Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/952/2024 du 20.08.2024 sur JTAPI/170/2024 ( LDTR ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/3222/2023-LDTR ATA/952/2024 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 20 août 2024 3ème section |
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dans la cause
A______ recourant
représenté par Me Christian LUSCHER, avocat
contre
DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE intimé
_________
Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 février 2024 (JTAPI/170/2024)
A. a. A______ est propriétaire d'un immeuble situé sur la parcelle n° 1______, feuille 14, de la commune de D______, à l'adresse B______, dans lequel il loue depuis le 1er décembre 2015 un appartement de six pièces, situé au rez-de-chaussée, à C______ (ci-après : les époux C______).
Selon l’état des lieux d’entrée du 30 novembre 2015, de nombreux éléments vérifiés étaient neufs. À la cuisine, il s’agissait du sol (carrelage), des murs (carrelage et peinture), des radiateurs, du plafond (plâtre), du plan de travail, de l’évier, de la robinetterie, de la cuisinière, du four, de la hotte aspirante, des meubles, des fenêtres, de(s) porte(s), des interrupteurs et des prises. Dans le séjour, étaient neufs le sol (parquet bois), les murs (papier peint), les radiateurs, le plafond, les fenêtres et le(s) porte(s). Dans le hall, étaient décrits comme neufs le sol (carrelage), les murs (papier peint) et le plafond (plâtre). S’agissant des WC, étaient décrits comme neufs le sol (carrelage), les murs (carrelage), le plafond (plâtre), les WC, le lavabo la robinetterie, le miroir et la porte. Étaient neufs dans la salle de bains le sol (carrelage), les murs (carrelage), le radiateur, le plafond (plâtre), la baignoire, les WC, le lavabo, la robinetterie, divers accessoires et la porte. Dans les quatre chambres, les sols (parquets bois), les murs (papiers peints), les radiateurs, les plafonds (plâtre), les fenêtres et les portes étaient neufs. Il en allait de même dans deux d’entre elles des stores. Étaient neufs dans la seconde salle de bains douche le sol (carrelage), les murs (carrelage), le plafond (plâtre), la douche, le lavabo, la robinetterie, divers accessoires et la porte. Enfin, dans le couloir, le sol (parquet bois), les murs (papier peint), le radiateur, le plafond (plâtre) étaient neufs, ainsi qu’une armoire à neuf portes.
b. Par requête formée auprès de la Commission de conciliation en matière de baux et loyers en date du 6 janvier 2021, dûment introduite ultérieurement, les époux C______ ont agi en fixation judiciaire de loyer, se prévalant de sa nullité initiale consécutive à la rénovation complète de leur l'appartement, sans que le propriétaire ne sollicitât l'autorisation nécessaire. La cause est actuellement suspendue en première instance, jusqu'à droit jugé sur la question de l'éventuelle application de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20).
B. a.
c. Le 18 mars 2021, les époux C______ ont informé le département du territoire (ci‑après : DT ou le département) que les travaux susvisés avaient été effectués avant leur emménagement. Ils les ont décrits et ont produit diverses photographies à l’office des autorisations de construire (ci-après : OAC).
d. Le 8 août 2023, le département a informé A______ que l'un des appartements de son immeuble semblait avoir fait l'objet de travaux, ce qui pouvait constituer une infraction à la LDTR ainsi qu'à la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05). Un délai lui était imparti pour se prononcer.
e. A______ a répondu le 5 septembre 2023, fournissant la liste des travaux d'entretien effectués dans l'appartement occupé par les époux C______ avant leur entrée.
f. Par courrier du 22 septembre 2023, le département a informé A______ qu'il considérait que les travaux entrepris étaient susceptibles d'être assujettis à la LCI ainsi qu'à la LDTR et lui a ordonné de requérir une autorisation de construire afin de pouvoir statuer à ce sujet. À cette fin, A______ devait indiquer sur le formulaire de requête détaillant son projet « Demande de régularisation I-8146 », toutes mesures ou sanctions étant pour le surplus réservées. Une voie de recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) était indiquée, de même qu’un délai de recours de dix jours.
B. a. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance contre cette décision le 5 octobre 2023, considérant que la jurisprudence selon laquelle l'ordre donné par le département de déposer une requête en autorisation de construire était une décision incidente devait être modifiée car elle conduisait à une inversion des règles procédurales et matérielles en matière de travaux d'entretien réalisés dans un appartement en cas de changement de locataire. Il fallait distinguer l'ordre de demander une autorisation (qui était final) et la soumission ou non à autorisation d'autre part (qui, au départ, était incident, pour, après coup, devenir final). Cette jurisprudence ne tenait en outre pas compte du fait qu'un tel ordre était contraignant et irréversible, conduisant au dépôt d'une demande à laquelle un numéro d'APA était attribué, et que cette procédure existerait éternellement. De plus, les frais prélevés par le département n'étaient jamais remboursés. À titre subsidiaire, la décision lui causait un préjudice irréparable puisqu'en pratique, une fois le dossier déposé, le département considérait toujours que les travaux étaient des travaux de rénovation, et donc soumis à autorisation. En conséquence, tout travail d'entretien dans un appartement changeant de locataire était présumé nécessiter une autorisation et cette pratique était de nature à décourager cette activité. Enfin, l'admission du recours pouvait conduire immédiatement à une décision finale permettant d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse, si le tribunal mettait fin à la procédure en admettant que les travaux réalisés étaient exclusivement des travaux d'entretien, sans modifier l'affectation, ni le confort de l'appartement, et donc non soumis à autorisation.
b. Le département a conclu à l'irrecevabilité du recours, après avoir produit son dossier. Bien que contraignante et irréversible, la décision du 22 septembre 2023 ne mettait pas fin à la procédure puisqu'elle ne tranchait pas définitivement la question de fond, soit la nature des travaux entrepris et leur soumission ou non à autorisation.
c. Par jugement du 27 février 2024, le TAPI a déclaré irrecevable le recours de A______. Il s’était vu notifier une décision lui ordonnant de déposer une demande d'autorisation de construire afin de permettre à l'autorité intimée de statuer sur l'assujettissement ou non à la LCI et à la LDTR des travaux litigieux. Conformément à une jurisprudence bien établie, confirmée récemment par le Tribunal fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 1C_66/2023 du 23 février 2023 publié in Droit de la Construction 5/2023 p. 292), une telle décision devait être qualifiée d'incidente, nonobstant les arguments soulevés par le recourant. Le reproche qu'il adressait à l'autorité intimée, selon lequel celle-ci aurait déjà décidé de soumettre les travaux litigieux à la LDTR, ne constituait qu'une supposition. En tout état, même s'il s'agissait effectivement de la position déjà arrêtée par le département, celui-ci devait encore la formaliser par une décision subséquente, susceptible de recours. La décision litigieuse était donc bien incidente. L’obligation de constituer un dossier dans le cadre d'une procédure d'autorisation de construire ne causait pas un préjudice irréparable. Eu égard à la seconde hypothèse de l'art. 57 let. c LPA, aucun élément ne permettait de retenir que la procédure d'autorisation de construire nécessiterait des mesures probatoires prenant un temps considérable et exigeant des frais importants. La constitution du dossier d'autorisation devrait être rapide et la procédure devrait pouvoir être instruite de manière simplifiée par la voie de la procédure accélérée, de sorte que la procédure d'autorisation ne devrait pas présenter pour le recourant des inconvénients tels que définis par la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 1C_470/2008 du 11 novembre 2008 consid. 2.3). Cette seconde hypothèse n'était ainsi pas réalisée.
C. a. Par acte déposé le 11 mars 2024, A______ a recouru contre ce jugement auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) en concluant à son annulation, à l'annulation de la décision I-8146 du 22 septembre 2023, à la clôture de la procédure ouverte à cette occasion et au versement d'une indemnité de procédure en sa faveur. Il entendait obtenir un changement de jurisprudence et reprenait les arguments développés devant le TAPI. Selon lui, la décision entreprise était finale car l'ordre concret de demander une autorisation ne permettait au département, ultérieurement, que de considérer que les travaux concernés étaient, ou n'étaient pas, soumis à autorisation. Par conséquent, il fallait distinguer cet ordre, final, de la soumission ou non à autorisation. Cet ordre était également final en tant qu'il ne serait jamais annulé et que l'OAC prélevait des frais pour l'examen de la requête, émolument qui constituait la preuve que l'ordre de demander une autorisation était final. Il fallait en conséquence modifier la jurisprudence récente, résultant de l'ATA/1548/2017 du 28 novembre 2017 de la chambre administrative, qui ne tenait pas compte de ces éléments. À supposer que la chambre administrative confirme le caractère incident de la décision querellée, le recourant subissait un préjudice irréparable du fait de l'obligation de déposer une requête en autorisation de construire, qui entérinait implicitement la conclusion de l'OAC de la soumission de tous travaux dans un appartement à la LDTR et à la LCI. Enfin, ne pas admettre un contrôle immédiat de la décision querellée entrainait l’ouverture d’une autre procédure administrative impliquant un traitement long et coûteux, pour des faits déjà anciens, alors que la chambre administrative pouvait arriver à la conclusion que les travaux d'entretien en cause ne nécessitaient pas d'autorisation. Il sollicitait en conséquence également une modification de la jurisprudence au regard de l'application de l’art. 57 let. c LPA, dont les conditions étaient réunies.
b. Le département a conclu au rejet du recours. Le TAPI avait constaté à juste titre qu'un ordre de déposer une demande d'autorisation de construire n'était pas une décision qui tendait à amener l'autorité à se prononcer sur une problématique juridique puisqu'il fallait au préalable qu'un dossier complet soit constitué, la décision finale n'intervenant qu'ultérieurement. Bien que contraignante, la décision querellée n’avait pas pour vocation de mettre un terme à la procédure, le département devant encore se prononcer sur l'assujettissement des travaux à une demande de construire. L'attribution d'un numéro de dossier n'avait pour valeur que de permettre l'identification de la procédure et la perception d'un émolument n'avait pas plus d'effet sur la qualification de la décision, étant précisé qu'aucun émolument n'était exigé lorsqu'un dossier n'était pas soumis à autorisation, ces deux questions étant toutefois étrangères à l'objet dont la chambre administrative était saisie.
c. Le recourant a persisté dans sa volonté d'obtenir un changement de jurisprudence et dans ses conclusions.
d. Les parties ont été informées le 25 avril 2024 que la cause était gardée à juger.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).
2. Le recourant considère que la décision de l’autorité intimée du 22 septembre 2023 constituerait une décision finale et, si tel n'était pas le cas, que les conditions de l'art. 57 let. c LPA seraient réunies, sollicitant sur ces sujets un changement de jurisprudence.
2.1 Un changement de jurisprudence ne se justifie en principe que lorsque la nouvelle solution procède d'une meilleure compréhension de la ratio legis de la norme à appliquer, repose sur des circonstances de fait modifiées ou répond à l'évolution des conceptions juridiques ; sinon, la pratique en cours doit être maintenue. Un revirement de jurisprudence doit par conséquent reposer sur des motifs sérieux et objectifs qui, dans l'intérêt de la sécurité du droit, doivent être d'autant plus importants que la pratique considérée comme erronée, ou désormais inadaptée aux circonstances, est ancienne (ATF 145 III 303 consid. 4.1.2 ; 145 I 227 consid. 4).
2.2.1 La décision administrative est définie, en procédure administrative genevoise, à l’art. 4 al. 1 LPA. Il s’agit d’une mesure individuelle et concrète, prise par l’autorité dans les cas d’espèce fondée sur le droit public fédéral, cantonal, communal et ayant pour objet, notamment, de créer, modifier ou annuler des droits ou obligations (let. a).
2.2.2 En droit genevois, la notion de décision est calquée sur le droit fédéral. Il ne suffit pas que l'acte querellé ait des effets juridiques, encore faut-il que celui-ci vise des effets juridiques. Sa caractéristique en tant qu'acte juridique unilatéral tend à modifier la situation juridique de l'administré par la volonté de l'autorité, mais sur la base de et conformément à la loi. La décision a pour objet de régler une situation juridique, c'est-à-dire de déterminer les droits et obligations de sujets de droit en tant que tels.
2.2.3 Constitue une décision finale, celle qui met un point final à la procédure, qu’il s’agisse d’une décision sur le fond ou d’une décision qui clôt l’affaire en raison d’un motif tiré des règles de la procédure (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 256 n. 2.2.4.2 ; ATA/521/2020 du 26 mai 2020 consid. 3b). Est en revanche une décision incidente, celle qui est prise pendant le cours de la procédure et ne représente qu’une étape vers la décision finale (ATA/521/2020 du 26 mai 2020 consid. 3b et les arrêts cités) ; elle peut avoir pour objet une question formelle ou matérielle, jugée préalablement à la décision finale (ATF 139 V 42 consid. 2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_567/2016 et 2C_568/2016 du 10 août 2017 consid. 1.3).
2.2.4 La chambre administrative a précisé à plusieurs reprises la nature de la décision du département par laquelle il ordonne de requérir une autorisation de construire, en application de la jurisprudence du Tribunal fédéral (1C_278/2017 du 10 octobre 2017 consid. 2.2 ; ATA/878/2023 du 22 août 2023 ; ATA/957/2020 du 29 septembre 2020 ; ATA/1548/2017 du 28 novembre 2017 ; ATA/362/2017 du 28 mars 2017 ; ATA/526/2016 et ATA/527/2016 du 21 juin 2016). Ainsi, et contrairement aux allégués du recourant, la nature incidente de la décision d'ordonner le dépôt d'une requête en autorisation de construire est ancienne et a été régulièrement confirmée par le Tribunal fédéral (1C_278/2017 du 10 octobre 2017 ; 1C_390/2016 du 5 septembre 2016 consid. 2.2 ; 1C_386/2013 du 28 février 2014 ; 1C_470/2008 du 11 novembre 2008 consid. 2.2).
Il ressort de cette jurisprudence que ne peut être considérée comme finale une décision qui ordonne de déposer une requête d'autorisation de construire relative à des travaux non autorisés constatés par le département. Celui-ci, suite au constat fait, ouvre une procédure administrative qui prendra fin par une décision qui pourra soit constater, sur la base du dossier complet, que les travaux ne sont pas soumis à une autorisation, soit dire que ceux-ci sont soumis à autorisation et accorder ou refuser cette autorisation. La décision litigieuse ne met donc pas fin à la procédure mais constitue une simple étape dans le cours de celle-ci. Le Tribunal fédéral l'a encore confirmé récemment, dans une cause tessinoise (arrêt du Tribunal fédéral 1C_66/2023 du 23 février 2023 consid. 2.5).
2.3 Les arguments du recourant ne sont pas nouveaux et ont déjà été écartés dans les différentes décisions susvisées, rendues dans des cas semblables. Les habiller d'un vocabulaire différent ne leur donne pas plus de valeur. Il demeure en définitive que le département, saisi d'un état de fait pouvant relever de l'obligation de déposer une requête en autorisation de construire, doit ouvrir une procédure, identifiée par un numéro qui ne présume pas de son issue, afin d'établir les faits, sans qu'il soit possible de déterminer si sa décision de soumettre les travaux à la LDTR est acquise, ce qui ne ressort pas des termes de celle-ci, le département ne statuant à ce stade d’aucune façon sur la soumission ou non des travaux à la LDTR ou à la LCI. En outre, le fait de se conformer à la loi en sollicitant le versement d'un émolument ne constitue pas un indice permettant de conclure à l'existence d'une décision finale. Il n'est dès lors pas possible de retenir que le département aurait rendu une décision finale de soumission à la LDTR par sa décision querellée.
En conséquence, conformément à la jurisprudence précitée, le recourant s'est vu notifier une décision lui ordonnant de déposer une requête en vue de régulariser sa situation, décision qui doit être qualifiée d'incidente. Le recourant ne propose pas d’arguments sérieux et nouveaux permettant un revirement de jurisprudence et, dans l'intérêt de la sécurité du droit, celle qui prévaut depuis de nombreuses années doit être maintenue.
Le premier grief sera donc écarté.
2.4 Le recourant fait valoir un préjudice irréparable.
2.4.1 Le recours contre une décision incidente n’est ouvert que si ladite décision, à supposer qu’elle soit exécutée, cause un préjudice irréparable à son destinataire. Il est également ouvert si l’admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d’éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 57 let. c LPA).
2.4.2 Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, un préjudice est irréparable au sens de cette disposition lorsqu’il ne peut être ultérieurement réparé par une décision finale entièrement favorable au recourant (ATF 138 III 46 consid. 1.2 ; 134 III 188 consid. 2.1 et 2.2 ; 133 II 629 consid. 2.3.1). Le préjudice irréparable suppose que le recourant ait un intérêt digne de protection à ce que la décision attaquée soit immédiatement annulée ou modifiée, comme un intérêt économique ou un intérêt tiré du principe de l’économie de la procédure (ATF 135 II 30 ; 134 II 137 ; 127 II 132 consid. 2a ; ATA/1187/2015 du 3 novembre 2015 consid. 2c). Le simple fait d’avoir à subir une procédure et les inconvénients qui y sont liés ne constitue toutefois pas, en soi, un préjudice irréparable (ATF 133 IV 139 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_149/2008 du 12 août 2008 consid. 2.1 ; ATA/305/2009 du 23 juin 2009 consid. 2b et 5b et les références citées). Un dommage de pur fait, tel que la prolongation de la procédure ou un accroissement des frais de celle-ci, n’est notamment pas considéré comme un dommage irréparable de ce point de vue (ATF 133 II 629 consid. 2.3.1 ; 131 I 57 consid. 1 ; 129 III 107 consid. 1.2.1 ; 127 I 92 consid. 1c ; 126 I 97 consid. 1b).
2.4.3 La chambre administrative a précisé à plusieurs reprises que l’art. 57 let. c LPA devait être interprété à la lumière de ces principes (ATA/231/2017 du 22 février 2017 consid. 3c et les références citées).
2.4.4 En application de ceux-ci, la décision litigieuse ne cause aucun préjudice irréparable au recourant, qui ne subit qu'une prolongation de la procédure et les inconvénients qu’elle comporte, dont il n'expose pas en quoi ils seraient différents pour lui de ce qu'ils sont dans autant de cas semblables dans lesquels de tels dommages n'ont pas été retenus. Ce grief sera par conséquent écarté.
2.5.1 La seconde hypothèse de l'art. 57 let. c LPA suppose cumulativement que l'instance saisie puisse mettre fin une fois pour toutes à la procédure en jugeant différemment la question tranchée dans la décision préjudicielle ou incidente et que la décision finale immédiate qui pourrait ainsi être rendue permette d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (ATF 133 III 629 consid. 2.4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_413/2018 du 26 septembre 2018 consid. 3 ; 1C_205/2011 du 16 mai 2011 consid. 2 ; ATA/365/2010 du 1er juin 2010 consid. 4c). Pour qu'une procédure soit « longue et coûteuse », il faut que la procédure probatoire, par sa durée et son coût, s'écarte notablement des procès habituels (arrêt du Tribunal fédéral 4A_162/2015 du 9 septembre 2014 consid. 2 et les références citées). Tel peut être le cas lorsqu'il faut envisager une expertise complexe ou plusieurs expertises, l'audition de très nombreux témoins, ou encore l'envoi de commissions rogatoires dans des pays lointains (ATA/1018/2018 du 2 octobre 2018 consid. 10d et les références citées).
2.5.2 En l’espèce, sans préjudice de l'examen au fond, le dossier rend vraisemblable, par les pièces et les photos produites, que le recourant a entrepris des travaux d'une certaine importance, concernant toutes les pièces de l'appartement loué, et n’a fourni aucune preuve permettant d’établir avec certitude leur nature exacte au regard de la LCI ou de la LDTR. Celle-ci doit ainsi être instruite et la chambre administrative n’est pas en mesure de rendre une décision qui trancherait la procédure au fond. Enfin, la durée de la procédure n'apparait pas démesurée, pouvant vraisemblablement être examinée sans expertise ou autre procédure extraordinaire longue et coûteuse, de sorte qu’elle ne s’écarte pas, par sa durée prévisible, d’une procédure ordinaire en la matière. La durée de la procédure se conçoit dès son ouverture, sans qu'importe le temps qui s’est écoulé avant qu’il en soit décidé. Le recourant n’explique pas par ailleurs à quels coûts extraordinaires il pourrait être confronté.
Faute de remplir les conditions de l'art. 57 let. c LPA, le recours devant le TAPI est également irrecevable de ce point de vue et les arguments du recourant ne permettent pas de revenir sur une jurisprudence bien établie, conformément à ce qui a été exposé ci-dessus (cf. ad 2.3).
Le second grief sera donc également écarté.
En déclarant le recours irrecevable, le TAPI n'a donc ni violé la loi ni abusé de son pouvoir d'appréciation.
2. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 900.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 11 mars 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 février 2024 ;
au fond :
le rejette ;
met un émolument de CHF 900.- à la charge de A______ ;
dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;
communique le présent arrêt à Me Christian LUSCHER, avocat du recourant, au département du territoire – office des autorisations de construire ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.
Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Patrick CHENAUX, juges, Louis PEILA, juge suppléant.
Au nom de la chambre administrative :
la greffière-juriste :
D. WERFFELI BASTIANELLI
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| le président siégeant :
C. MASCOTTO |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière :
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