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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1140/2025

ATA/485/2025 du 29.04.2025 ( PROF ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 20.05.2025, 2C_260/2025
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1140/2025-PROF ATA/485/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 avril 2025

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourante

contre

COMMISSION DU BARREAU intimée

 



EN FAIT

A. a. A______ est opposée, dans le cadre d'un lourd contentieux, à B______, père de leur fille C______ et qui exerce par ailleurs la profession d'avocat. Dans le cadre de ce litige, D______, avocate, a été nommée curatrice d’C______.

b. A______ a déposé, en lien avec ce litige, de très nombreuses dénonciations auprès de la Commission du Barreau (ci-après : la commission), que ce soit au sujet de Me D______ ou d'autres avocats impliqués. Elle a recouru à douze reprises devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), qui a déclaré ses recours déposés entre 2019 et 2024 irrecevables. Le Tribunal fédéral a également déclaré ses différents recours devant lui irrecevables.

B. a. Par courrier du 24 avril 2024, A______ a saisi la commission d'une nouvelle dénonciation de Me D______, avec pour en-tête « D______ demande de sanction avec effet immédiat et rétroactif et récusation de Mme E______ ».

b. La commission a rejeté la demande de récusation de la précitée, vice-présidente de la commission, par décision du 24 juillet 2024. Le recours interjeté contre cette décision a été déclaré irrecevable par décision de la chambre administrative du 17 octobre 2024 (ATA/1224/2024).

c. Par décision du 30 octobre 2024, la vice-présidente de la commission a classé la dénonciation.

Les conclusions de la dénonciation tendant à l'annulation des procédures dans lesquelles Me D______ était intervenue en qualité de curatrice d'C______, à l'attribution de la garde de sa fille ou à la condamnation de la curatrice à restituer ses honoraires étaient manifestement irrecevables, dans la mesure où aucun de ces prononcés n'était de la compétence de la commission.

Seul demeurerait le prononcé d'une sanction disciplinaire. Or, la dénonciation, dans la très faible mesure de son intelligibilité, avait pour objet les mêmes faits et griefs que ceux traités par la commission dans sa décision du 14 novembre 2022, entrée en force.

Il était hautement douteux que la dénonciatrice aurait la qualité pour requérir la reconsidération de cette décision alors qu'elle n'avait pas celle de partie. Quoi qu'il en fût, aucun motif de reconsidération n'était articulé. Il convenait dès lors de classer la dénonciation.

d. Par décision du 25 mars 2025, la commission plénière a confirmé la décision précitée.

C. a. Par acte déposé le 1er avril 2025, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre la décision précitée, concluant à l'invalidation « de tous les actes judiciaires déposés par D______ en qualité d'avocate », au prononcé d'une sanction pour divers manquements et à la « reprise de la procédure depuis la nomination de la curatrice qui a aidé les époux B______ en dépit de l'enfant mineur qu'elle devait protéger ».

Elle décrivait comme devant donner lieu à sanction des faits s'étant déroulés entre 2016 et 2019.

b. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             La chambre de céans examine d’office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATA/364/2025 du 2 avril 2025 consid. 1).

2.1 Selon l’art. 60 al. 1 LPA, ont qualité pour recourir non seulement les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée (let. a), mais aussi toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu’elle soit annulée ou modifiée (let. b).

2.2 La dénonciation est une procédure non contentieuse par laquelle n’importe quel administré peut attirer l’attention d’une autorité hiérarchiquement supérieure sur une situation de fait ou de droit qui justifierait à son avis une intervention de l’État dans l’intérêt public. La dénonciation est possible dans toute matière où l’autorité pourrait intervenir d’office. En principe, l’administré n’a aucun droit à ce que sa dénonciation soit suivie d’effets, car l’autorité saisie peut, après un examen sommaire, décider de la classer sans suite ; le dénonciateur n’a même pas de droit à ce que l’autorité prenne une décision au sujet de sa dénonciation (ATF 133 II 468 consid. 2).

Par conséquent, dans une procédure non contentieuse, la seule qualité de plaignant ou de dénonciateur ne donne pas le droit de recourir contre la décision prise ; le plaignant ou le dénonciateur doit encore pouvoir invoquer un intérêt digne de protection à ce que l’autorité de surveillance intervienne. La jurisprudence a ainsi dénié la qualité pour recourir au plaignant dans le cadre d’une procédure disciplinaire dirigée contre un avocat, considérant que celui-là n’avait pas un intérêt propre et digne de protection à demander une sanction disciplinaire à l’encontre de l’avocat pour une éventuelle violation de ses obligations professionnelles. En effet, la procédure de surveillance disciplinaire des avocats a pour but d’assurer l’exercice correct de la profession par les avocats et de préserver la confiance du public à leur égard, et non de défendre les intérêts privés des particuliers (ATF 138 II 162 consid. 2.1.2 ; 135 II 145 consid. 6.1 ; 133 II 468 consid. 2 ; 132 II 250 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_614/2024 du 24 janvier 2025 consid. 2.1).

Dans les procédures disciplinaires engagées contre des personnes exerçant une profession réglementée, le dénonciateur ou le plaignant n’est donc pas partie à la procédure (ATA/1318/2024 du 12 novembre 2024 consid. 2.2 et les arrêts cités).

2.3 Aux termes de l’art. 48 de la loi sur la profession d’avocat du 26 avril 2002 (LPAv - E 6 10), si la procédure a été ouverte sur une dénonciation, l’auteur de cette dernière est avisé de la suite qui y a été donnée ; il n’a pas accès au dossier ; la commission lui communique la sanction infligée et décide dans chaque cas de la mesure dans laquelle il se justifie de lui donner connaissance des considérants.

2.4 L'autorité administrative qui a pris une décision entrée en force n'est obligée de la reconsidérer que si sont réalisées les conditions de l'art. 48 al. 1 LPA. Une telle obligation existe lorsque la décision dont la reconsidération est demandée a été prise sous l'influence d'un crime ou d'un délit (art. 80 let. a LPA) ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (art. 80 let. b LPA ; faits nouveaux « anciens » ; ATA/512/2024 du 23 avril 2024 consid 3.1 ; ATA/651/2023 du 20 juin 2023 consid. 4.1).

Une telle obligation existe également lorsque la situation du destinataire de la décision s'est notablement modifiée depuis la première décision (art. 48 al. 1 let. b LPA). Il faut entendre par là des faits nouveaux « nouveaux », c'est-à-dire survenus après la prise de la décision litigieuse, qui modifient de manière importante l'état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l'autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause (ATA/512/2024 précité consid 3.1 ; ATA/757/2023 du 11 juillet 2023 consid. 3.1). Pour qu'une telle condition soit réalisée, il faut que survienne une modification importante de l'état de fait ou des bases juridiques, ayant pour conséquence, malgré l'autorité de la chose jugée rattachée à la décision en force, que cette dernière doit être remise en question (ATA/512/2024 du 23 avril 2024 consid 3.2 ; ATA/651/2023 précité consid. 4.1 in fine).

Une demande de reconsidération ne doit pas permettre de remettre continuellement en cause des décisions entrées en force et d'éluder les dispositions légales sur les délais de recours (ATF 136 II 177 consid. 2.1). C'est pourquoi, en principe, l'administré n'a aucun droit à ce que l'autorité entre en matière sur sa demande de reconsidération, sauf si une telle obligation de l'autorité est prévue par la loi ou si les conditions particulières posées par la jurisprudence sont réalisées (ATF 120 Ib 42 consid. 2b). La procédure de reconsidération ne constitue pas un moyen de réparer une erreur de droit ou une omission dans une précédente procédure (ATF 111 Ib 211 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, n. 1417).

2.5 En l'espèce, la commission a confirmé le classement décidé par la vice‑présidente en reprenant les mêmes motifs. Dans son recours, la recourante ne s'en prend pas aux motifs du classement litigieux mais relate des faits antérieurs aux précédents arrêts rendus en demandant qu'une sanction sévère soit prise à l'encontre de la curatrice de sa fille.

Comme cela lui a été rappelé à de très nombreuses reprises tant par la commission que par la chambre de céans et le Tribunal fédéral, en tant que dénonciatrice, elle ne dispose pas de la qualité de partie ni de la qualité pour recourir. Elle ne peut dans cette mesure pas demander non plus la reconsidération des décisions déjà entrées en force.

Enfin, les considérations émises par l'autorité intimée concernant l'irrecevabilité manifeste de certaines conclusions ne peuvent qu'être partagées. Sont ainsi manifestement irrecevables les conclusions contenues dans l'acte de recours tendant à l'invalidation de tous les actes judiciaires déposés par l'avocate visée ou encore à la reprise ab ovo de procédures civiles, pour lesquelles ni la commission ni la chambre de céans ne sont compétentes.

Il découle de ce qui précède que le recours sera déclaré irrecevable, sans échange d'écritures, conformément à l'art. 72 LPA).

3.             À titre exceptionnel, malgré l'issue du litige, il sera renoncé à percevoir un émolument (art. 87 al. 1 LPA) ; vu cette issue, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 1er avril 2025 par A______ contre la décision de la Commission du Barreau du 10 mars 2025 ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal-Fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession des recourants, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______, à la Commission du Barreau ainsi que, pour information, à Me D______, avocate.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Florence KRAUSKOPF, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :