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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1382/2021

JTAPI/1266/2021 du 14.12.2021 ( DSES ) , REJETE

ADMIS par ATA/1151/2022

Normes : Cst.29.al2; LEI.43.al2; LEI.42; LEI.51.al1.letb; LEI.63.al1.leta; LEI.62.al1.leta; LEI.90.al1.leta; LEI.97; OASA.82; RITPJ.4; RITPJ.12; CEDH.8.al1; CEDH.8.al2; LEI.64.al1.letc
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1382/2021

JTAPI/1266/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 14 décembre 2021

 

dans la cause

 

Madame A______, représentée par Me Andrea VON FLÜE, avocat, avec élection de domicile

contre

DÉPARTEMENT DE LA SÉCURITÉ, DE LA POPULATION ET DE LA SANTÉ

 


EN FAIT

1.             Madame A______ (née ______), née le ______1983, est ressortissante de Thaïlande.

2.             Le 6 mars 2007, elle a épousé Monsieur B______, ressortissant suisse né le ______1966. Le mariage a été célébré en Thaïlande.

3.             Mme A______ est arrivée à Genève le 21 juin 2007 et a été mise au bénéfice d’une autorisation de séjour au titre du regroupement familial.

4.             Le 21 juin 2007, elle a été engagée par le restaurant «______» en qualité de serveuse.

5.             Les 30 décembre 2009 et 8 août 2010, elle a sollicité un visa de retour afin de se rendre en Thaïlande pour passer les fêtes de fin d’année et pour voir à sa famille.

6.             Il ressort d'une feuille d’enquête établie le 24 mars 2010 par l’office cantonal de la population, désormais office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), qu’un enquêteur s’était rendu au domicile des époux, situé au______, avenue C______. L'inscription « B______ et A______ 2ème ét. » figuraient sur la boîte aux lettres et la porte palière. Selon la personne en charge du service de l’immeuble, le couple faisait bien ménage commun et était vu régulièrement.

7.             Le 24 septembre 2012, Mme A______ a été mise au bénéfice d’une autorisation d’établissement.

8.             Le 28 juin 2017, elle a sollicité un visa de retour, afin de rendre visite à sa famille en Thaïlande.

9.             Le 16 mai 2018, l’entreprise individuelle « D______ », ayant pour but « centre de massage traditionnel thaï », a été inscrite au registre du commerce. Mme A______ en était la titulaire avec signature individuelle. L’inscription de son époux, qui détenait une procuration collective à deux, a été radiée le 7 janvier 2019.

10.         Monsieur E______, né le ______1988, est ressortissant du Kosovo. Il est au bénéfice d’une autorisation d’établissement dans le canton de Genève.

Le 21 octobre 2018, il a été impliqué dans un accident de la circulation, alors qu’il se trouvait au volant d’une voiture appartenant à Mme A______, dont elle était passagère.

11.         Le 20 décembre 2018, cette dernière a été entendue par la brigade de lutte contre la traite des êtres humains et la prostitution illicite de la police genevoise en qualité de personne appelée à donner des renseignements.

Elle a déclaré qu’à son arrivée en Suisse, elle avait d’abord suivi un cours de français, puis avait travaillé durant six ans en qualité de serveuse dans un restaurant thaïlandais. Elle était ensuite retournée pendant deux mois en Thaïlande, afin de s’occuper de son père malade. À son retour en Suisse, elle avait travaillé en tant que réceptionniste dans un salon de massages. Fin 2015/début 2016, elle avait ouvert son propre salon de massages (D______) avec un « ami chinois » prénommé « F______ ». Ce dernier avait apporté les fonds et elle s’occupait de la réception et du recrutement des masseuses. Ils avaient convenu qu’ils détiendraient chacun 50 % de l'entreprise. À cette époque, elle se rendait passablement en Thaïlande pour s’occuper de son père. Après six à sept mois, « F______ » avait décidé de vendre sa part à un ami, car le salon « ne marchait pas très bien », mais elle s’y était opposée. « B______ » l’avait aidée à acquérir la part de « F______ » au début de l'année 2017 en versant CHF 5'000.- par mois à celui-ci, durant une année environ. Le nombre de clients avaient ensuite augmenté, car « B______ » avait mis des annonces sur Internet. Ce dernier avait aidé « F______ », lors de l’ouverture du salon, alors qu’elle se trouvait en Thaïlande. Durant cette période, « F_____ » gérait le salon. « En effet, il n’aimait pas trop Patrick car [elle] avait déjà des problèmes avec lui ». Depuis que « Patrick » avait acquis les parts de « F______ », ils étaient copropriétaires du salon. Elle en avait été la gérante. Elle recrutait les masseuses et « B______ » s’occupait des contrats. Elle ne connaissait rien « aux documents ». Elle y apposait sa signature, lorsqu’il le lui demandait. Elle lui faisait confiance. « Patrick » avait ouvert un autre salon de massage (« G______ ») depuis deux ou trois mois. Elle s’était également chargée du recrutement des masseuses. « E______ » avait recruté une masseuse qu’elle n’appréciait pas. Elle avait précisé à « B______ » qu’elle ne voulait pas que les salons offrent des prestations sexuelles. « E______ » était son compagnon. Ils étaient ensemble depuis trois ans et habitaient sous le même toit. Cela faisait dix ans qu’elle ne vivait plus avec « B______ ». Elle avait vécu avec lui durant seulement deux ans, mais son adresse avait toujours été enregistrée chez lui. Cela faisait dix ans qu’ils n’entretenaient plus de relation amoureuse. Ils étaient amis. « B______ » s’occupait de la gestion administrative du salon et gérait également « tout l’argent ». Ils n’avaient jamais parlé de divorce. « Ce n’[était pas qu’[elle] ne [voulait] pas divorcer mais [ils] n’en av[aient] jamais parlé. Elle ne connaissait pas la loi suisse à ce sujet. Elle ne percevait pas de salaire. En échange de son travail, elle avait demandé à « B______ » de lui donner un peu d’argent, de temps en temps, et de payer ses factures. Pour le surplus, elle a été questionnée sur le fonctionnement des salons, la nature des prestations offertes et les tarifs pratiqués, ainsi que la répartition des tâches et les aspects financiers.

Il ressort du procès-verbal d’audition que sa « langue maternelle parlée » était le thaï et qu’elle avait été assistée de son conseil et d’une traductrice, Madame H______ (laquelle figure - en tant que traductrice et interprète en langue thaïe - au registre des interprètes et des traducteurs autorisés à fournir des prestations aux juridictions du Pouvoir judiciaire [art. 3, 4 et 12 du règlement relatif aux interprètes et traducteurs mis en œuvre par le Pouvoir judiciaire du 29 octobre 2015 - RITPJ - E 2 05.60]).

12.         Le 11 janvier 2019, Mme A______ et M. E______ ont été entendus par la police suite à l’accident de circulation survenu le 21 octobre 2018.

Mme A______ a notamment déclaré qu’elle était arrivée en Suisse en 2007, soit l’année de son mariage avec son « ex-époux ». Elle avait encore des liens avec la famille de ce dernier, qu’elle voyait pour les fêtes de fin d’année et pour les anniversaires. Elle n’avait pas d’enfant et M. E______ était son compagnon.

Ce dernier a notamment confirmé que Mme A______ était sa « copine » et qu’ils vivaient ensemble.

A teneur des procès-verbaux d’audition, ils étaient domiciliés au______, rue de I_______. En outre, la langue maternelle de Mme A______ était le thaï ; elle parlait aussi anglais et avait donné son accord à ce que l'interprétation soit effectuée par un policier, en la personne de Monsieur J______.

13.         Le 6 septembre 2019, l’entreprise individuelle « D______ » a été radiée du registre du commerce, « par suite de remise de l’exploitation ».

En parallèle, le même jour, « K______ », ayant pour but l’« exploitation d’un centre de massage traditionnels thaïs », a été inscrite au registre du commerce. Elle a repris les affaires de ladite entreprise individuelle. M. B______ et Mme A______ en sont, respectivement, les associé (sans signature) et associée gérante (avec signature individuelle).

14.         Le 28 septembre 2019, M. B______ a sollicité le regroupement familial en faveur de L______, fils de son épouse, qui, âgé de 16 ans, était arrivé en Suisse le 3 juillet 2019 au bénéfice d’un visa valable trois mois.

15.         Le 28 janvier 2020, l’OCPM a transmis cette demande au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour en application des art. 43 et 47 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20).

16.         Par courrier du 13 février 2020, le SEM a fait savoir à l’OCPM qu'il ne lui était pas possible de se prononcer en toute connaissance de cause et a sollicité diverses pièces justificatives et mesures d’instruction. Il ressortait en effet du rapport de renseignements du 11 janvier 2019 que Mme A______ était séparée de son époux, qu’elle ne résidait plus au domicile conjugal, qu’elle vivait avec son compagnon, M. E______, et qu’elle n’avait pas d’enfant. Il convenait ainsi de clarifier la situation matrimoniale des époux A______ et B______, qui étaient censés vivre ensemble au domicile conjugal.

17.         Interpellée à cet égard par l’OCPM, Mme A______ a indiqué, par courrier du 16 mars 2020, qu’elle n’était « aucunement séparée de [s]on époux ». Elle s’était rendue à plusieurs reprises en Thaïlande pour de courts séjours et pour des raisons familiales liées à la situation de son fils, qui vivait avec sa grand-mère, mais qui était « pratiquement » livré à lui-même. Il était retourné en Thaïlande à l’échéance de son visa. Elle-même avait séjourné en Thaïlande du 25 juin au 3 juillet 2019 et du 1er octobre 2019 au 13 janvier 2020. Quant à son époux, il s’y était rendu le 23 janvier 2020 et y avait séjourné jusqu’au 10 mars 2020. Ce dernier s’était alors chargé des démarches administratives concernant son fils, notamment auprès de l’ambassade de Suisse. Lors de leurs séjours, ils avaient remis de l’argent à L______.

18.         Par courrier du 15 mai 2020, adressé à Mme A______ au ______ rue de I______, le SEM, rappelant la portée des art. 51 al. 2, 43, 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. a LEI, l’a informée de son intention de refuser de donner son approbation à l’octroi d’une autorisation d’entrée et de séjour en faveur de son fils, considérant que « tout portait à croire » qu’elle était séparée de son époux depuis plusieurs années et qu’elle vivait avec son compagnon, M. E______. Cette séparation ressortait des déclarations de son époux, qui avait été entendu le 13 décembre 2018 par les services genevois dans une affaire d’encouragement à la prostitution, d’usure et d’emploi d’étrangers sans autorisation, de ses propres déclarations des 20 décembre 2018 et 11 janvier 2019 et de celles faites par M. E______ à cette même date. De plus, le 19 septembre 2019, L______ avait publié, sur sa page Facebook, une photographie prise depuis le logement qu’elle occupait avec M. E______ et ce dernier avait publié, le 9 octobre 2019, sur sa propre page Facebook, une nouvelle photographie de couverture manifestement prise en Thaïlande, sur laquelle il apparaissait aux côtés de l’intéressée. Or, lorsque l’OCPM l’avait interpellée, elle avait nié être séparée de son époux et ses déclarations étaient « fortement sujettes à caution ». Elle faisait manifestement défaut à son obligation de collaborer prévue à l’art. 90 LEI et avait également fait de fausses déclarations et dissimulé des faits essentiels à la procédure. Conformément à l’art. 51 al. 2 LEI, elle ne pouvait pas se prévaloir de l’art. 43 LEI pour solliciter le regroupement familial en faveur de son fils. Un délai au 26 juin 2020 lui était imparti pour exercer son droit d’être entendu par écrit.

19.         Par courrier du 7 août 2020, l’OCPM a informé Mme A______ de son intention de proposer au département de la sécurité, de la population et de la santé (ci-après : DSPS) la révocation de son autorisation d’établissement et le prononcé de son renvoi de Suisse.

S’agissant de la réalité de la séparation avec son époux, il a repris les déclarations qu’elle avait faites les 20 décembre 2018 et 11 janvier 2019, ainsi que celles faites par M. E______ à cette date, relevant également que, selon le registre cantonal « CALVIN », ce dernier résidait chez elle au______, rue de I______. Il apparaissait ainsi clairement que, lors de l’octroi de son autorisation d’établissement, le 24 septembre 2012, elle était séparée de son époux de « longue date », soit depuis 2008. Partant, si cette information avait été connue, l’autorisation d’établissement ne lui aurait pas été délivrée. Elle n’avait à aucun moment communiqué cette information et lorsqu’elle avait été questionnée à ce sujet, elle avait affirmé, par courrier du 16 mars 2020, qu’elle n’était aucunement séparée. Elle avait fait de fausses déclarations, en totale contradiction avec celles enregistrées par la police genevoise. Elle remplissait ainsi les conditions objectives permettant la révocation de son autorisation d’établissement (art. 63 al. 1 let. a et 62 al. 1 let. a LEI). En outre, dans la mesure où la séparation du couple datait de 2008, l’union conjugale avait duré moins de trois ans. Partant, elle ne remplissait pas les conditions de l’art. 50 al. 1 let. a LEI et aucune raison personnelle majeure au sens de l’art. 50 al. 1 let. b LEI ne justifiait la poursuite de son séjour en Suisse. Enfin, âgée de 37 ans, elle était en bonne santé et avait de la famille dans son pays d’origine, où vivait son fils mineur. Il lui serait ainsi facile de s’y réintégrer. Au surplus, l’exécution de son renvoi apparaissait a priori possible, licite et exigible. Un délai de trente jours lui était imparti pour exercer son droit d’être entendu par écrit.

20.         Par courrier du 13 août 2020, le SEM a fait savoir à Mme A______ qu'il suspendait la procédure concernant son fils jusqu’au prononcé de la décision des autorités genevoises quant à ses conditions d’établissement en Suisse.

21.         Le 7 septembre 2020, se référant au courrier précité, qui « se rapport[ait] notamment à une transcription par la police des déclarations qu’auraient faites [s]on épouse » lors de son audition par la police en 2018, M. B______ a communiqué divers renseignements à l’OCPM, dans la mesure où il n’avait pas été interrogé et la police ne lui avait pas demandé de précisions s’agissant de son mariage.

Ainsi, de 2007 à 2015, il avait vécu avec son épouse au______, avenue C______. Ils avaient tenté de fonder une famille, mais elle avait fait une fausse-couche en 2011. Ce n’avait été qu’en 2017 qu’elle avait conclu un contrat de bail à son nom, portant sur un logement sis au 71, rue de Genève. Contrairement à ce qu’il ressortait du rapport de police, ils n’étaient pas séparés depuis dix ans, lorsqu’elle avait été entendue par la police en 2018 dans le cadre d’une affaire qui le concernait, lui, et non son épouse. Il avait d’ailleurs été totalement « disculpé » par le Ministère public des faits qui lui étaient reprochés. S’agissant de cette audition, son épouse lui avait fait part non seulement de ses propres problèmes de compréhension, mais également de celles auxquelles l’interprète avait été confrontée. À cet égard, « les modalités de transcription écrite des échanges verbaux se déroulant lors des auditions géné[raient], que cela soit intentionnel ou non, des biais de transcription imputables tant à l’acte de réécriture par les inspecteurs des énoncés produits dans une situation d’échange verbal, qu’à la fidélité et à la conformité discutable du travail de traduction réalisé par l’interprète qui ne sembl[ait] pas être au bénéfice d’un diplôme d’une Faculté universitaire de traduction et d’interprétation reconnue ». La police ne lui avait d’ailleurs pas demandé la date à laquelle son épouse avait quitté le domicile conjugal, ni celle depuis laquelle elle était domiciliée au______, rue de I______. Entre 2007 et 2015, il avait soutenu financièrement Madame M______, mère de son épouse, par des virements quasi-mensuels. Durant ces années, ils étaient également partis ensemble en vacances en Thaïlande, prenant les mêmes vols, notamment le 7 février 2013, soit postérieurement à l’obtention de son titre de séjour en 2012. Il avait demandé des justificatifs auprès des compagnies aériennes et ne manquerait pas de les transmettre. Par ailleurs, son épouse vivait à Genève depuis treize ans. Elle était très bien intégrée et n’avait jamais eu de démêlé avec la justice. Elle avait créé une société, qui regroupait deux centres de massages. La révocation de son titre de séjour conduirait à la cessation des activités de la société et à la perte d’emploi d’une dizaine de personnes. Il sollicitait son audition et celle de son épouse, afin d’apporter des compléments d’information.

Il a notamment joint un document intitulé « Biais d’une transcription d’une conversation entre une personne allophone (Mme A______) et une personne de langue maternelle française ».

22.         Par courrier du 7 septembre 2020, sous la plume de son conseil, Mme A______ a exercé son droit d’être entendu auprès de l'OCPM.

Lors de son audition par la police, le 20 décembre 2018, elle était assistée d’une interprète, qui n’était manifestement pas diplômée et qui avait rencontré des difficultés à traduire correctement, en raison d’un manque de compétence et d’une différence de dialecte thaï. Son conseil avait d’ailleurs dû intervenir à plusieurs reprises. De plus, dans la mesure où son audition n’avait pas de lien avec son statut légal en Suisse, elle n’avait pas « jugé utile » de se montrer plus précise au sujet du nombre d’années effectives de la vie conjugale avec son époux. Cela étant, il était exact qu’elle vivait séparée de son époux depuis plusieurs années, mais son union avait duré plus de deux ans. La vie conjugale avait pris fin en 2015. Ils étaient toutefois toujours mariés et restaient très proches, malgré l’absence de vie conjugale. Ils travaillaient ensemble. Elle exploitait un établissement, dont il gérait les aspects administratifs. Lorsqu’elle avait indiqué, dans son courrier du 16 mars 2020, qu’elle n’était « aucunement séparée de son époux », elle entendait, par cette affirmation, « être toujours mariée et ne pensait pas nécessaire de préciser quelle était la nature de leur relation, étant toujours mari et femme domiciliés à la même adresse ». Dans la mesure où son époux s’occupait de tous les aspects administratifs qui la concernaient, tant sur le plan privé que professionnel, ils n’avaient pas déclaré un domicile séparé, car le « centre de ses intérêts » demeurait au domicile conjugal pour tout ce qui touchait lesdits aspects.

Les photographies qu'elle produisait démontraient qu’ils étaient toujours en couple « au moins jusqu’en 2015 ». Son époux avait également effectué des virements bancaires réguliers en Thaïlande en faveur de sa mère, de 2008 à 2012. En outre, ils avaient consulté un gynécologue en 2011, soit quatre ans après leur mariage, car elle était enceinte, ce qui démontrait qu’ils étaient encore en couple à cette époque. Ils n’avaient toutefois pas pu fonder de famille, car elle avait fait deux fausses couches, lesquelles avaient conduit à leur séparation. Elle avait formé une communauté de toit, de lit et de table avec son époux jusqu’en 2015 « au moins », soit durant huit ans environ. Elle n’avait simplement pas procédé à une « actualisation de son lieu de domicile », démarche qui ne paraissait pas nécessaire, compte tenu de la particularité de leur situation. Cependant, s’il devait être considéré que l’union conjugale avait pris fin plus tôt, il ne pourrait être retenu, compte tenu des pièces produites, que cette rupture serait antérieure à 2011-2012, de sorte que l’union conjugale aurait duré « au moins » quatre ou cinq ans. Or, « la dissolution d’une union d’une telle durée n’entraîn[ait] pas nécessairement la révocation du titre de séjour accordé en vertu du regroupement familial ». En tout état, l’union conjugale avait duré « un temps suffisant pour que son autorisation d’établissement ne soit pas révoquée, de moins que son permis de séjour de l’époque soit prolongé » (sic). Enfin, cela faisait treize ans qu’elle séjournait en Suisse. Elle était financièrement indépendante et parfaitement intégrée. Son entreprise employait une dizaine de personnes. En outre, malgré leur séparation, elle continuait à entretenir une relation très étroite avec son époux et la famille de celui-ci. Dans ces circonstances, son renvoi paraissait disproportionné.

Elle a notamment joint les pièces suivantes :

- deux copies de photographies datées des 24 décembre 2009 et 15 février 2010, ainsi que six copies de photographies d'un écran d’ordinateur affichant des photographies datées des 25 décembre 2010, 25 décembre et 1er janvier 2011, 23 décembre 2013, 14 et 15 décembre 2014 la montrant notamment aux côtés d’un homme, dont l’une prise vraisemblablement lors d’un repas de famille ;

- des justificatifs de versements effectués par M. B_____en faveur de « M______ », en Thaïlande, entre août 2007 et juin 2015 ;

- un certificat médical établi le 27 août 2020 par le Dr N______, certifiant que Mme A______ était « venue avec son mari pour une grossesse en 2011 qu'elle était accompagnée de son mari B______ qu’ils vivaient ensemble au ______ av C______ » (sic).

23.         Par décision du 10 mars 2021, prise en application de l’art. 62 al. 1 let. a LEI, par renvoi de l’art. 63 al 1 let. a LEI, le DSPS a révoqué l’autorisation d'établissement de Mme A______ avec effet rétroactif au jour de sa délivrance et a prononcé son renvoi, lui impartissant un délai au 30 juin 2021 pour quitter la Suisse.

Il ressortait du dossier que lors de l’octroi de son autorisation d’établissement, le 24 septembre 2012, elle était déjà séparée de son époux. Elle n’en avait jamais informé l’OCPM et lorsque celui-ci l’avait questionnée à ce sujet, en se fondant notamment sur les courriers du SEM et des procès-verbaux d’audition de police, elle avait même persisté à le nier. Elle n’avait pas respecté son obligation de renseigner et avait cherché à tromper l’autorité sur le caractère stable et durable de sa relation vécue en Suisse avec son époux, qui lui avait donné le droit d’obtenir une autorisation de séjour en 2007, puis une autorisation d’établissement en 2012.

Elle avait ainsi voulu maintenir, à l’égard des autorités suisses, une fausse apparence sur un élément ayant une incidence essentielle sur l’examen de ses conditions de séjour devant conduire à la révocation de son autorisation d’établissement. Elle avait sciemment induit en erreur l’OCPM, qui ne lui aurait pas délivré une autorisation d’établissement, ou à tout le moins pas en 2012, s’il avait eu connaissance de la séparation.

Par ailleurs, la durée de son séjour de plus de dix ans en Suisse n’était pas déterminante, dès lors qu’elle avait été rendue possible par le biais de fausses déclarations et la dissimulation de faits essentiels. Pour ces mêmes motifs, son intégration pouvait être pondérée, car elle n’avait pas fait preuve d’une ascension professionnelle telle qu’un retour dans son pays ne pouvait être exigé d’elle. Son intégration ne pouvait en tous cas pas justifier, à elle seule, la poursuite de son séjour. De plus, elle avait vécu l’essentiel de sa vie en Thaïlande, où vivait son fils. Elle s’y était d’ailleurs régulièrement rendue, si bien que son retour n’y serait pas insurmontable. Enfin, le législateur poursuivait une politique migratoire restrictive et il existait un intérêt public à ce que les règles sur le séjour qui en découlaient soient respectées et que les étrangers ne puissent pas être récompensés de leurs mensonges en conservant une autorisation obtenue sur la base de fausses déclarations. Au surplus, le dossier ne faisait pas apparaître que l’exécution de son renvoi ne serait pas possible, pas licite ou qu’elle ne pourrait être raisonnablement exigée.

24.         Par acte du 22 avril 2021, sous la plume de son conseil, Mme A______ (ci-après : la recourante) a recouru contre cette décision devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, sous suite de frais et dépens, au maintien de son autorisation d’établissement, subsidiairement à ce qu’une autorisation de séjour lui soit accordée « au sens de l’art. 33 LEI ».

Elle s’étonnait du fait que l’OCPM et le SEM aient eu accès au procès-verbal de son audition par la police. Ce procès-verbal leur avait été transmis « de manière illicite », dès lors que les conditions de l’art. 101 du Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP - RS 312.0), soit notamment l’existence d’une procédure pendante à l’époque, n’étaient pas remplies. La décision attaquée devait être annulée, car elle reposait sur des moyens de preuve issus d’un procès-verbal obtenu illicitement, par conséquent « inexploitables ». Par ailleurs, l’autorité intimée avait procédé à une appréciation « biaisée » du dossier en se fondant essentiellement sur les déclarations qu’elle aurait faites à la police. Or, elle les contestait catégoriquement (pour les motifs déjà invoqués par son époux au sujet des qualifications de l’interprète qui l'avait assisté devant la police). À cela s’ajoutait l’état d’anxiété extrême dans lequel elle se trouvait lors de cette audition, compte tenu de la procédure pénale dirigée contre sa société et de l’arrestation de son époux. Son conseil, qui l’assistait, ignorait alors sa situation conjugale, de sorte qu’il ne savait pas que les déclarations protocolées n’étaient pas conformes à la vérité. Il avait relu le procès-verbal qu’elle avait signée, mais, compte tenu des circonstances, sa signature ne pouvait impliquer qu’elle confirmât l’entier de ses propos. Lors de cette audition, qui n’avait aucun lien avec sa relation conjugale, elle avait répondu de manière vague aux questions qui s’y rapportaient. En tout état, l’autorité intimée n’avait aucunement pris en compte les preuves qu’elle avait produites, soit notamment sa grossesse en 2011, le témoignage de son époux ou les versements effectués par celui-ci en Thaïlande en faveur de sa mère. Or, le simple fait qu’ils avaient des intérêts communs ne permettait pas de retenir que son époux s’était livré à de fausses déclarations.

Par ailleurs, dans la mesure où elle « prétend[ait] » que la séparation d'avec son époux avait eu lieu en 2015, elle aurait tout de même pu bénéficier de son autorisation d'établissement, si elle avait annoncé ladite séparation à l'époque. En 2015, elle comptabilisait sept années de vie conjugale en Suisse. Elle aurait déjà pu prétendre à un tel titre de séjour en 2012 et une séparation de fait, survenue en 2015, n’aurait certainement pas conduit à la révocation de son autorisation d’établissement. Elle n’avait aucunement cherché à dissimuler « quoique ce soit » aux autorités, mais avait simplement omis d’annoncer son changement d’adresse.

En outre, même si l’OCPM avait révoqué son autorisation d’établissement en 2015 en raison de sa séparation, il n’aurait eu aucun motif de refuser le renouvellement de son autorisation de séjour, dès lors que les conditions de l’art. 50 al. 1 let. a LEI auraient été remplies. Il était ainsi choquant qu’il refusât désormais de lui accorder une autorisation de séjour. Enfin, la décision litigieuse était disproportionnée, compte tenu de son intégration en Suisse, de la durée de son séjour et de ses attaches, parmi lesquelles comptaient non seulement son époux, avec lequel elle entretenait toujours une relation étroite, mais également la personne avec laquelle elle vivait en « concubinage qualifiée depuis au moins 2017 » (sic), et qui était titulaire d’une autorisation d’établissement.

Elle a produit un chargé de pièces contenant, pour l’essentiel, celles qu’elle avait déjà produites devant l’OCPM.

25.         Dans ses observations du 8 juin 2021, le DSPS a conclu au rejet du recours.

Le motif de révocation de l’autorisation d’établissement, prévu aux art. 63 al. 1 let. a et 62 al. 1 let. a LEI, était réalisé. En omettant sciemment de signaler la fin de son union conjugale en 2008 déjà, la recourante avait dissimulé des faits essentiels, qui avaient conduit à la poursuite de son séjour en Suisse, respectivement à la délivrance indue de son autorisation d’établissement. En outre, elle « n’emport[ait] au demeurant pas conviction lorsqu’elle minimis[ait] a posteriori les indications qu’elle a[vait] fournies par-devant la police judiciaire », étant rappelé que, selon la jurisprudence, en présence de déclarations contradictoires, la préférence devait être accordée à celles faites en premier.

26.         La recourante a répliqué le 6 juillet 2021 sous la plume de son conseil.

Les déclarations qu’elle avait faites après son audition par la police n’étaient pas « le produit de réflexions ultérieures ». Il s’agissait d’éléments de faits établis par des pièces probantes, dont l’autorité intimée n’avait aucunement tenu compte. Elle a repris en substance les arguments qu’elle avait déjà fait valoir en lien avec son audition par la police et a sollicité son audition, ainsi que celle de MM. B______ et E______.

27.         Le 28 juillet 2021, le DSPS a indiqué ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.

28.         A teneur du registre de l’OCPM, consulté pour la dernière fois ce jour, la recourante est domiciliée au ______, avenue C______ depuis le 3 décembre 2007.

Quant à M. B______, il est séparé de son épouse depuis le 13 juillet 2015 et est domicilié au______, rue de I______, chez « A______», depuis le 15 novembre 2018.

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l'espèce, contre les décisions du DSPS relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 cum art. 2 in fine de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente par la destinataire de la décision querellée, le recours est recevable (art. 57, 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

3.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole les principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2).

4.             Les arguments formulés par les parties à l'appui de leurs conclusions respectives seront repris et discutés dans la mesure utile (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_72/2017 du 14 septembre 2017 consid. 4.1 ; 1D_2/2017 du 22 mars 2017 consid. 5.1 ; 1C_304/2016 du 5 décembre 2016 consid. 3.1 ; 1C_592/2015 du 27 juillet 2016 consid. 4.1 ; 1C_229/2016 du 25 juillet 2016 consid. 3.1 et les arrêts cités), étant rappelé que, saisi d'un recours, le tribunal applique le droit d'office. S'il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n'est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. not. ATA/1024/2020 du 13 octobre 2020 consid. 1 et les références citées ; ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; cf. aussi ATF 140 III 86 consid. 2 ; 138 II 331 consid. 1.3 ; 137 II 313 consid. 1.4). Aussi peut-il admettre le recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (cf. ATF 139 II 404 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_164/2019 du 20 janvier 2021 consid. 2 ; 2C_44/2017 du 28 juillet 2017 consid. 2.1 ; 2C_540/2013 du 5 décembre 2013 consid. 3 ; 2C_349/2012 du 18 mars 2013 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-1734/2019 du 23 mars 2020 consid. 2).

5.             Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits ; il incombe à celles-ci d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_1156/2018 du 12 juillet 2019 consid. 3.3 et les arrêts cités). En matière de droit des étrangers, l'art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l'étranger ou des tiers participants (ATF 142 II 265 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_323/2018 du 21 septembre 2018 consid. 8.3.3 ; 2C_767/2015 du 19 février 2016 consid. 5.3.1).

Lorsque les preuves font défaut ou s'il ne peut être raisonnablement exigé de l'autorité qu'elle les recueille pour les faits constitutifs d'un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (cf. ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_27/2018 du 10 septembre 2018 consid. 2.2 ; 1C_170/2011 du 18 août 2011 consid. 3.2 et les références citées ; ATA/99/2020 du 28 janvier 2020 consid. 5b). Il appartient ainsi à l'administré d'établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l'administration de démontrer l'existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4a ; ATA/1155/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b et les références citées).

Par ailleurs, en procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3 ; ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n'est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b et les arrêts cités).

6.             Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit, pour l'intéressé, de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités).

Toutefois, ce droit ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pour décider de l'issue du litige. Il est ainsi possible de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsque le juge parvient à la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2021 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; 2C_946/2020 du 18 février 2021 consid. 3.1 ; 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1).

Par ailleurs, le droit d'être entendu ne comprend pas celui d'être entendu oralement (cf. not. art. 41 in fine LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_668/2020 du 22 janvier 2021 consid. 3.3 ; 2C_339/2020 du 5 janvier 2021 consid. 4.2.2 ; ATA/672/2021 du 29 juin 2021 consid. 3b), ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2019 du 12 septembre 2019 consid. 4.1 ; 2C_1004/2018 du 11 juin 2019 consid. 5.2.1 ; 2C_1125/2018 du 7 janvier 2019 consid. 5.1 ; ATA/672/2021 du 29 juin 2021 consid. 3b).

7.             En l’espèce, la recourante sollicite son audition, ainsi que celles de son époux et de M. E______. Or, elle ne dispose pas d’un droit à l'accomplissement de tels actes d'instruction et ceux-ci n'apparaissent pas nécessaires, le dossier contenant déjà les éléments utiles permettant au tribunal de statuer en connaissance de cause sur le litige, étant rappelé qu’une déclaration écrite de son époux, datée du 7 septembre 2020, figure au dossier.

8.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas en l’espèce.

9.             Le droit à l'obtention d'une autorisation d'établissement fondé sur l'art. 43 al. 2 LEI suppose que le conjoint étranger fasse ménage commun avec le ressortissant suisse durant cinq ans (ATF 140 II 289 consid. 3.6.2 ; sous réserve de l'art. 49 LEI, cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_656/2016 du 9 février 2017 consid. 4 ; 2C_1125/2014 du 9 septembre 2015 consid. 2.1).

10.         Les droits prévus à l’art. 42 LEI s’éteignent, en vertu de l’art. 51 al. 1 let. b LEI, s’il existe des motifs de révocation au sens de l’art. 63 LEI, étant précisé que ces motifs constituent chacun une cause de révocation (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_814/2020 du 18 mars 2021 consid. 5.1 ; 2C_44/2017 du 28 juillet 2017 consid. 4.3 et les arrêts cités).

11.         À teneur de l'art. 63 al. 1 let. a LEI, l'autorisation d'établissement peut notamment être révoquée aux conditions de l'art. 62 al. 1 let. a LEI, c'est-à-dire si l'étranger a fait de fausses déclarations ou a dissimulé des faits essentiels durant la procédure d'autorisation.

Les fausses déclarations qui portent sur des éléments déterminants pour l'octroi de l'autorisation de séjour ou d'établissement conduisent à la révocation de celle-ci. Il ne doit toutefois pas être établi que l'autorisation aurait avec certitude été refusée si l'autorité avait obtenu une information correcte. Quant à la dissimulation de faits essentiels, au même titre que pour les fausses déclarations, il faut que l'étranger ait la volonté de tromper l'autorité. Cela est notamment le cas lorsqu'il cherche à provoquer, respectivement à maintenir, une fausse apparence sur un fait essentiel (ATF 142 II 265 consid. 3.1 et les références ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_814/2020 du 18 mars 2021 consid. 5.1 ; 2C_553/2020 du 20 octobre 2020 consid. 3.1 ; 2C_176/2018 du 11 septembre 2018 consid. 3.1 ; 2C_656/2017 du 23 janvier 2018 consid. 4.1).

L'étranger est donc tenu de collaborer à la constatation des faits et en particulier de fournir des indications exactes et complètes sur les éléments déterminants pour la réglementation du séjour (art. 90 al. 1 let. a LEI). Il doit en particulier spontanément indiquer si la communauté conjugale sur laquelle son droit de séjour repose n'est plus effectivement vécue (arrêts du Tribunal fédéral 2C_814/2020 du 18 mars 2021 consid. 5.1 ; 2C_22/2019 du 26 mai 2020 consid. 4.1 ; 2C_176/2018 du 11 septembre 2018 consid. 3.1 ; 2C_148/2015 du 21 août 2015 consid. 5.1 ; 2C_299/2012 du 6 août 2012 consid. 4.1 ; 2C_15/2011 du 31 mai 2011 consid. 4.2.1). Un comportement trompeur est aussi donné si l'étranger a, durant la procédure d'octroi de l'autorisation de droit des étrangers, sciemment tu ou activement caché que l'union matrimoniale était vouée à l'échec, ou s'il invoque un mariage dénué de substance dès ses débuts, en ce sens que les époux (voire seulement l'un d'eux) n'ont jamais eu la volonté de former une véritable communauté conjugale (cf. ATF 127 II 49 consid. 4a et 5a ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_814/2020 du 18 mars 2021 consid. 5.1 ; 2C_900/2017 du 7 mai 2018 consid. 8.2 ; 2C_1055/2015 du 16 juin 2016 consid. 2.2).

Le silence ou l'information erronée doivent avoir été utilisés de manière intentionnelle dans le but d'obtenir une autorisation. Il en va d'autant plus ainsi que la tromperie n'a pas à être causale, en ce sens qu'il n'est pas nécessaire qu'elle ait joué un rôle décisif dans l'octroi de l'autorisation. En outre, il importe peu que l'autorité eût pu, en faisant preuve de la diligence nécessaire, découvrir par elle-même les faits dissimulés (arrêt du Tribunal fédéral 2C_420/2018 du 17 mai 2018 consid. 6.1 et l'arrêt cité).

En particulier, en ne mentionnant pas qu'il entretient une relation durable avec une autre personne, l'étranger cherche à tromper l'autorité sur le caractère stable de sa relation vécue en Suisse avec la personne lui donnant le droit d'obtenir une autorisation de séjour ou d'établissement, conformément aux art. 42 et 43 LEI. Il provoque ou maintient ainsi une fausse apparence de monogamie (arrêts du Tribunal fédéral 2C_61/2020 du 21 avril 2020 consid. 5.4 ; 2C_706/2015 du 24 mai 2016 consid. 3.2). La dissimulation d'une relation parallèle conduit donc à la révocation de l'autorisation, en application de l'art. 62 let. a LEI (par renvoi de l'art. 63 al. 1 let. a LEI, s'il est question d'autorisation d'établissement) (ATF 142 II 265 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_553/2020 du 20 octobre 2020 consid. 3.2 ; 2C_61/2020 du 21 avril 2020 consid. 5.4).

12.         La jurisprudence considère qu’en présence de déclarations contradictoires, la préférence doit en principe être accordée à celles que la personne concernée a données en premier lieu, alors qu'elle en ignorait les, les explications nouvelles pouvant être, consciemment ou non, le produit de réflexions ultérieures (ATA/1197/2021 du 9 novembre 2021 consid. 9 ; ATA/1038/2021 du 5 octobre 2021 consid. 8 ; cf. aussi ATF 142 V 590 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_728/2013 du 16 janvier 2014 consid. 4.1.2).

13.         En l’espèce, la recourante a épousé un ressortissant suisse en Thaïlande le 6 mars 2007 et est arrivée en Suisse le 21 juin 2007. Elle a ensuite bénéficié d’une autorisation de séjour, puis, dès le 24 septembre 2012, d’une autorisation d’établissement, toutes deux délivrées au titre du regroupement familial. Cela étant, il ressort du dossier, en particulier du procès-verbal de son audition du 20 décembre 2018 par la police, qu’à la date de délivrance de cette autorisation d’établissement, à tout le moins, la communauté conjugale qu'elle formait avec son époux n'était plus vécue.

A cet égard, il convient de rappeler que de tels procès-verbaux sont communiqués à l’OCPM et au SEM dans le cadre de l’assistance administrative et de l’obligation de communiquer prévues par la loi (cf. art. 97 LEI et 82 OASA ; cf. Directives et circulaires du SEM, Domaine des étrangers [ci-après : directives LEI], ch. 8.11 et 8.11.1, état au 1er novembre 2021). La décision attaquée ne repose dès lors pas sur des moyens de preuve obtenus illicitement.

En outre, lors de cette audition, la recourante était assistée tant par une traductrice réputée satisfaire à des exigences de formation professionnelle (cf. art. 4 al. et 12 RITPJ), que par son conseil. Le cas échéant, il lui aurait appartenu de prendre toutes les mesures nécessaires qu’imposaient les circonstances, afin de sauvegarder ses intérêts, qu'il s'agît de ne pas signer le procès-verbal ou de le faire en y mentionnant expressément les difficultés qu'elle avait pu rencontrer au cours de son audition. Il peut donc être tenu compte des déclarations qu'elle a faites à cette occasion. Au demeurant, il est pour le moins surprenant qu'elle conteste aujourd'hui uniquement la teneur de ses déclarations relatives à sa situation matrimoniale, et non celles ayant porté sur d'autres sujets.

La recourante a ainsi clairement indiqué, en bref, que cela faisait dix ans qu’elle ne vivait plus avec son époux (ce qui laisse ainsi entendre que leur communauté avait pris fin en 2008), qu’ils n’entretenaient plus de relation amoureuse, qu'elle avait vécu avec lui pendant seulement deux ans, même si son adresse était toujours enregistrée chez lui, qu'ils étaient (seulement) amis, même s'ils n’avaient jamais parlé de divorce, et qu'elle était en couple depuis trois ans avec M. E______, avec qui elle vivait.

A nouveau entendue par la police le 11 janvier 2019, elle a notamment déclaré que M. E______ était son compagnon, ce que ce dernier a confirmé, précisant qu’ils vivaient ensemble, ce qui ne l'empêchait pas d'avoir encore des liens avec la famille de son « ex-époux », qu’elle voyait pour les fêtes de fin d’année et pour les anniversaires.

Aucun élément ne justifie de s’écarter de ces déclarations, faites alors qu'elle en ignorait les conséquences juridiques, au profit de celles qu'elle a pu faire subséquemment, lesquelles n'apparaissent pas crédibles. Les huit copies de photographies produites, dont la plupart ont été prises durant la période des fêtes (not. 24 décembre 2009, 25 décembre 2010, 25 décembre et 1er janvier 2011, 23 décembre 2013, 14 et 15 décembre 2014) ne permettent pas non plus de remettre en cause ces déclarations. Elles ne sont en tout état pas de nature à prouver la réalité d’une union conjugale effectivement vécue à la date de la délivrance de son autorisation d’établissement. De même, compte tenu des liens personnels et professionnels qu’ils continuent d’entretenir, malgré leur séparation, le contenu du courrier du 7 septembre 2020 de son époux, qui allègue avoir vécu avec elle de 2007 à 2015, est à considérer avec précaution. Il ne saurait en tout état remettre en cause les déclarations circonstanciées qu'elle avait précédemment faites à la police. À ces éléments s’ajoutent ceux avancés par le SEM dans son courrier du 15 mai 2020.

Il apparaît ainsi qu’en omettant d’informer l’OCPM, d’une part, du fait que la communauté conjugale effectivement vécue avec son époux avait déjà pris fin lorsque l’autorisation d’établissement lui a été octroyée et, d’autre part, du fait qu’elle entretenait, à tout le moins depuis 2015, une relation durable avec M. E______, la recourante a cherché à tromper l’OCPM sur le caractère stable de sa relation avec son époux, ce qui réalise effectivement le motif de révocation prévu par l’art. 62 let. a LEI, par renvoi de l'art. 63 al. 1 let. a LEI.

14.         La révocation d'une autorisation d'établissement doit encore être proportionnée (art. 5 al. 2 Cst. ; art. 96 LEI ; art. 8 par. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 - CEDH - RS 0.101).

L'examen de la proportionnalité de la mesure imposé par l'art. 96 LEI se confondant avec celui qui est prévu à l'art. 8 par. 2 CEDH (cf. ATF 139 I 31 consid. 2.3.2 ; 135 II 377 consid. 4.3), il n'est pas nécessaire de se demander si la recourante peut se prévaloir de l'art. 8 par. 1 CEDH sous l'angle de la protection de son droit à la vie privée ou de la protection de son droit à une vie familiale (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_68/2020 du 30 avril 2020 consid. 5.1 ; 2C_754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 6.1) Quant à l'art. 5 al. 2 Cst., il est concrétisé par l'art. 96 LEI, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire un examen distinct de la proportionnalité sous cet angle (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_794/2020 du 31 août 2021 consid. 6.1 ; 2C_329/2020 du 10 juin 2020 consid. 7.1 ; 2C_68/2020 du 30 avril 2020 consid. 5.1 ; 2C_754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 6.1).

Dans le cadre de l'examen de la proportionnalité, il y a lieu de prendre en considération la gravité de l'éventuelle faute commise par l'étranger, son degré d'intégration, la durée de son séjour en Suisse et les conséquences d'un renvoi (cf. ATF 139 I 145 consid. 2.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1040/2019 du 9 mars 2020 consid. 5.1 ; 2C_338/2019 du 28 novembre 2019 consid. 5.3.3 et les arrêts cités).

L'importance de la durée du séjour doit toutefois être relativisée, lorsque cette durée a été rendue possible par de fausses déclarations ou par la dissimulation de faits essentiels et, partant, par un comportement contraire à l'ordre public suisse (arrêts du Tribunal fédéral 2C_553/2020 du 20 octobre 2020 consid. 4.1 ; 2C_1040/2019 du 9 mars 2020 consid. 5.1 ; 2C_338/2019 du 28 novembre 2019 consid. 5.3.3 ; 2C_261/2018 du 7 novembre 2018 consid. 5.2 ; 2C_176/2018 du 11 septembre 2018 consid. 5.2). En effet, dans un tel cas, c'est bien parce que l'étranger a fait de fausses déclarations ou qu'il a dissimulé des faits essentiels durant la procédure d'autorisation qu'il a pu séjourner (longuement) en Suisse. Il est donc légitime d'accorder, en pareilles circonstances, une importance moindre à la durée du séjour (arrêt du Tribunal fédéral 2C_553/2020 du 20 octobre 2020 consid. 4.2). Par ailleurs, lorsque l'étranger a pu s'intégrer à la faveur de titres de séjour obtenus en trompant les autorités, une bonne intégration ne pèse également qu'un faible poids dans la balance des intérêts à effectuer et ne peut en tout cas pas justifier à elle seule la prolongation du séjour en Suisse (arrêts du Tribunal fédéral 2C_553/2020 du 20 octobre 2020 consid. 4.2 ; 2C_1040/2019 du 9 mars 2020 consid. 5.1 ; 2C_754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 6.2 et les arrêts cités).

En particulier, la révocation d'une autorisation suite à la dissimulation d'une relation parallèle est une mesure qui sera en règle générale considérée comme étant proportionnée, sous réserve de circonstances particulières (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_553/2020 du 20 octobre 2020 consid. 4 ; 2C_706/2015 du 24 mai 2016 consid. 5, non publié in ATF 142 II 265).

15.         En l’espèce, cela fait quatorze ans que la recourante séjourne en Suisse, ce qui constitue une durée longue. Toutefois, ce critère ne revêt pas une importance décisive, puisque la recourante a obtenu l'autorisation d'établissement en ayant dissimulé des faits essentiels, étant même souligné que, selon ses propres déclarations, son union conjugale avait pris fin moins de deux après le mariage.

On ne se trouve en outre clairement pas dans le cas particulier récemment évoqué par le Tribunal fédéral, qui a jugé qu'une intégration qualifiée d'« excellente » pouvait jouer un rôle dans un cas où ladite intégration résultait non pas de la période passée en Suisse à la faveur d'un titre de séjour frauduleusement obtenu, mais des nombreuses années antérieures durant lesquelles l'étranger a séjourné et a travaillé régulièrement dans le pays (cf. arrêts 2C_1040/2019 du 9 mars 2020 consid. 5.1 ; 2C_338/2019 du 28 novembre 2019 consid. 5).

Si, en faveur de la recourante, il faut relever qu'elle n'a apparemment jamais fait l'objet de condamnation pénale, ni émargé à l'aide sociale et qu'elle semble avoir toujours travaillé, elle ne peut se prévaloir d'une ascension professionnelle telle qu'un retour dans son pays d'origine ne pourrait plus être exigé d’elle. Rien n'indique du reste qu'elle ne pourra pas y exercer l'activité qu'elle déploie actuellement à Genève. En outre, elle n’a pas justifié de son niveau de français et il n’apparaît pas que les liens qu’elle a créés en Suisse dépasseraient en intensité ce qui peut être raisonnablement attendu d’un étranger y ayant passé un nombre d'années équivalent. Elle ne peut du reste pas se prévaloir d’une intégration sociale exceptionnelle. Quoi qu’il en soit, une bonne intégration ne pèse qu'un faible poids dans la balance des intérêts en présence et elle ne peut pas justifier, à elle seule, la prolongation du séjour en Suisse, lorsque l'étranger a pu, comme en l'espèce, s'intégrer à la faveur d’un titre de séjour obtenu sur la base de dissimulation de fait essentiels.

Par ailleurs, la recourante est arrivée en Suisse à l’âge de 24 ans. Elle est née en Thaïlande, où elle a passé toute son enfance, son adolescence et une partie de sa vie d'adulte, soit les périodes cruciales pour l'intégration socio-culturelle. Elle a d'ailleurs visiblement conservé de fortes attaches avec sa patrie, où vivent à tout le moins ses parents et son fils. Elle a également sollicité des visas de retour, notamment les 30 décembre 2009, 8 août 2010 et 28 juin 2017, pour rendre visite à sa famille en Thaïlande et elle s’y est visiblement aussi rendue lors de l’ouverture de son salon de massage (fin 2015/début 2016), puis, selon ses propres déclarations, du 25 juin au 3 juillet 2019 et du 1er octobre 2019 au 13 janvier 2020. Désormais âgée de 38 ans, elle est encore jeune et en bonne santé. Dans ces circonstances, sa réintégration dans son pays d’origine ne devrait pas poser des problèmes insurmontables et il lui sera loisible de rester en contact avec son compagnon et son « époux » grâce aux nombreux moyens de communication disponibles et par des visites réciproques.

Il convient aussi de rappeler que celui qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (cf. ATF 123 II 248 consid. 4a ; 111 Ib 213 consid. 6b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1 ; 1C_269/2013 du 10 décembre 2013 consid. 4.1 et les références citées). Le fait que la recourante vive en Suisse depuis de nombreuses années, y ait créé et exploité une entreprise et s'y soit intégrée au fil du temps ne saurait dès lors revêtir une portée déterminante, sous peine d'encourager la politique du fait accompli et défavoriser les personnes qui remplissent les conditions nécessaires à l'obtention d'un titre de séjour et respectent les procédures prévues par la loi (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_458/2020 du 6 octobre 2020 consid. 7.3 ; 2C_61/2020 du 21 avril 2020 consid. 6.5 ; 2C_969/2017 du 2 juillet 2018 consid. 3.5 ; 2C_153/2018 du 25 juin 2018 consid. 5.5 ; 2C_473/2017 du 2 novembre 2017 consid. 3.2 ; 2C_877/2015 du 20 février 2017 consid. 4.3 ; 2C_1075/2015 du 28 avril 2016 consid. 4 in fine ; 2C_115/2016 du 31 mars 2016 consid. 6). Sous l'angle de l'intérêt public, il faut rappeler que le législateur suisse poursuit une politique migratoire restrictive et qu'il existe un intérêt public à ce que les règles sur le séjour qui en découlent soient respectées, afin que ce but ne soit vidé de sa substance. Il y a donc un intérêt public important à ce que des étrangers ne puissent être récompensés de leurs mensonges en pouvant conserver une autorisation de séjour qu'ils ont obtenue sur la base de fausses déclarations ou de la dissimulation de faits essentiels (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_553/2020 du 20 octobre 2020 consid. 4.7).

Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, il n'apparaît donc pas qu'en faisant primer l'intérêt public à l'éloignement de la recourante sur l'intérêt privé de celle-ci à pouvoir vivre en Suisse, l’autorité intimée ait violé le droit (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_553/2020 du 20 octobre 2020 consid. 4.8).

16.         Selon la jurisprudence, une rétrogradation au sens de l'art. 63 al. 2 LEI n'entre pas en considération lorsque les conditions d'une révocation de l'autorisation d'établissement sont réunies, c'est-à-dire lorsqu'il existe un motif de révocation au sens de l'art. 63 al. 1 LEI et que la mesure mettant fin au séjour est proportionnée. D'après le texte clair de la disposition, la rétrogradation n'est en effet admissible que lorsque les critères d'intégration de l'art. 58a LEI ne sont pas réunis et non pas lorsque la personne concernée a réalisé un motif de révocation et que le renvoi se révèle proportionné (arrêts du Tribunal fédéral 2C_264/2021 du 19 août 2021 consid. 5.2 ; 2C_268/2021 du 27 avril 2021 consid. 6 ; 2C_1040/2019 du 9 mars 2020 consid. 6.1 ; 2C_782/2019 du 10 février 2020 consid. 3.3.4 ; 2C_58/2019 du 31 janvier 2020 consid. 6.2 ; 2C_450/2019 du 5 septembre 2019 consid. 5.3 ; cf. également Rapport explicatif du 2 août 2018 sur la modification de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative [OASA; RS 142.201] relatif à la modification du 16 décembre 2016 de la loi fédérale sur les étrangers, p. 13 ad art. 62a OASA).

Dans ces conditions, il ne saurait être fait application de l'art. 63 al. 2 LEI. Partant, la conclusion subsidiaire de la recourante tendant à l’octroi d’une autorisation de séjour doit également être rejetée (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_1040/2019 du 9 mars 2020 consid. 6.2).

17.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

Le renvoi constitue la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande tendant à la délivrance ou la prolongation d'une autorisation de séjour, l'autorité ne disposant à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation (cf. ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a ; ATA/991/2020 du 6 octobre 2020 consid. 6b ; ATA/1798/2019 du 10 décembre 2019 consid. 6 ; ATA/1694/2019 du 19 novembre 2019 consid. 6).

18.         En l'espèce, dès lors qu'elle révoquait l'autorisation d'établissement de la recourante, l'autorité intimée devait en soi ordonner son renvoi de Suisse, aucun élément ne laissant pour le surplus supposer que l'exécution de cette mesure ne serait pas possible, pas licite ou qu'elle ne pourrait être raisonnablement exigée (cf. art. 83 LEI), ce qu'elle ne fait au demeurant pas valoir.

19.         Compte tenu de ce qui précède, le recours, mal fondé, doit être rejeté.

20.         Vu cette issue, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Cette dernière n'a pas droit à une indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA a contrario).

21.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 22 avril 2021 par Madame A______ contre la décision prise à son égard par le département de la sécurité, de la population et de la santé le 10 mars 2021 ;

2.             le rejette ;

3.             met un émolument de CHF 500.- à la charge de Madame A______, lequel est couvert par son avance de frais du même montant ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Yves JOLIAT

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

 

Genève, le

 

La greffière