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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1674/2023

JTAPI/135/2024 du 16.02.2024 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : EXCEPTION(DÉROGATION);PLAN D'AFFECTATION SPÉCIAL;ÉGALITÉ DE TRAITEMENT;ÉMOLUMENT
Normes : LExt.3.al4; LGZD.3.al5; LCI.154; RCI.254.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1674/2023 LCI

JTAPI/135/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 16 février 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, B______ SA, C______ SA et D______ SA, représentés par ZIMMERMANN IMMOBILIER SA, avec élection de domicile

 

contre

 

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, B______ SA, C______ SA et D______ SA sont propriétaires de la parcelle n° 1______ de la E______ (ci-après : la commune), qui se situe en zone de développement 2, dans les périmètres du plan localisé de quartier 2______ (ci-après : PLQ 2______) adopté le ______ 1995 et du plan directeur de quartier F______ n° 3______ (ci-après : PDQ 3______) adopté le ______ 2015, et sur laquelle est érigé un immeuble de sept étages (R+6) destiné à l’habitation.

2.             Le 29 juillet 2022, les propriétaires précités ont déposé, par le biais d’un architecte, une demande d’autorisation de construire portant sur la surélévation de deux étages de leur immeuble et sa rénovation HPE auprès du département du territoire (ci-après : le département).

3.             Lors de l’instruction de cette demande, enregistrée sous la référence DD 4______, les préavis usuels ont été requis et émis.

En particulier, l’office de l’urbanisme (ci-après : OU, auparavant la direction de la planification directrice cantonale et régionale, SPI) a émis un préavis favorable sous conditions en date du 18 août 2022. La direction F______ (ci-après : F______) étant compétente pour l’analyse des projets situés dans le périmètre du PDQ 3______, il s’en remettait à celle-ci concernant l’analyse et le suivi des projets dans ce secteur.

Le 2 novembre 2022, la commune a rendu un préavis défavorable. Le projet ne respectait pas le PLQ 2______ au niveau du gabarit autorisé et se trouvait hors des secteurs identifiés sur les cartes indicatives des bâtiments susceptibles d’être surélevés. Il devait également tenir compte de l’harmonie urbanistique du quartier, qui devait prendre en considération la cohérence urbanistique du bâtiment dans un périmètre à élargir, à savoir son intégration au sein de G______, rue relativement étroite, et au sein de H______, située au front nord de la rue et appelée à accueillir de nouveaux bâtiments (PLQ I______) avec maintien d’un tissu existant.

Le 11 janvier 2023, la F______ a préavisé défavorablement. Le projet n’était pas conforme au PLQ 2______ qui prévoyait un bâtiment de six étages, correspondant à la construction qui existait déjà en 1995. L’immeuble ne figurait pas sur la carte des bâtiments susceptibles d’être surélevés. Certes, diverses surélévations avaient été autorisées dans le périmètre du PLQ 2______ jusqu’à la mise en œuvre de la directive « Méthode d’évaluation des requêtes en autorisation de construire, Guide et Directives - septembre 2016 » et de la carte des bâtiments susceptibles d’être surélevés. Depuis 2016, celle-ci inscrivait les critères d’intégration des projets au regard des caractéristiques du quartier, de sorte que le projet devait démontrer son adéquation auxdits critères. La requête devait aussi faire l’objet d’un préavis de l’une des commissions compétentes (commission d’architecture [ci-après : CA] ou commission des monuments, de la nature et des sites). À cet égard, les requérants pouvaient prendre langue avec le département pour examiner l’opportunité d’élaborer un projet d’ensemble de type « DR » susceptible d’enclencher un nouveau plan localisé de quartier avec abrogation de l’ancien.

Les autres instances de préavis consultées se sont prononcées favorablement au projet, sous conditions et/ou avec dérogations, soit ont requis des pièces complé-mentaires et la poursuite de l’instruction du dossier.

4.             Par décision du 5 avril 2023, le département a refusé de délivré l’autorisation de construire sollicitée. Un bordereau d’émolument, en CHF 7’850.-, était joint à cette décision.

Le projet ne respectait pas le PLQ 2______, qui prévoyait le maintien du gabarit de l’immeuble, et ne remplissait pas les conditions nécessaires pour envisager l’octroi d’une dérogation ; fussent-elles d’ailleurs remplies, une telle dérogation ne serait pas opportune. De plus, aucun autre plan localisé de quartier n’avait été adopté pour remplacer le PLQ 2______ en vigueur, contrairement à ce que prévoyait la loi 5______ relative à l’aménagement du quartier « F______ » modifiant les limites de zones sur le territoire des J______, E______ et K______ (création d’une zone 2, de diverses zones de développement 2, d’une zone de verdure et d’une zone de développement 2 prioritairement affectée à des activités mixtes) du ______ 2011 (ci-après : loi 5______). L’autorisation ne pouvait être délivrée avant l’adoption de ce type de plans. En outre, les conditions prévues à l’art. 2 al. 2 de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35) permettant de renoncer à l’établissement d’un plan localisé de quartier n’étaient pas réalisées en l’état.

S’agissant de la problématique de la surélévation de l’immeuble voisin, les deux situations n’étaient pas comparables. Cet immeuble avait fait l’objet d’une demande préalable (DP 6______) et les préavis rendus dans ce cadre dataient de janvier et février 2015, soit avant l’entrée en vigueur du PDQ 3______. En outre, depuis l’adoption de ce dernier, l’appréciation du territoire dans le secteur faisait l’objet d’un examen axé sur sa mise en œuvre. Les deux cas de figure se distinguant l’un de l’autre, il n’était pas possible de les traiter de manière identique ; un cas isolé ne suffisait d’ailleurs pas à fonder une violation du principe d’égalité. Cette analyse s’appuyait de surcroît sur le préavis défavorable émis par la F______. La commune s’était également montrée défavorable.

Par économie de procédure et vu que le projet ne pouvait de toute manière pas être autorisé, notamment au vu des préavis défavorables émis, il avait été renoncé à exiger de l’architecte qu’il donne suite aux demandes de complément émises par diverses instances de préavis.

5.             Par acte du 8 mai 2023, par l’intermédiaire de leur conseil, les quatre propriétaires ont interjeté recours contre cette décision et contre la facture de CHF 7’850.- par devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal).

Ils ont conclu, principalement, à leur annulation et à ce que le tribunal ordonne au département d’ignorer ou d’écarter les préavis de la commune du 2 novembre 2022 et de la F______ des 1er décembre 2022 et 11 janvier 2023, puis de poursuivre l’instruction de la demande d’autorisation de construire DD 4______/1 et de leur octroyer un délai raisonnable pour remettre aux instances de préavis l’ayant requis les pièces complémentaires sollicitées dans leurs préavis. Subsidiairement, ils ont conclu à l’octroi de l’autorisation de construire. Préalablement, ils ont requis l’ouverture de mesures probatoires, en particulier l’audition de la commune, dans la mesure où elle avait rendu un préavis défavorable dans le cas d’espèce alors même que le dossier était similaire au dossier DD 7______, et de Madame L______, préaviseur et valideur des préavis de la F______, ainsi que la production de l’intégralité du dossier de l’autorisation de construire DD 7______ qu’ils n’avaient pu obtenir ; le tout sous suite de frais et dépens.

La surélévation projetée, qui créerait six appartements et non pas quatre comme mentionné à tort dans la décision querellée, s’alignerait sur celle de l’immeuble adjacent. À réception du premier préavis négatif de la F______ du 1er décembre 2022, ils avaient informé cette dernière que le propriétaire voisin avait requis de pouvoir surélever son immeuble de trois étages (de six à neuf) en ______ 2018 et obtenu l’autorisation en ______ 2019, malgré le PLQ 2______.

Le projet ne respectait certes pas le PLQ 2______, mais cela était sans pertinence. Ils avaient déjà obtenu une dérogation, leur immeuble s’élevant actuellement à un R+7. Par ailleurs, l’art. 12 al. 3 LGZD prévoyait que la surélévation d’immeubles en vue de permettre la construction de logements supplémentaires était constitutive d’un motif d’intérêt général justifiant que le projet de construction s’écarte d’un plan localisé de quartier adopté avant le 24 novembre 2009. Enfin, le propriétaire voisin avait obtenu en ______ 2019 l’autorisation de surélever son immeuble de trois étages. Il était irrelevant que ladite surélévation ait auparavant fait l’objet d’une demande préalable: à cette date, le PLQ 2______ était déjà en vigueur, tout comme la loi 5______ et la LGZD. En outre, la DP 6______ tendait à obtenir du département une réponse sur l’implantation, la destination, le gabarit, le volume et la dévestiture du projet présenté. Elle visait à déposer un dossier simplifié, mais ne permettait pas au département de s’affranchir de l’application correcte du droit matériel ou de justifier une inégalité de traitement. Le fait que cette demande préalable date d’avant l’entrée en vigueur du PLQ 2______ était sans pertinence, le département pouvant refuser l’autorisation définitive.

Le projet remplissait les conditions nécessaires à l’octroi d’une dérogation (plus importante que celle déjà existante) au sens de l’art. 3 al. 5 LGZD puisque la surélévation projetée permettrait la construction de six appartements. De plus, il portait sur une rénovation de type haute performance énergétique, ce qui constituait un autre motif d’intérêt général justifiant de s’écarter du PLQ 2______.

En précisant qu’une dérogation ne serait pas opportune même si les conditions pour ce faire étaient réalisées, le département avait violé le principe de l’égalité de traitement dans la mesure où il avait autorisé la surélévation de trois étages de l’immeuble voisin.

Le refus au motif qu’aucun plan localisé de quartier spécifique (ci-après : M______) n’avait été adopté pour remplacer le PLQ 2______ était contraire au droit. La loi 5______ était entrée en vigueur il y avait quasiment douze ans et les administrés ne pouvaient souffrir du fait que les M______, qui permettraient d’ailleurs aussi des dérogations, n’aient pas encore été adoptés à ce jour, n’étant pas responsables de cette incurie. À nouveau, le département avait autorisé la surélévation de l’immeuble voisin en ______ 2019 alors qu’aucun M______ n’avait été adopté.

Enfin, les préavis défavorables de la commune et de la F______ étaient infondés. La carte des bâtiments susceptibles d’être surélevés n’avait notamment aucune portée juridique propre ; l’immeuble voisin n’y figurait pas non plus. La surélévation en cause ne compromettrait pas l’harmonie urbanistique de la rue par rapport à la cohérence urbanistique du bâtiment dans son périmètre élargi, preuve en était que l’immeuble voisin était de même époque, construction et style et se situait dans la même rue et dans le même périmètre élargi. Il pouvait ainsi être légitimement retenu que la CA préaviserait également favorablement le projet litigieux.

Dans la mesure où la décision litigieuse était infondée, la facture de CHF 7’850,- liée à l’instruction de la DD 4______/1 l’était aussi. Elle doit donc être annulée.

6.             Dans ses observations du 10 août 2023, déposées dans le délai prolongé par le tribunal, le département a conclu au rejet du recours, s’en rapportant à justice s’agissant de sa recevabilité, et à la confirmation des décisions entreprises.

Les préavis de la CA et de la commune émis dans le cadre de l’autorisation de construire de l’immeuble voisin n’étaient pas pertinents en l’espèce, mais il les produisait à toutes fins utiles. Les auditions d’un représentant de la commune et de Mme L______ n’étaient pas non plus nécessaires pour résoudre le présent litige.

Il n’était pas contesté que le projet litigieux ne respectait pas le PLQ 2______ en vigueur. Les conditions de l’art. 3 al. 5 LGZD, dans sa teneur depuis mars 2015, n’étaient pas remplies, dans la mesure où l’ajout de deux étages supplémentaires faisait immanquablement augmenter le gabarit de l’immeuble et modifiait son intégration urbanistique. Outre le fait que l’image urbanistique du PLQ 2______ n’était pas respectée, les autres circonstances en jeu dans le secteur, soit les préavis de la commune et de la F______, instance spécialisée compétente pour l’analyse des projets situés dans ce périmètre avaient été prises en considération. La critique des recourants quant à deux préavis ne saurait être suivie, ceux-ci se contentant de substituer leur propre appréciation à celle des instances spécialisées.

L’art. 3 al. 1 de la loi 5______ impliquait que toute nouvelle construction dans le périmètre du N______ devait être précédée de l’adoption d’un M______. La modification du PLQ 2______ existant ne pouvait être considérée comme mineure. Le PDQ 3______, adopté en ______ 2015, prévoyait que le développement urbain du secteur s’inscrirait dans une temporalité longue, sur plusieurs dizaines d’années, due à la mutation progressive des quartiers. Il ne pouvait ainsi être attendu des autorités qu’elles aient déjà adopté des M______ pour tous les secteurs. La loi 5______ ne prévoyait pas de contraintes temporelles à cet égard et il n’y avait pas non plus d’obligation générale d’adopter un plan localisé de quartier. Les exceptions à l’adoption d’un M______ n’étaient pas réalisées en l’espèce et les recourants ne prétendaient pas le contraire. Ils avaient la possibilité de se conformer à la loi 5______ en requérant l’adoption d’un M______ en vue de la réalisation de leur projet.

La situation du projet et celle de l’immeuble voisin ne pouvaient être comparées. Ce dernier projet avait été précédé de la DP 6______ qui avait été délivrée en ______ 2015. Dans le cadre de l’instruction de cette demande préalable, l’OU s’était déclaré favorable à une dérogation au PLQ 2______ en application de l’art. 12 al. 3 LGZD, à une époque où le PDQ 3______ n’avait pas encore été adopté. L’existence de la procédure de demande préalable distinguait fondamentalement les deux cas. En outre, bien qu’elle soit intervenue quatre ans plus tard, l’octroi de l’autorisation de construire litigieuse était lié au fait que la DP 6______ avait été octroyée et était entrée en force. Dès lors, aucune violation du principe de l’égalité de traitement ne pouvait être retenue.

La décision de refus était pleinement justifiée et devait être confirmée, de sorte que la facture y relative devait l’être aussi. En tout état, la demande d’autorisation de construire DD 4______ avait été enregistrée et l’émolument facturé l’était pour le travail effectué dans le cadre de l’instruction de ce dossier. Peu importait que ce projet ait été autorisé ou refusé, cet émolument, indépendant de l’issue du litige, restait dû.

7.             Par réplique du 4 septembre 2023, les recourants ont intégralement persisté dans les conclusions de leur recours.

Les mesures provisoires sollicitées étaient incontestablement justifiées, étant rappelé que le dossier relatif à la surélévation de l’immeuble voisin n’était pas public.

Le département avait excédé son pouvoir d’appréciation en refusant la surélévation requise alors qu’il avait autorisé le propriétaire voisin à surélever son immeuble de trois étages. Il faisait grand cas de l’existence de la loi 5______ pour confirmer son refus. Pourtant, celle-ci était déjà en vigueur depuis ______ 2011 lorsqu’il avait octroyé la demande préalable puis l’autorisation de construire y relative ; il devrait produire le préavis du F______ rendu dans ce dossier. En réalité, il résultait des observations du département que le propriétaire voisin avait obtenu une dérogation en application de l’art. 12 al. 3 LGZD. Or, en l’espèce, le département ne s’était pas déterminé quant à l’octroi d’une telle dérogation, violant ainsi la loi. En sus, compte tenu de la situation similaire des immeubles concernés, il s’était prononcé défavorablement de façon arbitraire et en violation du principe de l’égalité de traitement.

8.             Par duplique du 29 septembre 2023, le département a persisté dans ses conclusions.

La production du dossier DD 7______ n’était pas nécessaire pour la résolution du présent litige. Il était pris acte du fait que, au vu de la présence d’un poste de police dans l’immeuble, ce dossier n’était accessible aux particuliers qu’au moyen d’une procuration de l’office cantonal des bâtiments et d’un responsable de la police. Les recourants n’avaient pas démontré avoir procédé aux démarches nécessaires à l’obtention de ces documents. Le préavis de la F______ rendu dans ledit dossier n’était pas non plus pertinent et ne ferait que confirmer ce qui ressortait déjà du préavis de l’OU du 11 février 2015 dans le dossier relatif à la DP 6______, soit que le projet voisin avait été approuvé sur la base d’une dérogation au sens de l’art. 12 al. 3 LGZD. À toutes fins utiles, ce préavis était annexé à la présente écriture.

S’agissant de la dérogation au plan localisé de quartier, les recourants se bornait à critiquer sa liberté d’appréciation et sa marge de manœuvre, ne faisant ainsi que substituer leur appréciation à la sienne et à celle des instances de préavis consultées. Ils n’amenaient pas d’éléments suffisants permettant de retenir que la décision contestée reposerait sur une appréciation insoutenable des circonstances.

Aucune dérogation selon l’art 12 al. 3 LGZD ne devait être accordée, cette disposition n’ayant pas de portée indépendante et son application restant soumise à l’art. 3 al. 5 LGZD, dont les conditions n’étaient pas remplies.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_712/2020 du 21 juillet 2021 consid. 4.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Les arguments formulés par les parties à l’appui de leurs conclusions respectives seront repris et discutés dans la mesure utile (ATF 145 IV 99 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 1C_136/2021 du 13 janvier 2022 consid. 2.1 et les références citées), étant rappelé que, saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office et que s’il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/84/2022 du 1er février 2022 consid. 3).

5.             Préalablement, les recourants sollicitent que l’intégralité du dossier relatif à la demande de construire de l’immeuble voisin DD 7______ soit versé à la procédure ainsi que l’audition d’un représentant de la commune et de Mme L______.

6.             Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend, classiquement, le droit, pour l’intéressé, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 149 I 91 consid. 3.2 ; 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3).

Ce droit ne s’étend toutefois qu’aux éléments pertinents pour décider de l’issue du litige et le droit de faire administrer des preuves n’empêche pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_159/2020 du 5 octobre 2020 consid. 2.2.1).

En revanche, le droit d’être entendu ne confère pas celui de l’être oralement, ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_381/2021 du 17 décembre 2021 consid. 3.2 ; cf. aussi art. 41 in fine LPA). Enfin, dans la règle, l’audition d’un membre d’une instance spécialisée ne se justifie pas lorsque cette instance a émis un préavis versé à la procédure (ATA/126/2021 du 2 février 2021 consid. 2b ; ATA/934/2019 du 21 mai 2019 consid. 2, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1 et 3.2).

7.             En l’espèce, le tribunal estime que le dossier contient les éléments suffisants et nécessaires à l’établissement des faits pertinents pour traiter les griefs soulevés par les recourants et statuer sur le litige. En particulier, les plans et les fiches techniques versés au dossier ainsi que les outils disponibles sur Internet (SITG) permettent parfaitement de visualiser le projet litigieux, son futur emplacement, ses dimensions, le périmètre dans lequel il s’insère. Il n’apparaît ainsi pas que la production du dossier de la DD 7______ concernant la surélévation de l’immeuble voisin, acte d’instruction en soi non obligatoire, serait susceptible de fournir des informations pertinentes supplémentaires, étant noté que le département a produit certaines pièces issues de ce dossier.

S’agissant de la comparution personnelle de Mme L______ et d’un représentant de la commune, il n’existe pas un droit à l’accomplissement de tels actes d’instruction et ceux-ci n’apparaissent pas nécessaires, le dossier contenant, ainsi que relevé ci-dessus, les éléments utiles permettant au tribunal de statuer sur le recours en connaissance de cause. Il n’y sera dès lors pas procédé.

8.             Dans un premier grief, les recourants allèguent que quand bien même leur projet ne respectait pas le PLQ 2______, une dérogation était possible en application des art. 3 al. 5 LGZD, voire 12 al. 3 LGZD.

9.             À teneur de l’art. 21 al. 1 LAT, les plans d’affectation ont force obligatoire pour chacun. Lorsque les circonstances se sont sensiblement modifiées, les plans d’affectation feront l’objet des adaptations nécessaires (art. 21 al. 2 LAT).

Ces dispositions tendent à assurer à la planification une certaine stabilité, sans laquelle les plans d’aménagement ne peuvent remplir leur fonction (ATF 144 II 41 consid. 5.1 ; 128 I 190 consid. 4.2 et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 1C_387/2016 du 1er mai 2017 consid. 4.2 ; ATA/473/2009 du 29 septembre 2009 consid. 7). La stabilité des plans est un aspect du principe, plus général, de la sécurité du droit, qui doit permettre aux propriétaires fonciers, comme aux autorités chargées de mettre en œuvre la planification, de compter sur la pérennité des plans d’affectation (ATF 128 I 190 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_176/2016 du 10 mai 2017 consid. 5). De manière générale, on considère que plus un plan est récent, plus on doit pouvoir compter sur sa stabilité, ce qui implique que les motifs justifiant une révision doivent être d’autant plus importants (Heinz AEMISSEG-GER/Alfred KUTTLER/Pierre MOOR/Alexander RUCH, Commentaire de la LAT, 1999, ad art. 21 p. 14). Le Tribunal fédéral a cependant posé le principe très clair selon lequel les propriétaires ne sauraient déduire de la garantie de la propriété un droit acquis au maintien du régime applicable à leur bien-fonds en vertu d’un plan d’affectation (ATF 123 I 175 consid. 3a). D’autres acteurs, comme les propriétaires ou habitants voisins, peuvent aussi avoir intérêt au maintien d’affectations qui, par exemple, les préservent des nuisances (Heinz AEMISSEGGE /Pierre MOOR/Alexander RUCH/Pierre TSCHANNEN, Commentaire pratique LAT : planifier l’affectation, 2016, ad art. 21 p. 665-666).

Les plans doivent être révisés lorsque les circonstances déterminantes se sont modifiées depuis leur adoption. Il s’agit d’une obligation imposée à l’autorité chargée de la planification (arrêt du Tribunal fédéral 1C_636/2015 du 26 mai 2016 consid. 2.3.1). Les circonstances à prendre en considération peuvent être de fait ou de droit (ATF 127 I 103 consid. 6b). Elles sont notamment les suivantes : la durée de validité du plan, le degré de précision et de réalisation du plan, les motifs de modification, l’étendue de la modification requise et l’intérêt public y relatif (ATF 140 II 25 consid. 3.1 ; 128 I 190 consid. 4.2).

10.         L’art. 21 al. 2 LAT est une solution de compromis entre deux exigences contradictoires : d’une part, l’aménagement du territoire étant un processus continu, et la détermination des différentes affectations impliquant des pesées d’intérêts fondées sur des circonstances changeantes et des pronostics qui ne se confirment jamais entièrement, l’adaptation périodique des plans d’affectation est indispensable pour assurer, progressivement, leur conformité aux exigences légales ; d’autre part, il faut tenir compte des intérêts privés et publics dont la protection nécessite une certaine sécurité juridique. La jurisprudence souligne que, pour apprécier l’évolution des circonstances et la nécessité d’adapter un plan d’affectation, une pesée des intérêts s’impose. L’intérêt à la stabilité du plan doit être mis en balance avec l’intérêt à l’adoption d’un nouveau régime d’affectation. Selon les cas, des intérêts publics pourront également justifier soit la stabilité du plan, soit son adaptation. Il incombe donc à l’autorité appelée à statuer sur un projet de modification d’un plan en vigueur d’examiner, en fonction des circonstances concrètes, une pluralité d’intérêts (ATF 132 II 408 consid. 4.2).

De façon générale, il y a lieu de reconnaître que les circonstances se sont sensiblement modifiées lorsque l’on pouvait raisonnablement estimer que la collectivité aurait pris des décisions différentes si elle avait été confrontée à ces circonstances au moment où elle s’est déterminée (Heinz AEMISSEGGER/Alfred KUTTLER /Pierre MOOR/Alexander RUCH, op. cit., ad art. 21 p. 14).

11.         En droit genevois, en tant que plans d’affectation spéciaux, les plans localisés de quartier permettent de préciser l’affectation et le régime d’aménagement des terrains compris à l’intérieur d’une ou plusieurs zones (art. 13 de la loi d’application de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire - LaLAT - L 1 30). Selon une jurisprudence constante, ils définissent de manière aussi précise et complète que possible tous les aspects contenus à l’intérieur du périmètre qu’ils fixent (ATA/298/2021 du 9 mars 2021 consid. 7).

12.         Conformément à l’art. 1 al. 1 de la loi sur l’extension des voies de communication et l’aménagement des quartiers ou localités du 9 mars 1929 (LExt - L 1 40), en vue d’assurer le développement normal des voies de communication et l’aménagement des quartiers ou localités dans les zones ordinaires, le Conseil d’État peut, au fur et à mesure des besoins, adopter, modifier ou abroger des plans localisés de quartier.

13.         Les éléments devant être contenus dans le plan localisé de quartier sont énumérés à l’art. 3 al. 1 LExt. Il s’agit notamment du périmètre d’implantation, du gabarit et de la destination des bâtiments à construire (let. a), des espaces libres, privés ou publics (let. b) et du nombre de places de parcage et leur aire d’implantation (let. e).

14.         Selon l’art. 3 al. 4 LExt, les projets de construction établis selon les normes d’une zone de développement doivent être conformes aux plans localisés de quartier adoptés en application de l’art. 2. Toutefois, lors du contrôle de conformité des requêtes en autorisation de construire avec le plan localisé de quartier, le département peut admettre, ou même prescrire s’agissant du nombre de places de parcage pour autant que ce nombre ne varie pas de plus de 10%, que le projet s’écarte du plan, pour autant que l’indice d’utilisation du sol (ci-après : IUS) et l’indice de densité (ci-après : ID) soient respectés et dans la mesure où la mise au point technique du dossier ou un autre motif d’intérêt général, notamment la construction de logements supplémentaires, le justifie. Il en va de même pour la réalisation des éléments d’équipement de base visés à l’al. 2 let. b.

15.         La teneur de cette disposition est identique à celle de l’art. 3 al. 5 LGZD, de sorte que la jurisprudence rendue au sujet du contrôle de la conformité des projets aux plans localisés de quartier concernés est applicable indifféremment de la base légale invoquée.

Selon l’art. 3 al. 5 LGZD, les projets de construction établis selon les normes d’une zone de développement doivent être conformes aux plans localisés de quartier adoptés en application de l’art. 2 LGZD. Lors du contrôle de conformité des requêtes en autorisation de construire avec le plan localisé de quartier, le département compétent peut toutefois admettre, ou même prescrire s’agissant du nombre de places de parcage pour autant que ce nombre ne varie pas de plus de 10%, que le projet « s’écarte » du plan, pour autant que l’IUS et l’ID soient respectés et, dans la mesure où la mise au point technique du dossier ou un autre motif d’intérêt général, notamment la construction de logements supplémentaires, le justifie. Il en va de même pour la réalisation des éléments d’équipement de base visés à l’al. 3 let. c LGZD.

16.         Conformément à la jurisprudence, l’art. 3 al. 5 LGZD, qui confère au département une marge d’appréciation au département dans laquelle les autorités de recours ne peuvent s’immiscer sous réserve d’un abus ou excès du pouvoir d’appréciation (ATA/1220/2020 du 1er décembre 2020 consid. 5g), doit s’interpréter restrictive-ment de façon à éviter que le plan localisé de quartier ne perde de sa substance. En acceptant, par le biais d’une autorisation de construire, une modification importante du plan localisé de quartier, la procédure d’adoption des plans d’affectation, telle que prévue par le droit fédéral de l’aménagement du territoire, ne serait en effet pas respectée (ATA/298/2021 du 9 mars 2021 consid. 9a et les arrêts cités). En conséquence, seules des modifications peu importantes, remplissant en outre les autres conditions prévues par l’art. 3 al. 5 LGZD, peuvent être autorisées (arrêt du Tribunal fédéral 1C_490/2015 du 15 avril 2016 ; ATA/874/2015 du 25 août 2015).

Par ailleurs, le régime dérogatoire prévu par l’art. 12 al. 3 LGZD pour les plans localisés de quartier antérieurs au 24 novembre 2009 n’a pas de portée indépendante de l’art. 3 al. 5 LGZD aux conditions duquel il reste soumis (ATA/39/2014 du 21 janvier 2014 consid. 7b). Le Tribunal fédéral l’a confirmé, citant les travaux préparatoires du législateur genevois selon lesquels les modifications permettant de déroger à un plan localisé de quartier ne doivent pas être trop importantes ; une surélévation ne doit donc pas dépasser un ou deux étages pour être encore considérée comme « peu importante » (arrêt 1C_490/2015 du 15 avril 2016 consid. 3.3 ; MGC 2003-2004/VII d/31 1835).

La chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administra-tive) a fréquemment eu l’occasion d’examiner des modifications apportées à des plans localisés de quartier lors de leur mise en œuvre et de préciser si elles entraient dans le cadre des modifications de peu d’importance. Ainsi, elle a notamment considéré que constituaient des modifications mineures le déplacement d’un bâtiment d’un mètre, l’agrandissement de 159 m2 de la surface d’un attique dans le cadre de l’augmentation d’un immeuble de 1,40%, l’aménagement d’un rez-de-chaussée inférieur permettant la construction d’un étage supplémentaire et un dépassement de 1,50 m de la hauteur maximale du plan localisé de quartier, un écart de la surface brute de plancher (ci-après : SBP) de 3% peu important compte tenu de la SBP totale du projet en cause - étant précisé que la mesure technique des SBP revêtait un caractère imprécis, l’expérience ayant montré que des différences de quelques pourcents n’étaient pas inhabituelles en raison de la complexité des mesures (ATA/505/2007 du 9 octobre 2007 ; cf. aussi à ce sujet ATA/1459/2019 du 1er octobre 2019 consid. 5a ; ATA/1064/2018 du 9 octobre 2018 consid. 7c et les arrêts cités), la création d’un étage supplémentaire comportant deux logements et induisant un dépassement du gabarit prévu par le plan localisé de quartier de 2,70 m dans le cadre de la réalisation d’une construction à haut standard énergétique, le changement d’implantation d’un parking souterrain ainsi que le changement d’accès en résultant, un projet comportant un attique de 51,50 m2 affecté à une cuisine, un séjour et une véranda non chauffée et n’excédant pas les 10% de SBP supplémentaires autorisés en application du bonus Minergie, le déplacement de cinq places de parc, la transformation de six logements traversants en non traversants, la création d’un sous-sol et cinq étages sur rez au lieu de deux sous-sols et quatre étages sur rez, la création de rez-de-chaussée « morts » entraînant le rehaussement de 1,40 m des bâtiments, sans toutefois que ceux-ci ne dépassent l’altitude maximale prévue par le plan, et enfin, le changement de place de la conduite de désenfumage, le dépassement d’un étage permettant d’obtenir treize logements d’utilité publique supplémentaires ainsi qu’une implantation prévue à 1 m près constitue une divergence mineure (ATA/206/2021du 23 février 2021 consid. 7b et les références citées ; voir aussi ATA/158/2021 du 9 février 2021) ; la construction d’un attique, soit un projet R+2+attique alors que le plan localisé de quartier prévoyait un gabarit de R+2 (ATA/206/2021 du 23 février 2021).

Elle a également précisé que pour juger de l’importance d’une dérogation au plan localisé de quartier, le taux de dépassement de l’IUS et de la SBP constituait un critère parmi d’autres à prendre en considération. La réalisation d’un étage supplémentaire, portant sur un dépassement de 36,63% de la SBP, pouvait être autorisé, dès lors que cette dérogation permettait d’accroître le parc locatif, tout en s’inscrivant dans un projet qui s’implantait harmonieusement dans le milieu bâti existant, de par ses dimensions identiques à celles des constructions voisines et conformes aux maxima de la zone (ATA/874/2015 du 25 août 2015 consid. 6, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_490/2015 du 15 avril 2016).

En revanche, n’ont pas été admises comme telles l’affectation du rez-de-chaussée à du logement en lieu et place d’activités administratives ou commerciales et la privatisation d’un jardin alors que le plan localisé de quartier le destinait au public (ATA/705/2012 du 16 octobre 2012), une augmentation de 40% des SBP dans le cas d’une construction de gabarit R+7 au lieu de R+5 prévu par le plan localisé de quartier (ATA/39/2014 du 21 janvier 2014) ou encore une emprise supplémentaire de 100 m2 de parking souterrain. Cette dernière modification a en revanche été considérée comme un changement admissible en l’espèce vu les circonstances particulières du cas (ATA/559/2000 du 14 septembre 2000). Il a aussi été retenu que ne constituaient pas des modifications mineures des logements modulaires temporaires destinés à l’accueil de migrants, qui ne correspondaient à aucun des bâtiments prévus par le plan localisé de quartier mais constituaient un projet spatial tout à fait différent (ATA/1461/2017 du 31 octobre 2017 consid. 4), le déplacement de 5,7 m d’un chemin piétonnier, sur l’emplacement prévu d’un immeuble, aux fins d’augmenter de 10% la SBP attribuée par le plan localisé de quartier et de construire deux appartements supplémentaires (ATA/1275/2017 du 12 septembre 2017 consid. 7b).

17.         Pour déterminer si l’on est en présence d’une dérogation mineure, il sera rappelé qu’une modification ne saurait être appréciée uniquement pour elle-même, indépendamment du contexte dans lequel elle s’inscrit. En effet, c’est d’abord l’échelle du plan localisé de quartier dans son ensemble, et celle des différentes constructions qui y sont prévues, qui donnent la mesure véritable d’une modification (JTAPI/142/2014 du 30 janvier 2014 confirmé par ATA/1017/2014 du 16 décembre 2014).

Partant, plusieurs dérogations mineures à un plan localisé de quartier ne s’additionnent pas forcément pour constituer une différence trop significative pour rester mineure (ATA/206/ 2021 du 23 février 2021 consid. 7b). Ainsi la hauteur du rez-de-chaussée, son affectation en partie à des activités commerciales, la modification du nombre des places de parc, l’abattage d’arbres supplémentaires et la modification du positionnement de l’abris à vélos ne constituaient pas pris dans leur ensemble une divergence avec le plan localisé de quartier plus significative que pris isolément (ATA/1359/2020 du 22 décembre 2020 consid. 7c).

Dans un arrêt du 9 février 2021, la chambre administrative a considéré, alors que l’art. 3 al. 5 LGZD dans sa nouvelle teneur était applicable, que le département n’avait pas commis d’abus ni d’excès de son pouvoir d’appréciation en considérant comme mineur un IUS de 1,21 (projet autorisé) en lieu et place de 1,05 (plan localisé de quartier) compte tenu de la tolérance de principe de 3%, de la jurisprudence évoquée plus haut et des circonstances particulières du cas (ATA/158/2021 consid. 6c).

Dans l’ATA/85/2022 du 1er février 2022, après avoir relevé que s’il était vrai que les travaux préparatoires relatifs à la modification légale de l’art. 3 al. 5 LGZD paraissaient privilégier un respect des IUS et des ID prévus par le plan localisé de quartier, la chambre administrative a jugé qu’on ne pouvait cependant retenir que le département ne disposait d’aucun pouvoir d’appréciation lorsqu’il s’agissait d’écarts mineurs entre le projet litigieux et le plan localisé de quartier, la jurisprudence de l’ancien Tribunal administratif demeurant applicable malgré la modification de l’art. 3 al. 5 LGZD (consid. 14k). Ce même raisonnement a été confirmé par la chambre administrative dans un ATA/332/2022 du 29 mars 2022 (consid. 6).

Plus récemment encore, dans un ATA/877/2023 du 22 août 2023 (consid. 6), la chambre administrative a considéré qu’une surélévation présentant un étage de différence avec le plan localisé de quartier n’était pas problématique, dès lors que la jurisprudence admettait que la réalisation d’un étage supplémentaire constituait une dérogation possible à un plan localisé de quartier (ATA/874/2015 précité confirmé par arrêt du Tribunal fédéral ; ATA/583/2010 du 31 août 2010 ; ATA/684/2002 du 12 novembre 2002).

18.         Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient donc pas les autorités. Ils n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu’un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 6a et les références citées).

Selon une jurisprudence bien établie, les autorités de recours observent une certaine retenue pour éviter de substituer leur propre appréciation à celle des commissions de préavis, pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci. Elles se limitent à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/896/2021 du 31 août 2021 consid. 4d ; ATA/155/2021 du 9 février 2021 consid. 7c et 10e ; ATA/1311/2020 du 15 décembre 2020 consid. 7d ; ATA/37/2020 du 14  janvier 2020 consid. 5d).

19.         En l’espèce, il n’est pas contesté par les parties qu’une divergence entre le projet litigieux - objet de l’autorisation de construire querellée - et le PLQ 2______ existe. Ce plan localisé de quartier prévoit en effet pour l’immeuble en cause un gabarit R+5 (6 étages) et le projet veut encore l’augmenter de deux étages pour parvenir à un gabarit final de neuf étages (R+8), étant précisé que l’immeuble a déjà obtenu une dérogation et qu’il comporte ainsi à ce jour sept étages (R+6).

Selon le département, l’ajout de ces deux étages supplémentaires, qui modifierait l’intégration urbanistique de l’immeuble, ne constitue pas une modification mineure du PLQ 2______, ce que les recourants contestent.

À la lumière des jurisprudences susmentionnées, qui ont retenu que la réalisation d’un étage supplémentaire constituait une dérogation possible à un plan localisé de quartier mais que tel n’était en principe pas le cas pour deux étages supplémentaires, cette décision doit être confirmée par le tribunal. À cela s’ajoute le fait que le résultat final serait non de deux étages supplémentaires par rapport au gabarit fixé par le PLQ 2______, mais de trois étages de plus. Une telle augmentation ne peut manifestement plus être qualifiée de modification peu importante, étant rappelé que le législateur genevois a considéré qu’une surélévation ne doit pas dépasser un ou deux étages pour être encore considérée comme « peu importante ».

Il sied encore de relever que le PLQ 2______ est actuellement en force et qu’il faut dès lors en tenir compte, même s’il est ancien et qu’aucun M______ n’a été établi pour le secteur où se trouve l’immeuble en cause. À cet égard, ainsi que relevé à juste titre par le département, le PDQ 3______, adopté en ______ 2015, prévoyait que le développement urbain du secteur s’inscrirait dans une temporalité longue, sur plusieurs dizaines d’années, due à la mutation progressive des quartiers. Il ne peut par conséquent être reproché aux autorités de ne pas avoir adopté à ce jour des M______ pour tous les secteurs, et en particulier celui englobant l’immeuble en cause. La loi 5______ ne prévoit au demeurant pas de contraintes temporelles pour l’adoption de M______ dans ce secteur et il n’existe aucune obligation générale d’adopter un plan localisé de quartier.

Dans ces circonstances, il ne peut être reproché au département d’avoir abusé ou excédé de son pouvoir d’appréciation en refusant l’octroi d’une dérogation au sens des art. 3 al. 5 ou 12 al. 3 LGZD. Le tribunal confirmera sa décision de refus, ce d’autant plus qu’il s’est basé sur les préavis de la commune et de la F______, instances spécialisées sur les questions relevant en particulier du gabarit d’un bâtiment. Il ne peut, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire (art. 61 al. 2 LPA), revoir cette analyse du département qui dispose en ce domaine d’une marge d’appréciation dans laquelle le tribunal ne peut s’immiscer sous réserve d’un abus ou excès du pouvoir d’appréciation, ce qui n’est pas le cas en l’occurrence ainsi que susmentionné. Le fait que la surélévation projetée permettrait la construction de six appartements et que le projet portait aussi sur une rénovation de type haute performance énergétique n’a pas été retenu comme suffisamment important par le département pour contrebalancer la non-conformité du projet au PLQ 2______.

20.         En second lieu, les recourants prétendent que la décision de refus litigieuse serait contraire au principe d’égalité de traitement, dans la mesure où une surélévation avait été autorisée pour l’immeuble voisin au leur.

21.         Une décision viole le principe de l’égalité de traitement consacré à l’art. 8 al. 1Cst., lorsqu’elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu’elle omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances, c’est-à-dire lorsque ce qui est semblable n’est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l’est pas de manière différente. L’inégalité de traitement apparaît ainsi comme une forme particulière d’arbitraire, consistant à traiter de manière inégale ce qui devrait l’être de manière semblable ou inversement. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. Les situations comparées ne doivent pas nécessairement être identiques en tous points, mais leur similitude doit être établie en ce qui concerne les éléments de fait pertinents pour la décision à prendre (cf. ATF 146 II 56 consid. 9.1 ; 144 I 113 consid. 5.1.1 ; 142 I 195 consid. 6.1 ; 137 I 167 consid. 3.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_195/2021 du 28 octobre 2021 consid. 5.1.2 ; 1C_270/2021 du 1er octobre 2021 consid. 3.1 ; 2C_538/2020 du 1er décembre 2020 consid. 3.2 ; 2C_949/2019 du 11 mai 2020 consid. 6.3 ; 8C_107/2019 du 4 juin 2019 consid. 4.2.1). Il n’y a pas d’arbitraire du seul fait qu’une solution autre que celle choisie semble concevable, voire préférable. Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable ; il faut encore que cette décision soit arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 318 consid. 5.4 et les références ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_523/2019 du 1er avril 2021 consid. 2 ; 2C_713/2020 du 8 décembre 2020 consid. 2.3 ; 1C_12/2019 du 11 novembre 2019 consid. 2.1.1).

L’inapplication ou la fausse application de la loi dans un cas particulier n’attribue en principe pas à l’administré le droit d’être traité par la suite illégalement. En effet, selon la jurisprudence, le principe de la légalité de l’activité administrative prévaut en principe sur celui de l’égalité de traitement. En conséquence, le justiciable ne peut généralement pas se prétendre victime d’une inégalité devant la loi, lorsque celle-ci est correctement appliquée à son cas, alors qu’elle aurait été faussement, voire pas appliquée du tout, dans d’autres cas. Cela présuppose cependant, de la part de l’autorité dont la décision est attaquée, la volonté d’appliquer correctement à l’avenir les dispositions légales en question. Le citoyen ne peut prétendre à l’égalité dans l’illégalité que s’il y a lieu de prévoir que l’administration persévérera dans l’inobservation de la loi. Il faut encore que l’autorité n’ait pas respecté la loi selon une pratique constante, et non pas dans un ou quelques cas isolés, et qu’aucun intérêt public ou privé prépondérant n’impose de donner la préférence au respect de la légalité (arrêt du Tribunal fédéral 1C_270/2021 du 1er octobre 2021 consid. 3.1 et les arrêts cités ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_949/2019 du 11 mai 2020 consid. 6.3 et les arrêts cités ; 1C_231/2018 du 13 novembre 2018 consid. 4.1). C’est seulement lorsque toutes ces conditions sont remplies que le citoyen est en droit de prétendre, à titre exceptionnel, au bénéfice de l’égalité dans l’illégalité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_921/2019 du 19 septembre 2019 consid. 1.1 ; 1C_231/2018 du 13 novembre 2018 consid. 4.1).

22.         En l’espèce, si les recourants évoquent certes la situation de l’immeuble voisin sur lequel une surélévation a été autorisée, rien ne permet cependant d’en tirer que le département aurait décider de considérer que toutes les surélévations de plus de trois étages par rapport au plan localisé de quartier régissant le périmètre de l’immeuble en cause constituerait des modifications mineures et qu’il accorderait ainsi systématiquement une dérogation. Les recourants ne parviennent nullement à le démontrer. Comme relevé par le département, il n’apparaît en outre pas que les situations soient identiques puisqu’une demande préalable avait été requise et octroyée avant l’entrée en vigueur du PDQ 3______ pour l’immeuble voisin. Le département pouvait dès lors refuser de délivrer l’autorisation de construire requise, refus qui apparaît conforme à la loi et à la jurisprudence. Le grief sera ainsi écarté.

23.         En dernier lieu, les recourants contestent la facture de CHF 7’850.- dans la mesure où la décision litigieuse serait infondée.

24.         À teneur de l’art. 154 LCI, le département perçoit un émolument pour toutes les autorisations et permis d’habiter ou d’occuper qu’il délivre, ainsi que pour les recherches d’archives ayant trait aux autorisations de construire (al. 1). Ces émoluments sont fixés par le Conseil d’État (al. 2).

Malgré sa teneur, cette disposition permet aussi le prélèvement d’émoluments pour les refus d’autorisation décidés en application de la LCI et de ses règlements d’exécution (ACST/12/2017 du 6 juillet 2017 consid. 7d ; ATA/1306/2018 du 5  décembre 2018 consid. 7a).

En vertu de l’art. 254 al. 1 du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI – L 5 05.01), intitulé « principe », le département perçoit, lors de la constitution des dossiers et, notamment, pour toute autorisation ou refus d’autorisation qu’il délivre en application de la loi et de ses règlements d’application, les émoluments calculés selon les dispositions du présent chapitre [chapitre VIII « Émoluments » ; art.  254  ss]. Exceptionnellement, l’émolument peut être réduit lorsqu’il parait manifestement trop important par rapport à l’objet de la demande d’autorisation de construire. L’autorité statue librement. L’émolument relatif aux remises de copies et aux recherches de documents est calculé conformément aux articles 10 et 10A du règlement sur les émoluments de l’administration cantonale du 15 septembre 1975.

25.         En l’occurrence, il ne fait aucun doute que la demande du 29 juillet 2022 visait l’obtention d’une autorisation de construire, de sorte qu’un émolument est dû par les recourants, conformément aux art. 154 LCI et 254 al. 1 RCI, quand bien même l’autorisation sollicitée n’a pas été délivrée. En effet, il résulte de ces dispositions, ainsi que le confirme la jurisprudence, que la délivrance ou le refus d’une autorisation de construire de la part du département suffit à fonder le droit de percevoir un émolument.

Le principe de l’émolument étant ainsi confirmé et les recourants ne contestant pas spécifiquement sa quotité, ce grief sera écarté.

26.         Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

27.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 1’500.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 8 mai 2023 par Monsieur A______, B______ SA, C______ SA et D______ SA contre la décision du département du territoire du 5 avril 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 1’500.-, lequel est partiellement couvert par l’avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Marielle TONOSSI, présidente, Isabelle KOECHLIN-NIKLAUS et Julien PACOT, juges assesseurs

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

Le greffier