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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3491/2023

JTAPI/545/2024 du 06.06.2024 ( LCI ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : DROIT D'ÊTRE ENTENDU;INVENTAIRE FÉDÉRAL;ZONE À PROTÉGER;ESTHÉTIQUE;BRUIT DU TRAFIC
Normes : Cst; OISOS; RPSFP; LCI.14.al1.leta; LCI.15; LCI.45; LCI.48
En fait
En droit
Par ces motifs

 

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3491/2023 LCI

JTAPI/545/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 6 juin 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Alain MAUNOIR, avocat, avec élection de domicile

 

contre

 

Madame B______, représentée par Me François BELLANGER, avocat, avec élection de domicile

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC


EN FAIT

1.             Madame B______ est propriétaire de la parcelle n° 1______ de la commune de C______ (ci-après : la commune), sur laquelle se trouve un ensemble bâti composé des bâtiments cadastrés nos 2______, 3______ et 4______.

Elle est également propriétaire de la n° 5______, sur laquelle se trouve notamment le bâtiment cadastré n° 6______ (ci-après : la maison de maître).

2.             Ces parcelles se trouvent dans le périmètre d’un site inscrit à l’inventaire des sites construits d’importance nationale à protéger en Suisse (ci-après: ISOS), avec un objectif de sauvegarde A (le plus élevé).

Elles sont aussi incluses dans le périmètre du plan de site N° 7______ (ci-après : le plan de site) adopté par arrêté du Conseil d’État du ______ 2017, lequel a, selon son règlement d’application adopté le même jour, pour but de protéger le sud du village de D______, qui figure dans l’ISOS, pour l’ensemble de ses qualités architecturales et paysagères.

Les bâtiments susmentionnés bénéficient, conformément à ce plan, d’une protection accrue dans la mesure où il est prévu qu’ils doivent être maintenus en raison de leurs qualités architecturales ou historiques.

3.             Monsieur A______ est propriétaire des parcelles nos 8______, 9______ et 10______ [recte : 11_____] de la commune, qui se situent en face de la parcelle n° 1______, de l’autre côté de la E______.

La parcelle n° 8______ abrite le bâtiment cadastré n° 12_____, une habitation de quatre logements

4.             En octobre 2021, par l’intermédiaire d’un architecte, Mme B______ a déposé auprès du département du territoire (ci-après : le département) une demande d’autorisation visant la rénovation et transformation du bâtiment n° 4______ (ci-après : le bâtiment en cause) et l’installation d’une pompe à chaleur (ci-après : PAC) sur la parcelle n° 1______.

5.             Lors de l’instruction de cette demande, enregistrée sous la référence DD 13_____, les préavis usuels ont été requis et émis. Le projet a été remanié à cinq reprises, de manière importante, pour répondre aux diverses exigences des instances de préavis.

Ainsi, l’office cantonal des transports (ci-après : OCT) a rendu un préavis favorable sous conditions, le 8 mars 2023. Il a requis que soit établi et enregistré la servitude de stationnement et d’accès à la cour sur la parcelle n° 5______ en faveur de la parcelle n° 1______ et que cela lui soit envoyé un mois avant l’ouverture du chantier.

La commune a préavisé favorablement en date du 20 avril 2023, sous conditions. D’une part, elle a requis que soit fourni, avant l’ouverture du chantier, l’acte de création de servitude sur la parcelle n° 5______ (passage à pied et à véhicules ainsi que d’usage de parking) en faveur de la parcelle n° 1______. D’autre part, elle a exigé que l’ensemble des véhicules rattaché aux logements existants sur la parcelle n° 5______ soit, au vu de la situation particulière en matière de stationnement sur le domaine public dans le village de D______, contenu dans l’espace de la cour, sur fonds privé.

Le 21 juin 2023, le service de l’air, du bruit et des rayonnements non ionisants
(ci-après : SABRA) a émis un préavis favorable, sous conditions. L’installation de la PAC air/eau devait être effectuée selon les exigences du constructeur afin de minimiser la génération de bruit. Le niveau dévaluation de la PAC était « de non 41.9 dB(A) » (sic) comme indiqué dans le formulaire. Cette valeur respectait la valeur de planification pour la période nuit, de 45 dB(A).

Le 14 août 2023, la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) a émis un préavis favorable, avec dérogation (pour un vide d’étage à 2,40 m au rez-de-chaussée) au sens de l’art. 49 al. 5 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05).

Le 20 septembre 2023, le service des monuments et des sites (ci-après : SMS) a préavisé favorablement, sous conditions et avec dérogation. Il encourageait l’octroi d’une dérogation au sens de l’art. 49 al. 5 LCI pour le vide d’étage au rez-de-chaussée dans la mesure où la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : CMNS) avait, lors de sa séance du 12 juillet 2022, requis la préservation des structures primaires de la construction (la charpente) et s’était déclarée défavorable au projet d’excaver exagérément le niveau naturel pour gagner de la hauteur habitable. Il avait pris connaissance de la dernière version du projet et considérait qu’il avait été majoritairement tenu compte de ses remarques émises en juillet 2023 et de celles de la CMNS du 12 juillet 2022. La reprise en sous-œuvre ne devait se produire qu’au niveau des seuils ; il devait s’agir d’une excavation modérée pour la mise en place d’une isolation/étanchéité contre sol. En cas de modifications, il devait en être informé au plus tôt, en amont de l’ouverture du chantier. Les places de stationnement et leur affectation aux logements A (sis dans la maison de maître), B (sis dans le bâtiment cadastré n° 2______) et C (projet en cause) devait être respectées ; aucun stationnement n’était autorisé devant la porte de la grange pour le logement C. S’agissant d’un bâtiment figurant dans la catégorie « maintenu » sur le plan de site, un crépi à la chaux devait être mis en œuvre - toutes les couches appliquées à la main en respectant le retrait des encadrements en pierre et des chaînes d’angle existants - en cas de travaux de rénovation des façades. Les installations intérieures (structures et escaliers) devaient être réalisées par un système porteur traditionnel - solivage en bois, plots - sur corbeaux et filière - ou autre système indépendant « sec » tels que plots, briques afin de minimiser les atteintes sur les murs porteurs en maçonnerie. Le béton coulé était proscrit. Toutes les ouvertures existantes anciennes - portes, fenêtres et volets - devraient faire l’objet d’une opération de conservation/restauration. L’ensemble des nouvelles menuiseries extérieures - volets, portes - devraient être en bois. Le système oscillo-battant était proscrit sur les nouvelles menuiseries à double vantaux. L’ensemble des règles d’exécution devaient lui être soumises pour validation avant commande des travaux et des divisions au moyen de partitions ou de doubles de vantaux pourraient dans ce cadre être demandés, y compris pour les grandes baies. Les matériaux naturels et traditionnels dont la mise en œuvre, la durabilité et l’intégration étaient confirmées étaient requis. Pour la toiture : tuile traditionnelle, ferblanterie en cuivre sans blindage des vire-vents et des plates-bandes, maintien de la finesse actuelle des avant-toits. Les châssis de toiture devaient recevoir une pose affleurée au matériau de couverture et ne devaient pas comporter de système d’obscurcissement extérieur, de type volet roulant. S’agissant de l’amélioration thermique du bâtiment, il demandait que les principes d’isolation intérieure prévus (murs et toitures) fassent l’objet d’une étude de physique du bâtiment afin de permettre de s’assurer de la pérennité des éléments anciens après les travaux d’isolation, au regard notamment des phénomènes hygrothermiques, et de lui faire valider le parti pris constructif et les détails de bords de toit. Toutes clôtures éventuelles devaient être en serrurerie traditionnelle, signifier tout pare-vues entre logements, etc. Les aménagements extérieurs devaient être précisés à l’exécution et il faudrait proposer des matériaux perméables et traditionnels, dans des teintes adaptées à ce contexte rural - type gravier, boulets dans la cour historique, pavé, sol argilo calcaire - et des plantations d’essences indigènes. Les pavés bétons étaient proscrits. Le projet de mutation parcellaire devait être accompagné de toutes les servitudes permettant au nouveau logement de jouir pleinement de ce statut. Il fallait lui soumettre, pour validation avant commande des travaux, l’ensemble des détails d’exécution, description des matériaux et teintes des éléments.

Le 31 janvier 2022, se prononçant sur la version initiale du projet, le SMS a rapporté la position de la CMNS adoptée le 18 janvier 2022 s’agissant de la façade nord du bâtiment en cause, qui s’était déclarée défavorable à tout percement aussi important sur cette façade pignon, borgne à l’origine, mais avait précisé que si les services de la mobilité l’acceptaient (chaussée exiguë et absence de trottoir), la création d’un accès E______ serait possible moyennant un percement de largueur correspondant à une porte d’accès standard, au maximum.

Les autres instances sollicitées ont émis des préavis favorables, notamment l’office de l’urbanisme (ci-après : OU) en date du 27 octobre 2021.

6.             Par décision du ______ 2023, publiée dans la feuille d’avis officielle du même jour, le département a délivré l’autorisation de construire DD 13_____.

En son point 7, cette décision stipulait que les conditions figurant dans les préavis des différentes instances consultées ou dans les analyses de l’OAC devaient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de l’autorisation de construire.

7.             Par acte du 23 octobre 2023, agissant en personne, M. A______ a interjeté recours contre la décision précitée par devant le tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant implicitement à son annulation.

Après avoir brièvement retracé l’histoire de la parcelle accueillant le projet attaqué, et présenté le site de D______, il a fait valoir que le projet était entaché d’erreurs et que des points essentiels, relevés dans ses observations du 10 novembre 2021 déposées auprès du département, n’avaient pas été pris en compte.

L’importance patrimoniale exceptionnelle du bâtiment en cause, non seulement régionale, mais nationale, n’avait pas été prise en considération.

Les places de stationnement posaient problème. La cour était déjà envahie par les véhicules de la famille de l’intimée et des actuels locataires. Le respect d’un espace devant la porte maintenue de la grange était peu probable vu les aménagements existants dans la partie nord-est de la cour et les deux bancs en pierre devant les fenêtres du salon de la maison de maître et ne figurant pas sur les plans rendaient douteux la création de deux places de parc à cet emplacement. Les futurs habitants iraient stationner leurs véhicules dans la rue du village déjà encombrée, comme le faisaient déjà en partie les locataires actuels. L’architecte était conscient que le problème du stationnement n’était pas résolu puisqu’il avait préconisé de garer des véhicules dans les parkings souterrains prévus dans le plan de site. Ces parkings ne seraient toutefois probablement jamais construits.

La parcelle n° 1______ se trouvait sur le site archéologique de D______ et des vestiges de l’époque romaine avaient été découverts à proximité. Des excavations profondes y avaient toutefois été réalisées sans que l’archéologue cantonal en soit averti. Le service archéologique cantonal devait dès lors suivre de près les travaux envisagés.

L’autorisation entreprise consistait à régulariser des travaux déjà accomplis.

La porte prévue sur la façade nord du bâtiment en cause, au ras de la E______ victime d’un fort trafic de transit, n’était pas nécessaire car ce bâtiment disposait déjà de plusieurs accès sur la façade ouest, qui donnaient sur la cour. La partie nord de la maison de maître, qui bordait également la E______, avait été rénovée récemment sans qu’il ait été nécessaire d’y pratiquer une ouverture dans la façade. L’ouverture d’un tel accès ne pourrait être envisagée que si une solution assurant la sécurité des piétons et respectant la physionomie du site était trouvée ; cette porte donnerait en effet sur le tronçon de la E______ situé en face de l’entré donnant accès à deux des quatre logements de sa maison et il faudrait prévoir les protections nécessaires des deux côtés de la route, ce qui rendrait le passage des véhicules fort problématique voire impossible. S’agissant de la fenêtre avec volets sur la façade nord, il convenait de rappeler que la rue était bordée de maisons d’habitations anciennes, séparées par des jardins et qui avaient été disposées de façon à éviter d’avoir des vis-à-vis. Lorsque l’intimée était devenue propriétaire, il avait été convenu qu’elle s’abstiendrait de créer des ouvertures sur cette façade et lui-même s’était engagé à ne pas créer un appartement dans les combles de sa demeure et à ne pas ouvrir de nouvelles fenêtres bénéficiant d’une vue plongeante sur la propriété de sa voisine. Le projet ne respectait pas cet accord.

En raison de la particularité de la route, le problème de la levée des ordures était particulièrement épineux à D______ et non résolu à ce jour puisque la commune ne disposait d’aucun emplacement pour les enterrer ou les stocker. On assistait donc à une prolifération des poubelles en bordure de la route, en face de la fontaine historique, avec toutes les nuisances que cela impliquait pour le voisinage.

S’il était légitime de valoriser un bien, le cas présent ne constituait qu’une opération purement commerciale visant à rentabiliser au maximum un bien récemment acheté. Or, un projet devrait viser une mise en valeur et non une rentabilisation maximum d’un bâtiment qui faisait partie d’un ensemble d’une valeur patrimoniale exceptionnelle. Il faudrait donc revoir ce projet en évitant les enlaidissements et les nuisances signalées.

8.             Dans ses observations du 29 décembre 2023, l’intimée a conclu, par le biais de son conseil, au rejet du recours et à la confirmation de la décision querellée, le tout avec suite de frais et dépens.

Le recourant invoquait une importance patrimoniale exceptionnelle du bâtiment en cause sans l’expliquer ni le démontrer et n’indiquait pas quelle serait la disposition légale ou la norme violée. De plus, il ne retirerait aucun avantage pratique de l’admission d’un grief relatif à la protection du patrimoine, invoqué de manière général, en l’absence d’incidence concrète sur sa situation. Ce grief relevait du contrôle abstrait du projet et était donc irrecevable. Sur le fond, tant le SMS que la CMNS avaient observé, dans le cadre de l’instruction minutieuse du dossier, que le projet se trouvait dans une zone protégée par un plan de site ainsi qu’à proximité d’une voie incluse dans l’inventaire fédéral des voies de communication historiques de la Suisse (ci-après : IVS) et que le bâtiment avait reçu une valeur « intéressant » au recensement architectural du canton. À réception de la première version du dossier, la CMNS avait immédiatement délégué son commissaire afin qu’il effectue une visite sur place et avait sollicité un reportage photographique. Sur cette base, le SMS avait sollicité, le 31 janvier 2022, d’importantes modifications du projet. Dans son préavis du 21 juillet 2022, la CMNS avait donné son accord de principe sur plusieurs éléments, tout en requérant d’autres modifications. Après une nouvelle modification du projet, le SMS s’était référé au préavis de la CMNS précité, en relevant les éléments positifs du nouveau projet. Enfin, sur la dernière version du projet, il s’était déclaré favorable avec dérogations et sous conditions, fixant de très nombreuses et précises conditions. Les instances de préavis avaient donc porté une attention particulière à la protection accordée au bâtiment, au projet et à son intégration dans son environnement, en établissant des préavis circonstanciés et en soumettant l’autorisation querellée à des conditions strictes. Ces préavis n’étaient pas remis en cause par le recourant et leurs conditions étaient reprises dans la décision. Au surplus, le SMS avait exigé que les éléments patrimoniaux dignes de protection soient non seulement maintenus, mais également restaurés. Partant, l’objectif de protection et de valorisation du patrimoine découlant tant de l’ISOS que du plan de site était pleinement atteint.

La création des places de stationnement avait été minutieusement étudiée par la commune, la CMNS et le SMS ainsi que l’OCT, qui s’étaient tous déclarés favorables au projet. La crainte du recourant quant à une prétendue impossibilité de les réaliser en raison des aménagements existants n’étaient pas étayée, étant rappelé qu’un délégué de la CMNS s’était rendu sur place et qu’un reportage photographique complet avait été réalisé. Il découlait de ce dernier que seuls quelques pots de fleurs et plantes en pot, soit du mobilier léger facilement amovible, se trouvaient à proximité de la façade au nord-est de la cour. La prétendue absence d’intention de respecter l’espace devant la porte maintenue ou la présumée intention des habitants de stationner leur véhicule dans le village ne reposaient sur aucun élément concret et relevait du procès d’intention. En tout état, la question du « parking sauvage » excédait le cadre du présent litige.

Le recourant prétendait, sans en apporter la preuve ou même un début d’indice, que des excavations profondes auraient été réalisées de manière illégale. Ce grief, sans aucune incidence sur sa situation personnelle, ce d’autant plus qu’il s’agirait de modifications intérieures au bâtiment, devait être déclaré irrecevable. Sur le fond, il relevait d’une mauvaise lecture du dossier. Si la première version du projet présentait certes une excavation pour un fitness, un local chaufferie et un atelier, celle-ci n’était plus prévue dans le projet autorisé ; seule une légère excavation était prévue au rez-de-chaussée notamment pour mettre en place une isolation/étanchéité au niveau du sol. Par ailleurs, les éventuelles découvertes archéologiques étaient déjà protégées par les art. 31 et 32 de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 (LPMNS - L 4 05), étant rappelé que ni le SMS ni la CMNS n’avaient formulé d’observations à cet égard. Aucune excavation n’avait été réalisée de manière illégale ; si tel avait été le cas, le commissaire délégué à la CMNS n’aurait pas manqué de le relever et le SMS et la CMNS auraient exigé des mesures rectificatives en ce sens dans leurs préavis.

Le grief relatif à la nécessité ou non d’un accès sur la façade nord, ce qui relevait exclusivement de l’opportunité, était irrecevable. La situation d’un autre bâtiment non concerné par le projet et aux caractéristiques différentes ne présentait aucune pertinence. En tout état, cette entrée se justifiait par la nécessité de pouvoir accéder à l’appartement existant (non inclus dans l’autorisation de construire objet de la présente procédure) et à l’appartement du projet. Elle avait été admise par toutes les instances de préavis et le recourant disposait exactement du même type accès pour sa parcelle et son bâtiment.

S’agissant du problème de circulation et risque pour la sécurité des piétons, le recourant se référait de manière toute générale au trafic sur la E______ et à de prétendus problèmes de sécurité pour les piétons, sans les expliciter ni les rendre crédibles. L’OCT avait examiné le projet à plusieurs reprises et rendu un préavis favorable sous conditions le 8 mars 2023, confirmant l’absence de risque pour la sécurité des usagers de la E______. Par ailleurs, la porte d’entrée s’ouvrait sur l’intérieur et n’empiétait pas sur cette route. Il n’existait donc aucun problème de sécurité découlant de la création de cet accès et il n’était nullement nécessaire de créer des « Protections nécessaires des deux côtés de la route ».

En se plaignant sans autre motivation de la création d’une fenêtre qui se trouverait « directement en face de la fenêtre du logement du rez-de-chaussée de [sa] maison », on pouvait comprendre que le recourant cherchait à préserver son intimité et invoquait un inconvénient grave au sens de l’art. 14 LCI. Ce dernier n’invoquait aucune violation d’une quelconque disposition légale du droit de la construction. Il n’existait par ailleurs aucun accord ou convention entre les parties, qui relèverait en tout état d’une problématique de droit privé.

Le problème soulevé au sujet de la levée des ordures, pour autant qu’il soit avéré, ne présentait aucun lien avec le projet. De plus, le recourant ne démontrait pas être affecté plus que les autres habitants du village par cette problématique, ni que la création d’un logement supplémentaire aurait un impact sensible sur cette situation préexistante. Ce problème relevait exclusivement de la police du domaine public.

Selon le recourant, le projet ne viserait qu’une opération purement commerciale en vue de rentabiliser un immeuble au maximum. Il préconisait de revoir le projet « en évitant les enlaidissements et les nuisances signalées ci-dessus ». On ne voyait pas quel serait son intérêt à l’admission du grief, puisque l’aspect extérieur du bâtiment visible depuis sa parcelle ne portait que sur la façade nord, soit la porte d’entrée et la fenêtre créées. Dans tous les cas, son appréciation purement subjective ne permettait pas de remettre en cause les conclusions circonstanciées et motivées des instances de préavis s’agissant des questions d’esthétique des constructions.

9.             Dans ses observations du 3 janvier 2024, le département a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision querellée, s’en rapportant à justice s’agissant de sa recevabilité. Il a produit son dossier.

Sans véritablement développer son grief ni remettre en cause les interventions proposées et autorisées sur le bâtiment existant, le recourant rappelait l’importance patrimoniale du bâtiment concerné par l’autorisation de construire délivrée. À cet égard, il ne pouvait qu’être constaté qu’amenée à se prononcer sur cette demande d’autorisation de construire, la CMNS ou, pour elle, le SMS, après avoir exigé et obtenu que d’importantes modifications soient apportées au projet initial, s’était déclarée favorable à cette demande. La présentation de cinq projets différents démontrait le sérieux avec lequel ces instances de préavis avaient travaillé avant de valider le dernier projet présenté, non sans émettre de strictes conditions à sa mise en œuvre, au vu notamment de l’importante protection offerte à ce bâtiment ainsi qu’à son environnement. À noter également que les éléments patrimoniaux dignes de protection devaient non seulement être maintenus mais aussi être restaurés, en respectant certaines règles d’intervention.

Au vu des caractéristiques du périmètre concerné par le projet, l’emplacement et le nombre de places dévolues au stationnement avaient fait l’objet d’une analyse fort approfondie, la commune et l’OCT exigeant notamment qu’une servitude d’accès et de stationnement soit établie et inscrite au registre foncier et le SMS imposant que l’espace situé devant la porte de la grange demeure en tout temps libre. Ces préavis avaient été repris au titre de conditions dans l’autorisation de construire délivrée et les pièces disponibles faisaient apparaître que des démarches auprès d’un notaire avaient déjà été entreprises. Ainsi, rien ne permettait en l’état de considérer que, juridiquement ou matériellement parlant, les places de parc ne pourraient pas être édifiées aux emplacements prévus.

Se basant sur des éléments ne concernant pas l’autorisation querellée, le recourant prétendait que des excavations profondes auraient déjà été réalisées sur la parcelle n° 1______ et que la procédure initiée consisterait à régulariser des travaux déjà accomplis. En l’occurrence, le projet initial avait considérablement évolué et l’excavation prévue avait été abandonnée ; seuls des travaux d’isolation des seuils avaient été autorisés et il n’avait pas connaissance d’autres travaux d’excavation effectués sans autorisation, le commissaire ayant effectué la visite n’ayant émis aucune remarque à ce sujet. Au surplus, on ne voyait pas sur la base de quel intérêt personnel le recourant pourrait les faire valoir.

Le recourant prétendait que l’accès prévu sur la façade nord du bâtiment ne serait pas nécessaire et qu’il serait même dangereux pour la circulation des piétons. En prenant en considération la typologie des transformations intérieures proposées par l’intimée, on ne voyait pas quelle autre solution aurait pu être mise en œuvre pour offrir aux habitants des logements concernés, existants ou à construire, un accès suffisant. Dans son préavis du 31 janvier 2022, le SMS avait indiqué que si l’OCT n’y était pas opposé, la création d’un accès côté route serait possible, moyennant un percement de largeur correspondant à une porte d’accès standard, au maximum, ce qui démontrait qu’au niveau de la protection du patrimoine, l’ouverture de cette façade aujourd’hui borgne n’avait pas été considérée comme inappropriée. Pour ce qui concernait la sécurité des piétons, le recourant ne démontrait pas que le village de D______ serait confronté à un problème de trafic de transit et l’OCT n’avait émis aucune remarque à ce sujet.

Sans vraiment étayer son grief, si ce n’était sur des considérations d’ordre privé en relation avec un accord qu’il aurait conclu avec l’intimée, le recourant s’opposait à la création d’une fenêtre. Les distances et vues droite prises en considération apparaissaient toutefois conformes à ce que permettait d’imposer l’art. 106 LCI.

La problématique de la levée des ordures n’apparaissait pas être en lien avec l’autorisation querellée. Conformément à l’art. 12 al. 1 de la loi sur la gestion des déchets du 20 mai 1999 (LGD - L 1 20), le département ne bénéficiait d’aucune compétence en la matière, seules les communes l’ayant. Or, en l’espèce, la commune n’avait formulé aucune remarque ni émis aucune condition à ce sujet.

Il n’appartenait pas au département de se prononcer sur les raisons qui amenait un administré à déposer une demande d’autorisation de construire, son rôle se limitant à contrôler que le projet présenté respectait les dispositions légales applicables ; tel était le cas en l’espèce.

10.         Par réplique du 29 février 2024, sous la plume de son conseil, le recourant a formellement conclu à l’annulation de la décision entreprise, sous suite de frais et dépens.

Le plan de site de D______ prévoyait le maintien de la cour historique située entre la maison de maître et les anciens bâtiments de ferme (bâtiments nos 2______, 3______ et 4______) ainsi que du portail en fer forgé existant à l’entrée, depuis la E______. En plus de la partie en fer forgé, ce portail était encadré de deux piliers et de deux bornes de pierre blanche également historiques, qui délimitaient l’espace d’accès à la cour. Le portail historique grillagé avait été déposé et, plus récemment, les bornes situées au sol avaient été sciées à leur base. Ces éléments historiques formant un tout digne de protection, le département devait ordonner leur remise en place respectivement leur reconstitution à l’identique. Or, cela aurait pour effet que les surfaces de parking prévues seraient concrètement impossibles à utiliser. Partant, le projet ne respectait pas les dispositions du plan de site puisque s’il était réalisé, il serait incompatible avec la conservation du portail dans son ensemble, incluant les parties en fer forgé ainsi que la remise en état des bornes blanches.

La création de nombreuses places de parking provoquerait une importante modification de l’utilisation de la cour. Le 21 juillet 2022, la CMNS avait exigé l’établissement d’un plan des aménagements paysagers (ci-après : PAP) incluant les parcelles nos n° 5______ et n°1______ et avait demandé que les droits de jour en direction de cette cour, liés à l’éventuel futur nouveau logement, soient garantis, par exemple par une servitude adéquate. À l’examen du dossier, aucun véritable PAP n’avait été établi, l’architecte ayant produit un « plan masse, PAP, places de stationnement – N 06 » daté du 8 février 2023 qui ne tenait pas compte des grandes qualités historiques et architecturales de la cour : ni le portail historique, ni la fontaine adossée au mur dans l’axe du portail, ni les autres éléments dignes de protection tels que les bancs en pierre et la terrasse située au nord-ouest de la cour historique n’y étaient dessinés. De plus, les droits de jour donnant sur cette même cour n’y étaient pas représentés. Ainsi, l’enchevêtrement des fonctionnalités de la cour n’avait fait l’objet d’aucune analyse exhaustive et sérieuse, permettant de respecter sa substance historique. Sous cet angle, le projet litigieux ne respectait ni les principes de conservation déduits de l’ISOS ni les exigences exprimées dans le préavis de la CMNS du 21 juillet 2022. À tout le moins, un véritable PAP devait être produit par l’intimée et soumis à la CMNS pour nouveau préavis. Par ailleurs, les interventions et nouveaux percements prévus dans la façade nord constituaient une violation manifeste du contenu de l’ISOS, portant une atteinte aux murs extérieurs d’une maison rurale attestée en 1723 et contrevenant à l’art. 6 al. 1 de la loi fédérale sur la protection de la nature et du paysage du 1er juillet 1966
(LPN - RS 451), notamment. Le plan de site exigeait également que les murs historiques caractéristiques soient conservés dans leur état d’origine. D’un point de vue fonctionnel, la création d’une nouvelle porte sur la façade nord n’était pas indispensable, un accès aux bâtiments nos 2______ et 4______ existant par la cour à l’ouest ou par la façade est.

La maison de maître était occupée par deux logements indépendants l’un de l’autre : le plus grand, situé dans la partie sud, était occupé par l’intimée et sa famille, soit quatre adultes et un enfant presque majeur. Si le projet litigieux se réalisait, un total de quatre habitations serait desservi par la cour, le bâtiment n° 2______ étant aujourd’hui déjà occupé. Compte tenu du ratio de 1,40 par 100 m2 habitables découlant du règlement relatif aux places de stationnement sur fonds privés du 17 mai 2023 (RPSFP - L 5 05.10), le total des surfaces habitables ne pouvait pas dépasser, avec six places de stationnement, 428 m2. Or, selon le plan masse n° 14_____ du 8 février 2023, le bâtiment n° 2______ disposait de 185,60 m2 habitables, le logement litigieux à créer s’étendrait sur 93,80 m2 habitables et on ignorait les surfaces habitables dans la maison de maître, d’une surface au sol de 381 m2 et qui disposait d’au moins deux niveaux habitables. Il était certain que les surfaces habitables actuellement existantes dépassaient largement les capacités de parking de la cour.

La distance entre le bâtiment en cause et son bâtiment cadastré n° 15_____, de l’autre côté de la E______, était inférieure à 6 m. Compte tenu du gabarit de hauteur des bâtiments existants de part et d’autre de cet axe routier, soit environ 10 m pour son bâtiment et environ 7,50 m au faîte du bâtiment en cause, il était manifeste que la distance de vues droites entre ces deux bâtiments n’était pas respectée. Le projet contesté créait de nouvelles vues droites dans la façade nord du bâtiment en cause jusqu’à présent toujours affecté à un usage purement agricole. L’intimée provoquait une situation nouvelle, ce qui la contraignait à respecter la distance minimale de vues droites. Dans sa réponse, le département avait prétendu que l’art. 106 LCI permettrait de déroger aux longueurs minimales de vues droites, mais cet argument se heurtait au fait que cette disposition ne prévoyait de dérogation que si celle-ci était justifiée par un objectif de sauvegarde du caractère architectural et de l’échelle de l’agglomération ainsi que du site environnant. Or, on peinait à comprendre en quoi la violation de la distance minimale de vues droites permettrait de sauvegarder le caractère architectural de D______ ; le département ne l’expliquait nullement. Au contraire, le plan de site indiquait que les murs existants « doivent conserver leur caractère d’origine » et l’art. 6 al. 1 LPN ainsi que le contenu de l’ISOS prescrivaient que les bâtiments existants devaient être conservés intacts. En tout état, aucune dérogation au sens de l’art. 106 LCI n’avait été octroyée. La CMNS ne s’était pas prononcée sur le non-respect des distances de vues droites et le SMS n’avait fait état que d’une dérogation à l’art. 49 LCI.

Le projet litigieux engendrerait une violation de l’ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB - RS 814.41). En effet, la fenêtre prévue sur la façade nord constituerait l’unique ouverture vers l’extérieur d’une nouvelle chambre à coucher et la E______ était un axe routier très fréquenté, au moins à certaines périodes de la journée, qui générait donc un important niveau de bruit routier.

Les plans autorisés ne prévoyaient aucun emplacement permettant le tri puis la levée des déchets des habitants de l’ensemble bâti formé des bâtiments cadastrés nos 2______, 3______ et 4______. Bien qu’un plan spécifique lui ait été demandé, l’intimée n’avait fourni qu’un plan masse (n° 14______) incomplet. Le dossier étant lacunaire à cet égard, il convenait de le renvoyer au département, étant noté que même à supposer que la compétence relative aux installations de récolte, de tri et de levée des déchets soit de la seule compétence communale, les mesures constructives correspondantes devaient être prises dans le cadre de la procédure d’autorisation de construire, en application du principe de coordination.

Il avait été allégué que la nouvelle porte d’accès depuis la façade nord serait indispensable pour accéder aux surfaces de logement, ce qui était inexact puisque les bâtiments susvisés formaient un tout et bénéficiaient d’un accès existant depuis la cour à l’ouest ainsi qu’à travers leur façade est. Cette porte provoquerait une situation de danger, tant pour les usagers de la route que pour les futurs habitants. Eu égard à l’étroitesse de la E______ à cet emplacement et de l’absence de trottoirs, toute personne franchissant cette porte se trouverait directement sur la chaussée, exposée à la circulation motorisée. Cela était d’autant plus problématique que le projet prévoyait que cette porte devrait aussi servir d’accès pour les vélos. Enfin, son percement était contraire aux dispositions du plan de site ainsi que de l’ISOS dès lors que les murs historiques existants devaient être conservés intacts.

11.         Dans sa duplique du 26 mars 2024, le département a intégralement persisté dans ses écritures et conclusions du 3 janvier 2024.

La décision attaquée portant exclusivement sur l’autorisation de transformer le bâtiment en cause, le recourant ne pouvait pas faire valoir des moyens qui n’étaient pas en relation avec celle-ci. Tel était notamment le cas de la problématique du portail qui aurait été déposé sans droit par l’ancien propriétaire de la parcelle et en violation du plan de site, étant aussi précisé qu’il s’agissait d’un nouveau grief dont il ne pouvait pas se prévaloir au stade de la réplique. En tous les cas, le projet autorisé respectait le plan de site et l’ISOS.

L’autorisation entreprise ne portant que sur la construction d’un nouveau logement de 93,80 m2, les deux nouvelles places de parking prévues, ainsi qu’il résultait des plan cadastral, plan masse, PAP et places de stationnement, respectait le RPSFP. Par ailleurs, tant la commune que l’OCT avaient validé la proposition de les aménager dans la cour.

S’agissant de la fenêtre avec volets sur la façade nord, la CMNS, le SMS et la commune n’avaient certes pas fait mention de l’art. 106 LCI, mais ils avaient préavisé favorablement la dernière version du projet. Or, selon la jurisprudence, un préavis globalement favorable sur un projet nécessitant une dérogation mais qui ne faisait mention d’aucune observation à ce sujet pouvait être considéré comme favorable également à l’octroi de la dérogation.

S’agissant de la voirie et de la porte d’accès, le recourant tentait de substituer son appréciation à celle des instances de préavis compétentes.

12.         Par écritures spontanées du 15 avril 2024, le recourant a persisté dans les conclusions de ses écritures du 29 février 2024.

Le département prétendait que la décision n’avait aucun lien avec l’aménagement de la cour. Il n’en était évidemment rien puisque l’autorisation litigieuse exigeait que la totalité des places de stationnement liées à l’ensemble des logements situés sur les parcelles nos 5______ et n°1______ y prennent place. Or, il était matériellement impossible d’y aménager de nouvelles places de parc.

Ses griefs, liés notamment au respect du plan de site et de l’ISOS, n’étaient pas irrecevables. Il n’avait en effet pas l’obligation de formuler tous ses griefs dès le dépôt de l’acte de recours. Il avait en outre un intérêt digne de protection à se prévaloir de la violation de l’OPB dans les futurs locaux à créer.

13.         Par duplique du 25 avril 2024, l’intimée a persisté dans son argumentation et ses conclusions du 29 décembre 2023.

Le recourant insistait sur l’existence d’un « portail » qui ferait partie du plan de site, respectivement de la fiche ISOS concernant ce secteur. Cependant, non seulement il s’agissait du portail d’entrée de la n° 5______, alors que le projet de transformation concernait la parcelle n° 1______, mais il confondait la partie en maçonnerie, qui était effectivement visée par le plan de site, et la partie ferronnerie (les battants du portail), qui n’existait plus depuis plusieurs dizaines d’années. Le portail en fer forgé ne pouvait donc être inclus dans le plan de site.

Selon le recourant, le plan de site aurait été violé au motif que le portail d’accès à la cour serait protégé alors que ses battants en ferronnerie et les bornes l’encadrant auraient été supprimés. Or, il ne démontrait pas l’incidence pratique de ce grief de protection du patrimoine sur sa situation personnelle et, pour cause, ce dernier n’ayant aucune influence sur sa situation concrète.

La prétendue violation de l’inventaire ISOS ne concernait en rien le recourant ; faute d’intérêt personnel, respectivement d’influence sur sa situation concrète, ce grief était irrecevable. Sur le fond, il devrait être rejeté, étant notamment noté que le PAP fourni s’avérait suffisant dans ces circonstances, ce d’autant plus qu’hormis l’illustration de l’emplacement des places de parking, les aménagements extérieurs n’étaient pas modifiés. De plus, la servitude de distance et vue droite en faveur de la parcelle n° 1______ figurait bien au dossier, sur l’extrait cadastral visé ne varietur.

Le recourant avait procédé à une pseudo-analyse des surfaces brute de plancher de l’ensemble des bâtiments existants et du nombre de logements existants et projetés pour faire valoir une violation du RPSFP. Ce grief était irrecevable dès lors qu’il revenait à tenter de remettre en question la situation existante de bâtiments ne faisant pas l’objet de l’autorisation de construire. Au surplus, le recourant n’expliquait pas quelle serait l’influence de ce grief sur sa situation personnelle. Sur le fond, même dans une hypothèse favorable au recourant, le minimum des places de parkings était respecté.

Le recourant invoquait la violation des vues droites selon l’art. 48 LCI respectivement une violation de l’art. 106 LCI dès lors que les instances de préavis ne se seraient pas prononcées sur la dérogation prévue par cette disposition. En l’occurrence, le bâtiment n° 15_____ auquel il se référait avait été érigé avant 1919. Par ailleurs, le recourant n’alléguait pas disposer d’une servitude en faveur de sa parcelle n° 8______ à propos des vues droites. Les dispositions concernant les distances et les vues droites n’étaient dès lors, conformément à l’art. 45 al. 2 LCI, pas applicables au projet et une dérogation au sens de l’art. 106 LCI n’était donc pas nécessaire. En tout état, la fenêtre projetée au premier étage était située dans l’axe du bâtiment en cause, de sorte qu’elle donnait sur le mur délimitant le jardin de la parcelle n° 8______, et non sur le bâtiment n° 15_____. Il en allait de même de la porte d’accès prévue à droite de l’axe du bâtiment en cause et il n’existait par ailleurs aucune vue droite croisée. Enfin, l’absence de mention d’une dérogation ne signifiait pas que celle-ci n’aurait pas été examinée et implicitement accordée ; en tout état, le tribunal pourrait directement solliciter l’avis des instances concernées, en vertu du principe de proportionnalité.

Les appréciations subjectives du recourant quant à la protection contre le bruit ne trouvaient aucune assise au dossier et étaient contestées ; celui-ci invoquait en outre un grief sans effet sur sa situation propre et, partant, irrecevable.

Le grief de violation du règlement communal sur la gestion des déchets devait enfin être déclaré irrecevable, ce règlement n’ayant, d’une part, aucune pertinence s’agissant des règles du droit de la construction cantonal et le recourant n’indiquant, d’autre part, pas quelle serait l’impact de ce grief sur sa situation, respectivement pour quel motif il serait spécialement et particulièrement touché. Les articles invoqués dans ce contexte par le recourant, relatifs aux locaux pour conteneurs et emplacements pour la levée ainsi qu’aux emplacements extérieurs pour le tri sélectif en cas de transformation ou de réalisation d'ensembles, n’étaient pas violés.

14.         Le 27 mai 2024, le recourant a persisté dans ses précédentes écritures.

Faisant valoir la violation de règles susceptibles d’aboutir à l’annulation de l’autorisation litigieuse, il disposait de la qualité pour recourir. Par ailleurs, conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, il était légitimé à faire valoir que les valeurs limites d’immission ne seraient pas respectées à l’intérieur des locaux à créer.

La décision attaquée ne portait pas exclusivement sur la transformation du bâtiment cadastré n° 4______ (et partiellement n° 2______) dans la mesure où elle exigeait que la totalité des places de stationnement liées à l’ensemble des logements situés sur les parcelles nos 5______ et n°1______ prennent place dans la cour historique. Celle-ci n’offrait pas suffisamment d’espace à l’intérieur de son périmètre pour accueillir les places de stationnement requises par la législation, étant précisé que la maison de maître accueillait deux logements. Il requérait un transport sur place afin notamment de vérifier ce point. En outre, le PAP n’avait pas été établi de manière conforme à la requête de la CMNS, de sorte qu’un nouveau PAP devait être produit afin que cette commission puisse, nantie de ce dernier, formuler un nouveau préavis.

L’allégation selon laquelle il n’existerait aucune possibilité d’accès au bâtiment litigieux depuis la cour historique était inexacte. S’il était vrai que la partie en ferronnerie du portail ornemental avait été retirée il y avait quelques années, il était contesté qu’elle ait été détruite ou supprimée. En tout état, ce portail, y compris ces éléments ornementaux en ferronnerie, se trouvait sur place en octobre 2004, lors de l’établissement du recensement ICOMOS des parcs et jardins historiques de la Suisse. L’apport de l’ensemble du dossier relatif à l’élaboration puis à l’adoption du plan de site, qui exigeait la conservation voire la restitution de ce portail ornemental dans son ensemble, devait être ordonné.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

Le recourant dispose en effet de la qualité pour recourir compte tenu de la proximité de ses biens avec le projet litigieux et des griefs relatifs au droit des constructions qu’il fait valoir.

3.             L’admission de la qualité pour recourir ne signifie pas encore que toutes les conclusions, respectivement griefs, formulés par un recourant sont recevables.

En effet, sous peine d’être irrecevable, une conclusion ne peut être exorbitante à l’objet du litige (ATA/195/2022 du 22 février 2022 consid. 3). Cet objet est défini principalement par l’objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu’il invoque. L’objet du litige correspond objectivement à l’objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2). La contestation ne peut excéder l’objet de la décision attaquée, c’est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l’autorité inférieure s’est prononcée ou aurait dû se prononcer (ATA/1367/2023 du 19 décembre 2023 consid. 4.8).

De plus, un recourant ne peut pas présenter n’importe quel grief ; il ne se prévaut d’un intérêt digne de protection, lorsqu’il invoque des dispositions édictées dans l’intérêt général ou dans l’intérêt de tiers, que si ces normes peuvent avoir une influence sur sa situation de fait ou de droit. Tel est souvent le cas lorsqu’il est certain ou très vraisemblable que l’installation ou la construction litigieuse sera à l’origine d’immissions - bruit, poussières, vibrations, lumière, fumée - atteignant spécialement les voisins. À défaut, il n’y a pas lieu d’entrer en matière sur le grief soulevé (ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 5b). Ils doivent en outre se trouver dans le champ de protection des dispositions dont ils allèguent la violation et être touchés par les effets prétendument illicites de la construction ou de l’installation litigieuse (ATF 121 I 267 consid. 2 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 1P.282/2005 du 7 juillet 2005 consid. 1 ; 1P.292/2004 du 29 juillet 2004 consid. 1.3 ; ATA/801/2014 du 14 octobre 2014 consid. 6d). Ainsi, la jurisprudence a retenu qu’un voisin ne disposait pas d’un intérêt pratique à se plaindre que la construction projetée ne respecterait pas les exigences légales en matière de protection contre le bruit, de sorte qu’un grief sur ce point n’était pas recevable (cf. ATA/450/2016 du 31 mai 2016 consid. 6a).

Par ailleurs, l’application du droit d’office par les juridictions administratives ne saurait avoir un quelconque effet sur la question d’un refus d’examiner un grief. En effet, si la juridiction administrative arrive à la conclusion que l’administré ne dispose pas d’un avantage pratique par rapport au grief soulevé, les règles de procédure imposent à celle-ci de ne pas entrer en matière et de déclarer irrecevable le grief invoqué (ATA/17/2023 du 10 janvier 2023 consid. 11d ; ATA/881/2022 du 30 août 2022 consid. 3d).

Enfin, la législation cantonale en matière de police des constructions a pour but d’assurer la conformité des projets présentés aux prescriptions en matière de constructions et d’aménagements, intérieurs et extérieurs, des bâtiments et des installations. Elle réserve expressément le droit des tiers. Selon les principes généraux du droit, il n’appartient donc pas à l’administration de s’immiscer dans les conflits de droit privé pouvant s’élever entre le requérant d’une autorisation de construire et un opposant, celle-ci n’ayant pas pour objet de veiller au respect des droits réels et notamment des servitudes (art. 3 al. 6 LCI ; ATA/439/2021 du 20 avril 2021 consid. 8a ; ATA/307/2021 du 9 mars 2021 consid. 4a ; ATA/1334/2019 du 3 septembre 2019 consid. 3b).

4.             La question de la recevabilité des griefs se distingue de celle de la recevabilité des conclusions, qui doivent être formées dans le délai de recours. En effet, l’absence de conclusions ne peut être réparée que dans le délai de recours. Hors ce délai, le fait d’être autorisé à compléter une écriture ne permet pas de suppléer le défaut de conclusions. De nouvelles conclusions ne peuvent pas non plus être présentées dans le mémoire de réplique (ATA/991/2021 du 27 septembre 2021 consid. 2b et les références citées).

Partant, un recourant est en droit de faire valoir un nouvel argument au stade de sa réplique si celui-ci s’insère dans le cadre de sa conclusion initiale.

5.             La question de la recevabilité de certains des griefs soulevés par le recourant sera examinée ci-après (consid. 20, 22, 23, 29, 30, 34 et 37).

6.             Le recourant sollicite l’apport de l’ensemble du dossier relatif à l’élaboration et à l’adoption du plan de site, la production d’un nouveau PAP ainsi que la tenue d’un transport sur place.

7.             Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend, classiquement, le droit, pour l’intéressé, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 149 I 91 consid. 3.2 ; 145 I 167 consid. 4.1).

Ce droit ne s’étend toutefois qu’aux éléments pertinents pour décider de l’issue du litige et le droit de faire administrer des preuves n’empêche pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_159/2020 du 5 octobre 2020 consid. 2.2.1).

Par ailleurs, il ne confère pas le droit à la tenue d’une inspection locale, en l’absence d’une disposition cantonale imposant une telle mesure d’instruction, ce qui n’est pas le cas à Genève (ATF 120 Ib 224 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_243/2013 du 27 septembre 2013 consid. 3.2.1 ; ATA/285/2021 du 2 mars 2021 consid. 2b).

8.             En l’espèce, le tribunal estime que le dossier contient les éléments suffisants et nécessaires à l’établissement des faits pertinents pour traiter les griefs soulevés par le recourant et statuer sur le litige. L’apport de l’ensemble du dossier relatif à l’élaboration et à l’adoption du plan de site ne se justifie ainsi pas. De plus, il n’est pas nécessaire qu’un nouveau PAP soit produit, celui figurant au dossier étant suffisant (cf. consid. 20). Enfin, les motifs pour lesquels le recourant souhaite l’annulation de la décision entreprise ressortant clairement du dossier et les divers plans versés au dossier permettant parfaitement de visualiser les points litigieux du projet, il n’apparaît pas que la tenue d’un transport sur place, acte d’instruction en soi non obligatoire, serait susceptible de fournir des informations pertinentes supplémentaires.

Les conclusions préalables du recourant seront donc rejetées.

9.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 146 V 16 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_706/2022 du 5 décembre 2023 consid. 6.1.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

10.         Les arguments formulés par les parties à l’appui de leurs conclusions respectives seront repris et discutés dans la mesure utile (ATF 145 IV 99 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 1C_136/2021 du 13 janvier 2022 consid. 2.1 et les références citées), étant rappelé que, saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office et que s’il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/84/2022 du 1er février 2022 consid. 3).

11.         Dans un premier grief, recevable, le recourant argue une violation des dispositions du plan de site et de l’ISOS, faisant notamment valoir que la cour historique subirait, compte tenu des places de stationnement, une importante modification de son utilisation et que la restitution du portail historique grillagé conforme au droit aurait pour effet que des surfaces de parc prévues ne pourraient être utilisées.

12.         À ce sujet, le tribunal tient à souligner que le recourant était en droit de faire valoir de nouveaux griefs au stade de sa réplique, ceux-ci précisant son grief formulé dans l’acte de recours et s’insérant au surplus dans le cadre de sa conclusion initiale.

13.         Selon l’art. 78 al. 2 Cst., la Confédération ménage, dans l’accomplissement de ses tâches, les paysages, la physionomie des localités, les sites historiques et les monuments naturels et culturels ; elle les conserve dans leur intégralité si l’intérêt public l’exige.

Pour faciliter l’accomplissement de cette tâche et trouver l’équilibre à maintenir entre les nouvelles installations et les intérêts de la protection de la nature et du patrimoine, les inventaires fédéraux, tel l’ISOS, servent de base de décision.

14.         L’inventaire ISOS est fondé sur l’art. 5 LPN qui charge le Conseil fédéral d’établir, après avoir pris l’avis des cantons, des inventaires d’objets d’importance nationale. Celui-ci peut se fonder sur des inventaires dressés par des institutions d’État ou par des organisations œuvrant en faveur de la protection de la nature, de la protection du paysage ou de la conservation des monuments historiques. Les critères qui ont déterminé le choix des objets sont indiqués dans les inventaires. Ils ne paraissent pas a priori semblables à ceux qui déterminent la protection par les plans de site, et les éventuelles critiques adressées par l’inventaire ISOS au bâtiment ne sont pas de nature à priver de sa pertinence la procédure de protection par le plan de site (ATA/352/2021 du 23 mars 2021 consid. 11e).

15.         Selon l’art. 9 al. 4 let. a de l’ordonnance concernant l’ISOS du 13 novembre 2019 (OISOS - RS 451.12), la sauvegarde de la substance signifie sauvegarder intégralement toutes les constructions et installations et tous les espaces libres, ainsi que supprimer les interventions-parasites.

À teneur de l’art. 10 OISOS, dans le cadre de l’accomplissement des tâches de la Confédération, les interventions qui n’ont pas d’effet sur la réalisation des objectifs de sauvegarde ne représentent pas une atteinte et sont admissibles. De légères atteintes sont également admissibles si elles sont justifiées par un intérêt qui prime l’intérêt à protéger l’objet (al. 1). Lorsqu’une atteinte est considérée comme admissible suite à la pesée des intérêts, elle doit être aussi limitée que possible. Son auteur doit tenir compte de la règle selon laquelle les qualités culturelles des objets, notamment leurs qualités urbanistiques, mérite d’être ménagé le plus possible (al. 4).

Les cantons tiennent compte de l’ISOS lors de l’établissement de leurs planifications, en particulier des plans directeurs, conformément aux art. 6 à 12 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700). Ils veillent à ce que l’ISOS soit pris en compte sur la base des plans directeurs cantonaux, en particulier lors de l’établissement des plans d’affectation au sens des art. 14 à 20 LAT (art. 11 al. 2 OISOS).

16.         Le site de D______ figure à l’ISOS. La fiche y relative (cf. pièce 7 rec.) indique que « dans un environnement champêtre marqué à l’arrière-plan par les falaises abruptes du Salève, le village anciennement agro-viticole de D______ est l’une des quelques localités historiques du canton de Genève à ne pas avoir connu de développement résidentiel. L’importance nationale du site résulte en particulier de son implantation au sein d’un écrin de verdure vierge de constructions - les jardins en sont la prolongation intra-muros - et de la symbiose entre un tissu rural dense, daté du XVIIe au XIXe siècle, et un bâti patricien qui lui est plus ou moins contemporain ». Selon la fiche, ses qualités de situation et ses qualités spatiales et celles historico-architecturales sont considérées comme « hautes ».

17.         À teneur du document intitulé « Clôture de la consultation relative à la révision de l’OISOS : examen des faits sur l’ISOS » du mois d’avril 2019, l’office fédéral de la culture a précisé que l’ISOS fait ressortir les qualités des sites qu’il répertorie, mais qu’il ne place aucun objet sous protection. Il n’équivaut pas à une mesure de protection absolue, mais à un document de référence devant être pris en compte lors des processus de décisions concernant des mesures d’aménagement du territoire, dans le but de sauvegarder au mieux les sites les plus remarquables de Suisse. L’ISOS constitue une base pour la pesée des intérêts, et non son résultat. Sa mise en application est souvent source d’incertitudes, notamment pour ce qui est du développement vers l’intérieur du milieu bâti. En effet, combiner protection des sites et densification du bâti nécessite de vastes compétences de planification et de réalisation, ainsi qu’une conscience aiguë des intérêts en présence. Dans certains cas, il arrive que l’ISOS soit instrumentalisé pour servir des intérêts particuliers. Il s’agit là d’un abus de cet instrument (https://www.bak.admin.ch/bak/fr/home/bau kultur/isos-und-ortsbildschutz/isos-in-kuerze.html, consulté ce jour).

18.         Le règlement du plan de site prévoit, en son article premier, que le plan de site et son règlement ont pour but de protéger le sud du village de D______, qui figure dans l’ISOS, pour l’ensemble de ses qualités architecturales et paysagères. Il peut ainsi être retenu que le plan de site intègre les objectifs de préservations du patrimoine visés par l’ISOS (cf. par analogie avec un autre plan de site ATA/1252/2023 du 21 novembre 2023 consid. 8).

L’art. 4 de ce règlement précise que le plan désigne les bâtiments maintenus, en raison de leur qualité architecturale ou historique ou de leur appartenance à un ensemble cligne d’intérêt (al. l). Les bâtiments maintenus peuvent faire l’objet de travaux d’entretien ou de transformation nécessaires à une adaptation des locaux ou à une amélioration du confort. Les structures porteuses de même que les éléments dignes de protection doivent être sauvegardés (al. 2).

La LPMNS institue la CMNS, composée de spécialistes en matière d’architecture, d’urbanisme et de conservation du patrimoine (art. 46 al. 2 LPMNS ; ATA/1059/2017 du 4 juillet 2017 consid. 6d), qui comporte trois sous-commissions (architecture, monuments et antiquités, nature et sites) et dont la compétence est codifiée dans le règlement d’application de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 29 mars 2023 (RPMNS - L 4 05.01) (cf. art. 3 al. 1 RPMNS).

La CMNS, qui participe à l’élaboration des plans de site (cf. art. 39 LPMNS), donne son préavis sur tous les objets qui, en raison de la matière, sont de son ressort. Elle se prononce en principe une seule fois sur chaque demande d’autorisation, les éventuels préavis complémentaires étant donnés par l’office du patrimoine et des sites par délégation de la commission (art. 47 al. 1 LPMNS), étant noté que le SMS est une subdivision de cet office à teneur de l’organigramme du département. La CMNS peut proposer toutes mesures propres à concourir aux buts de la présente loi (art. 47 al. 2 LPMNS).

Selon l’art. 5 RPMNS, la CMNS donne son préavis sur tout projet de travaux concernant un immeuble situé dans le périmètre d’un plan de site, sous réserve de l’al. 5 (al. 2 let. g). Elle est consultée en amont sur les projets susceptibles d’avoir une incidence majeure sur le patrimoine paysager, bâti et naturel (art. 1, lettre b, de la loi), en particulier sur ceux dont le périmètre s’étend sur tout ou partie d’un site recensé dans l’ISOS (al. 3). Il appartient au département de la saisir ou de saisir les sous-commissions concernées des projets pour lesquels un préavis ou des propositions sont requis en application de l’al. 2. Lorsqu’un préavis est exprimé par une sous-commission, il vaut préavis de la commission (al. 4). Lorsqu’une demande d’autorisation de construire est soumise à la procédure accélérée au sens de l’art. 3, al. 7 LCI, l’office du patrimoine et des sites est compétent pour rendre le préavis, à l’exception des demandes d’autorisation portant sur un immeuble classé (al. 5).

De jurisprudence constante, si la consultation de la CMNS est imposée par la loi, le préavis de cette commission a un poids certain dans l’appréciation qu’est amenée à effectuer l’autorité de recours. La CMNS se compose pour une large part de spécialistes, dont notamment des membres d’associations d’importance cantonale, poursuivant par pur idéal des buts de protection du patrimoine (art. 46 al. 2 LPMNS). À ce titre, son préavis est important (ATA/206/2024 du 13 février 2024 consid. 5.2 et les références citées). Il a déjà été admis par la jurisprudence qu’une nouvelle consultation formelle de la CMNS ne s’imposait pas dans les cas où le SMS pouvait constater que le projet répondait aux demandes de la CMNS telles qu’exposées dans son préavis (ATA/1371/2018 du 18 décembre 2018 ; ATA/1187/ 2017 du 22 août 2017 ; ATA/455/2016 du 31 mai 2016).

19.         Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l’autorité inférieure suit les préavis requis, la juridiction de recours doit s’imposer une certaine retenue, qui est fonction de son aptitude à trancher le litige. Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi. Lorsqu’elle estime que l’autorité inférieure est mieux en mesure d’attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l’autorité de recours s’impose alors une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l’interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, en matière économique, de subventions et d’utilisation du sol (ATA/515/2024 du 23 avril 2024 consid. 4.4 et les références citées).

20.         En l’espèce, force est pour le tribunal de constater que le projet a fait l’objet d’un examen particulièrement minutieux - dès réception du projet initial, un commissaire a effectué une visite sur place et a sollicité un reportage photographique - de la part de la CMNS et du SMS, lesquels ont exigé d’importantes modifications par rapport au projet initial. Le projet a ainsi été repris à cinq reprises avant d’être finalement validé par ces instances, qui ont encore émis de nombreuses conditions à sa mise en œuvre. Il faut également noter qu’il a été exigé que certains éléments patrimoniaux soient non seulement maintenus, mais aussi restaurés en respectant certaines règles d’intervention. Le recourant ne remet pas en cause les derniers préavis de ces instances, dont les conditions sont reprises dans la décision litigieuse. Il convient enfin de rappeler que la CMNS est composée de membres disposant des différentes connaissances et compétences utiles pour se prononcer sur des questions d’ordre patrimoniales, que son préavis obligatoire, auquel la jurisprudence attache un poids prépondérant, apparaît ainsi déterminant et que rien ne laisse supposer, bien au contraire, qu’elle aurait pris en compte des éléments sans pertinence pour forger sa conviction ou qu’elle n’aurait pas procédé à l’examen de la demande avec soin et diligence. Par ailleurs, la commune, dont le préavis est aussi obligatoire, s’est également déclarée favorable au projet le 20 avril 2023. Il en a été de même de la DAC.

Au surplus, le grief selon lequel le plan de site serait violé du fait que le portail d’accès à la cour serait protégé alors que ses battants en ferronnerie et les bornes l’encadrant auraient été supprimés est irrecevable. En effet, ledit portail est sis sur la parcelle n° 5______ qui n’est pas concernée par l’autorisation querellée et il ne découle pas du dossier qu’une quelconque intervention soit prévue sur celui-ci. Ce grief excède donc l’objet du litige.

L’impossibilité alléguée pour le projet de respecter les dispositions du plan de site si le portail était maintenu ouvert est sans fondement, ledit portail n’existant plus à ce jour.

À l’instar de l’intimée, le tribunal considère en outre que le PAP fourni est suffisant, ce d’autant plus que les aménagements extérieurs ne sont pas modifiés et que la substance historique et les qualités de la cour ne sont dès lors pas touchées. Il constate de plus que la servitude concernant les droits de jour donnant sur la cour figure au dossier et que tant la CMNS que le SMS ont donc pu se prononcer en toute connaissance de cause. Enfin, il résulte du plan de site que la façade nord du bâtiment en cause ne constitue pas un mur ancien à préserver (cf. consid. 30 et 35).

Au vu de ce qui précède, il ne peut dès lors être reproché au département d’avoir fait siens les préavis précités, en particulier celui de la CMNS et du SMS, et d’avoir admis que le projet était conforme tant au plan de site qu’à l’ISOS, étant rappelé que celui-ci ne place aucun objet sous protection et qu’il n’équivaut pas à une mesure de protection absolue, mais qu’il constitue une base pour la pesée des intérêts. Le fait que le département, suivant les instances de préavis - dont la CMNS qui a procédé à une pesée des intérêts complète -, a apprécié la situation différemment que le recourant ne permet pas de retenir qu’il se serait fondé sur des critères et considérations dénués de pertinence et étrangers au but visé par la législation. Partant, le tribunal, qui doit faire preuve de retenue et respecter le pouvoir d’appréciation conféré au département, ne saurait en corriger le résultat en fonction d’une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit (art. 61 al. 2 LPA).

Ces griefs seront par conséquent rejetés dans la mesure de leur recevabilité.

21.         Le recourant se plaint des places de stationnement, en particulier de leurs emplacements et de leur nombre, et du risque de parking sauvage.

22.         A cet égard, son grief relatif à la violation du RPSFP est toutefois irrecevable, dans la mesure où il ne démontre pas en quoi cet argument est susceptible d’exercer une influence directe sur sa situation factuelle ou juridique. Il est également irrecevable dès lors qu’il revient à remettre en question la situation existante de bâtiments ne faisant pas l’objet de l’autorisation de construire querellée À titre superfétatoire, le tribunal relèvera néanmoins que les deux places de parc prévues suffisent pour respecter l’art. 5 RPSFP, ainsi que l’a correctement exposé l’intimée dans sa duplique du 25 avril 2024.

La problématique de « parking sauvage » excède également le cadre du litige tel que défini par la décision attaquée. Pour rappel, les véhicules parqués sur la voie publique en un lieu interdit ou gênant la circulation - tous comme ceux parqués sans droit sur un terrain privé, moyennant le dépôt d’une plainte pénale - peuvent être enlevés, saisis ou mis en fourrière (cf. art. 11 let. c et f de la loi d’application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05). Le prononcé des mesures idoines échappe toutefois à la compétence tant du département que du tribunal. Partant, ce grief, qui excède l’objet du litige en ce qu’il porte sur une situation qui n’est pas de la compétence du tribunal (cf. ATA/896/2021 du 31 août 2021 consid. 6), doit aussi être déclaré irrecevable.

23.         S’agissant des excavations profondes qui auraient été réalisées sur la parcelle n° 1______ sans que l’archéologue cantonal en soit averti, avec pour conséquence que ses services devaient dès lors suivre de près les travaux envisagés, ce grief est sans incidence sur la situation personnelle du recourant, ce d’autant plus qu’il s’agirait de modifications intérieures au bâtiment, de sorte qu’il sera déclaré irrecevable.

En tout état, aucun élément au dossier ne permet de confirmer la réalité de telles excavations sur la parcelle n° 1______, excavations que l’intimée conteste et dont le commissaire de la CMNS qui s’était rendu sur place n’a nullement fait mention. Il sera dès lors retenu que de telles excavations n’ont pas eu lieu et qu’elles ne seront pas réalisées à l’avenir, puisque la décision entreprise n’autorise qu’une légère excavation au rez-de-chaussée, notamment pour mettre en place une isolation/étanchéité au niveau du sol.

24.         Le recourant remet en cause l’opportunité de la porte d’accès prévue dans la façade nord du bâtiment en cause, invoquant un problème de sécurité pour ses utilisateurs et l’impact sur le trafic des mesures qui devraient être prises pour leur sécurité.

25.         À teneur de l’art. 14 al. 1 let. a LCI, le département peut refuser les autorisations notamment lorsqu’une construction ou une installation peut être la cause d’inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public.

Cette disposition appartient aux normes de protection destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d’une zone déterminée. Elle n’a toutefois pas pour but d’empêcher toute construction dans une zone à bâtir, qui aurait des effets sur la situation ou le bien-être des voisins. La construction d’un bâtiment conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone ne peut en principe pas être source d’inconvénients graves, notamment s’il n’y a pas d’abus de la part du constructeur. Le problème doit être examiné par rapport aux caractéristiques du quartier ou des rues en cause (ATA/372/2024 du 12 mars 2024 consid. 4.2 et les références citées).

La notion d’inconvénients graves est une norme juridique indéterminée, qui doit s’examiner en fonction de la nature de l’activité en cause et qui laisse à l’autorité une liberté d’appréciation. Celle-ci n’est limitée que par l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation (ATA/1060/2023 du 26 septembre 2023 consid. 5.2 et la référence citée). Le pouvoir d’examen du tribunal s’exerce dans les limites précitées, sous réserve du respect du principe de proportionnalité en cas de refus malgré un préavis favorable et de l’intérêt public en cas d’octroi d’une autorisation (cf. not. ATA/1101/2022 du 1er novembre 2022 consid. 5b et les références).

26.         En l’espèce, en soutenant que la porte litigieuse n’est pas nécessaire, le recourant critique le fait d’avoir prévu un accès au bâtiment en cause à cet endroit. Or, un tel grief est irrecevable dans la mesure où le tribunal n’a pas, en vertu de l’art. 61 al. 2 LPA, compétence pour apprécier l’opportunité d’une décision. En tout état, comme relevé par le département le 3 janvier 2024, on ne perçoit pas, compte tenu de la typologie des transformations intérieures qui ressort des plans du rez-de-chaussée, quelle autre solution pourrait être mise en œuvre pour offrir aux habitants des deux logements concernés (celui existant et celui à construire), un accès suffisant. Cette particularité a aussi pour conséquence que la situation de la maison de maître, non concernée par le projet et aux caractéristiques différentes, ne présente aucune pertinence et ne peut être prise en compte pour déterminer la nécessité ou non de la porte litigieuse. Enfin, cette porte a été admise par toutes les instances de préavis ayant examiné le projet, étant précisé que le SMS avait, dans son préavis du 31 janvier 2022, avait indiqué que si l’OCT n’y était pas opposé, la création d’un accès côté route serait possible, moyennant un percement de largeur correspondant à une porte d’accès standard, au maximum, ce qui démontrait que l’ouverture de cette façade n’a pas été considérée comme étant inappropriée. Ce grief sera ainsi rejeté dans la mesure de sa recevabilité.

L’OCT, soit l’instance spécialisée en matière de circulation ct de sécurité routière, a pour le surplus examiné le projet à plusieurs reprises et rendu un préavis favorable sous conditions le 8 mars 2023, confirmant ainsi l’absence de problèmes de circulation et de risque pour la sécurité des usagers de la porte comme de la E______. Son allégation que ladite route serait fortement fréquentée n’est pour le surplus étayée par aucun document, le SABRA ayant, au contraire, indiqué dans son préavis du 21 juin 2023 qu’aucun cadastre n’était disponible « du fait du faible trafic sur les axes environnants ». L’on relèvera encore que la porte querellée s’ouvre sur l’intérieur, qu’elle n’empiète pas sur la route et que le recourant dispose d’un accès identique dans son bâtiment sans que cela semble poser le moindre problème de circulation.

Les griefs seront par conséquent rejetés.

27. Le recourant soutient que la fenêtre prévue dans la façade nord du bâtiment en cause ne respecte pas les vues droites au sens de l’art. 48 LCI, respectivement de l’art. 106 LCI dès lors qu’aucune dérogation au sens de cette disposition n’avait été octroyée. Elle serait également contraire à accord conclu à ce sujet avec l’intimée.

28. Selon l’art. 48 LCI, la longueur des vues droites se calcule de la même manière que les distances entre constructions (art. 45) (al. 1). Elle est mesurée, pour chaque baie, perpendiculairement à la façade et sur une longueur de 4 m au moins. Le champ visuel d’une baie doit s’étendre en outre sur toute la hauteur et toute la largeur de cette baie (al. 2).

À teneur de l’art. 45 al. 1 LCI, les distances entre deux constructions ne peuvent être inférieures à la somme des distances qui seraient exigibles entre chacune de ces constructions et une limite de propriété passant entre elles (al. 1). Toutefois, cette disposition n’est pas applicable lorsqu’il existe, sur la propriété voisine, une construction autorisée avant le 1er mai 1940 et qui ne bénéficie pas d’une servitude sur le fonds où s’élève la nouvelle construction (al. 2). Restent réservées les dispositions des règlements de quartier et des plans localisés de quartier adoptés conformément à la loi sur l’extension des voies de communication et l’aménagement des quartiers ou localités du 9 mars 1929 (LExt - L 1 40) et de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35) ; restent également réservées, en ce qui concerne la 4e zone, les dispositions des art. 33 et 43 (al. 3).

L’art. 33 LCI traite des constructions à la limite de propriétés et l’art. 43 LCI des constructions basses ou de peu d’importance.

29. Selon un arrêt de l’ancien Tribunal administratif, l’exception contenue à l’art. 45 al. 2 LCI pour les distances entre constructions vaut également pour les vues droites (ATA/321/1994 du 26 juin 1994 cons. 5).

30. En l’espèce, s’agissant tout d’abord de l’accord qui aurait été passé avec l’intimée, dont l’existence n’est au demeurant pas démontrée, il y a lieu de rappeler que selon les principes généraux du droit, il n'appartient pas à l'administration de s'immiscer dans les conflits de droit privé pouvant s'élever entre un requérant et un opposant, la législation genevoise en matière de police des constructions ayant pour seul but d'assurer la conformité des projets présentés aux prescriptions en matière de constructions et d'aménagements, intérieurs et extérieurs, des bâtiments et des installations (art. 3 al. 6 LCI ; cf. not. ATA/307/2021 du 9 mars 2021 consid. 4a ; ATA/169/2020 du 11 février 2020 consid. 7b ; ATA/1724/2019 du 26 novembre 2019 consid. 8e).

Quant à la problématique des vues droites, dans la mesure où le bâtiment n° 15_____ auquel se réfère le recourant a été érigé au XVIIIe siècle et que l’intéressé ne dispose pas, à teneur des éléments au dossier, d’une servitude en faveur de sa parcelle n° 8______ à propos des vues droites, les dispositions concernant les distances et les vues droites ne sont pas applicables au projet, conformément à l’art. 45 al. 2 LCI. Il n’y a dès lors aucune violation de l’art. 48 LCI et, partant, une dérogation au sens de l’art. 106 LCI n’était pas nécessaire.

Ce grief sera rejeté.

31. Les remarques et griefs formulés à l’égard de la levée des ordures, au demeurant pas démontrés à satisfaction de droit, ne présentent aucun lien direct avec la décision entreprise. Exorbitants à l’objet de cette décision, ils sont irrecevables.

32. Le recourant reproche encore au projet de viser une rentabilisation maximum d’un bâtiment faisant partie d’un ensemble d’une valeur patrimoniale exceptionnelle au lieu de tendre à sa mise en valeur. Le projet devrait dès lors être revu en évitant les enlaidissements et les nuisances signalées.

33. Selon l’art. 15 LCI, intitulé « Esthétique des constructions », le département peut interdire ou n’autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l’intérêt d’un quartier, d’une rue ou d’un chemin, d’un site naturel ou de points de vue accessibles au public (al. 1). La décision du département se fonde notamment sur le préavis de la commission d’architecture ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la CMNS. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département (al. 2).

34. Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu’un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 6a et les références citées).

Selon une jurisprudence bien établie, les autorités de recours observent une certaine retenue pour éviter de substituer leur propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci. Elles se limitent à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/532/2021 du 18 mai 2021 consid. 4 et la référence citée).

35. En l’espèce et pour rappel, la législation cantonale en matière de police des constructions, que le département doit appliquer, a pour but d’assurer la conformité des projets présentés aux prescriptions en matière de constructions et d’aménagements, intérieurs et extérieurs, des bâtiments et des installations. La question de savoir si un projet correspond à une opération purement commerciale est irrelevante dans ce cadre et ne saurait dès lors être portée par devant le tribunal de céans. Les remarques et griefs formulés à ce sujet sont irrecevables.

La CMNS et le SMS se sont pour le surplus prononcés en faveur du projet, se penchant notamment sur ses caractéristiques esthétiques et son insertion dans le quartier. Le recourant ne fait pour sa part que substituer sa propre appréciation de la situation à celle du département, elle-même fondée sur les préavis positifs des instances spécialisées, notamment ceux de la CMNS et du SMS, et ne démontre pas en quoi leurs préavis seraient insoutenables ou encore fondés sur des considérations étrangères aux buts de protection de la loi.

Ce grief sera rejeté.

36. En dernier lieu, le recourant fait valoir une violation de l’OPB, au motif du bruit excessif que subirait une pièce du futur logement en raison du bruit routier.

37. L’OBP a pour but de protéger contre le bruit nuisible ou incommodant (art. 1 al. 1) et régit, entre autres, la limitation des émissions de bruit extérieur produites par l’exploitation d’installations nouvelles ou existantes au sens de l’art. 7 de la loi fédérale sur la protection de l’environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01) (art. 1 al. 2 let. a).

38. Selon la jurisprudence, un voisin ne dispose pas d’un intérêt pratique de se plaindre que les mesures constructives envisagées pour le bâtiment projeté ne permettraient pas d’y respecter les exigences légales en matière de protection contre le bruit, de sorte qu’un grief sur ce point n’était pas recevable (ATA/450/ 2016 du 31 mai 2016 consid. 6a).

39. En l’espèce, faute de se trouver dans le champ de protection des dispositions dont il allègue la violation et d’être touché par les effets prétendument illicites de ladite construction, le recourant ne peut, ainsi que retenu par la jurisprudence, se plaindre que les mesures constructives envisagées pour le futur logement ne permettraient pas d’y respecter les exigences légales en matière de protection contre le bruit. Son grief est dès lors irrecevable.

40. Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

41. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 1’200.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l’issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 1’200.-, à la charge du recourant, sera allouée à l’intimée (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 23 octobre 2023 par Monsieur A______ contre la décision du département du territoire du ______2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 1’200.-, lequel est partiellement couvert par l’avance de frais en CHF 900.- ;

4.             condamne le recourant à verser à Madame B______ une indemnité de procédure de CHF 1’200.- ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Marielle TONOSSI, présidente, Diane SCHASCA et Carmelo STENDARDO, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

Le greffier