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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1674/2024

ATA/681/2024 du 05.06.2024 sur JTAPI/472/2024 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1674/2024-MC ATA/681/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 5 juin 2024

en section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Gabriele SEMAH, avocat

contre

COMMISSAIRE DE POLICE intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 mai 2024 (JTAPI/472/2024)


EN FAIT

A. a. A______, ressortissant turc, né le ______ 1985, a fait l’objet, le 6 juillet 2020, d’une décision du secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) rejetant sa demande d'asile formée le 27 novembre 2019 et ordonnant son renvoi de Suisse.

b. Cette décision a été confirmée par arrêt du Tribunal administratif fédéral (ci‑après : TAF) du 22 août 2023.

c. Entendu par l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) le 5 octobre 2023, A______ a exposé n'avoir entrepris aucune démarche en vue de retourner dans son pays d'origine et souhaité se faire indiquer les démarches auxquelles il devait procéder aux fins de rester en Suisse. Il a été informé de la possibilité de faire l'objet de mesures de contrainte, en particulier d'être placé en détention administrative pour une durée pouvant aller jusqu'à 18 mois.

d. Par décision du 8 décembre 2023, le SEM a rejeté la demande de réexamen de sa décision du 6 juillet 2020.

e. Le 21 mars 2024, A______ a été interpellé par la police genevoise aux fins d'être présenté au consulat de son pays d'origine, qui lui a délivré le laissez‑passer nécessaire à son retour en Turquie.

B. a. Le 21 mars 2024 à 10h00, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de A______ pour une durée de 60 jours sur la base de l’art. 77 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). Au commissaire de police, l’intéressé a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi en Turquie.

b. Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) le même jour.

c. Par jugement du 22 mars 2024, le TAPI l’a confirmé pour une durée de 60 jours, soit jusqu'au 19 mai 2024 inclus.

d. Le 25 mars 2024, A______ a refusé d’embarquer dans l’avion devant le ramener en Turquie.

e. Par acte du 30 mars 2024, A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement du TAPI du 22 mars 2024 dont il a requis l’annulation. Il a conclu à sa mise en liberté immédiate. Le commissaire de police devait être invité à prononcer, à titre de mesure de substitution, une assignation à un territoire déterminé, assortie d’une obligation de se présenter régulièrement auprès d’une autorité.

f. Par arrêt du 10 avril 2024, la chambre administrative a rejeté le recours.

g. Le 13 mai 2024, A______ s'est opposé à son renvoi lors d'un vol avec escorte policière.

C. a. Le 16 mai 2024, à 15h45, le commissaire de police a ordonné la mise en détention administrative de A______ pour une durée d'un mois sur la base de l'art. 78 al. 1 LEI (détention pour insoumission). Il faisait l’objet d’une décision de renvoi prononcée le 6 juillet 2020, laquelle n’avait toujours pas été exécutée en raison de son opposition. Selon les dernières informations reçues du SEM, les vols spéciaux à destination de la Turquie étaient, pour l'heure, impossibles. Dès lors, la collaboration de A______ était indispensable pour procéder à son renvoi.

Au commissaire de police, A______ a déclaré qu'il n'entendait toujours pas retourner en Turquie. Sa vie y était en danger.

b. Entendu le 17 mai 2024 par le TAPI, A______ a déclaré que c'était à cause de la tyrannie turque qu'il était en Suisse. Il ne rentrerait pas en Turquie même sous la contrainte. Il y avait trop d'injustice et de terreurs. Malheureusement, même en Suisse il avait trouvé l'injustice. S'il rentrait en Turquie, « c'était la mort ». Il ne voulait absolument pas rentrer en Turquie avec la politique du gouvernement en place. Si la Suisse lui donnait la garantie que rien ne lui arriverait en Turquie, il rentrerait. Rien ne le ferait changer d'avis. Il préférait rester 100 ans en prison plutôt que de retourner dans son pays.

Le représentant du commissaire de police a indiqué qu'il n'était pour le moment pas possible d'organiser des vols spéciaux à destination de la Turquie. Il n'en connaissait pas la raison, mais des négociations étaient en cours depuis plusieurs mois entre les autorités fédérales suisses et les autorités turques à ce sujet. Il était envisageable d'organiser un vol avec escorte policière pour A______ s'il entendait collaborer. Il a conclu à la confirmation de l’ordre de mise en détention administrative pour insoumission pour une durée d'un mois.

Le conseil de A______ a conclu à la libération immédiate de son client.

c. Par jugement du 17 mai 2024, le TAPI a rejeté le recours.

En faisant valoir que l'exécution du renvoi mettrait sa vie en danger, A______ ne s'en prenait pas à la détention, mais uniquement à son renvoi. Or, celui-ci ne faisait pas l'objet de l'examen du juge de la détention, à moins que la décision de renvoi n'apparaisse manifestement inadmissible, soit arbitraire ou nulle. Tel n’était cependant pas le cas. En effet, le SEM, puis le TAF, avaient procédé à un examen circonstancié de sa situation et constaté que l'exécution de son renvoi était licite, notamment parce qu'il ne démontrait pas qu'il existait pour lui un véritable risque concret et sérieux d'être victime de tortures ou de traitements inhumains ou dégradants en cas de renvoi dans son pays.

D. a. Par acte posté le 27 mai 2024, A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement du TAPI du 22 mars 2024 dont il a requis l’annulation. Il a conclu à sa mise en liberté immédiate et à l'octroi d'une indemnité de procédure.

Sa détention violait les art. 80 al. 6 let. a et 83 al. 3 LEI. Cette dernière disposition prohibait le renvoi lorsque celui-ci était contraire aux engagements internationaux de la Suisse.

Son renvoi était contraire à l'art. 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) car il risquait d'être soumis à la torture. En effet, il avait activement participé en Suisse à des manifestations pro-Kurdes, en se démarquant particulièrement des autres participants. Il a joint quatre photographies où il apparaît, tenant une banderole, dans une manifestation ayant lieu à la place des Nations.

b. Le 30 mai 2024, le commissaire de police a conclu ce que le recours soit rayé du rôle.

Le départ de Suisse de A______ avait eu lieu le 29 mai 2024. Dans la mesure où il concluait à titre principal à une libération immédiate, la procédure était devenue sans objet.

Si la chambre administrative devait statuer au fond, il concluait au rejet du recours et faisait sien le raisonnement contenu dans le jugement attaqué.

c. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 10 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Selon l'art. 10 al. 2 LaLEtr, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 27 mai 2024 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

3.             L'intimé soutient que le recours a perdu son objet car le recourant quitté la Suisse par un vol du 29 mai 2024.

3.1 Aux termes de l'art. 60 al. 1 let. b LPA, ont qualité pour recourir toutes les personnes qui sont touchées directement par une décision et ont un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée.

Selon la jurisprudence, le recourant doit avoir un intérêt pratique à l'admission du recours, soit que cette admission soit propre à lui procurer un avantage, de nature économique, matérielle ou idéale (ATF 138 II 162 consid. 2.1.2 ; ATA/1272/2017 du 12 septembre 2017 consid. 2b). Un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l'annulation de la décision attaquée (ATF 138 II 42 consid. 1 ; 137 I 23 consid. 1.3). L'existence d'un intérêt actuel s'apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours (ATF 137 I 296 consid. 4.2 ; 136 II 101 consid. 1.1) ; si l'intérêt s'éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1) ou déclaré irrecevable (ATF 123 II 285 consid. 4 ; ATA/322/2016 du 19 avril 2016).

3.2 La jurisprudence a toutefois admis que l'autorité de recours doit entrer en matière même s'il n'existe plus d'intérêt actuel et pratique au recours lorsque la partie recourante invoque de manière défendable un grief fondé sur la CEDH (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1 ; 139 I 206 consid. 1.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1028/2021 du 16 novembre 2022 consid. 1.2 ; ATA/460/2023 du 2 mai 2023 consid. 3.2).

3.3 En l’occurrence, le recourant ne se trouve plus en détention administrative depuis le 29 mai 2024, son renvoi ayant été exécuté à cette date. Conformément à la jurisprudence précitée, et quand bien même le recourant n'aurait plus d'intérêt actuel et pratique au recours, il y a lieu d'entrer en matière, dès lors qu'il invoque de manière défendable une violation de l'art. 3 CEDH.

4.             Dans la mesure où le recourant a conclu à sa mise en liberté immédiate, il convient d'examiner en premier lieu si les conditions générales de la mise en détention administrative étaient données.

4.1 La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 CEDH (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 précité consid. 4.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).

4.2 En vertu de l'art. 78 al. 1 LEI, si l'étranger n'a pas obtempéré à l'injonction de quitter la Suisse dans le délai prescrit et que la décision exécutoire de renvoi ou d'expulsion ne peut être exécutée en raison de son comportement, il peut être placé en détention afin de garantir qu'il quittera effectivement le pays, pour autant que les conditions de la détention en vue du renvoi ou de l'expulsion ne soient pas remplies et qu'il n'existe pas d'autres mesures moins contraignantes susceptibles de conduire à l'objectif visé.

4.3 Selon la jurisprudence, le but de la détention pour insoumission est de pousser un étranger, tenu de quitter la Suisse, à changer de comportement, lorsqu’à l’échéance du délai de départ, l’exécution de la décision de renvoi, entrée en force, ne peut être assurée sans la coopération de celui-ci malgré les efforts des autorités (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1 et la jurisprudence citée). La détention pour insoumission constitue une ultima ratio, dans la mesure où il n’existe plus d’autres mesures permettant d’aboutir à ce que l’étranger se trouvant illégalement en Suisse puisse être renvoyé dans son pays.

4.4 La prise d’une telle mesure doit respecter le principe de la proportionnalité, ce qui suppose d’examiner l’ensemble des circonstances pour déterminer si elle apparaît appropriée et nécessaire. Cet examen suppose de tenir compte de l'ensemble des circonstances, parmi lesquelles figurent la durée de la détention déjà accomplie, la persistance du détenu à ne pas collaborer, ses relations familiales, son âge, son état de santé et ses antécédents (arrêts du Tribunal fédéral 2C_639/2011 du 16 septembre 2011 consid. 3.1; 2C_624/2011 du 12 septembre 2011 consid. 2.1 ; 2C_936/2010 du 24 décembre 2010 consid. 1.3 ; 2C_984/2013 du 14 novembre 2013 consid. 3.2). Le seul refus explicite de collaborer de la personne concernée ne constitue qu’un indice parmi d’autres éléments à prendre en considération dans cette appréciation (ATF 135 II 105 et la jurisprudence citée ; ATA/1053/2016 du 14 décembre 2016).

4.5 La détention peut être ordonnée pour une période d’un mois et prolongée de deux mois en deux mois. Moyennant le consentement de l’autorité judiciaire cantonale et dans la mesure où l’étranger n’est pas disposé à modifier son comportement et à quitter le pays, elle peut être prolongée de deux mois en deux mois (art. 78 al. 2 LEI). Elle doit être levée notamment lorsqu’un départ de Suisse, volontaire et dans le délai prescrit, n’est pas possible malgré la collaboration de l’intéressé (art. 78 al. 6 let. a LEI ; ATA/1053/2016 précité).

4.6 La durée de la détention pour insoumission ne doit pas excéder, avec la détention en vue du renvoi et la détention en phase préparatoire, 18 mois (art. 78 al. 2 LEI et 79 al. 1 et 2 LEI ; ATF 140 II 409 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_188/2020 du 15 avril 2020 consid. 7.3).

4.7 En l'espèce, le recourant faisait l'objet d'une décision de renvoi exécutoire depuis le 22 août 2023. Depuis lors, il n’avait entrepris aucune démarche pour quitter la Suisse et s’est opposé aux deux premières tentatives de renvoi qui ont eu lieu les 25 mars et 13 mai 2024. Il a encore affirmé devant le TAPI qu'il n'était pas d'accord de retourner en Turquie, même sous la contrainte et préférait rester 100 ans en prison plutôt que de retourner dans son pays d'origine. Quand bien même le recourant n'a par la suite pas traduit ces intentions en acte, dès lors qu'il a pris l'avion le 29 mai 2024, il apparaissait au moment où le TAPI a rendu le jugement attaqué que le recourant n'entendait absolument pas se soumettre aux instructions des autorités.

La mise en détention pour insoumission était ainsi fondée, les vols spéciaux à destination de la Turquie n'étant pas envisageables en l'état et la collaboration de l'intéressé étant indispensable à son renvoi. La durée de la détention ordonnée apparaît en outre conforme au principe de la proportionnalité.

5.             Le recourant prétend que l'exécution de son renvoi est impossible pour des raisons matérielles.

5.1 Selon l'art. 80 al. 6 let. a LEI, la détention est levée lorsque le motif de la détention n’existe plus ou l’exécution du renvoi ou de l’expulsion s’avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles.

5.2 Le grief sera écarté, le départ de Suisse du recourant prouvant sans besoin d'un plus ample examen l'absence d'impossibilité matérielle à l'exécution de son renvoi.

6.             Le recourant fait enfin valoir que son renvoi à destination de la Turquie ne serait pas exigible ; c'est dans ce cadre qu'il fait valoir un grief de violation de la CEDH.

6.1 Selon l'art. 83 al. 4 LEI, l'exécution peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale.

L'art. 83 al. 4 LEI s'applique en premier lieu aux « réfugiées et réfugiés de la violence », soit aux personnes étrangères qui ne remplissent pas les conditions de la qualité de réfugiée ou réfugié parce qu'elles ne sont pas personnellement persécutées, mais qui fuient des situations de guerre ou de violence généralisée (Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, éd., Code annoté de droit des migrations, volume II : loi sur les étrangers, Berne 2017, p. 949 ; ATA/432/2023 du 25 avril 2023 consid. 4.3 ; ATA/515/2016 du 14 juin 2016 consid. 6b).

6.2 L’art. 3 CEDH proscrit la torture ainsi que tout traitement inhumain ou dégradant. Une mise en danger concrète de l'intéressé en cas de retour dans son pays d'origine peut ainsi constituer une raison rendant impossible l'exécution du renvoi (ATF 125 II 217 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_672/2019 du 22 août 2020 consid. 5.1). Pour apprécier l'existence d'un risque réel de mauvais traitements, il convient d'appliquer des critères rigoureux. Il s'agit de rechercher si, eu égard à l'ensemble des circonstances de la cause, il y a des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé, si on le renvoie dans son pays, y courra un risque réel d'être soumis à un traitement contraire à l'art. 3 CEDH (arrêts du Tribunal fédéral 6B_908/2019 du 5 novembre 2019 consid. 2.1.2 ; 2D_55/2015 du 9 mai 2016 consid. 4.1 et les références citées). Une simple possibilité de subir de mauvais traitements ne suffit pas. Il faut au contraire que la personne qui invoque l'art. 3 CEDH démontre à satisfaction qu'il existe pour elle un véritable risque concret et sérieux d'être victime de tortures ou de traitements inhumains ou dégradants en cas de renvoi dans son pays. Il en ressort qu'une situation de guerre, de guerre civile, de troubles intérieurs graves ou de tension grave accompagnée de violations des droits de l'homme ne suffit pas à justifier la mise en œuvre de la protection issue de l'art. 3 CEDH tant que la personne concernée ne peut rendre hautement probable qu'elle serait visée personnellement – et non pas simplement du fait d'un hasard malheureux – par des mesures incompatibles avec cette disposition (arrêt du TAF E-5397/2020 du 14 avril 2022 consid. 6.4).

6.3 Le juge de la détention administrative n'a pas à revoir le bien-fondé de la décision de renvoi de Suisse, à moins que celle-ci soit manifestement contraire au droit ou clairement insoutenable au point d'apparaître nulle (ATF 130 II 56 consid. 2 ; 128 II 193 consid. 2.2.2 ; 125 II 217 consid. 2 ; 121 II 59 consid. 2c).

6.4 Selon le TAF, malgré la résurgence, depuis le mois de juillet 2015, du conflit turco-kurde suite à la reprise d'affrontements directs entre les membres du parti communiste kurde (ci-après : PKK) et les forces de sécurité étatiques dans plusieurs provinces du sud-est, la Turquie ne connaît pas de situation de guerre, de guerre civile ou de violence généralisée sur l'ensemble de son territoire qui permettrait d'emblée – et indépendamment des circonstances du cas d'espèce – de présumer, à propos de tous les requérants provenant de cet État, l'existence d'une mise en danger concrète au sens de l'art. 83 al. 4 LEI (arrêt du TAF D-1260/2023 du 18 avril 2024).

6.5 En l'espèce, le dossier ne contient pas d'éléments permettant de considérer la décision de renvoi comme manifestement contraire au droit ou clairement insoutenable. On ne peut de plus partir d'une situation générale de mise en danger de la population, comme cela résulte des considérants qui précèdent. Quant à l'engagement du recourant en Suisse pour la cause kurde, le fait qu'il ait participé à visage découvert à une manifestation à Genève ne permet pas encore de retenir un risque concret de torture ou de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour au pays. Le recourant ne prétend par ailleurs pas avoir exercé des fonctions sujettes depuis le coup d'État manqué de 2016 à une répression de la part du régime en place.

Le grief sera ainsi écarté, et le recours, mal fondé, sera rejeté.

7.             Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA et 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu son issue, il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 27 mai 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 mai 2024 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Gabriele SEMAH, avocat du recourant, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

S. CROCI TORTI

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le  la greffière :