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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/768/2024

ATA/830/2024 du 09.07.2024 sur JTAPI/366/2024 ( ICCIFD ) , REJETE

Recours TF déposé le 14.08.2024, rendu le 25.09.2024, REJETE, 9C_421/2024
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/768/2024-ICCIFD ATA/830/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 juillet 2024

4ème section

 

dans la cause

 

A______ recourante

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS intimées

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 18 avril 2024 (JTAPI/366/2024)


EN FAIT

A.           Par jugement du 18 avril 2024, le Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI) a déclaré irrecevable pour défaut de paiement de l’avance de frais le recours formé par A______ le 5 mars 2024 contre les décisions sur réclamations rendues le 1er février 2024 par l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE).

Le courrier recommandé du TAPI contenant l’invitation à s’acquitter de l’avance de frais dans le délai échéant le 8 avril 2024 avait été retiré le 11 mars 2024. Ce courrier précisait qu’à défaut de paiement de l’avance de frais dans le délai imparti, le recours serait déclaré irrecevable. Aucun paiement n’était intervenu dans le délai.

B.            a. Par acte expédié le 22 mai 2024 à la chambre administrative de la Cour de justice, A______ a recouru contre ce jugement, dont elle a demandé l’annulation, concluant au renvoi de la cause au TAPI afin que celui-ci fixe un nouveau délai de paiement de l’avance de frais.

Le courrier réclamant l’avance de frais avait été reçu par son avocat, mais ne lui était pas parvenu avant le 8 avril 2024, en raison d’un problème technique de scannage survenu dans l’étude de son conseil. Le délai imparti était trop court, compte tenu de la période pascale. Le TAPI avait consacré une inégalité de traitement en déclarant le recours irrecevable sans fixer un nouveau délai pour payer l’avance de frais. Il y avait pourtant procédé dans la cause A/527/2017 présentant des similitudes à sa situation. Enfin, compte tenu des conséquences du défaut de paiement de l’avance de frais, le TAPI aurait dû l’en avertir.

b. Le TAPI n’a pas formulé d’observations.

c. Ni l’AFC-GE ni l’administration fédérale des contributions n’ont été invitées à se déterminer sur le recours.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 7 al. 2 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 145 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Est litigieuse l’irrecevabilité du recours formé devant le TAPI pour non-paiement de l’avance de frais dans le délai imparti.

2.1 En vertu de l’art. 86 LPA, la juridiction invite le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables ; elle fixe à cet effet un délai suffisant (al. 1). Si l’avance n'est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (al. 2). La restitution du délai peut être accordée, si la requérante a été empêchée d’agir sans sa faute dans le délai fixé (al. 3).

2.1.1 La référence au « délai suffisant » de l’art. 86 al. 1 LPA laisse une certaine marge d'appréciation à l’autorité judiciaire saisie (ATA/184/2019 du 26 février 2019 consid. 3c ; ATA/916/2015 du 8 septembre 2015 consid 2c).

2.1.2 La LPA ne prévoit pas, contrairement à l’art. 62 al. 3 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), l'octroi d'un délai supplémentaire lorsque le versement de l'avance de frais n'est pas effectué dans le délai fixé. L'octroi d'un tel délai ne résulte pas non plus d'une pratique constante du TAPI (arrêt du Tribunal fédéral 1C_339/2020 du 20 octobre 2020 consid. 2.4 ; ATA/1234/2022 du 6 décembre 2022 consid. 5 ; ATA/684/2021 du 29 juin 2021 consid. 4g ; ATA/150/2021 du 9 février 2021 consid. 6b).

2.2 Les délais en jours fixés par la loi ne courent pas du 7ème jour avant Pâques au 7ème jour après Pâques inclusivement (art. 63 al. 1 let. a LPA). Cette règle ne s’applique toutefois pas aux procédures soumises aux règles de la LPFisc (art. 63 al. 2 let. e LPA). La LIFD ne prévoit pas non plus de suspension de délais (arrêt du Tribunal fédéral 2C_89/2015 du 23 octobre 2015 consid. 6.3 ; ATA/687/2020 du 21 juillet 2020 consid. 2a ; ATA/72/2018 du 23 janvier 2018 consid. 2).

2.3 Selon la jurisprudence constante, il convient d'appliquer par analogie la notion de cas de force majeure de l'art. 16 al. 1 LPA afin d'examiner si l'intéressé a été empêché sans sa faute de verser l'avance de frais dans le délai fixé (ATA/184/2024 précité consid. 2.2 et les arrêts cités). Tombent sous la notion de force majeure les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d’influence de l'intéressé et qui s'imposent à lui de façon irrésistible. Les conditions pour admettre un empêchement sont très strictes.

Ce dernier doit être imprévisible et sa survenance ne doit pas être imputable à faute à l'administré (arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.2 et les références citées), partant à son représentant (ATA/158/2020 du 11 février 2020 ; ATA/38/2020 du 14 janvier 2020). Il doit être de nature telle que le respect du délai aurait exigé la prise de dispositions que l'on ne peut raisonnablement attendre de la part d'un homme ou d’une femme d'affaires avisée (ATA/651/2024 du 28 mai 2024 consid. 2.3 ; ATA/356/2023 du 4 avril 2023 consid. 2.3 ; ATA/544/2013 du 27 août 2013).

Que le retard dans le paiement de l'avance de frais soit imputable au plaideur, à son mandataire ou à la banque chargée du paiement, le comportement fautif doit être imputé à la partie recourante elle-même (ATF 114 Ib 67 consid. 2 et 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_21/2022 du 11 novembre 2022 consid. 3.4).

2.4 Le formalisme excessif, prohibé par l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 135 I 6 consid. 2.1 ; 134 II 244 consid. 2.4.2).

Il n'y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d'une avance de frais dans un délai déterminé. Il faut cependant que son auteur ait été averti de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le paiement et des conséquences de l'inobservation de ce délai (ATF 133 V 402 consid. 3.3 ; 104 Ia 105 consid. 5). La gravité des conséquences d'un retard dans le paiement de l'avance sur la situation du recourant n'est pas pertinente (arrêts du Tribunal fédéral 2C_107/2019 du 27 mai 2019 consid. 6.3 ; 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées).

2.5 En l’espèce, la recourante ne conteste pas avoir omis de s'acquitter de l'avance de frais en faveur du TAPI dans le délai imparti. Contrairement à ce qu’elle soutient, l'octroi d'un délai de grâce en cas de non‑paiement de l’avance de frais dans le délai imparti ne résulte ni de la LPA ni d'une pratique constante du TAPI. Ce dernier n'avait en conséquence aucune obligation de lui octroyer un nouveau délai pour le paiement de l’avance de frais.

L’arrêt ATA/1262/2017 du 5 septembre 2017 auquel la recourante se réfère pour soutenir le contraire se rapporte à une situation où la partie recourante avait sollicité l’assistance juridique, qui avait été refusée. Ainsi, après le refus de l’assistance juridique, l’autorité était tenue d’impartir un nouveau délai pour s’acquitter de l’avance de frais. Il ne s’agit donc pas d’une situation comparable à celle de la recourante, qui n’a pas demandé l’assistance juridique et ne se l’est, par conséquent, pas vu refuser.

Le pli recommandé contenant l’invitation à s’acquitter de l’avance de frais a été retiré par le mandataire de la recourante le lundi 11 mars 2024. À compter de la réception de ce pli, la recourante disposait d’un délai au lundi 8 avril 2024, soit de quatre semaines, pour procéder au paiement de l’avance de frais. Certes, le Vendredi saint (29 mars 2024) et le lundi de Pâques (1er avril 2024), jours fériés, tombaient dans ce délai. Il n’en demeure pas moins que le délai de paiement doit être qualifié de suffisant, étant précisé qu’il n’y a, en matière fiscale, pas de suspension de délai durant les féries pascales.

Le « problème technique » survenu, selon la recourante, dans l’étude de son conseil ne constitue pas un cas de force majeure au sens de l’art. 16 al. 3 LPA. Le problème allégué de scannage de l’invitation à s’acquitter de l’avance de frais n’est nullement comparable à un événement extraordinaire et imprévisible, survenu en dehors de la sphère d’influence du mandataire. Au contraire, il appartenait au mandataire de la recourante de s’organiser, y compris en s’assurant du bon fonctionnement de ses outils informatiques, afin que le respect des délais impartis par les autorités judiciaires soit garanti.

Enfin, l’invitation à payer l’avance de frais contenait l’indication qu’à défaut de paiement de celle-ci dans le délai imparti, le recours serait déclaré irrecevable. Pour le surplus, la jurisprudence considère que la conséquence de l’irrecevabilité du recours en cas de non-paiement de l’avance de frais ne se heurte pas à l’interdiction du formalisme excessif, indépendamment des intérêts en cause.

Au vu de ce qui précède, le TAPI n’a pas violé la loi ni abusé de son pouvoir d’appréciation en déclarant le recours formé devant lui irrecevable pour cause de non-paiement de l’avance de frais.

Manifestement mal fondé, le recours devant la chambre de céans sera rejeté, sans échange d’écritures (art. 72 LPA).

3.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 700.- sera mis à la charge de la recourante, qui ne peut se voir allouer une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 22 mai 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 18 avril 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 700.- à la charge d’A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la recourante, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. KRAUSKOPF

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :