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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2919/2024

JTAPI/138/2025 du 05.02.2025 ( LCR ) , REJETE

REJETE par ATA/1332/2025

Descripteurs : AVERTISSEMENT(SANCTION)
Normes : LCR.16a.al4; LCR.16a.al3
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2919/2024 LCR

JTAPI/138/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 5 février 2025

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Gaétan DROZ, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1952, est titulaire d’un permis de conduire.

2.             Selon le rapport de renseignements établi le 31 janvier 2024 par la gendarmerie, un accident avec dégâts matériels est survenu suite à la collision entre deux voitures de tourisme, le 2 novembre 2023, à 15h20, au chemin des Clos à Hermance.

Il était reproché à M. A______ de ne pas avoir gardé une distance latérale suffisante et avoir percuté un véhicule arrêté en sens inverse pour les besoins de la circulation.

Quelques heures après l'accident, Madame B______, automobiliste impliquée, s'est présentée au poste de police de C______ pour relater les faits. La police n'est pas intervenue sur place. Aucun point de choc n'a été relevé.

Venant d'Anières, M. A______, automobiliste, circulait chemin des Clos en direction d'Hermance. Alors qu'il croisait chemin avec un second automobiliste venant en sens inverse, l'avant gauche de son véhicule avait heurté l'arrière gauche dudit véhicule conduit par Mme B______. Cette dernière, venant d'Hermance, circulait chemin des Clos en direction d'Anières. Lors de la rencontre entre les deux automobilistes, Mme B______ avait placé son véhicule sur le bord de la chaussée, immobile, afin de laisser passer la voiture conduite par M. A______.

Un témoin automobiliste a confirmé les faits tels que précités.

3.             Par ordonnance pénale du 18 mars 2024, le service des contraventions a condamné M. A______ à une amende de CHF 860.- pour infractions aux art. 26, 34 et 90 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01) en raison de l'accident du 2 novembre 2023. Il lui était reproché une distance latérale insuffisante, avec accident et dégâts matériels.

4.             En date du 24 avril 2024, M. A______ a fait opposition à l'ordonnance pénale précitée. Il se référait au descriptif de l'accident adressé à son assurance. En substance, les faits décrits par Mme B______ étaient mensongers, le témoin évoqué n'avait pas assisté à l'accident. En revanche, sa compagne qui se trouvait dans la voiture avec lui avait assisté à toute la scène. L'accident survenu n'était pas de sa faute mais de celle de Mme B______, laquelle avait entrepris d'avancer bien que la chaussée ne soit pas suffisamment large pour permettre à deux véhicules de circuler en même temps ; et malgré qu'ils s'étaient entendus sur le fait qu'elle restait immobile.

5.             Le 4 juin 2024, le service des contraventions a prononcé une ordonnance de maintien de l'ordonnance pénale prononcée le 18 mars 2024 et transmis la procédure au Tribunal de police.

Il ressortait du rapport de police que la version des faits de Mme B______ était confirmée par les déclarations du témoin.

Que partant, il décidait que la procédure devait se poursuivre et transmettait la procédure au Tribunal de police afin qu'il statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition, étant précisé que l'ordonnance pénale tenait lieu d'acte d'accusation. M. A______ pourrait faire valoir ses réquisitions de preuves (audition de témoins ou autres) par devant le Tribunal de police.

6.             Le 14 juin 2024, M. A______ a retiré son opposition.

7.             Par décision du 8 juillet 2024, l'office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) a prononcé un avertissement pour infraction légère aux règles de la circulation routière à l'encontre de M. A______, en raison de l'infraction légère aux règles de la circulation routière commise le 2 novembre 2023.

8.             En date du 10 septembre 2024, M. A______ a, sous la plume de son conseil, recouru contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant à son annulation, sous suite de frais et dépens.

Quand bien même une ordonnance pénale assimilée à un jugement avait été rendue, les faits retenus, ne permettaient pas d'arrêter un état de fait conforme à la vérité, lesquels pouvaient être reconsidérés.

Il ne remettait pas en question l'état de fait arrêtés par l'ordonnance pénale du 18 mars 2024, lequel se limitait à énoncer « une distance latérale insuffisante ». Il n'était nullement fait mention de la vitesse à laquelle il avait circulé. Pourtant, compte tenu de l'étroitesse du chemin, il ne pouvait que rouler à la vitesse du pas. Il n'était également pas indiqué que Mme B______ avait décidé de passer outre les instructions convenues entre les automobilistes et d'avancer à son tour en même temps que le recourant, provoquant de ce fait le contact entre les deux véhicules. Il n'était pas non mentionné non plus qu'il avait proposé un constat à Mme B______ que cette dernière avait refusé, avant de lui donner ses coordonnées afin de régler l'incident à l'amiable, accord que cette dernière avait décidé de ne pas respecter.

Faute d'avoir été arrêté de manière exhaustive par le juge pénal, l'état de fait devait être complété des points qui précédaient. Il était d'autant plus fondé à les invoquer devant le juge administratif qu'il ne s'attendait pas, en capitulant par gain de paix au pénal, à une mesure de droit public.

Au besoin il y aurait lieu d'auditionner Madame D______.

S'agissant d'une manœuvre opérée à la vitesse du pas, la mise en danger n'apparaissait que des plus modeste. Il s'agissait tout au plus d'une infraction particulièrement légère. Il ne saurait être admis que l'incident impliquant les deux véhicules était plus important qu'une touchette à vitesse très faible sur un parking ou qu'une collision par l'arrière insignifiante.

Dès lors tant la faute que la mise en danger causée par l'éventuelle infraction étaient particulièrement légères et, par conséquent l'infraction retenue devait l'être sous l'angle de l'art. 16a al. 4 LCR impliquant qu'il soit renoncé à toute mesure administrative.

9.             En date du 11 novembre 2024, l'OCV a transmis son dossier au tribunal, accompagné de ses observations. Il persistait dans les termes de sa décision du 8 juillet 2024, laquelle était conforme à la loi et à la jurisprudence fédérale en matière de distance latérale insuffisante avec accident.

En effet, il ressortait du rapport de renseignements que le recourant n'avait pas gardé une distance latérale suffisante avec le véhicule venant en sens inverse sur le chemin des Clos à Hermance, entraînant de ce fait un heurt entre l'avant gauche de son véhicule et l'arrière gauche dudit véhicule. Il avait qualifié ladite infraction de légère, soit la mesure administrative la plus clémente.

Si le recourant estimait ne pas être responsable de l'infraction susmentionnée, il lui appartenait de faire valoir ses réquisitions de preuves par devant le Tribunal de police. Or il avait retiré son opposition par courrier du 14 juin 2024.

10.         Dans le délai prolongé à sa demande, le recourant a répliqué en date du 23 décembre 2024.

L'OCV perdait de vue qu'aucune décision pénale n'établissait les faits avec une précision suffisante.

Il a pour le surplus persisté dans son argumentation.

11.         Le 23 janvier 2025, l'OCV a indiqué au tribunal qu'il n'avait pas d'observations complémentaires à faire valoir.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal des véhicules (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b).

En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

Il n'en résulte toutefois pas que l'autorité est libre d'agir comme bon lui semble, puisqu'elle ne peut pas faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l'égalité de traitement, la proportionnalité et l'interdiction de l'arbitraire (ATA/1585/2019 du 20 octobre 2019 consid. 2.2).

4.             Lorsque la qualification d'un acte ou la culpabilité est douteuse, il convient de statuer sur le retrait de permis de conduire après seulement que la procédure pénale soit achevée par une décision entrée en force, car fondamentalement, selon la jurisprudence, l'autorité administrative appelée à prononcer un retrait du permis de conduire est en principe lié par les constatations de fait d'une telle décision, la sécurité du droit commandant en effet d'éviter que l'indépendance du juge pénal et du juge administratif ne conduise à des jugements opposés rendus sur la base des mêmes faits ; l'autorité administrative ne peut s'écarter du jugement pénal que si elle est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de fait inconnues du juge pénal ou qui n'ont pas été prises en considération par celui-ci, s'il existe des preuves nouvelles dont l'appréciation conduit à un autre résultat, si l'appréciation à laquelle s'est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés, ou si le juge pénal n'a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 139 II 95 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_654/2019 du 6 octobre 2020 consid. 2.1 ; 1C_470/2019 du 31 janvier 2020 consid. 5.1.2 ; ATA/12/2019 du 8 janvier 2019 consid. 9 ; ATA/206/2004 du 9 mars 2004 consid. 3).

5.             Cela vaut non seulement lorsque le jugement pénal a été rendu au terme d'une procédure publique ordinaire au cours de laquelle les parties ont été entendues et des témoins interrogés, mais également, en principe lorsque la décision a été rendue à l'issue d'une procédure sommaire, même si la décision pénale se fonde uniquement sur le rapport de police. Il en va notamment ainsi lorsque la personne impliquée savait ou aurait dû prévoir, en raison de la gravité des faits qui lui sont reprochés, qu'il y aurait également une procédure de retrait de permis. Dans cette situation, elle est tenue, en vertu des règles de la bonne foi, de faire valoir ses moyens dans le cadre de la procédure pénale, le cas échéant, en épuisant les voies de recours à sa disposition, mais ne peut pas attendre la procédure administrative pour exposer ses arguments (ATF 123 II 97 consid. 3c/aa ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_654/2019 du 6 octobre 2020 consid. 2.1 ; 1C_403/2020 du 20 juillet 2020 consid. 3 ; 1C_470/2019 du 31 janvier 2020 consid. 5.1.2).

6.             En l'espèce, le tribunal constate que le recourant a été reconnu coupable de violation simple des règles de la circulation routière (art. 26, 34, et 90 al. 1 LCR) par ordonnance pénale prononcée le 18 avril 2024, laquelle est entrée en force, suite au retrait de l'opposition par l'intéressé. Partant, conformément à la jurisprudence précitée, s'il désapprouvait les faits établis par l'autorité pénale, il lui aurait appartenu de faire valoir ses moyens dans la procédure pénale. C'est dans ce cadre uniquement qu'il pouvait remettre en cause les constatations de la police, notamment en requérant l'administration de moyens de preuve et/ou en en produisant lui-même. Le prononcé pénal n'ayant pas été contesté, il n'est plus fondé à nier la réalisation de l'infraction reprochée dans le cadre de la procédure administrative, étant au demeurant relevé qu'il n'apporte aucun élément de fait ou moyen de preuve nouveau, qu'il n'aurait pu faire valoir dans le cadre de la procédure pénale, susceptible de remettre en cause la décision de l'OCV.

7.             Lorsque la procédure prévue par la loi fédérale du 24 juin 1970 sur les amendes d'ordre n'est pas applicable, une infraction aux prescriptions sur la circulation routière entraîne le retrait du permis d'élève-conducteur ou du permis de conduire ou un avertissement (al. 2).

8.             Pour déterminer la durée et s'il y a lieu de prononcer un retrait d'admonestation, la LCR distingue les infractions légères, moyennement graves et graves (art. 16a à 16c LCR).

9.             Selon l'art. 16a al. 1 let. a LCR, commet en particulier une infraction légère la personne qui, en violant les règles de la circulation, met légèrement en danger la sécurité d'autrui et à laquelle seule une faute bénigne peut être imputée.

10.         Le niveau de mise en danger qui caractérise l'élément objectif de l’infraction légère de l’art. 16a al. 1 let. a LCR équivaut à une mise en danger (abstraite accrue) légère. Une faute légère correspond à une négligence légère. Un tel cas de figure est par exemple donné lorsque les conditions de circulation sont bonnes, n’inclinant pas un conducteur moyen - c’est-à-dire normalement prudent - à une vigilance particulière et qu’une infraction survient malgré tout à la suite d’une inattention. La faute peut ainsi être légère si l’infraction n’est que l’enchaînement de circonstances malheureuses, ou lorsque seule une légère inattention, ne pesant pas lourd du point de vue de la culpabilité, peut être reprochée au conducteur, lequel a fondamentalement adopté un comportement routier juste. Plus généralement, une faute légère est donnée lorsque le conducteur a pris conscience du danger spécifique et a adapté sa vitesse et sa vigilance en conséquence, mais non pas suffisamment du fait d’une mauvaise appréciation compréhensible du point de vue d’un conducteur moyen. En dernière analyse, la faute légère représente souvent un comportement qui, sans être totalement excusable, bénéficie des circonstances atténuantes, voire relève carrément d’une certaine malchance (ATA/661/2011 du 18 octobre 2011 et les références citées).

11.         L’auteur d’une infraction légère fait l’objet d’un avertissement si, au cours des deux années précédentes, le permis de conduire ne lui a pas été retiré et qu’aucune autre mesure administrative n’a été prononcée (art. 16a al. 3 LCR).

12.         En cas d’infraction particulièrement légère, il est renoncé à toute mesure administrative (art. 16a al. 4 LCR).

L’existence d’une faute particulièrement légère, au sens de l’art. 16a al. 4 LCR, ne peut être reconnue qu’avec restriction. De telles circonstances n’existent que lorsqu’un incident routier paraît être plus la conséquence d’un coup du sort que d’une véritable « faute » du conducteur (ATA/661/2011 du 18 octobre 2011 consid. 7c). Elle correspond en pratique souvent au cas de très peu de gravité de l'art. 100 ch. 1 2ème phr. LCR, soit une bagatelle pour laquelle même une amende très modérée apparaîtrait non appropriée et trop sévère (Cédric MIZEL, Les nouvelles dispositions légales sur le retrait du permis de conduire, in RDAF 2004, p. 375).

13.         En l'occurrence, comme vu plus haut, il est établi que le recourant a commis une infraction légère et les circonstances de sa commission - qui ne sont pas fortuites - ne peuvent constituer une infraction particulièrement légère au sens de l'art. 16a al. 4 LCR autorisant l'autorité à renoncer au prononcé d'une sanction administrative.

Dans ces conditions, c'est à juste titre que le recourant, qui n’a pas d’antécédent en matière de circulation routière, a fait l’objet d’un avertissement en application de l’art. 16a al. 3 LCR.

14.         Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté et la décision de l'OCV confirmée.

15.         Dans la mesure où il succombe, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant en application de l'art. 87 al. 1 LPA et du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03) ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 10 septembre 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal des véhicules du 8
juillet 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière