 LP) et il incombe à l'office des faillites de publier cette clôture (art. 268 al. 4 LP).
2.b. La compétence de l'office des faillites ou de l'administration de la faillite pour accomplir des actes administratifs s'éteint presque complètement avec la clôture de la faillite ; elle ne subsiste que dans les limites prévues par l'art. 269 LP, c'est-à-dire en relation avec des biens découverts après la clôture de la faillite. Une fois la procédure terminée, il n'est donc pas possible de céder des biens ou des droits douteux dont on avait connaissance auparavant (ATF 120 III 36 consid. 3 et les arrêts cités, JdT 1996 II 141). Une plainte contre les décisions prises dans le cours de la procédure n'est plus recevable (RVJ 2000, p. 285 consid. 1c. ; Nicolas Jeandin, CR-LP, ad art. 268 n° 14 -19).
En l'occurrence, l'Office a inventorié une prétention en responsabilité contre H______ SA, ex-réviseur de la faillie, et la circulaire qui a été communiquée aux créanciers le 13 mars 2006, puis la décision de cession du 20 septembre 2006 font mention de cette société. Aucun de ces actes n'a fait l'objet d'une plainte, le cas échéant, d'une demande de rectification, étant rappelé qu'au jour du dépôt d'action en responsabilité contre les organes de la faillie, le 30 juillet 2007, la faillite n'était pas encore clôturée, le jugement de clôture étant intervenu le 4 juin 2008.
3.a. A teneur de la plainte, qui a pour objet la décision de l'Office refusant de modifier l'inventaire et la cession des droits de la masse du 20 septembre 2006, les plaignants reprochent, implicitement, à l'Office de ne pas avoir mis en œuvre l'art. 269 LP.
Cette disposition légale exige toutefois l'existence d'un actif découvert postérieurement à la clôture de la faillite. Ainsi, ne tombe pas sous le coup de l'art. 269 LP un droit patrimonial dont les organes de la masse savaient ou pouvaient et devaient savoir que le failli en était titulaire ou qu'ils ont renoncé - peu importe pour quel motif - à comprendre dans la liquidation. Le fait que des créanciers aient connu l'existence d'un bien avant la clôture de la faillite exclut également l'application de l'art. 269 LP à ce bien (Nicolas Jeandin, op.cit. ad art. 268 let. B nos 5 ss).
En l'espèce, il est constant que ni les plaignants - ni d'ailleurs les autres cessionnaires - ne pouvaient ignorer que les organes de révision de la faillite, dûment inscrits au Registre du commerce, étaient F______ SA jusqu'au 2 juillet 2004, puis, H______ SA, à compter de cette date. Certes, l'Office n'a pas inventorié une prétention de la masse contre la première, comme demandé par l'un des plaignants, M. S______, dans son courrier du 2 mars 2005, mais contre la seconde. Force est cependant de retenir que l'Office et le précité avaient bien connaissance de cette prétention avant la clôture de la faillite. Quant aux autres cessionnaires, dont K______ SA, ils en ont eu connaissance au plus tard lors du dépôt de l'action judiciaire dirigée notamment contre F______ SA, le 30 juillet 2007, soit près d'un an avant que la faillite ne soit clôturée.
A supposer que le comportement de l'Office, qui a ignoré la prétention qui lui avait été signalée, constitue une négligence inexcusable - qui pourrait être de nature à entraîner la responsabilité du canton (art. 5 LP) (ATF 116 III 96 consid. 4c, JdT 1992 II 130 ; ATF 90 III 41 consid. 1, JdT 1964 II 76)-, la négligence des plaignants, qui ont intenté action contre un tiers qui n'était pas visé dans la décision de cession du 20 septembre 2006 et qui ne paraissent s'être rendus compte de leur "erreur" que le 26 avril 2010 (cf. consid. A.c.), soit près de trois ans après le début de la procédure judiciaire, est incompréhensible et doit leur être imputée.
3.b. A surplus, la Commission de céans relèvera que l'arrêt invoqué par les plaignants (ATF 127 III 526, JdT 2001 II 65) ne leur est d'aucun secours. Dans le cas d'espèce, la faillite avait, par erreur, été clôturée avant l'établissement de l'acte de cession (cf. art. 80 al. 1 OAOF). Le Tribunal fédéral a ainsi retenu que cette clôture ne pouvait rien changer au droit acquis par la créancière, les deux conditions posées par l'art. 260 al. 1 LP étant déjà réalisées, et qu'elle n'empêchait pas, en particulier, la procédure de cession qui était engagée d'aller jusqu'à son terme.
En l'occurrence, la procédure de cession est bien allée jusqu'à son terme, par l'établissement et la délivrance de l'acte de cession aux plaignants le 29 septembre 2006, étant rappelé que la clôture de la faillite n'est intervenue que le 4 juin 2008.
4. La plainte sera rejetée dans la mesure de sa recevabilité.
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COMMISSION DE SURVEILLANCE
SIÉGEANT EN SECTION :
Rejette, dans la mesure de sa recevabilité, la plainte formée le 26 mai 2010 par K______ SA et M. S______ contre le refus de l'Office des faillites de modifier l'inventaire et l'acte de cession des droits de la masse établis dans le cadre de la faillite de D______ SA clôturée par jugement du 4 juin 2008.
Siégeant : Mme Ariane WEYENETH, présidente ; Mme Florence CASTELLA et M. Olivier WEHRLI, juges assesseur(e)s.
Au nom de la Commission de surveillance :
Véronique PISCETTA Ariane WEYENETH
Greffière : Présidente :
La présente décision est communiquée par courrier A à l’Office concerné et par courrier recommandé aux autres parties par la greffière le