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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/1542/2017

AARP/99/2023 du 24.03.2023 sur JTCO/64/2021 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 11.05.2023, 7B_108/2023
Descripteurs : ACTE D'ORDRE SEXUEL AVEC UN ENFANT;APPRÉCIATION DES PREUVES
Normes : CP.187; CPP.10; CPP.289
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/1542/2017 AARP/99/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 17 mars 2023

 

Entre

A______, partie plaignante, comparant par Me Y______, avocat,

B______, partie plaignante, comparant par Me Z______, avocat,

appelantes,

contre le jugement JTCO/64/2021 rendu le 15 juin 2021 par le Tribunal correctionnel,

et

C______, domicilié ______, comparant par Me D______, avocat,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ et B______ appellent du jugement du 15 juin 2021, par lequel le Tribunal correctionnel (TCO) a classé la procédure dirigée à lencontre de C______ pour les infractions dactes dordre sexuel avec des enfants (art. 187 ch. 1 du code pénal suisse [CP]), contrainte sexuelle (art. 189 al. 1 CP) et viol (art. 190 al. 1 CP) visées sous chiffres 1.1.1, 1.1.3 et 1.1.4 de lacte daccusation, dans la mesure où elles portaient sur des faits susceptibles d'avoir été commis en Angola, ou en Suisse entre le 1er janvier 1990 et le 30 septembre 1992, ainsi que pour linfraction de tentative dactes dordre sexuel avec des enfants visée sous ch. 1.1.2, s’agissant des faits susceptibles d'avoir été commis en Suisse entre le 25 juin 1996 et le 31 décembre 2000.

Le TCO a acquitté C______ des infractions dactes dordre sexuel avec des enfants, de tentative de cette infraction, de contrainte sexuelle et de viol, mais l'a reconnu coupable de violation dune obligation dentretien (art. 217 CP) et l'a condamné à une peine pécuniaire de 90 jours-amende à CHF 30.- lunité, avec sursis pendant trois ans, complémentaire à celle prononcée par le Ministère public (MP) le 12 novembre 2018.

Les frais de la procédure, fixés en totalité à CHF 5'446.-, ont été mis à sa charge à hauteur de 10%, le solde étant laissé à la charge de l'État, et il a été condamné à verser à B______ CHF 2'700.- à titre de participation à ses frais d'avocat. Cette dernière ainsi que A______ ont été déboutées de leurs conclusions civiles et en réparation du dommage matériel.

L'émolument complémentaire de jugement, arrêté à CHF 4'500.- a été mis à la charge de B______, au motif que A______, qui bénéficiait de l'assistance judiciaire, était exonérée des frais de procédure.

b.a. A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant à la condamnation de C______ pour lensemble des infractions décrites dans l'acte d'accusation.

b.b. B______ fait de même et conclut à la condamnation de C______ à lui verser une indemnité de CHF 35000.- avec intérêts à 5% lan dès le 1er janvier 1991 à titre de réparation du tort moral et de CHF 9448.- avec intérêts à 5% lan dès le 20 janvier 2017 pour la réparation du dommage matériel, frais de la procédure à la charge de lintimé ou de l'État de Genève.

b.c. Par arrêt préparatoire du 12 avril 2022 (AARP/103/2022) la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) a décidé de ne pas entrer en matière sur les appels en tant qu'ils concernaient les infractions classées par le TCO.

c.a. Selon l'acte d'accusation du 30 juillet 2020, il est encore reproché ce qui suit à C______ :

- entre le 1er octobre 1992 et le 31 décembre 1994, en Suisse, il a commis à de très nombreuses reprises, soit à une fréquence d'une fois par semaine, des actes d'ordre sexuel sur sa belle-fille A______, née le ______ 1984, ces actes consistant à se tenir nu devant l'enfant en se tenant le sexe, à lui prendre toute sa joue dans sa bouche, à mettre son sexe dans sa bouche et à l'obliger à lui prodiguer des fellations (ch. 1.1.1).

En particulier :

o          à une date indéterminée entre 1992 et 1994, à E______ [VS], il a embrassé l'enfant, avant de passer la main sous sa robe et de la pénétrer vaginalement avec son sexe (ch. 1.1.1.C) ;

o          de 1992 jusqu’au ______ 1994, à E______, en prétextant jouer avec A______, il la fait venir sur ses genoux et lui a aspiré la joue avec sa bouche proche de la sienne (ch. 1.1.1.D) ;

o          à une date indéterminée, entre 1992 et le mois d’avril 1994, à E______, il a pénétré vaginalement A______ avec ses doigts alors qu’ils jouaient à la poupée (1.1.1.E) ;

o          à plusieurs reprises entre 1992 et le mois d’avril 1994, à E______, il a pénétré vaginalement A______ avec ses doigts lorsqu’elle prenait sa douche et qu’il l’aidait à se laver (1.1.1.F) ;

- à Genève, à des dates indéterminées entre le 1er janvier et le 24 juin 1996, il a tenté de commettre des actes dordre sexuel sur A______ sans parvenir à ses fins, celle-ci, devenue plus âgée, ayant appris à se défendre, s’étant même battue physiquement contre lui à plusieurs reprises (ch. 1.1.2) ;

- en Suisse, entre le 1er octobre 1992 et le mois d'avril 1994, à une fréquence d'environ une fois par semaine, en usant de menace et en exerçant des pressions d'ordre psychique ou en la mettant hors d'état de résister, il a contraint A______ à subir l'acte sexuel, en la pénétrant vaginalement avec son sexe, avec éjaculation (ch. 1.1.4).

c.b. L'acte d'accusation retient également qu'entre le 2 avril 2015 et le 31 octobre 2016, il a omis de s'acquitter de l'intégralité de la pension alimentaire due en faveur de son fils F______, bien qu'il en eût les moyens, le montant des arriérés s'élevant à CHF 9'727.90 (ch. 1.1.5).

Le verdict de culpabilité de ce chef n'est pas contesté en appel.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. B______ a rencontré C______ en République Démocratique du Congo, alors que sa fille, A______, était âgée d'environ un an et demi.

Le couple voyageait beaucoup entre le Congo et l'Angola, où il s'est installé en 1990 dans la famille de C______. Après avoir été laissée à la garde de sa grand-mère maternelle à G______ [RD Congo], A______ les y a rejoints.

En 1992, A______ est arrivée avec sa mère en Suisse, où elles ont déposé une demande d'asile et se sont installées dans un appartement à E______, alors que C______, qui avait formé une demande d'asile séparée, a été attribué au canton d'Argovie.

Le ______ 1994, B______ et C______ ont eu un fils, I______.

En 1995, les demandes d'asile qu'ils avaient formées ont été rejetées et ils ont été renvoyés au Congo.

Ils sont revenus en Suisse séparément, C______ dans un premier temps à J______ [SO], à une date qu'il estime se situer entre 1997 et 1998, et B______ et les enfants à Genève, en fin d'année 1996, tout d'abord au foyer K______, puis dans un appartement à L______.

Le ______ 2005, B______ et C______ se sont mariés et le second est venu définitivement s'installer à Genève. Un second fils est né de leur union le ______ 2009, F______.

Par jugement sur mesures protectrices de l'union conjugale du 9 décembre 2010 prononcé sur requête de B______, le Tribunal de première instance a, notamment, imparti un délai de deux mois à C______ pour quitter le domicile conjugal, ce qu’il a finalement fait le 25 février 2014.

b. Le montant de la contribution d’entretien a varié au fil du temps : initialement arrêtée à CHF 200.- par mois le 9 décembre 2010, elle a été portée à CHF 675.- en 2015 puis ramenée à CHF 330.- par mois le 13 juin 2017. Dans ce dernier jugement, le Tribunal de première instance a renoncé, en l'état, à fixer des relations personnelles entre C______ et son fils F______, au motif, entre autres, que l'intéressé ne s'était pas plaint de cette absence de relation auparavant, que la configuration familiale était particulière. Le fils aîné, I______, vivait avec son bébé chez sa mère et était en conflit avec son père depuis plusieurs années, à l'instar de A______. F______ redoutait une rencontre.

c.a. Le 4 avril 2017, A______ a à son tour déposé plainte pénale contre son beau-père, lui reprochant des viols à raison d'environ une fois par semaine, qui avaient débuté lorsqu'ils vivaient à G______ [RD Congo] et s'étaient poursuivis en Suisse jusqu'à ce qu'elle eut dix ans.

c.b. À l'appui de sa plainte, elle a produit un courrier dactylographié de 18 pages, non daté, intitulé "Lettre à mon violeur", présenté comme une "thérapie" lui permettant d'accepter ce qui lui était arrivé et d'aller de l'avant. Elle y précisait avoir caché durant 23 ans les viols subis dans son enfance, parce que l’auteur lui avait dit que cela resterait leur "secret" et lui avait fait promettre de "ne jamais le dire à [sa] mère".

Plusieurs événements ou souvenirs précis y sont décrits :

- "La première fois, c'était en Afrique. J'avais six ans et demi. Maman, comme à son habitude, était partie au marché. Ce jour-là, il faisait super chaud, et je me souviens m'être demandé pourquoi j'avais été punie. Je me revois dans ces draps blancs, ou je meurs de chaud et toi devant moi nu, tenant ton zizi. Pendant des années, j'ai essayé de comprendre si c'était normal pour une petite fille de connaître le zizi de son papa".

- "J'avais sept ans lorsque tu as fait basculer ma vie pour la première fois. [..]. À cette époque, si ta mémoire est bonne, nous venons tout juste de quitter l'Afrique pour venir en Europe. [..]. Je ne me rappelle pas de tout, mais il y a certains moments qui m'ont particulièrement marquée. Tu m'as violée à plusieurs reprises. Est-ce que tu te rappelles de comment j'étais habillée quand tu as recommencé, une fois arrivés en Europe? Moi oui, je portais une robe bleue et des baskets M______ [marque]. À cette époque, M______ était mon idole, ce qui n'est pas étonnant, vu que toutes les petites filles adorent M______. Il faut aussi que je te rappelle une chose qui vient juste de me revenir en mémoire à l'instant, une chose très importante que j'allais oublier. Te rappelles-tu du cadeau que tu voulais m'offrir pour mes huit ans? En tous cas, moi je m'en souviens, c'était la M______/1______ [marque, modèle], celle que toutes les filles voulaient avoir à l'époque parce que c'était à la mode. Je sais même que quelques jours après mon viol, tu me l'as offerte – je l'ai toujours en ma possession aujourd'hui. [..] Le jour de mon anniversaire, lorsque tu m'as offert ce présent, je me suis dit que tu étais super sympa [..] même si une autre partie de moi savait que tu étais méchant".

- "J'ai le souvenir d'une fois, où ça a été plus douloureux que les autres. On vivait à E______, dans cet appartement, de trois pièces ou tu venais nous rejoindre toutes les semaines. Tu te rappelles comment ça a commencé ? Il y a eu d'abord un petit bisou, c'était bizarre, mais supportable. J'ai commencé à réagir lorsque ta main est passée sous ma robe, c'est à partir de ce moment que j'ai compris que quelque chose n'allait pas, et que ce que tu voulais me faire n'était pas normal. Alors je t'ai dit "NON", mais tu n'as pas voulu m'écouter, tu as commencé à me dire que tu faisais ça pour mon bien et qu'il ne fallait pas que je m'inquiète, que tu n'allais pas me faire mal. Voyant que tu ne t'arrêtais pas, je commençais à crier de plus en plus fort pour que tu cesses, mais rien n'y a fait, tu as continué [..]. Le moment le plus difficile a été celui où tu es rentré en moi. Au moment de rentrer, tu m'as dit de ne pas crier et que si je criais tout le monde allait savoir ce qui se passait et que tout le monde dirait que c'était de ma faute, et surtout que ma mère serait déçue de savoir que j'avais désobéit et par conséquent, elle ne m'aimerait plus. Voilà pourquoi j'ai accepté de te laisser faire. Je n'ai plus crié, ni refusé quoi que ce soit par peur que ma mère soit déçue [..]. Je me rappelle aussi que je me suis mise à saigner d'en bas [..]. Je pense que ça a duré pendant trente minutes, trente minutes qui m'ont paru être une éternité. Des minutes pendant lesquelles je me faisais planter un couteau à l'intérieur de moi [..]. Je me rappelle aussi du sourire que tu m'as fait lorsque tu as fini [..] Tu m'as ensuite donné la permission de sortir de là, mais tu as aussi bien précisé que tout cela devait rester entre nous deux, et que personne ne devait connaître notre secret". Le soir venu, lorsqu'elle avait pris sa douche et que sa mère était venue vérifier si elle s'était bien lavée, de crainte que celle-ci découvre ce qu'il s'était passé, elle lui avait dit qu'elle n'était plus une petite fille et qu'elle pouvait désormais prendre sa douche seule.

- "Je me rappelle encore alors que j'avais seize ans, une dispute a éclaté entre nous deux [..]. J'étais à la cuisine, je lavais des assiettes quand tu es arrivé derrière moi, et sans comprendre le pourquoi du comment, tu avais un de mes doigts dans ta bouche, et pour me défendre, je t'ai frappé avec la poêle".

"La période où être une enfant violée est la plus dure, c'est pendant l'adolescence [..]. Tu ne peux pas avoir des moments intimes avec ton copain, par peur que lui aussi t'inflige un mauvais traitement, et aussi parce que tu as l'impression d'avoir un corps étranger en toi. Tu sais, quand je parle de corps étranger, c'est pour donner un nom à ton sperme qui coule encore en moi, car quoi que je fasse, il sera toujours là. Heureusement que j'étais encore trop jeune pour avoir mes règles".

Le texte parle encore du comportement difficile adopté par A______ et de son caractère capricieux, qui lui permettaient de soulager la douleur et lui donnaient l'impression de contrôler le déroulement de sa vie, de son incapacité à s'accepter et à s'aimer, ainsi que du silence gardé pour protéger sa mère, de son incompréhension qu'une telle chose ait pu arriver alors qu'elle était si proche de son violeur, qu'elle considérait comme son héros, de ses questionnements ("je me dis souvent que j'ai dû te provoquer, te pousser à agir ainsi") ou des changements que les viols avaient provoqués, de petite fille extravertie et "rigolote", à enfant solitaire, "chialeuse", "une fille chiante que tout le monde détestait".

A______ y explique avoir débuté son écrit à l'âge de 16 ans. Les actes avaient cessé à la naissance de son petit frère ; depuis lors, elle et son violeur étaient passé de l'amour à la haine et ne pouvaient plus se supporter. Elle avait essayé de faire comprendre à sa mère que son mari était un "homme mauvais", mais sans y parvenir. Elle n'avait pas non plus pu en parler à sa famille, par crainte de "ces histoires de coutume où la personne violée, même enfant, est considérée comme pas fréquentable". Par contre, elle était capable d'en parler à ses amies proches, sans aucune émotion, laissant entendre que cela l'avait rendue plus forte. En grandissant, elle avait fait un "blackout" de ces souvenirs et n'arrivait pas à savoir si "c'était quelque chose qui lui était vraiment arrivé". La main aux fesses d'un collègue de travail, en 2014, l'avait replongée dans le passé. Elle avait découvert qu'elle n'était pas assez forte. Depuis quelques temps, elle voyait un médecin qui lui avait confirmé qu'elle avait bien été violée et que le souvenir qu'elle avait dans sa tête correspondait à des faits qui avaient bien existé. Elle avait également pu dire la vérité à sa mère. L'acceptation de ces événements était un premier pas vers la guérison.

d. A______ a été entendue par la police le 11 mai 2017. Très émue, elle a pleuré durant toute l'audition. Elle a expliqué que les abus avaient commencé après qu'elle eut rejoint le couple en Angola. Elle se rappelait d'un jour où son beau-père s'était approchée d'elle, nu, en se tenant le sexe, alors qu'elle se trouvait en pleurs sur le lit, sans comprendre ce qu'il se passait. Il avait mis son sexe dans sa bouche, puis l'avait pénétrée vaginalement et avait "fait ce qu'il avait à faire". Il avait ensuite quitté la pièce.

Elle n'avait pas souvenir d'autres épisodes qui seraient survenus en Angola, mais les abus sexuels avaient repris lorsqu'elle était arrivée en Suisse, en 1992, dans l'appartement de E______ où elle vivait avec sa mère, lors des visites de son beau-père. Ce dernier, profitant de ce que B______ sortait, la faisait en général venir sur ses genoux en jouant, puis lui prenait toute la joue dans sa bouche en appelant cela un câlin. Quand il faisait cela, elle savait qu'il allait "se passer quelque chose de pas bien". Il y avait eu plusieurs épisodes. Elle se rappelait également qu'à une reprise, il était venu dans sa chambre pour jouer à la poupée, l'avait déshabillée et pénétrée vaginalement de ses doigts. Cela était arrivé à plusieurs reprises, y compris, souvent, lorsqu'elle prenait sa douche et qu'il l'aidait à se laver. Il avait également à plusieurs reprises mis son "zizi" dans sa bouche et entretenu des relations vaginales complètes avec elle, ceci plus particulièrement dans le second appartement qu'ils avaient occupé à E______, dans lequel il était plus présent la semaine. Elle criait et lui demandait d'arrêter, car elle avait mal, mais il continuait jusqu'à ce qu'il eut fini. C______ lui disait que sa maman l'aimait beaucoup et que si elle apprenait qu'on lui faisait du mal, elle ne serait pas contente. Comme elle le considérait comme son père et entretenait une relation fusionnelle avec lui, elle pensait que ce qu'il faisait était normal, même si elle n'aimait pas cela.

Elle avait l'impression qu'il l'avait laissée tranquille après la naissance de son frère I______, peut-être parce qu'il n'avait plus le temps. Elle avait vécu cet éloignement comme une deuxième punition. Leurs rapports étaient devenus très difficiles.

Il y avait eu des tentatives d'abus sexuels après leur arrivée à Genève, en 1996, mais comme elle était plus grande, elle s'était défendue et son beau-père n'était pas arrivé à ses fins. C'est à cette époque qu'elle avait commencé pour la première fois à parler de ce qui lui était arrivé, notamment à ses camarades d'école, pour expliquer son comportement difficile. Elle disait que l'abuseur était un proche de la famille, mais en taisant qu'il s'agissait de son beau-père, qui désormais vivait en permanence avec eux. Sa mère était souvent absente et C______ lui reprochait de tout gâcher et d'être responsable du fait que "ça n'allait pas à la maison". Ils s'étaient battus à plusieurs reprises. Comme sa mère ne comprenait pas ces violences, C______ lui expliquait que les bagarres étaient dues au fait qu'elle était désobéissante. À 16 ans, après la dispute survenue dans la cuisine, où elle lui avait donné un coup de poêle au visage après qu'il l'eût mordue au doigt, elle avait pris la décision de quitter le domicile et avait été accueillie durant plusieurs mois chez les parents d'une amie.

Elle avait alors commencé à consulter le Dr. N______ pour des crises de boulimie et lui avait parlé des abus sexuels dont elle avait été victime, sans préciser que l'auteur était son beau-père.

À 18 ans, alors qu'elle suivait une formation de monitrice de camps d'été et que chacun parlait de sa vie, elle avait craqué et raconté les abus dont elle avait été victime, toujours en taisant l'identité de son agresseur. Une fille l'avait amenée auprès de l'association "O______", où elle avait été prise en charge par un thérapeute. Elle avait interrompu le suivi après deux séances, car il était trop difficile "de parler de cela". Elle avait toutefois trouvé un exutoire dans l'écriture, décrivant ses émotions et l'impact que ces actes avaient eu sur sa vie dans une sorte de journal intime.

À 22 ans, elle avait été violée par son petit ami, qui l'avait pénétrée de force, bien qu'elle lui eut clairement dit qu'elle ne voulait pas de relations sexuelles. Elle s'était rendue à l'hôpital faire établir un constat, mais avait finalement renoncé à déposer plainte pénale, car il vivait près de chez elle et la menaçait.

Ce n'était qu'à l'âge de 25 ans qu'elle avait pour la première fois révélé, à son amie P______, que l'abuseur était son beau-père.

En 2013, elle-même avait demandé à sa mère de chasser C______, car l'ambiance à la maison était extrêmement mauvaise et son beau-père très agressif. Comme B______ ne le faisait pas et qu'elle-même avait un travail stable, elle avait quitté le domicile en pensant qu'elle pourrait peut-être aider sa famille davantage de l'extérieur, plutôt que de vouloir la sauver de l'intérieur.

Quand son beau-père avait quitté le domicile conjugal, en 2014, elle avait dit à tous ceux qui savaient ce qui lui étaient arrivé sans en connaître l'auteur qu'il s'agissait de C______. Pour nombre d'entre eux, qui les avaient côtoyés à la maison, ce n'était pas une surprise et ne faisait que confirmer ce qu'ils pensaient.

Fin 2014-début 2015, quelqu'un lui avait mis la main aux fesses au travail et tous ses souvenirs étaient remontés à la surface. Elle avait décidé de suivre une thérapie qui lui avait permis d'aboutir au dépôt de la plainte pénale. Elle était notamment suivie par la Dresse Q______, qui l'aidait à mieux comprendre son comportement et ses réactions par rapport à tout ce qu'elle avait vécu.

La Dresse Q______ avait convoqué sa mère en 2015 pour lui dire ce qu'il s'était passé. Cela avait été compliqué, mais cela allait désormais mieux et B______ l'aidait à se souvenir de certains détails. Son frère I______, qui savait depuis plusieurs années qu'elle avait subi des abus, n'avait appris que fin 2016 que l'auteur était son père. Il avait été difficile de déposer plainte contre ce dernier, car elle voulait protéger son frère, mais celui-ci l'avait encouragée, ayant lui-même une petite fille.

Elle n'avait compris qu'en 2016, en accompagnant sa mère au tribunal et y croisant son beau-père, que la grande emprise qu'il avait toujours exercée sur elle continuait et avait décidé d'agir.

e. Au Ministère public (MP), A______ – qui a pleuré durant toute l'audience – a confirmé ses précédentes déclarations. En Angola, elle partageait la chambre de sa mère et de son beau-père. Elle se souvenait que la première fois, C______ avait introduit son sexe dans sa bouche, puis l'avait pénétrée vaginalement, malgré qu'elle lui dise non et qu'elle avait mal, et ce jusqu'à éjaculation. Elle n'avait pas de souvenir précis des événements postérieurement à l'acte. Les autres viols s'étaient passés selon le même processus, y compris à E______, où tous trois partageaient une chambre. Sa mère partait le matin au travail. Elle savait que les actes allaient se produire lorsque C______ la prenait sur ses genoux et lui aspirait la joue avec sa bouche proche de la sienne. Il faisait passer cela pour un jeu, mais elle savait que cela n'était pas normal et cela la dégoûtait. Les actes se déroulaient soit dans la chambre, soit dans la douche. Elle n'avait pas de véritables souvenirs de ces viols, car quelque chose s'était bloqué en elle. Elle se souvenait néanmoins d'un épisode dans le deuxième appartement de E______, avant la naissance de son frère : ils jouaient à la poupée à l'entrée de la chambre et C______ avait mis des doigts dans son sexe. Elle ne se rappelait pas si elle était habillée ou non, ni si de tels gestes étaient survenus auparavant. En revanche, elle se rappelait très bien du sexe dans sa bouche, car c'était une chose qui était arrivée plus fréquemment, tant en Angola qu'en Suisse. Comme son beau-père lui répétait qu'elle était la préférée de sa mère et que s'il arrivait quelque chose, ce serait sa faute, elle avait eu le sentiment de protéger sa famille en ne disant rien.

Les agressions s'étaient arrêtées en 1994, à la naissance de I______. À la suite de la bagarre dans la cuisine, son beau-père avait demandé à sa mère de choisir entre lui et sa fille, de sorte qu'elle-même avait décidé de partir. Elle incluait cet épisode au nombre des tentatives d'abus sexuels dont elle avait parlé. Comme elle était grande, cela ne marchait plus, de sorte qu'il n'y avait plus eu d'actes physiques, mais en revanche C______ avait exercé sur elle une pression psychologique permanente jusqu'à ce qu'il quitte la maison.

Elle avait parlé pour la première fois des abus sexuels à des enfants de sa classe à E______, lorsqu'elle avait huit-dix ans. À Genève, elle en avait parlé à la plupart de ses amis, ainsi qu'au Dr N______, sans jamais nommer leur auteur.

À 22 ans, son petit ami, prénommé R______, l'avait effectivement violée.

Les attouchements subis au travail en 2015 avaient fait remonter tout ce qu'elle avait vécu enfant. Son mal-être et ses crises d'angoisse l'avaient poussée à consulter une psychologue, la Dr Q______, qui avait trouvé important qu'elle parle à sa mère, ce qui n'était pas aisé, selon les coutumes africaines. Elle avait évoqué une fois les viols subis devant toute la famille, en exclamant "comment as-tu pu faire cela alors que moi-même j'ai été violée", lorsque I______, alors âgé de 12-14 ans, avait agressé une jeune femme.

Depuis 2015, elle était en couple, mais n'avait jamais connu d'épanouissement sexuel et avait des rapports "parce qu'il faut en avoir".

f. A______ a pour l'essentiel confirmé ces déclarations devant le TCO. Elle s'était trompée dans sa plainte en désignant le Congo ; les abus avaient bien commencé en Angola. La fréquence d'une fois par semaine concernait plutôt les abus commis en Suisse, qui avaient débuté dans le premier appartement de E______. Sa mère faisait des ménages lorsque son beau-père venait le week-end, de sorte qu'il lui donnait les douches. Il ne s'était presque rien passé dans le second appartement, où la famille avait emménagé après la naissance de I______, car C______ et elle ne pouvaient plus se supporter. Elle avait manifesté des doutes, dans sa "Lettre à mon violeur" quant à la réalité des viols, car pendant longtemps, elle n'avait pas compris pourquoi elle pouvait visualiser le sexe de son beau-père et cette image de l'Angola qui la hantait. La réalité des abus subis lui avait été confirmée par la Dresse Q______, ce qui lui avait permis de comprendre son mal-être et ses envies suicidaires. Elle considérait n'avoir aucun intérêt à accuser son beau-père, qui demeurait le père de ses frères ; son but était uniquement de lui faire réaliser le mal qu'il lui avait fait.

g. C______ a contesté l'ensemble de ces accusations, dont il pensait qu'il s'agissait "d'une combine de plus" de son épouse et de sa fille pour l'empêcher de voir F______. Il considérait A______ comme sa propre fille et ne l'avait jamais touchée de manière inadéquate. Violer était un blasphème que la Bible n'autorisait pas. S'il avait été coupable, il aurait fui dans son pays à réception de la convocation de la police. Le fait qu'il était resté prouvait sa bonne foi.

Il s'était installé en Angola en 1988 environ. B______ l'y avait rejoint en 1990, puis A______ en 1991. À Luanda, ils vivaient dans une grande villa familiale, où ils n'avaient dormi les trois ensemble que la première nuit. Ensuite, A______ avait dormi avec les autres filles de la famille. Ils n’étaient au demeurant restés que quelques mois en Angola. A______ y était arrivée à l'âge de sept ans, et il n'était donc pas possible qu'il l'y eût violée à l'âge de six ans. De plus, en Afrique, il faisait si chaud que tout le monde vivait dehors dès 6h, de sorte qu'il n'était jamais seul avec l'enfant.

Lorsque B______ et A______ s'étaient installées à E______, il leur rendait visite le week-end. Il arrivait le vendredi vers 23h, voire le samedi matin, se reposait durant la journée et le dimanche, tous trois se rendaient à l'église à Bex, d'où il rentrait ensuite directement en Argovie. Il n'aurait donc matériellement pas eu le temps de commettre des abus sexuels sur sa belle-fille. De plus, B______ était presque toujours présente et la taille du studio, puis de l'appartement d'une chambre et d'un salon à E______, ne permettaient pas de faire ce dont il était accusé. À cela s'ajoutait le fait que, A______, âgée alors de huit ans, prenait vraisemblablement sa douche seule en semaine, ce qui rendait peu vraisemblable qu'il l'y eût aidée le week-end. Il prêchait le dimanche à l'église, ce dont il aurait été incapable s'il avait réellement commis ce dont il était accusé.

Le fait qu'elle n'eut pas parlé des abus en 2010 ou 2013 au Tribunal était la preuve que ce n'étaient que des mensonges, proférés parce qu'il voulait faire baisser la pension due pour F______. Il ignorait qu'elle avait parlé d'abus de la part d'un proche de la famille dès son arrivée à Genève, en 1996. Il n'y avait jamais eu d'altercation physique entre eux : il n'était pas violent, n'avait jamais frappé ses enfants et leur éducation aurait interdit à ceux-ci de s'en prendre à lui physiquement. Un médiateur était certes intervenu à l'époque, mais en raison des tensions entre lui et son épouse, et non sa belle-fille. À 16 ans, cette dernière avait effectivement quitté quelques semaines le domicile familial, après une dispute avec sa mère et n'était revenue qu'après qu'un ami de la famille, T______, eut négocié son retour avec B______.

h. Au MP, C______ a affirmé que A______ avait tout inventé, l'accusant de viol vraisemblablement en lien avec la procédure de divorce et parce que certains membres de sa famille maternelle ne voulaient pas de cette union depuis le début.

Il a précisé que le studio de E______ était composé d'une seule pièce et qu'une chambre d'un peu plus d'un mètre de large, avec un lit, avait été aménagée derrière les toilettes, où A______ et sa mère dormaient ; par la suite, ils avaient acquis un canapé-lit pour B______ et lui. Cette dernière, qui ne travaillait pas, ne s'absentait quasiment jamais et lorsqu'elle sortait faire des courses, il l'accompagnait avec sa fille, puisqu'il ne les avait pas vues de toute la semaine (même s'il a admis, en fin d'audience, que son épouse sortait parfois en le laissant à la maison avec les deux enfants). À la naissance de I______, B______ s'était vu attribuer un appartement plus grand, où A______ dormait avec l'enfant.

Après leur expulsion, puis leur retour à Genève, il avait passé l'essentiel de son temps avec sa famille, bien qu'attribué au canton de Soleure. Tout se passait en général bien avec A______, même s'il y avait des hauts et des bas, comme avec toute adolescente. La situation avait changé à la naissance de I______, dont A______ était un peu jalouse. Leurs disputes étaient uniquement verbales. Elle ne l'avait en particulier jamais frappé avec une poêle. A______ avait quitté le domicile familial en 2002 ou 2003 pour aller chez une amie, non pas parce qu'il avait demandé à B______ de choisir entre sa fille et lui – c'était plutôt celle-ci qui demandait à sa mère de choisir entre son beau-père et elle –, mais car, selon son épouse, la jeune fille ne "voulait rien faire", préférant sortir avec ses amis et son copain. Avant de partir, elle les avait traités de "pauvres". Elle était revenue après que T______ ait joué au médiateur entre elle et sa mère.

Il était exact que lorsque I______, alors âgé de 12-14 ans, avait agressé une jeune femme, A______ avait révélé qu'elle-même avait été violée. Toutefois, lorsqu'il avait interrogé B______, celle-ci lui avait dit que sa fille faisait semblant de pleurer et évoquait un viol pour calmer la jeune femme et protéger son frère.

i. Devant le TCO, C______ a ajouté que lorsque A______ avait quitté le domicile conjugal en 2013 pour s'installer dans son propre appartement, il avait transféré son adresse administrative chez elle, ce qui témoignait de leur bonne entente. Il admettait qu'à une reprise, alors qu'il avait exceptionnellement fait la vaisselle, il lui avait reproché de ne rien faire, ce qui l'avait fâchée. Lorsqu'elle l'avait frappé avec une poêle à la tête, il avait saisi sa main et le doigt de sa fille était entré dans sa bouche par accident ; il ne l'avait toutefois ni frappée, ni mordue.

Il n'avait jamais eu de litige avec elle jusqu'à ce qu'elle et sa mère formulent des accusations de viol afin qu'il perde son permis B, accusations qu'il avait apprises du Service de protection des mineurs trois semaines avant d'être convoqué par la police, et qui l'avaient "estomaqué". Tout était "archi-faux" A______ était une fille intelligente, qui avait pris des cours de théâtre: son émotion et ses larmes lors de ses auditions étaient de la comédie. Il n'avait aucune attirance pour les enfants et n'était pas pédophile, ses convictions religieuses s'y opposant de toute manière. Il n'aidait par ailleurs plus A______ à se laver depuis qu'elle avait six ans et n'était jamais rentré dans la salle de bain en Suisse lorsqu'elle s'y trouvait. Si les choses s'étaient passées à E______ comme elle le racontait, il y aurait eu des conséquences, car "ce sont des choses qui se voient à l'œil nu". Il n'avait pas lu la "Lettre à mon violeur", son niveau d'éducation étant limité.

j. B______ a indiqué au MP et au TCO que sa fille avait rejoint le couple en Angola dans le courant de l'année 1990, à l'âge de six ans. Tous trois vivaient dans la même chambre, dans un studio attenant à la maison de la tante de son époux. À cette époque, elle quittait le domicile à 4h30 pour vendre des choses au marché et ne revenait que dans l'après-midi ; les hommes ne sortaient pas, car ils risquaient d'être enrôlés.

Son époux avait l'habitude de prendre A______ sur ses genoux et de lui "manger les joues", comme décrit dans l'acte d'accusation, ce qui pour elle était l'attitude d'un père et n'éveillait pas les soupçons.

Elle avait commencé à voir que A______ était mal dans sa peau à E______ ; elle ne se sentait pas jolie et mise à l'écart. B______, qui ne comprenait pas pourquoi, était souvent convoquée à l'école.

Le premier appartement dans lequel elle et sa fille avaient emménagé en Valais, en 1992, était constitué d'une grande pièce faisant salon cuisine et d'une petite chambrette où dormait l'enfant. C______ les y rejoignait les week-ends, du vendredi soir au dimanche soir, voire au lundi matin ; à l'époque, il ne travaillait pas et était très souvent avec eux. Elle faisait un peu des ménages, de 9h à 18h, y compris les week-ends ; il lui arrivait également de laisser sa fille et son beau-père seuls pour aller faire des courses. Lorsqu'elle était tombée enceinte de I______, sa fille et elle avaient emménagé dans un appartement comprenant une grande chambre à coucher, qu'elle avait partagée grâce à une armoire pour créer aussi une chambre pour sa fille. Les relations entre son époux et A______ s'étaient détériorées à la naissance du bébé. Elle ignorait pourquoi. En septembre 1995, C______ avait été renvoyé au Congo et elle l'y avait suivi avec les enfants en décembre. Les relations du couple étaient tendues. Les enfants étaient revenus chez sa sœur à Genève, tandis qu'elle restait au Congo puis elle était rentrée en Europe. C______, qui était revenu en Suisse par la suite et logeait à J______ [SO], venait toujours au foyer K______ pour lui demander pardon pour tout ce qu'il lui avait fait subir au Congo, de sorte qu’ils s’étaient réconciliés et il était venu vivre avec eux [au Foyer] K______. Elle travaillait alors dans un hôtel, de 4h à 18h, et C______ restait avec les enfants. Ils avaient quitté le foyer en 1998 et pris un appartement. Son époux et sa fille se disputaient beaucoup, elle ignorait pourquoi. Son époux lui demandait de choisir entre A______ et lui, car celle-ci ne le respectait pas. Ses propres relations avec sa fille étaient en revanche bonnes et elles se parlaient. Un jour, quand A______ avait 13-14 ans, son époux et sa fille s'étaient bagarrés, le premier ayant mordu au sang la seconde au bras, cette dernière avait riposté en le frappant à la tête avec une ramassoire en fer. De ce qu'elle avait compris, C______ accusait A______ d'être impolie et de lui manquer de respect, ce qu'elle-même n'avait jamais constaté. Un évangéliste était venu pour essayer de comprendre les raisons de cette dispute, sans succès.

À 16 ans, sa fille était partie un mois chez une amie car elle ne s'entendait pas avec son beau-père et que ce dernier lui demandait de choisir entre sa fille et lui. Cette dernière ne les avait jamais traités de "pauvres".

A______ ne lui avait pas parlé du viol subi de l'un de ses petits amis, mais lorsque son frère avait agressé une fille qui souhaitait déposer plainte, elle avait pleuré et dit que le viol "n'était pas bien car elle était passée par là". Malgré ses questions, sa fille ne lui avait pas dévoilé l'identité de l'auteur. Par la suite, elle lui avait expliqué qu'elle ne voulait pas être la cause de son divorce et que ses frères grandissent sans leur père, comme elle. Lorsqu’elle lui avait révélé les faits, A______ lui avait également dit que ses amies à E______ et sa tante étaient au courant. B______ se sentait coupable de n'être pas parvenue à protéger son enfant. Elle n'avait jamais eu de soupçon et avait été naïve.

Il n'y avait aucun lien entre la procédure pénale et la procédure civile l'opposant à son époux, le problème des relations avec son fils cadet étant antérieur aux révélations de sa fille.

k. I______ a affirmé ne rien savoir des accusations de sa sœur et ne pas se rappeler des relations qu'elle entretenait avec son père. Il ne comprenait pas pourquoi il était entendu. Lorsqu'ils étaient enfants, ils étaient essentiellement gardés par leur mère, sauf quand elle n'était pas là, son père prenant alors le relais. Il était exact qu'il avait été accusé d'agression sexuelle par une fille et que sa sœur était en larmes lorsqu'elle l'avait appris. Il ne se rappelait pas qu'elle eut dit quelque chose de spécial, ni si on père était présent. En revanche, sa mère l'avait interpellé en lui disant "regarde ce que tu as fait, car moi on m'a violée".

l. Entendu par le MP, T______ a expliqué avoir connu B______ en 1996, lorsque tous deux logeaient au foyer K______. Depuis lors, il avait entretenu des contacts réguliers avec toute la famille. Il faisait de la musique et avait tourné des clips vidéo avec A______, lorsqu'elle avait 15 ou 16 ans et était tout le temps avec lui. Il avait senti une certaine tristesse en elle. La dernière fois qu'il l'avait vue, en septembre-octobre 2018, ils avaient parlé des rumeurs qui couraient dans la communauté angolaise et congolaise de Genève, soit qu'elle avait eu des relations sexuelles avec son père, ce qu'elle lui avait confirmé, en précisant qu'il s'agissait de pénétrations depuis qu'elle avait moins de huit ans et que l'affaire était en mains du tribunal. Elle était dans un état de tristesse et il la voyait "comme si elle allait fondre", mais en même temps, il avait eu l'impression qu'elle voulait en parler. Il avait senti qu'elle "parlait vrai", "comme quelqu'un parlait la vérité, du fond de son cœur". Lorsqu'il lui avait demandé pourquoi, pendant tout le temps passé avec lui, elle ne lui en avait pas parlé, elle avait répondu qu'elle n'y arrivait pas. Il se rappelait qu'à une époque, A______ était allée vivre chez une amie, mais ignorait pourquoi et ne se souvenait pas avoir été l'y chercher. Il excluait que l'histoire eût été inventée pour nuire à C______, dans la mesure où les problèmes du couple existaient déjà à son arrivée [au Foyer] K______, en 1996-1997.

m. Pensant avoir reconnu, dans le conducteur d'un scooter, le dénommé "R______" dont A______ avait dit qu'il l'avait violée à l'âge de 22 ans, C______ a sollicité son audition.

Ce conducteur, en réalité U______, a été décrit par A______ comme son meilleur ami, qu'elle avait rencontré à l'école de commerce lorsqu'elle avait 18 ans. Selon C______, il venait tous les jours à la maison et ils faisaient tout ensemble.

Au MP, U______ a déclaré avoir su depuis le début de leur amitié que A______ avait été violée par quelqu'un de sa famille, mais qu'elle avait toujours refusé de donner son identité, jusqu'à la période où elle réfléchissait à déposer plainte. Cela lui avait pris un certain temps et il l'avait encouragée à le faire, pour que ces actes ne demeurent pas impunis. A______ lui avait parlé de ses difficultés intimes avec les hommes, vu ce qu'il s'était passé.

Il comprenait désormais pourquoi l'ambiance au domicile de son amie était "bizarre" et les relations entre cette dernière et son beau-père "pas chaleureuse". Il lui semblait qu'elle lui avait dit avoir subi ces actes avant l'âge de dix ans ; il ne se rappelait pas la période précise pendant laquelle ils avaient duré, mais il ne s'agissait pas d'un seul événement ; cela avait duré "un bout de temps".

n. Deux personnes connaissant de longue date C______, V______ et W______, ont témoigné devant le TCO n'avoir jamais constaté de comportement inadéquat de sa part avec les femmes ou les enfants, ni ne l'avoir vu faire preuve d'agressivité verbale ou physique envers quiconque.

Le premier, bien qu'étant leur témoin de mariage et ayant passé plusieurs soirées avec les époux, n'avait jamais perçu de tension entre eux. Il était une fois intervenu à la demande de B______, car A______ avait fugué chez une amie, trouvant que sa famille n'avait pas suffisamment de moyens financiers. En discutant avec elle, il était parvenu à la faire revenir.

o. Le Dr N______, désormais à la retraite, a déclaré au MP et devant la CPAR avoir suivi A______ régulièrement dès 2003 en raison d'un mal-être important et de problèmes d'anorexie liés, selon ses dires, au décès de son père et de viols subis à raison d'une fois par semaine dès l'âge de neuf ans. Elle lui avait parlé des abus dont elle avait été victime durant son enfance lors de la première consultation, en 2003. À l'époque, elle ne lui avait pas dévoilé l'identité du violeur, mais parlait de lui comme du "gars". Elle lui avait dit que sa mère avait également été violée à l'âge de 15 ans, mais ne lui avait pratiquement pas parlé de cette dernière ou de sa relation avec elle.

Les séances, qui s'étaient poursuivies jusqu'en 2017, étaient plutôt d'ordre psychologique, même si d'autres problèmes avaient été traités (ORL, gastriques, gynécologiques). Il ne pouvait se prononcer sur d'éventuelles séquelles physiques des viols subis étant enfant, ne l'ayant pas auscultée à ce niveau ; il aurait fallu s'adresser à un gynécologue pour savoir si le nodule recto-vaginal dont elle avait été opérée en 2008 et les quatre fibromes découverts à cette occasion dans son vagin étaient d'origine post-traumatique. La vie sexuelle de sa patiente était "hyper chaotique" et elle "tombait" toujours sur des gens qui la maltraitaient. Elle avait en particulier été violée par un petit ami en 2005 ou 2006, puis avait subi des attouchements en 2014 au travail. Ce dernier épisode avait donné lieu à de grandes discussions, qui l'avait probablement aidée à comprendre certaines choses. Ce n'était toutefois qu'en 2016, lorsqu'elle avait commencé à aller mieux, qu'elle lui avait dit que l'auteur des viols était son beau-père.

p. La Dresse Q______, psychiatre, a suivi A______ depuis fin 2014 à 2016, dans un premier temps une fois par semaine ou toutes les deux semaines, puis l'a revue en consultation entre 2019 et 2021. Au début, sa patiente hésitait à parler, craignant que ce qu'elle avait à dire "ne s'éparpille dans la communauté africaine".

A______ l'avait consultée initialement pour des problèmes professionnels, puis, progressivement, lui avait parlé des viols, qui avaient commencé en Angola à l'âge de six ans et avaient duré jusqu'à ses dix ans, mais n'avait jamais mentionné le viol subi à l'âge de 22 ans. Elle n'avait pas précisé la fréquence des abus et désigné au début leur auteur comme étant son père, pour préciser ensuite qu'il s'agissait de son beau-père. La Dresse Q______ a expliqué que les choses avaient été dévoilées par séquences, car au début, il y avait beaucoup d'anxiété, de détresse et de pleurs. Avec le temps, sa patiente s'était ouverte et détendue et lui avait expliqué qu'elle gardait un secret depuis longtemps et qu'elle avait des images de son beau-père l'agressant sexuellement.

Elle-même avait très vite compris que sa patiente présentait un état traumatique avec des réminiscences de la scène à l'origine de son traumatisme. Elle avait un comportement d'évitement, des cauchemars, des "flash-backs" et tant son parcours de vie que sentimental étaient instables. Au début, il y avait des zones d'ombre. A______ n'était pas précise dans sa description des faits. Elle était embrouillée et "bloquait". Elle sentait et voyait l'abus, l'agression. Q______ a ajouté qu'elle-même ne pouvait pas savoir s'il s'agissait de bisous, d'une agression ou d'autre chose. Sa patiente parlait d'une agression sexuelle "C'étaient plus des images, comme des flashes, de ces abus". A______ était dans l'effondrement et ressentait beaucoup de culpabilité et de colère vis-à-vis de son agresseur et de son entourage, en particulier de sa mère, avec qui elle avait abordé la situation en 2015, au cabinet, après un ou deux mois de prise en charge, mais par laquelle elle ne s'était pas sentie soutenue. B______ avait été choquée par ces révélations. Elle avait probablement cru sa fille, mais était dans une sorte de conflit de loyauté entre celle-ci et C______. L'impact de ces révélations avait causé des tensions et des conflits. Elle-même les avait revues régulièrement pour les aider.

Son rôle de médecin avait été d'amener A______ à déculpabiliser, pour qu'elle ne se sente plus responsable de ce qu'il s'était passé. L'initiative du dépôt d'une plainte pénale revenait à sa patiente et était de nature à permettre la guérison, car le silence était brisé.

C. a. Les débats d'appel ont eu lieu en deux temps, le 1er novembre 2022, lors desquels le Dr N______ et la Dresse Q______ ont été entendus, et le 14 décembre 2022, après le dépôt par A______, à la demande de la Cour, d'un cahier dans lequel elle avait consigné des chansons et poèmes écrits, selon elle, au début des années 2000 (la page de garde porte la date de 2003), lequel contenait également diverses feuilles volantes.

a.a. Les auditions, sollicitées par A______ en date du 21 novembre 2022 et lors de l'audience qui a suivi, de trois gynécologues dont elle était ou avait été la patiente, ainsi que celle de son amie d'enfance, P______, qui la première avait recueilli ses confidences sur l'identité de son violeur, et qui l'avait accompagnée lors de l'audience du 1er novembre 2022 comme personne de confiance, ont été refusées.

a.b. Le contenu du cahier produit est sans lien évident avec la cause.

Il était en revanche accompagné de cinq textes non datés, rédigés sur des feuilles volantes, dont l'un, sous forme de chanson intitulée "Bilan", se réfère à trois parties de la vie de A______: la première, à sa naissance non désirée alors que sa mère avait 20 ans, la deuxième à son départ de l'Afrique à l'âge de huit ans pour la Suisse, la troisième, faisant référence à la perte, au même âge, de son innocence "à cause d'un seul homme, il m'a pris ce qu'une femme a de plus cher, la virginité, il m'a violée, alors que je lui faisais confiance", et "mon adolescence a été trop pénible, je devais sans cesse cacher ce secret qui faisait de moi une fille salie", "à l'âge où toutes mes copines avaient leurs premières amours, je me lamentais sur mon sort, on me demande qui voudras d'une fille violée". Un autre texte, également sous forme de chanson, parle d'un rêve qu'elle a fait durant des années "[elle] se trouve dans un lit inconnu, pleurant les larmes de tous [son] corps", qu'elle avait enfin pu décrypter, elle-même étant la petite fille, "et cet homme à côté [d'elle], qui [la] faisait tant pleurer, c'est lui la cause de tous [ses] malheurs passés et présents", poursuivant "je me vois criant, le suppliant d'arrêter de me faire du mal, c'est là que j'ai perdu mon innocence à jamais, tu vois je n'ai pas eu la force de le repousser, je n'avais que 9 ans" (n.r. le "9" est barré est remplacé par un "7").

b.a. A______, qui s'est montrée très émue lors de ses deux auditions par la CPAR, a confirmé ses précédentes déclarations. Elle n'agissait pas par vengeance – elle aurait eu bien d'autres occasions –, ni par jalousie, mais parce qu'elle avait besoin de se libérer, d'avancer dans la vie et de retrouver une stabilité physique et émotionnelle. De plus, elle ne voulait pas transmettre son mal-être aux deux filles qu'elle avait eues depuis le dépôt de sa plainte pénale. En renonçant à ses prétentions civiles, chiffrées à CHF 70'000.- en première instance, elle voulait montrer à C______ qu'elle n'agissait pas pour de l'argent.

En substance, elle reprochait à son beau-père d'avoir eu des gestes déplacés et de l'avoir violée entre ses huit et dix ans en Valais, bien qu'elle ne s'en rappelle que de bribes. Les actes étaient intervenus principalement dans leur premier appartement à E______. Elle avait probablement parlé du second appartement dans ses écrits et à la police car il s'agissait de souvenirs d'enfant et qu'il était possible qu'elle eût mélangé. Elle avait l’image très claire du sexe du prévenu, qu’il avait introduit dans sa bouche. Il l'avait pénétrée à plusieurs reprises. Il agissait toujours de la même façon, dans des moments de jeu. Elle était sur ses genoux, il lui attrapait la joue avec sa bouche et elle savait que "quelque chose de pas normal allait se produire". Elle avait toutefois de la peine à décrire ce qu'il faisait quand il "rentrait en elle", n'était pas à l'aise pour parler de sexe. Elle n'avait pas souvenir de traces physiques (bleus, saignements).

Comme il lui répétait tout le temps que son père biologique l'avait abandonnée car elle n'était pas gentille, elle s'accrochait à lui car elle n'avait que lui. Par ailleurs, il lui disait que cela ferait du mal à B______ si elle apprenait qu'on lui faisait du mal, de sorte qu'elle n'avait pas osé en parler à sa mère. Elle avait l'impression qu'il ne pouvait pas vivre sa vie par sa faute en raison des liens entre eux. Les actes avaient cessé du jour au lendemain, et elle n'avait pas compris pourquoi. Elle s'était même demandé s'il ne l'aimait plus comme avant, car elle croyait que ce qu'il lui faisait, c'était de l'amour.

Elle avait entamé la rédaction de ses cahiers vers l'âge de 16 ans, après la bagarre qu'elle avait eue avec C______ dans la cuisine, pour se libérer, et cela lui avait fait beaucoup de bien. Elle n'aurait pas ressenti autant de haine, de colère, étant enfant s'il ne s'était rien passé. Par la suite, elle avait retranscrit ses cahiers à l'ordinateur, ce qui avait donné la "Lettre à mon violeur". Elle n'était pas destinée à des tiers, car à l'époque, il lui paraissait impossible de parler de ce qu'elle avait vécu. Elle avait en effet été tellement conditionnée, jusqu'à l'âge adulte, par son beau-père qui lui disait tout le temps que tout était de sa faute, qu'elle avait le sentiment que si elle en parlait, cela créerait des problèmes et que sa mère et son frère ne l'aimeraient plus. Elle était restée aussi longtemps avec eux car elle croyait les protéger.

Le déclic avait eu lieu en 2015 quand, après avoir eu des problèmes sur son lieu de travail, elle avait décidé de consulter une thérapeute. Celle-ci lui avait permis de prendre confiance en elle et de réaliser que ce qu'elle avait vécu n'était pas normal. La rencontre avec son compagnon, fin 2015, avait également joué un rôle, car il lui avait dit qu'ils ne pourraient pas aller de l'avant sans qu'elle ne se libère de son lourd passé. Elle n'aurait clairement pas pu avoir des enfants sans le dépôt de la plainte pénale.

Encore à l'heure actuelle, elle gardait des séquelles psychologiques de ce qu'elle avait vécu. Elle n'aimait pas son visage et sa bouche, ni être regardée par des hommes. Elle avait essayé d'éviter de relire les procès-verbaux, car cela la bouleversait. Savoir qu'elle devrait se présenter en audience avait également été compliqué et elle avait eu des coups de colère avant de s’y rendre. Son compagnon et ses filles lui apportaient toutefois de la stabilité, elle avait réalisé qu'elle n'était pas une mauvaise personne, elle était fière d'elle et considérait qu'elle s'en sortait plutôt bien.

b.b. C______ a contesté les faits reprochés. Les accusations portées contre lui étaient mensongères. En raison de celles-ci, il avait fait un AVC, était partiellement paralysé et avait perdu près de 30 kilos. Sa belle-fille agissait par haine et malveillance. U______ avait pu mentir car il était son ami et elle avait pu l'influencer. T______ avait aussi menti et regrettait désormais ce qu'il avait dit.

Tout se passait bien à la maison. A______ avait toutefois été en colère à la naissance de son frère, car avant, elle était fille unique et très "chouchoutée". Par ailleurs, lorsqu'il était revenu en Suisse en 1998 (après avoir quitté le pays en septembre 1995), il avait constaté qu'elle ne participait pas du tout aux tâches ménagères et le lui avait fait remarquer, ce qui avait occasionné des tensions. La bagarre dans la cuisine avait débuté car il faisait la vaisselle et que sa belle-fille était arrivée et avait commencé à tout salir. Lorsqu'il lui avait dit de ne rien toucher, elle l'avait frappé avec une poêle et il avait mordu son doigt par accident.

c.a. Par la voix de son conseil, A______ fait valoir que si elle ne remettait pas en cause l'appréciation des premiers juges et de la CPAR en ce qui concernait la prescription d'un certain nombre de faits, la culpabilité de son beau-père subsistait pour les actes plus récents, soit ceux commis entre le 1er octobre 1992 et le 31 décembre 1994, ainsi qu'entre le 1er janvier et le 24 juin 1996. En effet, il existait un faisceau d'indices en ce sens. Le premier était la "Lettre à mon violeur", mais également le cahier, dont la lecture démontrait que cette lettre n'était pas le fruit d'un délire ou de son imagination. C'était également à tort que le TCO avait jugé ses déclarations imprécises et contradictoires, vu l'ancienneté des faits, son âge à l'époque, et l'émotion dont elle avait fait preuve à toutes les audiences. C______ se contentait de dire que tout ceci n'était que mensonges, mais n'avait pas déposé plainte pénale pour dénonciation calomnieuse, ni n'avait jamais fait preuve d'empathie à son endroit. Au contraire, il tentait de se faire passer pour une victime, alléguant pour la première fois devant la CPAR que la procédure avait eu des conséquences sur sa santé, sans pour autant apporter la moindre preuve d'un lien entre elles. Face aux accusations, il ne s'était pas immédiatement récrié qu'il n'aurait jamais pu violer une petite fille, comme cela eût été normal, mais s'était prévalu de ses emplois du temps chargés pour nier une telle possibilité. Il était démontré que les violences sexuelles subies en tant qu'enfant faisaient l'objet, à l'âge adulte, d'une amnésie totale dans 40% des cas et d'une amnésie partielle dans 60% d’entre eux (cf. www.memoiretraumatique.org/psychotraumatismes/memoire-traumatique.html). Elle avait pendant longtemps été partagée entre son amour pour celui qui tenait un rôle de père et sa haine pour le mal qu'il lui infligeait. Sa reconstruction était un long processus, qui avait notamment conduit au dépôt de sa plainte et lui avait permis de fonder une famille.

c.b. Par la voix de son conseil, B______ persiste dans ses conclusions.

La détresse de sa fille devait être entendue. L'absence de témoins ou de preuves matérielles ne devait pas nécessairement conduire à admettre un doute. Les imprécisions ou variations dans ses déclarations étaient insignifiantes ; elle était demeurée mesurée dans ses propos, et ne tirait aucun bénéfice de ses accusations, alors que C______ n'avait eu de cesse de tenter de la discréditer. Elle s'était confiée de longue date à ses médecins et à ses amis. La "Lettre à mon violeur" était si bouleversante de sincérité qu'il était impossible que son contenu fût une pure fiction. Il en allait de même du cahier produit. Elle-même ne se pardonnerait jamais de ne rien avoir vu et de ne pas avoir su protéger sa fille.

Elle conclut au paiement de CHF 35'000.- avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 1991 en réparation du préjudice moral très important subi en lien avec la commission des infractions très graves commises sur sa fille et CHF 3'524,48 au titre de ses frais d'avocat pour la procédure d'appel, application devant être faite de l'art. 73 al. 1 let. a CP, ainsi qu’à l’indemnisation de son conseil de choix.

Celui-ci, a déposé un état de frais pour l'activité déployée du 23 juin 2021 au 14 décembre 2022, faisant état de 18h15 d'activité au taux horaire de CHF 270.- (3h30 d'entretien, 2h40 pour les courriers et les téléphones, 6h55 pour la lecture du dossier, la rédaction de conclusions civiles, trois vacations [3h] et 5h10 pour les audiences), majorées de CHF 100.- de frais d'ouverture de dossier, photocopies, etc. et de la TVA.

En première instance, sa note d'honoraires s'élevait à CHF 9'693.-, correspond à 20h d'activité à CHF 450.-/h (4h d'audience devant le MP, 3h d'entretien, 3h de préparation pour l'audience de jugement, d'une durée totale estimée à 10h sur deux jours, retenue à hauteur de 8h45 par le TCO).

c.c. Par la voix de son conseil, C______ conclut au rejet des appels et fait valoir qu'une large partie des faits dont il est encore accusé à ce stade de la procédure sont également prescrits. Le ch. 1.1.1.B de l'acte d'accusation ne précisait aucune date, mais mentionnait que les faits seraient intervenus peu avant le 25 juin 1992, soit durant une période atteinte par la prescription. L'acte d'accusation faisait en outre état d'une fourchette large allant de 1992 à 1994 pour les actes visés aux let. C, D, E, et F de ce même chiffre, de sorte que faute de précision, il convenait de faire une application stricte du principe in dubio pro reo et de retenir la date la plus favorable à l'accusé, soit avant le 1er octobre 1992. Le chiffre 1.1.2 évoquait aussi une période allant de 1996 à 2000, sans date précise et sans que l'on sût exactement ce qu'il s'était passé, à l'exception de l'épisode intervenu dans la cuisine, de sorte qu'il convenait de considérer que, si tant est qu'ils eussent un caractère pénal, ils étaient intervenus après le 14 juin 1996.

Sur le fond, il était évident que la plainte servait les desseins de son épouse, pour laquelle A______ avait pris fait et cause, y compris en l'accompagnant aux audiences. Cette motivation figurait d'ailleurs noir sur blanc dans la "Lettre à mon violeur", où elle disait qu'il devait partir. Ce texte ne le désignait d'ailleurs pas et beaucoup des textes du cahier n'avaient rien à voir avec les accusations portées contre lui. Les déclarations de sa belle-fille n'étaient par ailleurs pas constantes, puisqu'elle avait tout d'abord situé les premiers faits au Congo, puis en Angola, et avait parlé d'abus en 1996 et 1997, alors qu'il n'était revenu en Suisse qu'en 1998. De plus, elle n'avait mentionné l’intimé au Dr N______ qu'en 2015, et n'avait pas parlé à sa psychologue du viol subi par son petit ami. Cet élément, ainsi que d'autres (par exemple le harcèlement subi sur son lieu de travail) pouvaient expliquer la souffrance de A______. Lui-même n'aurait au demeurant jamais eu la possibilité d'abuser de cette dernière, puisque lorsqu'il vivait en Suisse allemande, il venait pour passer le plus de temps possible avec sa femme. Par ailleurs, il y aurait nécessairement eu des traces (sang) si A______ avait réellement été pénétrée par un adulte étant enfant. Il n'y avait jamais eu de constat médical. Il n'y avait pas non plus eu d'enquête de voisinage à E______, susceptible de corroborer les accusations. Il n'avait pas le profil d'un pervers, travaillait dans une église où il côtoyait régulièrement des enfants, sans jamais qu'un quelconque problème nêut été évoqué.

e. Le MP s'en rapporte à justice.

D. C______, ressortissant congolais né le ______ 1963, réside en Suisse au bénéfice d'un permis B dont le renouvellement dépend du sort de la présente procédure.

Une procédure de divorce est en cours depuis 2022.

Il est titulaire d'un permis de cariste et d'un diplôme d'opérateur de machines conventionnelles obtenu à X______ [établissement de formation]. Il travaille à 50% comme chauffeur-livreur et distributeur en publicité pour un salaire mensuel variant entre CHF 2'000.- et CHF 2'500.- par mois. Il est par ailleurs responsable d'une mission évangélique à titre bénévole. Ses primes d'assurance-maladie sont prises en charge par l'État. Son loyer est de CHF 523.- par mois et il a des dettes pour un montant qu'il estime à environ CHF 15'000.-.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, il a été condamné par le MP pour diverses infractions à la LCR le 12 novembre 2018, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 30.-, avec sursis, et à une amende de CHF 800.-.

E. a. Me Y______, conseil juridique gratuit de A______, a déposé une note de frais pour l'activité déployée du 27 octobre au 14 décembre 2022, faisant état de 18h05 d'activité au tarif horaires de chef d'étude (2h d'entretien, 6h55 pour la consultation du dossier et la préparation des audiences, d'une durée totale estimée de 9h10, mais qui ont duré en réalité 6h20 au total), majorées d'un forfait de 20% pour la correspondance et les téléphones et de quatre vacations à CHF 100.-.

En première instance, il a été indemnisé à hauteur de 39h45 d'activité.

b. Me D______, défenseur d'office de C______, a déposé une note de frais pour l'activité déployée du 13 janvier au 14 décembre 2022, faisant état de 23h30 d'activité au tarif horaire de chef d'étude (3h d'entretien, 13h30 pour l'analyse et la rédaction d'observations sur la prescription, ainsi que pour la préparation des deux audiences, d'une durée estimée à 7h).

En première instance, il a été indemnisé à hauteur de 55h20 d'activité.

EN DROIT :

1. 1.1. L'appel formé par A______ (ci-après : l’appelante) est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du code de procédure pénale [CPP]).

1.2. En sa qualité de mère de la victime, B______ (ci-après : la mère de l’appelante ou la seconde appelante) est une proche susceptible de jouir des mêmes droits que celle-ci, notamment de celui de se voir octroyer la qualité de partie plaignante, dans la mesure où elle fait valoir contre le prévenu des prétentions civiles propres (art. 116 al. 2 et 117 al. 3 CPP).

Les prétentions invoquées doivent toutefois apparaître crédibles au vu des allégués : il ne suffit pas d'articuler des prétentions civiles sans aucun fondement, voire fantaisistes pour bénéficier des droits procéduraux. Il faut une certaine vraisemblance que les prétentions invoquées soient fondées (ATF 139 IV 89 consid. 2.2 p. 92).

En l'occurrence, le TCO a considéré que le cas de B______ était limite, mais qu'il convenait néanmoins d'admettre sa qualité de partie plaignante pour lui laisser la possibilité de rendre vraisemblable la gravité de ses souffrances.

Cette décision n'a pas été remise en cause par les autres parties, de sorte que, dans la mesure où son appel respecte le délai et les prescriptions de forme posées par la loi, il sera lui aussi considéré comme recevable.

1.3. La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure de recours se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance.

La juridiction de recours administre en outre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (art. 389 al. 3 CPP). Il n'y a cependant pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité ou déjà suffisamment prouvés (art. 139 al. 2 CPP).

2.2. L’appelante et sa mère ont sollicité les auditions des gynécologues de l’appelante ainsi que de son amie d'enfance.

Dans la mesure où cette dernière aurait recueilli ses confidences, son audition aurait pu être envisagée, et l'on ne peut que regretter qu’elle n’a pas été sollicitée durant la procédure préliminaire. Quoi qu'il en soit, l'intéressée a assisté, que ce soit en qualité de personne de confiance ou simplement dans le public, à tout le moins à une audience devant la Cour, ce qui porte une atteinte irrémédiable à la portée probante des déclarations qu'elle pourrait faire. Son audition ne serait dès lors pas utile pour la solution du litige.

Quant aux médecins, contrairement à ce qui a pu être plaidé, la CPAR n'a pas laissé entendre qu'elle en souhaitait l'audition. Celle-ci n'apparaît pas nécessaire à ce stade de la procédure, ce d'autant moins que l'on ne voit pas ce qu'ils pourraient avoir été à même de constater physiquement, si longtemps après les faits (au contraire du cas visé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1P.677/2003 du 19 août 2004, dans lequel un examen gynécologique d'une fillette de 11 ans a pu révéler des lésions de l'hymen caractéristiques d'une pénétration pénienne survenue avant la puberté ou, au plus tard, à cette période) et qu'il n'est pas allégué qu'ils auraient recueilli les confidences de la plaignante.

Pour ces motifs, les réquisitions de preuve des appelantes ont été rejetées lors des débats.

3. 3.1.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, il signifie qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité de l'accusé et non à ce dernier de démontrer son innocence (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 40 et les arrêts cités).

Comme principe présidant à l'appréciation des preuves, la présomption d'innocence est violée si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_784/2011 du 12 mars 2012 consid. 1.1). Le juge du fait dispose à cet égard d'un large pouvoir d'appréciation (ATF 120 Ia 31 consid. 4b). Confronté à des versions contradictoires, il forge sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents. L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble et l'état de fait déduit du rapprochement de divers éléments ou indices. Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (arrêts du Tribunal fédéral 6B_623/2012 du 6 février 2013 consid. 2.1 et 6B_642/2012 du 22 janvier 2013 consid. 1.1).

3.1.2. Les déclarations de la victime constituent un élément de preuve que le juge doit, dans l'évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires rassemblés au dossier, apprécier librement (arrêts du Tribunal fédéral 6B_732/2021 du 24 février 2022 consid. 2.3 et 6B_1498/2020 du 29 novembre 2021 consid. 3.1).

Dans la mesure où il est fréquent que, dans les délits de nature sexuelle, il n'y ait pas d'autres témoins que la victime elle-même, le juge peut d'ailleurs fonder sa condamnation sur les seules déclarations de cette dernière (arrêts du Tribunal fédéral 6B_626/2010 du 25 novembre 2010 consid. 2.2, 1P.677/2003 du 19 août 2004 consid. 3.3 et 1A.170/2001 du 18 février 2002 consid. 3.4.1), de sorte que le fait que celles-ci, en tant que principal élément à charge, s'opposent aux déclarations de la personne accusée, ne doit pas nécessairement conduire à un acquittement (ATF
137 IV 122 consid. 3.3. p. 127 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_942/2017 du 5 mars 2018 consid. 2.1.2).

Encore faut-il que les dires de la victime apparaissent crédibles et qu'ils emportent la conviction. Les déclarations successives d'un même témoin ne doivent pas nécessairement être écartées du seul fait qu'elles sont contradictoires. Les connaissances scientifiques actuelles tendent en effet à démontrer que les événements traumatiques sont traités différemment des événements quotidiens : d'une part, des distorsions de la mémoire et des pertes de mémoire peuvent survenir, notamment en raison de tentatives de refoulement ; d'autre part, chez certaines victimes, un grand nombre de détails de l'expérience traumatique restent gravés dans la mémoire, en particulier concernant des aspects secondaires, qui peuvent justifier d'éventuelles incohérences dans le récit. Il faut donc tenir compte de ces éléments dans l'analyse des déclarations (ATF 147 IV 409 consid. 5.4.2 p. 421 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_28/2013 du 13 juin 2013 consid. 1.2 et 6B_429/2008 du 7 novembre 2008 consid. 4.2.3).

En outre, il n'est pas possible de nier la crédibilité générale des déclarations de la victime sur la base d'un dépôt tardif de plainte. En effet, il n'est pas rare que les personnes concernées se trouvent dans un état de choc et de sidération après un événement traumatisant tel qu'un viol. Dans cet état, il y a des efforts de refoulement, respectivement de déni, voire un sentiment de peur ou de honte, qui font que, dans un premier temps, la victime ne se confie à personne (147 IV 409 consid. 5.4.1 p. 420).

De surcroît, en présence d'actes répétés commis dans la cellule familiale, on ne peut pas exiger de la victime un inventaire détaillant chaque cas (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1498/2020 du 29 novembre 2021 consid. 2.4).

3.2. Les conditions légales d'incrimination des actes reprochés ne se sont pas modifiées depuis le 1er octobre 1992, de sorte que la question de la lex mitior (art. 2 al. 2 CP) ne se pose pas à ce stade et ne sera examinée que sous ch. 4 ci-après.

3.3. L'art. 187 ch. 1 CP punit celui qui aura commis un acte d'ordre sexuel sur un enfant de moins de 16 ans (al. 1), celui qui aura entraîné un enfant de cet âge à commettre un acte d'ordre sexuel (al. 2) et celui qui aura mêlé un enfant de cet âge à un acte d'ordre sexuel (al. 3).

Par acte d'ordre sexuel, il faut entendre une activité corporelle sur soi-même ou sur autrui qui tend à l'excitation ou à la jouissance sexuelle de l'un des participants au moins. Il faut d'abord distinguer les actes n'ayant aucune apparence sexuelle, qui ne tombent pas sous le coup de la loi, des actes clairement connotés sexuellement du point de vue de l'observateur neutre, qui remplissent toujours la condition objective de l'infraction, indépendamment des mobiles de l'auteur ou de la signification que le comportement a pour celui-ci ou pour la victime (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1122/2018 du 29 janvier 2019 consid. 3.2 et les références citées). Les comportements simplement inconvenants, inappropriés, indécents, de mauvais goût, impudiques ou désagréables, doivent demeurer hors du champ des actes pénalement répréhensibles (ATF 125 IV 58 consid. 3b p. 63 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_744/2016 du 1er mars 2017 consid. 3.2). Dans les cas équivoques, qui n'apparaissent extérieurement ni neutres, ni clairement connotés sexuellement, une appréciation objective de l'ensemble des circonstances est requise, l'acte incriminé devant porter clairement atteinte au bien juridique protégé par la disposition légale, soit le développement sexuel non perturbé de l'enfant. Il convient alors de tenir compte de l'ensemble des éléments d'espèce, notamment de l'âge de la victime ou de sa différence d'âge avec l'auteur, de la durée de l'acte et de son intensité, ainsi que du lieu choisi par l'auteur (ATF 125 IV 58 consid. 3b p. 63 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1122/2018 du 29 janvier 2019 consid. 3.2 et les références citées).

Il résulte de cette jurisprudence que la notion d'acte d'ordre sexuel doit être interprétée plus largement lorsque la victime est un enfant. Dans ce cas, il faut se demander si l'acte, qui doit revêtir un caractère sexuel indiscutable, est de nature à perturber l'enfant (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1122/2018 du 29 janvier 2019 consid. 3.2). Un baiser lingual, des baisers insistants sur la bouche, une caresse insistante du sexe, des fesses ou des seins, même par-dessus les habits, constituent sur un enfant un acte d'ordre sexuel, alors qu'imposés à un adulte, ils entrent dans le champ d'application de l'art. 198 CP, dont l'application est subsidiaire (arrêts du Tribunal fédéral 6B_180/2018 du 12 juin 2018 consid. 3.1 et 6B_35/2017 du 28 février 2018 consid. 4.2). En revanche, des baisers sur la bouche ou sur la joue, ne constituent généralement pas un acte sexuel au sens de l'art. 187 CP (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1002/2019 du 28 novembre 2019 consid. 2.2 et 2.4 ; 6B_7/2011 du 15 février 2011 consid. 1.2 et 1.4).

3.4.1. L'art. 189 CP vise celui qui, notamment en usant de menace ou de violence envers une personne, en exerçant sur elle des pressions d’ordre psychique ou en la mettant hors d’état de résister l’aura contrainte à subir un acte analogue à l’acte sexuel ou un autre acte d’ordre sexuel.

Outre l'existence d'un acte d'ordre sexuel, dont l'acception est identique à celle de l'art. 187 CP, l'art. 189 al. 1 CP implique le recours à la contrainte pour amener une personne, sans son consentement, à subir ou à faire elle-même un acte d'ordre sexuel.

3.4.2. Aux termes de l'art. 190 al. 1 CP, se rend coupable de viol celui qui, notamment en usant de menace ou de violence, en exerçant sur sa victime des pressions d'ordre psychique ou en la mettant hors d'état de résister, aura contraint une personne de sexe féminin à subir l'acte sexuel.

Par acte sexuel au sens de cette disposition on entend l'union naturelle des parties génitales de l'homme et de la femme. Il importe peu de savoir dans quelle mesure le membre viril pénètre dans les parties génitales de la femme ou si le sperme s'est écoulé dans le vagin, l'éjaculation n'étant pas nécessaire (ATF 123 IV 49 consid. 2 p 52 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_206/2015 du 8 octobre 2015 consid. 1.1).

3.4.3. Le viol constitue une lex specialis par rapport à la contrainte sexuelle réprimée par l'art. 189 CP.

Ces deux infractions sont des délits de violence, qui supposent en règle générale une agression physique. En introduisant la notion de "pressions psychiques", le législateur a toutefois voulu viser également les cas où la victime se trouve dans une situation sans espoir, sans pour autant que l'auteur ait recouru à la force physique ou à la violence. Il peut ainsi suffire que, pour d'autres raisons, la victime se soit trouvée dans une situation telle que sa soumission est compréhensible eu égard aux circonstances.

En cas de pressions d'ordre psychique, il n'est pas nécessaire que la victime ait été mise hors d'état de résister (ATF 124 IV 154 consid. 3b p. 158). La pression exercée doit néanmoins revêtir une intensité particulière, comparable à celle d'un acte de violence ou d'une menace (ATF 133 IV 49 consid. 6.2 p. 55). Pour déterminer si on se trouve en présence d'une contrainte sexuelle, il faut procéder à une appréciation globale des circonstances concrètes déterminantes. L'infériorité cognitive ainsi que la dépendance émotionnelle et sociale peuvent, particulièrement chez les enfants et les adolescents, induire une énorme pression qui les rend incapables de s'opposer à des atteintes de nature sexuelle (ATF 131 IV 167 consid. 3.1 p. 171 ; 131 IV 107 consid. 2.2 p. 109 et les arrêts cités).

Un auteur se trouvant dans le proche entourage social d'un enfant peut aussi, sans utilisation active de la contrainte ou de la menace de désavantages, exercer sur lui une pression et ainsi réaliser des infractions de contrainte sexuelle. Est déterminante la question de savoir si l'enfant – compte tenu de son âge, de sa situation familiale et sociale, de la proximité de l'auteur, de la fonction de ce dernier dans sa vie, de sa confiance en l'auteur et de la manière dont sont commis les actes d'ordre sexuel – peut, de manière autonome, s'opposer aux abus. Plus la personne de référence est proche de l'enfant et plus celui-ci est jeune, moins les exigences en matière de pressions psychiques sont élevées (ATF 146 IV 153 consid. 3.5.3ss p. 157ss).

3.5. D'un point de vue subjectif, les infractions aux art. 187 CP, 189 CP et 190 CP sont intentionnelles. Le dol éventuel suffit (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1498/2020 du 29 novembre 2021 consid. 3.2, 6B_180/2018 du 12 juin 2018 consid. 3.1 et 6B_1083/2014 du 9 juillet 2015 consid. 3.2).

3.6. L'art. 187 CP protège le développement sexuel des enfants, alors que les art. 189 CP et 190 CP protègent la liberté sexuelle.

Lorsque des actes d'ordre sexuel avec un enfant constituent également l'infraction de contrainte sexuelle et de viol, un concours idéal est donc possible entre ces dispositions, puisque les biens juridiques protégés ne sont pas identiques (ATF
124 IV 154 consid. 3a p. 157 ; 122 IV 97 consid. 2a p. 99 ; 119 IV 309 consid. 7 p. 310ss ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_153/2016 du 14 juin 2016 consid. 1.1 et 6S_463/2005 du 10 février 2006 consid. 2).

3.7.1. En l'espèce, l’appelante s’est exprimée avec sincérité et constance, évoquant elle-même les doutes qui l’avaient assaillie et sa propre difficulté à intégrer et mettre en mots ce qui lui était arrivé, à un âge où elle n’avait pas encore les ressources cognitives pour identifier et qualifier les faits. Le très long processus de dévoilement n’est pas de nature à détruire la crédibilité de ses propos. L’appelante a longtemps conservé le secret sur les faits ; elle ne s’en est ensuite ouverte que de façon indirecte dans son journal intime, ce qui est une forme d’expression qui n’implique pas de révélation à l’entourage ou à des tiers. Le refus, vraisemblablement inconscient, de dénoncer est, comme le sentiment de culpabilité, un élément très fréquent dans des situations d’abus intra familiaux, et notamment chez de jeunes enfants qui ne comprennent pas ce qu’ils vivent et enfouissent ces événements dans leur mémoire. S’y ajoutent le conflit de loyauté et les conséquences d’un dévoilement, d’emblée perceptibles pour la victime.

L’appelante a manifesté au cours de la procédure des émotions d'une grande ampleur lors de ses différentes auditions. Ces émotions pourraient être certes liées au viol subi à 22 ans, au harcèlement dont elle a été victime sur son lieu de travail en 2014, et/ou à des abus intervenus dans son enfance, mais dont l'intimé ne serait pas l'auteur. Toutefois, il est établi, par les témoignages du Dr N______ et de U______ que l'appelante leur a parlé des abus subis alors qu'elle avait 18 -19 ans, ce qui exclut qu'elle se fût référée à l’agression dont elle a été victime à l'âge de 22 ans. L'appelante a par ailleurs toujours mentionné avoir été abusée par un proche. Or, l'intimé est le seul homme de sa famille qui a fait partie de son entourage durant toute son enfance, tant en Afrique qu'en Suisse. Il n'est dès lors pas envisageable que l'appelante lui impute, par haine ou erreur, les faits d'un tiers.

L’adolescence de l’appelante semble avoir été marquée par quelques conflits avec sa mère et son beau-père ; il est toutefois notoire que cette période est marquée par un tumulte émotionnel important et le mal-être de l’appelante à cette époque ne suffit pas à considérer qu’elle aurait perdu contact avec la réalité au point d’imaginer avoir été victime des faits dénoncés. Les doutes exprimés à ce sujet par l’appelante sont plutôt le reflet d’un processus de mémoire difficile. Le dossier ne présente aucun indice de troubles psychologiques autres que ceux relevant du traumatisme en lien avec les faits. Le récit livré est cohérent, si peu détaillé, ancré dans l’espace et dans le temps, faisant notamment référence à bon nombre d’éléments du vécu (lieux géographiques, différents appartements, événements tels que la naissance du frère ou les allers-retours en Afrique), au contraire de ce que pourrait être une narration qui ne serait que le fruit de l’imagination.

T______, qui connaît l’appelante depuis son adolescence, a d'ailleurs "senti" qu'elle "parlait vrai", "comme quelqu'un parlait la vérité, du fond de son cœur", quand bien même il regretterait désormais ses déclarations, ce qui n’est du reste nullement établi.

L'appelante a également décrit de manière convaincante le processus de dévoilement suivi, dont le caractère vraisemblable a été confirmé par ses médecins, qui ont expliqué que les attouchements subis au travail en 2014 avaient constitué un déclic, poussant leur patiente à agir et se soigner afin de pouvoir aller de l'avant, plutôt que d'occulter les événements. Le délai de plusieurs années qui lui a été nécessaire n'a, dans ce contexte, rien de surprenant.

L’appelante ne tire aucun bénéfice secondaire de ses accusations.

Certes, elle a déposé plainte alors que l'intimé avait, huit mois auparavant, assigné sa mère en justice en sollicitant la diminution de son obligation d'entretien envers F______ et la reprise du droit de visite sur ce dernier, et peu après que sa mère eut elle-même entamé une procédure pénale contre son époux pour violation d'une obligation d'entretien. La mésentente du couple est toutefois largement antérieure, puisqu'elle a été datée par T______ à leur retour en Suisse, en 1996-1997 et que deux décisions judiciaires civiles sont intervenues avant l'ouverture de la présente procédure. À ce moment-là, l'intimé n'avait déjà plus de contact avec son fils cadet depuis près de trois ans. Le dépôt de la plainte pénale, en avril 2017, n'était dès lors susceptible d'avoir d'influence ni sur le montant de la pension due, ni sur les relations personnelles de la famille. Un désir d'aider sa mère ou de renforcer sa position procédurale doit dès lors être exclu.

Une haine tenace envers son beau-père n'est pas non plus crédible. Elle impliquerait que l'appelante eut ourdi, depuis de longues années – puisqu'elle a parlé de viols à son médecin et à son ami U______ près de 14 ans avant de s'adresser à la justice – un plan machiavélique en vue de lui nuire, dont le dépôt de la plainte pénale aurait été le point d'orgue, tout en ne laissant rien paraître, allant même jusqu'à lui permettre de transférer chez elle son adresse administrative, en 2013.

En outre, si l'appelante avait réellement menti dans le but que lui impute l'intimé, elle n'aurait sans nul doute pas livré des descriptions fragmentées, comme elle l'a fait, mais un récit construit, ne prêtant pas flanc au questionnement. Le caractère lacunaire de ses souvenirs, leur forme de "flash-back", l'extrême précision de certains détails (cf. draps blancs, chaleur, robe bleue, poupée M______, etc.) auxquels s'oppose le flou des actes en eux-mêmes, parlent ainsi en faveur de sa crédibilité (cf. consid. 3.1.2 supra).

3.7.2. La défense, avec le TCO, voit dans les contradictions qui ont émaillé son récit un élément de nature à mettre en doute la crédibilité des déclarations de l’appelante.

Alors qu'elle avait pourtant mûrement réfléchi au dépôt de sa plainte, l’appelante a tout d'abord situé le lieu des premiers abus au Congo, pour ensuite affirmer de manière constante, lors de ses auditions, qu'ils étaient intervenus en Angola. Leur fréquence a également évolué, puisqu'ils ne seraient devenus hebdomadaires qu'en Suisse, contrairement à ce qui était mentionné dans la plainte. À la police, elle a désigné le deuxième appartement de E______ comme celui où, plus particulièrement, son beau-père avait agi, y décrivant devant le MP un épisode de manière particulièrement précise, pour ensuite dire devant le TCO qu'il ne s'était presque rien passé dans ce logement, où la famille n'avait emménagé qu'après la naissance de son frère. Ces imprécisions, notamment relatives aux pays concernés, s’expliquent par l’ancienneté des faits et l’absence de signification, pour un enfant de son âge, de la dénomination du pays, le lieu de vie étant essentiellement centré autour de celui où se trouvent la famille et l’entourage. Le fait que la plaignante ait confondu les deux appartements de E______ n'est pas déterminant, compte tenu de son jeune âge à l'époque (entre huit et dix ans), de la courte durée de son séjour dans chacun d'entre eux (au maximum deux ans), et de leur faible différence de configuration (selon les propres dires de l'intimé, un studio dans lequel avait été aménagée une chambrette, puis un appartement d'une chambre et d'un salon).

L'on peut aussi, avec le TCO, s'étonner de ce que l'appelante n'a pas mentionné certaines informations à la Dresse Q______, notamment le viol subi à l'âge de 22 ans et l'existence de la "Lettre à mon violeur", relever que ses déclarations sont, sur certains points, peu détaillées (que ce soit pour ce qui était des abus eux-mêmes ou de son ressenti physique à la suite de ceux-ci), et qu'elle a elle-même évoqué ses doutes quant à la réalité de ce qu'il lui était arrivé. Cela étant, le processus mis en œuvre avec ce thérapeute ne l’a manifestement pas été dans le but de recueillir des preuves à des fins pénales, mais dans un objectif thérapeutique totalement différent où ce n’est pas la recherche de la vérité mais bien la libération de la parole et le soin qui sont au centre de la relation. Il n’y a là aucun affaiblissement de sa crédibilité.

On ne peut enfin que regretter, à l'instar des juges du TCO, que des investigations plus poussées n'aient pas été entreprises au stade de la procédure préliminaire, ne serait-ce que pour entendre certains témoins (notamment l’amie dont l’audition ne sera sollicitée qu’en appel), tenter de retrouver des traces de la consultation de l'appelante auprès de l'association "O______" à 18 ans, ou aux HUG à 22 ans, préciser les dates de présence des protagonistes en Suisse, voire encore analyser les appareils de l'intimé afin de tenter d'étayer une éventuelle attirance pour les filles prépubères. L’absence de ces éléments ne porte toutefois pas atteinte à la crédibilité globale de l’appelante ; les conséquences de certaines imprécisions de date qui découlent de ces lacunes seront examinées ci-après.

Dans ces conditions, la CPAR considère que, nonobstant quelques hésitations et lacunes, les déclarations de l’appelante sont globalement crédibles.

3.7.3. S'agissant de faits s'étant déroulés il y a fort longtemps, sans témoins et sans traces tangibles, l'intimé ne peut guère faire davantage que clamer de manière constante son innocence. Certains arguments qu'il fait valoir ne sont toutefois pas convaincants ; d'autres sont contredits par des éléments du dossier.

Ainsi, être un homme d'église n'a jamais empêché la commission d'abus sexuels, pas plus qu'un emploi du temps chargé ou un besoin de repos. Le fait qu'il n'ait pas fui dans son pays à réception de la convocation par la police est sans portée. L'intimé s'est défendu d'un quelconque comportement criminel en Afrique en expliquant qu'il ne partageait pas la chambre de l'enfant et que vu la chaleur, personne n'était à l'intérieur durant la journée. Cette dernière affirmation est toutefois peu réaliste, le plein soleil poussant généralement à rechercher ombre et fraîcheur à l'intérieur des bâtiments ; la mère de l’appelante a par ailleurs expliqué de manière crédible qu'à l'époque, la guerre civile régnait en Angola et que les hommes ne sortaient pas, de crainte d'être enrôlés. Indépendamment de la question de savoir si l'appelante dormait dans une pièce séparée, rien ne l'empêchait de passer du temps, en journée, dans la chambre de ses parents. L'affirmation selon laquelle, en Suisse, l’intimé n'aurait jamais été seul avec les enfants est quant à elle contredite de manière crédible par les appelantes, la seconde ayant indiqué qu'elle laissait régulièrement la première seule avec son époux le week-end, pour aller faire des courses ou des ménages, ce qui correspond à un comportement ordinaire d'une mère de famille et qui est également confirmé par leur fils et frère. Dans ce contexte, l'exiguïté du logement ne suffisait pas à faire obstacle à des agissements tels que ceux relatés par l’appelante.

L'on relèvera par ailleurs que l'intimé a systématiquement minimisé les éléments susceptibles de l'incriminer, et n'a reconnu certains événements que dans la mesure où ils n'étaient pas de nature à étayer les accusations de la plaignante, les niant pour le surplus. Ainsi, les dates articulées l'ont été de manière à réduire les périodes durant lesquelles il aurait pu passer du temps avec sa belle-fille : selon l’intimé, celle-ci aurait rejoint le couple en Angola en 1991 et son séjour n'y avait duré que quelques mois, alors que la mère de l’appelante a affirmé que sa fille était arrivée en 1990 et qu'elles ne sont venues en Suisse qu'en 1992. Le prévenu affirme qu’il aurait été renvoyé en Afrique en 1995 et ne serait revenu qu'en 1998, alors que la date de son retour se situe vraisemblablement plutôt en 1996-1997, selon le témoignage de T______, qui l’a côtoyé au Foyer K______ à cette époque. L'intimé a par ailleurs longtemps décrit sa relation avec sa belle-fille comme "normale", avec des "hauts et des bas comme avec toute adolescente" ; il a soutenu n'avoir jamais eu d'altercation physique avec elle ; que le médiateur serait intervenu pour des tensions entre lui et son épouse ; que sa belle-fille s'était réfugiée chez une amie à la suite d'une dispute avec sa mère, parce qu'elle les trouvait "pauvres" et demandait à celle-ci de choisir entre son époux et elle. Or, il a finalement admis devant le TCO qu'il s'était battu à tout le moins à une reprise dans la cuisine avec sa belle-fille ; la mère de l’appelante a par ailleurs réfuté ses propos, confirmant la mésentente entre son époux et sa fille, l'intervention d'un médiateur entre eux (épisode que V______ a aussi confirmé), et le fait que c'était son époux qui lui demandait de choisir entre sa fille et lui. Les protagonistes s'accordent enfin sur l'existence d'un épisode, vers 2006-2008, lors duquel l'existence d'un viol aurait été évoquée. Si les plaignantes affirment que l’appelante aurait révélé, à cette occasion, avoir été elle-même violée, l'intimé affirme que son épouse lui aurait dit ensuite qu'il s'agissait d'une comédie destinée à éviter le dépôt d'une plainte pénale contre leur fils, alors que ce dernier a déclaré que la victime du viol était sa mère. Or, ces deux dernières versions, outre le fait qu'elles se contredisent, ne sont pas crédibles, dès lors qu'à cette époque, l’appelante avait à tout le moins subi, récemment, un viol de la part de son petit ami et n'avait aucun intérêt à en taire l'existence.

Les éléments susdécrits ne permettent dès lors pas d'ébranler la version de l'appelante. La CPAR retient ainsi que celle-ci a bien été abusée sexuellement durant son enfance par l'intimé.

3.8. Cela ne signifie pas pour autant que tous les actes faisant encore l'objet de l'acte d'accusation doivent être retenus et/ou sanctionnés.

3.8.1. Ainsi, ni le MP ni les parties plaignantes n'expliquent en quoi le fait, pour un adulte, de tenir un enfant sur ses genoux et d'aspirer sa joue avec la bouche (ch. 1.1.1.D de l'acte d'accusation), revêtirait un caractère sexuel, même en partant d'une acception large de cette notion et quand bien même ils seraient le prélude à des abus pénalement réprimés.

B______ a d'ailleurs admis qu'elle avait connaissance de ce geste, qui pour elle reflétait l'attitude d'un père et n'éveillait pas les soupçons.

L'acquittement de l'intimé sur ce point doit dès lors être confirmé.

3.8.2. A______ a de manière constante déclaré que les abus avaient cessé à la naissance de son frère, le ______ 1994. Si elle a mentionné devant le MP des tentatives postérieures, le seul exemple qu'elle a cité est celui de la dispute qui l'a amenée à frapper son beau-père d'un ustensile de cuisine. Or, outre le fait que cet épisode se situe en dehors de la période pénale entrant en considération (limitée à celle courant du 1er janvier au 24 juin 1996), ni celui-ci, ni aucun des autres faits décrits par l'acte d'accusation ne comporte d'élément à caractère sexuel manifeste, étant relevé qu’il n’est pas improbable que le doigt de la jeune fille ait pénétré dans la bouche de l’intimé par accident, dans le cadre de l’altercation. Il n'est dès lors pas possible de retenir que le prévenu se serait rendu coupable de tentatives d'actes d'ordre sexuel avec des enfants durant la période considérée (cf. art. 9 et 325 CPP).

L'acquittement de l'intimé sur ce point sera donc également confirmé.

3.8.3. L'acte d'accusation mentionne deux épisodes survenus à une date indéterminée entre 1992 et 1994 à E______, l'un lors duquel l'intimé aurait passé la main sous la robe de l'appelante, avant de la pénétrer vaginalement avec son sexe (ch. 1.1.1.C de l'acte d'accusation), l'autre lors duquel il l'aurait pénétrée vaginalement avec ses doigts alors qu'ils jouaient à la poupée (ch. 1.1.1.E de l'acte d'accusation).

Le premier événement est décrit dans la "Lettre à mon violeur", dont rien n'entache la crédibilité, quand bien même la date et les circonstances de sa rédaction – nécessairement intervenues longtemps après les faits – ne sont pas limpides. L'absence de date ne permet toutefois pas de retenir qu'il aurait été commis postérieurement au 1er octobre 1992 et qu'il ne serait donc pas prescrit. Le doute devant profiter à l'intimé, il ne saurait être condamné de ce chef.

Le second épisode, relaté par la plaignante tant à la police qu'au MP, n'est pas non plus daté avec précision, mais l'intéressée l'a situé, devant le MP, dans le deuxième appartement de E______, avant la naissance de son frère, ce qui tend à rapprocher l'événement de cette dernière et de leur déménagement. L'on peut dans ces conditions considérer qu'il s'est passé après le 1er octobre 1992 et n'est dès lors pas prescrit. L'intimé sera, partant, reconnu coupable d'acte d'ordre sexuel avec un enfant pour cet épisode.

3.8.4. L'acte d'accusation reproche à l'intimé d'avoir à plusieurs reprises pénétré vaginalement sa belle-fille avec ses doigts alors qu'elle prenait sa douche (ch. 1.1.1.F de l'acte d'accusation). L'argument selon lequel, à cette âge, A______ se lavait seule ne permet pas d'exclure que de tels agissements ont été perpétrés. La crédibilité de l'appelante a été admise. La répétition des actes exclut de considérer qu'ils seraient tous intervenus avant le 1er octobre 1992 et seraient donc prescrits.

L'intimé sera, partant, également reconnu coupable d'acte d'ordre sexuel avec un enfant, pour avoir, à réitérées reprises, introduit ses doigts dans le vagin de sa belle-fille alors qu'elle prenait sa douche.

3.8.5. L'acte d'accusation retient que l'intimé a, à de très nombreuses reprises, soit à une fréquence d'environ une fois par semaine, durant la période considérée, soit contraint l'appelante à des fellations, en se tenant nu devant elle et en mettant son sexe dans sa bouche, soit à des rapports sexuels complets (ch. 1.1.1 de l'acte d'accusation).

Cette description, qui se limite à décrire d'une manière globale un mode opératoire, sans individualiser chacun des actes d'ordre sexuels ou viols qui lui sont imputés, doit être considérée comme suffisante, au regard des principes régissant le contenu de l'acte d'accusation. Elle permet en effet à l'intimé de n'avoir aucun doute sur le comportement reproché, l'absence de date ou de lieu précis s'expliquant par le jeune âge de la victime, le temps écoulé et l'impossibilité, s'agissant de faits survenus à une certaine fréquence, de les circonscrire de manière autre qu'approximative (cf. notamment arrêts du Tribunal fédéral 6B_1003/2020 du 21 avril 2021 consid. 1.2.1; 6B_103/2017 du 21 juillet 2017 consid. 1.5.2; 6B_167/2014 du 5 janvier 2015 consid. 1.5).

L'appelante a fourni à ce propos des descriptions, que ce soit sous forme écrite (dans la "Lettre à mon violeur" ou les feuillets volants accompagnant son cahier) ou lors de ses auditions, de certains épisodes ou sensations dont elle se rappelait, qui doivent être tenus pour conformes à la réalité, au vu des éléments cités sous ch. 3.7 ci-dessus, en dépit des dénégations de l'intimé. Le premier viol qui serait intervenu en Europe, peu avant son huitième anniversaire mentionne en particulier des détails qui ne sauraient avoir été inventés, telle la robe bleue portée ce jour-là et la [poupée] M______/1______, offerte peu après, qui a effectivement été mise sur le marché en 1992. Bien que prescrit, il renforce la crédibilité de l'appelante, s'agissant de ceux qui ont suivi.

L'intimé sera, partant, reconnu coupable, pour ces faits, d'actes d'ordre sexuel avec un enfant et de viol.

Compte tenu du caractère lacunaire des souvenirs de l'appelante, du nombre réduit d'exemples qu'elle a été en mesure de fournir à l'appui de ses accusations et des fluctuations de ses déclarations sur ce point, la régularité d'une fois par semaine ne peut cependant être retenue, quand bien même la victime expose de façon crédible que les faits se sont répétés.

Le principe de la présomption d'innocence devant, ici aussi, prévaloir, la CPAR retiendra à ce titre que les faits se sont produits en tout cas à deux reprises en temps non prescrit.

3.8.6. L'intimé a clairement tiré avantage de sa supériorité physique pour arriver à ses fins. L'appelante a également, de manière constante, décrit l'emprise que son beau-père – que, dans son enfance, elle appelait "papa" et voyait comme un héros – exerçait sur elle. Il jouait à ses yeux un rôle d'autant plus important que son père biologique n'avait pas de place dans la configuration familiale. L'intimé a usé de cette position et de son ascendant pour imposer le secret à la fillette, lui laissant entendre qu'elle serait responsable de la déception de sa mère si elle n'obéissait pas, le retrait de l'amour maternel en étant la conséquence ultime. Il ne pouvait ignorer pour le surplus que dans le milieu culturel dans lequel la famille évoluait, "où la personne violée, même enfant, est considérée comme pas fréquentable", il serait particulièrement difficile à sa belle-fille de révéler ses agissements,

Dans ces circonstances, l'infraction de contrainte sexuelle est réalisée, de sorte que l'intimé sera reconnu coupable de ce chef.

4. Les faits reprochés à l'intimé ont été commis sous l'empire de l'ancien droit, soit antérieurement au 1er janvier 2007, date d'entrée en vigueur de la nouvelle partie générale du code pénal. Il sied dès lors d'examiner, sous l'angle de la lex mitior, le droit applicable à la fixation de la peine.

4.1. En principe, une loi n'a pas d'effet rétroactif, de sorte qu'elle ne s'applique qu'aux infractions commises après son entrée en vigueur (art. 2 al. 1 CP). Toutefois, si l'auteur est mis en jugement sous l'empire de la nouvelle loi, celle-ci s'applique si elle est plus favorable à l'auteur (art. 2 al. 2 CP, qui consacre l'exception de la lex mitior).

La détermination du droit le plus favorable s'effectue par une comparaison concrète de la situation de l'auteur, suivant qu'il est jugé à l'aune de l'ancien ou du nouveau droit. En présence d'un comportement punissable sous l'empire de la loi ancienne et de la loi nouvelle (ce qui est le cas en l'occurrence), c'est à l'aune de l'ensemble des sanctions principales encourues qu'il est nécessaire de procéder à la comparaison, étant entendu que la peine maximale a un rôle décisif dans ce contexte. Lorsque la sanction principale à laquelle s'expose l'auteur est la même, avant et après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, la détermination de la lex mitior s'opère sur la base des peines accessoires. Enfin, doivent également être prises en compte les autres règles, à l'instar de celles régissant la fixation de la peine et l'octroi du sursis (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2ème éd., Bâle 2021, n. 53 ad art. 2).

L'art. 2 CP ne permet pas à l'auteur de bénéficier, le cas échéant, d'une loi plus favorable qui n'était pas en vigueur au moment où il a commis l'infraction et qui ne l'est plus au moment où il est mis en jugement (ATF 135 IV 113 consid. 2.1 p. 114).

Il est en outre exclu de combiner l'ancien et le nouveau droit dans un cas d'espèce, en appliquant en partie l'un et en partie l'autre pour juger un seul acte. En particulier, la punissabilité d'un acte ne saurait être déterminée sur la base de l'ancienne loi et la peine fixée selon la nouvelle (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), op.cit., n. 54 ad art. 2). 

4.2.1. À l'heure actuelle, l'art. 187 ch. 1 CP sanctionne les actes d'ordre sexuel avec des enfants d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire, l'art. 189 al. 1 CP la contrainte sexuelle d’une peine privative de liberté de dix ans au plus ou d’une peine pécuniaire, l'art. 190 al. 1 CP le viol d’une peine privative de liberté de un à dix ans et l'art. 217 CP la violation d'une obligation d'entretien d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.

Sous l'ancien droit, les art. 187 aCP et 189 aCP prévoyaient la réclusion de cinq ans au plus ou de l'emprisonnement, alors que l'art. 190 aCP sanctionnait le viol de la réclusion pour dix ans au plus.

Compte tenu des peines concrètement envisageables (cf. infra ch. 4.8), l'application de l'ancien ou du nouveau droit est sans incidence.

4.2.2. L'actuel art. 47 CP régissant la fixation de la peine correspond à l'art. 63 aCP, les critères étant demeurés identiques et la jurisprudence rendue en la matière valable pour les deux dispositions (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_604/2007 du 9 janvier 2008 consid. 5.1).

La question de la lex mitior n'a donc pas à être tranchée à l'aune de ces dispositions et les principes de la peine seront examinés, pour en faciliter la compréhension, sous l'angle du nouveau droit.

4.3. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

4.4. D'après l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion.

Il y a plusieurs peines identiques lorsque le tribunal prononce dans le cas d'espèce, pour chaque norme violée, des peines du même genre (ATF 138 IV 120 consid. 5.2 p. 122 ss).

Pour satisfaire à cette règle, le juge, dans un premier temps, fixera la peine pour l'infraction la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes. Dans un second temps, il doit augmenter la peine de base pour tenir compte des autres infractions en application du principe de l'aggravation (ATF 144 IV 217 consid. 3.5 p. 231; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1216/2017 du 11 juin 2018 consid. 1.1.1), en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1175/2017 du 11 avril 2018 consid. 2.1 in medio). Une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation suppose, à la différence de l'absorption et du cumul des peines, que le tribunal ait fixé (au moins de manière théorique) les peines (hypothétiques) de tous les délits. Le prononcé d'une peine unique dans le sens d'un examen global de tous les délits à juger n'est pas possible (ATF 144 IV 217 consid. 3.5 précité).

4.5. À teneur de l'art. 49 al. 2 CP, si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement (ATF 142 IV 329 consid. 1.4.1 p. 331 ; 142 IV 265 consid. 2.3.3 p. 268 ; 141 IV 61 consid. 6.1.2 p. 67 ; 138 IV 113 consid. 3.4.1 p. 115 et les références citées).

Concrètement, le juge doit se demander comment il aurait fixé la peine en cas de concours simultané, puis déduire de cette peine d'ensemble hypothétique la peine de base, soit celle qui a déjà été prononcée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_28/2008 du 10 avril 2008 consid. 3.3.1).

Le prononcé d'une peine complémentaire suppose que les conditions d'une peine d'ensemble au sens de l'art. 49 al. 1 CP sont réunies. Une peine additionnelle ne peut ainsi être infligée que lorsque la nouvelle peine et celle qui a déjà été prononcée sont du même genre. Des peines d'un genre différent doivent en revanche être infligées cumulativement car le principe d'absorption n'est alors pas applicable (ATF
142 IV 265 consid. 2.3.1-2.3.2 p. 267 s ; 137 IV 57 consid. 4.3.1).

4.6. Selon l'art. 48 let. e CP, le juge atténue la peine si l'intérêt à punir a sensiblement diminué en raison du temps écoulé depuis l'infraction et que l'auteur s'est bien comporté dans l'intervalle. L'atténuation de la peine en raison du temps écoulé depuis l'infraction procède de la même idée que la prescription. L'effet guérisseur du temps écoulé, qui rend moindre la nécessité de punir, doit aussi pouvoir être pris en considération lorsque la prescription n'est pas encore acquise, si l'infraction est ancienne et si le délinquant s'est bien comporté dans l'intervalle (ATF 140 IV 145 consid. 3.1 p. 148 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_773/2016 du 22 mai 2017 consid. 4.4).

Cette disposition n'est toutefois pas applicable en cas d'infractions imprescriptibles (notamment celles visées par les art. 187 ch. 1 CP, 189 CP et 190 CP lorsqu'elles ont été commises sur des enfants de moins de 12 ans et que l'action pénale ou la peine n'était pas prescrite le 30 novembre 2008 en vertu du droit applicable à cette date, cf. art. 101 al. 1 let. e et al. 3 3ème phrase CP). Dans ce cas, l'art. 101 al. 2 CP prévoit que le juge peut atténuer la peine si l’action pénale est prescrite en vertu des art. 97 et 98 CP.

Selon l'art. 97 al. 1 CP, qui avait, au 30 novembre 2008, la même teneur qu'actuellement, l'action pénale se prescrit par 15 ans si la peine maximale encourue est une peine privative de liberté de plus de trois ans. En cas notamment d'actes d'ordre sexuel avec des enfants et de contrainte sexuelle dirigée contre un enfant de moins de 16 ans, la prescription de l'action pénale court en tout cas jusqu'au jour où la victime a 25 ans (art. 97 al. 2 CP), soit, en l'occurrence, jusqu'au 25 juin 2009.

La date déterminante pour l'examen de la prescription est celle du jugement sur appel (ATF 140 IV 145 consid. 3.6 p. 149)

4.7. Selon l'art. 42 al. 1 CP entré en vigueur le 1er janvier 2018, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits.

Il peut suspendre partiellement l’exécution d’une peine privative de liberté d’un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute de l’auteur (art. 43 al. 1 CP).

Sous cet angle, les règles du nouveau droit sont plus favorables au prévenu que celles de l'ancien droit (art. 41 aCP), dans la mesure où une peine privative de liberté de trois ans peut être assortie du sursis partiel et une peine de deux ans du sursis complet, alors que l'art. 41 ch. 1 al. 1 aCP limitait la possibilité du sursis aux peines privatives de liberté n'excédant pas 18 mois.

Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur (ATF 134 IV 5 consid. 4.2.1; 128 IV 193 consid. 3a; 118 IV 97 consid. 2b). Auparavant, il fallait que le pronostic soit favorable. Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (ATF 134 IV 5 consid. 4.4.2).

Il est donc, sur ce point également, plus favorable.

Le nouveau droit des sanctions sera ainsi appliqué.

4.8. La faute du prévenu est très lourde. Il a porté atteinte à l'intégrité sexuelle de sa belle-fille de manière répétée sur une longue période, en profitant de l'ascendant qu'il avait sur elle.

Il a ainsi durablement, voire définitivement, porté atteinte à son développement et à son épanouissement, l'appelante ayant beaucoup souffert des abus subis et continuant d'en subir les conséquences, malgré la résilience dont elle a fait preuve.

Le mobile du prévenu est égoïste. Il a agi pour assouvir ses pulsions sexuelles, en fonction des circonstances qui se présentaient, sans prendre en compte le mal qu'il causait ainsi à une enfant qu'il considérait comme sa fille.

Rien dans sa situation personnelle n'explique ses agissements, sa responsabilité n'étant diminuée par aucun trouble psychique.

La collaboration du prévenu a été mauvaise, puisqu'il a persisté à nier les faits et n'a fait montre d'aucune empathie envers la plaignante, ce qu'il aurait pu faire tout en persistant à nier sa culpabilité.

Il y a concours d'infractions, facteur aggravant.

La circonstance atténuante de l'écoulement du temps sera retenue au bénéfice du prévenu.

Compte tenu de la gravité des actes, seule une peine privative de liberté entre en considération pour les infractions visées par les art. 187 CP, 189 CP et 190 CP.

La peine de base sera arrêtée à deux ans pour le premier viol, infraction objectivement la plus grave, et sera augmentée d’un an pour l’autre viol (peine théorique de deux ans), de huit mois pour la contrainte sexuelle (peine hypothétique d’une année) et de huit mois pour les actes sexuels avec des enfants (peine hypothétique d’une année).

Compte tenu de l'écoulement du temps, cette peine sera atténuée en application de l'art. 101 al. 2 CP et réduite à une peine globale de trois ans.

Cette peine sera assortie du sursis partiel, dont les conditions sont réalisées. La partie ferme sera arrêtée au minimum légal de six mois et le solde assorti d’un délai d’épreuve de trois ans.

La peine pécuniaire de 90 jours-amende infligée par le premier juge pour la violation de l'obligation d'entretien, complémentaire à celle du 12 novembre 2018 (art. 49 al. 2 CP), tient adéquatement compte des critères légaux et n'est au demeurant pas remise en cause.

Elle sera dès lors confirmée.

5.            Le MP avait requis, devant le TCO, le prononcé d'une mesure d'expulsion sur la base de l'ancien droit (art. 55 aCP, qui donnait au juge la possibilité d'expulser du territoire suisse, pour une durée de trois à 15 ans, tout étranger condamné à la réclusion ou à l'emprisonnement).

Cette disposition a été abolie en 2007 et l'expulsion n'a été réintroduite dans le code pénal qu'à partir du 1er octobre 2016, aux art. 66a ss CP. Il s'ensuit que l'expulsion ne peut être prononcée que pour des infractions commises après le 1er octobre 2016 (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), op.cit., n. 7 ad art. 66a).

Les actes commis l'ayant été sous l'empire d'un droit, et ce dernier n'étant clairement pas plus favorable à l'intimé, il n'est pas possible de prononcer son expulsion.

6.            6.1. L’appelante a renoncé, en appel, à ses prétentions civiles.

Il lui en sera donné acte.

6.2.1. En tant que proche de la victime, la mère de l’appelante peut faire valoir des prétentions civiles propres (art. 122 al. 2 CPP), notamment prétendre à l'indemnisation du tort moral subi en raison des infractions en invoquant les art. 47 et 49 CO.

L'atteinte à l'intégrité sexuelle est régie par cette dernière disposition, qui prévoit que celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité a droit à une somme d'argent à titre de réparation morale, pour autant que la gravité de l'atteinte le justifie et que l'auteur ne lui ait pas donné satisfaction autrement.

Bien que régi par les art. 122 ss CPP, le procès civil dans le procès pénal demeure soumis à la maxime des débats et à la maxime de disposition. Ainsi, l'art. 8 CC est applicable au lésé qui fait valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale, en ce sens qu'il supporte le fardeau de la preuve de chacun des faits pertinents (arrêt du Tribunal fédéral 6B_98/2021 du 8 octobre 2021 consid. 2.1.3).

6.2.2. L'action en réparation du tort moral ne vise pas à rétablir la situation financière de l'ayant droit, ni à assouvir son besoin de vengeance, mais a pour but de compenser, par le versement une somme d'argent, les souffrances qu'a subies le lésé et d'augmenter ainsi d'une autre manière le bien-être de ce dernier ou de rendre plus supportable les atteintes subies (L. THÉVENOZ / F. WERRO, Commentaire romand : Code des obligations I, 3ème éd., Bâle 2021, n. 2 ad intro. Art. 47-49).

La jurisprudence est restrictive quant à l'allocation d'une indemnité pour tort moral aux parents d'un enfant abusé sexuellement, exigeant qu'ils souffrent avec la même intensité ou avec une intensité plus grande qu'en cas de décès (ATF 139 IV 89 consid. 2.4.1 p. 93). La seule douleur morale, non contestable, qu'ils peuvent subir de ce fait et les tensions résultant de ces abus au sein de la famille ne sont pas assimilées à de telles souffrances (arrêt du Tribunal fédéral 6B_646/2008 du 23 avril 2009 consid. 7.2).

6.2.3. En l'occurrence, l'appelante a articulé des prétentions de CHF 35'000.- en se bornant à invoquer "un préjudice moral très important en lien avec la commission par son époux d'infractions très graves sur la personne de sa fille".

Les éléments décrits pour témoigner de l'ampleur du préjudice moral subi sont bien en-deça des exigences légales et jurisprudentielles rappelées ci-dessus. Il ne peut ainsi être considéré comme établi à satisfaction de droit que l'appelante éprouve, du fait des actes dont son époux a été reconnu coupable, des souffrances équivalentes à celles qui auraient été les siennes en cas de décès de sa fille.

Elle sera, partant, déboutée de ses conclusions.

7. 7.1. Conformément à l'art. 428 al. 1 CPP, les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé.

7.2. En l'occurrence, les appels ne sont que partiellement admis, de sorte les frais de la procédure d'appel, comprenant un émolument de décision de CHF 1'800.- (art. 14 al. 1 let. e du règlement fixant le tarif des frais en matière pénale [RTFMP]) seront répartis à raison d'un huitième à charge de la seconde appelante d’une moitié à charge de l'appelant, le solde, y-compris la part de l’appelante qui est au bénéfice de l’assistance judiciaire, étant laissé à la charge de l'État (art. 136 al. 2 let. a CPP).

7.3. Compte tenu de l'admission partielle des appels, il se justifie de modifier la répartition des frais de première instance, qui seront mis à charge de l'intimé non pas à hauteur de 10%, mais de 50%, le solde étant laissé à charge de l'État.

7.4. Les premiers juges ont arrêté l'émolument complémentaire de jugement à CHF 4'500.- (correspondant à la moitié du triple de l'émolument de jugement), et l'ont mis en totalité à charge de B______, en se fondant sur l'art. 9 al. 2 RTFMP (en réalité 10 al. 2 RTFMP, s'agissant d'un Tribunal correctionnel) et le fait que A______, autre appelante, bénéficiait de l'assistance judiciaire et était donc exonérée des frais de procédure (art. 136 al. 2 let. b CPP).

L'on observera tout d'abord que le triplement de l'émolument de jugement prévu par le RTFMP se réfère uniquement à l'art. 82 al. 2 CPP, qui traite des cas dans lesquels un jugement motivé doit être rendu, et n'a aucun lien avec la situation financière ou procédurale des parties. Cet émolument ne saurait dès lors être mis en totalité à la charge d'une partie défendue par un avocat de choix au seul motif que les autres appelants bénéficient de l'assistance judiciaire. Ce constat vaut y compris dans les cas où, sans le dire, le TCO a déjà réduit l'émolument pour tenir compte de cette mise à charge, seul faisant foi le montant tel qu'arrêté dans le dispositif.

Les premiers juges ont par ailleurs omis de tenir compte du fait que, à l'instar des autres frais (art. 428 al. 1 CPP), seule une partie condamnée à assumer ceux-ci peut se voir imputer un émolument complémentaire en lien avec la demande de motivation écrite du jugement, ce que tant l'art. 9 al. 2 RTFMP que l'art. 10 al. 2 RTFMP mentionnent expressément.

Il s'ensuit que c'est à tort qu'un émolument complémentaire a été mis à charge de la mère de l’appelante, qui n'a pas été condamnée aux frais de la procédure de première instance.

Ce point du dispositif sera dès lors annulé.

8. 8.1. Conformément à l'art. 433 al. 1 CPP, la partie plaignante obtient gain de cause si les prétentions civiles sont admises ou lorsque le prévenu est condamné.

Lorsqu'une partie obtient gain de cause sur un point, mais succombe sur un autre, le montant des frais à mettre à sa charge dépend de manière déterminante du travail nécessaire à trancher chaque point. Dans ce cadre, la répartition des frais relève de l'appréciation du juge du fond (arrêt du Tribunal fédéral 6B_369/2018 du 7 février 2019 consid. 4.1 non publié aux ATF 145 IV 90).

La juste indemnité, notion qui laisse un large pouvoir d'appréciation au juge, couvre les dépenses et les frais nécessaires pour faire valoir le point de vue de la partie plaignante dans la procédure pénale (arrêts du Tribunal fédéral 6B_549/2015 du 16 mars 2016 consid. 2.3 ; 6B_495/2014 du 6 octobre 2014 consid. 2.1 ; 6B_965/2013 du 3 décembre 2013 consid. 3.1.1 ; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 8 ad art. 433). Les démarches doivent apparaître nécessaires et adéquates pour la défense du point de vue de la partie plaignante raisonnable (arrêts du Tribunal fédéral 6B_864/2015 du 1er novembre 2016 consid. 3.2 ; 6B_495/2014 du 6 octobre 2014 consid. 2.1 ; 6B_159/2012 du 22 juin 2012 consid. 2.3).

8.2. En l'espèce, l'activité déployée par l'avocat de B______ pour la procédure d'appel apparaît excessive : deux entretiens avec la cliente, l'une après l'audience du TCO, l'autre avant celles de la CPAR, auraient été suffisants. L'activité retenue à ce titre sera dès lors réduite à 1h45. L'étude du dossier, lequel ne comporte que deux classeurs fédéraux et était supposé bien connu de l'avocat, qui la défend tant dans le cadre de la présente procédure pénale que des procédures civiles qui l'opposent à l'intimé, sera limité à 4h, y compris la préparation des deux audiences devant la CPAR (d'une durée de 6h20 au total). La rédaction de conclusions civiles, au demeurant déjà formulées en première instance, ne sera pas indemnisée, vu leur caractère inutile en l'absence de toute motivation du tort moral. Le temps de déplacement sera limité à 30 minutes aller-retour, soit celui nécessaire pour se rendre, en transports publics, de l'étude de l'avocat au Palais de justice. Deux heures seront enfin allouées pour les téléphones et les courriers.

L'indemnité due à B______ pour ses frais d'avocat en appel sera ainsi fixée à CHF 4'615.- TTC (14h au taux horaire de CHF 270.- + 1h30 pour les déplacements + CHF 100.- pour les frais d'ouverture de dossier + CHF 330.- pour la TVA à 7.7%).

Pour tenir compte du fait que son appel n'est que partiellement admis et vu la répartition des frais, l'intimé ne sera condamné à prendre en charge que la moitié de ce montant, soit CHF 2'307,50 TTC.

8.3. B______ a demandé qu'il soit fait application de l'art. 73 al. 1 let. a CP, qui prévoit que si un crime ou un délit a causé à une personne un dommage qui n'est couvert par aucune assurance et s'il y a lieu de craindre que l'auteur ne réparera pas le dommage ou le tort moral, le juge alloue au lésé, à sa demande, jusqu'à concurrence des dommages-intérêts ou de la réparation morale, le montant de la peine pécuniaire ou de l'amende payées par le condamné.

La peine de 90 jours-amende ayant été assortie du sursis, cette conclusion est toutefois sans objet, de sorte qu'elle sera rejetée.

8.4. Vu l'admission partielle de l'appel de B______, il se justifie de revoir la participation de l'intimé à ses frais d'avocat pour la procédure de première instance.

Le TCO n'a pas détaillé les motifs qui l'ont conduit à fixer celle-ci à CHF 2'700.-, hormis l'indication qu'une partie des honoraires, d'un montant total de CHF 9'693.-, devrait être supportée par le prévenu, vu sa condamnation pour violation d'une obligation d'entretien. Compte tenu de l'admission de la culpabilité de l'intéressé pour les trois autres chefs d'accusation, mais le rejet des conclusions civiles pour tort moral, la participation de l'intimé sera fixée aux trois quarts de l'activité alléguée, admise à hauteur de 20h, incluant les déplacements, au tarif horaire de CHF 450.-, soit CHF 6'750.-, plus la TVA à 7.7% (CHF 519.75).

9. 9.1. Considéré globalement, l'état de frais produit par Me Y______, conseil juridique gratuit de A______ satisfait les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale, sous réserve du forfait alloué aux activités diverses, de 10% vu l'ampleur de l'activité déployée en première instance (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3), et des déplacements, réduits à trois au lieu de quatre.

Sa rémunération sera, partant, arrêtée à CHF 3'968.75 TTC, correspondant à 15h15 d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 3'050.-), plus CHF 300.- pour les déplacements, majoré de 10% (CHF 335.-) et de la TVA à 7.7% (CHF 283.75).

9.2. Considéré globalement, l'état de frais produit par Me D______, défenseur d'office de C______, satisfait lui aussi les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite, sous réserve de la durée des audiences (6h20 au lieu de 7h).

Sa rémunération sera, partant, arrêtée à CHF 5'647.05 TTC, correspondant à 22h50 d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 4'566.65.-), plus CHF 200.- pour les déplacements, majoré de 10% (CHF 476.65) et de la TVA à 7.7% (CHF 403.75).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit les appels formés par A______ et B______ contre le jugement JTCO/64/2021 rendu le 15 juin 2021 par le Tribunal correctionnel dans la procédure P/1542/2017.

Les admet partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Classe la procédure s'agissant de l'infraction d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 ch. 1 CP) visée sous chiffre 1.1.1 de l'acte d'accusation, de l'infraction de contrainte sexuelle (art. 189 al. 1 CP) visée sous chiffre 1.1.3 et de l'infraction de viol (art. 190 al. 1 CP) visée sous chiffre 1.1.4, en tant qu'elles portent sur des faits susceptibles d'avoir été commis en Angola (art. 329 al. 1 et 5 CPP et art. 5 aCP).

Classe la procédure s'agissant de l'infraction d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 ch. 1 CP) visée sous chiffre 1.1.1 de l'acte d'accusation, de l'infraction de contrainte sexuelle (art. 189 al. 1 CP) visée sous chiffre 1.1.3 et de l'infraction de viol (art. 190 al. 1 CP) visée sous chiffre 1.1.4, en tant qu'elles portent sur des faits susceptibles d'avoir été commis en Suisse entre le 1er janvier 1990 et le 30 septembre 1992 (art. 329 al. 1 et 5 CPP et art. 389 CPP, art. 97 ss CP, art. 70 ss aCP).

Classe la procédure s'agissant de l'infraction de tentative d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 22 al. 1 et 187 ch. 1 CP) visée sous chiffre 1.1.2 de l'acte d'accusation, en tant qu'elle porte sur des faits susceptibles d'avoir été commis en Suisse entre le 25 juin 1996 et le 31 décembre 2000 (art. 329 al. 1 et 5 CPP et art. 389 CP, art. 97 ss CP, art. 70 ss aCP).

Déclare C______ coupable d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 ch. 1 CP), de contrainte sexuelle (art. 189 al. 1 CP) et de viols (art. 190 al. 1 CP) et de violation d'une obligation d'entretien (art. 217 CP).

Acquitte C______ de tentative d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 22 al. 1 cum 187 ch. 1 CP).

Condamne C______ à une peine pécuniaire de 90 jours-amende (art. 34 aCP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.-.

Dit que cette peine est complémentaire à celle prononcée le 12 novembre 2018 par le Ministère public de Genève (art. 49 al. 2 CP).

Met C______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans (art. 42 et 44 CP).

Condamne C______ à une peine privative de liberté de trois ans (art. 40 CP).

Dit que la peine est prononcée sans sursis à raison de six mois (art. 43 CP).

Met pour le surplus C______ au bénéfice du sursis partiel et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans (art. 43 et 44 CP).

Avertit C______ que, s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, les sursis pourraient être révoqués et les peines suspendues exécutées, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 46 CP).

Donne acte à A______ du retrait de ses conclusions en réparation du tort moral.

Déboute B______ de ses conclusions en réparation de son tort moral (art. 49 CO).

Condamne C______ à verser à B______ CHF 7'269.75 TTC à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure de première instance et CHF 2'307.50 pour celles occasionnées par la procédure d'appel (art. 433 al. 1 CPP).

Prends acte de ce que l'indemnité de procédure due à Me Y______, conseil juridique gratuit de A______, pour la procédure préliminaire et de première instance, a été fixée à CHF 9'886.05 (art. 138 CPP).

Prends acte de ce que l'indemnité due à Me D______, défenseur d'office de C______, pour la procédure préliminaire et de première instance, a été fixée à CHF 12'568.65 (art. 135 CPP).

Condamne C______ à 50% des frais de la procédure préliminaire et de première instance, qui s'élèvent au total à CHF 5'446.-, y compris un émolument de jugement de CHF 3'000.-, soit CHF 2'723.-, le solde étant laissé à la charge de l'État (art. 426 al. 1 CPP).

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 2'885.-.

Met 1/8ème de ces frais, soit CHF 360.65 à la charge de B______, 50% de ces frais, soit CHF 1'442.50, à celle de C______, et laisse le solde à la charge de l'État.

Arrête à CHF 3'968.75, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me Y______, conseil juridique gratuit de A______, pour la procédure d'appel.

Arrête à CHF 5'647.05, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me D______, défenseur d'office de C______, pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal correctionnel, à l'Office fédéral de la police, à l'Office cantonal de la population et des migrations ainsi qu'au Service de l'application des peines et mesures.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

La présidente :

Gaëlle VAN HOVE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal correctionnel :

CHF

5'446.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

780.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

230.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'800.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

2'885.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

8'331.00