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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1213/2024

ATAS/451/2025 du 05.06.2025 ( LAMAL ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1213/2024 ATAS/451/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 5 juin 2025

Chambre 0

 

En la cause

A______

représentée par Me Éric MAUGUÉ, avocat

 

recourante

 

contre

SERVICE DE L'ASSURANCE-MALADIE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. A______ (ci-après : l'intéressée), née en 1959, de nationalité suisse et domiciliée à Genève, est divorcée d'état civil à teneur des données figurant dans le registre de l'Office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM).

b. Elle est en couple avec B______, célibataire d'état civil, ancien fonctionnaire de l'organisation internationale pour les migrations (ci-après : OIM), également domicilié à Genève, mais à une adresse différente de celle de l'intéressée selon les données de l'OCPM.

B. a. Le 8 juillet 2021, par le biais d'un formulaire de contrôle de l'équivalence à l'assurance-maladie contresigné par l'OIM, l'intéressée a déposé auprès du service de l'assurance-maladie du canton de Genève (ci-après : SAM) une demande de dispense de s'assurer à l'assurance obligatoire des soins (ci-après : AOS) en invoquant le fait qu'elle était liée par un partenariat enregistré à B______, et qu’elle disposait à ce titre, depuis le 1er juillet 2005, tout comme lui, d'une couverture d'assurance-maladie auprès de CIGNA.

b. Par décision du 12 mai 2022, le SAM a refusé la dispense d'affiliation, en se prévalant de ce que l'assurance CIGNA était une institution étrangère non admise à pratiquer l'assurance-maladie sociale en Suisse, de ce que l'intéressée n'avait pas de carte de légitimation et de ce que le délai de trois mois accordé par l'Office fédéral de la santé publique (ci-après : OFSP) pour formuler une requête d'exemption était dépassé.

c. Le 8 juin 2022, l'intéressée a formé opposition contre la décision précitée, en faisant valoir qu’elle avait payé durant de nombreuses années une assurance-maladie à double, ce qu'elle ne pouvait désormais plus se permettre pour des raisons financières. CIGNA offrait plus d'avantages, de sorte qu'elle souhaitait profiter de cette assurance.

d. L'OIM a contresigné une nouvelle attestation de contrôle de l'équivalence à l'AOS le 4 juillet 2022.

e. Le 27 février 2023, le SAM a informé CONCORDIA, caisse d'assurance-maladie suisse de l'intéressée, qu'une procédure relative à l'affiliation de cette dernière était en cours et lui a demandé de suspendre la procédure de recouvrement à son encontre.

f. Le 28 juin 2023, l'intéressée a déposé une nouvelle demande de dispense d'affiliation et a produit un nouveau formulaire de contrôle de l'équivalence de l'assurance-maladie signé par l'OIM, ainsi qu'une attestation du 24 février 2023 de cette institution. Il en ressortait qu’elle et son compagnon faisaient partie de sa caisse d'assurance-maladie collective ; la couverture d'assurance était valable dans le monde entier et s'étendait au remboursement des frais médicaux à la suite de maladies et accidents d'origine non-professionnelle « avec une couverture illimitée », plus précisément :

-          90% des frais des soins ambulatoires, frais liés à la grossesse inclus ;

-          100% des frais d'hospitalisation, frais liés à l'accouchement inclus ;

-          100% des frais encourus à la suite d'accidents d'origine non-professionnelle ;

-          prise en charge des frais de soins médicaux, frais médicaments et honoraires médicaux en établissement médico-social, ;

-          prise en charge des soins dentaires occasionnés par une maladie grave et non évitable du système de la mastication ou pour traiter une maladie grave et ses séquelles.

L'intéressée a également remis un tableau des garanties de CIGNA précisant le régime d'assurance-maladie auprès de l'OIM.

g. Le 19 octobre 2023, le SAM a prononcé une « décision de maintien de refus de dispense », invoquant les mêmes motifs que dans sa précédente décision du 12 mai 2022 et le fait que l'intéressée n'entrait dans aucune des catégories d'exemption prévues par la législation. Elle était ainsi invitée à conserver sa police d'AOS.

h. Le 20 novembre 2023, l'intéressée a formé opposition contre cette décision, sollicitant en substance à être exemptée de l'obligation de s'affilier à l'AOS. Elle faisait valoir que, vu son âge, une souscription à une assurance complémentaire serait empêchée, soumise à des réserves ou entraînerait des primes prohibitives. Le régime prévu par CIGNA, qui ne comprenait aucun plafond pour les soins couverts, correspondait à la couverture de l'AOS et le formulaire d'équivalence signé et tamponné par l'OIM reconnaissait la prise en charge totale des frais de traitement dans un établissement médico-social. L'adhésion à l'AOS engendrerait par ailleurs une dégradation de la protection d'assurance, notamment s’agissant des soins dentaires.

i. Par décision du 29 février 2024, le SAM a rejeté l’opposition.

Il a constaté que le compagnon de l'intéressée bénéficiait d'une exemption de l'obligation de s'affilier du fait de son statut d'ancien fonctionnaire international, duquel découlait des privilèges et immunités. L'intéressée avait cependant déposé sa demande d'exemption tardivement, le 8 juillet 2021. La décision de refus de dispense du 12 mai 2022 était donc justifiée.

Cela étant, même si la requête avait été déposée dans les délais, la condition d'équivalence n'aurait pas été remplie, car la couverture offerte par CIGNA contenait une série d'exclusions, une liste d'éléments non remboursables et une liste de tests et procédures ambulatoires uniquement susceptibles d'être pris en charge à 100%. Faisaient notamment partie de la série d'exclusions les blessures volontaires ou atteintes volontaires à la santé que l'assuré s'auto-infligeait ou qui lui étaient infligées par un tiers avec son consentement, ainsi que les séjours en maison de retraite.

L’exception à l'obligation de s'assurer en Suisse prévue par la loi pour les rentiers affectés d'un état de santé préexistant désireux de s'établir en Suisse n'entrait pas non plus en compte, puisque l'intéressée, domiciliée en Suisse depuis de nombreuses années, ne rentrait pas dans le cercle des personnes visées par cette disposition. Celle-ci exigeait par ailleurs que la couverture d'assurance offre une garantie, non pas seulement équivalente, mais supérieure à l'AOS et que la personne assurée soit empêchée de maintenir son standard de protection à l'aide de la souscription d'une assurance complémentaire, du fait de son âge et/ou de problèmes de santé antérieurs à son arrivée en Suisse. Les deux conditions cumulatives prévues par la loi n'étaient par conséquent pas remplies.

C. a. Le 12 avril 2024, l'intéressée a interjeté recours auprès de la Cour de céans en concluant principalement à son exemption de l'AOS en raison de son affiliation auprès de l'assureur de l'OIM depuis le 1er juillet 2005, subsidiairement, à ce que son affiliation auprès de la caisse d'assurance-maladie suisse CONCORDIA soit reportée au 1er mars 2024, au lieu du 1er janvier 2021 et, si cela était impossible, à ce que l'intimé prenne en charge les primes maladie de cet assureur du 1er avril 2021 au 29 février 2024.

La recourante rappelle que, quand bien même l'OIM a à plusieurs reprises signé le formulaire d'équivalence, l'intimé a refusé sa demande de dispense et lui a imposé un assureur qui lui réclame le paiement de primes depuis le 1er janvier 2021.

Alors qu’elle est affiliée avec son conjoint à l'assureur de l'OIM depuis le 1er juillet 2005, ce n'est que maintenant que l'intimé refuse de reconnaître l’équivalence des prestations. Il est inadmissible, selon elle, que la demande d'exemption, déposée en juillet 2021, ne soit tranchée de manière définitive que près de trois ans plus tard. Le fait que l'intimé ait reconnu l'équivalence des prestations couvertes par l'assureur de l'OIM à son conjoint, à elle-même et à l'ensemble du personnel de l'OIM, ainsi que le courrier de ce service du 27 février 2023, l'ont induite en erreur, en ce sens qu'elle n'a plus payé les primes de CONCORDIA et que celle-ci les lui réclame depuis le 1er janvier 2021. Le rétroactif porte sur plus de trois ans et sa rente du deuxième pilier fait l'objet d'une saisie.

À l’appui de sa position, la recourante produit notamment un certificat d'assurance émis par CIGNA le 9 mars 2021, stipulant que les traitements et services médicaux reçus en Suisse sont couverts, sous réserve du taux de remboursement, des plafonds et des exclusions de la police.

b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 13 mai 2024, a conclu au rejet du recours.

Il allègue que la recourante est affiliée de son plein gré depuis le 1er avril 2016 à la caisse d'assurance-maladie CONCORDIA et auprès de CIGNA, assurance- maladie de l'OIM, depuis le 1er juillet 2005.

Le fait que l'OIM ait signé un formulaire d'équivalence ne démontre pas encore que la recourante bénéficie d'une couverture d'assurance supérieure à celle de l'AOS.

c. Le 29 juillet 2024, la recourante a fait remarquer, pièces à l'appui, que CIGNA n'est pas l'assureur-maladie de l'OIM, mais le gestionnaire qui s'occupe de traiter les demandes de remboursement. ALLIANZ SUISSE SOCIÉTÉ D'ASSURANCES SA (ci-après : ALLIANZ) est le fournisseur d'assurance depuis les années 1980 et a externalisé la gestion de ses régimes d'assurance-maladie à CIGNA depuis le 1er mars 2021. Depuis le 1er janvier 2023, le traitement des demandes de remboursement est désormais géré par ALLIANZ PARTNERS.

La recourante produit en outre le « Guide de l'affilié » édité par ALLIANZ, entré en vigueur le 1er janvier 2023, présentant la couverture d'assurance de l'OIM. Selon elle, celle-ci est à tout le moins équivalente à celle de l'AOS et même plus avantageuse à plusieurs égards. Vu son âge, elle ne peut espérer conclure des assurances-maladies complémentaires à des conditions satisfaisantes, notamment s'agissant de la prise en charge des frais d'hospitalisation et dentaires.

La recourante ajoute que le délai de trois mois dont se prévaut l'intimé n'est prévu par aucune base légale.

Enfin, selon la jurisprudence de la Cour de céans, une affiliation d'office doit être annulée si elle se révèle injustifiée et une requête de dispense doit ainsi être examinée même si elle est tardive.

d. Par écriture du 12 septembre 2024, l'intimé a relevé que les listes des exclusions, qu'elles émanent de CIGNA ou d'ALLIANZ, sont assez similaires et qu'il faut se référer aux conditions générales et particulières. Celles-ci prévoient des exclusions qui ne permettent pas de dire que la couverture offerte est supérieure à l'AOS.

Quant au délai pour déposer une requête de dispense, s'il n'est certes pas prévu dans la loi, il a fait l'objet d'une note émise par l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) à l'attention des services cantonaux responsables du contrôle du respect de s'assurer et est approuvé par la doctrine et la jurisprudence.

e. Par réplique spontanée du 30 septembre 2024, la recourante a fait remarquer que la jurisprudence à laquelle se référait l'intimé n'avait été que partiellement retranscrite ; la Cour de céans avait aussi admis qu'une affiliation d'office injustifiée devait être annulée, ce qui impliquait qu'une requête de dispense, même tardive, devait quand même être examinée.

f. Le 22 janvier 2025, la recourante a informé la Cour de céans qu'elle n'était plus assurée par la caisse d'assurance-maladie de l'OIM depuis le 1er janvier 2025 et a restreint ses conclusions en conséquence. Elle a en outre produit une attestation de l'OIM du 21 janvier 2025 faisant état de la couverture d'assurance ayant prévalu.

g. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 4 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10).

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté en temps utile, le recours est recevable, compte tenu des féries de Pâques (art. 60 al. 1 et 2 et art. 38 al. 4 let. a LPGA).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé du refus de l’intimé de dispenser la recourante de l'obligation d'être affiliée à la LAMal. La décision querellée ne portant pas sur l'affiliation à proprement parler à un assureur autorisé à pratiquer l'assurance-maladie obligatoire, les conclusions subsidiaires du recours qui demandent que l'affiliation soit reportée du 1er janvier 2021 au 1er mars 2024 et que l'intimé prenne en charge les primes pour la période du 1er avril 2021 au 29 février 2024 sont exorbitantes au litige, et ne seront donc pas examinées (cf. ATF 134 V 418 consid. 5.2.1 et les références).

3.              

3.1 L'assurance obligatoire des soins est fondée sur l'affiliation obligatoire : toute personne domiciliée en Suisse au sens des art. 23 à 26 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) doit s'assurer pour les soins en cas de maladie, ou être assurée par son représentant légal, dans les trois mois qui suivent sa prise de domicile en Suisse ou sa naissance en Suisse (art. 3 al. 1 LAMal et 1 al. 1 OAMal ; cf. également art. 13 al. 1 LPGA ; sur l'obligation d'assurance, cf. ATF 129 V 77 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_750/2009 du 16 juin 2010 consid. 2.1 et les références), quelle que soit sa nationalité (Gebhard EUGSTER, Krankenversicherung, in Ulrich MEYER [éd.], Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], 3e éd., 2016, n. 35, cité ci-après : EUGSTER - SBVR). Un des buts principaux de la LAMal est en effet de rendre l'assurance-maladie obligatoire pour l'ensemble de la population en Suisse (ATF 125 V 266 consid. 5b).

Il n'y a cependant pas d'affiliation ex lege, au contraire d'autres assurances sociales (p. ex. l'AVS/AI, la LPP ou l'assurance-accidents obligatoire). C'est aux cantons qu'il incombe de veiller au respect de cette obligation et, s'il y a lieu, de procéder, conformément à l'art. 6 LAMal, à une affiliation d'office d'une personne tenue de s'assurer qui n'a pas donné suite à cette obligation en temps utile (ATF 126 V 265 consid. 3b).

À Genève, le SAM contrôle l'affiliation des assujettis (art. 4 al. 1 LaLAMal) et statue sur les exceptions à l'obligation d'assurance (art. 5 LaLAMal).

3.2 Aux termes de l'art. 4 LAMal, les personnes tenues de s'assurer choisissent librement parmi les assureurs autorisés à pratiquer l'assurance-maladie sociale en vertu de la loi fédérale sur la surveillance de l'assurance-maladie sociale, du 26 septembre 2014 (LSAMal - RS 832.12). L'autorité de surveillance publie la liste des assureurs admis à pratiquer l'assurance-maladie sociale au sens de la LAMal (art. 2 et 4 LSAMal).

En l'occurrence, selon les dernières pièces versées à la procédure, ce ne serait pas CIGNA, mais ALLIANZ qui serait l'assureur-maladie collectif de l'OIM depuis de nombreuses années, la première organisation n'ayant été que gestionnaire, et non fournisseuse de prestations.

Aucun de ces deux organismes n'ayant cependant été autorisé à pratiquer l'assurance-maladie sociale par l'OFSP, la souscription d'une assurance auprès de l'un ou l'autre de ces partenaires ne constitue pas une affiliation à LAMal, quand bien même ALLIANZ aurait son siège en Suisse. Cela n'est du reste pas contesté par les parties.

3.3 À teneur de l'art. 3 al. 2 LAMal, le Conseil fédéral peut excepter de l'assurance obligatoire certaines catégories de personnes, notamment les personnes bénéficiaires de privilèges, d'immunités et de facilités visées à l'art. 2 al. 2 de la fédérale sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordés par la Suisse en tant qu'État hôte, du 22 juin 2007 (loi sur l'État hôte, LEH - RS 192.12).

Au regard du but de solidarité fixé par le législateur, les exceptions à l'obligation de s'assurer doivent être interprétées de manière stricte (ATF 132 V 310 consid. 8.3 ; 129 V 77 consid. 4.2).

Faisant usage de cette délégation de compétence, l'autorité exécutive a notamment adopté l'art. 6 de l’ordonnance sur l'assurance-maladie du 27 juin 1995 (OAMal - RS 832.102) qui traite des personnes jouissant de privilèges en vertu du droit international. Depuis sa modification du 1er janvier 2018 (RO 2017 6723), la disposition précitée contient un nouvel alinéa 4 concernant les personnes assurées avec une personne qui a cessé ses fonctions auprès d'un bénéficiaire institutionnel (sur l'évolution dans le temps de l'art. 6 OAMal concernant les membres de la famille, voir l'arrêt du Tribunal fédéral 9C_613/2019 du 7 mai 2021 consid. 3.2.1).

Ainsi, aux termes de l'art. 6 al. 4 OAMal, les personnes qui sont assurées avec une personne mentionnée aux alinéas 1 ou 3 auprès de l'assurance-maladie d'un bénéficiaire institutionnel visé à l'art. 2 al. 1 let. a, b, i ou k LEH et qui ne bénéficient pas elles-mêmes de privilèges ou d'immunités sont exceptées sur requête de l'obligation de s'assurer, pour autant que leur couverture d'assurance soit équivalente pour les traitements en Suisse. La requête doit être accompagnée d'une attestation écrite de l'organisme compétent du bénéficiaire institutionnel donnant tous les renseignements nécessaires. L'intéressé ne peut revenir sur l'exception ou la renonciation à une exception.

L'art. 6 al. 3 OAMal dispose pour sa part que les personnes qui ont cessé d'exercer leurs fonctions auprès d'un bénéficiaire institutionnel visé à l'art. 2 al. 1 let. a, b, i ou k LEH sont exceptées sur requête de l'assurance obligatoire, pour autant que leur couverture d'assurance soit équivalente pour les traitements en Suisse. La requête doit être accompagnée d'une attestation écrite de l'organisme compétent de leur ancien bénéficiaire institutionnel donnant tous les renseignements nécessaires. L'intéressé ne peut revenir sur l'exception ou la renonciation à une exception.

Quant à l'art. 6 al. 1 OAMal, il énonce que les personnes bénéficiaires de privilèges, d'immunités et de facilités visées à l'art. 2 al. 2 let. a et c LEH, à l'exception des domestiques privés, ne sont pas tenues de s'assurer. Elles peuvent demander à être soumises à l'assurance suisse.

4.             L'application de l'art. 6 al. 4 OAMal au cas d'espèce soulève plusieurs questions.

4.1  

4.1.1 En premier lieu, il s'agit d'examiner si la recourante, du fait de sa relation avec B______, est visée par la disposition précitée, étant souligné que ce dernier est un ancien fonctionnaire international ayant travaillé pour l'OIM – organisation intergouvernementale qui est un bénéficiaire institutionnel au sens de l'art. 2 al. 1 let. a LEH (cf. FF 2006 7603, p. 7616 s.) – et qu'il est toujours assuré par l'assureur-maladie de son ancien employeur.

Se pose en particulier la question du champ d'application personnel de l'art. 6 al. 4 OAMal, dans la mesure où cette disposition fait référence aux « personnes qui sont assurées avec une personne mentionnée aux al. 1 ou 3 », sans préciser ce que recouvre cette notion.

Les deux cas d'exceptions visés aux al. 1 et 3 de l'art. 6 OAMal, auxquels renvoie l'al. 4 de cette même norme, font référence à des personnes encore bénéficiaires de privilèges, d'immunités et de facilités en vertu de la LEH, en d'autres termes à des fonctionnaires internationaux en fonction (al. 1), ou à des anciens fonctionnaires internationaux de certaines catégories de bénéficiaires institutionnels (al. 3). Dans les deux cas, un renvoi à la LEH est opéré.

Or, sous la note marginale « personnes autorisées à accompagner », l'art. 20 de l'ordonnance d'application (ordonnance relative à la loi fédérale sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordés par la Suisse en tant qu'Etat hôte du 7 décembre 2007, Ordonnance sur l'Etat hôte, OLEH - RS 192.121) précise que lesdites personnes bénéficient des mêmes privilèges, immunités et facilités que le titulaire principal qu'elles accompagnent lorsqu'elles font ménage commun avec lui (al. 1). Parmi celles-ci figure notamment le conjoint du titulaire principal (let. a), le partenaire de même sexe du titulaire principal, lorsqu'il existe un partenariat enregistré suisse, que le partenariat découle d'une législation étrangère équivalente ou que le partenaire est considéré comme un partenaire officiel ou une personne à charge par le bénéficiaire institutionnel concerné (let. b), ou encore son concubin (personnes non mariées au sens du droit suisse, de sexe opposé), lorsque ce dernier est considéré comme un partenaire officiel ou une personne à charge par le bénéficiaire institutionnel concerné (let. c). En vertu de l'art. 20 al. 2 OLEH, d'autres personnes peuvent, à titre exceptionnel, être autorisées par le Département fédéral des affaires étrangères à accompagner le titulaire principal lorsqu'elles font ménage commun avec lui ; elles bénéficient d'une carte de légitimation, mais ne jouissent pas de privilèges, d'immunités ou de facilités. Il s'agit notamment du partenaire de même sexe du titulaire principal, lorsqu'il n'est pas reconnu comme partenaire officiel ou personne à charge par le bénéficiaire institutionnel, mais que la demande de titre de séjour est présentée par le bénéficiaire institutionnel concerné et que la preuve d'une relation de longue durée est apportée, si les personnes concernées ne sont pas en mesure de faire enregistrer un partenariat conformément au droit suisse ou au droit d'un État étranger (let. a) et du concubin du titulaire principal (personnes non mariées, au sens du droit suisse, de sexe opposé), lorsqu'il n'est pas reconnu comme partenaire officiel ou personne à charge par le bénéficiaire institutionnel, mais que la demande de titre de séjour est présentée par le bénéficiaire institutionnel concerné et que la preuve d'une relation de longue durée est apportée (let. b).

L'art. 20 al. 2bis OLEH contient par ailleurs une liste de cas dans lesquels une exemption à l'obligation de faire ménage commun avec le titulaire principal peut être accordée (domicile à l'étranger à des fins de formation, affectation professionnelle à l'étranger, ou certaines procédures judiciaires du droit de la famille en cours).

4.1.2 Si les al. 1 et 2 de l'art. 20 OLEH ne restreignent pas la qualité de personnes accompagnantes aux seuls conjoints ou partenaires de même sexe du titulaire principal et envisagent le cas du concubin, ils imposent néanmoins un ménage commun entre le titulaire principal et la personne l'accompagnant, condition qui n'est en l'occurrence pas remplie à teneur des données de l'OCPM – la recourante et son compagnon étant domiciliés à des adresses différentes –, sans que l'une des exceptions visées à l'art. 20 al. 2bis OLEH n'apparaisse remplie (sur l'élément de ménage commun, voir ATAS/387/2017 du 18 mai 2017 consid. 5b).

Ainsi, dans l'hypothèse où il devrait être admis que l'art. 6 al. 4 OAMal opère un renvoi à la LEH et à l'OLEH pour ce qui a trait de la notion de « personnes qui sont assurées avec une personne mentionnée aux al. 1 ou 3 », le fait que la recourante et son compagnon ne fassent pas ménage commun selon les données officielles aurait pour conséquence qu'elle pourrait ne pas être couverte par ladite disposition.

4.2 Les parties s'opposent par ailleurs sur le fait de savoir si la demande de dispense d'affiliation à la LAMal est soumise ou non à un délai.

4.2.1 Dans son écriture du 12 septembre 2024, l'intimé se réfère à une lettre d'information de l'OFSP du 13 décembre 2017 à l'attention des gouvernements cantonaux et des services cantonaux responsables du contrôle du respect de l'obligation de s'assurer – la même missive ayant aussi été adressée aux assureurs-maladie LAMal, aux réassureurs et à l'Institution commune LAMal –, selon laquelle le délai de dépôt de la demande d'exemption est fixé à trois mois dès la survenance du motif d'exemption, c'est-à-dire dès la date d'affiliation à l'assurance-maladie de l'organisation internationale, respectivement – pour les personnes déjà assurées – dès l'entrée en vigueur de l'ordonnance révisée au 1er janvier 2018 ; les personnes accompagnantes qui étaient jusqu'alors assurées LAMal peuvent être exemptées au 1er janvier 2018 si la demande d'exemption est déposée d'ici au 31 mars 2018 (§1.4 ; consultable sous https://www.bag.admin.ch/bag/fr/home/versicherungen/krankenversicherung/krankenversicherung-versicherer-aufsicht/kreis-und-informationsschreiben/archiv.html). Dans la décision sur opposition du 29 février 2024, elle se prévalait par ailleurs d'une note de la Mission permanente de la Suisse auprès de l'Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève du 15 novembre 2017, prévoyant le même délai de trois mois.

La recourante objecte pour sa part que ce délai de trois mois ne résulte d'aucune base légale et n'a donc aucune portée juridique, subsidiairement que la jurisprudence a établi qu'une requête de dispense, même tardive, doit être examinée.

4.2.2 Il est exact, comme l'affirme la recourante, que ni la LAMal, ni l'OAMal ne contiennent de dispositions concernant le délai dans lequel les requêtes de dispense de l'assurance obligatoire doivent être déposées.

S'agissant des directives administratives, de jurisprudence constante, celles-ci s'adressent aux organes d'exécution et ne créent pas de nouvelles règles de droit, mais sont destinées à assurer l'application uniforme des prescriptions légales, en visant à unifier, voire à codifier la pratique des organes d'exécution. Elles ont notamment pour but d'établir des critères généraux d'après lesquels sera tranché chaque cas d'espèce et cela aussi bien dans l'intérêt de la praticabilité que pour assurer une égalité de traitement des ayants droit. Le juge peut les prendre en considération lorsqu'elles permettent une application correcte des dispositions légales dans un cas d'espèce. Il doit en revanche s'en écarter lorsqu'elles établissent des normes qui ne sont pas conformes aux règles légales applicables (arrêt du Tribunal fédéral 8C_73/2022 du 26 janvier 2023 consid. 4.3.2 et les références).

La doctrine voit dans l'absence de base légale concernant le délai de dépôt d'une demande de dispense une lacune qui devrait être comblée par l'application analogique des règles de procédure relatives à l'exercice par un frontalier de son droit d'option. La requête devrait ainsi être présentée dans les trois mois qui suivent la naissance de l'obligation d'assurance en Suisse (EUGSTER-SBVR, op. cit., n. 63 et 101 ; ATAS/514/2024 du 26 juin 2024 consid. 6.2). EUGSTER invoque à cet égard une application analogique de l'art. 3 let. b/aa de l'annexe XI du Règlement (CE) n°883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale modifié par le Règlement (CE) n°988/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 (JO L 284 du 30.10.2009, p. 43) adapté selon l'annexe II à l'accord sur la libre circulation des personnes entre la Communauté européenne et ses États membres d'une part, et la Suisse d'autre part (RS 0.831.109.268.1). Aux termes de l'art. 3 let. b/aa précité, la demande de dispense doit en effet être déposée dans les trois mois qui suivent la survenance de l'obligation de s'assurer en Suisse ; lorsque, dans des cas justifiés, la demande est déposée après ce délai, l'exemption entre en vigueur dès le début de l'assujettissement à l'obligation d'assurance.

4.2.3 La situation du cas d'espèce étant caractérisée par le fait que la recourante était déjà domiciliée en Suisse et affiliée à la LAMal le 1er janvier 2018, lors de l'entrée en vigueur de l'art. 6 al. 4 OAMal ayant (ré)introduit la faculté, pour la personne assurée avec un titulaire principal, de solliciter une dispense, l'application de l'opinion doctrinale qui précède aurait effectivement pour conséquence qu'elle aurait dû déposer sa demande d'exemption jusqu'au 31 mars 2018, comme le considère du reste l'OFSP.

La jurisprudence cantonale qu'invoque la recourante (ATAS/514/2024 du 26 juin 2024 consid. 8.1) traitait d'une affiliation d'office à la LAMal. Dans ce cadre, la Cour de céans avait estimé que l'art. 6 al. 3 LaLAMal – qui prévoit que l'affiliation d'office est annulée si elle se révèle injustifiée – imposait de considérer une requête de dispense, même tardive. La question de la compatibilité de cette disposition cantonale avec le droit fédéral et une éventuelle application analogique du délai de trois mois n'avait alors pas été examinée.

En l’espère, il ne s’agit pas d’une affiliation d'office, mais uniquement du rejet d’une demande de dispense. Du fait que la recourante, comme elle l'expose, se trouve déjà affiliée à la LAMal depuis plusieurs années en sus de l'assurance de l'OIM (situation de double affiliation), la décision litigieuse n'a pas porté sur ce point. Il est donc douteux que l'art. 6 al. 3 LaLAMal trouve à s'appliquer dans ce contexte.

Cela étant, compte tenu de l'examen qui sera fait de l'exigence de la couverture équivalente des prestations entre le régime de l'AOS et l'assurance privée (cf. consid. 4.3 infra), la question de savoir si la requête de dispense doit être faite dans un certain délai peut rester ouverte en l’occurrence.

4.3  

4.3.1 L'art. 6 al. 4 OAMal exige que la couverture d'assurance de la personne requérant une dispense d'affiliation à la LAMal soit équivalente pour les traitements en Suisse. La notion d'équivalence des prestations se retrouve dans plusieurs dispositions de l'OAMal (art. 1 al. 2 let. b et g, art. 2 al. 1 let. f, art. 2 al. 2, art. 2 al. 4, art. 2 al. 7, art. 6 al. 3) et vise à éviter les situations de double assurance qui pourraient découler du principe de l'affiliation obligatoire institué par la LAMal. Elle est l'expression du devoir de proportionnalité de l'activité étatique et a la même portée dans toutes les dispositions susvisées (Gebhard EUGSTER, in Basler Kommentar zum KVG/KVAG, 2020, n. 72 ad art. 3 LAMal, cité ci-après EUGSTER-KVG ; ATF 134 V 34 consid. 5.6, concernant l'art. 6 al. 3 OAMal dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2017).

La notion d'équivalence de l'OAMal que se doit de respecter l'assurance-maladie privée substitutive exige l'incorporation contractuelle du catalogue des prestations en cas de maladie garanties aux art. 25 à 31 LAMal (Gregor T. CHATTON, Les exceptions à l'assurance obligatoire des soins : quelques points de contact entre le droit public et le droit privé, RSAS 2011 458, p. 472 ; EUGSTER-SBVR, op. cit., n. 58). L'équivalence est ainsi donnée si l'assurance étrangère couvre de manière substantielle l'ensemble des coûts des traitements ambulatoires, hospitaliers et semi-hospitaliers en cas de maladie, accident et maternité ainsi que ceux liés à une hospitalisation en division commune d'un hôpital public ou d'un établissement semi-hospitalier en Suisse (ATF 134 V 34 consid. 5.8). La personne assurée ne doit pas participer aux coûts d'une manière supérieure à si elle se trouvait affiliée à l'AOS (EUGSTER-KVG, op. cit., n. 74 ad art. 3 LAMal). Le Tribunal fédéral a par exemple jugé que la condition d'équivalence n'était pas remplie dans un cas où l'assurance étrangère couvrait seulement 80% des coûts de santé, même si l'assuré avait en plus assuré les 20% restants sur une base volontaire privée (arrêt du Tribunal fédéral K 167/00 du 4 octobre 2001 consid. 3c ; voir aussi arrêts du Tribunal fédéral 9C_86/2016 du 18 novembre 2016 consid. 4.3 et 9C_182/2009 du 2 mars 2010 consid. 5.1).

L'exigence d'une couverture équivalente ne signifie cependant pas qu'il faille une concordance exacte, sur tous les points, avec les prestations assurées par l'AOS, faute de quoi une exemption serait à peine envisageable. Il suffit que l'assurance étrangère couvre de manière similaire les domaines centraux de l'assurance. Des déficits dans des domaines accessoires peuvent ainsi être compensés par d'autres avantages offerts par l'assurance étrangère (EUGSTER-KVG, op. cit., n. 73 ad art. 3 LAMal). Cet auteur considère en outre que les exclusions de couverture de nature secondaire pour des risques plutôt théoriques (comme les atteintes à la santé consécutives à des troubles de guerre en Suisse) ou pour des faits extrêmement rares (comme les atteintes à la santé provoquées intentionnellement) sont marginales et donc sans importance (EUGSTER-KVG, op. cit., n. 76 ad art. 3 LAMal).

4.3.2 En l'espèce, la condition d'équivalence doit être examinée en se fondant sur le « Guide de l'affilié » édité par ALLIANZ, qui énonce les différentes prestations assurées par cet organisme, compte tenu qu'il est le fournisseur de prestations. L'on relèvera que la documentation remise antérieurement, établie par CIGNA, ne diffère pas fondamentalement de celle d'ALLIANZ.

À teneur du « Guide de l'affilié », sont notamment couvertes les maladies non professionnelles, y compris la maternité, à 100% pour les soins hospitaliers, et à 90% pour les soins ambulatoires (p. 9). Le tableau des garanties signale plusieurs traitements munis d'un astérisque, devant faire l'objet d'une entente préalable de l'assureur, notamment les soins palliatifs et certaines chirurgies (p. 13 ss), ainsi que les soins infirmiers à domicile (p. 25). Les médicaments prescrits et les vaccinations sont pris en charge à hauteur de 90% des frais réels (p. 16), tout comme, par exemple, le suivi psychiatrique et psychothérapeutique, qui est en outre limité à un plafond annuel de séances remboursées (52), à l'instar d'autres soins (par exemple, kinésithérapie, 52 séances annuelles et chiropraxie, 10 séances par an au maximum, toutes pathologies confondues) (cf. p. 18 s.). Les accidents professionnels et non professionnels ainsi que les maladies professionnelles sont couverts à 100% des frais réels, mais, pour ces deux dernières éventualités, avec des plafonds en ce qui concerne les soins dentaires, d'optique et les prothèses (p. 9 et 11). En page 28, il est précisé que plusieurs traitements requièrent une entente préalable, dont notamment l'interruption volontaire de grossesse, toutes les hospitalisations, la chimiothérapie, radiothérapie et l'hémodialyse. En page 29, figure une liste des prestations non remboursables, non exhaustive, qui comprend notamment les pansements et les antalgiques (ch. 6). En cas de doute, le gestionnaire de demandes de remboursement est autorisé à décider si la prestation est remboursable ou non. Des exclusions sont encore prévues en page 31, à savoir, notamment les dépenses liées aux blessures volontaires ou atteintes volontaires à la santé causées par la personne assurée envers elle-même, ou une tierce personne avec le consentement de la personne assurée, les dépenses liées aux blessures ou atteintes à la santé engendrées par des crimes ou délits intentionnels, y compris les tentatives de crimes ou de délits, imputables à la personne assurée, les dépenses liées aux accidents survenant lors de la participation à des courses de véhicules à moteur et de bateaux à moteur et celles liées aux séjours en maison de retraite.

Certains des éléments qui précèdent – non exhaustifs – constituent une détérioration de la couverture d'assurance par rapport au catalogue de prestations assurées par la LAMal (art. 25-31). Outre le paiement d'une franchise et d'une quote-part maximale (art. 64 LAMal), cette loi ne prévoit en effet pas de plafond de prise en charge ou de taux maximal de couverture, ni ne conditionne certaines prestations à l'accord préalable obligatoire de l'assureur. Elle ne prévoit en outre pas des catégories d'exclusions générales, dont certaines peuvent avoir une portée pratique non négligeable (par exemple, le non-remboursement des antalgiques). Apparaît en particulier problématique le fait que la plupart des médicaments prescrits et les traitements ambulatoires, auxquels une personne assurée est plus souvent susceptible d'avoir recours, ne sont couverts qu'à 90%, ce qui laisse une part non négligeable de 10% à sa charge, qui plus est sans plafonnement maximal. Un doute subsiste en outre sur le fait de savoir si les examens et traitements dispensés dans un établissement médico-social sont remboursés au vu de l'exclusion figurant à ce propos dans le « Guide de l'affilié », malgré l'affirmation donnée à ce propos dans l'attestation du 24 février 2023 signée par l'OIM.

Certes, sur certains points, la couverture d'assurance d'ALLIANZ prévoit certains avantages en comparaison avec l'assurance-maladie obligatoire suisse. Cet assureur offre notamment une couverture mondiale de ses prestations (p. 6), couvre les frais d'hébergement à l'hôpital en division commune, chambre semi-privée ou chambre privée standard (p. 14), certains traitements de médecine alternative comme l'acupuncture (p. 16), la médecine chinoise et l'ostéopathie (p. 18), et prend en charge les soins dentaires usuels (en partie) (p. 20), ainsi que les chirurgies dentaires (p. 21).

Ces avantages ne contrebalancent cependant pas les lacunes de couverture qui existent sur d'autres points, notamment la prise en charge des frais ambulatoires à hauteur de 90% seulement, qui constitue une lacune importante par rapport à la LAMal.

Le fait que l'OIM ait rempli le formulaire d'équivalence ne saurait remettre en cause l'analyse qui précède, fondée sur une comparaison des prestations offertes par les deux systèmes de santé, sur la base des prestations détaillées dans la documentation contractuelle remise par l'organisme assureur. Les diverses attestations délivrées par l'OIM, notamment celle du 21 janvier 2025 dont se prévaut la recourante, ne font que résumer les prestations couvertes et ne stipulent pas que les conditions établies par ALLIANZ auraient été amendées en faveur de ses employés, anciens employés et des personnes les accompagnant.

4.3.3 Il ressort de ce qui précède que la recourante n'a pas démontré que la protection offerte par ALLIANZ était équivalente à celle de la LAMal. Partant, c’est à juste titre que l'intimé a refusé la demande d'exemption à cette assurance sur la base de l'art. 6 al. 4 OAMal, les questions du champ d'application personnel de cette disposition et du délai pour déposer la demande de dispense restant au surplus réservées (cf. consid. 4.1 et 4.2 supra).

5.             Il reste encore à examiner si la recourante peut prétendre à l'application de l'art. 2 al. 8 OAMal.

5.1 Aux termes de cette disposition, sont exceptées sur requête de l'obligation de s'assurer les personnes dont l'adhésion à l'assurance suisse engendrerait une nette dégradation de la protection d'assurance ou de la couverture des frais et qui, en raison de leur âge et/ou de leur état de santé, ne pourraient pas conclure une assurance complémentaire ayant la même étendue ou ne pourraient le faire qu'à des conditions difficilement acceptables. La requête doit être accompagnée d'une attestation écrite de l'organisme étranger compétent donnant tous les renseignements nécessaires. L'intéressé ne peut revenir sur l'exception ou la renonciation à une exception sans raisons particulières.

Selon la jurisprudence, l'art. 2 al. 8 OAMal ne peut être invoqué de manière générale par les personnes pour lesquelles le passage au système d'assurance suisse signifie, certes, une couverture d'assurance plus onéreuse ou moins étendue, mais qui peuvent encore s'assurer au-delà du minimum obligatoire au moyen d'assurances complémentaires au sens de la loi fédérale sur le contrat d'assurance du 2 avril 1908 (loi sur le contrat d'assurance, LCA - RS 221.229.1), même si ces assurances offrent globalement une protection moindre, mais que la personne concernée peut bénéficier de cette protection dans la mesure où elle est disponible en Suisse. Cette norme ne peut être invoquée que par les personnes qui, dans le cadre de l'offre d'assurance disponible en Suisse, ne peuvent conclure une assurance complémentaire – ou seulement à des conditions inacceptables – en raison de leur âge ou de leur atteinte à la santé ; il s'agit d'éviter que ces personnes voient leur niveau de protection d'assurance diminuer, en raison de leur âge ou de leur état de santé, en entrant dans le système suisse (ATF 132 V 310 consid. 8.5.6 ; arrêt du Tribunal fédéral K 138/05 du 25 août 2006 consid. 4.1).

L'art. 2 al. 8 OAMal vise une catégorie spécifique de personnes – de fait, en particulier les rentiers affectés d'un état de santé préexistant qui sont désireux de s'établir en Suisse – susceptibles d'être exemptées. Il s'agit des personnes au bénéfice d'une assurance-maladie étrangère pour qui l'adhésion à l'assurance suisse engendrerait une nette dégradation de la protection d'assurance ou de la couverture des frais dont elles disposent au moment de se rendre en Suisse, et dont on ne saurait exiger, en raison de leur âge et/ou de leur état de santé, qu'elles concluent une assurance complémentaire, soumise au droit privé et aux réserves qui l'accompagnent, afin de combler ces lacunes de protection. Cette disposition se démarque au travers de l'exigence que la couverture d'assurance offre une garantie non pas seulement équivalente, mais encore supérieure à la LAMal, et que la personne assurée soit empêchée de maintenir son standard de protection à l'aide de la souscription d'une assurance complémentaire, du fait de son âge et/ou de problèmes de santé antérieurs à son arrivée dans notre pays (Gregor T. CHATTON, op. cit., p. 464 ; voir également Pierre-Yves GREBER/Bettina KAHIL-WOLFF/Ghislaine FRÉSARD-FELLAY/Romolo MOLO, Droit suisse de la sécurité sociale, 2010, p. 80-81).

L'âge critique pour la conclusion d'une assurance complémentaire couvrant les soins stationnaires se situe à 55 ans (Gebhard EUGSTER, in Hans-Ulrich STAUFFER/Basile CARDINAUX [éd.], Rechtsprechung des Bundesgerichts zum KVG, 2018, n. 15 ad art. 3 LAMal).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, compte tenu des dispositions restrictives de la loi sur l'obligation de s'assurer, il n'y a en règle générale pas de détérioration claire de la couverture d'assurance actuelle ou de la couverture des coûts actuelle au sens de l'art. 2 al. 8 OAMal lorsque l'assurance existante ne couvre pas les frais de soins de manière à ce que les prestations selon l'art. 25a ainsi que l'art. 25 al. 2 let. a LAMal et l'art. 7 de l'ordonnance du DFI sur les prestations dans l'assurance obligatoire des soins en cas de maladie, du 29 septembre 1995 (OPAS - RS 832.112.31), soient garanties (arrêts du Tribunal fédéral 9C_447/2017 du 20 septembre 2017 consid. 2.2 ; 9C_858/2016 du 20 juin 2017 consid. 2.2.2 ; 9C_8/2017 du 20 juin 2017 consid. 2.2.2). Notre Haute Cour a ainsi par exemple jugé que des tarifs limités pour des soins ambulatoires, hospitaliers et dentaires n'étaient pas en faveur de l'assurance existante (arrêts du Tribunal fédéral 9C_86/2016 du 18 novembre 2016 consid. 4.3 et 9C_8/2017 du 20 juin 2017 consid. 4.3).

La jurisprudence développée par la Cour de céans va dans le même sens puisqu'elle considère qu'un plafond annuel de EUR 1,2 million ne correspond pas à la couverture de l'assurance obligatoire (ATAS/806/2022 du 14 septembre 2022 consid. 5) et que, même si l'assurance privée offre de nombreux avantages, la couverture d'assurance insuffisante des prestations de soins pèse plus lourd dans la balance, quand bien même elle constitue le seul inconvénient de la solution d'assurance actuelle (ATAS/231/2021 du 15 mars 2021 consid. 11 et ATAS/769/2019 du 2 août 2019 consid. 9).

5.2 En l'occurrence, s'il est certes vrai que la recourante est âgée de plus de 55 ans et pourrait, de ce fait, être désavantagée pour la conclusion d'assurances complémentaires, il apparaît néanmoins qu'une adhésion à l'assurance suisse (respectivement son maintien obligatoire dans ce système) n'engendrerait pas de nette dégradation de sa protection d'assurance ou de la couverture des frais.

Les lacunes de protection de l'assurance privée, relevées ci-dessus (cf. consid. 4.3.2), qui ne permettaient déjà pas de reconnaître les deux systèmes équivalents au sens de l'art. 6 al. 4 OAMal, empêchent en effet de considérer que cette assurance offre des prestations supérieures à celles de la LAMal. La péjoration qui peut exister sur certains aspects couverts de manière plus favorable par ALLIANZ (prise en charge des frais de division privée, de certaines thérapies et de traitements dentaires) ne suffit pas à admettre une nette dégradation de la protection d'assurance de la recourante au sens de l'art. 2 al. 8 OAMal, vu que l'assurance ne couvre pas tous les frais et traitements à hauteur de la LAMal (notamment, prise en charge de seulement 90% des frais ambulatoires, limitations des prestations dans certains domaines et exclusion pour d'autres).

Comme l'a récemment jugé la Cour de céans, une restriction qui constitue une lacune importante dans le cadre de l'examen de l'équivalence entre deux assurances l'est encore plus lorsque l'assurance étrangère doit être supérieure à la LAMal au sens de l'art. 2 al. 8 OAMal (ATAS/514/2024 du 26 juin 2024 consid. 8.2.2), de sorte que la recourante n'est pas fondée à se prévaloir de la protection conférée par cette disposition.

Cela est d'autant plus vrai que les exceptions à l'affiliation obligatoire à la LAMal doivent être interprétées de manière stricte au vu du but de solidarité institué par cette loi.

La conclusion qui précède suffit à nier l'application de l'art. 2 al. 8 OAMal dans le cas d'espèce, sans que la question du cercle des personnes concernées par cette norme ne doive être ici précisée. Il n'est ainsi pas utile d'examiner l'argument avancé par l'intimé selon lequel la recourante ne serait pas une rentière affectée d'un état de santé préexistant désireuse de s'établir en Suisse et ne pourrait dès lors pas se prévaloir de la protection conférée par la disposition précitée.

5.3 Le grief tiré d'une mauvaise application de l'art. 2 al. 8 OAMal est écarté, eu égard à ce qui précède.

6.             Partant, le recours est rejeté et la décision sur opposition du 29 février 2024 confirmée.

La recourante, qui succombe, ne peut prétendre à une indemnité à titre de dépens (art. 61 let. g LPGA a contrario).

Par ailleurs, les assureurs sociaux qui obtiennent gain de cause devant une juridiction de première instance n'ont en principe pas droit à une indemnité de dépens (ATF 126 V 143 consid. 4).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 

***


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral de la santé publique par le greffe le

 

 

 

 

Une copie du présent arrêt est transmise pour information à CONCORDIA