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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/718/2025

JTAPI/709/2025 du 26.06.2025 ( OCPM ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/718/2025

JTAPI/709/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 26 juin 2025

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______, agissant en leur nom et celui de leur enfant mineur C______, représentés par Me Manuel BOLIVAR, avocat, avec élection de domicile

contre

 

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS


 

 

EN FAIT

1.             Madame A______ et Monsieur B______, nés respectivement les ______ 1978 et ______ 1980, et leurs quatre enfants D______, E______, F______ et C______, nés les 1er mars 2002, ______ 2003, ______ 2005 et ______ 2009, sont ressortissants du Kosovo.

2.             Par décision du 17 février 2015, le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) a prononcé à l’encontre de B______ une interdiction d’entrée en Suisse (ci-après : IES), valable jusqu’au 16 février 2018.

3.             Le 14 décembre 2017, B______ a fait l’objet d’une nouvelle IES, valable jusqu’au 13 décembre 2020.

4.             Par ordonnance du 9 mai 2018, le Ministère public (ci-après : MP) du canton de Genève l’a condamné à une peine privative de liberté de trente jours, assortie du sursis, délai d’épreuve de trois ans, pour entrée illégale.

5.             Par arrêt du 9 mai 2019 (F-770/2018), le Tribunal administratif fédéral (ci après : TAF) a confirmé cette IES.

6.             Par décision du 9 mai 2018, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a ordonné le renvoi de Suisse de B______, tout en lui impartissant un délai au 16 mai 2018 pour quitter le territoire.

7.             Par ordonnance pénale du 1er juin 2018, le MP de l’arrondissement de la Côte l'a condamné à une peine privative de liberté de dix jours, assortie du sursis, délai d’épreuve de trois ans, pour entrée et séjour illégaux.

8.             Le 21 décembre 2018, B______ a saisi l'OCPM d'une demande d’autorisation de séjour dans le cadre de l' « opération Papyrus ».

9.             Le 27 janvier 2019, Mme A______ est arrivée à Genève avec ses enfants F______ et C______.

10.         Le 14 avril 2020, Mme D______ et M. E______ ont soumis à l'OCPM une demande d'autorisation de séjour au titre du regroupement familial.

11.         Auditionnée par la police le 2 juin 2020 comme prévenue d’infractions à l’art. 115 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), Mme A______ a notamment déclaré qu'elle était arrivée en Suisse par avion le 27 janvier 2019 avec ses enfants F______ et C______, pour y passer des vacances. Ils étaient munis d'un visa d'une durée de deux semaines. Sa mère, ses trois frères et ses trois sœurs vivaient au Kosovo. Lorsque son époux était sans travail à Genève, il venait au Kosovo, à savoir pendant les vacances du Nouvel-An et d'été. Pendant les dix dernières années, il y était venu une à deux fois par année. Son époux ne parlait pas le français.

12.         Par ordonnance pénale du 14 juillet 2020, le MP a condamné Mme A______ à une peine pécuniaire de 120 jours-amende, assortie du sursis, délai d’épreuve de trois ans, pour infraction à l’art. 115 al. 1 let. b et c LEI.

13.         Le 14 août 2020, Mme A______ a saisi l’OCPM d’une demande d’autorisation de séjour avec activité lucrative.

14.         Par ordonnance pénale du 27 septembre 2020, le MP genevois a condamné B______ à une peine pécuniaire de 180 jours-amende pour faux dans les certificats et infractions aux art. 115 al. 1 let a, b et c et 118 al. 1 LEI.

Il lui était notamment reproché d’avoir, dans le cadre de sa « demande Papyrus » du 21 décembre 2018, produit des documents falsifiés, notamment des certificats de salaire émis par l'entreprise G______ Sàrl, ainsi que des attestations comportant des indications erronées, notamment le fait qu'il résidait en Suisse sans interruption depuis 2008, ce dans le but d'induire en erreur l’OCPM pour obtenir frauduleusement une autorisation de séjour.

15.         Par courrier du 5 mars 2021, l'OCPM a fait part aux époux A______ et B______ ainsi qu’à leurs enfants Mme D______ et M. E______ de son intention de ne pas donner une suite favorable à leur demande de régularisation et de prononcer leur renvoi de Suisse.

Au vu de ses condamnations pénales, B______ n’avait pas respecté l'ordre juridique suisse, en particulier les IES prononcées à son encontre. En refusant de quitter la Suisse à la suite de la décision de renvoi du 9 mai 2018, il avait persisté dans son mépris des décisions administratives prises à son égard. Il avait en outre manifestement menti aux autorités suisses en signant, le 16 décembre 2018, une attestation stipulant qu’il n'avait pas déposé de demande d'autorisation de séjour dans un pays de l’UE/AELE, alors qu’il possédait un permis de séjour italien « valable du 1er août 2017 au 2 août 2018 ». L’existence de ce permis de séjour italien impliquait par ailleurs une discontinuité de son séjour en Suisse. Il avait donc tenté d'obtenir frauduleusement une autorisation de séjour en Suisse. En tout état, sa situation ne répondait pas aux critères de l’« opération Papyrus ».

La famille n’avait pas démontré une intégration socio-culturelle particulièrement remarquable. Aucune attestation de réussite à l'examen de français (niveau A2), attendue de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour, n'avait été produite.

Mme A______, Mme D______ et M. E______ ne lui avaient pas annoncé leur arrivée en Suisse et aucune demande de regroupement familial n'avait été déposée pour F______ et C______. L’intégration en Suisse des enfants, arrivés en Suisse les 7 juillet 2018 et 27 janvier 2019, n’était pas encore déterminante. Leur réintégration dans leur pays d'origine ne devrait pas poser des problèmes insurmontables

La famille ne remplissait pas les critères relatifs au cas individuel d'extrême gravité. Elle n’avait en effet pas démontré une très longue durée de séjour en Suisse ni d’élément permettant de déroger à cette exigence. Elle n'avait pas non plus démontré qu'une réintégration dans son pays d’origine aurait de graves conséquences sur sa situation, indépendamment des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires ou scolaires) affectant l'ensemble de la population restée sur place.

16.         Par décision du 3 juin 2021, l’OCPM, reprenant les termes de sa lettre d’intention du 5 mars 2021 a refusé de soumettre le dossier des époux A______ et B______ et de leurs quatre enfants au SEM avec un préavis positif en vue de la délivrance de titres de séjour et a prononcé leur renvoi, leur impartissant un délai au 3 août 2021 pour quitter le territoire.

17.         Par jugement du 16 mars 2022 (JTAPI/252/2022), le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) a rejeté le recours formé par les époux A______ et B______, agissant en leur nom et celui de F______ et C______, mineurs, ainsi que par Mme D______ et M. E______ contre la décision du 3 juin 2021.

Ce jugement a été confirmé par la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le 6 septembre 2022 (ATA/989/2022).

18.         Le 28 mars 2024, les époux A ______ et B______, sous la plume de leur conseil, ont indiqué à l’OCPM qu’ils entendaient se conformer à leur obligation de quitter la Suisse. Ils avaient effectué toutes les démarches en vue de quitter le territoire helvétique le 31 mars 2024. Ils souhaitaient toutefois que leurs deux enfants puissent, pour l’un, terminer son année scolaire et, pour l’autre sa formation au 30 juin 2024. En gage de leur bonne foi, ils étaient disposés à fournir une déclaration dûment signée dans ce sens.

19.         A la demande de l’OCPM, les époux ont, sous la plume de leur conseil, transmis le 11 juin 2024 une copie des billets d’avion pour les enfants C______ et F______ avec un départ au plus tard le 1er juillet 2024.

20.         Le 27 juin 2024, B______ a adressé à la Présidente du Conseil d’État un courrier appelant à sa clémence envers sa famille. Il souhaitait pouvoir poursuivre avec sa famille sa vie en Suisse, que la décision d’expulsion soit donc annulée et qu’un permis de séjour et de travail lui soient octroyés. Il avait par ailleurs déboursé plus de CHF 25'000.- pour des avocats qui n’avaient pas effectué leur travail.

21.         Par courrier du 1er juillet 2024, B______ a informé le directeur général de l’OCPM de sa démarche dans laquelle il avait apporté toutes les preuves pour justifier qu’il habitait et travaillait en Suisse depuis 2008. Pendant toutes ces années, les avocats avaient omis d’apporter les preuves. En particulier, sa femme était suivie médicalement et, en cas d’arrestation par la police, elle retournerait certainement à Belle-Idée.

22.         B______ a transmis au directeur de l’OCPM, le 15 juillet 2024, copie d’un rapport médical concernant sa femme.

23.         Par courrier du 22 juillet 2024, B______ a transmis à la Présidente du Conseil d’État un complément d’information ainsi qu’un certain nombre de pièces.

24.         Le 14 août 2024, la conseillère d’État en charge du département des institutions et du numérique a informé B______ avoir transmis sa demande à l’OCPM pour raison de compétence.

25.         B______ a encore transmis un complément d’information au directeur de l’OCPM le 10 septembre 2024.

26.         Le 7 octobre 2024, à la demande de l’OCPM, le J______ a rempli un formulaire médical concernant Mme A______.

A teneur de celui-ci, Mme A______ a été hospitalisée à trois reprises en milieu psychiatrique à la clinique H______, du 16 au17 septembre 2022, du 13 au 21 ocotbre 2022 et du 31 juillet au 6 septembre 2024, Cette dernière hospitalisation vait permis de confirmer le diagnostic de trouble bipolaire de type1. Les entretiens avec la patiente étaient compliqués par la barrière de la langue et la présence nécessaire d’un interprète.

La patiente était actuellement stable sur le plan thymique, avec un traitement de lithium et olanzapine bien toléré. Sa prescription actuelle comprenait également du Fluazépam en raison de troubles du sommeil. D’un point de vue somatique, elle était connue pour des hernies discales.

Depuis sa dernière sortie d’hospitalisation, son état était stable, Elle semblait comprendre et accepter le diagnostic de trouble bipolaire et motivée de suivre son traitement ainsi que les mesures comportementales visant à préserver sa stabilité.

Le traitement pharmacologique suivi régulièrement permettait de réduire le risque de rechute thymique dans le trouble bipolaire, améliorant le pronostic. D’un point de vue strictement psychiatrique, il n’existait actuellement aucune contre-indication à voyager.

27.         Le 11 novembre 2024, le SEM a transmis à l’OCPM des informations concernant les prises en charge médicales possibles au Kosovo pour une patiente présentant les symptômes de Mme A______.

Il ressort de ce dernier que, selon les informations recueillies par le Centre consulaire régional des Balkans occidentaux (CCR) c/o Ambassade de Suisse à I______ (Kosovo) la prise en charge psychiatrique, neurologique et urologique de Mme A______était possible dans son pays.

28.         Le 5 décembre 2024, l’OCPM a informé B______ de son intention de refuser d’accéder à sa requête du 27 juin 2024 et, par conséquent, de soumettre son dossier avec un préavis positif au SEM.

29.         B______ a exercé son droit d’être entendu le 4 janvier 2025, appelant à la clémence envers sa famille menacée d’expulsion.

Il avait suivi les conseils de ses quatre avocats successifs - lesquels l’avaient « escroqué » de plus de CHF 25'000.-, raison pour laquelle il avait été condamné pénalement à huit reprises.

Il avait passé 17 ans en Suisse et le 90% de sa famille y vivait. Il n’avait ni maison ni infrastructure au Kosovo.

La situation médicale de sa femme était très fragile. C’était lui qui finançait tous les frais liés à sa maladie et en cas de retour au Kosovo, il n’aurait pas les moyens de financer ni une clinique ni un hôpital.

30.         Par décision du 27 janvier 2025, l’OCPM a refusé d’accéder à la demande de
B______ et donc de soumettre son dossier au SEM avec un préavis positif, estimant qu’il ne remplissait pas les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur.

Il avait déposé une demande de reconsidération en invoquant vivre et travailler en Suisse depuis seize ans, ne jamais avoir eu recours à l’aide sociale, ne faire l’objet d’aucune poursuite, avoir deux enfants scolarisés et une grande partie de sa famille en Suisse, et ne pas envisager un retour au Kosovo compte tenu des tensions entre le Kosovo et la Serbie. Il avait également mis en avant les divers problèmes de santé rencontrés par son épouse. Ces éléments constituaient des faits nouveaux devant être pris en compte dans l’examen de sa situation actuelle et l’OCPM acceptait d’entrer en matière sur la demande de reconsidération.

Son épouse et lui avaient vécu toute leur enfance, leur adolescence et une grande partie de leur vie d'adulte au Kosovo. Ils avaient donc passé au Kosovo les années déterminantes pour le développement de leur personnalité et en connaissaient les us et coutumes.

Par ailleurs, ils ne pouvaient pas se prévaloir d'une intégration sociale ou professionnelle particulièrement marquée au point de devoir admettre qu’ils ne pouvaient quitter la Suisse sans devoir être confrontés à des obstacles insurmontables.

Concernant leur fils C______, il était arrivé en Suisse en 2019, soit à l'âge de dix ans. Il avait donc vécu son enfance au Kosovo, où il avait probablement été scolarisé. Son processus d'intégration en Suisse n’était pas avancé et irréversible au point qu'un retour dans son pays ne pourrait être envisagé et constituerait un déracinement.

Concernant la situation médicale de son épouse, il ressortait du rapport de l'Ambassade suisse de I______ que des traitements médicaux nécessaires étaient accessibles au Kosovo. En effet, bien que la qualité et l'accessibilité aux soins ne fussent pas comparables aux services médicaux en Suisse, des consultations et des traitements psychiatriques ambulatoires et hospitaliers étaient disponibles dans son pays d'origine. A noter également qu'il existait des cliniques de neurochirurgie et d'urologie offrant les soins nécessaires aux problèmes rencontrés par Mme A______. Force était de constater que son épouse pourra bénéficier de soins nécessaires au Kosovo.

Les circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles il allait également exposés à son retour, ne sauraient être prises en considération. Sa situation personnelle ne se distinguait guère de celle de bon nombre de ses concitoyens connaissant les mêmes réalités au Kosovo. L'exception aux mesures de limitation n’avait pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie dans son pays d'origine.

Enfin, il constatait que les observations formulées dans le cadre de son droit d’être entendu étaient identiques à celles mentionnées dans ses précédents courriers et de ce fait n’était pas de nature à modifier sa position.

Dès lors, il ne remplissait pas les critères relatifs à un cas individuel d’extrême gravité.

31.         Par acte du 27 février 2025, B______ (ci-après : le recourant) a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant à son annulation, à la reconnaissance de l’existence d’un cas de rigueur, à la permission du maintien de sa famille en Suisse, en tenant compte de la situation médicale de son épouse et de son propre parcours professionnel et entrepreneurial.

Reprenant son parcours et celui de sa femme et de ses deux enfants ainés, D______ et E______, il a indiqué que cette dernière avait eu un petit garçon le 18 janvier 2024 et qu’elle travaillait avec lui à 50% dans sa société depuis le 3 février 2025. Depuis octobre 2024, son fils travaillait également avec lui.

Sa femme et ses fils C______ et F______ étaient arrivés en Suisse le 17 janvier 2019 et F______ était maintenant au bénéfice d’un permis B. C______ poursuivait ses études à l’école de commerce en effectuant un apprentissage ayant débuté le 19 août 2024 et finissant le 30 juin 2027.

Il avait été condamné à huit reprises toujours pour les mêmes motifs, à savoir avoir rendu visite à sa famille et être revenu travailler à Genève. Ces infractions n’étaient pas de nature à troubler gravement l’ordre public, s’expliquant par sa volonté de maintenir un lien familial et un lien professionnel stables. Il était en Suisse depuis 2008 et pouvait prouver y habiter et y travailler sans interruption depuis cette date. Il était intégré et autonome financièrement. Son retour au Kosovo serait très difficile, les perspectives d’emploi et de développement professionnels y étant très limités. Sans travail, il ne pourrait pas permettre à sa femme de bénéficier des soins médicaux de qualité dont elle bénéficiait en Suisse. Ils étaient solidement ancrés en Suisse et un renvoi menacerait non seulement la continuité de ses projets de vie mais également la santé de sa femme et l’avenir professionnel de ses enfants.

Il a produit un certain nombre de pièces, dont notamment un rapport médical concernant Mme A______ établi par les Hôpitaux Universitaires de Genève le 23 décembre 2024, au contenu identique à celui transmis le 7 octobre 2024.

Les pièces produites à l’appui du recours seront discutées en tant que de besoin dans la partie « En droit » ci-après.

32.         Par courrier du 15 mars 2025, le recourant a sollicité des mesures provisionnelles afin d’être autorisé, lui, sa femme et leur fils C______ à rester en Suisse toute la durée de la procédure. Cette demande reposait sur la protection de sa vie familiale, sur l’intérêt supérieur de son enfant et sur la protection de sa société, où il avait des engagements et des obligations envers son associé, ses employés et ses clients à honorer.

33.         L’OCPM s’est déterminé sur la requête en mesures provisionnelles et sur le fond du recours le 27 mars 2025, concluant à leur rejet. Il a produit son dossier.

Le recourant faisait valoir différents problèmes de santé de
son épouse. Or, les soins nécessaires à l’état de cette dernière pouvaient lui être prodigués au Kosovo. Enfin, cet élément, bien que nouveau, ne permettait pas d’influer la situation administrative du recourant et de sa famille.

Il confirmait donc les termes de sa décision du 27 janvier 2025.

34.         Le recourant et son épouse (ci-après : les recourants) ont répondu à la prise de position de l’OCPM le 4 avril 2025, maintenant leurs arguments relatifs à leur situation actuelle, leur intégration et les difficultés à repartir au Kosovo.

35.         Par décision du 10 avril 2025 (DITAI/157/2025), le tribunal a rejeté la demande d’effet suspensif et de mesures provisionnelles au recours.

Cette décision a fait l’objet d’un recours actuellement pendant auprès de la chambre administrative.

36.         L’OCPM a dupliqué le 12 mai 2025.

La situation médicale de la recourante avait déjà été prise en compte lors de l’examen de la demande de reconsidération et cet élément, bien que nouveau, ne permettait pas une appréciation différente du dossier, étant précisé que les problèmes de santé de la recourante pourraient être pris en charge au Kosovo. Pour le surplus, l’autorité intimée n’avait pas d’observations complémentaires à formuler.

37.         Pa pli du 23 mai 2025, l’OCPM a transmis au tribunal un rapport Consulting médical du SEM relatif à la prise en charge de la bipolarité de la recourante au Kosovo, indiquant en substance qu’un traitement psychiatrique était possible, par exemple, au centre clinique universitaire du Kosovo à I______. Des soins de suivi urologique pouvaient également être effectués dans cette clinique. Des traitements endocrinologues et neurochirurgicaux y étaient également possibles de même que de la physiothérapie.

38.         Le tribunal a transmis ce rapport aux recourants, tout en leur impartissant un délai au 6 juin 2025 pour lui transmettre leurs éventuelles déterminations.

39.         Par écritures du 6 juin 2025, sous la plume de leur conseil, les recourants ont fait valoir que le renvoi d’une personne atteinte de troubles psychiatriques graves, comme la bipolarité, s’exposait à des risques sérieux de rupture de soins, de décompensation, et d’atteinte à la dignité et à la santé, ce qui pouvait constituer un danger réel pour sa vie et son intégrité physique et psychique et serait contraire à l’art. 3 Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

Or, le système de santé du Kosovo était reconnu comme défaillant et incapable de répondre aux besoins de la population, en particulier des personnes vulnérables. Selon la Direction du développement et de la coopération suisse (ci-après : DDC), les prestations médicales proposées étaient insuffisantes et n’atteignaient pas l’ensemble de la population, notamment en raison de barrières économiques. Le Kosovo faisait en outre face à un déficit croissant en personnel soignant. De plus, la stigmatisation sociale et la méconnaissance des troubles psychiques constituaient des obstacles majeurs aux recours aux soins. L’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (ci-après : OSAR) avait à cet égard relevé dans un rapport du 2 septembre 2024 (référence citée) que l’accès effectif aux traitements adaptés, notamment pour des pathologies sévères comme la bipolarité, n’était pas garanti, tant en termes de disponibilités de médicament que de suivi thérapeutique. Enfin, l’introduction d’une couverture universelle n’était pas encore achevée au Kosovo, et les soins cités par l’OCPM n’étaient accessibles qu’aux personnes ayant des ressources suffisantes, ce qui n’était pas leur cas.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             D’une manière générale, selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l’autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l’établissement des faits ; il incombe à celles-ci d’étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu’il s’agit d’élucider des faits qu’elles sont le mieux à même de connaître. Lorsque les preuves font défaut ou s’il ne peut être raisonnablement exigé de l’autorité qu’elle les recueille pour les faits constitutifs d’un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (ATF 148 II 465 consid. 8.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). En matière de droit des étrangers, l’art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l’étranger ou des tiers participants (ATF 142 II 265 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1).

6.             Lorsque les preuves font défaut ou s’il ne peut être raisonnablement exigé de l’autorité qu’elle les recueille pour les faits constitutifs d’un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_27/2018 du 10 septembre 2018 consid. 2.2). Il appartient ainsi à l’administré d’établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l’administration de démontrer l’existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/139/2025 du 4 février 2025 consid. 7.6).

En outre, en procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n’est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/139/2025 du 4 février 2025 consid. 7.6).

7.             Saisie d’une demande de reconsidération, l’autorité examine préalablement si les conditions de l’art. 48 LPA sont réalisées. Si tel n’est pas le cas, elle rend une décision de refus d’entrer en matière qui peut faire l’objet d’un recours dont le seul objet est de contrôler la bonne application de cette disposition (ATF 117 V 8 consid. 2).  Lorsque l'autorité entre en matière sur une demande de reconsidération et la rejette après instruction, il s’agira alors d’une nouvelle décision sur le fond, susceptible de recours. Dans cette hypothèse, le litige a pour objet la décision de reconsidération et non la décision initiale (arrêts du Tribunal fédéral 2D_55/2015 du 9 mai 2016 consid. 3 ; 2C_319/2015 du 10 septembre 2015 consid. 3).

8.             En l'espèce, à l’appui de leur demande de reconsidération, les recourants ont principalement invoqué les 16 ans de séjour du recourant, sa carrière professionnelle en Suisse, leur enfant scolarisé à Genève, la présence d’une grande partie de leur famille sur le territoire helvétique, l’impossibilité d’envisager un retour dans leur pays en raison de tensions entre le Kosovo et l’Albanie ainsi que l'état de santé de la recourante, situation considérée par l'autorité intimée comme constitutive d'un fait nouveau.

L’OCPM étant entré en matière sur cette demande et l’ayant instruite, le présent litige a pour objet cette décision sur demande de reconsidération du 27 janvier 2025 et non la décision initiale du 3 juin 2021.

9.             La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Kosovo.

10.         Les dérogations aux prescriptions générales d’admission (art. 18 à 29 LEI) sont énoncées de manière exhaustive à l’art. 30 al. 1 LEI ; il est notamment possible de déroger aux conditions d’admission dans le but de tenir compte des cas individuels d’extrême gravité (let. b).

11.         L’art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l’intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l’état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g).

12.         Le critère de l’intégration du requérant se base sur le respect de la sécurité et de l’ordre public, le respect des valeurs de la Constitution, les compétences linguistiques, la participation à la vie économique ou l’acquisition d’une formation (art. 58a LEI).

Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3), d’autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (ATA/545/2022 du 24 mai 2022 consid. 3e).

13.         Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu’ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l’obtention d’une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; ATA/122/2023 du 7 février 2023 consid. 4b ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3).

14.         Lors de l’appréciation d’un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce, étant relevé que l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée. On ne saurait tenir compte des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires) affectant l’ensemble de la population restée sur place, auxquelles les personnes concernées pourraient être également exposées à leur retour, sauf si celles-ci allèguent d’importantes difficultés concrètes propres à leur cas particulier (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-5341/2020 du 7 février 2022 consid. 6.7 ; F-6616/2017 du 26 novembre 2019 consid. 6.5 et les références citées). En particulier, les éventuels inconvénients liés à la recherche d’un logement ou d’un emploi sont des aspects qui touchent la majeure partie des étrangers qui retournent dans leur pays après une absence prolongée à l’étranger (arrêt du Tribunal fédéral 2C_491/2024 du 4 novembre 2024 consid. 5.2.3).

La question n’est donc pas de savoir s’il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d’examiner si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (ATA/122/2023 du 7 février 2023 consid. 4d et les références citées).

15.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, l’intéressé possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4206/2021 du 24 novembre 2022 consid. 5.4).

S’agissant de la condition de la durée totale du séjour, elle constitue un critère important de reconnaissance d’un cas de rigueur. Il importe cependant de rappeler que selon la jurisprudence applicable en la matière, le simple fait pour un étranger de séjourner en Suisse pendant de longues années ne permet pas d’admettre un cas personnel d’une extrême gravité. Il s’agit d’un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul (ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7e). En outre, la durée d’un séjour illégal, ainsi qu’un séjour précaire ne doivent normalement pas être pris en considération ou alors seulement dans une mesure très restreinte, sous peine de récompenser l’obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4206/2021 du 24 novembre 2022 consid. 9.1 et les références citées ; ATA/122/2023 du 7 février 2023 consid. 4f). Par durée assez longue, on entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017).

Ainsi, le simple fait, pour un étranger, de séjourner en Suisse pendant de longues années, y compris à titre légal, ne permet pas d’admettre un cas personnel d’extrême gravité sans que n’existent d’autres circonstances tout à fait exceptionnelles (ATF 124 II 110 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.540/2005 du 11 novembre 2005 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral E-643/2016 du 24 juillet 2017 consid. 5.1).

16.         En ce qui concerne la condition de l’intégration au milieu socioculturel suisse, la jurisprudence considère que, d’une manière générale, lorsqu’une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte dans son pays d’origine, il y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l’âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d’origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).

L’intégration socio-culturelle n’est en principe pas susceptible de justifier à elle seule l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 ; C-384/2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l’engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d’une intégration réussie, voire remarquable (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine ; cf. aussi Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10).

17.         Selon la jurisprudence, des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d’un cas de rigueur lorsque la personne concernée démontre souffrir d’une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d’urgence, indisponibles dans le pays d’origine, de sorte qu’un départ de Suisse serait susceptible d’entraîner de graves conséquences pour sa santé.

Le seul fait d’obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d’origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation (ATA/766/2024 du 25 juin 2024 consid. 2.8). La personne étrangère qui entre pour la première fois en Suisse en souffrant déjà d'une sérieuse atteinte à la santé ne saurait se fonder uniquement sur ce motif médical pour réclamer une telle exemption (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_861/2015 du 11 février 2016 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6860/2016 du 6 juillet 2018 consid. 5.2.2 ; ATA/1474/2024 du 17 décembre 2024 consid. 3.8 ; ATA/766/2024 précité consid. 2.8).

Une grave maladie (à supposer qu'elle ne puisse être soignée dans le pays d'origine) ne saurait cependant justifier, à elle seule, la reconnaissance d'un cas de rigueur. En l’absence de liens d’une certaine intensité avec la Suisse, l’aspect médical et les éventuelles difficultés de réintégration de la personne concernée dans le pays d’origine ne sauraient justifier, à eux seuls, l’octroi d’un permis humanitaire. Le cas échéant, ces critères ne peuvent en effet être pris en considération que dans le cadre de l’examen de la licéité et de l’exigibilité de l’exécution du renvoi et un individu ne pouvant se prévaloir que d'arguments d'ordre médical ne se distingue pas de ses compatriotes restés dans son pays d'origine et souffrant de la même maladie (arrêt du Tribunal administratif fédéral F‑4125/2016 du 26 juillet 2017 consid. 5.4.1 ; ATA/506/2023 du 16 mai 2023 consid. 7.7 ; ATA/41/2022 du 18 janvier 2022 consid. 9).

Le Tribunal administratif fédéral a déjà eu l’occasion de constater que le Kosovo disposait de structures de soins et des médicaments nécessaires au traitement des maladies tant physiques que psychiques (ATAF 2011/50 consid. 8.8.2).

18.         Hormis des cas d'extrême gravité, l'état de santé ne peut fonder un droit à une autorisation de séjour, ni sous l'aspect de l'art. 3, ni sous celui de l'art. 8 CEDH (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_891/2016 du 27 septembre 2016 consid. 3.3 et la référence citée).

19.         Dans l’examen d’un cas de rigueur concernant le renvoi d’une famille, il importe de prendre en considération la situation globale de celle-ci. Dans certaines circonstances, le renvoi d’enfants peut engendrer un déracinement susceptible de constituer un cas personnel d’extrême gravité. D’une manière générale, lorsqu’un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse et y a seulement commencé sa scolarité, il reste encore attaché dans une large mesure à son pays d’origine, par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-1700/2022 du 10 janvier 2024 consid. 7.5 ; ATA/365/2024 du 12 mars 2024 consid. 2.5). Avec la scolarisation, l’intégration au milieu suisse s’accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l’âge de l’enfant lors de son arrivée en Suisse et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, de l’état d’avancement de la formation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter, dans le pays d’origine, la scolarisation ou la formation professionnelle entamée en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l’école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L’adolescence, une période comprise entre 12 et 16 ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 9a). Sous l’angle du cas de rigueur, il est considéré que cette pratique différenciée réalise la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant, telle qu’elle est prescrite par l’art. 3 al. 1 CDE ; arrêts du Tribunal fédéral 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3 et 2A.43/2006 du 31 mai 2006 consid. 3.1 ; ATA/1068/2024 du 10 septembre 2024 consid. 6.3).

Dans un arrêt de principe (ATF 123 II 125), le Tribunal fédéral a mentionné plusieurs exemples de cas de rigueur en lien avec des adolescents. Ainsi, le cas de rigueur n’a pas été admis, compte tenu de toutes les circonstances, pour une famille qui comptait notamment deux adolescents de 16 et 14 ans arrivés en Suisse à, respectivement, 13 et 10 ans, et qui fréquentaient des classes d’accueil et de développement (arrêt non publié Mobulu du 17 juillet 1995 consid. 5). Le Tribunal fédéral a précisé dans ce cas qu’il fallait que la scolarité ait revêtu une certaine durée, ait atteint un certain niveau et se soit soldée par un résultat positif (cf. aussi ATA/114/2025 du 28 janvier 2025 consid. 27).

20.         Ce n'est pas parce qu'il existe un droit à un nouvel examen de la cause que l'étranger peut d'emblée prétendre à l'octroi d'une nouvelle autorisation. Les raisons qui ont conduit l'autorité à révoquer, à ne pas prolonger ou à ne pas octroyer d'autorisation lors d'une procédure précédente ne perdent pas leur pertinence. L'autorité doit toutefois procéder à une nouvelle pesée complète des intérêts en présence, dans laquelle elle prendra notamment en compte l'écoulement du temps. Il ne s'agit cependant pas d'examiner librement les conditions posées à l'octroi d'une autorisation, comme cela serait le cas lors d'une première demande d'autorisation, mais de déterminer si les circonstances se sont modifiées dans une mesure juridiquement pertinente depuis la révocation de l'autorisation, respectivement depuis le refus de son octroi ou de sa prolongation (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_203/2020 du 8 mai 2020 consid. 4.3 ; 2C_176/2019 du 31 juillet 2019 consid. 7.2 ; 2C_883/2018 du 21 mars 2019 consid. 4.4 ; 2C_556/2018 du 14 novembre 2018 consid. 3 ; 2C_198/2018 du 25 juin 2018 consid. 3.3).

21.         Dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI). Sauf prescription particulière de la loi ou d'un traité international, l'étranger n'a donc en principe aucun droit à la délivrance et au renouvellement d'un permis de séjour pour cas de rigueur.

L'autorité compétente dispose d'un très large pouvoir d'appréciation dans le cadre de l'examen des conditions de l'art. 31 al. 1 OASA, dont elle est tenue de faire le meilleur exercice en respectant les droits procéduraux des parties. Le contrôle de l'usage du pouvoir d'appréciation de l'autorité intimée par le tribunal de céans doit donc s'exercer avec retenue et se limiter au cas de l'excès ou de l'abus du pouvoir d'appréciation. Le tribunal ne saurait ainsi substituer sa propre appréciation des preuves à celle de l'autorité intimé en l'absence d'une appréciation manifestement contraire au droit, voire choquante.

Dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir d’appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son degré d’intégration (art. 96 al. 1 LEI).

22.         En l’espèce, le manque d’intégration socio-professionnelle des recourants ainsi que l’absence de difficultés insurmontables de réintégration dans leur pays a déjà été constatée dans la première procédure et aucun élément ne justifie de revenir sur cette appréciation. Pour rappel, cette appréciation globale de la situation de la famille par l’autorité intimée a été confirmée par le tribunal le 16 mars 2022, puis par la chambre administrative en date du 6 septembre 2022.

23.         A toutes fins utiles, s'agissant notamment de la durée de séjour du recourant en Suisse, le tribunal rappellera que ce dernier n’a pas démontré, à satisfaction de droit, qu'il y aurait effectivement séjourné depuis 2008 de manière continue. Quoiqu’il en soit, une telle cette durée de séjour – qui pourrait être qualifiée de très longue – ne serait pas suffisante pour permettre, à elle seule, la reconnaissance d’un cas de rigueur dans la mesure où elle s’est déroulée dans l’illégalité, puis au bénéfice d’une simple tolérance des autorités suite au dépôt de sa requête. Or, le recourant ne saurait déduire de droits résultant d'un état de fait qu'il a lui-même créé en violation de la loi.

L’intégration socio-professionnelle du recourant en Suisse n’a en outre rien d’exceptionnel, étant rappelé que le fait de travailler pour ne pas dépendre de l'aide sociale, de ne pas avoir contracté de dettes, de payer ses impôts et de s'efforcer d'apprendre au moins la langue nationale parlée au lieu du domicile constitue un comportement ordinaire qui peut être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Il ne s'agit pas de circonstances exceptionnelles permettant à elles seules de retenir l'existence d'une intégration particulièrement marquée susceptible de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur. Dans le cas du recourant, quand bien même ce dernier a occupé divers emplois puis développé sa propre entreprise K______ Sàrl, son intégration professionnelle, qui peut être qualifiée de bonne, ne correspond cependant pas au caractère exceptionnel rappelé plus haut. En outre, son activité professionnelle exercée en Suisse se rapporte au domaine du bâtiment. Il ne s’agit donc pas d’une profession spécifiquement liée à la Suisse, de sorte que le recourant sera en mesure d’utiliser dans son pays les compétences et l’expérience professionnelles acquises en Suisse.

Le recourant ne saurait se prévaloir d’un comportement irréprochable, compte tenu des multiples condamnations dont il a fait l’objet. A cet égard, le recourant tente vainement de relativiser les condamnations inscrites à son casier judiciaire liées à son statut illégal. Or, pour rappel il a également été condamné le 27 septembre 2020 pour faux dans les certificats, après avoir tenté de tromper l’OCPM par la production de faux certificats de salaire émis par l’entreprise G______ Sàrl et d’attestations comportant des indications erronées en lien avec un prétendu séjour en Suisse sans interruption depuis 2008, à l’appui de sa demande d’autorisation de séjour du 21 décembre 2018. Il convient aussi de relever qu’il a encore fait preuve d’un mépris certain pour l’ordre juridique et les autorités suisses, violant les IES dont il a fait l’objet et se soustrayant, avec sa famille, au renvoi que l'OCPM avait prononcé à leur encontre.

Par ailleurs, le recourant a passé au Kosovo toute son enfance, son adolescence et une grande partie de sa vie d’adulte, périodes déterminantes pour le développement personnel et scolaire, et qui entraînent souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé. Outre sa famille nucléaire résidant avec lui en Suisse, il a d'ailleurs certainement conservé de fortes attaches tant familiales que sociales dans son pays d’origine. De plus, il n'apparaît pas que le recourant aurait noué des liens avec la Suisse qui dépasseraient en intensité ce qui peut être raisonnablement attendu de n'importe quel étranger au terme d'un séjour d'une durée comparable. Il n’a en outre pas été démontré qu’il maitriserait la langue française et il ressort au contraire de plusieurs pièces du dossier que ses auditions ont nécessité la présence d’un interprète. Le recourant n'a pas non plus établi avoir noué avec la Suisse des liens si profonds que l'on ne pourrait raisonnablement exiger de lui qu'il mette un terme à son séjour. Aucun élément du dossier n'atteste en outre que les difficultés auxquelles il devrait faire face en cas de départ vers son pays d'origine seraient plus lourdes que celles que rencontrent d'autres compatriotes contraints de partir au terme d'un séjour régulier en Suisse.

En outre, il ne faut pas perdre de vue que celui qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (cf. ATF 123 II 248 consid. 4a ; 111 Ibb 213 consid. 6b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1 ; 1C_269/2013 du 10 décembre 2013 consid. 4.1 et les références citées). Ainsi, le recourant ne pouvait ignorer, au vu de son statut illicite en Suisse, qu'il pourrait à tout moment être amené à devoir renoncer, en cas de refus de la régularisation de ses conditions de séjour, à tout ce qu’il avait mis en place en Suisse, y compris à son activité professionnelle indépendante.

Partant, ni l'âge du recourant, ni la durée de son séjour sur le territoire, ni son comportement, ni encore les inconvénients d'ordre socio-professionnel auxquels il pourrait éventuellement être confrontés dans son pays ne constituent des circonstances si singulières qu'il faudrait considérer qu'il se trouve dans une situation de détresse personnelle devant justifier l'octroi d'une exception aux mesures de limitation. Une telle exception n'a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d'origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu'on ne saurait exiger d'eux qu'ils tentent de se réadapter à leur existence passée, ce que le recourant n'a pas établi.

24.         Quant à la recourante, elle réside en Suisse depuis 2019, démunie de titre de séjour, ce qui ne remplit pas la condition de la longue durée de séjour exigée par la loi et la jurisprudence. Par ailleurs, comme déjà retenu par le tribunal et la chambre administrative dans leurs décisions précédentes, elle ne peut se prévaloir d’aucunes circonstances exceptionnelles, au niveau de son intégration sociale et professionnelle, qui rempliraient les conditions d’un cas de rigueur. En particulier, elle ne démontre pas une bonne maîtrise du français. Les relations d’amitié qu’elle a pu nouer en Suisse sont inconnues et il n’est pas établi qu’elles dépasseraient des liens d’amitié usuels après quelques années passées au même endroit. Enfin, son indépendance financière est essentiellement liée aux revenus de son époux. Un retour dans son pays d’origine, où elle a vécu jusqu’à ses 40 ans et où vivent ses trois frères, ses trois sœurs et sa mère, ne la confrontera donc pas à une situation d’une gravité telle qu’elle doive être mise au bénéfice d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur.

S’agissant de son étant de santé, il n’a pas été démontré que ses pathologies tant physiques que psychiques ne pourraient être soignées dans son pays d’origine. La recourante ne peut donc pas se prévaloir de son état de santé actuel – qui sera discuté plus avant sous l’angle de l’exécution du renvoi – pour justifier une exception aux mesures de limitation, étant rappelé que des problèmes de santé, mêmes importants, ne suffisent de toute façon pas, à eux seuls, à justifier l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas individuel d’une extrême gravité, en l’absence de liens particulièrement intenses avec la Suisse, dont la recourante ne peut se prévaloir. Enfin, le tribunal rappellera que le seul fait d’obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d’origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation (ATA/766/2024 du 25 juin 2024 consid. 2.8).

25.         Concernant le mineur C______, désormais âgé de 16 ans, ce dernier est arrivé en Suisse en 2019, à l’âge de 10 ans. Il a donc passé toute son enfance et effectué une partie de sa scolarité au Kosovo. Dans la mesure où, selon les déclarations du recourant, C______ suit actuellement un apprentissage d’employé de commerce dans la cadre de sa formation débutée auprès de R______ le 19 août 2024, dont le terme est prévu au 30 juin 2027, il ne peut pas encore se prévaloir d’avoir achevé avec succès une formation professionnelle en Suisse (cf. ATA/114/2025 du 28 janvier 2025 consid. 2.7). Ainsi, après une certaine période d'adaptation, il devrait pouvoir supporter un nouveau changement de lieu de vie dans son pays d'origine, comme il l’a déjà fait lors de son arrivée à Genève. Les connaissances scolaires acquises par C______ à Genève, d'ordre général, lui seront en outre profitables pour la suite de sa formation ou de sa carrière professionnelle au Kosovo. Familier avec les us et coutumes de son pays d'origine et maîtrisant l'albanais, qui est au demeurant la langue utilisée par ses parents, il devrait être en mesure de poursuivre au Kosovo une formation similaire à l’apprentissage qu’il a débuté en Suisse. L’intégration de l’adolescent en Suisse n'est ainsi pas avancée ni irréversible au point qu’un retour dans son pays d’origine ne pourrait être envisagé et constituerait un véritable déracinement.

Enfin, il faut encore relever qu’à teneur des pièces du dossier, C______ a débuté son apprentissage en août 2024, alors qu’il faisait l’objet, avec ses parents, d’une décision de renvoi définitive et exécutoire. Comme déjà dit supra, la situation actuelle des recourants résulte de leur persistance à demeurer en Suisse après le prononcé de la décision de refus de titres de séjour et de renvoi prononcée à leur encontre il y a quatre ans. Compte tenu de leur statut administratif précaire, ils ne pouvaient ignorer qu'ils risquaient de devoir à tout moment renoncer à ce qu’ils avaient mis en place en Suisse, tant pour eux-mêmes que pour leur enfant, avec les conséquences qui en découlent.

26.         On relèvera pour le surplus que les problèmes susceptibles d’affecter les recourants et leur fils au Kosovo sont pour l’essentiel ceux qui sont le lot de la population de ce pays, étant rappelé que l’exception aux mesures de limitation prévue par l’art.  30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire les étrangers aux conditions de vie de leur pays d'origine.

27.         Au vu de ce qui précède, l'OCPM n'a pas violé le droit fédéral, ni encore excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation (cf. art. 96 LEI) en refusant de délivrer les autorisations de séjour sollicitées et le refus de l’intimé de proposer au SEM l’octroi d’autorisations de séjour pour cas d’extrême gravité ne peut qu’être confirmé.

28.         Reste à déterminer si les recourants peuvent, comme ils le prétendent, obtenir un titre de séjour en se fondant sur l'art.  8 CEDH.

29.         L'art. 8 par. 1 CEDH peut être invoqué par un ressortissant étranger pour s'opposer à une séparation d'avec sa famille et obtenir une autorisation de séjour en Suisse à la condition qu'il entretienne des relations étroites, effectives et intactes avec un membre de celle-ci disposant d'un droit de présence assuré en Suisse, ce qui suppose que celui-ci ait la nationalité suisse ou qu'il soit au bénéfice d'une autorisation d'établissement ou d'un droit certain à une autorisation de séjour (ATF 135 I 143 consid. 1.3.1 ; 130 II 281 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1023/2016 du 11 avril 2017 consid. 5.1).

30.         Les relations familiales qui, sous cet angle, peuvent fonder un droit à une autorisation de police des étrangers sont avant tout celles qui concernent la famille dite nucléaire, soit celles qui existent entre époux, ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (ATF 140 I 77 consid. 5.2 ; 137 I 113 consid. 6.1 ; 135 I 143 consid. 1.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_293/2018 du 5 octobre 2018 consid. 1.4).

31.         Le Tribunal fédéral admet aussi qu’un étranger puisse, exceptionnellement et à des conditions restrictives, déduire un droit à une autorisation de séjour de l’art. 8 par. 1 CEDH s’il existe un rapport de dépendance particulier entre lui et un proche parent (hors famille nucléaire) au bénéfice d’un droit de présence assuré en Suisse (nationalité suisse ou autorisation d’établissement), par exemple en raison d’une maladie ou d’un handicap (ATF 140 I 77 consid. 5.2 ; 137 I 113 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_71/2022 du 26 janvier 2022 consid. 4.2).

32.         La jurisprudence du Tribunal fédéral relative à l'existence d'un rapport de dépendance entre parents et enfants majeurs dépend étroitement des circonstances. Un tel lien de dépendance a par exemple été reconnu entre un enfant majeur, souffrant d'une schizophrénie paranoïde continue et d'un trouble dépressif récurrent, et sa mère, qui bénéficiait d'une autorisation de séjour en Suisse, dans la mesure où il était établi, notamment par certificat médical, que le soutien que nécessitait l'état de santé de l'intéressé ne pouvait être fourni que par cette dernière, à défaut d'autres personne proches disponibles (arrêt 2C_546/2013 du 5 décembre 2013 consid. 4.4.2).

33.         En l’espèce, il n’a pas été démontré - ni même allégué - que les recourants se trouveraient dans une situation de dépendance particulière avec les membres de leur famille titulaires d’un droit de présence assuré sur le territoire helvétique. Les recourants ne peuvent ainsi revendiquer l'application de l'art. 8 CEDH en vue de l'octroi d'une autorisation de séjour sous l'angle du respect de leur vie familiale. En tout état, il leur sera loisible de maintenir des contacts avec leur famille en Suisse par le biais des moyens de communications actuels et de visites réciproques.

Il ressort de ce qui précède que l'autorité intimée n'a violé ni le droit conventionnel, ni le droit fédéral, ni encore excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation (art. 96 LEI) en refusant de donner une suite favorable à leur demande d'autorisations de séjour.

34.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation (cf. ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a). Le renvoi d'une personne étrangère ne peut cependant être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L'exécution n'est pas possible lorsque la personne concernée ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyée dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsqu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger la personne étrangère, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

35.         Cette dernière disposition s’applique en premier lieu aux « réfugiés de la violence », soit aux étrangers qui ne remplissent pas les conditions de la qualité de réfugié parce qu’ils ne sont pas personnellement persécutés, mais qui fuient des situations de guerre ou de violence généralisée (Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, éd., Code annoté de droit des migrations, volume II : loi sur les étrangers, 2017, p. 949). En revanche, les difficultés socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, de logement, d’emplois et de moyens de formation, ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-5549/2020 du 17 octobre 2022 consid 7.1 ; ATA/14/2024 du 9 janvier 2024 consid. 5.3).

36.         S’agissant spécifiquement des personnes en traitement médical en Suisse, l’exécution du renvoi ne devient inexigible, en cas de retour dans leur pays d’origine, que dans la mesure où elles pourraient ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d’existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d’urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine (arrêts du Tribunal administratif fédéral D-6799/2017 du 8 octobre 2020 ; E-3320/2016 du 6 juin 2016 et les références citées). Ainsi, si les soins essentiels nécessaires ne peuvent pas être assurés dans le pays d’origine de l’étranger concerné, en raison de l’absence de possibilités de traitement adéquat, si l’état de santé de l’intéressé se dégradait très rapidement au point de conduire d’une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique, l’exécution du renvoi ne sera raisonnablement pas exigible (ATA/137/2022 du 8 février 2022 consid. 9d).

37.         Selon la jurisprudence, en ce qui concerne l’accès à des soins essentiels, celui-ci est assuré dans le pays de destination s’il existe des soins alternatifs à ceux prodigués en Suisse, qui - tout en correspondant aux standards du pays d’origine - sont adéquats à l’état de santé de l’intéressé, fussent-ils d’un niveau de qualité, d’une efficacité de terrain (ou clinique) et d’une utilité (pour la qualité de vie) moindres que ceux disponibles en Suisse. En particulier, des traitements médicamenteux (par exemple constitués de génériques) d’une génération plus ancienne et moins efficaces, peuvent, selon les circonstances, être considérés comme adéquats. Hormis le critère qualitatif des soins, ceux-ci doivent de plus -, en conformité avec le modèle vu auparavant et développé en matière de droits (sociaux et économiques) de l’homme -, être accessibles géographiquement ainsi qu’économiquement et sans discrimination dans l’État de destination. Quoiqu’il en soit, lorsque l’état de santé de la personne concernée n’est pas suffisamment grave pour s’opposer, en tant que tel, au renvoi sous l’angle de l’inexigibilité, il demeure toutefois un élément à prendre en considération dans l’appréciation globale des obstacles à l’exécution du renvoi (Gregor T. CHATTON/Jérôme SIEBER, Le droit à la santé et à la couverture des soins des étrangers en Suisse, Annuaire du droit de la migration 2019/2020, p. 155 et les références citées). En revanche, les difficultés socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-838/ 2017 du 27 mars 2018 consid. 4.3).

38.         L’art. 83 al. 4 LEI ne confère donc pas un droit général d’accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l’infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d’origine de l’intéressé n’atteignent pas le standard élevé prévalant en Suisse. Ainsi, si les soins essentiels nécessaires peuvent être assurés dans le pays d’origine ou de provenance de l’étranger concerné, l’exécution du renvoi sera raisonnablement exigible. Elle ne le sera plus, en raison de l’absence de possibilités de traitement adéquat, si l’état de santé de l’intéressé se dégradait très rapidement au point de conduire d’une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-2693/2016 du 30 mai 2016 consid. 4.1 et les références citées ; ATA/1455/2017 du 31 octobre 2017 consid. 10d).

39.         En l’espèce, à teneur du dossier, la recourante est atteinte d’un syndrome bipolaire de type 1 ayant nécessité trois hospitalisations en milieu psychiatrique. Sur le plan somatique, elle souffre également de lombo sciatalgies chroniques, secondaires à des hernies discales étagées de la colonne vertébrale nécessitant un suivi régulier, sans opération envisagée à ce stade. Elle est en outre atteinte de coliques néphrétiques ayant nécessité une opération et qui sont soumises à surveillance médicale.

40.         Dans son arrêt du 25 août 2023 (6B_244/2023 consid. 6.8), le Tribunal fédéral a relevé que diverses autorités ont été en mesure de constater que le système de santé au Kosovo est en voie de progression. Même si l'introduction d'une couverture universelle n'est pas achevée (Commission européenne, Commission Staff working document, Kosovo 2022 report, 12 octobre 2022, p. 91), s'il fait face à des difficultés pour retenir son personnel attiré par la possibilité de travailler à l'étranger et si des résidents peuvent être amenés à effectuer des examens de routine dans des pays limitrophes (arrêt du Tribunal administratif fédéral précité F-3527/2019 consid. 7.2.4; v. aussi SEM, Focus Kosovo medizinische Grundversorgung, 2017, ch. 6.5), le système public de santé kosovar, organisé sur trois niveaux, est en mesure d'offrir des prestations médicales correctes; les soins de base sont en principe assurés (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-1602/2020 du 14 février 2022 consid. 5.3.8; D-2958/2018 du 12 novembre 2018 consid. 8.4.2) et l'accès à ces soins libre (Commission européenne, loc. cit.). L'offre est suffisante sur un plan quantitatif (SEM, op. cit., ch. 6.2) et répartie sur l'ensemble du territoire. Dans ce dernier document, le SEM a également constaté que rien n'indiquait que les personnes de retour au Kosovo n'auraient pas un plein accès aux prestations, y compris à celles offertes aux administrés dispensés d'en assumer les frais, cercle qui semble inclure notamment les patients souffrant d'affections chroniques. Cette offre publique est complétée par des fournisseurs de prestations privés (SEM, op. cit., ch. 7.3 et 8.1; Internationale Organisation für Migration [IOM] Deutschland, Kosovo Länderinformationsblatt 2020 ch. 1).

41.         Par principe, un étranger ne peut pas exciper de l'existence en Suisse de prestations médicales de qualité supérieure pour s'opposer à son renvoi dans un pays où le traitement s'avère disponible (cf. arrêts 6B_1226/2021 précité consid. 2.3.1; 6B_708/2020 du 11 mars 2021 consid. 5.3; 6B_1079/2018 du 14 décembre 2018 consid. 1.4.2; 2C_401/2018 du 17 septembre 2018 consid. 7) et qu'il ne suffit pas non plus d'invoquer que le traitement ne serait pas disponible à un prix abordable (arrêt 6B_822/2021 du 4 juillet 2022 consid. 2.4).

42.         La chambre administrative, citant le rapport « Landinfo » du 3 mars 2023 relatif au système de soins de santé au Kosovo, a jugé que ce pays offrait les soins nécessaires dans le domaine de la psychiatrique (ATA/1046/2023 du 26 septembre 2023 consid.10 ; ATA/1082/2023 du 3 octobre 2023 consid. 3.10). En particulier, le nombre d’établissements de soins de santé mentale y avait considérablement augmenté depuis 2000. Les soins psychiatriques de niveau secondaire sont dispensés dans les services psychiatriques des hôpitaux régionaux de L______ (Kosovo), M______, N______, O______ et P______ et Q______ ainsi qu’à l’hôpital universitaire de I______. Un site Web fournissait des informations sur le personnel et les services de chaque hôpital. Des centres de santé mentale avaient par ailleurs été créés dans toutes les grandes villes. Il proposait des conseils et des activités de jour pour les clients, avec des thérapies individuelles, de groupe et familiales. Il proposait également des visites à domicile. Les patients étaient suivis par des psychiatres, des travailleurs sociaux et des infirmiers psychiatriques.

43.         Compte tenu de ce qui précède, il est établi que la prise en charge médicale globale de la recourante est disponible dans son pays. Concernant en particulier ses troubles psychiatriques, elle pourra poursuivre son suivi thérapeutique et médicamenteux au Kosovo, où il existe sept centres de traitements ambulatoires pour les maladies psychiques ainsi que des services de neuropsychiatrie pour le traitement des cas de psychiatrie aiguë au sein des hôpitaux généraux des villes précitées. Au besoin, sa prise en charge pourra être préparée depuis la Suisse avec l’aide des services compétents. Au surplus, afin de parer à l’éventualité d’une latence à l’accès aux médicaments, immédiatement après son retour, la recourante aura la possibilité d’emporter avec elle une réserve de médicaments suffisante pour couvrir ses besoins jusqu’à ce que sa prise en charge puisse à nouveau être assurée au Kosovo et, si la disponibilité permanente du traitement qui lui est actuellement administré ne devait pas y être garantie, changer de médication avec l’aide du corps médical sur place, voire de s’organiser pour se faire acheminer la médication prescrite depuis l’étranger. 

On ne peut donc retenir en l'état qu'en cas de renvoi son état de santé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie, comme l'exige la jurisprudence précitée. Au surplus, il ressort du rapport médical du 2024 que l’évolution de l’état de la recourante est favorable avec la poursuite de son traitement médicamenteux, qui est disponible au Kosovo. Compte tenu des documents médicaux figurant au dossier le seuil de gravité au sens restrictif de la jurisprudence précitée n’est pas manifestement pas atteint.

Si les passages du rapport de l’OSAR cités par les recourants dans leurs écritures finales du 6 juin 2025, font certes état de certaines carences dans le système de santé kosovar (déficit de personnel, indisponibilité de certains médicaments et équipements, tendance de la population à se diriger vers des soins privés qui sont plus coûteux), ils ne mentionnent en aucun cas que des affections psychiatriques ne seraient pas prises en charge dans ce pays. Les éléments contenus dans ces documents ne suffisent donc manifestement pas à rendre insoutenables les constatations faites dans la décision querellée (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_561/2024 du 12 mars 2025 consid. 3.3.1).

Enfin, concernant l’argument invoqué dans le recours en lien avec les tensions existant entre le Kosovo et l’Albanie, le tribunal retiendra que le Kosovo n’est pas en proie à la guerre ou à une situation de violence généralisée qui pourrait justifier une admission provisoire.

En conclusion, en l’absence d'éléments démontrant que le retour de la recourante au Kosovo la mettrait concrètement en danger compte tenu de sa situation médicale, il convient de retenir que l'exécution de son renvoi, de même que celui de son mari et de son fils C______, est raisonnablement exigible au sens de l’art. 83 LEI, de sorte que l'OCPM n'avait pas à proposer leur admission provisoire au SEM.

44.         Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

45.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent sont condamnés au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 750.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

46.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 27 février 2025 par Madame A______ et Monsieur B______, agissant en leur nom et celui de leur enfant mineur C______, contre la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 27 janvier 2025 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 750.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.


Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations et, pour information, à la chambre administrative de la Cour de justice.

Genève, le

 

La greffière