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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3669/2024

JTAPI/547/2025 du 22.05.2025 ( OCPM ) , REJETE

REJETE par ATA/1132/2025

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3669/2024

JTAPI/547/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 22 mai 2025

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Roxane KIRCHNER, avocate, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1995, est ressortissant du Brésil.

2.             Par ordonnance pénale du 12 décembre 2016, le Ministère public de l'arrondissement de La Côte a condamné M. A______ pour entrée illégale et séjour illégal ainsi que l'exercice d'une activité lucrative sans autorisation.

3.             Par décision du 21 mars 2017, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a prononcé le renvoi de Suisse de M. A______. Cette décision n'a pas été contestée et est entrée en force.

4.             Par formulaire daté du 10 avril 2019, M. A______ a sollicité de l'OCPM une autorisation de séjour avec activité lucrative en tant que manœuvre-peintre, laquelle a été refusée par décision du 12 juin 2019 de l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT).

5.             Le 15 mars 2024, M. A______ a sollicité de l'OCPM une autorisation de séjour.

A l'appui de sa requête, il a notamment produit un courrier d'accompagnement mentionnant une arrivée en Suisse en mai 2016 ainsi que le fait qu'il n'avait plus que de rares contacts avec sa mère et ses frères au Brésil et vivait désormais en Suisse auprès de son père et sa belle-mère, un formulaire M mentionnant une prise d'emploi en janvier 2023, une copie de son contrat de travail et une copie de son passeport.

6.             Le 22 avril 2024, sous la plume de son conseil, M. A______ a précisé à l'OCPM que sa demande du 15 mars 2024 était une demande d'autorisation de séjour pour cas individuel d'une extrême gravité.

7.             Le 12 juin 2024, M. A______ a produit des documents supplémentaires, notamment des factures de l'école de langue B______, des lettres de soutien, un extrait de l'office des poursuites, une attestation de l'Hospice général et une attestation d'achat d'abonnement TPG depuis 2016.

8.             Le 22 juillet 2024, l'OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser sa demande d'autorisation de séjour pour cas de rigueur, lui accordant un délai de 30 jours pour faire valoir ses observations.

9.             Le 2 août 2024, M. A______ a produit une attestation de son niveau de français B1 à l'oral.

10.         Par courrier du 20 septembre 2024, dans le délai prolongé par l'OCPM,
M. A______ a transmis ses observations.

11.         Par décision du 4 octobre 2024, l'OCPM a refusé d'accorder l'autorisation de séjour sollicitée par M. A______ et a prononcé son renvoi de Suisse.

Il était arrivé en Suisse à l'âge de 21 ans, en mai 2016, et avait passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d'adulte dans son pays d'origine, précisant qu'il était venu rejoindre son père en Suisse et que sa mère et ses frères vivaient au Brésil. Il n'avait ainsi pas prouvé un séjour continu de dix ans en Suisse et restait encore attaché dans une large mesure à son pays d'origine.

Son intégration au milieu socioculturel suisse n'était pas si profonde et irréversible qu'un retour dans son pays constituerait un déracinement complet. Pour le surplus, les témoignages d'amis et d'employeurs n'étaient pas considérés comme engageants. Même si le niveau de langue requis était atteint, le critère des années de séjour n'était pas rempli. Son intégration n'était pas remarquable et correspondait au comportement ordinaire qui pouvait être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour.

Il n'avait pas démontré qu'une réintégration dans son pays d'origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle indépendamment des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place.

Il n'avait enfin pas démontré l'existence d'obstacles au retour dans son pays d'origine et le dossier ne faisait pas apparaitre que son renvoi ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait pas être raisonnablement exigé.

12.         Par acte du 2 novembre 2024, sous la plume de son conseil, M. A______ a formé recours contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) concluant à son annulation, subsidiairement au renvoi du dossier à l'autorité intimée pour nouvelle décision au sens des considérants, sous suite de frais et dépens. Préalablement, il a conclu à son audition.

L'OCPM n'avait pas constaté les faits de manière complète, en ne prenant pas en compte des éléments importants en lien avec son intégration. Il vivait en Suisse depuis près de 9 ans et avait démontré une excellente intégration, tant sur le plan familial, social que professionnel.

Son comportement était exemplaire. Il respectait l'ordre et la sécurité publics ainsi que les valeurs de la Constitution. Il avait de bonnes compétences linguistique et participait activement à l'économie genevoise, travaillant à plein temps pour une entreprise luttant au quotidien contre la pénurie de logement. Il avait démontré à satisfaction de droit que sa situation financière était saine, ayant un salaire lui permettant largement de subvenir à ses besoins, n'ayant aucune dette et n'ayant jamais sollicité l'aide sociale.

Vu ses fortes attaches en Suisse et l'absence de lien avec son pays d'origine, il ne pouvait être exigé de lui qu'il retourne au Brésil. Il risquait de s'y retrouver seul car il n'y avait plus que de rares contacts et il ne parlait plus la langue de son pays d'origine depuis des années. Il avait vécu toute sa vie d'adulte en Suisse et s'y était reconstruit sur un plan privé auprès de son père avec lequel il partageait les mêmes intérêts. Son père et sa belle-mère constituait son noyau familial depuis près de neuf ans, n'ayant plus que de rares contacts téléphoniques avec sa mère. Il n'avait par ailleurs plus d'amis ou de connaissances au Brésil, pays qu'il avait quitté dans un climat de tensions familiales. Un retour forcé le plongerait dans une profonde dépression.

13.         Le 7 janvier 2025, l'OCPM a transmis ses observations, accompagnées de son dossier. Il a conclu au rejet du recours.

Le recourant avait passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d'adulte au Brésil auprès de sa mère et de ses frères. Agé aujourd'hui de 29 ans et en bonne santé, il n'avait pas démontré de manière convaincante qu'un retour au Brésil le placerait dans une situation personnelles d'extrême gravité. L'expérience professionnelle qu'il avait acquise en Suisse dans le domaine du second œuvre et la maîtrise d'une autre langue seraient certainement des atouts pour sa réintégration au Brésil. S'agissant des liens qu'il avait pu nouer avec son père et sa belle-mère, ces derniers pourraient être maintenus par le biais de visites réciproques.

14.         Le 10 février 2025, le recourant a répliqué, persistant dans ses conclusions et reprenant en substance son argumentation développée dans le cadre de son recours.

15.         Le 11 mars 2025, l'OCPM a informé le tribunal qu'il n'avait pas d'observations complémentaires à formuler.

16.         Le détail des écritures et des pièces produites sera repris dans la partie « En droit » en tant que de besoin.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits ; il incombe à celles-ci d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître. Lorsque les preuves font défaut ou s'il ne peut être raisonnablement exigé de l'autorité qu'elle les recueille pour les faits constitutifs d'un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1). Il appartient ainsi à l'administré d'établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l'administration de démontrer l'existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4a). En effet, Il incombe à l'administré d'établir les faits qu'il est le mieux à même de connaître, notamment parce qu'ils ont trait spécifiquement à sa situation personnelle.

6.             En matière de droit des étrangers, l'art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l'étranger ou des tiers participants (arrêt du Tribunal fédéral 2C_153/2018 du 25 juin 2018 consid. 4.2). Cette obligation a été qualifiée de « devoir de collaboration spécialement élevé » lorsqu'il s'agit d'éléments ayant trait à la situation personnelle de l'intéressé et qu'il connaît donc mieux que quiconque (arrêts du Tribunal fédéral 1C_58/2012 du 10 juillet 2012 consid. 3.2).

7.             Par ailleurs, en procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n'est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b et les arrêts cités).

8.             À titre préalable, le recourant sollicite son audition personnelle.

9.             Le droit d’être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit, pour l’intéressé, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités).

Le droit de faire administrer des preuves n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières ou de mettre un terme à l'instruction, lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2019 du 12 septembre 2019 consid. 4.1 ; 2C_1125/2018 du 7 janvier 2019 consid. 5.1 ; 1C_212/2018 du 24 avril 2019 consid. 4.1).

Enfin, le droit d’être entendu ne comprend pas le droit d’être entendu oralement (cf. not. art. 41 in fine LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 5D_204/2016 du 15 mars 2017 consid. 4.4 ; 5A_792/2016 du 23 janvier 2017 consid. 3.4 ; 6B_594/2015 du 29 février 2016 consid. 2.1 ; ATA/1637/2017 du 19 décembre 2017 consid. 3d).

10.         En l’espèce, le tribunal estime que le dossier contient les éléments suffisants et nécessaires, tel qu'ils ressortent des écritures des parties, des pièces produites et du dossier de l'autorité intimée, pour statuer sur le litige, de sorte qu'il n'apparaît pas utile de procéder à la comparution personnelle du recourant, étant souligné qu’il a eu la possibilité de s’exprimer dans le cadre de son recours et de produire tout moyen de preuve utile en annexe de ses écritures. Il n'indique d'ailleurs pas sur quels aspects de sa situation la procédure écrite aurait été impropre à lui permettre de renseigner correctement le tribunal.

11.         Le recourant sollicite la délivrance d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur.

12.         La loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (cf. art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Brésil.

13.         Les dérogations aux prescriptions générales d’admission (art. 18 à 29 LEI) sont énoncées de manière exhaustive à l’art. 30 al. 1 LEI ; il est notamment possible de déroger aux conditions d’admission dans le but de tenir compte des cas individuels d’extrême gravité ou d’intérêts publics majeurs (let. b). En vertu de l’art. 30 al. 2 LEI, le Conseil fédéral en a fixé les conditions et la procédure dans l’OASA.

14.         L’art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte, notamment, de l’intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l’état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g). Selon l’art. 58a al. 1 LEI, les critères sont le respect de la sécurité et de l’ordre publics (let. a), le respect des valeurs de la Constitution (let. b), les compétences linguistiques (let. c), la participation à la vie économique ou l’acquisition d’une formation (let. d).

Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 II 345 consid. 3.2), d’autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (ATA/545/2022 du 24 mai 2022 consid. 3e).

15.         Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu’ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l’obtention d’une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3).

16.         Lors de l’appréciation d’un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce, étant relevé que l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée. On ne saurait tenir compte des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires) affectant l’ensemble de la population restée sur place, auxquelles les personnes concernées pourraient être également exposées à leur retour, sauf si celles-ci allèguent d’importantes difficultés concrètes propres à leur cas particulier (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-5341/2020 du 7 février 2022 consid. 6.7 ; F-6616/2017 du 26 novembre 2019 consid. 6.5 et les références citées).

La question n’est donc pas de savoir s’il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d’examiner si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (ATA/122/2023 du 7 février 2023 consid. 4d et les références citées).

17.         La reconnaissance de l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité implique que les conditions de vie et d’existence de l’étranger doivent être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des étrangers. En d’autres termes, le refus de le soustraire à la réglementation ordinaire en matière d’admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que l’étranger a séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu’il y est bien intégré, tant socialement et professionnellement, et que son comportement n’a pas fait l’objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d’extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite que l’on ne puisse exiger qu’il vive dans un autre pays, notamment celui dont il est originaire. À cet égard, les relations de travail, d’amitié ou de voisinage qu’il a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu’ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3).

18.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, l’intéressé possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-6322/2016 du 1er mai 2018 consid.4.6 et les références citées ; ATA/1130/2017 du 2 août 2017 consid. 5b).

19.         Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l’examen d’un cas d’extrême gravité, elle doit être examinée à la lumière de l’ensemble des circonstances et être relativisée lorsque l’étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l’obstination à violer la loi (arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

La durée du séjour (légal ou non) est ainsi un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul, pour la reconnaissance d’un cas de rigueur (ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7e). La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée, soit une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral
C-7330/2010 du 19 mars 2012 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6c ; ATA/1306/2020 du 15 décembre 2020 consid. 5b ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. 2 : LEtr, 2017, p. 269 et les références citées).

20.         S’agissant de l’intégration professionnelle, elle doit revêtir un caractère exceptionnel au point de justifier, à elle seule, l’octroi d’une autorisation de séjour en dérogation aux conditions d’admission. Le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les utiliser dans son pays d’origine ou doit avoir réalisé une ascension professionnelle remarquable, circonstances susceptibles de justifier à certaines conditions l’octroi d’un permis humanitaire (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.4 et les références citées).

21.         En ce qui concerne la condition de l’intégration au milieu socioculturel suisse, la jurisprudence considère que, d’une manière générale, lorsqu’une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte dans son pays d’origine, il y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l’âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d’origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).

22.         Il est parfaitement normal qu’une personne, ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers, s’y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l’une des langues nationales. Aussi, les relations d’amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l’étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d’une situation d’extrême gravité (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.3 ;
F-1714/2016 du 24 février 2017 consid. 5.3).

L’intégration socio-culturelle n’est donc en principe pas susceptible de justifier à elle seule l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 ;
C-384/2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7 ; Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l’engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d’une intégration réussie, voire remarquable (arrêts du Tribunal administratif fédéral
C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine ; cf. aussi Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10).

23.         Dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir d’appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son degré d’intégration (art. 96 al. 1 LEI).

24.         En l'espèce, après un examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, il y a lieu de constater que l'OCPM n'a pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que le recourant ne satisfaisait pas aux conditions strictes requises pour la reconnaissance d'un cas de rigueur. C'est le lieu de rappeler que le seul fait de séjourner en Suisse pendant plusieurs années n'est pas suffisant, sans que n'existent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles, lesquelles font défaut ici.

Le recourant séjourne en Suisse depuis mai 2016, ce qui n'est pas contesté par l'OCPM. Au moment du dépôt de sa demande d'autorisation de séjour, le 15 mars 2024, il totalisait un séjour en Suisse de près de 8 ans. Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que le recourant a déjà fait l'objet d'une décision de renvoi en date du 21 mars 2017, laquelle est entrée en force, ce qui amène à relativiser la durée de son séjour en Suisse. À cela s'ajoute que même en prenant en compte un séjour continu depuis mai 2016, la durée de celui-ci doit en plus être relativisée, puisque ce séjour a été effectué illégalement, puis, à compter de mars 2024, sous couvert d’une simple tolérance suite au dépôt de sa demande de titre de séjour.

Par ailleurs, son intégration socio-professionnelle, certes louable et réussie, ne peut être qualifiée de remarquable ou d'exceptionnelle. Les emplois qu’il a exercés dans le domaine du bâtiment ne témoignent pas d’une ascension professionnelle remarquable et il n’a pas acquis des qualifications spécifiques susceptibles de justifier l’admission d’un cas de rigueur. Il ne peut pas non plus se prévaloir d’un comportement irréprochable, puisqu’il a séjourné et travaillé illégalement en Suisse durant plusieurs années. Sur le plan social, si le recourant possède un niveau de français dépassant le minimum requis et s'il s'est constituée un réseau d’amis et de connaissances en Suisse, comme l'attestent les différentes lettres de soutien produites, il ne ressort pas du dossier que ces liens dépasseraient en intensité ce qui peut être raisonnablement attendu d’un étranger ayant passé un nombre d’années équivalents dans le pays.

En tout état, le fait de travailler pour subvenir à ses besoins, ne pas dépendre de l'aide sociale et de ne pas avoir de dettes constitue un comportement ordinaire qui peut être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Il ne s'agit pas là de circonstances exceptionnelles permettant à elles seules de retenir l'existence d'une intégration particulièrement marquée, susceptible de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur.

Il convient encore de relever que le recourant, arrivé en Suisse au plus tôt à l’âge de 21 ans, a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte dans son pays d’origine. Il en maîtrise ainsi la langue, même s'il la maîtrise actuellement avec moins d'aisance, et la culture. De plus, âgé de 29 ans, il est en bonne santé et en mesure de travailler. En outre, s’il prétend ne plus avoir d’attaches au Brésil, il ressort du dossier que sa mère et ses frères y vivent toujours. Ainsi, bien que son père et sa belle-mère résident en Suisse, il dispose malgré tout d’un tissu familial au Brésil sur lequel il devrait pouvoir compter en cas de retour. En tout état, l’absence de liens familiaux dans le pays d’origine n’est pas, chez un jeune adulte en bonne santé, un élément susceptible de fortement compromettre la réintégration dans ce pays, dès lors que cette notion recouvre plus largement les aspects sociaux, culturels et professionnels pour lesquels un adulte est en principe autonome. En outre, le recourant n’a pas démontré qu’il se serait créé des attaches à ce point profondes avec la Suisse qu’il serait empêché de retourner dans son pays d’origine. Il pourra maintenir des contacts avec sa famille vivant en Suisse par le biais des moyens de communications modernes et de visites réciproques. Ces éléments faciliteront sa réintégration au Brésil, de même que les expériences professionnelles et connaissances linguistiques qu’il a pu acquérir en Suisse.

Dans ces circonstances, il n'apparaît pas que les difficultés auxquelles le recourant devra faire face en cas de retour seraient plus lourdes que celles que rencontrent d'autres compatriotes contraints de retourner dans leur pays d'origine au terme d'un séjour en Suisse. À cet égard, c’est le lieu de rappeler que l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur constitue une exception aux mesures de limitation, exception qui n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée, ce que le recourant n’établit pas.

Au vu de ce qui précède, c’est conformément à la loi et sans violer son pouvoir d’appréciation que l’autorité intimée a refusé de préaviser favorablement auprès du SEM la demande d’autorisation de séjour présentée par le recourant.

25.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande d'autorisation (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-4183/2011 du 16 janvier 2012 consid. 3.1; cf. aussi not. ATA/954/2018 du 18 septembre 2018 consid. 9).

26.         Le renvoi d'un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

27.         Aux termes de l'art. 83 al. 4 LEI, l'exécution de la décision de renvoi peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale.

Cette disposition s'applique notamment aux personnes pour qui un retour reviendrait à les mettre concrètement en danger, notamment parce qu'elles ne pourraient plus recevoir les soins dont elles ont besoin ou qu'elles seraient, selon toute probabilité, condamnées à devoir vivre durablement et irrémédiablement dans un dénuement complet, et ainsi exposées à la famine, à une dégradation grave de leur état de santé, à l'invalidité, voire à la mort. En revanche, les difficultés
socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, de logement, d'emplois, et de moyens de formation, ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-838/2017 du 27 mars 2018 consid. 4.3).

28.         En l'espèce, le recourant n’obtenant pas d’autorisation de séjour, c’est à bon droit que l’autorité intimée a prononcé son renvoi de Suisse.

Au surplus, l’exécution de cette mesure paraît possible, licite et raisonnablement exigible, aucune pièce du dossier ne permettant de retenir qu’un retour au Brésil l’exposerait à une mise en danger concrète.

29.         Intégralement infondé, le recours sera donc rejeté.

30.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais du même montant versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

31.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 2 novembre 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 4 octobre 2024 ;

2.             le rejette;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Kristina DE LUCIA

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

Le greffier