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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3919/2023

ATAS/731/2024 du 26.09.2024 ( AI )

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3919/2023 ATAS/731/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Ordonnance d’expertise du 26 septembre 2024

Chambre 10

 

En la cause

A______
représenté par Me Manuel MOURO, avocat

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né le ______ 1974, d’origine irakienne, père de trois enfants nés en 2008, 2011 et 2020, séparé depuis le mois de juin 2020, sans formation professionnelle, est titulaire d’un livret B. Depuis son arrivée en Suisse en 1998, l’assuré a exercé diverses activités, notamment comme aide-cuisinier, vendeur dans un kiosque et serveur dans un fast food. Il est aidé financièrement par l’Hospice général depuis le 1er mai 2020.

b. Le 12 octobre 2020, l’assuré a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI), mentionnant souffrir physiquement et psychologiquement suite à son vécu de la guerre.

c. Dans la cadre de l’instruction du dossier, l’OAI a notamment reçu des rapports des docteurs B______, médecin généraliste de l’assuré (rapport du 10 novembre 2020) et C______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie (rapports des 18 décembre 2020 et 13 avril 2021), ainsi qu’un rapport d’imagerie par résonance magnétique (ci-après : IRM) de la colonne cervicale (rapport du 7 octobre 2020).

d. Le 17 janvier 2022, le docteur C______, médecin au service médical régional (ci-après : SMR) de l’OAI, a proposé la réalisation d’une expertise bidisciplinaire comportant des volets rhumatologique et psychiatrique.

e. Le 20 janvier 2022, l’assuré a été opéré de l’épaule gauche en raison d’une récidive d’un conflit acromio-claviculaire et d’un conflit sous-acromial, et d’une bursite sous-acromiale.

f. Le 16 mai 2022, les docteurs E______, spécialiste FMH en rhumatologie, et F______, psychiatre, tous deux médecins auprès du SMR, ont procédé à l’examen de l’assuré.

Dans leur rapport y relatif du 30 mai 2022, les examinateurs ont retenu, à titre de diagnostics ayant des répercussions sur la capacité de travail, un conflit
sous-acromial gauche persistant après deux opérations de l’épaule gauche, des cervicobrachialgies gauches et des lombalgies dans le cadre de troubles statiques et dégénératifs du rachis avec une hernie discale C6-C7 gauche et un état de stress post traumatique (F41.3). Ils ont également mentionné, sans influence sur la capacité de travail, des talalgies bilatérales dans le cadre de troubles statiques des pieds, un excès pondéral et un autre épisode dépressif (F32.8).

Sur le plan rhumatologique, l’incapacité de travail était totale, dans l’activité de propriétaire de kiosque, de vendeur salarié dans un kiosque ou de serveur, depuis le 10 octobre 2020, conformément à l’avis du Dr B______ qui était confirmé. Par contre, dans une activité strictement adaptée aux limitations fonctionnelles requises par la pathologie ostéo-articulaire, la capacité de travail serait probablement de 80% dans un délai de trois mois, soit à partir du
20 août 2022, date du début de l’aptitude à suivre et à s’investir dans une mesure de réadaptation. Sur le plan psychique, l’incapacité de travail était de 20% depuis le mois de mai 2017. Vu le problème psychiatrique concomitant, l’assuré ne pourrait de toute manière pas reprendre une activité adaptée à plus de 80% le
20 août 2022. Si une telle reprise n’était pas intervenue à cette date, du point de vue rhumatologique, l’examinateur resterait à disposition pour revoir l’assuré et réévaluer sa capacité de travail. Les troubles dégénératifs du rachis cervical risquaient de s’aggraver à long terme. Quant à la hernie cervicale C6-C7, elle pourrait s’aggraver, disparaître ou rester stationnaire. Sur le plan psychiatrique, le pronostic était bon. En conclusion, aucune capacité de travail exigible n’était retenue en tant que serveur, propriétaire ou vendeur salarié d’un kiosque, mais une activité adaptée à 80% serait probablement exigible à partir du 20 août 2022 et devrait être confirmée auprès des médecins somaticiens de l’assuré.

g. Par rapports des 3 et 9 mai, et 16 août 2022, le Dr C______ a attesté que son patient était dans l’incapacité totale de travailler ou de suivre une formation.

h. Une arthro-IRM de l’épaule gauche réalisée le 30 mai 2022 a notamment mis en évidence une fissuration labrale et un épaississement du ligament
gléno-huméral moyen.

i. Dans un rapport du 2 septembre 2022, le Dr B______ a signalé la fissure du labrum et indiqué qu’une opération était prévue le 21 octobre 2022. Il a en outre rappelé l’état anxio-dépressif sévère justifiant un suivi par un spécialiste en psychiatrie et les cervicobrachialgies sur une hernie gauche. L’état de santé de son patient s’était aggravé compte tenu de la nouvelle atteinte au niveau de l’épaule gauche.

j. Par avis du 28 septembre 2022, le Dr D______ a proposé de suivre les conclusions des Drs E______ et F______ et de s’écarter de l’avis du
2 septembre 2022 du Dr B______. Il a conclu que la capacité de travail exigible était de 80% dès le 1er mai 2017 dans l’activité habituelle de serveur ou de vendeur dans un kiosque, et de 0% dès le 10 octobre 2020. Dans une activité adaptée, ladite capacité s’élevait à 80% dès le 20 août 2022.

k. Le 21 octobre 2022, l’assuré s’est soumis à une ténodèse arthroscopique du biceps gauche.

B. a. Le 13 février 2023, l’OAI a informé l’assuré qu’il envisageait de lui accorder une rente d’invalidité entière, sur la base d’un degré d’invalidité de 100%, du 1er avril 2021 au 30 novembre 2022. En effet, il ressortait de l’instruction médicale que l’incapacité de travail dans l’activité habituelle avait été de 20%, dès le 1er mai 2017 et de 100% dès le 10 octobre 2020. La demande de prestations ayant été déposée le 12 octobre 2020, la rente ne pouvait être versée qu’à partir du mois d’avril 2021. Dans une activité adaptée, la capacité de travail exigible était de 80% depuis le 20 août 2022. Après comparaison des gains avec et sans invalidité, la perte de gain révélait un taux d’invalidité de 20%, de sorte que le droit à la rente était supprimé trois mois après l’amélioration de l’état de santé, soit dès le 1er décembre 2022.

b. Par courriel des 27 février et 7 mars 2023, le Dr C______ a contesté l’amélioration clinique retenue par l’OAI et attesté que son patient souffrait d’un état chronique avec un risque vital engagé. Il était entré dans une crise psychique majeure et présentait une recrudescence de la symptomatologie
traumato-psychique. L’incapacité de travailler ou de suivre une formation était totale.

c. Le 20 mars 2023, le Dr D______ a suggéré la réalisation d’une expertise psychiatrique afin d’évaluer la capacité de travail résiduelle dans une activité adaptée.

d. Le 6 avril 2023, l’assuré a été hospitalisé en raison d’un risque suicidaire majeur.

e. L’OAI a confié une expertise psychiatrique à la docteure G______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, associée à une psychologue, Madame H______. Dans son rapport du 3 août 2023, l’experte a retenu, à titre de diagnostics ayant des répercussions sur la capacité de travail, un trouble dépressif récurrent moyen avec syndrome somatique depuis 2017 (F33.11), un état de stress post traumatique depuis l’adolescence et en aggravation depuis 2017 (F43.1) et une dépendance aux benzodiazépines utilisation continue légère, sans tolérance, sans augmentation des doses et avec des taux sanguins dans la fourchette thérapeutique (F13.25). Elle a également diagnostiqué un trouble de la personnalité émotionnellement labile et anxieuse actuellement non décompensé (F61.0), sans effet sur la capacité de travail. Cette dernière était nulle dans une activité impliquant la gestion de l’administratif ou la conduite professionnelle, et de 70% depuis 2017 dans une activité adaptée, tenant compte des indicateurs standards pour les troubles retenus et « sous réserve des réponses aux questions du point 6.1.3 ». La capacité de travail avait toujours été de 70% dans une telle activité, en dehors des périodes d’hospitalisation. Toute activité adaptée au niveau d’acquisition, sans conduite professionnelle, sans relations sociales intenses ou stressantes, sans nécessité de gestion de l’administratif et adaptée d’un point de vue somatique était adaptée. L’évolution était stationnaire et la situation n’était pas stabilisée. Un suivi psychiatrique et un traitement antidépresseur de duloxétine à des taux sanguins efficaces pourraient améliorer le pronostic évolutif et la capacité de travail qui était en l’état de 70% dans une activité adaptée.

f. Le 14 août 2023, le Dr D______ a conclu, concernant le volet somatique, qu’il convenait de se référer à l’examen rhumatologique du SMR qui mentionnait une capacité de travail dans une activité adaptée depuis le mois d’août 2022, et au niveau psychiatrique, aux conclusions de la dernière expertise qui retenait une capacité de travail de 70% dans une activité adaptée. En conclusion, la capacité de travail dans l’activité habituelle avait été de 70% dès le 1er mai 2017 et de 0% dès le 10 octobre 2020. Dans une fonction adaptée tenant compte des atteintes somatiques et psychiatriques, ladite capacité était de 70% depuis le 20 août 2022.

g. Par décision du 24 octobre 2023, l’OAI a accordé une rente entière à l’assuré, sur la base d’un degré d’invalidité de 100%, du 1er avril 2021 au
31 décembre 2022. Il a rappelé avoir soumis le dossier de l’intéressé au SMR pour réexamen dans le cadre de la procédure d’audition, et qu’il en ressortait que l’incapacité de travail était de 30% dans l’activité habituelle depuis le
1er mai 2017 et de 100% depuis le 10 octobre 2020. Cependant, dans une activité adaptée, la capacité de travail était de 70% depuis le 28 septembre 2022. Suite à l’amélioration de l’état de santé à partir de cette date, il avait procédé à une nouvelle comparaison des revenus sans invalidité (CHF 65'969.-) et avec invalidité (CHF 46'178.-), ce qui donnait une perte de gain de CHF 19'791.-, soit un degré d’invalidité de 30%, inférieur au taux de 40% ouvrant le droit à une rente. Partant, cette dernière était supprimée dès le 10 janvier 2023, soit trois mois après l’amélioration de l’état de santé.

C. a. Par acte du 24 novembre 2023, l’assuré, représenté par un avocat, a interjeté recours contre cette décision auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice. Il a conclu, sous suite de frais et dépens, à l’octroi d’un délai complémentaire pour compléter ses écritures et, au fond, à ce que lui soit reconnu le droit à une rente entière d’invalidité dès le 1er avril 2021. En substance, le recourant a contesté la capacité de travail retenue par l’intimé, ainsi que l’absence de tout abattement dans l’évaluation de revenu d’invalide.

b. Dans le délai accordé à cet effet, le recourant a complété son écriture et requis, préalablement, la mise en œuvre d’une expertise judiciaire bidisciplinaire. Sa capacité de travail était restée nulle d’un point de vue psychiatrique, comme confirmé par le Dr C______. En outre, il présentait des limitations fonctionnelles qui le handicapaient dans le port de charges et l’utilisation du bras gauche, ce qui avait été attesté par le Dr B______, et le docteur I______ avait évoqué une probable rupture de la ténodèse du biceps. Le diagnostic demeurait réservé et la reprise d’une activité professionnelle était en l’état exclue. L’incapacité de travail de 100%, admise jusqu’au
31 décembre 2022, était toujours d’actualité. Son aptitude dans une activité strictement adaptée aux restrictions était de 100%, mais il était quasiment impossible qu’une telle activité existe. La décision querellée se fondait sur un rapport rhumatologique annonçant une amélioration de l’état de santé qui ne s’était jamais produite, ainsi que sur une expertise psychiatrique qui retenait une capacité de travail de 70% sous réserve de la réponse à une multitude de questions demeurées ouvertes, susceptibles d’influencer le taux retenu. Il priait la chambre de céans de renoncer à retourner la cause à l’intimé pour instruction complémentaire, afin d’éviter de retarder la reconnaissance de son droit à des prestations.

À l’appui de son recours, l’intéressé a produit des rapports du Dr C______ du 20 novembre 2023, du Dr B______ du 5 décembre 2023 et du
Dr I______du 5 décembre 2023.

c. Dans sa réponse du 19 février 2024, l’intimé a proposé le renvoi pour instruction complémentaire au vu des éléments médicaux produits dans le cadre du recours.

Il a joint un avis de la docteure J______, médecin au SMR, daté du 16 février 2024, aux termes duquel il ne pouvait pas être retenu que l’état de santé du recourant était stabilisé au 21 août 2022, comme estimé par l’examinateur rhumatologue du SMR, au vu de la nouvelle opération de l’épaule gauche le 21 octobre 2022. Par ailleurs, il y avait des signes de rupture du biceps post opératoire lors de la consultation du 5 décembre 2023. La situation médicale n’était donc pas stabilisée. De plus, l’experte psychiatre avait émis des conclusions sur les diagnostics et évalué la capacité de travail sous réserve de questions qui devaient être résolues en raison de nombreuses incohérences. Enfin, l’intéressé avait été hospitalisé le 6 avril 2023. Partant, la reprise de l’instruction était nécessaire les plans orthopédique et psychiatrique.

d. Par écriture du 4 mars 2024, le recourant a maintenu sa demande de mise en œuvre d’expertise judiciaire. À défaut, il a sollicité que l’intimé soit condamné à assumer les frais d’avocat engendrés par la nécessité de recourir contre la décision litigieuse à concurrence de la facture jointe.

e. Le 4 avril 2024, l’intimé a soutenu que le complément d’instruction était requis par l’évolution médicale et qu’aucun élément objectif ne justifiait la mise en place d’une expertise judiciaire. Enfin, la somme sollicitée par le recourant dépassait largement les dépens accordés usuellement par la chambre de céans.

f. Le 29 avril 2024, le recourant a reproché à l’intimé d’avoir fait preuve de négligence en omettant de suivre les préconisations des experts. Les carences de l’instruction étaient d’autant plus patentes qu’une opération était d’ores et déjà agendée avant même que la décision ne soit rendue, ce qui avait échappé à l’intimé. Les dépens correspondaient au dommage subi.

g. Le 3 mai 2024, l’intimé a transmis à la chambre de céans une lettre de sortie du 25 mars 2024 de la Clinique du K______, reçue par son médecin-conseil, suite à une admission volontaire du recourant, du 9 au 22 mars 2024, à la demande de son psychiatre en raison d’une décompensation anxieuse et dépressive sur fond d’épuisement psychique prolongé.

h. Le 23 août 2024, le recourant a produit un rapport du 24 juillet 2024 de la consultation d’antalgie ambulatoire. Ont notamment été diagnostiqués des douleurs chroniques avec des cervicobrachialgies gauches secondaires à des troubles dégénératifs C6-C7, des omalgies gauches persistantes malgré la résection acromio-claviculaire et l’acromioplastie gauches et la tendinodèse du long chef du biceps en 2022, ainsi qu’un état dépressif. Des IRM cervicale et de l’épaule avaient été réalisées les 8 et 15 mai 2024. La prise en charge multimodale s’était poursuivie, avec des approches médicamenteuse, psychologique et physique, puis interventionnelle par la réalisation de blocs anesthésiques diagnostiques. Suite à un essai TENS positif du 3 juin 2024, le patient avait décidé de continuer cette utilisation à domicile.

i. Par courrier du 4 septembre 2024, la chambre de céans a informé les parties de son intention de confier une mission d’expertise rhumatologique et psychiatrique au docteur L______, spécialiste FMH en rhumatologie, et au docteur M______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, et leur a communiqué les questions qu’elle soumettrait aux experts.

j. En date 18 septembre 2024, l’intimé a indiqué qu’il n’avait pas de motif de récusation à faire valoir et suggéré l’ajout d’une question complémentaire.

k. Le 23 septembre 2024, le recourant a exposé ne pas avoir de motif de récusation à l’encontre des experts annoncés, ni de questions complémentaires à leur soumettre.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

2.              

2.1 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

2.2 Le 1er janvier 2022 sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du
19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du
3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961
(RAI – RS 831.201 ; RO 2021 706).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable est celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

En l’occurrence, la décision litigieuse est contestée en tant qu’elle limite l’octroi d’une rente d’invalidité pour la période du 1er avril 2021 au 31 décembre 2022, et la supprime dès cette date. Les dispositions légales applicables seront donc citées dans leur teneur en vigueur à partir du 1er janvier 2022.

3.              

3.1 L’objet du litige dans la procédure administrative subséquente est le rapport juridique qui, dans le cadre de l’objet de la contestation déterminé par la décision, constitue, d’après les conclusions du recours, l’objet de la décision effectivement attaqué. D’après cette définition, l’objet de la contestation et l’objet du litige sont identiques lorsque la décision administrative est attaquée dans son ensemble. En revanche, lorsque le recours ne porte que sur une partie des rapports juridiques déterminés par la décision, les rapports juridiques non contestés sont certes compris dans l’objet de la contestation, mais non pas dans l’objet du litige
(ATF 125 V 413 consid. 1b et 2 et les références).

Les questions qui, bien qu'elles soient visées par la décision administrative et fassent ainsi partie de l’objet de la contestation, ne sont plus litigieuses, d'après les conclusions du recours, et qui ne sont donc pas comprises dans l’objet du litige, ne sont examinées par le juge que s'il existe un rapport de connexité étroit entre les points non contestés et l’objet du litige (ATF 125 V 413 consid. 1b et les références).

3.2 En l’espèce, il est rappelé que, dans sa décision du 24 octobre 2023, l’intimé a octroyé au recourant le droit à une rente d’invalidité du 1er avril 2021 au
31 décembre 2022, date à laquelle il a supprimé cette prestation au motif que le degré d’invalidité était insuffisant.

Le recourant ne conteste la décision litigieuse qu’en ce qui concerne la suppression de sa rente, de sorte que le litige porte sur son droit à une rente entière d’invalidité à partir du 1er janvier 2023.

4.             Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 148 V 321 consid. 7.3.1 ; 145 V 209 consid. 5.3 et les références).

4.1 L’art. 17 al. 1 LPGA dispose que la rente d'invalidité est, d'office ou sur demande, révisée pour l'avenir, à savoir augmentée, réduite ou supprimée, lorsque le taux d'invalidité de l'assuré subit une modification d'au moins 5 points de pourcentage (let. a) ou atteint 100% (let. b).

Tout changement important des circonstances, propre à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon
l’art. 17 LPGA (ATF 149 V 91 consid. 7.5 et les références). La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important. Tel est le cas lorsque la capacité de travail s'améliore grâce à l'accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 147 V 167 consid. 4.1 et les références).

Une amélioration de la capacité de gain ou de la capacité d'accomplir les travaux habituels de l'assuré n'est déterminante pour la suppression de tout ou partie du droit aux prestations qu'à partir du moment où l'on peut s'attendre à ce que l'amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période. Il en va de même lorsqu'un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu'une complication prochaine soit à craindre (art. 88a al. 1 RAI). Le fardeau de la preuve quant à cette amélioration de la capacité de travail incombe à l’administration (arrêt du Tribunal fédéral 8C_510/2020 du
15 avril 2021 consid. 2.2 et les références).

Dans le cas de l’octroi rétroactif d’une rente temporaire ou échelonnée, les bases de comparaison déterminantes sont, d'une part, la date du début du droit à la rente et, d'autre part, la date de la modification du droit à la rente compte tenu du délai de trois mois de l'art. 88a RAI (arrêt du Tribunal fédéral 8C 51/2024 du 2 juillet 2024 consid. 2.4 et les références).

4.2 Aux termes de l’art. 8 al. 1 LPGA, est réputée invalidité l’incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée.

Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique ou mentale et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable
(al. 2).

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a
al. 1 LAI).

4.2.1 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA.

La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanent d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1 ; 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

Dans l’ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d'évaluation de la capacité de travail, respectivement de l'incapacité de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d'affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d'évaluation au moyen d'un catalogue d'indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d'évaluation aux autres affections psychiques
(ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d'atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 143 V 409 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références).

Le Tribunal fédéral a en revanche maintenu, voire renforcé la portée des motifs d'exclusion définis dans l'ATF 131 V 49, aux termes desquels il y a lieu de conclure à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit aux prestations d'assurance, si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, et ce même si les caractéristiques d'un trouble au sens de la classification sont réalisées. Des indices d'une telle exagération apparaissent notamment en cas de discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, de grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psycho-social intact (ATF 141 V 281 consid. 2.2.1 et 2.2.2 ; 132 V 65 consid. 4.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2016 du 14 juin 2016 consid. 3.2).

L'organe chargé de l'application du droit doit, avant de procéder à l'examen des indicateurs, analyser si les troubles psychiques dûment diagnostiqués conduisent à la constatation d'une atteinte à la santé importante et pertinente en droit de l'assurance-invalidité, c'est-à-dire qui résiste aux motifs dits d'exclusion tels qu'une exagération ou d'autres manifestations d'un profit secondaire tiré de la maladie (ATF 141 V 281 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 5.2.2 et la référence).

4.2.2 Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources)
(ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence). 

Il y a lieu de se fonder sur une grille d’analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

Ces indicateurs sont classés comme suit :

I. Catégorie « degré de gravité fonctionnelle »

Les indicateurs relevant de cette catégorie représentent l’instrument de base de l’analyse. Les déductions qui en sont tirées devront, dans un second temps, résister à un examen de la cohérence (ATF 141 V 281 consid. 4.3).

A. Axe « atteinte à la santé »

1. Caractère prononcé des éléments et des symptômes pertinents pour le diagnostic

Les constatations relatives aux manifestations concrètes de l’atteinte à la santé diagnostiquée permettent de distinguer les limitations fonctionnelles causées par cette atteinte de celles dues à des facteurs non assurés. Le point de départ est le degré de gravité minimal inhérent au diagnostic. Il doit être rendu vraisemblable compte tenu de l’étiologie et de la pathogenèse de la pathologie déterminante pour le diagnostic (ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.1).

L'influence d'une atteinte à la santé sur la capacité de travail est davantage déterminante que sa qualification en matière d'assurance-invalidité (ATF 142 V 106 consid. 4.4). Diagnostiquer une atteinte à la santé, soit identifier une maladie d'après ses symptômes, équivaut à l'appréciation d'une situation médicale déterminée qui, selon les médecins consultés, peut aboutir à des résultats différents en raison précisément de la marge d'appréciation inhérente à la science médicale (ATF 145 V 361 consid. 4.1.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_212/2020 du 4 septembre 2020 consid. 4.2 et 9C_762/2019 du 16 juin 2020 consid. 5.2).

2. Succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à ces derniers

Le déroulement et l'issue d'un traitement médical sont en règle générale aussi d'importants indicateurs concernant le degré de gravité du trouble psychique évalué. Il en va de même du déroulement et de l'issue d'une mesure de réadaptation professionnelle. Ainsi, l'échec définitif d'une thérapie médicalement indiquée et réalisée selon les règles de l'art de même que l'échec d'une mesure de réadaptation - malgré une coopération optimale de l'assuré - sont en principe considérés comme des indices sérieux d'une atteinte invalidante à la santé. A l'inverse, le défaut de coopération optimale conduit plutôt à nier le caractère invalidant du trouble en question. Le résultat de l'appréciation dépend toutefois de l'ensemble des circonstances individuelles du cas d'espèce (arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2.1.3 et la référence).

3. Comorbidités

La présence de comorbidités ou troubles concomitants est un indicateur à prendre en considération en relation avec le degré de gravité fonctionnel (arrêt du Tribunal fédéral 9C_650/2019 du 11 mai 2020 consid. 3.3 et la référence). On ne saurait toutefois inférer la réalisation concrète de l'indicateur "comorbidité" et, partant, un indice suggérant la gravité et le caractère invalidant de l'atteinte à la santé, de la seule existence de maladies psychiatriques et somatiques concomitantes. Encore faut-il examiner si l'interaction de ces troubles ayant valeur de maladie prive l'assuré de certaines ressources (arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 consid. 5.2.3 et le référence). Il est nécessaire de procéder à une approche globale de l’influence du trouble avec l’ensemble des pathologies concomitantes. Une atteinte qui, selon la jurisprudence, ne peut pas être invalidante en tant que telle (cf. ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.2; arrêt du Tribunal fédéral 9C_98/2010 du 28 avril 2010 consid. 2.2.2, in : RSAS 2011 IV n° 17, p. 44) n’est pas une comorbidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1040/2010 du 6 juin 2011 consid. 3.4.2.1, in : RSAS 2012 IV n° 1, p. 1) mais doit à la rigueur être prise en considération dans le cadre du diagnostic de la personnalité (ATF 141 V 281 consid. 4.3.2). Ainsi, un trouble dépressif réactionnel au trouble somatoforme ne perd pas toute signification en tant que facteur d’affaiblissement potentiel des ressources, mais doit être pris en considération dans l’approche globale (ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.3).

Même si un trouble psychique, pris séparément, n'est pas invalidant en application de la nouvelle jurisprudence, il doit être pris en considération dans l'appréciation globale de la capacité de travail, qui tient compte des effets réciproques des différentes atteintes. Ainsi, une dysthymie, prise séparément, n'est pas invalidante, mais peut l'être lorsqu'elle est accompagnée d’un trouble de la personnalité notable. Par conséquent, indépendamment de leurs diagnostics, les troubles psychiques entrent déjà en considération en tant que comorbidité importante du point de vue juridique si, dans le cas concret, on doit leur attribuer un effet limitatif sur les ressources (ATF 143 V 418 consid. 8.1).

B. Axe « personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles)

Le « complexe personnalité » englobe, à côté des formes classiques du diagnostic de la personnalité qui vise à saisir la structure et les troubles de la personnalité, le concept de ce qu’on appelle les « fonctions complexes du moi » qui désignent des capacités inhérentes à la personnalité, permettant des déductions sur la gravité de l’atteinte à la santé et de la capacité de travail (par exemple : auto-perception et perception d’autrui, contrôle de la réalité et formation du jugement, contrôle des affects et des impulsions, intentionnalité et motivation; cf. ATF 141 V 281 consid. 4.3.2). Etant donné que l’évaluation de la personnalité est davantage dépendante de la perception du médecin examinateur que l’analyse d’autres indicateurs, les exigences de motivation sont plus élevées (ATF 141 V 281 consid. 4.3.2).

Le Tribunal fédéral a estimé qu’un assuré présentait des ressources personnelles et adaptatives suffisantes, au vu notamment de la description positive qu’il avait donnée de sa personnalité, sans diminution de l'estime ou de la confiance en soi et sans peur de l'avenir (arrêt du Tribunal fédéral 8C_584/2016 du 30 juin 2017 consid. 5.2).

C. Axe « contexte social »

Si des difficultés sociales ont directement des conséquences fonctionnelles négatives, elles continuent à ne pas être prises en considération. En revanche, le contexte de vie de l’assuré peut lui procurer des ressources mobilisables, par exemple par le biais de son réseau social. Il faut toujours s’assurer qu’une incapacité de travail pour des raisons de santé ne se confond pas avec le chômage non assuré ou avec d’autres difficultés de vie (ATF 141 V 281 consid. 4.3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 consid. 5.2.3).

Lors de l'examen des ressources que peut procurer le contexte social et familial pour surmonter l'atteinte à la santé ou ses effets, il y a lieu de tenir compte notamment de l'existence d'une structure quotidienne et d'un cercle de proches […]. Le contexte familial est susceptible de fournir des ressources à la personne assurée pour surmonter son atteinte à la santé ou les effets de cette dernière sur sa capacité de travail, nonobstant le fait que son attitude peut rendre plus difficile les relations interfamiliales (arrêt du Tribunal fédéral 9C_717/2019 du 30 septembre 2020 consid. 6.2.5.3). Toutefois, des ressources préservées ne sauraient être inférées de relations maintenues avec certains membres de la famille dont la personne assurée est dépendante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_55/2020 du 22 octobre 2020 consid. 5.2).

II. Catégorie « cohérence »

Il convient ensuite d’examiner si les conséquences qui sont tirées de l’analyse des indicateurs de la catégorie « degré de gravité fonctionnel » résistent à l’examen sous l’angle de la catégorie « cohérence ». Cette seconde catégorie comprend les indicateurs liés au comportement de l’assuré (ATF 141 V 281 consid. 4.4). A ce titre, il convient notamment d’examiner si les limitations fonctionnelles se manifestent de la même manière dans la vie professionnelle et dans la vie privée, de comparer les niveaux d’activité sociale avant et après l’atteinte à la santé ou d’analyser la mesure dans laquelle les traitements et les mesures de réadaptation sont mis à profit ou négligés. Dans ce contexte, un comportement incohérent est un indice que les limitations évoquées seraient dues à d’autres raisons qu’une atteinte à la santé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.3).

A. Limitation uniforme du niveau des activités dans tous les domaines comparables de la vie

Il s’agit ici de se demander si l’atteinte à la santé limite l’assuré de manière semblable dans son activité professionnelle ou dans l’exécution de ses travaux habituels et dans les autres activités (par exemple, les loisirs). Le critère du retrait social utilisé jusqu’ici doit désormais être interprété de telle sorte qu’il se réfère non seulement aux limitations mais également aux ressources de l’assuré et à sa capacité à les mobiliser. Dans la mesure du possible, il convient de comparer le niveau d’activité sociale de l’assuré avant et après la survenance de l’atteinte à la santé (ATF 141 V 281 consid. 4.4.1).

B. Poids de la souffrance révélé par l’anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation

L'interruption de toute thérapie médicalement indiquée sur le plan psychique et le refus de participer à des mesures de réadaptation d'ordre professionnel sont des indices importants que l’assuré ne présente pas une évolution consolidée de la douleur et que les limitations invoquées sont dues à d'autres motifs qu'à son atteinte à la santé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_569/2017 du 18 juillet 2018 consid. 5.5.2).

La prise en compte d’options thérapeutiques, autrement dit la mesure dans laquelle les traitements sont mis à profit ou alors négligés, permet d’évaluer le poids effectif des souffrances. Tel n’est toutefois pas le cas lorsque le comportement est influencé par la procédure assécurologique en cours. Il ne faut pas conclure à l’absence de lourdes souffrances lorsque le refus ou la mauvaise acceptation du traitement recommandé est la conséquence d’une incapacité (inévitable) de l’assuré à reconnaître sa maladie (anosognosie). Les mêmes principes s’appliquent pour les mesures de réadaptation. Un comportement incohérent de l'assuré est là aussi un indice que la limitation fonctionnelle est due à d’autres raisons qu’à l'atteinte à la santé assurée (ATF 141 V 281 consid. 4.4.2).

4.2.3 Le trouble de stress post-traumatique (CIM-10 ; F43) constitue une réponse différée ou prolongée à une situation ou à un événement stressant (de courte ou de longue durée), exceptionnellement menaçant ou catastrophique et qui provoquerait des symptômes évidents de détresse chez la plupart des individus. Dans certains cas, le trouble peut présenter une évolution chronique, durer de nombreuses années, et entraîner une modification durable de la personnalité (ATF 142 V 342 consid. 5.1 et les références). Selon la jurisprudence, pour que le diagnostic d'état de stress post-traumatique de survenue différée puisse être retenu, l'ensemble des critères diagnostiques du DSM-5 et de la CIM-10 doit être présent au plus tard six mois après l'événement (ATF 142 V 342 consid. 5.2.2). Une motivation particulière est nécessaire dans les cas où, exceptionnellement et pour des motifs déterminés, une durée supérieure à six mois doit être prise en compte (arrêts du Tribunal fédéral 9C_571/2023 du 11 janvier 2024 consid. 6.2 et la référence ; 9C_480/2021 du 8 novembre 2022 consid. 5.3.2 et les références).

4.2.4 En ce qui concerne les facteurs psychosociaux ou socioculturels et leur rôle en matière d'invalidité, ils ne figurent pas au nombre des atteintes à la santé susceptibles d'entraîner une incapacité de gain au sens de l'art. 4 al. 1 LAI. Pour qu'une invalidité soit reconnue, il est nécessaire, dans chaque cas, qu'un substrat médical pertinent, entravant la capacité de travail (et de gain) de manière importante, soit mis en évidence par le médecin spécialisé. Plus les facteurs psychosociaux et socioculturels apparaissent au premier plan et imprègnent l'anamnèse, plus il est essentiel que le diagnostic médical précise s'il y a atteinte à la santé psychique qui équivaut à une maladie. Ainsi, il ne suffit pas que le tableau clinique soit constitué d'atteintes qui relèvent de facteurs socioculturels ; il faut au contraire que le tableau clinique comporte d'autres éléments pertinents au plan psychiatrique tels, par exemple, une dépression durable au sens médical ou un état psychique assimilable, et non une simple humeur dépressive. Une telle atteinte psychique, qui doit être distinguée des facteurs socioculturels, et qui doit de manière autonome influencer la capacité de travail, est nécessaire en définitive pour que l'on puisse parler d'invalidité. En revanche, là où l'expert ne relève pour l'essentiel que des éléments qui trouvent leur explication et leur source dans le champ socioculturel ou psychosocial, il n'y a pas d'atteinte à la santé à caractère invalidant (ATF 127 V 294 consid. 5a in fine).

5.             La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1). La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450
consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR
(ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I.244/05 du 3 mai 2006 consid. 2.1). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (ATF 125 V 351 consid. 3a ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C/973/2011 du
4 mai 2012 consid. 3.2.1).

On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

6.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références ; 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d’après l’état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue. Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent normalement faire l’objet d’une nouvelle décision administrative (ATF 121 V 366 consid. 1b et les références). Les faits survenus postérieurement doivent cependant être pris en considération dans la mesure où ils sont étroitement liés à l’objet du litige et de nature à influencer l’appréciation au moment où la décision attaquée a été rendue
(ATF 99 V 102 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances
I 321/04 du 18 juillet 2005 consid. 5).

Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210
consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

7.             En l’espèce, l’intimé propose le renvoi pour investigations complémentaires, concluant ainsi à l’admission partielle du recours.

Le recourant pour sa part sollicite la mise en œuvre d’une expertise judiciaire, relevant de nombreuses carences dans l’instruction de son dossier.

7.1 La chambre de céans rappelle que la décision litigieuse repose sur l’avis du
14 août 2023 du Dr D______, lequel s’est fondé, du point de vue rhumatologique, sur le rapport du 30 mai 2022 du Dr E______ et, au niveau psychiatrique, sur le rapport du 3 août 2023 de la Dre G______.

7.1.1 L’examinateur rhumatologue du SMR a estimé que la capacité de travail dans une activité adaptée aux restrictions somatiques serait de 80% dans un délai de trois mois, soit dès le 20 août 2022. Il a cependant clairement recommandé de revoir l’intéressé si une telle reprise professionnelle n’avait pas lieu, soulignant encore que cette aptitude devrait être confirmée par les médecins traitants. Force est donc de constater que le Dr E______ a émis un simple pronostic s’agissant de la capacité de travail de l’intéressé.

Or, deux semaines après l’examen de ce médecin, une nouvelle lésion a été mise en exergue au niveau de l’épaule gauche du recourant, lésion qui a justifié une troisième intervention chirurgicale, réalisée le 21 octobre 2022. Dans son rapport du 2 septembre 2022, le Dr B______ a expressément signalé cette nouvelle atteinte somatique et fait état d’une aggravation de l’état de santé de son patient.

Il est dès lors difficilement compréhensible que le Dr D______ ait tout de même pu proposer, dans son avis du 28 septembre 2022, de retenir la capacité de travail hypothétique évoquée par le Dr E______, dont le pronostic favorable ne s’est à l’évidence pas concrétisé.

7.1.2 S’agissant de l’appréciation psychiatrique, la Dre G______ a écrit dans son rapport d’expertise que l’évaluation de la capacité de travail dépendait des réponses qui seraient apportées aux discordances qu’elle avait relevées au « point 6.1.3 » (recte : 6.2.3). La psychiatre y a exposé avoir retenu de nombreuses incohérences, ce qui rendait difficile l’appréciation chez l’intéressé qui présentait clairement des avantages secondaires (avec une difficulté à retrouver un emploi à son âge, sans bien parler le français, sans formation dans une activité légère physiquement, avec une démotivation après une longue pause professionnelle) et une exagération des plaintes, mais qui avait beaucoup souffert depuis l’adolescence avec un état de stress post traumatique, suite à un emprisonnement dans son pays d’origine où il avait subi des viols, puis une aggravation depuis 2017. Les discordances devraient être clarifiées en dehors du cadre de l’expertise, pour lui permettre ensuite de se prononcer de façon définitive. Elle a énuméré les renseignements à obtenir qui portaient en particulier sur la description exhaustive d’une journée, les dates des consultations psychiatriques depuis 2019, le droit de garde et la prise en charge des enfants, les rapports d’hospitalisations, l’historique des prises de médicaments auprès des pharmacies, ou encore les symptômes retenus par le psychiatre traitant, le traitement prescrit et les analyses effectuées. En fonction des éléments précités, un examen neuropsychologique avec validation des symptômes devrait être demandé. Sous réserve de réponses plus convaincantes à ces questions, elle estimait que la capacité de travail était nulle dans certaines activités non adaptées et « probablement » de 70%, et non pas de 80% comme retenu précédemment par le SMR, dans une fonction n’impliquant ni gestion de l’administratif ni conduite professionnelle.

Il appert ainsi que l’experte s’est livrée à de simples conjectures, faute de disposer de toutes les informations nécessaires, et que son appréciation n’a pas été rendue en pleine connaissance du dossier. Elle n’était par conséquent pas en mesure de répondre au mandat d’expertise et aurait dû s’abstenir de prendre des conclusions hasardeuses.

7.1.3 Contrairement à ce que soutient l’intimé, l’instruction complémentaire qui s’impose ne résulte pas de l’évolution de l’état de santé du recourant postérieurement à la décision contestée, mais bien des carences du SMR.

En effet, l’arthro-IRM de l’épaule gauche du 30 mai 2022 a mis en évidence une fissuration labrale et un épaississement du ligament gléno-huméral moyen. Ces lésions ont été dûment signalées par le médecin traitant dans son rapport du
2 septembre 2022. L’aggravation somatique est donc survenue plus d’une année avant le prononcé de la décision litigieuse et n’a pas été prise en considération par le Dr D______.

Quant à l’état de santé psychique, la Dre G______ a exposé que le dossier devait être complété et ne permettait en l’état pas de se prononcer sur la capacité de travail. À cet égard, il pourra encore être relevé que la psychiatre n’a
semble-t-il pas eu connaissance de l’hospitalisation du recourant survenue le
6 avril 2023, soit deux mois avant ses deux entretiens avec l’intéressé.

Le Dr D______ aurait donc dû constater que les conclusions de l’examen rhumatologique et de l’expertise psychiatrique n’étaient pas fiables, puisque ces documents établissaient la nécessité de poursuivre l’instruction.

7.1.4 Par conséquent, l’intimé ne pouvait pas se fonder sur le rapport du
Dr D______ du 14 août 2023 pour retenir que l’état de santé du recourant s’était amélioré à partir du 28 septembre 2022 et supprimer le droit à la rente le
1er janvier 2023.

L’intimé ayant omis de procéder aux investigations qui s’imposaient pourtant clairement, la chambre de céans ordonnera une expertise judiciaire bidisciplinaire, comportant des volets en rhumatologie et psychiatrie, laquelle est confiée aux docteurs L______ et M______.


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant préparatoirement

 

I. Ordonne une expertise de A______. Commet à ces fins le docteur L______, spécialiste FMH en rhumatologie, Centre médical de N______, route de ______, 1232 Confignon, et le docteur M______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, rue ______, 1225 Chêne-Bourg. Dit que la mission d’expertise sera la suivante :

A.  Prendre connaissance du dossier de la cause.

B.  Si nécessaire, prendre tous renseignements auprès des médecins ayant traité la personne expertisée, en particulier les Drs B______, I______ et C______, et les médecins de la Clinique du O______.

C.  Examiner et entendre la personne expertisée et si nécessaire, ordonner d'autres examens.

D.  Charge le Dr L______ d’établir un rapport détaillé comprenant les éléments suivants :

1.             Anamnèse détaillée (avec la description d’une journée-type)

2.             Plaintes de la personne expertisée

3.             Status et constatations objectives

4.             Diagnostics (selon un système de classification reconnu)

Précisez quels critères de classification sont remplis et de quelle manière (notamment l’étiologie et la pathogenèse)

4.1. Avec répercussion sur la capacité de travail

4.1.1   Dates d'apparition

4.2         Sans répercussion sur la capacité de travail

4.2.1   Dates d'apparition

4.3         Quel est le degré de gravité de chacun des troubles diagnostiqués (faible, moyen, grave) ?

4.4         Les atteintes et les plaintes de la personne expertisée correspondent-elles à un substrat organique objectivable ?

4.5         L’état de santé de la personne expertisée s’est-il amélioré/détérioré depuis le mois d’août 2022 ?

4.6         Dans quelle mesure les atteintes diagnostiquées limitent-elles les fonctions nécessaires à la gestion du quotidien ? (N’inclure que les déficits fonctionnels émanant des observations qui ont été déterminantes pour le diagnostic de l’atteinte à la santé, en confirmant ou en rejetant des limitations fonctionnelles alléguées par la personne expertisée).

4.7         Y a-t-il exagération des symptômes ou constellation semblable (discordance substantielle entre les douleurs décrites et le comportement observé ou l’anamnèse, allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, absence de demande de soins médicaux, plaintes très démonstratives laissant insensible l'expert, allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact) ?

4.8 Dans l’affirmative, considérez-vous que cela suffise à exclure une atteinte à la santé significative ?

4.9 Est-ce que le tableau clinique est cohérent, compte tenu du ou des diagnostic(s) retenu(s) ou y a-t-il des atypies ?

4.10 Est-ce que ce qui est connu de l’évolution correspond à ce qui est attendu pour le ou les diagnostic(s) retenu(s) ?

5.             Limitations fonctionnelles

5.1         Indiquer les limitations fonctionnelles en relation avec chaque diagnostic

5.1.1   Dates d’apparition

5.2 Les plaintes sont-elles objectivées ?

6.             Capacité de travail

6.1         Dater la survenance de l’incapacité de travail durable dans l’activité habituelle pour chaque diagnostic, indiquer son taux pour chaque diagnostic et détailler l’évolution de ce taux pour chaque diagnostic.

6.2         La personne expertisée est-elle capable d’exercer son activité lucrative habituelle ?

6.2.1   Si non, ou seulement partiellement, pourquoi ? Quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ?

6.2.2   Depuis quelle date sa capacité de travail est-elle réduite / nulle ?

6.3         La personne expertisée est-elle capable d’exercer une activité lucrative adaptée à ses limitations fonctionnelles ?

6.3.1   Si non, ou seulement partiellement, pourquoi ? Quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ?

6.3.2   Si oui, quel est le domaine d’activité lucrative adaptée ? À quel taux ? Depuis quelle date ?

6.3.3   Dire s'il y a une diminution de rendement et la chiffrer.

6.4         Comment la capacité de travail de la personne expertisée a-t-elle évolué depuis le mois d’août 2022 ?

6.5         Des mesures médicales sont-elles nécessaires préalablement à la reprise d’une activité lucrative ? Si oui, lesquelles ?

6.6         Quel est votre pronostic quant à l’exigibilité de la reprise d’une activité lucrative ?

7.             Traitement

7.1         Examen du traitement suivi par la personne expertisée et analyse de son adéquation.

7.2         Est-ce que la personne expertisée s’est engagée ou s’engage dans les traitements qui sont raisonnablement exigibles et possiblement efficaces dans son cas ou n’a-t-elle que peu ou pas de demande de soins ?

7.3         En cas de prise de traitement médicamenteux, soit antalgique, soit psychotrope, pouvez-vous vérifier la compliance ou la biodisponibilité à l’aide d’un dosage sanguin ?

7.4         Propositions thérapeutiques et analyse de leurs effets sur la capacité de travail de la personne expertisée.

8.             Appréciation d'avis médicaux du dossier

8.1 Êtes-vous d'accord avec l’appréciation du Dr I______ du
5 décembre 2023 ? En particulier avec les diagnostics évoqués, les limitations fonctionnelles mentionnées et l’estimation de la capacité de travail ? Si non, pourquoi ?

9.             Quel est le pronostic ?

10.         Des mesures de réadaptation professionnelle sont-elles envisageables ?

11.         Faire toutes autres observations ou suggestions utiles

E.     Invite l’expert à faire une appréciation consensuelle du cas avec le Dr M______ s’agissant de toutes les problématiques ayant des interférences entre elles, notamment l’appréciation de la capacité de travail résiduelle.

F.   Invite l’expert à déposer, dans les meilleurs délais, un rapport en trois exemplaires auprès de la chambre de céans.

 

G.  Charge le Dr M______ d’établir un rapport détaillé comprenant les éléments suivants :

1.             Anamnèse détaillée (avec la description d’une journée-type)

2.             Plaintes de la personne expertisée

3.             Status et constatations objectives

4.             Diagnostics (selon un système de classification reconnu)

Précisez quels critères de classification sont remplis et de quelle manière (notamment l’étiologie et la pathogenèse)

4.1 Avec répercussion sur la capacité de travail

4.1.1   Dates d'apparition

4.2    Sans répercussion sur la capacité de travail

4.2.1 Dates d'apparition

4.3 Quel est le degré de gravité de chacun des troubles diagnostiqués (faible, moyen, grave) ?

4.4 L’état de santé de la personne expertisée s’est-il amélioré/détérioré depuis le mois d’août 2022 ?

4.5         Dans quelle mesure les atteintes diagnostiquées limitent-elles les fonctions nécessaires à la gestion du quotidien ? (N’inclure que les déficits fonctionnels émanant des observations qui ont été déterminantes pour le diagnostic de l’atteinte à la santé, en confirmant ou en rejetant des limitations fonctionnelles alléguées par la personne expertisée).

4.6         Y a-t-il exagération des symptômes ou constellation semblable (discordance substantielle entre les douleurs décrites et le comportement observé ou l’anamnèse, allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, absence de demande de soins médicaux, plaintes très démonstratives laissant insensible l'expert, allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact) ?

4.7         Dans l’affirmative, considérez-vous que cela suffise à exclure une atteinte à la santé significative ?

5. Limitations fonctionnelles

5.1. Indiquer les limitations fonctionnelles en relation avec chaque diagnostic

5.1.1 Dates d'apparition

5.2 Les plaintes sont-elles objectivées ?

6. Cohérence

6.1 Est-ce que le tableau clinique est cohérent, compte tenu du ou des diagnostic(s) retenu(s) ou y a-t-il des atypies ?

6.2 Est-ce que ce qui est connu de l'évolution correspond à ce qui est attendu pour le ou les diagnostic(s) retenu(s) ?

6.3 Est-ce qu'il y a des discordances entre les plaintes et le comportement de la personne expertisée, entre les limitations alléguées et ce qui est connu des activités et de la vie quotidienne de la personne expertisée ? En d’autre termes, les limitations du niveau d’activité sont-elles uniformes dans tous les domaines (professionnel, personnel) ?

6.4 Quels sont les niveaux d’activité sociale et d’activités de la vie quotidienne (dont les tâches ménagères) et comment ont-ils évolué depuis la survenance de l’atteinte à la santé ?

6.5 Dans l’ensemble, le comportement de la personne expertisée vous semble-t-il cohérent et pourquoi ?

7. Personnalité

7.1 Est-ce que la personne expertisée présente un trouble de la personnalité selon les critères diagnostiques des ouvrages de référence et si oui, lequel ? Quel code ?

7.2 Est-ce que la personne expertisée présente des traits de la personnalité pathologiques et, si oui, lesquels ?

7.3 Le cas échéant, quelle est l'influence de ce trouble de personnalité ou de ces traits de personnalité pathologiques sur les limitations éventuelles et sur l'évolution des troubles de la personne expertisée ?

7.4 La personne expertisée se montre-t-elle authentique ou y a-t-il des signes d'exagération des symptômes ou de simulation ?

8. Ressources

8.1 Quelles sont les ressources résiduelles de la personne expertisée sur le plan somatique ?

8.2 Quelles sont les ressources résiduelles de la personne expertisée sur les plans :

a) psychique

b) mental

c) social et familial. En particulier, la personne expertisée peut-elle compter sur le soutien de ses proches ?

 

9. Capacité de travail

9.1 Dater la survenance de l’incapacité de travail durable dans l’activité habituelle pour chaque diagnostic, indiquer son taux pour chaque diagnostic et détailler l’évolution de ce taux pour chaque diagnostic.

9.2 La personne expertisée est-elle capable d’exercer son activité lucrative habituelle ?

9.2.1 Si non, ou seulement partiellement, pourquoi ? Quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ?

9.2.2 Depuis quelle date sa capacité de travail est-elle réduite/ nulle ?

9.3 La personne expertisée est-elle capable d’exercer une activité lucrative adaptée à ses limitations fonctionnelles ? 

9.3.1 Si non, ou dans une mesure restreinte, pour quels motifs ? Quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ?

9.3.2 Si oui, quel est le domaine d’activité lucrative adaptée ? À quel taux ? Depuis quelle date ?

9.3.3 Dire s’il y a une diminution de rendement et la chiffrer.

9.4 Comment la capacité de travail de la personne expertisée a-t-elle évolué depuis le mois d’août 2022 ?

9.5 Des mesures médicales sont-elles nécessaires préalablement à la reprise d’une activité lucrative ? Si oui, lesquelles ?

9.6 Quel est votre pronostic quant à l’exigibilité de la reprise d’une activité lucrative ?

10. Traitement

10.1 Examen du traitement suivi par la personne expertisée et analyse de son adéquation.

10.2 En cas de prise de traitement médicamenteux psychotrope, pouvez-vous vérifier la compliance ou la biodisponibilité à l’aide d’un dosage sanguin ?

10.3 Est-ce que la personne expertisée s'est engagée ou s'engage dans les traitements qui sont raisonnablement exigibles et possiblement efficaces dans son cas ou n'a-t-elle que peu ou pas de demande de soins ?

10.4 En cas de refus ou mauvaise acceptation d’une thérapie, cette attitude doit-elle être attribuée à une incapacité de la personne expertisée à reconnaître sa maladie ?

10.5 Propositions thérapeutiques et analyse de leurs effets sur la capacité de travail de la personne expertisée.

11. Appréciation d'avis médicaux du dossier

11.1 Êtes-vous d'accord avec les appréciations du Dr C______ ? En particulier avec les diagnostics posés, les limitations fonctionnelles constatées et l'estimation d'une capacité de travail de 0% ? Si non, pourquoi ?

12. Quel est le pronostic ?

13. Des mesures de réadaptation professionnelle sont-elles envisageables ?

14. Faire toutes autres observations ou suggestions utiles.

H.  Invite l’expert à faire une appréciation consensuelle du cas avec le Dr L______ s’agissant de toutes les problématiques ayant des interférences entre elles, notamment l’appréciation de la capacité de travail résiduelle.

I.     Invite l’expert à déposer, dans les meilleurs délais, un rapport en trois exemplaires auprès de la chambre de céans.

II. Réserve le fond ainsi que le sort des frais jusqu’à droit jugé au fond.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente

 

 

 

 

Joanna JODRY

Une copie conforme de la présente ordonnance est notifiée aux parties par le greffe le