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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/10038/2011

AARP/65/2017 (3) du 23.02.2017 sur JTCO/48/2016 ( PENAL ) , ADMIS PARTIELLEMENT

Descripteurs : IN DUBIO PRO REO ; ABUS DE CONFIANCE ; CONTRAT FIDUCIAIRE ; BANQUE ; SOCIÉTÉ DE DOMICILE ; DÉPENS
Normes : CP.138.1.2; CPP.126; CPP.428; CPP.429; CPP.433
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/10038/2011 AARP/65/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 23 février 2017

 

Entre

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

A______, domicilié ______, comparant en personne, ayant élu domicile ______,

B______, domiciliée ______, comparant en personne, ayant élu domicile ______,

appelants,

 

contre le jugement JTCO/48/2016 rendu le 20 avril 2016 par le Tribunal correctionnel,

 

et

C______, domicilié ______, comparant par Me D______, avocat, ______,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par courriers expédiés les 22 et 28 avril 2016, le Ministère public (MP), A______ et B______ ont annoncé appeler du jugement rendu le 20 avril 2016 par le Tribunal correctionnel, dont les motifs leur ont été notifiés le lendemain, par lequel le tribunal de première instance a acquitté C______ du chef d'accusation d'abus de confiance (art. 138 ch. 1 al. 2 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 [CP - RS 311.0]), débouté A______ et B______ de leurs conclusions civiles, condamné l'Etat de Genève à verser à C______ la somme de CHF 450'000.- en couverture de ses frais de défense et de son dommage économique, levé les séquestres portant sur six comptes bancaires auprès de la E______ (compte 1______ au nom de F______), G______ (comptes 2______ au nom de F______, 3______ au nom de H______, 4______ au nom de K______ et 5______ au nom de I______) et J______ (compte 6______ au nom de L______), et laissé les frais de la procédure par CHF 14'764.30, y compris un émolument de jugement de CHF 8'000.-, à la charge de l'Etat.

b. Par acte expédié le 6 mai 2016 à la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR), A______ et B______ ont formé la déclaration d'appel prévue à l'art. 399 al. 3 du code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP -RS 312.0), concluant à l'annulation du jugement entrepris, à ce que C______ soit reconnu coupable d'abus de confiance (art. 138 ch. 1 al. 2 CP) et de blanchiment d'argent (art. 305bis al. 1 et 2 CP), à l'admission de leurs conclusions civiles telles que déposées devant le Tribunal correctionnel, actualisées, au maintien du séquestre des avoirs figurant sur les six comptes susmentionnés et à la condamnation de C______ aux frais de la procédure.

c. Par acte expédié le 9 mai 2016, le MP a également déclaré appel, concluant préalablement à ce que, cas échéant et si elle le jugeait nécessaire, la CPAR l'invite à compléter son acte d'accusation, s'agissant des faits retenus sous point B c 30, et, principalement, à ce que C______ soit reconnu coupable d'abus de confiance (art. 138 ch. 1 al. 2 CP) et condamné à une peine privative de liberté de 24 mois, avec sursis durant trois ans, au maintien du séquestre des avoirs figurant sur les six comptes susmentionnés, à leur allocation à A______ et B______, dans le cadre de leurs conclusions civiles, et à ce que C______ soit débouté de ses conclusions en indemnisation et condamné aux frais de la procédure.

d. Selon l'acte d'accusation du MP du 30 juin 2015, reproduit ici in extenso, C______ se voit reprocher les faits suivants :

 

"B. Actes reprochés

a) Préambule

1. Le plaignant A______, de nationalité M______, a été président, de 1992 à 1998, de la banque N______, dont il était actionnaire à 50% et qu'il a revendue à M______ pour qu'elle devienne une banque étatique. De 2001 à 2004, il a travaillé au sein de la société O______, active dans le commerce du pétrole, avant de se lancer dans la politique et de devenir sénateur, en 2005, de M______.

2. Le plaignant a réalisé des gains importants dans le commerce du pétrole et du gaz, ainsi que dans l'immobilier. Ses avoirs ont été placés sur des comptes personnels et des comptes joints avec son épouse de l'époque, B______, ainsi que sur des comptes détenus par des entités offshore décrites ci-après.

3. A______ était ainsi actionnaire majoritaire de la société P______ (pièce 500'034) et ayant droit économique du compte de cette société auprès de la banque Q______ à R______ ; ayant droit économique de la société S______ à T______ (pièce 500'044) ; ayant droit économique de la société U______ (pièce 500'036) ; ayant droit économique des avoirs des sociétés V______ et W______ déposés auprès de G______ (pièce 500'034) ; ayant droit économique des comptes, ouverts de 1996 à 2000, notamment auprès de la X______ à Y______, aux noms de trois sociétés offshore : Z______, AA______ et AB______, auprès de la banque AC______ à Y______ au nom de AA______ et auprès de AD______ au nom de AB______ (pièce 500'032).

4. Les trois sociétés offshore Z______, AA______ et AB______, titulaires des comptes bancaires, étaient administrées par Me AE______, avocat. Les actions des sociétés offshore étaient détenues formellement par un trust mis en place par Me AE______, dénommé AF______, dont le plaignant était le "settlor" et dont AG______ était le trustee (pièce 500'032). Le plaignant était l'ayant droit économique des avoirs détenus par le trust et des avoirs bancaires détenus par les trois sociétés (underlying companies).

5. La plaignante B______, de nationalité M______, ancienne actrice de cinéma et de théâtre, était l'épouse du plaignant jusqu'à leur divorce prononcé en mars ______. Elle était également ayant droit économique d'une partie des fonds détournés par le prévenu C______.

6. Le prévenu, C______, de nationalité M______, est administrateur et actionnaire de la société F______ (juridiction : AH______ ; ci-après dénommée : F______) et actionnaire majoritaire de la société AI______ (juridiction : AJ______ ; ci-après dénommée : AI______), ainsi que de la société AK______ (juridiction : AL______ ; ci-après dénommée AK______).

7. Le prévenu et le plaignant ont fait connaissance en 1995 alors que le prévenu était domicilié en ______. Les deux hommes se sont fréquentés socialement avant que le plaignant ne fasse appel au prévenu pour lui servir d'interprète en anglais dans le cadre de ses relations d'affaires.

8. A partir de l'année 1999, X______ à Y______ a modifié sa politique d'affaires en refusant de poursuivre les relations bancaires avec des entités dont les ayants droit économiques étaient des citoyens M______ ne résidant pas en ______, catégorie dans laquelle entrait le plaignant (pièce 500'008).

9. La même politique de clôture de comptes dont des citoyens M______ non-résidents étaient ayants droit économiques a été appliquée, plus tard, par la banque AC______ auprès de laquelle AA______ était titulaire d'un compte dont le plaignant était l'ayant droit économique (pièce 500'033).

10. Le plaignant et le prévenu ont alors convenu que les avoirs du plaignant détenus à titre individuel ou par les sociétés offshore Z______, AA______ et AB______ seraient transférés auprès de sociétés gérées par le prévenu qui pouvait alors apparaître en qualité d'ayant droit économique sur les comptes ouverts aux noms de ces entités et sur lesquels seraient versés les avoirs de A______ et de B______.

11. Il était convenu que les avoirs devaient être administrés et gérés par le prévenu C______ et son cousin H______, agissant à titre fiduciaire, pour le compte et dans l'intérêt des fiduciants A______ et B______.

 

b) Teneur du contrat de fiducie entre le plaignant et le prévenu

12. Contrairement au plaignant, C______ était résident britannique et parlait couramment anglais. Ce statut lui facilitait l'ouverture de comptes et la qualité d'ayant droit économique. Pour cette raison, C______ avait développé cette activité qui consistait à détenir et administrer - à titre fiduciaire - les avoirs confiés par des citoyens M______ domiciliés en M______ (pièce 500'052).

13. Entre février et mars 2000, le prévenu et le plaignant définirent oralement les modalités de la convention de détention, d'administration et de gestion des avoirs de A______ et de B______ (fiduciants) par C______ (fiduciaire).

14. Il fut convenu que C______ se chargerait de la détention, l'administration et la gestion des avoirs dont A______ était l'ayant droit économique final. Il servait d'intermédiaire entre A______ et les banques, d'une part, et entre A______ et Me AE______, d'autre part.

15. Il fut également convenu que A______ apparaîtrait comme unique ayant droit économique sur un compte 7______ ouvert par F______ dans les livres de AM______ à AN______ - établissement repris par suite de fusion par G______ - compte sur lequel A______ et C______ seraient signataires individuels.

16. Etant précisé que l'accord prévoyait également que A______ serait administrateur avec un droit de signature sur la société F______.

17. Il fut enfin convenu que A______ pourrait utiliser de manière exclusive, pour ses avoirs, les sous-comptes 1______/8______ (USD), 1______/9______ (GBP) et 1______/10______ (EUR) ouverts au nom de F______ dans les livres de E______.

18. Etant précisé que H______ et C______ étaient formellement les seuls ayants droit économiques du compte 1______ ouvert le 27 février 1998 au nom de la société F______ dans les livres de la banque AO______, devenue - par suite de fusion - la banque E______, à Genève (pièce 30'011).

19. Etant précisé que le compte 1______ ouvert au nom de la société F______ était subdivisé en six sous-comptes relatifs aux devises utilisées, identifiés par les extensions 8______ (USD), 11______ (USD), 12______ (EUR), 13______ (USD), 9______ (GBP) et 10______ (EUR) et que les trois sous-comptes 1______/8______ (USD), 1______/9______ (GBP) et 1______/10______ (EUR) seraient utilisés exclusivement pour les avoirs de A______ alors que le sous-compte 1______/11______ (USD) serait utilisé exclusivement pour les propres avoirs du prévenu.

20. Etant précisé que seule la "racine" du compte 1______ était documentée par un formulaire A faisant apparaître H______ et C______ comme ayants droit économiques ; les divers sous-comptes 8______ (USD), 11______ (USD), 12______ (EUR), 13______ (USD), 9______ (GBP) et 10______ (EUR) n'étant pas documentés individuellement par des formulaires A (pièce 30'011) et ne faisant donc pas apparaître le nom du plaignant quand bien même il était le véritable ayant droit économique final des avoirs figurant sur les sous-comptes 8______, 9______ et 10______. E______ ignorait cet accord interne entre le prévenu et les plaignants et la qualité d'ayant droit économique exclusif du plaignant sur les sous-comptes 8______, 9______ et 10______ (pièce 500'024).

21. Lors de l'audition du 29 août 2013, le prévenu a d'ailleurs reconnu qu'il avait ouvert le sous-compte 9______ "pour qu'il (A______) puisse transférer ses GBP que je convertissais en USD pour le prêt à l'attention de la société O______" et qu'il n'avait "pas informé la banque de ce contexte particulier" (pièce 500'034), confirmant ainsi la nature occulte de la convention fiduciaire qui liait A______ et C______.

22. Il fut également convenu entre A______ et C______ que les comptes ouverts au nom de F______ dans les livres de E______ - crédités pratiquement uniquement par les avoirs de A______ - pourraient servir, au cas par cas et moyennant accord préalable du plaignant, de garantie aux comptes ouverts auprès de la même banque aux noms de AI______ et de AK______ (pièce 30'024).

23. A______ acceptait ainsi que ses avoirs déposés auprès de E______ puissent être parfois utilisés - moyennant accord préalable - pour servir de garantie aux sociétés AI______ et AK______ appartenant à C______.

24. En contrepartie A______ pourrait utiliser de manière non exclusive au cas par cas, pour ses avoirs, les comptes ouverts au nom de AI______ et de AK______ dans les livres de E______.

25. Etant rappelé que C______ apparaissait comme unique ayant droit économique sur le formulaire A de la banque pour les comptes ouverts aux noms de AI______ et de AK______.

26. Etant précisé que l'accord prévoyait également que C______ aurait un droit de signature sur le compte ouvert au nom de AA______ (ayant droit économique : A______) dans les livres de la AP______ à Y______.

c) Origine des fonds et transferts sur le sous-compte 1______/8______ (plaignant) chez E______

27. Dans le cadre de l'accord portant sur l'administration et la gestion de ses avoirs, A______ a ainsi fait créditer sur le sous-compte 1______/8______ (USD) ouvert au nom de F______ dans les livres de E______ un montant total d'USD 30,3 millions dont l'origine est décrite ci-après.

28. D'une part, il s'agissait d'une partie de la fortune personnelle de A______, soit un montant d'USD 7,3 millions qui provenait du compte 7______ ouvert au nom de F______ dans les livres de G______ (origine : ex G______) et dont le plaignant et la plaignante étaient ayants droit économiques (pièces 10'028, 10'029 et 10'111).

29. D'autre part, il s'agissait d'honoraires dus au plaignant, soit un montant total d'USD 23 millions qui provenait d'un compte ouvert au nom de la société AQ______ dans les livres de AR______ et versés sur le sous-compte 1______/8______, à la demande et en faveur du plaignant, à travers une série de virements opérés d'avril à septembre 2004 par AQ______ (pièces 500'186, 500'385, 500'386 et 500'387).

30. Enfin, plusieurs entités n'ayant aucun rapport avec le prévenu étaient des partenaires d'affaires de A______. A ce titre, le plaignant leur avait consenti des facilités qui ont été, en partie, remboursées par des paiements destinés à A______ sur le sous-compte 1______/8______ (USD) ouvert auprès de E______. Ces entités débitrices du plaignant sont notamment : O______, AS______, AT______, AU______, AQ______, AV______, AW______, AX______, AY______, AZ______ (pièces 500'046 et 500'047).

31. Etant rappelé que les avoirs patrimoniaux détenus par F______ et transférés sur le sous-compte 1______/8______ (USD) ouvert dans les livres de E______ à la demande et en faveur de A______ devaient être employés par le prévenu conformément aux intérêts et aux instructions de A______.

d) Remplacement de A______ par B______

32. A partir du mois d'octobre 2004, le plaignant s'est investi dans une campagne politique visant à devenir sénateur de M______. Il a été élu en ______ 2005.

33. Dans le cadre de cette campagne et de cette fonction politique, le plaignant a dû renoncer à ses mandats d'administrateur de sociétés étrangères.

34. A______ a donc désigné son ex-épouse B______ en qualité d'administratrice de F______, ce qui a conduit cette dernière à obtenir la signature, en lieu et place de celle de A______, sur le compte 7______ ouvert au nom de F______ dans les livres de G______.

35. De surcroît, en raison de son nouveau statut de BA______, les règles bancaires en matière de compliance étaient plus restrictives et demandaient des contrôles plus étendus sur les comptes dont les BA______ étaient titulaires ou ayants droit économiques. Le plaignant a donc demandé la clôture de tous les comptes sur lesquels il apparaissait comme ayant droit économique (pièce 500'034).

e) Prêts consentis par le plaignant à diverses sociétés

36. Entre 2001 et 2008, les avoirs confiés par A______ ont été employés, avec son consentement, pour garantir des prêts à diverses sociétés dont, notamment, BB______, AY______, AU______, O______ ou encore AT______.

37. Ces avoirs ont également été employés avec son consentement pour l'acquisition d'une société dénommée BC______ ou de titres auprès des sociétés BD______ ou BE______.

38. Dans le cadre des activités commerciales de A______, ce dernier a également consenti trois prêts négociés directement entre le plaignant et BF______, ayant droit économique de AX______ (pièces 500'133, 500'134, 500'680 et 500'681). Un contrat de joint-venture entre AX______ et F______ a été conclu en date du ______ 2006, indiquant comme domiciliation bancaire pour F______ le sous-compte 1______/8______ (pièces 500'142 à 500'144 et traduction en anglais : pièces 500'137 à 500'140).

39. Les prêts ont fait l'objet de contrats conclus formellement entre AX______ et F______ et datés respectivement, du 21 février 2008, pour un montant de USD 10 millions (pièces 500'145 à 500'153) avec indication du sous-compte no 1______/8______ pour F______, du 28 avril 2008, pour un montant de USD 10 millions (pièces 500'154 à 500'162) avec indication du sous-compte 1______/8______ pour F______, du 7 juillet 2008, pour un montant de USD 6,2 millions (pièces 500'163 à 500'171) avec indication du sous-compte 1______/8______ pour F______.

f) Remboursement par AX______ des prêts consentis par le plaignant par versements sur le sous-compte 1______/8______ F______ chez E______

40. En remboursement des trois prêts (capital plus intérêts), la société AX______ a versé sur le sous-compte 1______/8______ dédié aux avoirs de A______ et ouvert au nom de F______ auprès de E______, un montant d'USD 10,625 millions le 10 juin 2009 (pièce 34'911), d'USD 11,25 millions le 28 juillet 2009 (pièce 34'918) et d'USD 7,3625 millions le 14 septembre 2009 (pièce 34'922).

I. Abus de confiance au sens de l'art. 138 ch. 1 CP

Depuis l'année 2000 jusqu'à l'année 2008, les relations d'affaires entre A______ et C______ se sont déroulées dans un climat de confiance. Dans le courant de l'année 2008 la relation de confiance s'est brutalement détériorée.

 

A. Première occurrence - nantissement d'un montant d'USD 5,3 millions

1. Comme mentionné supra (B b ch. 22), le plaignant avait donné son accord de principe afin que les avoirs lui appartenant - mais déposés sur le compte de F______ auprès de E______ - puissent servir de garantie en cas d'octroi de facilités par E______ aux sociétés appartenant au prévenu, soit AI______ et/ou AK______.

2. Le prévenu devait toutefois remplir la condition d'informer préalablement le plaignant lorsqu'il souhaitait nantir des avoirs appartenant à A______ en faveur de ses propres sociétés AI______ et/ou AK______.

3. En juillet 2008, l'assistant du plaignant, BG______, a demandé à l'assistant du prévenu, H______, de faire transférer un montant d'USD 12 millions depuis le sous-compte 1______/8______ en faveur de la société AX______ à qui A______ avait consenti un prêt.

4. C______ a alors informé A______ que le sous-compte 1______/8______ ne pouvait pas être débité car il garantissait un prêt octroyé par E______ aux sociétés AI______ et AK______.

5. C'est à cette occasion que le plaignant a découvert que l'utilisation de ses avoirs par le prévenu n'était pas conforme à l'accord passé entre lui et C______, ce dernier ne lui ayant pas demandé l'autorisation préalable de nantir un montant d'USD 5,3 millions déposé sur le sous-compte 1______/8______, ouvert au nom de F______, en faveur de E______, pour garantir les facilités octroyées à AI______ et AK______ et ne l'ayant pas non plus informé de ce nantissement.

6. Interpellé par le plaignant, C______ s'est alors engagé à régler cette situation de manière qu'au plus tard, en décembre 2008, le nantissement de USD 5,3 millions sur le sous-compte 1______/8______ ait été libéré.

7. En décembre 2008, C______ n'a pas respecté cet engagement et le montant d'USD 5,3 millions est resté bloqué pour cause de nantissement afin de garantir la facilité octroyée par E______ aux sociétés du prévenu.

8. De surcroît, agissant par l'intermédiaire d'une tierce personne, C______ a alors demandé à A______ de lui verser un montant d'USD 11 millions à titre d'honoraires alors que cela n'avait jamais été convenu entre le prévenu et le plaignant. Par la suite, le prévenu a augmenté le montant de ces honoraires fictifs à hauteur d'USD 17 millions.

9. Cette prétention de C______ ne reposait sur aucune justification. Il s'agissait d'une contre-prétention totalement fictive, motivée par l'incapacité du prévenu de restituer aux plaignants les avoirs qui lui avaient été confiés.

10. Devant cette situation, A______ a exigé à nouveau la libération du montant d'USD 5,3 millions bloqué à titre de garantie en faveur des sociétés de C______. Il a également refusé de verser des honoraires indus à ce dernier et a demandé que tous les avoirs appartenant aux deux plaignants et déposés sur le compte de F______ et de AI______ lui soient restitués par transfert sur les comptes bancaires dont étaient titulaires des sociétés entièrement contrôlées par le plaignant.

11. C______ a refusé d'effectuer les transferts demandés, a refusé de remettre les relevés bancaires au plaignant et lui a indiqué qu'il considérait que désormais tous les avoirs déposés sur les comptes ouverts au nom de F______ et/ou AI______ dans les livres de E______ lui appartenaient.

12. De ce fait, les prêts octroyés par E______ et garantis par les avoirs appartenant à A______ pouvaient désormais être remboursés par le biais de la compensation ou de la réalisation des avoirs apportés par A______ et nantis par le prévenu en faveur de E______. De cette façon, le prévenu réalisait un gain sous la forme d'un non appauvrissement dès lors que les sociétés - appartenant au prévenu - débitrices des prêts n'étaient plus tenues de rembourser les facilités et que la banque créancière pouvait rembourser les facilités qu'elle avait octroyées aux sociétés du prévenu par la réalisation des avoirs appartenant aux plaignants et frauduleusement nantis par le prévenu.

En nantissant sans droit puis en refusant de faire libérer les montants nantis, le prévenu s'est ainsi rendu coupable d'abus de confiance au sens de l'art. 138 ch. 1 CP qui punit celui qui, sans droit, aura employé à son profit ou au profit d'un tiers des valeurs patrimoniales qui lui avaient été confiées.

B. Deuxième occurrence - prêt d'un montant d'EUR 5,3 millions

1. En date du 15 avril 2002, le plaignant a consenti un prêt personnel d'EUR 3,4 millions au prévenu (pièce 10'112 et traduction 10'113). Deux amendements ont été apportés respectivement le 25 novembre 2003 (pièce 10'114 et traduction 10'115) et le 23 janvier 2007 (pièce 10'116 et traduction 10'117), après quoi le montant total prêté personnellement par A______ à C______ s'est élevé à EUR 5,3 millions.

2. Ce prêt d'EUR 5,3 millions devait être remboursé à A______ par mensualités, la dernière devant être versée par C______ en date du 2 mars 2009 (pièce 10'116 et traduction 10'117).

3. Etant précisé que les prêts étaient consentis par A______ en faveur de C______, mais que le montant faisant l'objet du prêt avait été débité du sous-compte de F______ 1______/10______ auprès de E______ et ce même sous-compte a été crédité du montant périodique des intérêts par le débit du compte de AI______ appartenant au prévenu. Ce sont donc les comptes bancaires des sociétés F______ et AI______ qui ont été utilisés pour l'octroi du prêt d'une part et le paiement des intérêts et le remboursement du prêt d'autre part.

4. En mars 2009, C______ n'a pas respecté son engagement de rembourser le prêt d'EUR 5,3 millions à A______.

5. Interpellé par le plaignant, C______ avait agi par l'intermédiaire d'une tierce personne pour demander à A______ de lui verser un montant d'USD 11 millions à titre d'honoraires alors que cela n'avait jamais été convenu entre le prévenu et le plaignant. Par la suite, le prévenu a augmenté le montant de ces honoraires fictifs à hauteur d'USD 17 millions.

6. Cette prétention de C______ ne reposait sur aucune justification. Il s'agissait d'une contre-prétention totalement fictive motivée par l'incapacité du prévenu de rembourser au plaignant le montant du prêt.

7. A______ a exigé le remboursement du prêt d'EUR 5,3 millions. Il a également refusé de verser des honoraires indus au prévenu et a demandé que tous les avoirs appartenant aux plaignants et déposés sur le compte de F______ et de AI______ lui soient restitués par transfert sur les comptes de sociétés contrôlées par le plaignant.

8. C______ a refusé de rembourser le montant du prêt au plaignant. Il a refusé de lui remettre les relevés bancaires et lui a indiqué qu'il considérait que désormais tous les avoirs déposés sur les comptes et sous-comptes ouverts au nom de F______ et/ou AI______ dans les livres de E______ lui appartenaient.

En refusant de rembourser le prêt consenti, le prévenu s'est rendu coupable d'abus de confiance au sens de l'art. 138 ch. 1 CP qui punit celui qui, sans droit, aura employé à son profit ou au profit d'un tiers des valeurs patrimoniales qui lui avaient été confiées.

C. Troisième occurrence - appropriation par le prévenu des montants déposés par les plaignants sur le sous-compte 1______/8______ ouvert au nom de F______ auprès de E______

1. Comme expliqué supra (I A et I B) lorsque A______ avait réalisé que le nantissement de ses avoirs à hauteur d'USD 5,3 millions n'avait pas été libéré par le prévenu, que son prêt de EUR 5,3 millions en faveur du prévenu ne serait pas remboursé et que ce dernier réclamait des honoraires indus, il avait exigé du prévenu que tous les avoirs appartenant aux plaignants et déposés sur le compte de F______ et de AI______ lui soient restitués par transfert sur les comptes de sociétés contrôlées par le plaignant.

2. C______ a refusé de restituer ses avoirs au plaignant et lui a indiqué qu'il considérait que désormais tous les avoirs déposés sur les comptes et sous-comptes ouverts au nom de F______ et/ou AI______ dans les livres de E______ lui appartenaient.

3. C______ s'est approprié les avoirs de A______, à son unique profit, en procédant, en violation des intérêts et des instructions du plaignant, aux transferts suivants :

a) USD 4,8 millions, le 5 décembre 2008, depuis le sous-compte 1______/8______ (attribué au plaignant) F______ en faveur du sous-compte 1______/11______ (pièce 34'815), étant rappelé que l'extension 11______ se rapportait aux avoirs du prévenu. Dans les jours qui ont suivi, le prévenu a fait transférer USD 2 millions, le 12 décembre 2008, en faveur de sa société AK______ (pièce 34'819) puis 1,1 million, le 15 décembre 2008, en faveur de AI______ (pièce 34'820).

b) USD 2,4 millions, le 11 juin 2009 (pièce 34'913), puis USD 0,460 million, le 29 juillet 2009 (pièce 34'920), et USD 1,360 million, le 16 septembre 2009 (pièce 34'924), soit un total d'USD 4'220'000, a été transféré sur instructions du prévenu depuis le sous-compte 1______/8______ (attribué au plaignant) F______ ouvert chez E______ en faveur du compte AI______/1______ ouvert chez E______.

c) USD 2,5 millions, le 14 avril 2009 (pièce 34'905), puis USD 8 millions, le 11 juin 2009 (pièce 34'912), USD 10,8 millions, le 29 juillet 2009 (pièce 34'919), et USD 6 millions, le 15 septembre 2009 (pièce 34'923), soit un total d'USD 27'300'000 a été transféré sur instructions du prévenu depuis le sous-compte 1______/8______ (attribué au plaignant) F______, ouvert chez E______ en faveur du compte 2______ ouvert au nom de la société F______ auprès de la banque G______, dont H______ et le prévenu sont les ayants droit économiques.

Depuis ce compte 2______, le prévenu a ensuite fait transférer USD 2,5 millions, le 14 avril 2009, et USD 6 millions, le 11 juin 2009, sur un compte ouvert au nom de K______ ; USD 4 millions, le 16 juin 2009 (pièce 37'700), et USD 1 million, le 5 août 2009, sur un compte ouvert au nom de L______ et enfin USD 3 millions, le 23 septembre 2009, sur un compte ouvert au nom de BH______ auprès de BI______ (pièce 37'701). Etant précisé que le prévenu est actionnaire de ces sociétés et ayant droit économique des comptes desdites sociétés.

d) USD 2 millions, le 23 mars 2009 (pièce 34'901), ont été transférés sur instructions du prévenu depuis le sous-compte 1______/8______ (attribué au plaignant) F______ ouvert chez E______ en faveur de la société L______ chez BJ______, établissement racheté en 2009 par J______.

4. Le prévenu s'est ainsi livré, depuis le mois de décembre 2008 jusqu'au mois de septembre 2009, au pillage systématique des avoirs du plaignant déposés par ce dernier sur le sous-compte 1______/8______ (attribué au plaignant) F______ ouvert chez E______. Les montants ainsi détournés, qui totalisent l'équivalent en francs suisses d'USD 30,32 millions, ont ensuite été en grande partie transférés en M______, sur instructions du prévenu et à l'insu des plaignants, sur des comptes et pour des objectifs demeurés inconnus, laissant des soldes très faibles en Suisse.

En refusant de restituer les montants confiés par le plaignant et en se les appropriant, le prévenu s'est rendu coupable d'abus de confiance au sens de l'art. 138 ch. 1 CP qui punit celui qui, sans droit, aura employé à son profit ou au profit d'un tiers des valeurs patrimoniales qui lui avaient été confiées."

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

Audition des parties

a. Le 11 juillet 2011, A______ et B______ ont déposé plainte pénale contre C______ et H______.

a.b. Entendu par le MP les 22 septembre 2011, 29 et 30 août 2013 et 12 et 13 novembre 2013, A______ a déclaré être au bénéfice d'un doctorat en économie et avoir exercé la fonction de directeur de N______ en M______ de 1992 à 1998, établissement actif dans les domaines pétrolier et gazier, dont il était l'actionnaire majoritaire et qu'il avait vendu à l'Etat M______. De 1998 à 2001, il avait vécu entre T______ et R______ et fait du "business" puis, jusqu'en 2004, travaillé dans une société O______, active dans le domaine pétrolier. De 2005 à 2011, il avait été Sénateur de M______ et avait ultérieurement présidé un parti politique.

En 1996, il avait fait la connaissance de C______, lequel vivait en ______, et ils avaient noué une relation amicale. En 1999, ils étaient entrés en relations d'affaires. C______ était devenu à cette époque la personne de confiance de A______, son représentant et son traducteur à Y______. C______ avait ensuite collaboré activement avec Me AE______, avocat qui gérait un trust dont A______ était l'ayant droit.

En 1999, A______ avait dû clôturer les comptes dont il était l'ayant droit auprès d'établissements bancaires en ______, dont la X______, car la politique envers les ressortissants M______ était devenue plus restrictive. Il s'agissait en particulier des comptes de ses sociétés Z______, AA______ et AB______, détenant ses avoirs provenant du commerce de pétrole, de gaz et de gains réalisés dans l'immobilier.

En présence de Me AE______, C______ lui avait proposé de transférer ses avoirs sur le compte 1______ de sa société F______ auprès de la E______ (alors AO______). Le 27 mars 2000, en présence de C______, A______ avait ouvert au nom de F______ le compte no 7______ auprès du G______ (alors G______, ci-après : G______), dont il était le seul ayant droit économique. Le 28 mars 2000, toujours accompagné de C______, il s'était rendu à la E______ et avait "signé des documents similaires, soit des documents d'ouverture de compte, en renouvellement des précédents". Il pensait donc être également l'unique ayant droit économique du compte de F______ auprès de la E______. Tous les avoirs transférés sur les comptes de F______ lui appartenaient, notamment ceux (USD 2'189'000.-) remboursés par sa société U______, active dans l'immobilier, à laquelle Z______ avait octroyé un prêt.

Par ailleurs, toujours en 1999, A______ avait prêté USD 4'700'000.- à C______, somme versée sur le compte de la société de ce dernier, AK______.

En 2004, compte tenu de ses activités politiques, A______ avait demandé à C______ de faire figurer son ex-épouse, B______, comme ayant droit économique, avec pouvoir de signature, des comptes de F______ auprès du G______ et de la E______.

Selon A______, un contrat de fiducie avait été conclu oralement en février ou mars 2000 avec C______, ce dernier lui ayant proposé d'être son "fiduciaire" pour les fonds se trouvant sur les sous-comptes 1______ 8______, 9______ et 10______ de F______ auprès de la E______.

C______ devait gérer les avoirs de A______ déposés sur le sous-compte 8______ et suivre ses instructions et celles de B______. C______ lui avait demandé que l'argent placé sur les sous-comptes susmentionnés serve de garantie pour l'obtention de crédits en faveur de ses sociétés AI______ et AK______, ce qu'il avait accepté. Pour A______, l'activité déployée par C______ était une contre-partie des prêts qu'il lui avait octroyés en février ou mars 2000, ainsi qu'en 2002.

A______ donnait des instructions à BG______ et C______, qui devaient les transmettre notamment à H______ cousin de ce dernier. Ni C______ ni H______ n'étaient ses partenaires. Ils exécutaient les instructions qu'il leur faisait parvenir.

Le 15 avril 2002, A______ avait prêté EUR 3'400'000.- à C______, qui avait demandé l'extension de la durée dudit prêt, estimant que le taux de change EUR-USD lui était défavorable. Le montant du prêt, non remboursé à ce jour, était passé à EUR 5'300'000.-. Les intérêts avaient été crédités sur le sous-compte 1______/10______, comme cela ressortait des pièces bancaires. Ce sous-compte n'avait donc rien à voir avec des transactions portant sur des céréales.

S'agissant des versements totalisant USD 23'000'000.-, opérés par AQ______ sur le compte de F______ auprès de la E______, A______ a expliqué qu'il possédait, en 2004, une société BK______ et qu'il souhaitait transférer des avoirs de cette dernière vers F______. C______ lui avait alors proposé de passer par les sociétés BL______ et AQ______ car il y avait un intérêt personnel. A______ ne connaissait pas les ayants droit économiques de ces sociétés en 2004. Pour ce service, C______ lui avait demandé un prêt d'USD 1'000'000.- en faveur d'une société BM______. A la demande de C______, les "swifts" bancaires relatifs aux transferts entre BK______ et BL______ mentionnaient des références ne correspondant pas à la réalité, telles que "pmt for market research for petrol". A______ a produit des attestations de AQ______, précisant qu'elles avaient été établies sur la base de la documentation bancaire relative à F______. C'était cependant bien BK______ qui était à l'origine des fonds finalement reçus par F______ de AQ______, les quelques jours séparant les virements de BK______ et les dépôts sur le compte de F______ en attestant.

A______ et C______ avaient procédé de la même manière dans le cadre d'un versement effectué par BN______, une autre société dont A______ était l'ayant droit économique, à destination de F______. A nouveau, à la demande de C______, les 28 "swifts" relatifs aux transferts entre BK______ et BL______ mentionnaient des références ne correspondant pas à la réalité, telles que "delivery of feed weat to BO______".

A______ a indiqué qu'en 2011, il avait acquis les sociétés BL______ et AQ______.

Enfin, ses partenaires commerciaux, BP______, BQ______ et BR______ avaient, à sa demande, versé des commissions, en lien avec le commerce de céréales, sur le compte bancaire de BL______, transférées ensuite sur les comptes bancaires de AQ______, puis de F______.

A______ considérait que les contrats conclus en 2004 entre F______ et AQ______, versés à la procédure par C______, étaient des faux. En effet, ces documents mentionnaient que 80'000 tonnes de grain d'origine M______ devaient être livrées, durant l'année 2004, dans la ville de BS______, à la frontière entre BU______ et la BU______. Or, dans un courrier également produit, les douanes BU______ avaient indiqué n'avoir pas retrouvé la trace de telles livraisons, lesquelles n'avaient donc pas eu lieu. Ces contrats n'étaient donc pas de nature à établir l'origine des fonds transférés de AQ______ à F______. De manière générale, A______ avait transféré son argent sur le sous-compte 8______ de F______ à la E______. Par exemple, USD 52'350'000.- avaient servi, durant la seule année 2008, à accorder des prêts à de nombreuses sociétés, dont AX______ et BV______. Ces fonds n'avaient rien à voir avec des transactions portant sur des céréales. C______ devait exécuter ses instructions. Contrairement aux affirmations de celui-ci, A______ ne pouvait avoir été son conseiller. Il était d'ailleurs son créancier, vu les prêts qu'il lui avait accordés.

A propos des montants versés par F______ à BC______ et BC______ BW______, A______ a déclaré que ces sociétés faisaient partie de sa holding agraire dénommée BV______, dont il était l'un des actionnaires et bénéficiaires finaux.

Les fonds prêtés à AX______ étaient sa propriété. C______ et H______ étaient intervenus sur des points techniques, devant signer les contrats et suivre les instructions données par BG______.

a.c. Entendue par le MP le 20 novembre 2013, B______ a déclaré s'être mariée avec A______ en 1997 et avoir divorcé en 2001. Elle avait d'abord mis ses connaissances de la langue anglaise à disposition de son mari mais le couple s'était vite rendu compte que celles-ci n'étaient pas suffisantes dans le cadre des affaires de A______. Des amis du couple leur avaient présenté C______ en tant qu'assistant potentiel pour A______. C______ avait ainsi officié en qualité d'interprète et leur avait rendu d'autres services. C______ travaillait pour son mari et exécutait ses instructions. L'hypothèse inverse, soutenue par C______, la faisait rire. Lorsque les comptes auprès de la X______ avaient été clôturés, les avoirs qui y étaient déposés avaient été transférés en Suisse. En 2004, lorsque A______ était entré en politique, elle avait signé des documents bancaires qui lui permettaient de disposer des avoirs déposés sur le compte de F______ auprès du G______. Elle se considérait comme propriétaire d'une partie de cet argent qui provenait d'un fonds familial destiné à la fille qu'elle avait eue avec A______. L'un des comptes sur lesquels se trouvait l'argent se nommait BX______, en référence à sa fille BY______. Elle refusait d'indiquer le montant lui ayant appartenu et ayant été détourné par C______.

b. Entendu par le MP les 14, 15 et 16 mai 2013, 27, 29 et 30 août 2013, 12, 13 et 21 novembre 2013, ainsi que le 28 avril 2014, C______ a déclaré qu'il était l'ayant droit économique des sociétés AK______, AI______ et F______ notamment. La société F______, dont il était l'actionnaire unique, avait été créée en 1997.

Il avait fait la connaissance de A______ en juin 1995. Leurs relations d'affaires avaient débuté en 1999. En février 2000, ils avaient décidé de "collaborer ponctuellement sans devenir pour autant partenaires", circonstances dans lesquelles A______ avait acquis un pouvoir de signature sur le compte 1______ de F______ auprès de la E______, pour représenter plus aisément cette société. A______ devait cependant le consulter pour engager F______. C______ fonctionnait comme conseiller. Avec son cousin H______, ils étaient les seuls ayants droit économiques du compte 1______ de F______ auprès de la E______ et de ses sous-comptes. Le sous-compte 8______ avait été créé en 1998. Après avoir été utilisé dans le cadre d'un commerce d'olives, il avait été attribué aux investissements auxquels C______ procédait avec A______.

Sur l'ouverture du compte 7______ de F______ auprès du G______, C______ a déclaré que A______ voulait ouvrir des comptes en Suisse pour ses propres affaires et qu'il lui avait demandé de l'accompagner. Il n'était pas resté pour la signature de tous les documents par A______. C______ se considérait comme l'ayant droit économique de ce compte, quoiqu'il ne figurât pas sur le formulaire A.

A______ n'avait pas opéré des versements sur les comptes de F______ au motif que les banques voulaient clôturer ses comptes.

Lorsque A______ était entré en politique, en 2004, il avait demandé à C______ que B______ puisse avoir la signature sur le compte 7______ de F______ auprès du G______, ceci dans la mesure où ce compte était débiteur de l'utilisation de la carte de crédit de cette dernière.

Selon C______, le contrat de fiducie, dont A______ prétendait qu'il avait été conclu oralement, n'avait jamais existé, sans quoi il aurait été passé par écrit, puisque d'autres accords, de moindre portée, avaient été établis sous cette forme. Il n'avait jamais été question qu'il gère les avoirs de A______, conformément aux instructions de ce dernier. Ils avaient simplement décidé de collaborer ponctuellement dans certaines affaires, raison pour laquelle A______ était devenu administrateur de F______ avec pouvoir de signature, afin de faciliter la représentation de la société. A______ devait le consulter avant de conclure des contrats au nom de cette société. A______ n'était pas son conseiller et il ne le rémunérait pas.

S'agissant du contrat de prêt conclu le 15 avril 2002, C______ a expliqué que A______ et lui-même avaient tenu une "sorte de balance des entrées et des sorties de fonds", qu'ils se devaient réciproquement. Il avait cependant souhaité clarifier la situation en avril 2002. Ils avaient ainsi déterminé le montant net qu'il devait à A______, toutes transactions et devises confondues, et avaient formalisé leur accord sur ce point dans le document du 15 avril 2002. Ce prêt avait fait l'objet de deux amendements ultérieurs, se montant finalement à USD 5'300'000.-, non remboursés.

La somme d'USD 7'300'000.- créditée sur le compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______ et provenant du compte 7______ de F______ auprès du G______, n'appartenait pas à A______, ledit compte ayant été auparavant crédité d'avoirs dont C______ était propriétaire. Seuls les montants libellés en GBP et crédités sur le compte 7______, soit GBP 630'000.- transférés le 13 avril 2000, GBP 356'357.- transférés le 14 septembre 2000, GBP 290'000.- transférés le 9 avril 2001 et USD 201'950.- transférés le 12 octobre 2000, appartenaient à A______. Tous ces montants avaient cependant été pris en compte dans le montant du prêt du 15 avril 2002 qui le liait à A______ et qui avait fixé leurs obligations à cette date. Tous les autres montants crédités sur ce compte lui appartenaient et il considérait par ailleurs qu'il était le seul ayant droit économique du compte 7______.

C______ a encore admis qu'USD 656'000.- et USD 247'000.-, crédités sur le compte 7______ de F______ en 2004 et provenant des comptes de BX______, respectivement de AB______, dont l'ayant droit économique était A______, appartenaient à ce dernier.

Quant aux montants versés par F______ à BC______ et BC______ BW______, C______ a déclaré qu'en 2004, A______ lui avait proposé d'investir dans le marché de la pomme de terre dans la région BZ______ dont il était le Sénateur. Dès lors que C______ ne connaissait pas ce marché, A______ avait proposé de gérer ces transactions. Ils avaient convenu d'investir conjointement dans cette affaire. En 2008, F______ avait investi USD 8'000'000.- dans la société BC______, aujourd'hui CA______ en liquidation, et USD 8'800'000.- dans la société BC______ BW______, aujourd'hui CB______ en liquidation. A______ n'avait pas investi d'argent. Ces sociétés n'avaient jamais remboursé l'argent de F______ leur avait prêté.

S'agissant des versements totalisant USD 23'000'000.- opérés par AQ______ sur le compte de F______ auprès de la E______, C______ a déclaré que AQ______ était la source principale d'arrivée de fonds sur le compte de F______.

En 2004, il avait conclu avec la société AQ______ quatre contrats portant sur la livraison d'un peu moins de 80'000 tonnes de céréales M______ et BT______ pour un montant total d'USD 21'500'000.-, payé à F______ sur son compte 1______/8______ et /11______ auprès de la E______. Finalement, la cargaison avait été plus importante et le paiement final s'était élevé à USD 23'000'000.-. Ces quatre contrats avaient été exécutés en l'espace de cinq mois. Il était entré en contact
avec AQ______ par l'intermédiaire CC______ et CD______. AQ______ voulait alors acquérir le grand garage CC______ en BU______, lequel voulait être payé en espèces. AQ______ ne traitant pas en espèces, F______ avait livré des céréales à cette dernière pour un prix déterminé versé sur le compte de F______. CD______ avait vendu les céréales contre des espèces qu'il avait remises pour AQ______ à CC______, en échange du bien dont la précitée faisait l'acquisition.

C______ ne disposait plus de la documentation relative aux quatre contrats. Ils avaient en effet été exécutés au travers de sa société AZ______, disparue depuis lors.

C______ contestait les explications de A______, selon lesquelles il avait perçu USD 23'000'000.- à titre de commissions. Par ailleurs, toutes les pièces bancaires relatives aux transferts opérés par AQ______ mentionnaient les références des contrats susmentionnés.

A______ était intervenu comme intermédiaire dans la négociation des prêts octroyés en 2006 et 2008 à AX______. L'argent prêté n'appartenait pas à ce dernier. Sur les fonds prêtés, USD 1'000'000.- avaient été transférés en 2008 du compte 7______ de F______ au G______.

Le 5 décembre 2008, lorsqu'il avait pris conscience que A______ voulait s'en prendre à ses actifs, il avait transféré USD 4'800'000.- du sous-compte 8______ au sous-compte 11______ du compte 1______ de F______.

Les virements d'USD 2'500'000.-, USD 8'000'000.-, USD 10'800'000.- et USD 6'00'000.-, soit au total USD 27'300'000.-, effectués les 14 avril, 11 juin, 29 juillet et 15 septembre 2009 par le débit du sous-compte 8______ en faveur du compte 2______ de sa société AI______ avaient servi à réaliser des opérations immobilières à T______ par l'intermédiaire des sociétés K______ et CE______. Cet argent n'avait rien à voir avec A______. Ultérieurement, C______ est revenu sur ses déclarations, affirmant que ces sommes avaient été utilisées dans le cadre de transactions portant sur des céréales.

L'argent transféré à BH______ était un prêt qu'il avait octroyé à l'un de ses amis et qui lui avait été remboursé. Les fonds n'avaient rien à voir avec A______. Il en était de même de l'argent transféré sur le compte de L______.

Il avait ainsi mis ses actifs à l'abri de décembre 2008 à septembre 2009.

C______ avait rompu toute relation avec A______ en décembre 2008. Il accusait ce dernier de lui avoir volé des actions des sociétés CF______ et CG______ lui appartenant, actuellement détenues par une société CH______, dont A______ est propriétaire.

C______ avait déposé une plainte pénale à T______ contre BG______ pour le vol des titres au profit de A______.

Par ordonnance du 7 septembre 2013, le Juge d'instruction M______ a classé l'affaire, retenant que l'enquête avait permis d'établir que A______ était le légitime propriétaire des actions.

Celui-ci avait déposé plainte à Genève pour avoir accès à la documentation bancaire et pouvoir soutenir ensuite que les fonds s'étant trouvés sur le compte 1______/8______ de F______ lui appartenaient. Il l'avait ainsi spolié d'environ USD 50'000'000.-, dont USD 25'000'000.- investis dans les sociétés BC______ et USD 19'000'000.- correspondant à la valeur des titres CF______ et CG______. A______ voulait briser ses activités commerciales.

En octobre 2008, A______ lui avait réclamé USD 12'500'000.- et l'avait menacé de le faire mettre en prison s'il ne lui rendait pas son argent. Il avait refusé.

Audition des témoins

c. Me AE______, avocat conseil de A______, avait mis en place un trust pour ce dernier en 1998, dont le but était de lui permettre de devenir un résident et un investisseur en ______. Les trois structures qui le composaient, soit les sociétés AA______, AB______ et Z______, avaient des comptes bancaires auprès d'établissements en ______, notamment la X______, où A______ était également titulaire d'un compte joint avec son épouse.

Selon Me AE______, C______ avait d'abord agi en qualité d'interprète pour A______, organisé des séances et obtenu des visas pour ce dernier. Jusqu'en 2008, C______ s'était occupé du paiement de ses notes d'honoraires et lui avait envoyé des documents pour le compte de A______. Me AE______ avait également reçu des instructions de C______, pour le compte de A______. Ses contacts avec A______ se faisaient le plus souvent par l'intermédiaire de C______. Avec celui-ci, ils avaient été les conseillers de A______.

En janvier ou février 2000, les banques clôturaient tous les comptes des ressortissants M______ du jour au lendemain. C'était notamment le cas de la X______ et de la AC______. Me AE______, C______ et A______ avaient alors eu une réunion. C______ était intervenu "comme le Messie" car il avait trouvé une solution à ce problème. Aussi, en 2000 et 2001, sur instructions de ce dernier, Me AE______ avait transféré plusieurs montants appartenant à A______ sur les comptes de F______.

Il y avait en outre eu plusieurs transferts du compte de F______ auprès du G______ sur celui de F______ auprès de la E______, notamment de GBP 1'040'000.- le 20 février 2001, USD 6'300'000.- le 6 avril 2001, GBP 300'000.- le 9 avril 2001 et USD 1'000'000.- le 7 juillet 2008.

Tous les montants avaient été versés sur le compte 1______ de F______ auprès de la E______ car Me AE______ estimait que A______ en était l'ayant droit économique.

En 2004, A______ avait commencé une carrière politique, souhaitant être élu au Parlement M______, de sorte qu'il ne pouvait plus apparaître comme ayant droit économique de fonds à l'étranger.

Me AE______ a déclaré avoir entendu parler de AQ______ pour la première fois en 2010 ou 2011.

Me AE______ devait, à la demande de A______, exécuter les instructions que lui donnait C______, ce dernier étant l'intermédiaire entre le propriétaire des fonds et son avocat.

Enfin, tant A______ que C______ lui avaient dit qu'ils disposaient de comptes bancaires en Suisse pour accueillir les fonds du premier venant d'______.

d. BG______ était spécialisé dans le domaine bancaire. Il avait travaillé au sein de la N______ avec A______ de 1993 à 1998 puis était devenu directeur général d'une société d'investissement dont A______ était le propriétaire, fonction qu'il exerçait toujours. Son activité consistait à suivre et contrôler les transferts des fonds effectués par A______, notamment sur le compte de F______ auprès de la E______. Jusqu'en 2008, il recevait des instructions oralement de A______ et les transmettait aux collaborateurs de F______, lesquels les exécutaient. Il recevait ensuite des collaborateurs de F______ les documents y relatifs et faisait un rapport à A______. Il contrôlait ainsi les trois sous-comptes 1______/8______, 9______ et 10______ de F______ auprès de la E______, sur lesquels se trouvaient les avoirs de A______, ainsi que le compte ouvert au nom de F______ auprès du G______. Les autres comptes et sous-comptes de F______ appartenaient à C______, lequel utilisait en particulier le sous-compte 1______/11______ pour des opérations de trading sur les matières premières.

Selon BG______, au moyen de ses avoirs déposés sur le compte de F______ auprès de la E______, A______ s'était porté garant en faveur de la E______ des débits des comptes des sociétés AI______ et AK______.

BG______ a en outre déclaré que C______ faisait un usage assez libre de l'argent de A______.

Selon BG______, la société AQ______ était active dans le domaine du gaz et du pétrole. Il n'en connaissait pas les ayants droit. A______ l'avait informé de l'arrivée de fonds en provenance de AQ______ à la E______. Les montants, totalisant USD 23'000'000.-, versés par cette société sur le compte 1______/8______ de F______ étaient des bénéfices réalisés par A______ dans des affaires faites avec AQ______. Ni A______ ni BG______ n'avaient donné d'instructions pour transférer cet argent sur le compte 2______ de F______. C______ et H______ s'étaient appropriés les fonds.

La société AW______ avait effectué deux versements sur le compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______. Le second avait été crédité sur le sous-compte 11______, dans la mesure où cet argent n'appartenait pas à A______.

Un montant de USD 16'800'000.- devait être transféré à titre de prêt par F______ en faveur de la société BC______, appartenant à A______. Seuls USD 15'600'000.- avaient toutefois été transférés, argent qui était ainsi resté dans la sphère économique de A______. Aucun remboursement n'était intervenu.

e. CI______ connaissait A______ depuis 20 ans et avait été actionnaire et vice-président de la N______. Avec A______, ils avaient fondé les sociétés BC______ et BC______ BW______. F______ avait accordé un prêt d'USD 16'800'000.- à ces deux sociétés, jamais remboursé mais réinvesti dans un autre projet avec A______.

C______, qui était un subordonné de A______, lui avait volé son argent.

f. CJ______ avait été membre du conseil d'administration de la N______ jusqu'en 1998 et avait fait des affaires avec A______ de 1991 à 1998. A cette époque, les banques procédaient à la fermeture des comptes détenus par des ressortissants de M______. A______ lui avait expliqué avoir fait appel à C______ et à sa société F______ pour "garder" son argent. Au nombre des avantages, A______ lui avait dit que C______ était parfaitement anglophone, disposait d'une formation juridique adéquate et était résident anglais. CJ______ s'était vu proposer les mêmes services par C______ dès leur première rencontre. Ce dernier avait mis l'accent sur l'ouverture d'un sous-compte spécial du compte de sa société F______ qui aurait été destiné aux avoirs de CJ______ uniquement, pour les sécuriser.

Aux yeux de CJ______, C______ était l'assistant de A______ en ______ et son homme de confiance.

A______ avait une grosse fortune qu'il avait confiée à C______.

CJ______ s'est en outre dit persuadé que C______ avait volé l'argent de A______, se fondant sur de nombreuses rumeurs circulant dans la communauté BT______ de T______. Il avait été constaté que le train de vie de C______ avait changé. Il menait grand train, fréquentant tous les endroits huppés d'Europe, tels que ______ ou ______.

Entre le 5 et le 7 décembre 2008, CJ______ avait eu une conversation téléphonique de quarante minutes avec C______, durant laquelle ce dernier lui avait exposé avoir perdu USD 11'000'000.- appartenant à A______ dans des opérations immobilières. C______ lui avait demandé de trouver un arrangement à l'amiable avec A______, à qui il entendait donner la société F______, contre un abandon de la créance. A______ avait refusé la proposition. En septembre 2009, CJ______ avait rencontré C______ à T______, le trouvant inquiet et stressé. Celui-ci avait à nouveau sollicité son aide mais en réclamant le versement par A______ d'une somme d'USD 17'000'000.- en contre-partie de la cession de F______.

g. CK______ avait fait la connaissance de A______ et de C______ en 2008. Il avait succédé à CL______ dans la gestion du compte 7______ de F______ au G______ en août 2009, après avoir suivi la clientèle du précité pendant 18 mois. CL______ lui avait dit que A______ était bien l'ayant droit économique de ce compte. C______ l'était devenu par la suite. Il avait cru comprendre que ce changement était fictif et lié à la carrière politique de A______. B______ avait un pouvoir de signature sur le compte, peut-être en lien avec l'émission d'une carte de crédit.

h. CL______ avait travaillé pour la CM______ (G______), de 1997 au 1er septembre 2009, en qualité de conseiller à la clientèle privée. F______ détenait un compte auprès de la G______. Il rencontrait A______ une fois par année. C______ officiait en qualité de traducteur lors de ces rendez-vous. C'était également celui-ci qui fixait les rendez-vous pour A______. Au début, les investissements ne concernaient que A______. C______ ne faisait rien sans consulter ce dernier. CL______ avait eu le sentiment que les ordres étaient donnés par A______ et relayés par C______. Il y avait clairement un rapport hiérarchique entre les précités. Cela avait duré aussi longtemps que A______ avait eu des comptes au sein de la banque.

Selon CL______, A______ était l'ayant droit économique de F______ mais c'était C______ qui avait le pouvoir de signature sur la société. A la lecture du formulaire A du compte 7______ du 27 mars 2000, CL______ a déclaré que dès lors que A______ figurait en qualité d'ayant droit économique du compte, il était évident que les fonds déposés sur ce compte lui appartenaient, à défaut de quoi le formulaire serait un faux dans les titres. Lorsque A______ était devenu Sénateur de M______, la société F______ avait été vendue à C______ qui était devenu l'ayant droit économique du compte 7______. CL______ n'avait depuis lors plus eu de contacts qu'avec C______.

Ont été produits les trois courriers des 18 octobre et 8 décembre 2004, le premier signé tant par A______ que par C______, donnant instructions au G______ de clôturer les comptes AB______, V______ et BX______ et de transférer les avoirs sur le compte 7______ de F______.

i. Selon CN______, gestionnaire du compte 1______ de F______ auprès de la E______ depuis 2006, et CO______, membre du service juridique de la E______ de 2005 à 2010, cette relation avait été ouverte en 1998. Son fractionnement en plusieurs sous-comptes ne pouvait pas être dû à l'existence de différents ayants droit économiques, ou alors cela avait été la volonté du client mais à l'insu de la banque. Les seuls ayants droit économiques étaient C______ et H______, soit ceux figurant sur le formulaire A, lors de l'ouverture du compte. C______ n'avait jamais évoqué l'existence de A______ en présence de CN______.

j. Selon BF______, A______ était une relation commerciale de longue date. Ce dernier, qui s'était présenté comme l'ayant droit économique de F______, avait négocié avec lui les prêts octroyés par cette société à AX______ en 2006 et 2008. Ces prêts avaient été remboursés en 2009.

Documents d'ouverture de comptes et pouvoirs de signatures

k. A teneur du formulaire A relatif au compte 7______ de F______ auprès de la G______, daté du 27 mars 2000, A______ figurait en qualité d'ayant droit économique des avoirs déposés sur le compte. C______ et A______ avait tous deux un pouvoir de signature.

Le formulaire A relatif au compte 1______ de F______ auprès de l'AS______ (devenue E______), du 14 avril 1998, mentionne C______ et H______ en qualité d'ayants droit économiques.

Selon le formulaire A concernant le même compte, daté du 6 novembre 2001, C______ et H______ figuraient toujours en qualité d'ayants droit économiques. A______ a signé ce document, de même que les précités. Le tampon humide apposé par la banque porte la date du 22 mars 2002. A teneur du document "authorised signatories" portant la même date, A______ avait la signature sur ce compte.

Courriers bancaires

l. Selon un courrier du 5 octobre 1999 de la X______ à Me AE______, "the proposed transfer of the M______ customers with whom you are associated from this office has been due entirely to a policy directive from the Bank's Head Office relating to offshore companies undertaking business in M______".

Attestations de transferts bancaires

m. En relation avec la somme d'USD 7'300'000.- provenant du compte 7______ de F______ auprès du G______ et créditée sur le compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______ :

- Un relevé de compte attestant d'un débit du compte 7______ de F______ auprès du G______ d'USD 6'300'018.-, le 6 avril 2001, et d'un crédit du compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______, le 9 avril 2001, d'USD 6'299'985.- ;

- Un relevé de compte attestant d'un débit du compte 7______ de F______ auprès du G______, le 7 juillet 2008, d'USD 1'000'024.24 et d'un crédit sur le compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______, le même jour, d'USD 1'000'000.- ;

- Un relevé de compte attestant d'un débit du compte 7______ de F______ auprès du G______, le 20 février 2001, de GBP 1'040'010.44 et le 9 avril 2001 de GBP 300'010.-, en faveur du compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______.

Selon les pièces bancaires figurant à la procédure, ces fonds proviennent du compte joint de A______ et B______ auprès de la X______, du compte BX______ auprès du G______, du compte V______ auprès du G______ et des comptes des sociétés P______, AA______ et AB______, A______ étant l'ayant droit économique de toutes ces relations.

n. Concernant les versements totalisant environ USD 23'000'000.-, effectués par AQ______ sur le compte de F______ auprès de la E______ :

- 29 swifts attestant de versements de BK______ à BL______ pour un total d'USD 8'010'484.-, entre le 31 mars et le 28 juillet 2004, avec la mention "pmt for market research for petroleum products in CP______ under Agr. w/n dd 17.02.2004" ;

- 28 swifts attestant de versements de BN______ à BL______ pour un total d'USD 9'010'532.-, entre le 31 mars et le 28 juillet 2004, avec la mention "delivery of feed wheat to BO______, october-november 2004, agreement w/n dd 10.02.2004" ;

- 2 swifts attestant de versements de BR______ à BL______ pour un total d'USD 593'068.-, les 25 août et 8 septembre 2004, avec la mention "pmt market research for petroleum products in CP______ under invoices" ;

- 7 swifts attestant de versements de BP______ à BL______ pour un total d'USD 2'529'208.-, entre le 28 août et le 14 septembre 2004, avec la mention "pmt market research for petroleum products in CP______ under invoices" ;

- 4 swifts attestant de versements de BQ______ à BL______ pour un total d'USD 1'578'115.-, entre le 30 août et le 8 septembre 2004, avec la mention "pmt market research for petroleum products in CP______ under invoices" ;

- 34 avis de débit du compte de BL______ auprès de la AR______ pour un total d'USD 15'278'677.-, entre avril et septembre 2004, et les avis de crédit correspondants, durant la même période, sur le compte de AQ______ dans la même banque. Ces avis comportent des mentions telles que "by contract 14______ dd 26.07.2004" ;

- Plusieurs dizaines d'avis de crédit du compte de F______ 1______/8______ et 11______ auprès de la E______ pour un total d'USD 22'604'298.-, entre le 2 avril et le 17 septembre 2004, mentionnant à titre de cause du paiement "PMNT ACC. TO CONTRACT 15______21 DD 31.03.2004 ; 15______22 DD 02.04.2004 ; 15______23 DD 31.05.2004 ; 15______24 DD 10.08.2004 et 15______21 DD 31.03.2004". Selon C______, ces fonds sont le produit de la vente de plus de 80'000 tonnes de céréales par F______ à AQ______ en 2004.

Entre le 5 décembre 2008 et le 23 septembre 2009, C______ a vidé le compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______ de la presque totalité de ses avoirs, procédant de la manière suivante :

- Le 5 décembre USD 4'800'000.- ont été transférés ("transfer") en faveur du sous-compte 1______/11______ (attribué à C______) de F______ auprès de la E______. Le 12 décembre 2008, ce sous-compte a été débité d'une somme d'USD 2'000'000.-, transférée ("partial return of credit bearing no interest") sur un compte de sa société AK______. Le 15 décembre 2008, un montant d'USD 1'100'000.- a été transféré ("intergroup financing") du même sous-compte sur un compte de sa société AI______.

- Les 11 juin, 29 juillet et 16 septembre 2009, USD 2'400'000.- ("intergroup financing"), USD 460'000.- (aucun motif indiqué) et USD 1'360'000.- (aucun motif indiqué) ont été transférés sur le compte de sa société AI______ auprès de la E______.

- Les 14 avril, 11 juin, 29 juillet et 15 septembre 2009, USD 2'500'000.-, USD 8'000'000.-, USD 10'800'000.- et USD 6'000'000.- ont été transférés, sans indication de motifs, sur le compte 2______ de F______ auprès de la E______, dont C______ et H______ sont les ayants droit économiques.

Les 14 avril et 11 juin 2009, les montants d'USD 2'500'000.- et d’USD 6'000'000.- ont été transférés, sans indication de motifs, de ce compte en faveur du compte 4______ de K______ auprès de la E______, dont C______ est l'ayant droit économique.

Les 16 juin et 5 août 2009, des sommes d'USD 4'000'000.- ("loan agreement 16______ DD 15.06.2009") et d'USD 1'000'000.- ("loan agreement 17______ DD 04.08.2009") ont été transférées du même compte sur le compte 18______ de la société L______, dont C______ est l'ayant droit économique, auprès de la J______.

Le 23 mars 2009, un montant d'USD 2'000'000.- avait été transféré ("loan agreement 20/309 DD 20.03.2009") directement du compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______ sur le compte 18______ de la société L______ auprès de la J______.

Le 23 septembre 2009, USD 3'000'000.- (aucun motif indiqué) ont été transférés du compte 2______ de F______ auprès de la E______ sur le compte de la société BH______, dont C______ est l'ayant droit économique, auprès de BI______.

C______ a ensuite transféré une grande partie des fonds débités du compte 1______/8______ de F______ en M______ pour des motifs et sur des comptes restés inconnus.

o. En relation avec les virements effectués par F______, via son compte 1______/8______ auprès de la E______, en faveur de BC______ et de BC______ BW______ :

- Des virements en faveur de BC______ effectués entre le 24 janvier 2008 et le 27 mai 2008, soit USD 1'500'099.86, USD 2'500'064.72, USD 2'000'067.94, USD 1'000'067.04 et USD 1'000'103.96, pour un total d'USD 8'000'403.52 ;

- Des virements en faveur de BC______ BW______ effectués entre le 24 janvier 2008 et le 27 mai 2008, soit USD 3'000'099.86, USD 2'000'064.72, USD 800'105.04, USD 1'500'068.50 et USD 1'500'103.96, pour un total d'USD 8'800'442.08.

Autres documents

p. Courriers relatifs à des instructions données ou adressées par/à C______ :

- Un fax du 28 juin 2000, adressé à Me AE______ par C______, sous l'en-tête de AK______ : "Dear Mr. AE______, Please, find enclosed the draft of the letter from Z______ to P______ with regards to Loan Agreement between two companies. A______ asked me to write it down and to send it to you" ;

- Un courrier de A______, daté du 10 octobre 2000, sous l'en-tête de AA______ dont A______ était l'ayant droit, et adressé à la AP______, "We refer to the indemnity relating to our fax instructions which we have provided on 10 October 2000. Any instructions should be checked by a telephone call made and should be checked with any individual appearing or purporting to be on the list below : Mr. C______ or in his absence Mr. H______ tel: 19______".

q. Un contrat du 15 avril 2002, aux termes duquel A______ a prêté à C______ la somme d'EUR 3'400'000.-, le document prévoyant les échéances dudit prêt et son taux d'intérêt, mais ne disant rien d'une affectation déterminée des fonds. Ce contrat a été amendé à deux reprises, soit le 25 novembre 2003 et le 25 janvier 2007, date à laquelle le prêt s'élevait à EUR 5'300'000.-. La dernière tranche du prêt devait être remboursée le 2 mars 2009. Ces pièces portent les signatures de A______ et de C______.

"Board resolutions" de F______ relatives au nantissement

r. A teneur d'une décision du conseil d'administration de F______ du 3 avril 2002, A______, C______ et H______ ont signé un acte de nantissement général en faveur de la E______ afin de garantir les obligations de la société AI______ envers la banque "It was resolved that Mr. C______, Mr. H______ and Mr. A______ would sign a General Form of Pledge, in favour of E______, in order to secure any and all obligations of Compania AI______ towards E______".

Le 6 novembre 2001, une autre décision du conseil d'administration de F______, signée par les mêmes personnes, faisait état d'un engagement semblable afin de garantir les obligations de la société AK______ envers la E______.

Documentation relative à la cause des versements pour un total d'USD 23 millions de AQ______ à F______

s. Selon trois attestations non datées, signées par CQ______, dont la signature avait été authentifiée, USD 12'144'649.50, USD 7'778'785.- et USD 2'180'844.- avaient été versés, entre le 2 avril et le 17 septembre 2004, sur le compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______, A______ étant l'ayant droit économique de ces sommes d'argent, représentant des commissions pour l'aide qu'il avait apportée dans le cadre de certaines transactions.

A teneur d'un "certificate of Amendment of Certificate of Incorporation" du 14 septembre 2011, CQ______ avait été nommé directeur de AQ______ en septembre 2011.

t. Quatre copies (les originaux ne figurent pas au dossier) de contrats conclus entre F______, soit pour elle H______, et AQ______, soit pour elle CR______, aux termes desquels F______ avait vendu des céréales à AQ______, font état de ce qui suit :

- Contrat n° 15______21 du 31 mars 2004, pour un prix de USD 2'418'000.- à payer le jour après la livraison des biens sur le compte 1______/11______ de F______ auprès de la E______, la livraison devant intervenir en avril 2004 ;

- Contrat n° 15______22 du 1er avril 2004, pour un prix de USD 7'948'000.- à payer au plus tard le 30 mai 2004 sur le compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______, la livraison devant intervenir entre septembre et novembre 2004 ;

- Contrat n° 15______23 du 31 mai 2004, pour un prix de USD 6'450'000.- à payer au plus tard le 15 août 2004 sur le compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______, la livraison devant intervenir entre novembre 2004 et mars 2005 ;

- Contrat n° 15______24 du 10 août 2004, pour un prix de USD 4'680'000.- à payer au plus tard le 30 septembre 2004 sur le compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______, la livraison devant intervenir entre janvier et février 2005.

A titre d'exemple, les avis de crédit du compte de F______ mentionnant la référence à ce contrat font état de quinze versements pour un montant total d'USD 5'109'303.-.

Ces contrats ne comportent pas d'élection de for en cas de litige ni de disposition relative au droit applicable ni enfin de clause de garantie.

A teneur d'un courrier des douanes BU______ du 6 décembre 2013, aucune information n'avait pu être fournie sur un transit de blé depuis M______ par la BU______ vers BU______, en lien avec la transaction faisant l'objet des quatre contrats susmentionnés.

u.a. Devant le Tribunal correctionnel, C______ a confirmé ses précédentes déclarations, ajoutant, à propos du contrat de prêt du 15 avril 2002, qu'il s'agissait d'un solde du compte courant global entre lui-même et A______. Interrogé sur le fait que le contrat en question ne mentionnait pas les personnes physiques ou morales concernées, il a expliqué que le texte du contrat avait été rédigé par BG______ et que ledit contrat et ses avenants ne concernaient de F______, ce que lui avait d'ailleurs dit A______. A______ lui avait aussi proposé que cet accord prenne la forme d'un prêt.

u.b. Selon B______, l'argent ayant alimenté les comptes de F______ provenait d'un fond familial dont elle était l'ayant droit économique, conjointement avec A______. Les fonds étaient initialement déposés auprès de la X______. A partir du moment où les banques n'avaient plus permis aux citoyens M______ de conserver leur argent sur des comptes en ______, ces avoirs avaient été transférés sur les comptes de F______. Aussi, elle avait toujours considéré que cet argent était le sien. En 2004, elle s'était substituée à A______ comme signataire sur tous les comptes bancaires où celui-ci apparaissait comme ayant droit économique. Lorsqu'elle utilisait sa carte de crédit liée au compte de F______ auprès du G______, elle n'avait pas besoin de demander l'autorisation de C______.

u.c. A______ avait confié plusieurs millions de dollars à C______. Le contrat de fiducie avait été passé par oral. Il avait procédé ainsi car il avait confiance en C______, ce lien s'étant créé par leur amitié, leurs relations commerciales, le fait que A______ lui avait accordé un pouvoir de signature sur les comptes de certaines de ses sociétés et par les services que C______ lui avait rendus comme traducteur. Selon son expérience de la pratique bancaire, la documentation ne permettait pas de se prémunir contre la malhonnêteté. Il n'avait dès lors pas perçu de risque avant 2008.

Il n'avait pas vu que les documents qu'il avait signés auprès de la E______ n'étaient pas les mêmes que ceux signés la veille à la G______ car il faisait confiance à C______.

BG______ lui présentait deux fois par mois un rapport établi sur la base de relevés bancaires que C______ et H______ lui transmettaient.

CQ______ n'était pas actif au sein de la société AQ______ en 2004. C'était de A______ et de Me AE______ que CQ______ tenait les informations dont il avait fait état dans les trois attestations versées à la procédure. CQ______ travaillait néanmoins depuis 2001 dans l'équipe de Me AE______, avec lequel A______ discutait toujours des schémas de transferts de fonds.

A______ a confirmé que les montants reçus de AQ______ avaient pour cause non pas des commissions dues, comme il l'avait indiqué dans un premier temps, mais bien un simple transfert de son propre patrimoine par le biais de sociétés, notamment BL______, BK______ et BN______. L'argent versé par les sociétés BK______, BN______, BP______, BQ______ et BR______ correspondait à des gains réalisés suite à des investissements. Il ne pouvait cependant pas expliquer pourquoi CQ______ parlait de commissions dans ses attestations. Il s'étonnait également des déclarations de BG______, selon lesquelles les montants provenant de AQ______ étaient des bénéfices que A______ avait réalisés dans le cadre d'affaires avec cette société.

A______ avait fait figurer des indications fantaisistes sur les swifts des transferts bancaires à la demande de C______.

Les sociétés CA______ et CB______ étaient des projets qu'il menait en commun avec CI______. Il ignorait si les USD 16'800'000.- prêtés à ces sociétés avaient été remboursés.

Il ne s'était pas rendu compte avant décembre 2008 que C______ avait trahi sa confiance.

u.d. CD______ avait fait la connaissance de C______ en 1988, en BU______. Ils avaient commencé à faire des affaires ensemble en 1989. Ils se considéraient aujourd'hui comme les meilleurs amis et leurs deux familles étaient très proches. Il leur était arrivé de parler de la procédure dont C______ faisait l'objet.

Son meilleur ami, CC______, voulait vendre son garage sis en BU______. AQ______ était intéressée mais ne pouvait pas payer la somme d'USD 25'000'000.- demandée en cash, comme CC______ le souhaitait pour éviter des démarches et des frais bancaires. CD______ avait alors proposé à C______ de vendre des céréales à AQ______, que cette dernière devrait payer à C______. AQ______ et F______ avaient dès lors passé des contrats à cette fin, documents dont CD______ avait été responsable. Les céréales avaient été livrées par bateau en BU______ où elles avaient été chargées sur le train à BO______ puis transportées jusqu'en BU______, à CS______. AQ______ s'était acquittée du prix de vente, soit environ USD 23'800'000.- à USD 24'000'000.-, entre avril et septembre 2004. CD______ s'était ensuite chargé de la revente des céréales contre un montant en espèces qu'il avait remis, pour le compte de AQ______, à CC______.

u.e. A______ et B______ ont conclu à ce que C______ soit condamné à leur verser les montants suivants :

- USD 4'800'000.- avec intérêts à 5% l'an depuis le 5 décembre 2008, USD 2'400'035.- avec intérêts à 5% l'an depuis le 11 juin 2009, USD 460'000.- avec intérêts à 5% l'an depuis le 29 juillet 2009, USD 1'360'000.- avec intérêts à 5% l'an depuis le 16 septembre 2009, USD 2'500'079.21 avec intérêts à 5% l'an depuis le 14 avril 2009, USD 8'000'081.74 avec intérêts à 5% l'an depuis le 11 juin 2009, USD 10'800'081.99 avec intérêts à 5% l'an depuis le 29 juillet 2009, USD 6'000'083.66 avec intérêts à 5% l'an depuis le 15 septembre 2009 et USD 2'000'079.87 avec intérêts à 5% l'an depuis le 23 mars 2009, ces sommes d'argent correspondant aux virements effectués sans droit par C______ par le débit du sous-compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______, en faveur de comptes dont il est l'ayant droit économique ;

- EUR 5'000'000.- avec intérêts à 10.5% l'an depuis le 2 mars 2009, soit le solde non remboursé du prêt octroyé le 15 avril 2002 ;

- EUR 134'135.71 avec intérêts à 5% l'an depuis le 1er janvier 2009, soit le solde du compte 1______/10______ de F______ auprès de la E______ au 31 décembre 2008 ;

- CHF 618'834.76 pour leurs frais de défense ;

- Ils ont enfin conclu à ce que leur soient alloués tous objets et valeurs confisqués, respectivement toute créance compensatrice de l'Etat à concurrence des dommages susvisés, qu'il leur soit donné acte de ce que, moyennant l'allocation requise, ils cédaient une part correspondante de leur créance à l'Etat, qu'il soit dit que les objets et valeurs séquestrés dont la confiscation n'aurait pas été ordonnée soient affectés au paiement de leur créance compensatrice et de leur indemnité de procédure, que soit ordonné le maintien du séquestre sur les objets et valeurs séquestrés dont la confiscation n'aurait pas été ordonnée, ceci jusqu'à l'achèvement de la procédure de recouvrement de leur créance compensatrice et de leur indemnité de procédure, et que C______ soit débouté de toutes autres ou contraires conclusions.

u.f. C______ a conclu à l'octroi d'une indemnité pour l'exercice raisonnable de ses droits de procédure à hauteur de CHF 456'565.50 (les tarifs horaires pratiqués varient de CHF 130.- à CHF 180.- pour les avocats stagiaires, de CHF 330.- à CHF 420.- pour les avocats collaborateurs et de CHF 490.- à CHF 550.- pour le chef d'étude), avec la précision que l'activité de deux défenseurs a été constamment nécessaire, en raison du volume et de la complexité de la cause, les parties plaignantes étant également assistées de plusieurs conseils, ainsi qu'à une indemnité de CHF 71'430.- au titre du dommage économique subi en raison du séquestre de comptes bancaires dont il était l'ayant droit durant la procédure et qu'il n'avait, par conséquent, pas pu utiliser (CHF 50'000.- au minimum), de ses frais de déplacement et de logement pour assister aux audiences (CHF 11'430.-), ainsi que de son gain manqué lors des audiences et des jours de déplacement y relatifs (CHF 10'000.-).

C. a. Par ordonnance du 2 juin 2016, la CPAR a ouvert une procédure écrite avec l'accord des parties.

b. Dans son mémoire d'appel du 2 août 2016, le MP renonce à ses conclusions préalables tendant, cas échéant, à ce que la CPAR lui renvoie son acte d'accusation afin qu'il soit complété, et persiste pour le surplus dans les conclusions de sa déclaration d'appel.

- Le MP renvoie la CPAR à l'exposé des faits de la cause figurant en pages 2 à 18 du jugement entrepris, qu'il ne critique pas.

- Comme l'avait retenu le Tribunal correctionnel, A______ avait oralement conclu avec C______ un contrat aux termes duquel le premier confiait au second une partie de sa fortune, le mandataire devant en disposer selon les instructions du mandant. L'argent avait été transféré sur le compte de la société du mandataire auprès de la E______. C______ était par conséquent entré en possession des valeurs patrimoniales appartenant à A______. Un tel rapport contractuel avait pour but/expliquait que C______ apparaisse vis-à-vis des banques comme l'ayant droit économique des fonds confiés.

- Le MP ne remettait pas en cause l'appréciation juridique des faits poursuivis, telle que figurant dans le jugement entrepris, concernant le nantissement d'un montant d'USD 5'300'000.-, le prêt d'une somme d'USD 5'300'000.- et l'utilisation d'un montant d'USD 7'300'000.-. Sur ces trois points, le jugement du Tribunal correctionnel n'était donc pas contesté.

- Par contre, les considérations des premiers juges concernant le transfert d'USD 23'000'000.- de AQ______ à F______ étaient contestées.

- Le Tribunal correctionnel avait considéré comme établi que A______ était le propriétaire des fonds déposés sur le compte 7______ de la société F______ auprès du G______. Il avait aussi retenu que A______ avait confié à C______ une somme d'USD 7'300'000.- lui appartenant, par virements d'USD 6'300'018.- le 6 avril 2001 et d'USD 1'000'024.- le 7 juillet 2008 sur le compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______. Il avait enfin constaté que le montant d'USD 23'000'000.- avait été crédité sur le sous-compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______ en 2004.

A______ était le seul ayant droit des avoirs déposés sur le sous-compte 1______/8______, en exécution du contrat de fiducie, même si C______ apparaissait comme unique ayant droit du compte général 1______, ce que le Tribunal correctionnel avait admis implicitement.

Comme l'avait dit le témoin BG______, les USD 23'000'000.- avaient été versés par la société AQ______ Il s'agissait d'honoraires. Cet argent n'avait rien à voir avec une prétendue vente de 80'000 tonnes de céréales, non documentée de façon crédible. A______ était au courant de l'arrivée des fonds, ce qui ressortait notamment du témoignage de BG______ et ne se concevait pas s'ils provenaient d'affaires menées par C______ pour lui-même.

Le Tribunal correctionnel n'avait pas tenu compte du témoignage de CJ______, selon lequel C______ lui avait aussi proposé la mise à disposition de sous-comptes pour ses affaires. Selon ce témoin, en novembre 2008, A______ lui avait dit que C______ n'exécutait plus ses instructions, concernant les fonds se trouvant sur le sous-compte 1______/8______. Par ailleurs, entre le 5 et le 7 décembre 2008, C______ avait admis, lors d'une conversation téléphonique avec le témoin, avoir perdu USD 11'000'000.- appartenant à A______, lui demandant d'intervenir auprès de ce dernier pour trouver une solution à l'amiable. Or, ce témoignage confirmait que A______ était l'ayant droit économique de la totalité des fonds déposés sur le sous-compte 1______/8______.

Si A______ avait effectivement changé de version s'agissant de la cause du versement des USD 23'000'000.-, parlant d'honoraires puis d'autres types d'affaires, cela ne signifiait pas encore qu'il n'était pas le propriétaire de cet argent.

En disposant des fonds sans instructions expresses de son mandant, C______ s'était rendu coupable d'abus de confiance. Il n'y avait pas place pour le doute.

- Dans l'hypothèse d'une confirmation de l'acquittement prononcé en première instance, CHF 23'344.55 devaient être retranchés à l'indemnité allouée pour les frais de défense, ce montant concernant d'inutiles consultations du dossier en 2014 et 2015, durant des périodes sans actes d'instruction.

La présence de deux avocats à tous les stades de la procédure n'était pas justifiée, ce qui devait conduire à une réduction d'un tiers du montant des honoraires facturés.

Enfin, seul le dommage économique établi devait être retenu, soit celui consécutif aux vacations (frais de déplacements et d'hôtels), par CHF 11'430.-.

Ainsi, le montant de l'indemnité fondée sur les dispositions de l'art. 429 CPP devait être fixé au total à CHF 279'550.65.

c. Dans leur mémoire d'appel du 26 juillet 2016, A______ et B______ persistent dans les conclusions de leur déclaration d'appel et exposent en substance ce qui suit :

- Le Tribunal correctionnel avait retenu que A______ avait fait créditer le sous-compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______ d'un montant d'USD 30'300'000.-, dont USD 7'300'000.- provenant de sa fortune personnelle. USD 6'300'018.- avaient été transférés le 6 avril 2001 et USD 1'000'024.- le 7 juillet 2008. Sur ce dernier montant, USD 400'000.- avaient été retirés du même sous-compte le 8 juillet 2008 et USD 600'000.- avaient été inclus dans le prêt d'USD 6'200'000.- octroyé par A______ à BF______, ayant droit économique de AX______, le 7 juillet 2008. Cette société avait remboursé le prêt, en capital et intérêts, par un versement de USD 7'362'500.-, le 14 septembre 2009, sur le sous-compte 1______/8______ de F______. C______ avait alors "volé" la totalité du montant. Ainsi, les USD 1'000'024.- n'avaient pas été transférés aux sociétés BC______ et BC______ BW______ durant la période du 24 janvier au 27 mai 2008, contrairement à ce que le Tribunal correctionnel avait retenu dans son jugement, en page 36, sous ch. 4.2.2.1 et 4.2.3.3.

- En page 31 du jugement attaqué, sous ch. 4.2.2.2, le Tribunal correctionnel mentionnait le virement, en 2004, sur le sous-compte 1______/8______ de F______, de USD 23'000'000.-, alors qu'il s'agissait d'USD 22'104'278.50, versés en trois fois, soit USD 12'144'649.50, USD 7'778'7895 et USD 2'180'844, du 2 avril au 17 septembre 2004, selon les trois affidavit signés par CQ______.

C______ avait demandé à A______ d'effectuer ces transferts par l'intermédiaire des comptes des sociétés BL______ et AQ______, lesquelles avaient reçu l'argent des sociétés BK______, BP______, BR______, BN______, BQ______ et CT______. L'affirmation de C______, selon laquelle il ne connaissait pas ces sociétés était mensongère, ce qui ressortait de ses propres déclarations, des contrats conclus pour justifier ces opérations et des pièces bancaires. C______ tentait par ce montage de rendre plus difficile l'établissement de l'origine des fonds.

Il n'y avait aucune divergence entre les déclarations de A______ et celles du témoin BG______ au sujet de la cause des transferts susmentionnés, ce dernier ne disposant, en 2004, pas d'informations complètes sur la provenance des fonds.

CQ______, devenu directeur de AQ______ en 2011, avait établi les trois affidavit susmentionnés sur la base des relevés de comptes de la AR______ pour 2004. Le Tribunal correctionnel aurait ainsi dû accorder à ces pièces toute leur force probante.

Il n'y avait aucune contradiction entre les déclarations de A______ et celles de Me AE______, lorsque ce dernier disait n'avoir pas entendu parler de AQ______ avant 2011. En effet, A______ avait acquis cette société en 2011. Il n'en était donc pas propriétaire en 2004, lorsqu'elle avait été utilisée pour les transferts de fonds sur le sous-compte 1______/8______ de F______. Il était possible que Me AE______ n'ait pas entendu parler de cette société à l'époque. A partir de 2011, CQ______ avait reconstitué le cheminement des fonds grâce à des informations qui lui avaient été remises par A______ et Me AE______.

- Les allégations de A______ relatives à la provenance des fonds avaient été confirmées par les relevés bancaires, les swifts et les déclarations des témoins. Il n'y avait par conséquent pas place pour le doute sur ce point.

- S'agissant de la première occurrence retenue par le MP dans son acte d'accusation, soit le nantissement d'USD 5'300'000.- en faveur des sociétés AK______ et AI______, il ressortait effectivement des "board resolutions" de F______, signés par A______, C______ et H______, que les avoirs déposés sur le compte de F______ auprès de la E______ pouvaient être nantis en faveur de AI______ et de AK______. Il ne s'agissait toutefois pas d'un accord général donné par A______ d'utiliser à de telles fins les avoirs se trouvant sur les sous-comptes du compte 1______. L'utilisation de ces fonds devait faire l'objet d'une décision orale à chaque fois. Devenu un élu de M______, A______ ne pouvait plus donner d'autorisation écrite relative à des avoirs détenus à l'étranger. Les autorisations orales étaient données par l'intermédiaire de BG______. A______ suivait l'utilisation de ses avoirs par C______. C'est ainsi qu'il avait découvert le détournement par ce dernier de la somme de USD 5'300'000.-, comportement constitutif d'abus de confiance.

- S'agissant de la seconde occurrence retenue par le MP dans son acte d'accusation, soit de l'utilisation à d'autres fins que celles prévues d'un montant de USD 5'300'000.-, objet du prêt de A______ à F______, c'était à tort que le Tribunal correctionnel avait retenu que les parties n'avaient pas spécifié d'affectation particulière des fonds. Ceux-ci devaient servir à financer des transactions sur les céréales et dans le commerce d'olives. Les fonds prêtés les 15 avril 2002, 25 novembre 2003 et 23 janvier 2007 n'avaient pas été remboursés à l'échéance du 2 mars 2009. C______ se les était appropriés et les avait utilisés pour octroyer des prêts à certaines de ses sociétés.

En agissant de la sorte, C______ s'était rendu coupable d'abus de confiance.

d. Aux termes de son mémoire de réponse du 31 octobre 2016, C______ conclut au rejet des appels formés par le MP et les parties plaignantes, à la confirmation du jugement entrepris et à l'indemnisation de ses frais de défense pour la procédure d'appel par CHF 70'671.70, les frais de la procédure d'appel devant être laissés à la charge de l'Etat.

- C______ renvoie la CPAR à l'exposé des faits figurant dans le jugement attaqué en pages 2 à 18, qu'il ne critique pas.

- Il n'avait jamais conclu de contrat de fiducie avec A______ aux fins de gérer la fortune de celui-ci et les sous-comptes de F______ auprès de la E______ n'avaient pas été mis à son unique disposition. D'ailleurs, selon les formules A, signées en 1998 et 2001, la seconde fois en présence de A______, C______ apparaissait comme l'ayant droit du compte général 1______ de F______ auprès de la E______.

A______ n'avait pas besoin de C______ ni de F______. En effet, la directive des banques sur laquelle il se fondait concernait en réalité les sociétés offshore ayant une activité commerciale en M______. Il n'était pas question de résidence en Y______. Par ailleurs, C______ était résident en M______ depuis 1997. Durant l'année 2000, A______ avait également ouvert trois comptes bancaires à AN______, à la CM______, indiquant être domicilié à R______/CU______. Il apparaissait sur les formules A comme ayant droit économique des avoirs déposés sur ces comptes. Ces éléments montraient l'inexistence du contrat de fiducie allégué.

- Le Tribunal correctionnel avait par contre retenu avec raison l'existence d'un rapport contractuel oral visant au transfert d'une partie de la fortune de A______ sur les comptes de F______. En effet, certains montants avaient été versés sur ces comptes, vu le rôle d'apporteur d'affaires joué par A______. Il en avait toutefois été tenu compte dans le prêt conclu par écrit en 2002 entre eux, de sorte qu'il ne lui devait plus rien à ce titre.

- Sur les USD 7'300'000.- provenant du compte 7______ de F______ auprès du G______, USD 2'300'000.- appartenaient auparavant déjà à F______, USD 3'695'000.- revenaient à F______ dans le cadre d'une opération portant sur des céréales et les fonds provenant des comptes personnels de A______ et de B______, ainsi que ceux crédités par les sociétés V______, BX______ et AB______, avaient été pris en considération lors de la conclusion du prêt d'avril 2002.

- Au surplus, l'arrière-plan économique de l'opération de 2004 (les quatre contrats portant sur la vente d'environ 80'000 tonnes de céréales) était documenté, de sorte qu'il y avait lieu de retenir que l'argent versé par AQ______ à F______ appartenait à cette société et à ses ayants droit économiques, soit C______ et H______. Aucun élément de la procédure ne permettait de retenir la fausseté des documents produits au sujet de cette transaction. C______ tenait, cas échéant, les originaux à disposition de la justice.

L'on ne pouvait accorder de valeur probante au témoignage de CJ______, qui affirmait que C______ avait volé l'argent de A______, vu le lien d'amitié liant ces deux personnes.

A______ n'avait pas mentionné le montant d'USD 23'000'000.- ni le nom de la société AQ______ dans sa plainte du 11 juillet 2011 ni lors de son audition du 22 septembre 2011, ce qui montrait qu'il ne connaissait pas l'arrière-plan économique de la transaction passée entre AQ______ et F______.

A______ avait varié sur la provenance des fonds, parlant de commissions, puis de versements effectués par plusieurs de ses sociétés, qu'il voulait transférer à F______, de sorte que l'on ne pouvait accorder de crédibilité à ses allégations.

Lorsque le témoin BG______ affirmait que les fonds étaient des bénéfices réalisés par A______ dans le cadre d'affaires réalisées avec AQ______, il ne faisait que répéter ce que A______ lui avait dit.

Ce dernier n'avait pas apporté la preuve de ce que les USD 23'000'000.- lui appartenaient. Il y avait à tout le moins un doute à ce sujet, qui devait profiter à la défense.

- Dans l'hypothèse où la CPAR retiendrait que A______ était propriétaire de ces fonds, force serait alors de constater que ni lui ni B______ n'avaient apporté la preuve de ce qu'ils étaient en 2004 les actionnaires des sociétés dont provenaient l'argent. Ils n'avaient par conséquent subi qu'un dommage indirect et n'avaient pas la qualité de lésé ni par conséquent celle de partie plaignante.

- S'agissant du nantissement de USD 5'300'000.-, les "board resolutions" n'étaient pas ceux des sociétés AK______ et AI______ mais émanaient bien de F______ et permettaient de nantir les avoirs de la société pour garantir les obligations des deux premières sociétés, sans conditions. Ces documents ayant été signés par A______, le nantissement incriminé ne pouvait être constitutif d'abus de confiance.

- Les contrats de prêt de 2002 et 2007 ne prévoyaient aucune affectation précise des fonds, ce qui excluait aussi la commission d'un abus de confiance.

- Pour le surplus, A______ s'était approprié environ USD 50'000'000.- appartenant à F______, somme se composant d'actions de CF______ et CG______, actuellement d'une valeur d'USD 19'000'000.-, d'USD 8'000'000.- investis dans une société CV______ CB______ BC______ (CB______), d'USD 8'800'000.- prêtés à la société CV______ CB______ BW______ (CA______), les intérêts de ces deux prêts se montant à plus d'USD 6'000'000.-, d'USD 1'500'000.- prêtés à CW______, d'USD 4'850'000.- et USD 250'000.- prêtés à CY______, d'USD 3'000'000.- prêtés à CX______, d'USD 250'000.- dus par BB______ et d'USD 300'000.- dus à titre de dépens en exécution d'une décision des tribunaux des AH______, devant lesquels A______ avait abandonné la procédure qu'il avait initiée.

C______ avait entrepris plusieurs procédures pour tenter de récupérer les sommes mentionnées ci-dessus, à l'encontre des sociétés CX______, CA______, CB______ et AX______, sans que l'on connaisse leur issue.

- Enfin, l'indemnité allouée par les premiers juges pour les frais de défense était justifiée, y compris l'assistance constante de C______ par deux avocats, vu la complexité du dossier, son volume et la tenue d'audiences en langues étrangères.

- C______ produit la note d'honoraires de ses conseils du 31 octobre 2016 au montant de CHF 70'671.70, pour leurs prestations durant la procédure d'appel, comprenant 185h20 facturées à des tarifs de CHF 180.- (stagiaire), CHF 420.- (collaborateur) et CHF 550.- (chef d'étude).

e. Dans son courrier du 21 septembre 2016, le Tribunal correctionnel conclut au rejet des appels et à la confirmation de son jugement.

f. Par courriers du 1er novembre 2016, la CPAR a informé les parties que la cause était gardée à juger sous trente jours. Aucune réplique n'a été déposée.

D. C______ est né le ______ 1959. Selon ses déclarations, il gagne environ USD 100'000.- par an, est propriétaire de biens immobiliers pour un montant approximatif d'USD 1'000'000.- et n'a pas de dettes. Ses participations dans différentes sociétés ont une valeur située entre USD 80'000'000.- et USD 120'000'000.-. Il est marié et a quatre enfants, âgés de 13, 16, 26 et 28 ans.

C______ n'a aucun antécédent judiciaire en Suisse.

EN DROIT :

1. Les appels sont recevables pour avoir été interjetés et motivés selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).

La partie qui attaque seulement certaines parties du jugement est tenue d'indiquer dans la déclaration d'appel, de manière définitive, sur quelles parties porte l'appel, à savoir (art. 399 al. 4 CPP) : la question de la culpabilité, le cas échéant en rapport avec chacun des actes (let. a) ; la quotité de la peine (let. b) ; les mesures qui ont été ordonnées (let. c) ; les prétentions civiles ou certaines d'entre elles (let. d) ; les conséquences accessoires du jugement (let. e) ; les frais, les indemnités et la réparation du tort moral (let. f) ; les décisions judiciaires ultérieures (let. g).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH ; RS 0.101) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. ; RS 101) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, ce principe signifie qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité de l'accusé, et non à ce dernier de démontrer son innocence. Il est violé lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que l'accusé n'a pas prouvé son innocence ; lorsqu'il résulte du jugement que, pour être parti de la fausse prémisse qu'il incombait à l'accusé de prouver son innocence, le juge l'a condamné parce qu'il n'avait pas apporté cette preuve (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 40 et les arrêts cités) ou encore lorsque le juge condamne le prévenu au seul motif que sa culpabilité est plus vraisemblable que son innocence (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1145/2014 du 26 novembre 2015 consid. 1.2 et 6B_748/2009 du 2 novembre 2009 consid. 2.1).

Comme principe présidant à l'appréciation des preuves, la présomption d'innocence est violée si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes. Il ne doit pas s'agir de doutes abstraits ou théoriques, qui sont toujours possibles ; ces principes sont violés lorsque l'appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à la culpabilité de l'accusé, autrement dit lorsque le juge du fond retient un état de fait défavorable à l'accusé alors qu'il existe un doute raisonnable quant au déroulement véritable des événements (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_784/2011 du 12 mars 2012 consid. 1.1).

2.2. Commet un abus de confiance au sens de l'art. 138 ch. 1 al. 2 CP, celui qui, sans droit, aura employé à son profit ou au profit d'un tiers, des valeurs patrimoniales qui lui avaient été confiées.

Sur le plan objectif, l'infraction suppose qu'une valeur ait été confiée, autrement dit que l'auteur ait acquis la possibilité d'en disposer, mais que, conformément à un accord (exprès ou tacite) ou un autre rapport juridique, il ne puisse en faire qu'un usage déterminé, en d'autres termes, qu'il l'ait reçue à charge pour lui d'en disposer au gré d'un tiers, notamment de la conserver, de la gérer ou de la remettre (ATF 133 IV 21 consid. 6.2 p. 27 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_635/2015 du 9 février 2016 consid. 3.1). Le comportement délictueux consiste à utiliser la valeur patrimoniale contrairement aux instructions reçues, en s'écartant de la destination fixée (ATF 129 IV 257 consid. 2.2.1 p. 259).

Il doit premièrement exister un rapport de confiance entre le lésé et l'auteur. Celui-ci peut trouver sa source dans un rapport contractuel exprès ou tacite (une simple relation de fait suffit) ou dans un fondement légal. Ce rapport de confiance permet à l'auteur d'entrer en possession de valeurs patrimoniales et détermine l'usage qu'il doit en faire, dans l'intérêt du lésé ou d'un tiers (ATF 133 IV 21 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_91/2007 du 8 juillet 2007 consid. 6.1 et 6P ; 156/2005 du 24 mars 2006 consid. 4.1).

Fondé sur le rapport de confiance précité, l'auteur doit en sus acquérir un droit de disposer desdites valeurs patrimoniales dont le lésé reste à tout le moins l'ayant droit économique, l'auteur pouvant en devenir le propriétaire selon les règles de droit civil (ATF 133 IV 21 consid. 6.2 ; arrêt TF 6B_312/2009 du 17 juillet 2009 consid. 2.2). Il suffit à cet égard que l'auteur se voie conférer la faculté de disposer des valeurs patrimoniales sans le concours du lésé, peu importe que ce dernier conserve lui-même cette faculté ou non (ATF 133 IV 21 consid. 6.2 ; ATF 119 IV 127 consid. 2 ; 109 IV 27 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_33/2008 du 12 juin 2008 consid. 3.1).

Il faut enfin une violation du rapport de confiance. Elle prend la forme d'une utilisation sans droit des valeurs patrimoniales confiées, soit tout comportement par lequel l'auteur utilise ces dernières en violant les instructions reçues et les détourne de la destination fixée en vertu du rapport de confiance (ATF 129 IV 257 consid. 2.2.1 ; ATF 119 IV 127 consid. 2). Cette violation du rapport de confiance doit en outre causer un dommage au lésé (ATF 111 IV 19 consid. 5 ; ATF 124 IV 241 consid. 4c et 4d ; arrêts du Tribunal fédéral 6P.46/2004 et 6S.141/2004 du 11 août 2004 consid. 3.2).

L'alinéa 2 de l'art. 138 ch. 1 CP ne protège pas la propriété, mais le droit de celui qui a confié la valeur patrimoniale à ce que celle-ci soit utilisée dans le but qu'il a assigné et conformément aux instructions qu'il a données ; est ainsi caractéristique de l'abus de confiance le comportement par lequel l'auteur démontre clairement sa volonté de ne pas respecter les droits de celui qui lui fait confiance (ATF 129 IV 257 consid. 2.2.1 p. 259 ; 121 IV 23 consid. 1c p. 25 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_507/2015 du 25 février 2016 consid. 1).

Une chose obtenue par l'auteur à la faveur d'une tromperie ne lui est en règle générale pas confiée. Il en va en revanche différemment lorsque cette tromperie a précisément eu pour but que la victime confie ce bien à l'auteur (ATF 133 IV 21 consid. 6.2 p. 29, 117 IV 429 consid. 3c p. 436).

S'agissant du transfert d'une somme d'argent, on peut concevoir deux hypothèses : soit les fonds sont confiés à l'auteur par celui qui les lui remet, soit les fonds sont confiés par celui en faveur duquel l'auteur les encaisse. Pour que l'on puisse parler d'une somme confiée, il faut cependant que l'auteur agisse comme auxiliaire du paiement ou de l'encaissement, en tant que représentant direct ou indirect, notamment comme employé d'une entreprise, organe d'une personne morale ou fiduciaire. Cette condition n'est pas remplie lorsque l'auteur reçoit l'argent pour lui-même, en contrepartie d'une prestation qu'il a fournie pour son propre compte, même s'il doit ensuite verser une somme équivalente sur la base d'un rapport juridique distinct. L'inexécution de l'obligation de reverser une somme ne suffit pas à elle seule pour constituer un abus de confiance (ATF 118 IV 239 consid. 2b, spéc. p. 241 s. et les références citées). Les contrats synallagmatiques ne font naître en principe que des prétentions à une contre-prestation et non une obligation de conservation. Il n'y a ainsi pas de valeur confiée lorsqu'une partie à un contrat reçoit de l'argent pour son propre compte, en contrepartie d'une prestation qu'elle doit elle-même fournir (ATF 133 IV 21 consid. 7.2 p. 30 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_312/2009 du 17 juillet 2009).

Quant au contrat de prêt en particulier, à teneur de la jurisprudence, il ne saurait fonder une infraction à l'art. 138 ch. 1 al. 2 CP que lorsque l'affectation de la valeur patrimoniale prêtée est clairement prédéfinie et sert dans le même temps à assurer la couverture du risque du prêteur ou à diminuer son risque de perte. L'utilisation de l'argent prêté contrairement à sa destination convenue peut dès lors être constitutive d'un abus de confiance lorsqu'elle remet en cause cet objectif et s'avère propre à causer un dommage au prêteur (ATF 129 IV 257 consid. 2.2.2 et 2.3 ; M. DUPUIS [et al.], Petit commentaire du Code pénal, Bâle 2012, note 35 ad art. 138 et les références citées).

Du point de vue subjectif, l'auteur doit avoir agi intentionnellement et dans un dessein d'enrichissement illégitime ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime. Celui qui dispose à son profit ou au profit d'un tiers d'un bien qui lui a été confié et qu'il s'est engagé à tenir en tout temps à disposition de l'ayant droit s'enrichit illégitimement s'il n'a pas la volonté et la capacité de le restituer immédiatement en tout temps. Celui qui ne s'est engagé à tenir le bien confié à disposition de l'ayant droit qu'à un moment déterminé ou à l'échéance d'un délai déterminé s'enrichit illégitimement que s'il n'a pas la volonté et la capacité de le restituer à ce moment précis (ATF 118 IV 27 consid. 3a p. 29 s.). Le dessein d'enrichissement illégitime fait en revanche défaut si, au moment de l'emploi illicite de la valeur patrimoniale, l'auteur en paie la contre-valeur, s'il avait à tout moment ou, le cas échéant, à la date convenue à cet effet, la volonté et la possibilité de le faire ("Ersatzbereitschaft" ; ATF 118 IV 32 consid. 2a p. 34) ou encore s'il était en droit de compenser (ATF 105 IV 29 consid. 3a p. 34 s.). Le dessein d'enrichissement illégitime peut être réalisé par dol éventuel (ATF 133 IV 21 consid. 6.1.2 p. 27 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_635/2015 du 9 février 2016 consid. 3.1).

2.3. L'acte d'accusation du MP retient qu'en février/mars 2000, le plaignant et l'intimé ont conclu oralement un contrat de fiducie, aux termes duquel le premier aurait confié au second une partie de son importante fortune aux fins de la conserver et de la gérer selon ses instructions.

- Les deux hommes ont fait connaissance en 1995/1996, alors que le plaignant avait l'intention d'investir de l'argent en Y______, où il avait ouvert diverses relations bancaires, alors que l'intimé était domicilié dans ce pays.

Selon le plaignant, dont les déclarations sont confirmées par plusieurs témoins, Me AE______, BG______ et CJ______, l'intimé lui avait tout d'abord servi d'interprète en langue anglaise, puis une relation amicale et de confiance s'était établie entre eux. En 1999, le plaignant avait notamment octroyé un prêt personnel à l'intimé, ce que celui-ci admet. Une collaboration avait débuté dans le cadre de diverses affaires.

En 2000, les banques avaient décidé de clôturer les comptes détenus par des ressortissants M______, ce qui est confirmé non seulement par Me AE______, avocat du plaignant, mais aussi par un courrier de la X______ du 5 octobre 1999 figurant à la procédure.

Début 2000, une réunion avait eu lieu entre le plaignant, Me AE______ et l'intimé pour trouver une solution à cette situation. L'intimé avait proposé au plaignant de transférer ses avoirs, notamment détenus à la X______ et à la AC______, sur le compte 1______ d'une société F______, qui lui appartenait, auprès de la E______ à Genève. Il est établi que cette relation était composée de plusieurs sous-comptes, par monnaie. Alors que le plaignant soutient que les sous-comptes 8______, 9______ et 10______ avaient été mis à son unique disposition, l'intimé admet que le plaignant pouvait utiliser le sous-compte 8______, mais de manière non exclusive.

CJ______ a indiqué que l'intimé lui avait fait la même proposition, néanmoins déclinée.

Le 27 mars 2000, le plaignant et l'intimé s'étaient rendus au G______ à AN______, où ils avaient ouvert un compte 7______ au nom de F______, dont l'ayant droit économique était le plaignant, comme en témoignent la formule A et les déclarations de CK______ et CL______, alors collaborateurs de la banque. Ces derniers ont précisé qu'en 2000/2001 et 2004, le plaignant n'avait plus voulu apparaître comme ayant droit vis-à-vis de la banque. Les allégations de l'intimé, selon lesquelles il aurait été l'ayant droit des avoirs se trouvant sur ce compte ne trouvent pas d'appui dans la procédure.

Le 28 mars 2000, les deux hommes s'étaient rendus à la E______ à Genève, où un pouvoir de signature avait été donné au plaignant sur le compte général de F______, dont il est admis que l'intimé figure comme ayant droit économique sur les formulaires A.

La mise en place d'une telle structure ne se comprend que si le plaignant, qui ne voulait plus apparaître en son nom, avait accepté la proposition de l'intimé de déposer ses fonds sur l'un au moins des sous-comptes du compte 1______ de F______, ce que confirment notamment les versements opérés en avril 2000 à hauteur de USD 6'300'000.-, dont il sera question ci-dessous.

Les déclarations du plaignant et des témoins susmentionnés permettent aussi de retenir que le premier donnait à BG______, Me AE______ et à l'intimé des instructions que ceux-ci devaient exécuter, BG______ recevant ensuite les documents relatifs à l'exécution des transferts de fonds ordonnés. Plusieurs témoins ont en particulier indiqué qu'il y avait un rapport hiérarchique entre le plaignant et l'intimé, lequel n'agissait que sur instructions.

Dans ses écritures d'appel, l'intimé admet expressément, à la suite des premiers juges (jugement TCO p. 29), "l'existence d'un rapport contractuel oral" avec le plaignant, relatif au transfert d'une partie de la fortune de ce dernier sur le compte de F______.

Il avait donc à tout le moins été convenu début 2000 entre les parties que des avoirs dont le plaignant et son épouse étaient les ayants droit économiques soient conservés par la société de l'intimé et qu'il en soit disposé selon leurs instructions, ce qui avait constitué le fondement d'un rapport de confiance.

Ces avoirs étaient par ailleurs entrés dans la possession ou à tout le moins la copossession de l'intimé, lequel était, vis-à-vis de la E______, non seulement propriétaire de la société mais aussi ayant droit économique du compte général 1______ de F______, avec pouvoir de signature.

La CPAR retiendra par conséquent, comme les premiers juges, que les fonds transférés par le plaignant en 2000/2001 auprès de la E______ étaient confiés à l'intimé, au sens de l'art. 138 CP.

- Il s'agit ensuite de déterminer quelles ont été les valeurs patrimoniales confiées par les plaignants à l'intimé sur le sous-compte 1______/8______ de F______.

- Dans son acte d'accusation (p. 5, par. 28), le MP retient tout d'abord une somme d'USD 7'300'000.-, faisant partie de la fortune personnelle des plaignants.

Il ressort des pièces bancaires figurant à la procédure que le plaignant a effectué, pour l'essentiel en 2000 et 2001, de nombreux et importants virements du compte joint dont il était titulaire avec son épouse et des comptes de sociétés qu'il contrôlait (en particulier AA______, AB______, V______, BX______), sur le compte 7______ de F______ au G______ à AN______, dont il était l'ayant droit économique.

Après avoir soutenu être l'ayant droit économique du compte 7______ et affirmé que les avoirs s'y trouvant n'appartenaient pas au plaignant, l'intimé a admis que les sommes de GBP 630'000.-, GBP 356'357.-, GBP 290'000.-, USD 656'000.-, USD 247'000.- et USD 201'950.-, transférées en 2000, 2001 et 2004, appartenaient à A______.

L'intimé a néanmoins affirmé qu'une somme d'USD 2'300'000.- appartenait à F______, allégué ne trouvant pas d'appui dans la procédure, en particulier s'agissant de l'origine de ces fonds et de leur arrière-plan économique. USD 3'695'000.- reviendraient à F______, représentant le produit d'une transaction sur des céréales. Là encore, les faits ne sont pas établis. Enfin, l'intimé a prétendu qu'il avait été tenu compte des fonds provenant des comptes des plaignants lors de l'établissement du décompte du 15 avril 2002, ayant pris la forme d'un contrat de prêt de EUR 3'400'000.-, ce que les éléments figurant à la procédure ne confirment pas non plus.

Le plaignant a viré GBP 1'040'010.44 le 20 février 2001, USD 6'300'018.- le 6 avril 2001, GBP 300'010.- le 9 avril 2001 et USD 1'000'024.24 le 7 juillet 2008 du compte 7______ au sous-compte 1______/8______ de F______.

Au vu de ce qui précède, il y a lieu de retenir que le plaignant et son épouse étaient les ayants droit économiques de ces fonds, lesquels sont entrés à tout le moins dans la copossession de l'intimé, qui devait les conserver et ne les utiliser que conformément aux instructions du plaignant. Cet argent avait donc bien été confié à l'intimé.

- Dans son acte d'accusation (p. 5, par. 29), le MP retient ensuite une somme d'USD 23'000'000.-, virée d'avril à septembre 2004 par AQ______ sur le sous-compte 1______/8______ de F______, représentant des honoraires dus au plaignant.

Le plaignant a indiqué qu'en 2004, il faisait campagne en vue de son élection comme Sénateur de M______. A ce titre, il ne pouvait plus apparaître en qualité d'ayant droit économique de fonds déposés à l'étranger. Il avait ainsi décidé de transférer d'importantes sommes d'argent des comptes de l'une de ses sociétés, BK______, sur le sous-compte 1______/8______ de F______, les fonds étant ainsi confiés à l'intimé comme en 2000/2001.

Selon le plaignant, l'intimé lui avait alors demandé de ne pas procéder à des transferts directs du compte de BK______ sur celui de F______, mais de passer par ceux des sociétés BL______ et AQ______, qu'il contrôlait, en indiquant lors de chaque virement un motif contraire à la réalité, soit des paiements intervenant dans le cadre de transactions sur du pétrole. L'intimé avait ajouté avoir un intérêt personnel à agir ainsi. Le plaignant avait accepté de procéder de la sorte, faisant confiance à l'intimé, ce qui ne manque pas d'étonner, de la part d'un homme d'affaires avisé, docteur en économie, ancien directeur général de banque et rompu au trading de matières premières et aux opérations financières de tous ordres, telles que l'octroi de prêts importants à de nombreuses sociétés.

Entre le 31 mars et le 14 septembre 2004, les sociétés BK______, mais aussi BN______, BR______ et BP______, que le plaignant qualifie de partenaires commerciaux, ont effectué septante virements sur le compte de BL______, pour environ USD 22'000'000.-.

Sur l'origine des fonds, le plaignant et certains témoins ont beaucoup varié. Le MP retient dans son acte d'accusation qu'il s'agit d'honoraires dus au plaignant, sans indiquer la nature des prestations ayant justifié lesdits honoraires, d'un montant tout de même très important. Les sociétés partenaires du plaignant mentionnées ci-dessus auraient versé des commissions en lien avec des opérations de trading sur les céréales. Devant le Tribunal correctionnel, le plaignant est revenu sur ses précédentes déclarations, soutenant que les fonds transférés sur le compte de BL______ provenaient en partie d'un simple transfert de son propre patrimoine et, pour le solde, de bénéfices réalisés à l'occasion d'investissements dont la nature n'a pas été indiquée. Le plaignant ne pouvait expliquer que CQ______ parle de commissions dans ses attestations rédigées sur la base des pièces bancaires et des informations qu'il lui avait founies ni que BG______ dise que les fonds constituaient des bénéfices réalisés dans le cadre d'affaires conclues avec AQ______. Enfin, le plaignant a affirmé qu'il discutait toujours des schémas de transferts de fonds avec son avocat, Me AE______. Or, ce dernier a indiqué n'avoir pas connu l'existence de la société AQ______ avant 2011, année durant laquelle le plaignant en avait fait l'acquisition.

De telles circonstances et incertitudes sur l'origine des fonds entament la crédibilité des déclarations du plaignant.

Par ailleurs, l'intimé a allégué que les fonds virés du compte de AQ______ sur celui de F______ provenaient de la vente par la seconde à la première de plus de 80'000 tonnes de céréales, pour un prix total d'environ USD 23'000'000.-. AQ______ avait revendu les céréales contre des espèces remises à un certain CC______, en paiement du prix d'un grand garage dont ce dernier était propriétaire à CS______, en BU______. CC______ aurait souhaité "du cash" afin de régler certaines de ses dettes/d'éviter des frais bancaires. CD______, de AQ______, un ami de l'intimé avec lequel il s'est entretenu de la procédure pénale pendante à Genève, a confirmé la réalité de cette opération, ajoutant qu'CC______ était son meilleur ami. Il y a donc lieu d'apprécier les déclarations de ce témoin avec beaucoup de circonspection.

L'intimé a produit copie de quatre contrats passés entre F______ et AQ______ les 31 mars (15______ 21), 1er avril (15______ 22), 31 mai (15______ 23) et 10 août 2004 (15______ 24), relatifs à la vente des céréales. Aucun autre document n'a été versé à la procédure concernant ces transactions, réalisées, selon l'intimé, par l'intermédiaire de sa société AZ______, disparue depuis lors.

Suite à la requête du plaignant, les douanes BU______ ont indiqué n'avoir pas retrouvé la trace des livraisons effectuées, selon l'intimé, à la frontière avec BU______.

Il apparaît que, du 2 avril au 17 septembre 2004, le compte de BL______ auprès de la AR______, en BU______, a été débité à trente-quatre reprises de montants, ne correspondant pas à ceux virés par le plaignant des comptes de ses sociétés et de ceux de ses partenaires, totalisant USD 15'278'677.-, aux fins de créditer le compte de AQ______ dans la même banque, avec des indications relatives à de nombreux contrats, dont les dates de conclusion ne coïncident pas avec celles des quatre conventions susmentionnées.

Enfin, entre le 2 avril et le 17 septembre 2004, des dizaines de versements ont été effectués par AQ______ sur le sous-compte 1______/8______ de F______ auprès de la E______, pour un montant total d'USD 22'604'298.-, faisant expressément référence aux quatre contrats susmentionnés.

Le plaignant soutient que les quatre contrats produits par l'intimé sont des faux et que les transactions dont ils font état n'ont jamais existé.

Il est vrai que ces transactions et leur cause, soit la remise d'espèces à hauteur de USD 23'000'000.- à un BT______ afin de lui permettre de payer ses dettes/d'éviter des frais bancaires, laissent pour le moins perplexe. Les contrats produits ne figurent à la procédure qu'en copies, même si l'intimé avait indiqué tenir les originaux à disposition de la justice. Ils ne contiennent rien sur le for en cas de litige ni sur le droit applicable. Les douanes BU______ n'ont pas trouvé trace de ces opérations. L'on ne comprend pas pour quelle raison l'intimé aurait fait virer des fonds sur le sous-compte mis à disposition du plaignant et non sur les rubriques du compte 1______ qu'il contrôlait. BG______ a déclaré que le plaignant lui avait annoncé des entrées d'argent, ce qui n'est compréhensible que si ce dernier avait connaissance de leur cause. Or, il n'a pas été allégué que l'intimé aurait informé le plaignant de paiements devant intervenir sur le sous-compte 8______ en exécution de transactions portant sur des céréales. Enfin, les transferts de fonds sont tous intervenus durant la même période, courant 2004. Ces éléments vont dans le sens de la thèse soutenue par le plaignant.

Il n'en reste pas moins que les avis de crédit du sous-compte 8______ de F______ en 2004 font référence aux contrats produits par l'intimé, ce qui semble exclure l'hypothèse retenue par les premiers juges, d'une confection ultérieure de ces documents, en 2008 ou 2009, aux seules fins de justifier des détournements de fonds commis à cette époque. Une autre éventualité serait qu'en 2004, l'intimé aurait obtenu du plaignant qu'il accepte les modalités de transfert des fonds finalement appliquées, ayant déjà l'intention d'être en mesure, ultérieurement, d'alléguer être l'ayant droit économique des fonds pour pouvoir se les approprier. La procédure ne contient toutefois pas d'éléments suffisants permettant de retenir un tel scénario. En définitive, la fausseté des contrats produits n'est pas établie à satisfaction.

A cela s'ajoute le fait que d'innombrables opérations se sont déroulées sur le sous-compte 8______ de F______ entre 2004 et 2008, le plaignant mentionnant par exemple des prêts accordés à diverses sociétés à hauteur d'USD 52'350'000.- durant la seule année 2008, notamment à AX______ et USD 16'800'000.- à ses sociétés CA______ et CB______, prêt non remboursé mais dont le plaignant admet que les fonds ont finalement été utilisés pour d'autres opérations, restant ainsi dans sa sphère de possession. L'on ne sait pas si la convention orale conclue en 2000 entre le plaignant et l'intimé était toujours d'actualité en 2008/2009 ou si les deux hommes entretenaient alors de simples relations d'affaires, sans qu'il soit encore question de conservation ou de gestion de fonds appartenant au plaignant.

Confrontée à ces éléments, la CPAR doit constater qu'il subsiste un doute insurmontable au sujet de l'origine et de l'identité de l'ayant droit des USD 23'000'000.- mentionnés dans l'acte d'accusation du MP, de sorte qu'il ne peut être retenu que ces fonds ont été confiés à l'intimé.

- Dans son acte d'accusation (p. 5, par. 30), le MP retient que le sous-compte 1______/8______ de F______ a été alimenté, à des dates indéterminées, par des montants indéterminés provenant du remboursement par de nombreuses sociétés, notamment AQ______ et AX______, de facilités que le plaignant leur avait accordées.

Les premiers juges ont considéré que l'acte d'accusation n'était pas assez précis sur ce point et violait la maxime accusatoire. En particulier, une nouvelle mention de AQ______ faisait double emploi avec le par. 29 examiné ci-dessus. Les faits allégués ne pouvaient par conséquent pas être retenus à l'encontre de l'intimé, soit que des fonds avaient été confiés à ce dernier.

Il n'en reste pas moins que l'acte d'accusation mentionne (p. 7 et 8, par. 36 à 40) l'octroi en 2006 par le plaignant, au travers de F______, de trois prêts à AX______, société de BF______, ces facilités ayant été formalisées en 2008, datés du 21 février 2008 pour USD 10'000'000.-, du 28 avril 2008 pour USD 10'000'000.- et du 7 juillet 2008 pour USD 6'200'000.-. Les remboursements étaient intervenus sur le sous-compte 1______/8______ de F______ le 10 juin 2009 pour USD 10'625'000.-, le 28 juillet 2009 pour USD 11'250'000.- et le 14 septembre 2009 pour 7'362'500.-. L'intimé avait immédiatement transféré ces trois montants sur des comptes de ses sociétés. L'existence de ces transactions a été confirmée par les déclarations de BF______, lequel a indiqué que le plaignant s'était présenté, lors de la négociation des prêts, comme l'ayant droit économique de F______.

Selon le plaignant, ces fonds faisaient partie de ceux confiés à l'intimé, dans le cadre du contrat de fiducie conclu en 2000, ce que ce dernier conteste, sans indiquer quelle aurait été l'origine des fonds, dont il ne s'est prétendu l'ayant droit économique qu'à partir de fin 2008, sans produire de pièces appuyant sa thèse. L'intimé s'est en effet contenté d'affirmer que cet argent était la propriété de F______ et n'avait rien à voir avec le plaignant.

Ceci étant, il ne s'agit plus ici du transfert d'éléments de fortune des plaignants, confiés à l'intimé, mais de nombreuses transactions commerciales, auxquelles participent le plaignant, l'intimé et des tiers, menées huit ans après l'accord oral conclu en 2000. De tels fonds étaient-ils encore confiés à l'intimé ? Il subsiste un doute à ce sujet, qui doit lui profiter. Il ne sera donc pas retenu que les fonds mentionnés au par. 30 de l'acte d'accusation du MP lui avaient été confiés dans le but qu'il les conserve ou les administre conformément aux instructions du plaignant.

- Dans son acte d'accusation (p. 7 et 8, par. 1 à 12), le MP retient, comme premier comportement constitutif d'abus de confiance, le nantissement à hauteur d'USD 5'300'000.- des avoirs du plaignant en faveur de la E______ pour garantir les dettes des sociétés de l'intimé AI______ et AK______ envers la banque et cela sans en avoir préalablement obtenu l'autorisation, ainsi que le maintien dudit nantissement en dépit d'une demande de sa levée émanant du plaignant.

Dans son mémoire d'appel, le MP a admis l'acquittement prononcé par les premiers juges sur ce point.

Selon les "board resolutions" de F______ signés les 6 novembre 2001 et 3 avril 2002 par le plaignant, l'intimé et H______, le premier a accepté que les avoirs de F______ garantissent les dettes des sociétés de l'intimé envers la E______. Ces documents ont pris la forme d'actes généraux de nantissement ne contenant aucune condition ou restriction. En particulier, ils n'excluent pas de leur application les avoirs figurant sur le sous-compte 1______/8______ ni ne prévoient la nécessité d'une autorisation expresse du plaignant à chaque fois qu'il est recouru à ces garanties.

Il subsiste donc un doute insurmontable sur la survenance d'une violation du rapport de confiance existant entre le plaignant et l'intimé, de sorte que la décision des premiers juges sera confirmée.

- Dans son acte d'accusation (p. 8 et 9, par. 1 à 8), le MP retient, comme second comportement constitutif d'abus de confiance, le refus de l'intimé de rembourser, en 2008, le prêt d'EUR 5'300'000.- octroyé en 2002 et dont le montant avait augmenté dans l'intervalle.

Dans son mémoire d'appel, le MP ne remet pas en cause l'acquittement prononcé par les premiers juges sur ce point.

Les deux parties admettent avoir été liées par un contrat de prêt, les intérêts ayant été versés sur le sous-compte 10______ du compte de F______.

Aucun élément du dossier ne permet de retenir que les sommes prêtées devaient avoir une affectation précise. L'intimé pouvait par conséquent utiliser cet argent à sa guise.

Ainsi, et conformément à la jurisprudence citée ci-dessus sous ch. 2.2., l'abus de confiance n'entre pas ici en considération. La décision des premiers juges sera également confirmée sur ce point.

- Dans son acte d'accusation (p. 9 à 11, par. 1 à 4), le MP retient, comme troisième comportement constitutif d'abus de confiance, le fait que l'intimé ait disposé sans droit, en 2008 et 2009, à son profit ou au profit de tiers, d'USD 30'320'000.- appartenant au plaignant et qui lui avaient été confiés.

Dans son mémoire d'appel, le MP a admis le raisonnement des premiers juges, selon lequel l'intimé n'avait pas pu s'approprier les USD 7'300'000.- qui lui avaient été confiés par le plaignant en 2000/2001, provenant de sa fortune personnelle, compte tenu des nombreux prêts octroyés à diverses sociétés, notamment au moyen de ces fonds, au fil des années, jusqu'en 2008. La CPAR partage cette analyse.

Au surplus, la CPAR a retenu, comme les premiers juges, que les USD 23'000'000.- provenant de AQ______ en 2004 n'avaient pas été confiés à l'intimé, en raison du doute subsistant sur l'origine des fonds et, par conséquent, l'identité de leur ayant droit économique.

Ainsi, même si les explications fournies par l'intimé au sujet des débits opérés à fin 2008 et en 2009 sur le sous-compte 1______/8______ de F______ ne sont guère crédibles, trois des témoins, il est vrai anciens subordonnés du plaignant chez N______ à T______, ayant exprimé leur conviction que l'intimé "avait volé l'argent du plaignant", un abus de confiance ne peut être retenu.

En conclusion, l'acquittement prononcé en première instance sera confirmé, ce qui dispense la juridiction d'appel d'examiner si les faits poursuivis peuvent aussi être qualifiés de blanchiment d'argent.

3. 3.1. En vertu de l'art. 126 al. 1 let. a CPP, le tribunal statue sur les prétentions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu. En revanche, il renvoie la partie plaignante à agir par la voie civile lorsqu'elle n'a pas chiffré ses conclusions de manière suffisamment précise ou ne les a pas suffisamment motivées (art. 126 al. 2 let. b CPP). L'art. 126 al. 2 let. b CPP constitue le pendant des exigences imposées par la loi à la partie plaignante relativement au calcul et à la motivation des conclusions civiles, formulées à l'art. 123 CPP, et le non-respect de ces exigences conduit au renvoi de la partie plaignante à agir par
la voie civile (A. KUHN / Y. JEANNERET (éds.), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 21 ad art. 126). Dans le cas où le jugement complet des conclusions civiles exigerait un travail disproportionné, le tribunal peut traiter celles-ci seulement dans leur principe et, pour le surplus, renvoyer la partie plaignante à agir par la voie civile. Les prétentions de faible valeur sont, dans la mesure du possible, jugées par le tribunal lui-même (art. 126 al. 3 CPP).

3.2. L'intimé ayant été acquitté, les plaignants seront déboutés de leurs conclusions civiles.

4. 4.1. L'art. 433 al. 1 CPP permet à la partie plaignante de demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure lorsqu'elle obtient gain de cause (let. a) ou lorsque le prévenu est astreint au paiement des frais conformément à l'art. 426 al. 2 CPP (let. b). L'alinéa 2 prévoit que la partie plaignante adresse ses prétentions à l'autorité pénale ; elle doit les chiffrer et les justifier. Si elle ne s'acquitte pas de cette obligation, l'autorité pénale n'entre pas en matière sur la demande.

4.2. Les plaignants ayant succombé, ils seront déboutés de leurs conclusions prises en application de l'art. 433 CPP.

5. 5.1. Selon l'art. 429 al. 1 CPP, le prévenu bénéficiant d'un acquittement a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (let. a), une indemnité pour le dommage économique subi au titre de sa participation obligatoire à la procédure pénale (let. b) et à une réparation du tort moral en cas de privation de liberté (let. c). L'alinéa 2 prévoit que l'autorité pénale examine d'office les prétentions du prévenu. Il en résulte qu'il incombe à l'autorité pénale, à tout le moins, d'interpeller le prévenu sur cette question et, comme le prévoit la loi, de lui enjoindre, au besoin, de chiffrer et justifier ses prétentions en indemnisation (arrêts du Tribunal fédéral 6B_661/2013 du 10 juin 2014 consid. 3.1 et 6B_472/2012 du 13 novembre 2012 consid. 2.1).

Aux termes de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, l'indemnité concerne les dépenses du prévenu pour un avocat de choix (ATF 138 IV 205 consid. 1 p. 206). Elle couvre en particulier les honoraires d'avocat, à condition que le recours à celui-ci procède d'un exercice raisonnable des droits de procédure. Selon le message du Conseil fédéral, l'Etat ne prend en charge les frais de défense que si l'assistance d'un avocat était nécessaire compte tenu de la complexité de l'affaire en fait ou en droit et que le volume de travail et donc les honoraires étaient ainsi justifiés (Message du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, FF 2006 1313 ch. 2.10.3.1).

Les honoraires d'avocat se calculent selon le tarif local, à condition qu'ils restent proportionnés (N. SCHMID, Schweizerische Strafprozessordnung : Praxis-kommentar, 2e éd., Zurich 2013, n. 7 ad art. 429) ; encore faut-il que l'assistance d'un avocat ait été nécessaire, compte tenu de la complexité de l'affaire en fait ou en droit, et que le volume de travail de l'avocat était ainsi justifié (Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale (CPP) du 21 décembre 2005, FF 2006 1309) ; le juge dispose d'une marge d'appréciation à cet égard, mais ne devrait pas se montrer trop exigeant dans l'appréciation rétrospective qu'il porte sur les actes nécessaires à la défense du prévenu (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER (éds), Strafprozessordnung - Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 2e éd., Bâle 2014, n. 19 ad art. 429).

La Cour de justice applique, pour un chef d'étude, un tarif horaire de CHF 450.- (ACPR/112/2014 du 26 février 2014, renvoyant au tarif "usuel" de CHF 400.- ressortant de la SJ 2012 I 175 et jugé non arbitraire par le Tribunal fédéral = SJ 2014 I 426 ; ACPR/279/2014 du 27 mai 2014, ACPR/21/2014 du 13 janvier 2014) ou de CHF 400.- (ACPR/282/2014 du 30 mai 2014), notamment si l'avocat concerné avait lui-même calculé sa prétention à ce taux-là (ACPR/377/2013 du 13 août 2013). Les tarifs horaires appliqués sont de CHF 350.- pour un collaborateur et de CHF 150.- pour un stagiaire (AARP/497/2016 consid. 5.5.1 et les références citées, AARP/477/2016 consid. 4.1.1).

L'art. 127 al. 2 CPP prévoit qu'une partie peut se faire assister de plusieurs conseils juridiques pour autant que la procédure n'en soit pas retardée de manière indue. En pareil cas, elle désigne parmi eux un représentant principal qui est habilité à accomplir les actes de représentation devant les autorités pénales et dont l'adresse est désignée comme unique domicile de notification. Le Message du Conseil fédéral spécifie que, dans les affaires complexes, les parties peuvent avoir un intérêt légitime à disposer de plusieurs avocats, étant chacun spécialisé dans une matière déterminée (Message du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure, FF 2005 1057 p. 1155).

Au vu de ce qui précède, le CPP n'exclut pas en soi la participation de plusieurs défenseurs. Autre est néanmoins la question de savoir si le prévenu acquitté peut requérir une indemnisation pour ses frais de défense qui couvre l'intervention de ses différents défenseurs.

Le recours à plusieurs avocats peut, en cas de procédure d'une exceptionnelle longueur, particulièrement volumineuse et complexe, par exemple une procédure se rapportant à la gestion des intérêts pécuniaires d'une banque, procéder d'un exercice raisonnable des droits de procédure (arrêt du Tribunal fédéral 6B_875/2014 consid. 4.3/4.5 = SJ 2014 I 424-425).

5.2. L'intimé ayant été acquitté, une indemnité lui est due, à charge de l'Etat de Genève, et non des parties plaignantes, le MP devant poursuivre d'office des chefs d'abus de confiance et de blanchiment d'argent, pour ses frais de défense de première instance et d'appel, ainsi qu'en réparation de son dommage matériel.

En l'espèce, l'intimé ne remet pas en cause le montant de CHF 450'000.- qui lui a été alloué par les premiers juges au titre d'indemnité pour ses frais de défense. Il produit une note d'honoraires de ses conseils de CHF 70'671.70 pour la procédure d'appel, utilisant les mêmes tarifs horaires qu'en première instance. Le MP conclut à une réduction des montants alloués/réclamés.

Si les prestations facturées ne sont pas contestées en tant que telles, il apparaît que la présence de deux avocats aux côtés de l'intimé, admise par ce dernier, n'était pas nécessaire, le dossier n'ayant pas un volume ni une complexité exceptionnelle. Cela justifie une réduction d'un tiers des sommes facturées. Par ailleurs, le tarif horaire pratiqué est proche de CHF 500.-, soit supérieur à celui admissible de CHF 400.- à CHF 450.-, selon la jurisprudence citée plus haut, ce qui justifie une réduction supplémentaire de 15% des montants réclamés. Enfin, ne seront retenus au titre du dommage matériel que les montants établis à satisfaction, qui concernent les frais de voyage et d'hôtel.

Au vu de ce qui précède, l'intimé se verra allouer une indemnité globale de CHF 350'000.-, en application des dispositions de l'art. 429 al. 1 let. a et b CPP, pour les deux instances. Le jugement entrepris sera réformé sur ce point.

6. 6.1. Les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé (art. 428 al. 1 CPP).

6.2. En l'occurrence, les appelants ayant succombé, les frais de la procédure de première instance et d'appel seront mis à la charge de l'Etat, et non des parties plaignantes, le MP ayant eu à poursuivre les faits d'office.

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit les appels formés par le Ministère public, A______ et B______ contre le jugement JTCO/48/2016 rendu le 20 avril 2016 par le Tribunal correctionnel dans la procédure P/10038/2011.

Rejette les appels formés par A______ et B______.

Admet très partiellement l'appel formé par le Ministère public.

Annule le susdit jugement en tant qu'il condamne l'Etat de Genève à verser à C______ la somme de CHF 450'000.- à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure et pour le dommage économique subi au titre de sa participation obligatoire à la procédure pénale.

Et, statuant à nouveau sur ce point :

Condamne l'Etat de Genève à verser à C______ la somme de CHF 350'000.- à titre d'indemnité globale (première instance et appel) pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure et pour le dommage économique subi au titre de sa participation obligatoire à la procédure pénale.

Au surplus, confirme le jugement entrepris.

Déboute A______ et B______ de leurs conclusions en indemnisation pour la procédure de première instance.

Laisse les frais de la procédure d'appel à la charge de l'Etat de Genève.

Notifie le présent arrêt aux parties.

 

Le communique, pour information, au Tribunal correctionnel et à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

Siégeant :

Monsieur Pierre MARQUIS, président ; Madame Verena PEDRAZZINI et Madame Yvette NICOLET, juges.

 

La greffière :

Christine BENDER

 

Le président :

Pierre MARQUIS

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.