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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2199/2025

JTAPI/722/2025 du 27.06.2025 ( LVD ) , ADMIS PARTIELLEMENT

REJETE par ATA/1330/2025

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2199/2025 LVD

JTAPI/722/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 27 juin 2025

 

dans la cause

 

Madame A______, agissant en son nom et celui de ses enfants mineurs, B______, C______ et D______, représentés par Me Sophie BOBILLIER, avocate, avec élection de domicile

 

contre

Monsieur E______, représenté par Me Andreia RIBEIRO, avocate, avec élection de domicile

 


 

EN FAIT

1.             Par décision du 16 juin 2025, le commissaire de police a prononcé une mesure d'éloignement d'une durée de onze jours à l'encontre de Monsieur E______, lui interdisant de s'approcher ou de pénétrer à l'adresse privée de Madame A______, située rue de la F______ 1______ G______, et de contacter ou de s'approcher d’elle et de leurs trois enfants mineurs B______, C______ et D______.

2.             Selon cette décision, M. E______ était présumé avoir commis à l'encontre de Mme A______ des contraintes sexuelles, des injures et des voies de fait.

3.             Selon le rapport de renseignements établi par la police le 16 juin 2025, Mme A______ s'était rendue ce jour-là au poste de police afin d'informer cette dernière des violences dont elle avait été victime de la part de son mari depuis l'année 2016 environ.

4.             De ses déclarations, il ressortait qu'elle avait rencontré M. E______ en 2013 et que, six mois plus tard, dès le début de leurs fiançailles, il avait commencé à se montrer plus dur verbalement avec elle, lui disant par exemple « tu ne m'interromps pas ». Au début, elle avait trouvé qu'il parlait mal à sa propre sœur, ainsi qu'à sa mère et qu'il faisait des remarques qui la stressaient, par exemple « j'ai du sperme jusqu'aux chaussettes ». Il était très colérique et s'était un jour énervé parce qu'il y avait des bulles dans ses gaufres. À la naissance de leur première fille en 2018, elle avait dû s'en occuper seule et si elle devait se lever au milieu de la nuit et avait le malheur de faire du bruit, il l'engueulait. Il lui avait proposé des pratiques sexuelles qu'elle ne voulait pas, mais par peur de sa réaction, elle avait dû accepter. Par exemple, s'agissant des rapports annaux, elle ne voulait pas, mais s'il voulait, elle le laissait. C'était surtout lorsqu'il voulait mettre son poing dans son vagin qu'elle lui disait non, sans crier, mais il insistait en disant « mais si, mais si ». Elle ne l'avait pas repoussé physiquement. Cela était arrivé à plusieurs reprises depuis 2018, à raison d'une fois par semaine ou chaque deux semaines. Les autres fois, elle n'avait pas consenti, mais elle n'avait pas réussi à s'exprimer, à lui dire non. Il lui était arrivé de pleurer après les rapports, mais son mari ne voyait rien. En janvier 2025, elle avait réussi à prendre conscience et à lui dire stop et il n'y avait plus eu aucun contact entre eux. Depuis février 2025, elle dormait dans son bureau et cela faisait désormais trois semaines qu'il était parti et qu'il dormait à l'hôtel. C'était probablement à la suite de la thérapie de couple qu'elle avait pris conscience de la situation.

Durant son enfance, elle avait eu quelques expériences qui avaient fait qu'elle avait peur de l'abandon. Il le savait et en jouait énormément. Quand elle lui disait qu'elle l'aimait, il ne lui répondait pas et rigolait.

Environ trois ans auparavant, il s'était fâché et avait donné un coup de poing à travers la porte de la chambre des enfants. Elle ne se rappelait pas la raison de sa colère.

Environ un an auparavant, elle avait commencé à dire stop et à ne plus tolérer ses remarques. Il avait alors commencé à l'insulter en lui disant « salope, va chier, t'es chiante, attardée, tu mérites qu'on te traite comme une merde, connasse ». Si les enfants ne s'habillaient pas assez rapidement, il s'énervait contre eux et les tapait. En fonction de la situation, cela pouvait être un coup dans le ventre ou une morsure. Elle a montré durant son audition une photo de la marque faite par son mari sur son fils de trois ans en octobre 2024. Il n'avait pas de patience et s'énervait très rapidement avec les enfants. Malgré le fait que ces trois dernières semaines, la situation allait bien, elle pensait qu'il n'arriverait pas à changer son comportement. Lui-même reconnaissait qu'il était fatigué quand il s'occupait des enfants.

À la question de savoir si elle souhaitait que son mari soit éloigné du domicile, elle a répondu « je ne sais pas, oui, je pense que oui mais cela me stresse pour lui ». Sur question de la police, elle a répondu qu'il ne l'avait jamais frappée mais que, par contre, il tapait les enfants. Il l'avait menacée une fois de la taper, avec son poing levé et elle lui avait dit qu'elle irait à la police s'il le faisait. Il était très en colère et c'était la fois où il venait de casser la porte de la chambre des enfants.

À la question de savoir s'il y avait eu des menaces précédemment, elle a répondu que non, mais sous forme indirecte, en disant que leur couple le tuait et qu'il allait se jeter par la fenêtre. Il avait dit cela le week-end où elle lui avait annoncé qu'elle voulait mettre fin à leur relation, c'est-à-dire celui du 9 mai 2025. Il était en détresse totale. Elle se sentait coupable.

Ils allaient consulter un thérapeute de couple et elle allait elle-même voir une psychologue deux fois par semaine et un psychiatre deux fois par an. À la question de savoir si les enfants avaient assisté à des conflits dans le passé, elle a répondu affirmativement, précisant qu'ils avaient été témoins des insultes. À la question de savoir si les enfants avaient subi des violences de la part de leur père, elle a répondu que C______ s'était déjà fait pincer plusieurs fois au niveau des bras et du ventre, sans doute parce qu'il était très agité. Il lui avait également lancé des objets, dont sa chaussure. Concernant D______, hormis la morsure, il l'avait également fessé. D______ avait assez peur de son père et se collait à elle quand ce dernier était présent. B______, la plus grande, n'avait jamais eu de problème particulier, sauf la fois où elle avait mis trop de temps pour se doucher et où il lui avait mis l'eau froide. Il voulait que les enfants prennent des douches froides comme punition. Elle l'avait arrêté parce qu'elle n'était pas d'accord. Sur question de savoir à quelle fréquence avait lieu la violence sur les enfants, elle a répondu que les cris et les hurlements étaient quotidiens et, s'agissant de la violence physique, cela arrivait environ une fois par semaine.

Sur question de savoir si elle avait quelque chose à ajouter, elle a précisé que ces derniers temps, les enfants voyaient leur père pleurer régulièrement et qu'ils essayaient de le réconforter, mais que ce n'était pas leur rôle. Sur question de savoir comment elle envisageait l'avenir, elle a expliqué qu'elle n'arrivait pas à dormir sous le même toit que lui et qu'elle voulait se séparer. S'agissant des enfants, s'il allait mieux, elle pensait qu'il devait les voir, mais pas dans cette situation. À son avis, les enfants étaient probablement en danger avec lui en ce moment, car il était très fatigué et en extrême détresse. Il pleurait tout le temps et n'avait pas la force de s'en occuper. Il était suivi par un psychiatre depuis un an et demi. Depuis qu'il lui avait dit qu'il allait se tuer, il y allait deux fois par semaine.

5.             Entendu à son tour le 16 juin 2025, M. E______ a expliqué, concernant sa relation conjugale, qu'il y avait déjà eu des conflits et qu'il existait des hauts et des bas, comme dans tous les couples. Récemment, les disputes avaient augmenté, entraînant des cris très forts devant les enfants, surtout les derniers mois où aucune discussion n'était possible. Depuis la fin de l'été 2024, la situation était de pire en pire, il ne faisait rien d'assez bien. Il n'arrivait pas à lui dire quand il rentrait et elle le lui reprochait. Étant donné qu'il avait fait un burnout et avait arrêté de travailler de décembre 2023 à avril 2024, la situation était très compliquée à la maison et au travail. Pendant cette période d'arrêt, il s'était davantage trouvé à la maison. Son épouse ne mettant pas les mêmes limites que lui aux enfants. Ils avaient eu des désaccords par rapport à cela.

Il n'était pas violent envers les enfants. Il avait peut-être déjà été un peu brusque une fois ou deux. Il ne pouvait pas nier qu'il avait déjà mis une fessée à D______, mais il le regrettait. À la question de savoir ce qu'il fallait entendre par le fait qu'il était un peu brusque, il a répondu qu'il lui était arrivé de crier pour que les enfants se dépêchent avant de partir à l'école. Son épouse voyait cela comme de la maltraitance, mais il n'était pas du tout d'accord. Il savait qu'il pourrait se montrer un peu plus doux, mais il les aimait et ne se considérait pas comme quelqu'un de violent. Elle aussi criait sur les enfants et l'engueulait devant eux, surtout ces derniers mois. Il vivait cela comme de l'acharnement, car il n'avait pas la possibilité de s'exprimer. C'était comme si elle voulait le forcer à endosser la mauvaise image de lui qu'elle avait décidée. Il lui était déjà arrivé de priver ses enfants de dessert ou de leur demander d'aller se calmer dans leur chambre ou de les priver de soirées cinéma. Sur question, il ne se souvenait pas d'avoir donné des douches froides par punition. Il leur avait déjà demandé de l'aider à réparer leurs bêtises ou de vider le lave-vaisselle. Il ne pensait pas avoir déjà frappé ses enfants, mais il avait réagi avec D______ qui n'arrêtait pas de bouger dans tous les sens et à qui il avait mis une fessée. C'était la seule fois où il se souvenait d'avoir dépassé ses limites. Il s'était dit que cela n'était pas bien et avait regretté son geste. Il était exact qu'il avait déjà insulté sa femme, mais c'était dans les deux sens. Il l'avait d'ailleurs regretté et il lui avait demandé pardon.

Sur la question de savoir s'il y avait eu de la contrainte sexuelle depuis 2018, il a répondu qu'il n'était pas au courant de cette situation et que son épouse ne le lui avait jamais dit. Lorsqu'il lui avait demandé pourquoi elle ne l'avait jamais dit, elle lui avait répondu qu'elle avait peur qu'il parte. Il n'avait jamais continué quelque chose qu'elle n'aimait pas. Il avait l'impression qu'il s'agissait d'une relation saine. Son épouse sous-entendait qu'il l'avait violée pour leurs deux garçons, mais leur relation était consentie et bien vécue ; il pensait qu'il y avait eu du plaisir partagé. Il lui était déjà arrivé d'interrompre des actes en se rendant compte qu'elle n'était pas bien. Il ne l'avait jamais forcée et elle avait aussi initié des rapports elle-même.

Concernant la perspective d'un éloignement du domicile, il a expliqué qu'il était déjà parti de la maison depuis trois semaines et qu'il n'avait pas eu le choix. Son épouse s'était engagée à faire la garde des enfants en alternance, puis deux jours après, elle était revenue en lui disant que c'était lui qui devait partir et il avait accepté, car elle ne lui laissait pas le choix et lui-même cherchait l'apaisement. En thérapie de couple, elle lui avait clairement dit qu'elle ne visait pas une bataille juridique et qu'elle n'allait pas lui reprocher d'avoir quitté le foyer familial.

Apprenant que son épouse avait demandé une mesure d'éloignement à son encontre, il a déclaré qu'il était choqué. Il voulait bien la laisser tranquille, mais il ne voulait pas qu'elle l'éloigne de ses enfants. Il lui avait proposé de garder les enfants, mais elle avait refusé. Elle avait exprimé vouloir se reposer un mois sans les enfants elle aussi, mais avait insisté pour que ce soit lui qui parte.

Sur question de savoir comment il envisageait l'avenir, il a déclaré qu'il aimait son épouse et voulait rester avec elle. Elle était fausse et elle ne disait pas la même chose à ses amis qu'à lui. Il avait envie de travailler pour que ça marche, mais il n'avait pas l'impression que cela soit son cas.

6.             Sous la plume de son conseil, M. E______ a fait opposition à la mesure d'éloignement prononcé à son encontre par acte reçu par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le 19 juin 2025.

7.             À l'audience du 20 juin 2025 devant le tribunal, Mme A______ a expliqué qu'elle venait d'une famille catholique intégriste et qu'elle partait de zéro lorsqu'elle avait rencontré M. E______. Après les fiançailles, il avait commencé à utiliser des expressions qui ne lui convenaient pas ou à se moquer de son nez, ce qui l'avait amenée à se poser des questions à ce sujet, alors qu'elle n'avait eu aucun complexe jusque-là. Toutes ces remarques s'étaient développées de façon très progressive, de sorte que, selon son souvenir, elle n'avait tout d'abord pas indiqué à M. E______ que cela n'allait pas. Ensuite, elle avait commencé à poser « un petit peu » des limites, mais il répondait par une manière consistant à nier abruptement son ressenti (« mais non »). Elle ne se sentait pas écoutée lorsqu'elle lui faisait des remarques pour poser des limites, comme cela avait ensuite été le cas dans les pratiques sexuelles qu'il avait introduites dans leur couple, par exemple par la pénétration de un, puis deux, puis trois doigts, puis toute la main dans son vagin, alors qu'à chaque fois, elle lui disait qu'elle ne voulait pas et qu'il insistait sans du tout l'écouter. Ensuite, elle s'était progressivement davantage affirmée sur les limites qu'elle souhaitait poser, à mesure que le comportement violent de son conjoint prenait plus d'ampleur. C'était pour cela qu'aujourd'hui, elle pensait nécessaire de se séparer et, dans l'immédiat, de protéger également ses enfants, car elle avait l'impression que son mari allait lui aussi de plus en plus mal, au point qu'il lui était arrivé récemment de la menacer de mettre fin à ses jours. Tout cela avait pas mal impacté les enfants et elle en était arrivée à s'enfermer une fois avec eux pendant la nuit. Elle avait dernièrement perçu un changement d'attitude du côté de ses enfants, qui dormaient désormais le matin et qu'elle devait elle-même réveiller. Jusque-là, ils se réveillaient spontanément vers six heures du matin et son petit dernier manifestait un stress dès le réveil de son père, soit en se recroquevillant dans son lit, soit en courant la retrouver. Il était encore arrivé une semaine auparavant, alors que son mari avait quitté l'appartement depuis deux semaines, que D______ veuille s'enfermer avec elle à la salle de bains afin d'empêcher son père d'entrer.

Elle avait contacté la H______ et l'association AVVEC à la fin de l'année dernière, puis, au début de cette année, une association s'occupant des violences faites aux enfants, où son mari et elle-même s'étaient rendus en mars. Après ce rendez-vous, il s'était montré agressif avec elle en lui reprochant ce qu'elle avait dit.

Sur question du tribunal, elle a expliqué qu'elle avait elle-même été victime de maltraitance de la part de ses deux parents, physiquement jusque vers l'âge de
quinze ou seize ans et psychologiquement jusque vers l'âge de 18 ans. Par exemple, il arrivait que sa mère lui plonge la tête dans l'eau, ou qu'elle fasse preuve d'une immense violence si les enfants n'étaient pas levés avant sept heures, ou encore d'arracher tout ce qui se trouvait dans sa chambre. Son père lui infligeait des douches froides ou l'avait traînée à l'âge de cinq ans sur un sommet de 4000 m alors qu'elle avait pleuré tout le long. Elle avait aussi reçu des grandes fessées de la part de son père et des coups de pieds de la part de sa mère. Elle avait parlé de ces violences à son mari. Au début, il écoutait sans rien dire, mais en relevant néanmoins qu'elle avait de la chance, à cette époque de vivre à la montagne, et que cela semblait chouette. Plus tard, il lui avait progressivement dit qu'il ne voulait plus entendre parler de cela. Il était également au courant de sa vulnérabilité en termes d'attachement, car elle lui disait son besoin d'une relation amoureuse et de fidélité. Il avait cependant appuyé sur ces éléments, soit pour faire des remarques grossières au sujet des belles femmes qu'ils croisaient (par exemple en lui disant que ce genre de femme lui mettait du sperme jusque dans les chaussettes), soit en lui disant, au sujet de la fidélité, qu'il n'était pas meilleur qu'un autre et que l'on verrait bien.

S'agissant des violences sexuelles, il n'y avait eu qu'un seul rapport anal environ six ans auparavant. Il lui avait demandé si elle voulait et elle n'avait pas dit non. Elle ne savait plus si elle avait exprimé quelque chose ou pas, mais elle pensait qu'elle avait probablement dit oui. Elle sentait cependant à l'intérieur d'elle-même qu'elle ne voulait pas de ce rapport, mais qu'elle n'avait pas réussi à exprimer son refus. Elle pensait qu'elle avait dû avoir peur de sa réaction, sans forcément craindre que celle-ci se manifeste sur le moment, mais qu'elles se traduisent par exemple par de la bouderie les jours suivants ou par des mots très durs. C'était selon son souvenir également l'époque où il avait donné un coup de poing dans une porte en lui faisant un trou, et où elle avait commencé à avoir peur d'une violence physique.

Le tribunal a relevé à ce stade qu'il était émotionnellement difficile pour Mme A______ de reconnaître qu'elle n'avait pas voulu de rapport sexuel anal et qu'elle n'avait pas su s'y opposer.

Cela faisait environ une année qu'elle avait réalisé que depuis déjà six ans environ, elle subissait des rapports sexuels dont elle ne voulait pas, même si émotionnellement, elle ressentait depuis tout ce temps un réel mal-être à ces occasions. Elle n'avait cependant jamais dit non au moment de ces rapports. Après cette prise de conscience, il lui avait encore fallu six mois de plus pour pouvoir affirmer qu'elle ne voulait désormais plus de rapports sexuels, ce qui y avait mis un terme au début de l'année 2025. Il y avait également eu des fellations un peu poussées et lors de la dernière, elle avait vomi sur son conjoint. Sur question de savoir si cette réaction avait provoqué une discussion quelconque entre eux, elle a expliqué que c'était arrivé environ une année auparavant, à l'hôtel, sur le trajet d'un voyage, et à son souvenir, ils n'avaient tout simplement pas parlé de cela et avaient évité le sujet.

Sur question du tribunal, elle ne savait pas pourquoi il n'y avait eu qu'un seul rapport anal, mais se souvenait que le lendemain ou peu de temps après, elle avait pensé à l'interdit que la sodomie constituait selon la Bible et qu'elle ne souhaitait pas que cela recommence.

M. E______ s'est exprimé à son tour en disant que les rapports sexuels étaient la question qui le choquait le plus dans les déclarations de son épouse. Il ne l'avait jamais forcée physiquement ou moralement. Il tombait des nues en entendant que, depuis longtemps, elle n'était pas bien dans leurs relations sexuelles et affectives. Concernant les violences dont elle lui avait fait part en lien avec son enfance, cela finissait par prendre toute leur vie. Il entendait son malaise, mais il ne pouvait pas l'aider et se sentait impuissant, de sorte qu'il lui avait demandé d'arrêter d'en parler. Il était vrai également qu'ils avaient eu deux éducations très différentes et qu'il lui avait exprimé le fait qu'il ne comprenait pas très bien pourquoi elle en faisait tout un drame, alors que qu'il n'avait pas eu la chance comme elle d'aller faire des excursions à la montagne, ce qu'il aurait trouvé super cool.

S'agissant de leur sexualité, il lui avait toujours semblé qu'elle y prenait du plaisir et qu'il y était lui-même attentif. Il était choqué d'apprendre que depuis des années, elle feintait. Ils avaient eu des discussions sur les doigts pénétrants. Leurs relations étaient peut-être moins conventionnelles que celle que connaissaient certaines amies de l'entourage de son épouse. Lorsque cela allait trop loin pour elle, il s'était toujours arrêté. Quant à la pénétration avec son point, c'était tout à fait faux. Jusqu'à récemment, elle lui avait toujours dit qu'elle appréciait qu'il soit attentif à lui procurer du plaisir et c'était peut-être une relecture de leur histoire qui ne lui en faisait désormais voir que le mal. Il ne l'avait jamais forcée et était extrêmement étonné par la violence de ses propos. S'agissant de la fellation, cela faisait partie des pratiques dont il discutait et de son côté, il pratiquait le cunnilingus et d'ailleurs à sa demande, étant précisé qu'il arrivait à son épouse d'initier elle-même leurs rapports sexuels, ou à lui exprimer le fait qu'il était trop fatigué. Il ne comprenait pas comment il aurait pu s'apercevoir qu'elle n'était pas satisfaite, puisqu'elle ne l'avait jamais exprimé. Concernant le rapport anal qui n'avait eu lieu qu'une seule fois, contrairement à ce qui était indiqué dans le procès-verbal de la police, son épouse avait exprimé auparavant sa réticence en disant qu'elle trouvait cela un peu sale, puis elle était ensuite venue vers lui en lui disant « si tu veux, je veux bien » et elle s'était elle-même munie de lubrifiant. Juste après, ils avaient convenu tous les deux qu'ils n'avaient pas trouvé ce type de rapport satisfaisant. Depuis environ un an ou un an et demi, les préliminaires étaient devenus progressivement plus courts et l'acte sexuel plus monotone. Lors de leur avant-dernier rapport qui avait eu lieu en décembre 2024, c'était elle qu'il l'avait approché en lui disant qu'elle en avait vraiment envie. Il lui avait demandé si elle en était bien sûre, étant donné que leurs liens étaient quand même déjà plus tendus à cette époque. Au moment de leur dernier rapport, qui avait eu lieu en janvier 2025 et suite à quoi elle s'était installée dans le bureau, il s'était rendu compte que cela ne se passait pas bien et il avait immédiatement arrêté. Il avait senti qu'elle prenait des distances, lui reprochant d'avoir été lui-même distant avec un travail très prenant et qu'elle en avait eu marre de s'occuper de tout à la maison. Elle avait probablement également mal vécu le fait qu'ils soient tous deux de tempérament assez différent, lui-même appréciant une certaine tranquillité, tandis qu'elle avait besoin de bouger et de faire du sport.

Concernant ce que son épouse avait dit au sujet d'D______, il fallait préciser que celui-ci se blottissait volontiers dans ses bras lorsque Mme A______ n'était pas à la maison.

Il avait énormément d'incompréhension au sujet de la plainte déposée par son épouse et de sa volonté de l'éloigner de leurs enfants. Jusqu'à tout récemment, elle ne lui avait jamais exprimé son sentiment qu'il l'agressait et il ne comprenait pas pourquoi elle voulait impliquer désormais la justice et les services sociaux, sachant qu'ils avaient entamé une thérapie. Il pensait que le changement d'attitude de son épouse pouvait être lié au fait qu'au moment où elle avait changé de psychologue à la fin de l'été 2024, elle lui avait dit avoir subi des violences de la part de la psychologue qui l'avait suivie jusque-là, du fait des refus que cette dernière avait exprimés au sujet d'une médication ou d'un suivi chez un sexothérapeute. Mais le malaise de son épouse remontait selon lui à loin. Elle avait d'abord remis en question ses parents, puis sa religion et son éducation, puis enfin leur couple et peut-être que dorénavant, elle se questionnait également sur son orientation sexuelle, puisqu'il avait découvert qu'elle lisait un livre relatant le parcours d'une jeune catholique finissant par se rebeller et découvrir son homosexualité.

Mme A______ a encore exprimé le fait que le changement de situation liée à la mesure d'éloignement provoquait chez elle un immense soulagement, car il s'agissait d'un changement profond avec un cadre légal, en comparaison avec la période précédente où, quand bien même son mari avait quitté l'appartement, elle le sentait revenir vers elle de toutes les manières, notamment par les contacts pris avec son entourage, auquel elle avait désormais demandé de ne plus en faire mention. C'était un stop hyper fort, mais qui néanmoins la stressait, parce qu'elle craignait la réaction que cela pourrait entraîner chez lui. Elle se sentait beaucoup mieux et percevait également un changement de comportement chez ses enfants.

Suite à la question du tribunal adressé à M. E______ de savoir comment il expliquait le fait que son épouse affirmait avoir subi la pénétration vaginale avec toute la main, Mme A______ a expliqué que ce n'était pas le point entier, mais tous les doigts.

M. E______ a déclaré que si l'on ne parlait effectivement pas de la pénétration avec le poing, il était exact qu'ils avaient essayé la pénétration avec tous ses doigts, mais c'était durant un acte où ils ne cessaient de communiquer et où son épouse n'avait jamais demandé à que cela s'arrête. Sur question du tribunal de savoir s'il était exact qu'il y avait eu une fellation lors de laquelle son épouse avait vomi sur lui, il ne s'en souvenait pas. Sur question de la représentante du commissaire de police au sujet des menaces de suicide qu'il aurait proférées, il a expliqué que cela s'était passé un soir où ils avaient eu l'une de ces disputes durant laquelle son épouse avait énuméré tous les reproches qu'elle avait à lui faire, et où il avait fini par aller s'enfermer dans sa chambre en disant « elle me tue, elle me tue, je vais me tuer ». Les deux enfants aînés étaient déjà dans leur chambre, mais peut-être qu'D______ pas encore. Sur question du tribunal de savoir quel était alors son volume de voix, il ne savait pas. Sur question de savoir s'il marmonnait ou s'il hurlait, c'était probablement entre les deux. Cela dit, il ne s'adressait pas directement à son épouse et se parlait à lui-même, porte fermée. Sur question du conseil de son épouse, il ne se souvenait pas d'avoir répété le lendemain matin qu'il comptait se jeter par la fenêtre, mais il avait cependant eu une vive discussion suite au fait qu'elle avait emmené les enfants dans la chambre à coucher. Il lui avait alors demandé pourquoi et si elle craignait de sa part des attouchements sexuels à leur rencontre, étant précisé qu'il lui avait confié tout récemment qu'il y en avait eu dans sa famille.

Le conseil de M. E______ a plaidé en concluant à l'annulation de la mesure litigieuse.

Le conseil de Mme A______ a plaidé en concluant à la confirmation de la mesure litigieuse, ce qu'a également fait la représentante du commissaire de police.

Les parties ont ensuite été informées que la cause était gardée à juger.

8.             Par jugement du 20 juin 2025 (JTAPI/676/2025), le tribunal a rejeté l'opposition formée le 18 juin 2025 par M. E______ contre la mesure d’éloignement prise à son encontre par le commissaire de police le 16 juin 2025 pour une durée de onze jours.

Il découlait des déclarations des parties, en particulier de celles de Mme A______, qu'elle était victime depuis de nombreuses années de violences sexuelles, ainsi que de violences verbales et psychologiques, relevant, la manière très réaliste dont la précitée avait été capable de dépeindre le climat de violence progressivement de plus en plus fort qu'elle avait subi durant de nombreuses années de la part de son mari, notamment en l'illustrant par des exemples précis.

La manière dont la violence sexuelle, verbale et psychologique s'était peu à peu instaurée dans le couple, en commençant par exemple par des « petites moqueries », puis en s'intensifiant et en survenant sur des sujets anodins (par exemple pour des bulles dans une gaufre ou du bruit) était particulièrement frappante, en ce qu'elle correspondait typiquement aux phénomènes d'emprise, notamment de la part de personnes atteintes d'un trouble de type pervers narcissique.

Le tribunal a en outre retenu que M. E______ semblait dans un déni massif de la souffrance qu'il avait infligée à son épouse sous différentes formes pendant de nombreuses années. De manière encore plus frappante, il avait été jusqu'à répéter devant le tribunal, au sujet des plaintes exprimées par son épouse concernant les extrêmes violences qu'elle avait subies de la part de ses parents, qu'elle avait eu de la chance de vivre à la campagne notamment, amenant le tribunal à se poser sérieusement des questions sur ses capacités d'empathie.

Cette interrogation trouvait par ailleurs un écho dans d'autres déclarations de M. E______, par exemple lorsque, s'agissant de la sexualité du couple, celui-ci s'était déclaré choqué d'apprendre que depuis toutes ces années, son épouse « feintait », comme si, entendant de la bouche de cette dernière qu'elle avait en réalité énormément souffert et vécu des années de sexualité non consentie, il trouvait matière à lui reprocher d'avoir fait semblant d'y trouver du plaisir.

Le déni de M. E______ par rapport à la violence qu'il avait infligée sur différents plans à son épouse trouvait par ailleurs son expression concrète dans les exemples donnés par Mme A______, qui n'arrivait pas à se faire entendre lorsqu'elle lui demandait de modifier des comportements de plus en plus heurtants et qu'elle se heurtait à une non-entrée en matière, ou lorsqu'elle tentait, par exemple dans des actes de pénétration vaginale par les doigts, de lui faire comprendre qu'elle ne pouvait pas le supporter. Dans cette mesure, le fait que Mme A______ ne soit pas toujours parvenue à exprimer verbalement son refus de l'acte sexuel ou de certaines pratiques ne relativisait pas du tout la gravité du comportement de M. E______, qu'un tel silence arrangeait en réalité, lui permettant d'ignorer le message que son épouse transmettait forcément sur le plan émotionnel. À cet égard, un autre exemple frappant était celui de la fellation pratiquée par Mme A______ dans un contexte qu'elle avait su décrire de manière tout à fait précise et durant laquelle elle avait fini par avoir une réaction vomitive sur son mari. Or, interrogé à ce sujet par le tribunal, M. E______ avait indiqué, d'une manière tout à fait invraisemblable, qu'il ne s'en souvenait pas, alors qu'un tel événement ne pouvait que laisser une trace assez vive dans la mémoire. C'était dire, à nouveau, à quel point M. E______ était apte à ignorer la souffrance de son épouse, voire à la nier.

Dans le même ordre d'idées, le tribunal avait été frappé que M. E______ puisse non pas nier catégoriquement avoir donné des douches froides à ses enfants comme punition, mais ne pas s'en souvenir, des actes de ce type n'appartenant manifestement pas aux micros-actes du quotidien dont on parvenait difficilement à se souvenir. De même lorsqu'il exprimait le fait qu'il ne « pens[ait] pas » avoir déjà frappé ses enfants, hormis une fessée infligée à son fils.

Enfin, le tribunal a relevé que M. E______ n'avait pas contesté avoir déclaré, au moins à une reprise, récemment, qu'il avait voulu se tuer, ses déclarations à ce sujet permettant de comprendre, malgré ses tentatives pour minimiser cet événement, qu'il avait proféré cette menace à voix suffisamment haute pour que son épouse puisse l'entendre malgré la porte qui les séparait, et en prenant d'ailleurs le risque que son fils D______, dont il n'était pas sûr qu'il soit déjà couché, puisse l'entendre également. De tels propos étaient évidemment constitutifs de violence psychologique pour les proches qui les entendaient.

9.             Par acte du 23 juin 2025, parvenu au tribunal le 24 juin 2025, Mme A______ a demandé la prolongation de la mesure d'éloignement pour une durée supplémentaire de 30 jours. Elle a sollicité du tribunal d'être dispensée de comparaître vu l'épreuve particulièrement dure qu'avait représentée pour elle sa comparution à l'audience du 20 juin 2025.

10.         Vu l'urgence, le tribunal a informé les conseils des parties par téléphone et courriel du 24 juin 2025, de l'audience qui se tiendrait le 26 juin 2025. Les parties ont en outre été informées par le tribunal qu'il avait été fait droit à la demande de Mme A______ d'être dispensée de comparaître à l'audience du 26 juin 2025 et qu'elle y serait en conséquence représentée par son conseil.

11.         Lors de cette audience, les parties ont déposé des chargés de pièces complémentaires.

M. E______ a produit :

- un certificat médical établi le 19 juin 2025 par le docteur I______, psychiatre et psychothérapeute, à teneur duquel ce dernier certifiait suivre M. E______ depuis octobre 2023 et que l'état de santé de ce dernier, selon ses observations cliniques jusqu'à présent, lui permettait de s'occuper de ses enfants ;

- une capture d'écran d'un courriel lui ayant été adressé le 25 juin 2025 par la régie J______ et lui communiquant les coordonnées de la concierge d'un appartement en vue de sa visite ;

- l'extractions de messages qu'il avait échangés avec son épouse entre le 23 mai 2025 et le 27 mai 2025, puis entre le 8 juin 2025 et le 11 juin 2025, enfin entre le 14 juin 2025 et le 16 juin 2025.

Mme A______, par l'intermédiaire de son conseil, a produit :

-       des captures d'écran, non datées, de messages échangés avec son amie K______ le 21 juin 2025, son père le 25 juin 2025 et son amie L______ le 25 juin 2025.

Entendu par le tribunal, M. E______ a confirmé être à la recherche d’un appartement. Il en avait visité un le 25 juin 2025, proche de l’école et des crèches. Il pensait que cet appartement lui serait attribué dans la mesure où il se trouvait dans un immeuble, propriété de son employeur, avec entrée dans les locaux le 1er juillet 2025. Il s'agissait d’un 4 pièces devant lui permettre provisoirement d’accueillir ses trois enfants avant de trouver quelque chose de plus grand lui convenant davantage.

Sur questions du tribunal, il a confirmé avoir respecté la mesure d’éloignement et n’avoir contacté ni son épouse, ni les enfants, ce qu'a également confirmé le conseil de Mme A______.

Ses beaux-parents l'avaient contacté. Contrairement à ce qui était écrit dans le message de son beau-père, produit à l'audience par son épouse, ce dernier avait demandé à son gendre (soit l'époux de sa deuxième fille) de lui demander de ne pas faire opposition à la mesure d'éloignement, ce que son beau-frère n’avait cependant pas fait par message. Ils en avaient en revanche parlé, avec son beau-frère, de vive voix le samedi 21 juin 2025 lorsqu'ils s'étaient vus à une soirée. À cette occasion, il avait compris que son épouse avait déjà fait part au mari de sa sœur de toutes les conclusions du juge après l’audience du 20 juin 2025. Son épouse en avait d’ailleurs fait part à d’autres, soit toutes les personnes de son entourage à lui, y compris celles avec lesquelles son épouse avait moins de contacts.

Lorsque son épouse avait fait sa dénonciation à la police, dont le tribunal lui a rappelé qu’il s’agissait en réalité d’une plainte, elle en avait informé tous leurs amis communs, soit tous ceux dont son épouse savait qu'il leur parlait. Elle leur avait expliqué qu'elle avait déposé une main courante le lundi (16 juin 2025) et que c’était très grave, avec un screenshot sur lequel étaient lisibles : « agression sexuelle, injures et violences sur les enfants. Face à la violence, l’État de Genève a décidé de porter plainte ».

Sur question du tribunal, M. E______ a confirmé qu'il avait effectivement contacté VIRES le 16 juin 2025. Il avait eu un premier entretien le 19 juin 2025 et en aurait un second le 27 juin 2025, copie de l'attestation établie par VIRES le 19 juin 2025 à l'appui de ses dires.

Il a ajouté qu'il y avait eu une véritable escalade depuis que son épouse avait pris la décision de leur séparation, sauf erreur le 9 mai 2025, dans le cadre de la thérapie de couple qu'ils avaient initiée au début de l’année 2025, laquelle avait finalement pris la forme d’une médiation. Après le choc de la séparation, il avait tout accepté pour apaiser les tensions, notamment de quitter le domicile conjugal. Il y avait eu beaucoup de choses. Outre les reproches quant à l’éducation des enfants ou sa prétendue infidélité, ce qui était faux, son épouse l’avait par exemple, en décembre 2024, inscrit sans le lui dire sur M______. Elle lui avait en outre créé une adresse
e-mail : E______@gmail.com et il ignorait ce qu'elle avait fait avec cette adresse de courriel.

Entre le 9 mai 2025 et le 16 juin 2025, il avait notamment contacté VIRES et l’Unité interdisciplinaire de médecine et prévention de la violence des Hôpitaux Universitaires de Genève (UIMPV). Son épouse lui reprochait des violences conjugales et psychologiques dans le cadre de l’escalade à laquelle il avait fait référence plus tôt. Chaque semaine, il y avait eu autre chose. Par ailleurs, ces accusations de violences étaient consécutives au fait qu'il lui avait parlé, à cette période, des attouchements commis par son grand-père sur ses tantes et dont il venait d’apprendre l’existence.

S'agissant des messages dont il avait demandé à ce qu'ils soient versés au dossier, et sur question du tribunal qui lui a demandé s'il s'agissait de tous les messages qu'ils avaient échangés avec son épouse entre le 23 mai 2025 et le 16 juin 2025, il a répondu qu'il ne s'agissait effectivement pas de tous les messages qu'ils avaient échangés durant cette période, mais de ceux illustrant le fait que son épouse n'avait vu aucun inconvénient, bien au contraire, à ce qu'il s'occupe, seul, des enfants pour lui permettre de partir en week-ends, notamment à Ibiza du 24 au 25 mai 2025. Il a ajouté qu'en mars 2025, il s'était occupé seul d’D______ pendant une semaine, alors que B______ et C______ étaient gardés par ses beaux-parents.

Sur question du tribunal, après qu'il lui ait fait remarquer qu'il s'était montré ambivalent dans ses déclarations au tribunal lors de l'audience du 20 juin 2025 s'agissant des faits de violence allégués par son épouse à l'égard de leurs enfants, il a contesté avoir commis tout acte de violence à l’encontre de ces derniers. Il était sous le choc. À une seule reprise, il avait donné une fessée à D______ qu'il avait immédiatement regrettée ; il le changeait et il y avait du caca sur le lit. D______ ne cessait de s’agiter, car il voulait que ce soit sa mère qui s’occupe de lui. À ce moment-là, son épouse n’avait pas souhaité intervenir. Toutes les accusations étaient fausses et incohérentes.

Sur question du tribunal, il ne s'opposait pas à la demande de prolongation de la mesure d’éloignement à l’égard de son épouse. Si elle ne souhaitait pas le voir, il le comprenait et le respectait. Il n’en demeurait pas moins qu'il contestait fermement ses accusations.

Le conseil de Mme A______ a indiqué que sa mandante avait eu contact avec le SPMi le 23 juin 2025 et que ce service avait également contacté M. E______.

M. E______ a confirmé que la personne du SPMi lui avait dit qu’elle l'appelait à la demande de son épouse. Au cours de leur entretien téléphonique, elle lui avait dit que son épouse l'avait chargée de lui demander s'il entendait retourner au domicile conjugal, ce à quoi il avait répondu : « évidemment que non ». Néanmoins, le lendemain, son épouse avait demandé la prolongation de la mesure d’éloignement.

Le conseil de Mme A______ a expliqué que, lorsque la gestionnaire du SPMi avait rappelé sa mandante, elle lui avait dit que M. E______ était extrêmement fâché.

Elle a également rappelé que lors de la précédente audience, M. E______ n’avait pas contesté avoir menacé de se suicider à l’issue de la médiation. Il apparaissait clair que M. E______, lorsqu’il était en proie à des moments de détresse, comme c’était le cas actuellement, devenait violent psychologiquement et physiquement, et qu’en conséquence, il n’était, à l’heure actuelle, pas en mesure de s’occuper des enfants

S’agissant des messages produits ce jour par M. E______, elle attirait l’attention du tribunal sur le fait que sa mandante n’avait jamais remis en cause le fait que son mari s’était occupé des enfants depuis leur naissance. Le bien-être des enfants était l’objectif principal de Mme A______.

Par ailleurs, comme le verrait le tribunal à teneur du message de L______ (amie de Mme A______), celle-ci avait constaté un changement de comportement chez B______, changement également constaté par Mme A______ chez sa fille. Sa mandante lui avait rapporté que ses trois enfants lui semblaient beaucoup plus apaisés et calmes depuis le prononcé de la mesure d’éloignement.

Elle a encore précisé qu'il n'était aucunement l'intention de sa mandante de couper les liens entre les enfants et leur père. Cela étant, le comportement de M. E______ était problématique. S’il avait admis quelques points lors de la dernière audience, il les contestait désormais. Il était totalement dans le déni, ce qui laissait à penser qu’il existait un risque concret de violences en cas de reprise de contacts avec les enfants.

Sur questions du tribunal, elle a indiqué qu'une requête de mesures protectrices de l’union conjugal avec mesures provisionnelles serait prochainement déposée au Tribunal de première instance. Dans un premier temps, sa mandante envisageait de demander une garde exclusive avec un droit de visite accompagné, un week-end sur deux. Cette requête n’avait pas encore été déposée, vu la mesure d’éloignement, ce sur quoi le tribunal lui a rappelé que le but de la mesure d’éloignement était de contenir un risque de récidive et non de statuer sur le sort des relations personnelles avec les enfants notamment, de la compétence exclusive de l’autorité civile.

Elle l'avait pas de question à l'attention de M. E______.

Sur questions du conseil de M. E______ qui lui a demandé :

-       quand avait eu lieu cette prétendue menace de suicide, elle a répondu, sauf erreur le 9 mai 2025, selon le jugement du TAPI ;

-       de détailler toutes les violences physiques commises par M. E______ sur les enfants durant les week-ends où il s’en était occupé seul parce que son épouse était absente, elle a répondu que, comme l’avait répété à plusieurs reprises sa mandante, celle-ci n’avait jamais décrit des violences quotidiennes, mais, au contraire, une violence progressive. Sa mandante était par ailleurs de fait absente lors de ces week-ends. Par conséquent, elle n'était pas en mesure de savoir ce qu’il s’était passé ;

-       si elle confirmait que sa mandante avait régulièrement reçu des photographies des enfants durant les week-ends où elle avait été absente, elle a répondu qu'elle ne le savait pas, dans la mesure où elle n'avait pas vu ces photographies, hormis les indications qui figuraient dans les messages produits.

M. E______ a ajouté qu'il n'était pas un danger pour ses enfants. La semaine précédente, il était sous le choc. Ils avaient pris part une médiation pour organiser une séparation la plus sereine possible et, une semaine plus tard, son épouse l’accusait de toute une série de choses fausses. C’était la raison pour laquelle il n'avait pas été plus assertif dans ses réponses jusqu’ici. Son épouse préparait en réalité cela depuis des mois, notamment en prenant contact avec diverses associations. Elle utilisait différents moyens, notamment ChatGPT pour restructurer son ressenti. Tout cela n’avait plus rien de cohérent et était évidemment faux. Il était tout aussi faux de dire qu'il était un danger pour les enfants. Il ne les avait jamais mis en danger, contrairement à son épouse. Il faisait notamment référence à leurs vacances en décembre 2024. Son épouse avait décidé de visiter une grotte avec les enfants et il les avait accompagnés. Il y avait beaucoup d’eau et il avait demandé à son épouse qu’ils s’arrêtent, car c’était dangereux pour les enfants. Elle avait absolument voulu continuer et avait effectivement continué avec les enfants. Elle lui avait ainsi forcé la main. Or, la descente était effrayante. Il relevait encore que son épouse avait, avec les enfants, des comportements qui étaient ceux qu’elle avait reprochés à ses propres parents.

Sur question du tribunal qui lui a demandé, après lui avoir rappelé qu'il contestait toute violence à l’égard des enfants, à l’exception d’une fessée dans un contexte très particulier, geste qu'il avait par ailleurs expliqué avoir immédiatement regretté, s'il contestait être colérique et régulièrement crier devant et sur les enfants, il a répondu qu'il ne criait pas, mais qu'il posait des limites. Son épouse, elle, lui criait dessus devant les enfants. Depuis le début de l’année 2025, il vivait un véritable acharnement. Son épouse listait ses reproches le concernant, en criant devant les enfants.

Le conseil de Mme A______ a conclu à la prolongation de la mesure d’éloignement à l'égard, tant de sa mandante que des trois enfants, pour une durée de 30 jours.

M. E______, par l'intermédiaire de son conseil, a attiré l'attention du tribunal sur le fait que la demande de son épouse, visant à ce qu’elle soit dispensée de comparaître à l'audience, faisait en réalité suite au fait qu'elle savait que ces messages seraient produits.

Il a plaidé et conclu au rejet de la demande de prolongation.

Le tribunal a invité M. E______ à s'entretenir avec son conseil vu la divergence entre sa position exprimée plus tôt s'agissant de sa non-opposition à la prolongation de la mesure d'éloignement administrative à l'égard de son épouse et sa conclusion visant au rejet de dite demande. Après avoir consulté son conseil, il a confirmé effectivement s’opposer à la demande de prolongation, y compris à l’égard de son épouse, dès lors qu'il n'avait commis aucune violence domestique. En revanche, comme il avait l'exprimé plus tôt, il respectait tout à fait le fait qu’elle ne veuille pas le voir. Il entendait recourir contre le jugement du tribunal du 20 juin 2025 (JTAPI/676/2025).

 

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des demandes de prolongation des mesures d'éloignement prononcées par le commissaire de police (art. 11 al. 2 de la loi sur les violences domestiques du 16 septembre 2005 - LVD - F 1 30), sur lesquelles il est tenu de statuer avant l'échéance de la mesure, avec un pouvoir d'examen s'étendant à l'opportunité (art. 11 al. 3 LVD).

2.             Déposée en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, la demande de prolongation est recevable au sens de l'art. 11 al. 2 LVD.

3.             La LVD a pour but de contribuer à la protection de la personnalité dans le cadre familial et domestique en soutenant et en renforçant les efforts de lutte contre les violences domestiques (art. 1 al. 1 LVD).

Par « violences domestiques », la loi désigne une situation dans laquelle une personne exerce des violences physiques, psychiques, sexuelles ou économiques sur une autre personne avec laquelle elle est liée par un rapport familial, conjugal, de partenariat ou d'union libre, existant ou rompu (art. 2 al. 1 LVD).

Par « personnes concernées par les violences domestiques », la loi vise notamment les victimes et les auteurs de violences domestiques, les proches de ces personnes ainsi que les professionnels du domaine (art. 2 al. 2 LVD).

Selon l'art. 8 al. 1 LVD, la police peut prononcer une mesure d'éloignement à l'encontre de l'auteur présumé d'actes de violence domestique, si la mesure paraît propre à empêcher la réitération de tels actes.

Selon l'art. 8 al. 2 LVD, une mesure d'éloignement consiste à interdire à l'auteur présumé de

a) pénétrer dans un secteur ou dans des lieux déterminés ;

b) contacter ou approcher une ou plusieurs personnes.

La mesure d'éloignement est prononcée pour une durée de dix jours au moins et de 30 jours au plus (art. 8 al. 3 LVD).

Elle peut être prolongée pour 30 jours au plus. Depuis le prononcé initial de la mesure, sa durée totale ne peut excéder nonante jours (art. 11 al. 2 LVD).

En vertu de l'art. 12 LVD, la mesure d'éloignement est assortie de la menace des peines prévues à l’art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937
(CP - RS 311.0), qui prévoit que « celui qui ne se sera pas conformé à une décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue au présent article, par une autorité ou un fonctionnaire compétents sera puni d'une amende ».

Il ressort des travaux préparatoires relatifs à la révision de la LVD en 2010, que la volonté clairement exprimée par le législateur était de simplifier la loi, de manière à en favoriser une application plus régulière et effective. Dans ce sens, le nouvel art. 8 al. 1 LVD ne vise plus une mesure qui serait nécessaire pour écarter un danger relatif à des actes de violences domestiques, mais qui doit être simplement propre à empêcher la réitération de tels actes. En revanche, la loi continue à poser pour condition l'existence d'une présomption que des actes de violences domestiques ont été commis auparavant (rapport de la commission judiciaire et de la police chargée d'étudier le PL 10582, p. 11).

Ainsi que cela résulte des principes rappelés ci-dessus, les violences à l'origine de la mesure d'éloignement n'ont pas à être prouvées. Il suffit que l'on puisse présumer, sur la base de l'ensemble des circonstances, qu'elles ont eu lieu. La LVD est ainsi faite pour protéger la personne dont il paraît plausible qu'elle a été victime de telles violences, et constitue ainsi un cadre essentiellement préventif. Elle diffère sur ce point d'une procédure pénale, dont l'issue emporte des conséquences beaucoup plus sévères pour l'auteur, et qui est parallèlement soumise à des exigences de preuve plus strictes.

4.             En l'espèce, s'agissant des violences domestiques alléguées par Mme A______, tant sur le plan sexuel que verbal et psychologique, le tribunal constate que les déclarations des parties sont en tous points contradictoires. Ce nonobstant, il retient qu'il existe, comme l'a retenu le tribunal dans son jugement du 20 juin 2025 (JTAPI/676/2025), après avoir longuement entendu les parties, un faisceau de nombreux indices convergents permettant de retenir l'existence d'une présomption que des actes de violences domestiques ont été commis par M. E______ à l'encontre de son épouse, au vu, en particulier, des déclarations circonstanciées et mesurées de Mme A______, dont la crédibilité apparaît renforcée par des exemples concrets et des détails périphériques spécifiques, étant rappelé qu'il ne revient pas au tribunal de statuer sur la véracité des faits reprochés, celui-ci se contentant d'examiner les violences domestiques allégués sous l'angle de la vraisemblance suffisante.

A cela s'ajoute qu'il ressort des éléments au dossier que M. E______, bien qu'il conteste désormais fermement les faits qui lui sont reprochés, a néanmoins admis, lors de sa première audition par la police, avant de se rétracter petit à petit, avoir crié à plusieurs reprises, au cours des trois semaines ayant précédé, y compris devant les enfants, et insulté son épouse, ainsi qu'avoir été en proie à des crises d'angoisse, au point de menacer de se suicider le 9 mai 2025, devant son épouse et son fils, enfin s'être rendu aux urgences psychiatriques. Force est ainsi de constater que la situation, très conflictuelle, et dont l'on voit mal par quel moyen elle pourrait rapidement s'apaiser, est de nature à exacerber le risque de survenance de nouvelles violences.

S'agissant de la demande de prolongation de la mesure d'éloignement en ce qu'elle concerne les trois enfants, B______, C______ et D______, âgés de respectivement 7 ans, 5 ans et demi et 4 ans et demi, le tribunal retient, là encore, qu'il existe, sous l'angle de la vraisemblance, une présomption suffisante de la commission de violences à leur égard, notamment s'agissant de la morsure infligée à D______ en octobre 2024 et des douches froides à titre de punition, malgré les dénégations de M. E______, à l'exception d'une fessée donnée à D______ dans des circonstances décrites comme particulières. En particulier, il sera relevé, qu'à la question de savoir s'il était colérique et s'il contestait régulièrement crier devant les enfants et sur ses enfants, l'intéressé s'est limité à répondre qu'il fixait des limites et à mettre en cause son épouse. Les messages produits par M. E______ − outre qu'il s'agisse d'extraits choisis ne permettant pas au tribunal de se forger une opinion sur la nature des échanges entre ce dernier et Mme A______ et qu'il lui aurait été loisible de les produire le 19 juin 2025 déjà − ne suffisent pas à démontrer, malgré ce qu'il allègue, qu'il n'y a pas eu d'actes de violence de sa part à leur encontre. Tout au plus, ces messages attestent qu'il s'est occupé des enfants entre le 24 et le 25 mai 2025 alors que son épouse était à l'étranger, sans qu'il puisse par ailleurs lui être fait grief de s'être rendue à Ibiza avec ses amies. Or, comme cela ressort des déclarations constantes et mesurées de Mme A______, tant à la police que devant le tribunal de céans le 20 juin 2025, celle-ci n'a jamais remis en cause le fait que son époux s'occupe des enfants ni prétendu que les violences étaient quotidiennes, mais, au contraire, qu'une violence progressive s'était installée et que celle-ci était exacerbée en situation de fatigue et de détresse, soit précisément les circonstances actuelles. Enfin, le tribunal retient qu'il n'existe pas de raison valable de s'écarter du contenu du message que L______ a envoyé à Mme A______ et dont il ressort qu'elle a constaté un changement de comportement chez B______, ce que Mme A______ a également relevé chez C______ et D______ qui sont plus calmes et apaisés depuis le prononcé de la mesure d'éloignement.

5.             Au vu de ce qui précède, la demande de prolongation sera admise et la mesure d'éloignement prolongée tant à l'égard de Mme A______ que des enfants B______, C______ et D______.

6.             Reste à déterminer s'il se justifie de prolonger cette mesure pour une durée de trente jours, comme l'a requis Mme A______.

7.             En l'occurrence, le tribunal retient que cette durée apparaît excessive au motif que les époux ne font plus domicile commun depuis le 9 mai 2025 et que M. E______ a entrepris les démarches en vue de trouver un nouvel appartement et qu'un bail devrait être signé d'ici le 30 juin 2025, avec une entrée dans l'appartement dès le lendemain.

A cela s'ajoute, comme l'a rappelé le tribunal lors de l'audience du 26 juin 2025, qu'il ne lui revient pas de se prononcer sur une éventuelle suspension de l'exercice des relations personnelles entre M. E______ et ses enfants, de compétence exclusive de la justice civile. Il s'en suit qu'un délai de dix jours apparaît largement suffisant à Mme A______ pour, comme cela est son intention, saisir le juge civil d'une requête en mesures protectrices de l'union conjugale avec, cas échéant, des mesures provisionnelles.

8.             Au vu des développements qui précèdent, la demande de prolongation sera partiellement admise et la mesure d'éloignement prolongée, mais pour une durée de 10 jours, soit jusqu'au 4 juillet 2025 à 17h00.

9.             Il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA).

10.         Un éventuel recours déposé contre le présent jugement n'aura pas d'effet suspensif (cf. rapport du 1er juin 2010 de la Commission judiciaire et de la police du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi 10582-A du Conseil d'État modifiant la LVD, in MGC 2009-2010/IX A, D. Examen de détail, ad art. 11 al. 1 LVD).


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable la demande formée par Madame A______ le 23 juin 2025 tendant à la prolongation de la mesure d'éloignement prononcée par le commissaire de police le 16 juin 2025 à l’encontre de Monsieur E______ pour une durée de trente jours, soit jusqu'au 26 juillet 2025 à 17h00 ;

2.             l'admet partiellement ;

3.             prolonge la mesure d'éloignement dans son principe, mais réduit sa durée à dix jours, soit jusqu'au 4 juillet 2025 à 17h00, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, dont la teneur figure dans les considérants ;

4.             dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant ;

6.             dit qu'un éventuel recours contre le présent jugement n'aura pas d'effet suspensif.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Laetitia MEIER DROZ

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties. Une copie du jugement est transmise pour information au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant ainsi qu'au commissaire de police.

Genève, le

 

La greffière