Skip to main content

Décisions | Tribunal administratif de première instance

1 resultats
A/2244/2024

JTAPI/679/2024 du 05.07.2024 ( MC ) , CONFIRME

REJETE par ATA/890/2024

Descripteurs : MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS);DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION
Normes : LEI.69.al2; LEI.75.al1.leth; LEI.76.al1.letb.ch1; LEI.76.al1.letb.ch3; LEI.76.al1.letb.ch4; LEI.83.al4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2244/2024 MC

JTAPI/679/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 5 juillet 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Laure BAUMANN, avocate

 

contre



COMMISSAIRE DE POLICE

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1999, est originaire de Gambie. Il est en possession d'un passeport gambien valable et d'un permis de séjour italien échu (CASI SPECIALI) depuis le 8 août 2020.

2.             Depuis son arrivée en Suisse en 2021, il a été condamné à six reprises par les instances pénales genevoises, principalement pour des infractions à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) (séjour illégal), au code pénal suisse (vol – art. 139 al. 1 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), rupture de ban – art. 291 CP, dommages à la propriété – art. 144 CP) et à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) (art 19 al. 1 et 19a).

3.             Le Tribunal de police a prononcé l'expulsion de Suisse de M. A______ à trois reprises : le 28 mars 2022 pour une durée de 3 ans, le 11 janvier 2023 pour une durée de 5 ans, et le 15 avril 2024 pour une durée de 20 ans, en application des art. 66a bis et 66a CP.

4.             Le 31 mars 2022, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a décidé de ne pas reporter l'expulsion judiciaire de l'intéressé.

5.             M. A______, se prévalant de son orientation sexuelle pour faire obstacle à son renvoi de Suisse à destination de la Gambie, a contesté cette décision auprès de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice, laquelle a rejeté son recours par arrêt du 2 août 2022 (ACPR/1______).

6.             Par arrêt du 24 octobre 2023 (2______), le Tribunal fédéral a confirmé que l'expulsion judiciaire de l'intéressé de Suisse à destination de la Gambie ne devait pas être reportée. Selon la Haute Cour, l'homosexualité du recourant n'étant pas établie – sans que celui-ci démontre l'arbitraire de cette conclusion – il n'y avait pas lieu d'examiner plus avant les dangers auxquels seraient exposées les personnes homosexuelles en Gambie dont le recourant se prévalait.

7.             Le 27 avril 2022, l'OCPM a procédé à la saisie du document d'identité de l'intéressé (passeport gambien valable jusqu'au 24 février 2026) et simultanément, le commissaire de police a assigné M. A______ au territoire de la commune de B______ pour une durée de douze mois, le temps que les juridictions puissent trancher la question du report/non-report de l'expulsion de l'intéressé.

8.             Le 3 janvier 2024, M. A______ a été incarcéré à la prison de Champ-Dollon en vue de purger différentes peines privatives de liberté.

9.             Par ordonnance du 6 juin 2024, le Tribunal d'application des peines et des mesures a refusé la libération conditionnelle de M. A______. Cette juridiction a notamment retenu que la situation personnelle de l'intéressé demeurait inchangée et on ne percevait aucun effort du cité pour modifier sa situation, étant rappelé qu'il faisait l'objet de trois expulsion de Suisse pour une durée de 3, 5 et 20 ans. En particulier, aucun projet concret et étayé n'était présenté, de sorte que l'intéressé se retrouverait à sa sortie dans la même situation personnelle que celle ayant mené à ses dernières condamnations, à savoir en situation illégale en Suisse, sans travail, ni logement.

10.         Le 2 juillet 2024, à la fin de sa peine, les services de police ont conduit l'intéressé à l'aéroport de Genève, où une place à bord d'un vol à destination de la Gambie avait été réservée.

11.         M. A______ a refusé d'embarquer sur ledit vol arguant que du fait de son homosexualité, il était en danger dans son pays. Il a été mis à disposition du Ministère public sur ordre du commissaire de police pour infraction aux art. 291 CP, 292 CP et 286 CP.

12.         Dans le cadre de son audition, M. A______ a réitéré qu'il ne voulait pas retourner dans son pays d'origine en raison de son orientation sexuelle. S'agissant de sa situation personnelle, il a déclaré être démuni de moyens financiers, loger dans des foyers, avoir un oncle résidant dans le quartier C______.

13.         Le 3 juillet 2024, le Ministère public a entendu l'intéressé sans le condamner, les faits relatifs à son arrestation devant être joints à la procédure pénale ouverte le 17 mai 2024 (P/3______), actuellement en cours. Le Ministère public a ensuite libéré l'intéressé et l'a remis en mains des services de police.

14.         Le 3 juillet 2024, à 11h05, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de six mois.

L'organisation d'un vol de degré supérieur était actuellement à l'étude par les services de police. Selon les informations figurant sur l'EXTRANET du secrétariat d'État aux migrations (ci-après: SEM), le vol avec escorte policière n'était pas possible, la seule option envisageable restait le vol spécial. L'intéressé avait déjà été préinscrit/annoncé au SEM comme candidat potentiel sur un vol spécial depuis 2022, demande qui avait été renouvelée le 23 mai 2024.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi en Gambie.

15.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour.

16.         Par courriel du même jour, le commissaire de police a informé le tribunal qu'une demande de réadmission concernant l'intéressé avait été formulée auprès des autorités italiennes.

17.         Entendu le 4 juillet 2024 par le tribunal, M. A______ a déclaré qu'il n'était pas d'accord de retourner en Gambie, mais qu'il ne serait pas opposé à son renvoi vers l'Italie. Il s'opposait à retourner en Gambie en raison de son homosexualité. Son pays d'origine était musulman et les homosexuels n'y étaient pas bien vus. Il risquait ainsi d'être mis en prison et même d'être tué pour cette raison.

Le conseil de l'intéressé a remis au tribunal un flyer de l'association Asile LGBT ainsi qu'une capture d'écran du site internet Dialogai.org que lui avait remis son client lors de sa visite à FAVRA. Celui-ci lui avait en effet indiqué qu'il comptait demander l'aide de ces organismes.

M. A______ a expliqué qu'il n'avait plus de proches en Gambie. Son père vivait en Allemagne, sa mère était décédée et il avait un frère qui habitait la Gambie. Depuis que son père et son frère avaient appris son homosexualité, ils l'avaient chassé de leur vie. Il avait vécu cinq années en Sicile où il avait encore des amis. Il les contacterait pour leur demander s'ils pouvaient l'aider dans ses démarches visant le renouvellement de son autorisation de séjour. Il avait fait renouveler son passeport gambien en 2021 depuis la Suisse dans le but de demander la prolongation de son autorisation de séjour en Italie. Un passeport valable était en effet nécessaire pour retourner en Italie. Il n'y était toutefois pas retourné car il n'avait pas les moyens pour entreprendre ce voyage.

Le représentant du commissaire de police a expliqué qu'ils avaient initié des démarches le 3 juillet 2024, auprès des autorités italiennes afin de leur demander s'ils seraient d'accord de réadmettre M. A______ sur leur territoire. Il a relevé que les chances d'une réponse positive étaient faibles dès lors que l'autorisation de séjour italienne de l'intéressé était échue depuis quatre ans et que M. A______ n'avait entrepris aucune démarche pour solliciter le renouvellement de son autorisation. Quoi qu'il en fût, une réponse des autorités italiennes ne devrait pas intervenir avant une dizaine de jours.

L'ordre de mise en détention était prononcé pour une durée de six mois, dès lors que tout restait à faire pour organiser un vol spécial à destination de la Gambie. En particulier, l'autorisation de ce pays devrait être obtenue, il conviendrait également d'affréter un avion et de réunir, avec l'aide des cantons, un nombre suffisant de candidats au renvoi dans ce pays, pour des questions de coûts. Si le nombre nécessaire de candidats ne pouvait être trouvé, il devrait être envisagé d'organiser un vol FRONTEX chargé de rapatrier des candidats au retour depuis différents pays européens.

Ainsi à ce stade, ils n'avaient aucune visibilité concernant la date à laquelle le refoulement de M. A______ pourrait être exécuté. Il a ajouté que les vols sous escorte policière à destination de la Gambie n'étaient pas possibles. En revanche, si M. A______ était volontaire à son refoulement, un vol pourrait être organisé dans la semaine puisque celui-ci était au bénéfice d'un passeport valable.

Pour le surplus, il a conclu à la confirmation de l’ordre de mise en détention administrative prononcé à l’encontre de M. A______ le 3 juillet 2024 pour une durée de six mois.

L'avocate de l’intéressé a conclu, principalement à l’annulation de l’ordre de mise en détention administrative et à sa mise en liberté immédiate ; subsidiairement à sa libération et au prononcé d'une mesure d'assignation à territoire et encore plus subsidiairement, à la réduction de la durée de la détention à un mois et enfin, à l'allocation d'une indemnité de procédure de CHF 880.-.

EN DROIT

1.            Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner d'office la légalité et l’adéquation de la détention administrative en vue de renvoi ou d’expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d de loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

Il doit y procéder dans les nonante-six heures qui suivent l'ordre de mise en détention (art. 80 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr ; 9 al. 3 LaLEtr).

2.            En l'espèce, le tribunal a été valablement saisi et respecte le délai précité en statuant ce jour, la détention administrative ayant débuté le 3 juillet 2024 à 10h50.

3.            Si l'étranger a la possibilité de se rendre légalement dans plusieurs États, l'autorité compétente peut le renvoyer ou l'expulser dans le pays de son choix (art. 69 al. 2 LEI). La possibilité de choisir le pays de destination présuppose toutefois que l'étranger ait la possibilité de se rendre de manière effective et admissible dans chacun des pays concernés par son choix. Cela implique qu'il se trouve en possession des titres de voyage nécessaires et que le transport soit garanti (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_285/2013 du 23 avril 2013 consid. 7 ; 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 6 ; ATA/324/2013 du 24 mai 2013 ; ATA/157/2013 du 7 mars 2013 ; ATA/58/2013 du 31 janvier 2013). Le renvoi ou l'expulsion dans un pays tiers du choix de l'étranger constitue par ailleurs seulement une faculté (« peut ») de l'autorité compétente (arrêt du Tribunal fédéral 2C_285/2013 du 23 avril 2013 consid. 7 ; cf. également arrêts 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 6 ; 2C_393/2009 du 6 juillet 2009 consid. 3.4). Le renvoi ou l'expulsion dans le pays souhaité par la personne concernée doit être non seulement légalement possible, mais encore concrètement réalisable en temps utile. S'il est déjà possible de renvoyer ou d'expulser l'intéressé vers un Etat déterminé, il n'y a pas lieu d'attendre de l'autorité qu'elle procède à des démarches supplémentaires relatives à une autre destination (cf. Danièle REVEY in Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE [éd.], Code annoté de droit des migrations, vol. II [Loi sur les étrangers], 2017, n. 11 p. 698).

4.            En l'espèce, M. A______ ne démontre, à ce stade, pas être légitimé à se rendre valablement dans un autre pays, tel que l'Italie que dans son pays d'origine. La préparation de l'exécution de son expulsion à destination de la Gambie, seul pays dans lequel il est légalement autorisé à se rendre, ne prête donc pas le flanc à la critique en l'état du dossier, sous réserve du résultat des démarches en cours auprès des autorités italiennes initiées par les autorités.

5.            La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (cf. ATF 135 II 105 consid. 2.2.1) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.1 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.1).

6.            L'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, renvoyant à l'art. 75 al. 1 let. h de cette même loi, dispose qu’après notification d’une décision de première instance de renvoi ou d’expulsion au sens de la présente loi ou d’une décision de première instance d’expulsion obligatoire au sens des art. 66a ou 66abis CP ou 49a ou 49abis CPM, l'autorité compétente peut, afin d’en assurer l’exécution, mettre en détention la personne concernée qui a été condamnée pour crime, par quoi il faut entendre une infraction passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (cf. art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a ; ATA/997/2016 du 23 novembre 2016 consid. 4a ; ATA/295/2011 du 12 mai 2011 consid. 4).

7.            Une mise en détention administrative est aussi possible si des éléments concrets font craindre que la personne concernée entende se soustraire au renvoi ou à l'expulsion, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEI).

8.            Ces deux dispositions décrivent toutes deux des comportements permettant de conclure à l'existence d'un risque de fuite ou de disparition, de sorte que les deux éléments doivent être envisagés ensemble (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1 ; ATA/740/2015 du 16 juillet 2015 ; ATA/943/2014 du 28 novembre 2014 ; ATA/616/2014 du 7 août 2014).

Selon la jurisprudence, un risque de fuite - c'est-à-dire la réalisation de l'un des deux motifs précités - existe notamment lorsque l'étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité, qu'il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine. Comme le prévoit expressément l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI, il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.2 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.2 ; 2C_658/2014 du 7 août 2014 consid. 1.2).

Lorsqu'il existe un risque de fuite, le juge de la détention administrative doit établir un pronostic en déterminant s'il existe des garanties que l'étranger prêtera son concours à l'exécution du refoulement, soit qu'il se conformera aux instructions de l'autorité et regagnera son pays d'origine le moment venu, c'est-à-dire lorsque les conditions seront réunies ; dans ce cadre, il dispose d'une certaine marge d'appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 3.3 ; 2C_806/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 2C_400/2009 du 16 juillet 2009 consid. 3.1 ; ATA/740/2015 du 16 juillet 2015 ; ATA/739/2015 du 16 juillet 2015 ; ATA/682/2015 du 25 juin 2015 ; ATA/261/2013 du 25 avril 2013 ; ATA/40/2011 du 25 janvier 2011).

9.            Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l’accord de l’autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l’obtention des documents nécessaires au départ auprès d’un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).

10.        Comme toute mesure étatique, la détention administrative en matière de droit des étrangers doit respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst. et art. 80 et 96 LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Elle doit non seulement apparaître proportionnée dans sa durée, envisagée dans son ensemble (ATF 145 II 313 consid. 3.5 ; 140 II 409 consid. 2.1 ; 135 II 105 consid. 2.2.1), mais il convient également d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si elle constitue une mesure appropriée et nécessaire en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi ou d'une expulsion (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 143 I 147 consid. 3.1 ; 142 I 135 consid. 4.1 ; 134 I 92 consid. 2.3 ; 133 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_672/2019 du 22 août 2019 consid. 5.4 ; 2C_263/2019 du 27 juin 2019 consid. 4.1 ; 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi ou de l'expulsion de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées ; cf. aussi ATF 130 II 425 consid. 5.2).

11.        Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEI ; « principe de célérité ou de diligence »). Il s'agit d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; ATA/611/2021 du 8 juin 2021 consid. 5a ; ATA/1367/2020 du 24 décembre 2020 consid. 7 et les références citées).

12.        En l’espèce, M. A______ fait l’objet de trois décisions d’expulsion judiciaire de Suisse prononcées par le Tribunal de police, la première le 28 mars 2022 pour une durée de 3 ans, la deuxième le 11 janvier 2023 pour une durée de 5 ans et la troisième le 15 avril 2024, pour une durée de 20 ans, décisions qu’il n’a pas respectées.

Il a par ailleurs été condamné à plusieurs reprises pour vol, soit un crime au sens de l'art. 10 al. 2 CP.

En outre, il a exprimé catégoriquement son opposition à son renvoi en Gambie en refusant d'embarquer le 2 juillet 2024 à bord d'un vol à destination de son pays d'origine, puis devant le commissaire de police et également devant le tribunal de céans. Il n'a par ailleurs aucune source de revenu licite ni aucune attache à Genève. Au vu de ces éléments, on peut admettre l'existence d'un risque réel et concret que, s'il était libéré à présent, il n'obtempérerait pas aux instructions de l'autorité lorsque celle-ci lui ordonnera de monter à bord de l'avion devant le reconduire dans son pays et qu'il pourra être amené à disparaître dans la clandestinité, situation visée par le motif de détention prévu par l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI (cf. ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.2 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.2 ; 2C_658/2014 du 7 août 2014 consid. 1.2).

Sa détention administrative se justifie par conséquent sur la base des art. 76 al. 1 let. b ch. 1 en lien avec l'art. 75 al. 1 let. h et 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI.

L'assurance de son départ de Suisse répond par ailleurs à un intérêt public certain et toute autre mesure moins incisive que la détention administrative serait vaine pour assurer sa présence lorsqu'il devra monter dans l’avion devant le reconduire dans son pays d’origine, étant relevé que l’intéressé a opposé un refus catégorique à son renvoi en Gambie, n’a ni résidence fixe ni source légale de revenu en Suisse et que les autorités suisses doivent s'assurer du fait qu'il quittera effectivement le territoire (cf. not. art. 8 par. 6 de la Directive sur le retour et 15f de l'ordonnance sur l'exécution du renvoi et de l'expulsion d'étrangers du 11 août 1999 - OERE - RS 142.281). Dès lors, une assignation à territoire n’est pas envisageable car le risque que l’intéressé disparaisse dans la clandestinité comme vu précédemment est élevé et ne peut être pris.

Concernant les démarches entreprises, l'autorité chargée du renvoi a agi avec célérité, dès lors qu'elle avait réservé une place à bord d'un vol à destination de Banjul prévu le 2 juillet 2024 alors que l'intéressé était encore détenu pénalement.

Depuis, les démarches en vue de l'organisation du refoulement de M. A______ par vol spécial ont été initiées et aucun élément ne permet aujourd'hui de douter que les autorités les poursuivront avec assiduité. Quant au grief selon lequel les autorités auraient tardé à s'adresser aux autorités italiennes en vue d'une éventuelle réadmission, il est particulièrement mal venu de la part de l'intéressé qui a laissé venir à échéance son autorisation de séjour depuis 2020, sans tenter de la faire renouveler, alors qu'il se savait faire l'objet d'une mesure d'expulsion de Suisse (la première) prononcée en mars 2022.

Le principe de célérité est dès lors respecté.

13.        Concernant la durée de la détention de six mois, elle respecte le cadre légal et si elle apparait certes longue, elle est en l'état nécessaire compte tenu des démarches à accomplir par les autorités en vue de l'organisation d'un vol spécial à destination de la Gambie, laquelle demande davantage de préparatifs que celle d'un vol ordinaire avec ou sans escorte policière, étant rappelé que cette période d'attente découle directement du comportement de l’intéressé, à savoir son refus de monter à bord du vol du 2 juillet 2024. Il sera rappelé au surplus que la durée de cette détention pourrait être grandement écourtée si M. A______ se déclarait volontaire pour repartir dans son pays.

14.        L'art. 80 al. 6 let. a LEI prévoit que la détention est levée notamment lorsque l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles.

Dans ce cas, la détention dans l'attente de l'expulsion ne peut en effet plus être justifiée par une procédure d'éloignement en cours; elle est, de plus, contraire à l'art. 5 par. 1 let. f CEDH (cf. ATF 130 II 56 consid. 4.1.1; arrêt 2C_216/2023 du 22 juin 2023 consid. 6.1 et les arrêts cités). Il s'agit d'évaluer la possibilité d'exécuter la décision de renvoi en fonction des circonstances de chaque cas d'espèce. Le facteur décisif est de savoir si l'exécution de la mesure d'éloignement semble possible dans un délai prévisible, respectivement raisonnable avec une probabilité suffisante (arrêts 2C_468/2022 du 7 juillet 2022 consid. 4.1; 2C_233/2022 du 12 avril 2022 consid. 4.3.1; 2C_984/2020 du 7 janvier 2021 consid. 4.1; 2C_955/2020 du 10 décembre 2020 consid. 5.1; 2C_634/2020 du 3 septembre 2020 consid. 6.1). Sous l'angle de l'art. 80 al. 6 let. a LEI, la détention ne doit être levée que si la possibilité de procéder à l'expulsion est inexistante ou hautement improbable et purement théorique, mais pas s'il y a une chance sérieuse, bien que mince, d'y procéder (cf. ATF 130 II 56 consid. 4.1; arrêt 2C_468/2022 du 7 juillet 2022 consid. 4.1 et les arrêts cités).

15.        Selon l'art. 83 al. 4 LEI, l'exécution de la décision de renvoi peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale. Une mise en danger concrète de l'intéressé en cas de retour dans son pays d'origine peut ainsi constituer une raison rendant impossible l'exécution du renvoi (cf. ATF 125 II 217 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_672/2019 du 22 août 2020 consid. 5.1 ; 2C_672/2019 du 22 août 2019 consid. 5.1 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 3.1).

16.        De jurisprudence constante, en matière de mesures de contrainte, la procédure liée à la détention administrative ne permet pas, sauf cas exceptionnels, de remettre en cause le caractère licite de la décision de renvoi ou d'expulsion (ATF 129 I 139 consid. 4.3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_672/2019 du 22 août 2020 consid. 5.1 ; 2C_932/2017 du 27 novembre 2017 consid. 3.2 ; 2C_47/2017 du 9 février 2017 consid. 5.2). Les objections y relatives doivent être invoquées et examinées par les autorités compétentes lors des procédures ad hoc et ce n'est que si cette décision apparaît manifestement inadmissible, soit arbitraire ou nulle, qu'il est justifié de lever la détention en application de l'art. 80 al. 6 let. a LEI, étant donné que l'exécution d'un tel ordre illicite ne doit pas être assurée par les mesures de contrainte (arrêts du Tribunal fédéral 2C_672/2019 du 22 août 2020 consid. 5.1 ; 2C_672/2019 du 22 août 2019 consid. 5.1 ; 2C_383/2017 du 26 avril 2017 consid. 3 ; 2C_47/2017 du 9 février 2017 consid. 5.2 ; 2C_1178/2016 du 3 janvier 2017 consid. 4.2 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 7 ; 2C_206/2014 du 4 mars 2014 consid. 3).

17.        M. A______ fait valoir que l'exécution de son expulsion à destination de la Gambie serait illicite, dès lors qu'en raison de son orientation sexuelle, il serait exposé au risque de subir de mauvais traitements dans son pays d'origine.

18.        En l'espèce, en sa qualité de juge de la détention, le tribunal ne peut que constater et prendre en compte le fait que M. A______ ne dispose pas de statut en Suisse et qu'il fait (notamment) l'objet de décisions judiciaires d'expulsion définitives et exécutoires.

De plus, la chambre pénale de recours a considéré, après un examen circonstancié de sa situation, que le non-report de l'exécution de son expulsion décidé par l'OCPM était fondé, ce que le Tribunal fédéral a confirmé ; la Haute Cour ayant souligné que M. A______ n'avait pas établi son homosexualité. Or, devant le tribunal, M. A______ n'établit nullement que ces décisions seraient nulles ou entachées d'arbitraire, la production d'un flyer d'une association venant en aide aux réfugiés LGBT+ et d'une capture d'écran du site d'un organisme engagé en faveur des mêmes personnes ne permettant pas une autre conclusion. Il s'ensuit que les motifs dont il se prévaut à nouveau ici, déjà examinés par l'autorité compétente, sont irrecevables et, partant, ne sauraient être à nouveau examinés (cf. not. arrêt du Tribunal fédéral 2C_206/2014 du 4 mars 2014 consid. 3).

19.        Partant, l'impossibilité du renvoi n'apparaît pas patente et ne peut être prise en compte par le tribunal, en sa qualité de juge de la détention (cf. not. ATA/88/2012 du 15 février 2012 consid. 6 ; ATA/449/2011 du 20 juillet 2011 consid. 5).

20.        M. A______ prétend que sa détention devrait être levée dès lors que l'exécution de la mesure d'éloignement n'est pas possible dans un délai prévisible.

21.        Le tribunal ne saurait suivre cette argumentation. En effet, il faut tout d’abord relever que ce n'est qu'en raison du refus de l'intéressé de quitter la Suisse volontairement que l'organisation de son refoulement par vol spécial a été initiée. De plus, à ce stade aucun élément ne permet de considérer que ce vol ne pourra pas être organisé dans un délai prévisible, les autorités gambiennes n'ayant à ce sujet pas exprimé leur opposition.

22.        Au vu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer l'ordre de mise en détention administrative de M. A______ pour une durée six mois.

23.        Vu l'issue de la procédure, il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure.

24.        Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             confirme l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 3 juillet 2024 à l’encontre de Monsieur A______ pour une durée de six mois, soit jusqu'au 2 janvier 2025, inclus ;

2.             dit qu’il n'est pas alloué d’indemnité de procédure ;

3.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière