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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2267/2021

ATA/898/2022 du 06.09.2022 sur JTAPI/252/2022 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2267/2021-PE ATA/898/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 6 septembre 2022

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______, agissant pour leur compte et celui de leurs enfants mineurs C______ et D______

et

Madame E______ et Monsieur F______

représentés par Me Gazmend Elmazi, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 mars 2022 (JTAPI/252/2022)


EN FAIT

1) Madame A______ et Monsieur B______, nés respectivement les ______1978 et ______1980, et leurs quatre enfants E______, F______, C______ et D______, nés les ______2002, ______2003, ______2005 et ______2009, sont ressortissants du Kosovo.

2) Par ordonnance pénale du 30 septembre 2014, le Ministère public (ci-après : MP) de l’arrondissement de la Côte (VD) a condamné B______ à une peine pécuniaire de 70 jours-amende, assortie du sursis, délai d’épreuve de deux ans, et une amende de CHF 420.-, pour entrée illégale, séjour illégal et exercice d'une activité lucrative sans autorisation.

B______ avait déclaré à la police être entré en Suisse « à la mi-mai 2014 » et avoir pris un emploi – sans autorisation – au sein de l’entreprise de son frère, Monsieur G______.

3) Par décision du 17 février 2015, le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) a prononcé à son encontre une interdiction d’entrée en Suisse, valable jusqu’au 16 février 2018, relevant notamment qu’il avait déjà occupé un emploi sans autorisation, du 25 février 2011 au 29 février 2012, pour le compte de Monsieur H______ à Genève.

4) Le 14 décembre 2017, B______ a fait l’objet d’une nouvelle interdiction d’entrée en Suisse, valable jusqu’au 13 décembre 2020.

Le 28 novembre 2017, il avait fait l'objet d'un contrôle par les gardes-frontière à I______, alors qu'il tentait d'entrer illégalement en Suisse dans un train en provenance d'Italie. Il était notamment muni d'un titre de séjour italien échu depuis le 2 août 2017. Il avait déclaré qu'il se rendait en France et qu'il résidait au Kosovo.

5) Par arrêt du 9 mai 2019 (F-770/2018), le Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF) a confirmé cette interdiction d’entrée.

Dans son recours du 25 janvier 2018, B______ avait « contesté le fait que le SEM avait qualifié son entrée en Suisse d'irrégulière et critiqué, du moins implicitement, la durée fixée de l'interdiction d'entrée, dans la mesure où il était détenteur d'un permis de séjour italien lui permettant de circuler librement dans l'Espace Schengen, y compris en Suisse, et qu'il était à même de respecter l'ordre juridique suisse et européen dès lors qu'il n'avait commis aucune infraction attentant à l'ordre et à la sécurité publics » (cf. consid. 4.1). Il avait aussi « invoqué ( ) qu'il était au bénéfice d'un permis de séjour italien valable, dont il n'était pas en possession lorsqu'il [était] entré en Suisse, ainsi que d'un contrat de travail en Italie » (consid. 7.2).

Il ressort encore de cet arrêt que, suite à son entrée illégale sur le territoire, les autorités compétentes avaient prononcé à son encontre une décision de renvoi immédiatement exécutoire et qu'il avait été renvoyé de Suisse en application de l'Accord entre la Confédération suisse et la République italienne relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière (RS 0.142.114.549) (consid. 7.4 et let. B des « faits »).

6) Le 8 mai 2018, B______ a à nouveau tenté d'entrer illégalement sur le territoire suisse au passage-frontière de J______. Démuni de passeport valable, il a notamment déclaré, assisté par un interprète, que c’était la première fois qu’il était entré en Suisse depuis le prononcé de l'interdiction d’entrée précitée et que son but était « d’aller rejoindre sa mère et sa sœur en France ».

7) Par ordonnance du 9 mai 2018, le MP l’a condamné à une peine privative de liberté de trente jours, assortie du sursis, délai d’épreuve de trois ans, pour entrée illégale.

8) Par décision du 9 mai 2018, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a ordonné le renvoi de Suisse de B______, lui impartissant un délai au 16 mai 2018 pour quitter le territoire.

9) Par ordonnance pénale du 1er juin 2018, le MP de l’arrondissement de la Côte l'a condamné à une peine privative de liberté de dix jours, assortie du sursis, délai d’épreuve de trois ans, pour entrée et séjour illégaux.

10) Le 7 juillet 2018, les mineurs E______ et F______ sont arrivés à Genève, au bénéfice d’un visa polonais.

11) Le 21 décembre 2018, B______ a saisi l'OCPM d'une demande d’autorisation de séjour dans le cadre de l' « opération Papyrus ».

Il était arrivé à Genève en 2008 et y avait depuis lors toujours vécu et travaillé, dans le domaine du bâtiment. Il a produit :

- un formulaire « Papyrus », à teneur duquel il était arrivé en Suisse en 2008 ;

- un formulaire M, indiquant notamment qu’P______ l'engageait en qualité de « poseur » pour un salaire mensuel brut de CHF 6’670.-, ainsi qu'une copie du « contrat de travail » y relatif, non daté et non signé à teneur du registre de commerce, cette société [« pose, ponçage et imprégnation de parquets, ainsi que tous travaux de revêtements de sol ; travaux de nettoyage et entretien »] a été inscrite le 3 avril 2017 ; lui-même et Madame K______ en sont associés gérants, avec signature individuelle ;

- une attestation de non-poursuite et une attestation de non-perception de l’aide sociale ;

- quatre « certificat[s] de travail » établis par L______, en liquidation [dissoute par suite de faillite prononcée par jugement du Tribunal de première instance du 24 avril 2017 et radiée du registre du commerce le 30 avril 2020], indiquant le nombre de jours de travail qu’il avait effectués auprès d’elle en 2008 (un jour en avril, un en juillet, un en août, deux en octobre et un en novembre), en 2009 (un jour en février, un en avril, un en juin, un en juillet, un et demi en octobre et un en novembre), en 2010 (un jour en janvier, un en mai, un en juin, un et demi en juillet, un en septembre et un en novembre) et en 2011 (un jour en avril, un et demi en juin, deux en juillet, une demi-journée en septembre et deux en décembre) ;

- des fiches de salaire de M______ pour les mois d’août à décembre 2011 et janvier à février 2012 ;

- des fiches de salaire de « N______ » [entreprise individuelle de M. G______] pour les mois de juin à octobre et décembre 2014, janvier à juin 2015 et janvier 2016 ;

- un certificat de salaire émanant de O______ pour la période du 21 janvier au 31 décembre 2016 ;

- des extraits de son compte bancaire suisse pour la période du 25 février 2016 au 14 décembre 2018 ;

- un extrait de son compte auprès de la caisse cantonale genevoise de compensation, daté du 26 novembre 2018, faisant état de cotisations à l’AVS pour les mois d’août à décembre 2011, janvier, février et août à décembre 2012, janvier à novembre 2013, juin à octobre et décembre 2014, janvier à juin 2015 et janvier à décembre 2016 ;

- une fiche de salaire de P______ pour le mois de juillet 2018.

12) Le 27 janvier 2019, Mme A______ est arrivée à Genève avec ses enfants C______ et D______.

13) Le 25 novembre 2019, Mme E______ et M. F______ ont sollicité de l'OCPM la délivrance d'un visa de retour en vue de se rendre au Kosovo pendant un mois pour « visite familiale ».

14) Le 14 avril 2020, Mme E______ et M. F______ ont soumis à l'OCPM une demande d'autorisation de séjour au titre du regroupement familial.

15) Le 5 mai 2020, l’OCPM a dénoncé auprès du MP le fait que les cotisations sociales retenues par L______, selon les fiches de salaire produites, n’apparaissaient pas dans le compte de B______ auprès de la caisse AVS.

16) Auditionnée par la police le 2 juin 2020 comme prévenue d’infractions à l’art. 115 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), Mme A______ a notamment déclaré qu'elle était arrivée en Suisse par avion le 27 janvier 2019 avec ses enfants C______ et D______, pour y passer des vacances. Ils étaient munis d'un visa d'une durée de deux semaines. Sa mère, ses trois frères et ses trois sœurs vivaient au Kosovo. Lorsque son époux était sans travail à Genève, il venait au Kosovo, à savoir pendant les vacances du Nouvel-An et d'été. Pendant les dix dernières années, il y était venu une à deux fois par année. Son époux ne parlait pas le français.

17) Par ordonnance pénale du 14 juillet 2020, le MP a condamné Mme A______ à une peine pécuniaire de 120 jours-amende, assortie du sursis, délai d’épreuve de trois ans, pour infraction à l’art. 115 al. 1 let. b et c LEI.

18) Le 14 août 2020, Mme A______ a saisi l’OCPM d’une demande d’autorisation de séjour avec activité lucrative.

À teneur du formulaire M signé par le responsable de Q______, cette société l'avait engagée dès le 2 mars 2020 en qualité de femme de ménage pour une durée indéterminée et un salaire mensuel brut de CHF 1’375.-. Il y était par ailleurs indiqué qu’elle était arrivée à Genève en 2018.

19) Auditionné par la police le 27 septembre 2020 comme prévenu, B______, assisté par un interprète, a notamment déclaré que :

- il était en Suisse depuis « environ 9 ans, soit [depuis] 2011 ou 2012 », mais ne connaissait pas la date exacte de son arrivée ;

- il n’avait pas fait d’études au Kosovo et y avait travaillé comme menuisier ;

- il ne connaissait pas le nom de son avocat qui avait « fait [sa] demande Papyrus » du 21 décembre 2018 ;

- il avait un titre de séjour italien (valable jusqu’en août 2020) ;

- il ne connaissait par l’entreprise L______ ;

- il n’était pas responsable du fait d’avoir déclaré être arrivé en Suisse en 2012, alors que certains documents qu’il avait remis à l’OCPM dataient de 2008 ;

- il ne connaissait pas l’adresse de son employeur actuel, P______, soit l’entreprise qui appartenait à sa belle-sœur, Madame K______ ;

- il ne savait pas que sa demande du 21 décembre 2018 contenait des faux certificats de travail pour les années 2008 à 2011.

20) Par ordonnance pénale du même jour, le MP l'a condamné à une peine pécuniaire de 180 jours-amende pour faux dans les certificats et infractions aux art. 115 al. 1 let a, b et c et 118 al. 1 LEI.

Il lui était notamment reproché d’avoir, dans le cadre de sa « demande Papyrus » du 21 décembre 2018, produit des documents falsifiés, notamment des certificats de salaire émis par l'entreprise L______, ainsi que des attestations comportant des indications erronées, notamment le fait qu'il résidait en Suisse sans interruption depuis 2008, ce dans le but d'induire en erreur l’OCPM pour obtenir frauduleusement une autorisation de séjour.

21) Par courrier du 5 mars 2021, l'OCPM a fait part aux époux AB______ ainsi qu’à leurs enfants Mme E______ et M. F______ de son intention de ne pas donner une suite favorable à leur demande de régularisation et de prononcer leur renvoi de Suisse.

Au vu de ses condamnations pénales, B______ n’avait pas respecté l'ordre juridique suisse, en particulier les interdictions d'entrée en Suisse prononcées à son encontre. En refusant de quitter la Suisse à la suite de la décision de renvoi du 9 mai 2018, il avait persisté dans son mépris des décisions administratives prises à son égard. Il avait en outre manifestement menti aux autorités suisses en signant, le 16 décembre 2018, une attestation stipulant qu’il n'avait pas déposé de demande d'autorisation de séjour dans un pays de l’UE/AELE, alors qu’il possédait un permis de séjour italien « valable du 1er août 2017 au 2 août 2018 ». L’existence de ce permis de séjour italien impliquait par ailleurs une discontinuité de son séjour en Suisse. Il avait donc tenté d'obtenir frauduleusement une autorisation de séjour en Suisse. En tout état, sa situation ne répondait pas aux critères de l’ « opération Papyrus ».

La famille n’avait pas démontré une intégration socio-culturelle particulièrement remarquable. Aucune attestation de réussite à l'examen de français (niveau A2), attendue de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour, n'avait été produite.

Mme A______, Mme E______ et M. F______ ne lui avaient pas annoncé leur arrivée en Suisse et aucune demande de regroupement familial n'avait été déposée pour C______ et D______. L’intégration en Suisse des enfants, arrivés en Suisse les 7 juillet 2018 et 27 janvier 2019, n’était pas encore déterminante. Leur réintégration dans leur pays d'origine ne devrait pas poser des problèmes insurmontables.

La famille ne remplissait pas les critères relatifs au cas individuel d'extrême gravité. Elle n’avait en effet pas démontré une très longue durée de séjour en Suisse ni d’élément permettant de déroger à cette exigence. Elle n'avait pas non plus démontré qu'une réintégration dans son pays d’origine aurait de graves conséquences sur sa situation, indépendamment des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires ou scolaires) affectant l'ensemble de la population restée sur place.

22) Par courrier du 8 avril 2021, B______ a exposé qu’il vivait en Suisse depuis de nombreuses années et qu’il y était intégré socialement et professionnellement. Il travaillait pour la société P______ dont il était l’associé et était indépendant financièrement. Il n’avait pas de dettes. Son épouse travaillait également à temps partiel (deux heures et demi par jour). Leurs enfants étaient scolarisés et deux d’entre eux étaient à la recherche d'une place d'apprentissage. Ainsi, sa famille et lui-même faisaient de leur mieux pour s’intégrer en Suisse. Ils n’avaient pas eu l'intention de ne pas respecter l'ordre juridique suisse. Ils étaient vraiment attachés à la Suisse et n'imaginaient pas du tout un retour au Kosovo.

Ses enfants voyaient leur avenir en Suisse où ils avaient établi leurs relations personnelles et sociales et souhaitaient créer leurs réseaux professionnels. Ils avaient appris le français et travaillaient dur à l'école. Ils ne pensaient pas retourner au Kosovo, car ils n'y auraient pas d'avenir.

Sa famille n'avait aucune perspective dans son pays d'origine. Il était venu travailler en Suisse plusieurs années auparavant car il ne pouvait pas subvenir aux besoins de sa famille au Kosovo.

23) Par décision du 3 juin 2021, reprenant les termes de sa lettre d’intention du 5 mars 2021, l’OCPM a refusé de soumettre le dossier des époux AB______ et de leurs quatre enfants au SEM avec un préavis positif en vue de la délivrance de titres de séjour et a prononcé leur renvoi, leur impartissant un délai au 3 août 2021 pour quitter le territoire.

24) Par acte du 5 juillet 2021, les époux AB______, agissant en leur nom et pour celui de C______ et D______, mineurs, ainsi que Mme E______ et M. F______, ont interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l’OCPM, afin que celui-ci préavise favorablement leur demande auprès du SEM.

En raison d'une situation économique et sociale « désespérante », B______ avait quitté son pays en 2011 pour s'installer à Genève. Dès leur arrivée en Suisse, ses enfants E______ et F______ avaient intégré le système scolaire genevois. Durant l'année scolaire 2020-2021, ils avaient été en classe d'insertion professionnelle. Dès août 2021, ils entameraient une formation d'assistant/e de bureau. D______ avait été admis au cycle d'orientation en 9ème année, regroupement R3, soit le regroupement réunissant les élèves ayant les meilleurs résultats. C______ était inscrit au cycle d'orientation de Drize en 11ème année, en section communication et technologie.

Ils n’avaient pas de dettes ni de poursuites. Ils n’avaient jamais fait appel à l'aide sociale. Ils étaient parfaitement intégrés et parlaient couramment le français. B______ avait toujours travaillé, au sein de différentes entreprises, dont notamment M______, O______et N______. Il percevait un salaire mensuel de CHF 7'000.- pour son activité au sein de la société P______. Les époux jouissaient ainsi d'une indépendance financière complète.

Ils avaient parfaitement su s'intégrer en Suisse et avaient réussi à nouer de solides liens d'amitié et de relations de travail. Toutes les condamnations pénales de B______ étaient liées directement ou indirectement à des infractions à la LEI et à son désir de pouvoir vivre en Suisse avec sa famille. Le risque de récidive était nul. En dehors de cela, toute la famille était respectueuse de l'ordre juridique suisse. Leur parfaite intégration en Suisse était corroborée par le fait qu'ils maîtrisaient tous la langue française.

Les enfants avaient fourni des efforts continus et soutenus pour s'intégrer scolairement à Genève. Un retour dans leur pays d'origine aurait pour conséquence d'interrompre leur cursus scolaire à une période charnière, les obligeant à se réadapter au système scolaire d'un pays avec lequel ils n'avaient que très peu de liens et repères et dont les conditions de vie leurs étaient désormais étrangères. À plus long terme, leur renvoi serait de nature à remettre en cause les acquis de l'enseignement genevois et à compromettre sérieusement toute formation professionnelle future. Ces circonstances particulières, prises dans leur ensemble, étaient de nature à admettre qu'un retour au Kosovo constituerait pour les enfants un déracinement important et présenterait ainsi une rigueur excessive.

25) Dans ses observations du 6 septembre 2021, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

Bien qu’il n’ait été saisi d’aucune demande en faveur des enfants mineurs C______ et D______, ceux-ci étaient concernés par sa décision.

B______ ne pouvait pas se prévaloir du programme « Papyrus », étant donné qu’il n’avait « pas été en mesure de prouver un séjour ininterrompu d'au moins dix ans en date du 31 décembre 2018 ». Cela étant, il pouvait être admis qu'à ce jour, il pouvait « se prévaloir d'une présence de dix ans ». Toutefois, pendant toutes ces années, il avait gardé des liens étroits avec son pays natal et sa famille y résidant, à laquelle il avait rendu visite régulièrement. De plus, il avait été au bénéfice d'une carte de séjour italienne, dont la durée de validité avait pris fin le 2 août 2018. Par ailleurs, en pénétrant sur le territoire et en le quittant à plusieurs reprises, il ne s'était pas conformé aux décisions d'interdiction d'entrée en Suisse prononcées à son encontre, de sorte qu'il ne pouvait pas se prévaloir d'un comportement irréprochable. Enfin, son intégration socio-économique n’avait aucune particularité et n'atteignait pas le degré exigé par la jurisprudence.

En raison de la courte durée de son séjour, Mme A______ ne pouvait pas se prévaloir d'une intégration exceptionnelle, ni de liens étroits avec la Suisse. Il était indéniable que toutes ses racines se trouvaient au Kosovo, où elle avait vécu jusqu'à l'âge de 43 ans.

Le parcours scolaire complet des enfants C______ et D______, qui étaient arrivés avec leur mère, n'avait pas été documenté à satisfaction. En tout état, arrivés à Genève à l'âge de presque 14 et 10 ans, ils avaient passé toute leur enfance dans leur pays d'origine et, jusqu'à présent, avaient acquis uniquement des connaissances scolaires d'ordre général. Leur intégration sociale n'apparaissait ainsi pas irréversible.

Mme E______ et M. F______ étaient arrivés en Suisse à l'âge de 16 et 15 ans. Bien qu'ils eussent vécu une partie de leur adolescence à Genève, leur situation ne pouvait pas être assimilée à celle d'enfants ayant accompli tout leur parcours scolaire en Suisse. Leur situation n'était pas non plus comparable à celle de jeunes qui auraient entrepris des études ou une formation professionnelle initiale en Suisse, par exemple un apprentissage, qu'ils ne pourraient pas mener à terme dans leur pays d'origine.

Dans ces circonstances, un retour des enfants dans leur pays ne représenterait pas une mesure d'une dureté excessive, d'autant moins que la poursuite de leurs études pourrait certainement s'y faire dans des conditions satisfaisantes, dans la mesure où ils y avaient déjà été scolarisés. Après une certaine période et grâce à l'aide de leurs parents, ils devraient pouvoir se réadapter à leur lieu de vie d'origine, de sorte que leur réintégration n'y était pas fortement compromise.

Enfin, une autorisation de séjour fondée sur un cas individuel d'extrême gravité n'avait pas pour but de soustraire les étrangers aux conditions de vie de leur pays d'origine, mais impliquait que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation à ce point rigoureuse qu'on ne puisse exiger d'eux qu'ils tentent de se réadapter à leur existence passée, ce qui n'avait pas été démontré en l'espèce.

26) Par réplique du 11 novembre 2021, Mmes et MB______ ont relevé que c’était à juste titre que l'OCPM avait constaté que B______ séjournait en Suisse depuis dix ans. P______ employait au minimum trois personnes et il avait effectué d’importants investissements pour développer son entreprise, ce qui démontrait une intégration professionnelle exceptionnelle. En cas de renvoi dans son pays d’origine, il « perdrait » cette société et ne pourrait tout simplement pas se réadapter à son existence passée.

27) Par courrier du 1er décembre 2021, B______ a produit les comptes de P______ pour les exercices 2019 et 2020.

28) Le TAPI a rejeté le recours par jugement du 16 mars 2022.

L’OCPM n'avait en l’espèce pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que les membres de la famille AB______ne satisfaisaient pas aux conditions strictes requises par les art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA y compris, s'agissant de B______, sous l'angle particulier de l' « opération Papyrus », étant d'emblée rappelé que le seul fait de séjourner en Suisse pendant plusieurs années – même à titre légal – n'était à cet égard pas suffisant sans que n'existent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles, lesquelles faisaient ici manifestement défaut.

La durée réelle et continue du séjour en Suisse de B______ n’était pas établie par les pièces versées au dossier, étant relevé ses diverses versions données à cet égard aux autorités. En outre, selon les déclarations de son épouse, il était retourné au Kosovo à plusieurs reprises et pendant des durées indéterminées, lorsqu'il était dépourvu de travail en Suisse. La durée de ce séjour devait de plus être très fortement relativisée, dès lors qu'il s'y était toujours déroulé sans autorisation et, entre 2015 et 2020, au mépris d'interdictions d'entrer dans le pays. B______ avait en outre été renvoyé une première fois en novembre 2017 et avait fait l'objet d'une décision de renvoi en mai 2018. Depuis le dépôt de sa requête, en décembre 2018, son séjour se poursuivait au bénéfice d'une simple tolérance. Quoi qu'il en soit, sa condamnation du 27 septembre 2020 pour faux dans les certificats et infraction à l'art. 118 al. 1 LEI réalisait le motif de révocation de l’art. 62 al. 1 let. a LEI, ce qui permettait en soi d'exclure la délivrance d'une autorisation de séjour en sa faveur.

Mme A______ vivait en Suisse depuis janvier 2019 seulement. Pour ce motif déjà, la délivrance d'une autorisation de séjour en application des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) apparaissait inenvisageable.

À toutes fins utiles, s'il n'était pas contesté que, depuis leur arrivée, les membres de la famille s’étaient créé un nouvel environnement de vie, dans lequel ils s’étaient apparemment bien adaptés, ils ne s’étaient pas pour autant constitué avec la Suisse des attaches à ce point profondes et durables qu'ils ne pourraient plus envisager un retour dans leur pays d'origine. Ils ne démontraient notamment pas avoir un niveau de français suffisant ni une intégration sociale et professionnelle exceptionnelle. Même si B______ semblait avoir exercé une activité lucrative pendant plusieurs années et avoir créé son entreprise, une telle situation ne revêtait en soi aucun caractère exceptionnel. Mme A______ n’avait, à teneur du dossier, exercé une activité lucrative qu'à temps partiel depuis le 2 mars 2020 en qualité de femme de ménage.

Même si B______ était parvenu à subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille et qu'il avait créé sa propre entreprise, il ne pouvait ignorer, au vu de son statut précaire en Suisse, qu'il pourrait à tout moment être amené à devoir mettre un terme à son activité en cas de refus de l'OCPM. Par ailleurs, le fait de travailler pour ne pas dépendre de l'aide sociale, de ne pas avoir de dettes et de s'efforcer d'apprendre au moins la langue nationale parlée au lieu du domicile constituait un comportement ordinaire qui pouvait être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. B______ avait fait l'objet de plusieurs condamnations pénales, notamment pour faux dans les certificats et comportement frauduleux à l'égard des autorités, de deux interdictions successives d'entrer en Suisse ainsi que de deux décisions de renvoi. Le comportement qu'il avait adopté en Suisse n'était donc de loin pas irréprochable.

Mme A______et M. B______ avaient vécu la majeure partie de leur existence dans leur pays d'origine. Les difficultés qu'ils pourraient rencontrer de retour au Kosovo, afin, notamment, de retrouver un emploi, ne sauraient constituer une situation de rigueur au sens de la jurisprudence, ce d'autant moins qu'ils avaient librement choisi de séjourner illégalement en Suisse et en portaient donc seuls la responsabilité. Pour le surplus, les époux avaient manifestement conservé des attaches dans leurs pays, notamment des membres de leurs familles, ce qui devrait encore faciliter leur réintégration.

Si le sort de Mme E______ et M. F______ n'était en soi plus lié à celui de leurs parents, ils vivaient encore avec ces derniers qui subvenaient à leurs besoins, de sorte qu’ils avaient encore besoin de leur soutien matériel et moral. Il convenait donc de ne pas faire abstraction, dans l'examen de leur situation, de celle de ces derniers. En outre, leur propre séjour en Suisse, de moins de quatre ans, ne pouvait être considéré comme de longue durée. À leur arrivée en Suisse, ils étaient âgés de 16, respectivement 15 ans, et avaient donc eux aussi passé toute leur enfance et pratiquement toute leur adolescence au Kosovo, où ils avaient été scolarisés pendant une longue période. Ils ne devraient pas rencontrer de difficultés particulières pour continuer à y vivre. Le 25 novembre 2019, ils avaient sollicité de l'OCPM la délivrance d'un visa pour s’y rendre pendant un mois. Ainsi, tout en ne minimisant pas leurs difficultés, l'OCPM ne s'était pas fondé sur des considérations dénuées de pertinence et étrangères au but visé par la loi pour considérer qu'ils ne se trouvaient pas dans une situation de détresse personnelle.

Les mineurs C______ et D______ avaient quitté le Kosovo à l’âge de 14, respectivement 10 ans. Ils avaient donc aussi vécu toute leur enfance au Kosovo, où ils avaient dû être scolarisés. Leur processus d'intégration en Suisse n'était pas avancé et irréversible au point qu'un retour dans leur patrie ne pourrait être envisagé et constituerait un déracinement. Au contraire, compte tenu de leur âge, il n'était pas à exclure qu'ils rencontrent des difficultés importantes pour s'adapter en Suisse. Il apparaissait ainsi douteux qu'il soit véritablement dans leur intérêt de déplacer leur centre de vie en Suisse à ce stade.

En tout état, les quatre enfants des époux AB______ ne séjournant en Suisse que depuis un peu plus de trois ans, le processus de leur intégration n'était assurément pas à ce point profond et irréversible qu'un départ de Suisse ne pourrait pas être envisagé. La poursuite de leurs études pourrait à n'en point douter être effectuée dans des conditions satisfaisantes au Kosovo, puisqu’ils y avaient déjà été scolarisés.

Les membres de la famille AB______, qui ne pouvaient se prévaloir d'un quelconque séjour légal en Suisse et dont l'intégration n'apparaissait – au surplus – pas exceptionnelle, ne pouvaient pas davantage tirer bénéfice de l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

N'obtenant pas d'autorisation de séjour, c'était à bon droit que l'OCPM avait prononcé leur renvoi de Suisse, dont il n’apparaissait pas que l'exécution ne serait pas possible, serait illicite ou qu'elle ne pourrait être raisonnablement exigée.

29) Les membres de la famille AB______ ont formé recours contre ce jugement par acte expédié le 2 mai 2022 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant à l’annulation dudit jugement, de même qu’à celle de la décision de l’OCPM du 3 juin 2021 et à ce qu’il soit ordonné à cette autorité de transmettre leur dossier au SEM avec un préavis positif.

Les époux AB______ parlaient couramment le français, comme retenu par le TAPI, ce qui était aussi le cas de leurs enfants.

Le TAPI remettait en cause la durée du séjour en Suisse de B______, de onze ans, alors qu’elle était démontrée par son extrait de compte et divers documents de la R______ (ci-après : R______) et d’autres pièces produites à l’appui de sa demande d’autorisation de séjour. L’OCPM avait, dans sa réplique du 6 septembre 2021, retenu qu’il pouvait se prévaloir d’une présence en Suisse de dix ans. S’il était vrai qu’il avait varié dans ses déclarations à ce sujet au fil des années, c’était uniquement par crainte d’être renvoyé dans son pays d’origine. Il était retourné dans son pays d’origine pour des séjours de courte durée uniquement pour rendre visite à son épouse et ses enfants qui y vivaient alors. Depuis l’arrivée de ces derniers en Suisse, il n’avait plus aucun lien avec le Kosovo. Ses divers emplois, dont en dernier lieu pour sa société qui employait au minimum trois personnes et lui procurait un revenu mensuel brut de plus de CHF 7'000.-, démontraient une intégration professionnelle exceptionnelle. Un retour au Kosovo aurait pour conséquence qu’il perdrait l’intégralité de son entreprise. Toutes les condamnations pénales dont il avait été l’objet étaient liées directement ou indirectement à des infractions à la LEI et à son désir de pouvoir vivre en Suisse avec sa famille. Le risque de récidive était nul. En dehors de cela, toute la famille était respectueuse de l’ordre juridique suisse.

Mme A______, arrivée en Suisse depuis plus de deux ans, avait également été immédiatement intégrée et avait rapidement trouvé un emploi.

Ils revenaient sur le parcours scolaire des enfants qui tous avaient fourni des efforts continus et soutenus pour s’intégrer scolairement à Genève. Un retour dans leur pays d’origine, où ils n’avaient que très peu de liens et de repères, et dont les conditions de vie leur étaient désormais étrangères, aurait pour conséquence d’interrompre leur cursus scolaire à une période charnière. À long terme, le renvoi serait de nature à remettre en cause les acquis de l’enseignement genevois et à compromettre sérieusement toute future formation professionnelle. Ainsi, un retour des enfants au Kosovo constituerait pour eux un déracinement important et présenterait ainsi une rigueur excessive.

Les recourants n’ont pas déposé de nouvelles pièces à l’appui de leur recours, à l’exception d’une procuration en faveur de leur conseil et du jugement attaqué.

30) L’OCPM a conclu, le 8 juin 2022, au rejet du recours, se référant au jugement entrepris, de même qu’à sa décision.

31) Les recourants n’ont pas fait usage, dans le délai imparti par courrier du 10 juin 2022, prolongé à leur demande au 31 juillet 2022, de leur droit à la réplique.

Conformément audit courrier du 10 juin 2022, la cause a été gardée à juger passé le 31 juillet 2022.

32) La teneur des pièces figurant au dossier sera pour le surplus reprise ci-dessous dans la mesure nécessaire au traitement du litige.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de l’OCPM du 3 juin 2021, confirmée par le TAPI, refusant de présenter au SEM le dossier des six recourants avec un préavis positif en vue de la délivrance de titres de séjour et prononçant leur renvoi de Suisse.

3) Selon l'art. 61 LPA, le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (al. 1). En revanche, la chambre administrative ne connaît pas de l'opportunité des décisions prises en matière de police des étrangers, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (al. 2 ; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario).

4) a. Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la LEI et de l’OASA. Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées avant le 1er janvier 2019, ce qui concerne M. B______ uniquement, sont régies par l’ancien droit, alors que celles des cinq autres membres de la famille, postérieures à cette date, le sont par le nouveau droit (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1075/2019 du 21 avril 2020 consid. 1.1).

En tout état et comme justement retenu par le TAPI, quel que soit le droit applicable, la solution demeure la même pour tous les recourants puisque l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas connu de modification et que nonobstant l’abrogation de la let. b. de l’art. 31 al. 1 OASA, le nouveau droit n’est pas plus favorable et la jurisprudence développée sous l’ancien droit reste applicable (ATA/344/2021 du 23 mars 2021).

b. L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

c. L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur avant le 1er janvier 2019, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

Dans sa teneur depuis le 1er janvier 2019, l’art. 31 al. 1 OASA prévoit que, pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration de la personne requérante sur la base des critères d'intégration définis à l'art. 58a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené une personne étrangère à séjourner illégalement en Suisse (SEM, Directives et commentaires, Domaine des étrangers, 2013 - état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.10 [ci-après : directives LEI] ; ATA/340/2020 du 7 avril 2020 consid. 8a).

d. L'art. 58a al. 1 LEI précise que pour évaluer l'intégration, l'autorité compétente tient compte des critères suivants : le respect de la sécurité et de l'ordre publics (let. a), le respect des valeurs de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) (let. b), les compétences linguistiques (let. c), la participation à la vie économique ou l'acquisition d'une formation (let. d).

e. Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4 ; ATA/257/2020 du 3 mars 2020 consid. 6c). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/92/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4d).

f. La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012 consid. 5.3 ; Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, LEtr, vol. 2, 2017, p. 269 et les références citées).

Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance - par exemple en raison de l'effet suspensif attaché à des procédures de recours - ne sont pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid.  4.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_603/2019 du 16 décembre 2019 consid. 6.2 ; 2C_436/2018 du 8 novembre 2018 consid. 2.2).

Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

S'agissant de l'intégration professionnelle, celle-ci doit être exceptionnelle : le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ou alors son ascension professionnelle est si remarquable qu'elle justifierait une exception aux mesures de limitation (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; ATA/981/2019 précité consid. 6c et l'arrêt cité).

La question est de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (ATA/353/2019 précité consid. 5d ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

5) a. Processus administratif simplifié de normalisation des étrangers en situation irrégulière à Genève, l'opération « Papyrus » ayant prévalu de février 2017 au 31 décembre 2018 n'emportait aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/1288/2019 précité consid. 6a ; ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

b. L'opération « Papyrus » a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes d'un pays de l'UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir, selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus », avoir un emploi ; être indépendant financièrement ; ne pas avoir de dettes ; avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; faire preuve d'une intégration réussie ; absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

6) En l'espèce, même à considérer, dans la situation qui lui est la plus favorable, que le recourant aurait séjourné en Suisse de manière continue de 2011 à ce jour, ce qu'il n'a nullement démontré à teneur des pièces de la procédure, cette durée de onze ans doit être fortement relativisée, conformément à la jurisprudence susmentionnée, par le caractère illégal du séjour jusqu'à la fin de l’année 2018, soit pendant environ sept ans, puis sous le régime d'une tolérance, le temps que soit instruite sa demande d'autorisation déposée en décembre 2018 dans le cadre de l’« opération Papyrus ». À cet égard, il ne peut se prévaloir de ladite opération, dans la mesure déjà où, lors du dépôt de sa demande, il ne remplissait pas la condition d’une durée de séjour minimum de dix ans. La relativisation de la durée de son séjour est d'autant plus justifiée que le recourant a passé une partie de ce séjour sous le coup de deux décisions successives d'interdiction d'entrée prononcées à son encontre par le SEM, en février 2015, puis en décembre 2017, à chaque fois pour une durée de trois ans, ce qui couvrait donc la période de février 2015 à décembre 2020. Il n’a de plus tenu aucun compte de la décision de renvoi de l’OCPM du 9 mai 2018, pas plus que d’un renvoi exécuté selon arrêt du TAF du 9 mai 2019.

Par ailleurs, s'il n'est en l'espèce pas remis en cause que le recourant n'a jamais émargé à l'aide sociale, ni fait l'objet de poursuites, son activité d'employé polyvalent dans la construction, pour divers employeurs, puis d’une société dont il est associé gérant n’est toutefois pas constitutive d'une ascension professionnelle remarquable et ne l'a pas conduit à acquérir des connaissances professionnelles spécifiques à la Suisse qu'il ne pourrait mettre à profit dans un autre pays, en particulier son pays d'origine. Ces emplois ne lui permettent pas de se prévaloir d'une intégration professionnelle exceptionnelle au sens de la jurisprudence précitée. Au demeurant, il n’a pas produit à la procédure le contrat de travail annoncé en pièce 11 de son chargé au TAPI du 5 juillet 2021, pas plus que les fiches de salaires censées établir un salaire mensuel brut de plus de CHF 7'000.-. Les documents afférents à son compte bancaire auprès de la R______ ne sont pas aptes à démontrer ce revenu, dans la mesure où ils ne couvrent que la période du 25 février 2016 au 14 décembre 2018.

Le recourant ne met nullement en avant des attaches personnelles particulières avec la Suisse, ni a fortiori n'en étaye. Il ne démontre pas une intégration sociale particulièrement poussée, étant rappelé que les relations de travail, d'amitié ou de voisinage qu'il aurait pu nouer pendant son séjour ne constitueraient en tout état normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception aux mesures de limitation. Il ne maîtrise pas le français, puisqu’il a dû être assisté d’un interprète lors de ses diverses dépositions à la police. Il n'a pas produit de document pouvant attester de son niveau et le simple fait d'affirmer qu'il parle cette langue ne suffit pas. Il ne soutient de toute manière pas que cette maîtrise irait au-delà de ce qui peut être attendu d'un étranger séjournant depuis plusieurs années en Suisse romande.

C'est vainement qu'il cherche à relativiser les trois condamnations inscrites à son casier judiciaire liées à son statut illégal, mais pas seulement, puisqu’il a été condamné le 27 septembre 2020 pour faux dans les certificats et avoir cherché à induire en erreur l’OCPM par la production de faux certificats de salaire émis par l’entreprise L______ et d’attestations comportant des indications erronées en lien avec un prétendu séjour en Suisse sans interruption depuis 2008, à l’appui de sa demande d’autorisation de séjour du 21 décembre 2018.

S'agissant des possibilités de réintégration dans son pays d'origine, le recourant, actuellement âgé de 42 ans, est né au Kosovo, pays dont il parle la langue où il a vécu toute son enfance, son adolescence et une partie de sa vie d’adulte, et où il a fondé une famille. Il a donc passé au Kosovo les années déterminantes pour le développement de sa personnalité et en connaît les us et coutumes.

Finalement, de retour dans son pays d'origine, le recourant, encore jeune et en bonne santé, pourra faire valoir l'expérience professionnelle et éventuellement linguistique acquise en Suisse.

Dans ces circonstances, il ne ressort pas du dossier que les difficultés auxquelles le recourant devrait faire face en cas de retour au Kosovo seraient pour lui plus graves que pour la moyenne des étrangers, en particulier des ressortissants du Kosovo retournant dans leur pays.

Au vu de ce qui précède, le recourant ne se trouve pas dans une situation de détresse personnelle au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI. S'il est vrai qu'un retour dans son pays d'origine pourra engendrer pour lui certaines difficultés, sa situation n'est pas remise en cause de manière accrue et il ne se trouve pas dans une situation si rigoureuse que l'on ne saurait exiger son retour au Kosovo.

Il ne se justifie dès lors pas de déroger aux conditions d'admission en Suisse en faveur du recourant, de sorte que l'autorité intimée était fondée à refuser de donner une suite positive à sa demande d'autorisation de séjour et l'instance précédente à confirmer ledit refus. Cette conclusion vaut pour les autres membres de la famille comme il sera vu ci-dessous.

7) Reste à examiner la situation des autres membres de la famille.

a. Comme pour les adultes, il y a lieu de tenir compte des effets qu'entraînerait pour les enfants un retour forcé dans leur pays d'origine. Il faut prendre en considération qu'un tel renvoi pourrait selon les circonstances équivaloir à un véritable déracinement, constitutif d'un cas personnel d'extrême gravité. Pour déterminer si tel serait le cas, il faut examiner plusieurs critères. La situation des membres de la famille ne doit pas être considérée isolément, mais en relation avec le contexte familial global, dès lors que le sort de la famille forme un tout ; il serait difficile d'admettre le cas d'extrême gravité, par exemple, uniquement pour les parents ou pour les enfants. Ainsi, le problème des enfants est un aspect, certes important, de l'examen de la situation de la famille, mais ce n'est pas le seul critère (ATF 123 II 125 consid. 4a ; ATA/434/2020 du 30 avril 2020 consid. 10a ; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 6d).

D'une manière générale, lorsqu'un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse et y a seulement commencé sa scolarité, il reste encore attaché dans une large mesure à son pays d'origine, par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet (arrêts du TAF F-3493/2017 du 12 septembre 2019 consid. 7.7.1 ; C-636/2010 du 14 décembre 2010 consid. 5.4 et la référence citée). Avec la scolarisation, l'intégration au milieu suisse s'accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l'âge de l'enfant lors de son arrivée en Suisse et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, de l'état d'avancement de la formation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter, dans le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle entamée en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats.

b. L'adolescence, une période comprise entre 12 et 16 ans, est une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 9a). Le Tribunal fédéral a considéré que cette pratique différenciée réalisait la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, telle qu'elle est prescrite par l'art. 3 al. 1 de la Convention relative aux droits de l'enfant, conclue à New York le 20 novembre 1989, approuvée par l'Assemblée fédérale le 13 décembre 1996. Instrument de ratification déposé par la Suisse le 24 février 1997 (CDE - RS 0.107) (arrêts du Tribunal fédéral 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3 et 2A.43/2006 du 31 mai 2006 consid. 3.1 ; ATA/434/2020 précité consid. 10a).

c. Dans un arrêt de principe (ATF 123 II 125), le Tribunal fédéral a mentionné plusieurs exemples de cas de rigueur en lien avec des adolescents. Ainsi, le cas de rigueur n'a pas été admis, compte tenu de toutes les circonstances, pour une famille qui comptait notamment deux adolescents de 16 et 14 ans arrivés en Suisse à, respectivement, 13 et 10 ans, et qui fréquentaient des classes d'accueil et de développement (arrêt non publié Mobulu du 17 juillet 1995 consid. 5). Le Tribunal fédéral a précisé dans ce cas qu'il fallait que la scolarité ait revêtu une certaine durée, ait atteint un certain niveau et se soit soldée par un résultat positif (ATF 123 II 125 consid. 4b). Le Tribunal fédéral a admis l'exemption des mesures de limitation d'une famille dont les parents étaient remarquablement bien intégrés ; venu en Suisse à 12 ans, le fils aîné de 16 ans avait, après des difficultés initiales, surmonté les obstacles linguistiques, s'était bien adapté au système scolaire suisse et avait achevé la neuvième primaire ; arrivée en Suisse à 8 ans, la fille cadette de 12 ans s'était ajustée pour le mieux au système scolaire suisse et n'aurait pu se réadapter que difficilement à la vie quotidienne scolaire de son pays d'origine (arrêt non publié Songur du 28 novembre 1995 consid. 4c, 5d et 5e). De même, le Tribunal fédéral a admis que se trouvait dans un cas d'extrême gravité, compte tenu notamment des efforts d'intégration réalisés, une famille comprenant des adolescents de 17, 16 et 14 ans arrivés en Suisse cinq ans auparavant, scolarisés depuis quatre ans et socialement bien adaptés (arrêt Tekle du 21 novembre 1995 consid. 5b ; arrêt non publié Ndombele du 31 mars 1994 consid. 2, admettant un cas de rigueur pour une jeune femme de près de 21 ans, entrée en Suisse à 15 ans).

8) En l’espèce, la recourante n’est arrivée en Suisse que le 27 janvier 2019, avec ses deux plus jeunes enfants.

Au jour du dépôt de sa demande d’autorisation de séjour, le 14 avril 2020, elle ne séjournait dans ce pays que depuis un peu plus d’un an. Outre que cette période constitue un séjour illégal, elle n’a à ce jour en tout et pour tout séjourné en Suisse que depuis trois ans et demi, ce qui à l’évidence ne remplit pas la condition de la longue durée de séjour exigée par la loi et la jurisprudence. Par ailleurs et pour le surplus, comme retenu à juste titre par le TAPI, et avant cela par l’autorité intimée, elle ne peut se prévaloir d’aucunes circonstances exceptionnelles, au niveau de son intégration sociale et professionnelle, qui rempliraient les conditions d’un cas de rigueur. En particulier, elle ne démontre pas, pas plus que les autres membres de la famille au demeurant, une bonne maîtrise du français. À cet égard, le 2 juin 2020, elle a été entendue par la police assistée d’une interprète en langue albanaise dans le cadre d’une procédure concernant un séjour illégal et une activité illégale en Suisse, qui lui a valu une condamnation pénale du MP du 14 juillet 2020 à une peine pécuniaire de 120 jours-amende assortie du sursis, et a alors déclaré qu’elle ne parlait pas la langue française, ce qui valait également pour son époux. Elle était alors femme au foyer et son époux travaillait en tant que carreleur « là où il peut » et subvenait aux besoins de la famille. En août 2020, elle a sollicité par son employeur une autorisation de séjour avec activité lucrative pour un emploi de femme de ménage pour un salaire mensuel de CHF 1'375.-, étant relevé que pour cet emploi, pas plus que tout autre, elle n’a produit de documents attestant de la réception effective de salaires réguliers, respectivement de l’acquittement des charges sociales obligatoires. Les relations d’amitié qu’elle a pu nouer en Suisse sont inconnues et il n’est pas établi qu’elles dépasseraient des liens d’amitié usuels après quelques années passées au même endroit. Son indépendance financière est due essentiellement, si ce n’est exclusivement, aux revenus de son époux.

Un retour dans son pays d’origine, où elle a vécu jusqu’à ses 40 ans et où vivent ses trois frères, ses trois sœurs et sa mère, ne la confrontera pas à une situation d’une gravité telle que doive être délivrée une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Pour le surplus, il peut sans autre être renvoyé à la motivation détaillée du TAPI, étant relevé que la recourante n’amène aucun élément dans son acte de recours permettant de remettre en question le raisonnement fondé de l’autorité de première instance judiciaire.

Pour ce qui est des deux enfants majeurs du couple, les prénommés E______ et F______, ils ne sont arrivés en Suisse que le 7 juillet 2018, soit il y a un petit peu plus de quatre ans. Il n’est pas démenti qu’ils vivent auprès de leurs parents, de sorte que c’est à juste titre que le TAPI retient que leur sort suit celui de ces derniers. En tout état, même s’ils vivaient hors du domicile familial, de manière indépendante, leur situation ne présenterait pas un cas de rigueur pour la raison déjà que leur séjour en Suisse ne correspond pas à la durée requise par la loi et la jurisprudence et que leur intégration tant sociale que professionnelle n’est pas exceptionnelle. À nouveau, ces deux jeunes adultes n’amènent aucun élément au stade du recours permettant de remettre en question le raisonnement détaillé et fondé du TAPI. Ainsi, c’est à juste titre que cette instance a en particulier relevé qu’arrivés en Suisse à l’âge de 16 et 15 ans, ils avaient passé toute leur enfance et pratiquement toute leur adolescence au Kosovo, où ils avaient donc été scolarisés pendant une longue période. Vu leurs profonds liens avec leur pays, ils ne devraient pas rencontrer de difficultés particulières pour continuer à y vivre, étant rappelé que la question n'était pas de savoir s'il leur serait plus facile de vivre en Suisse qu'au Kosovo, où ils s’étaient au demeurant apparemment rendus à la fin de l’année 2019 vu la délivrance de visas de retour pour un mois. Ils ne se trouvaient pas dans une situation de détresse personnelle, au sens où la jurisprudence l'entendait. La relation nouée avec la Suisse n'était pas si profonde qu'il devenait impossible d'exiger d'eux qu'ils retournent dans leur pays d'origine, où leur intégration ne semblait pas compromise. La chambre de céans ajoute à cela que quand bien même tous deux seraient en train de poursuivre leur formation d’assistants de bureau à l’école de culture générale, entamée au mois d’août 2021, après une année scolaire en classe d’insertion professionnelle, ce qui n’est démontré par aucune pièce actualisée, pas plus que les résultats obtenus en juin 2022, force est de constater qu’il n’existe aucun obstacle apparent pour la poursuite d’une telle formation dans leur pays d’origine.

Les mineurs C______ et D______ sont arrivés en Suisse avec leur mère à la fin du mois de janvier 2019. Le premier était alors âgé de presque 14 ans et le second de presque 10 ans. C______, âgé de 17 ans, vient de sortir de l’adolescence dans laquelle D______, âgé de 13 ans, vient d’entrer, ce qui est un élément à prendre en considération selon la jurisprudence. Ils n'ont toutefois vécu en Suisse que trois ans et demi.

Avant cela, ils ont tous deux vécu au Kosovo avec leur mère qu’ils vont devoir suivre, tout comme leur père et leurs sœurs et frère. Il n’est pas allégué qu'ils ne seraient plus familiers avec les us et coutumes de leur pays d'origine ou ne maîtriseraient pas l'albanais qui est au demeurant la langue utilisée par leurs parents.

Par ailleurs, les recourants ne documentent nullement la suite du parcours scolaire en Suisse de leurs deux fils mineurs, étant relevé en particulier que l’on ignore ce qu’il est advenu de la fin de l’année 2021/2022, en particulier pour C______ qui est censé avoir terminé le cycle d’orientation. Aucun document ne permet de retenir que les deux cadets pourraient se prévaloir d’une intégration particulièrement bonne en l’absence de tout renseignement à leur propos, qu’il s’agisse de leurs fréquentations, de leurs intérêts, de leurs éventuelles pratiques sportives ou culturelles, voire de la fréquentation d’une maison de quartier, notamment, étant rappelé leur obligation de collaborer.

Si le retour de D______ et C______ nécessitera un effort d’adaptation, dont l’importance ne doit pas être sous-estimée, ils seront accompagnés de leur père et mère, ainsi que de leur sœur et frère majeurs. Ils pourront mettre à profit leurs connaissances de la langue française, quand bien même le niveau atteint n’est pas démontré, et poursuivre leur scolarité, ce qui devrait leur permettre de surmonter les difficultés initiales de réintégration.

Dans ces conditions, l'OCPM était en droit de retenir que la situation de la mère et des quatre enfants du couple ne justifiait pas l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur.

9) a. Sous l'angle étroit de la protection de la vie privée, l'art. 8 CEDH ouvre le droit à une autorisation de séjour, mais à des conditions restrictives, l'étranger devant établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire (ATF 130 II 281 consid. 3.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_255/2020 du 6 mai 2020 consid. 1.2.2 ; 2C_498/2018 du 29 juin 2018 consid. 6.1 ; 2C_739/2016 du 31 janvier 2017 consid. 1.1 ; 2C_647/2016 du 2 décembre 2016 consid. 1.1 et 3.1 ; 2C_891/2016 du 27 septembre 2016 consid. 3.2).

Lorsque l'étranger réside légalement depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l'idée que les liens sociaux qu'il y a développés sont suffisamment étroits pour qu'il bénéficie d'un droit au respect de sa vie privée ; lorsque la durée de la résidence est inférieure à dix ans, mais que l'étranger fait preuve d'une forte intégration en Suisse, le refus de prolonger ou la révocation de l'autorisation de rester en Suisse peut également porter atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 144 I 266 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_603/2019 du 16 décembre 2019 consid. 6.2 ; 2C_459/2019 du 17 mai 2019 consid. 3.1 ; 2C_398/2019 du 1er mai 2019 consid. 3.1 ; 2C_1042/2018 du 26 novembre 2018 consid. 4.1).

Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance – par exemple en raison de l'effet suspensif attaché à des procédures de recours – ne sont pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3 ; arrêts 2C_603/2019 du 16 décembre 2019 consid. 6.2 ; 2C_436/2018 du 8 novembre 2018 consid. 2.2).

b. En l'espèce, comme vu précédemment, les recourants, qui ne peuvent se prévaloir ni l’un ni l’autre d'un quelconque séjour légal en Suisse et dont l'intégration n'apparaît – au surplus – pas exceptionnelle, ne peuvent pas se fonder sur l'art. 8 CEDH.

10) a. Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation (ATA/1798/2019 du 10 décembre 2019 consid. 6 et les arrêts cités). Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

b. En l'espèce, dès lors qu'il a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour aux recourants, l'intimé devait prononcer leur renvoi. Pour le surplus, aucun motif ne permet de retenir que le renvoi des recourants ne serait pas possible, licite ou ne pourrait raisonnablement être exigé ; ceux-ci ne le font d'ailleurs pas valoir.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

11) Vu l'issue du recours, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge solidaire des époux AB______ et aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 mai 2022 par Madame A______ et Monsieur B______, agissant pour leur compte et celui de leurs enfants mineurs C______ et D______, ainsi que par Madame E______ et Monsieur F______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 mars 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge solidaire de Madame A______ et Monsieur B______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Gazmend Elmazi, avocat des recourants, à l’office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et McGregor, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.