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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3848/2021

ATA/1069/2022 du 21.10.2022 sur JTAPI/681/2022 ( LDTR ) , ACCORDE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3848/2021-LDTR ATA/1069/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 21 octobre 2022

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

Mesdames A______ et G______, Madame et Monsieur B______, Monsieur C______, Madame D______ et Monsieur E______

représentés par Me Paul Hanna, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

et

F______

représentée par Me Jean-François MARTI, avocat


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 juin 2022 (JTAPI/681/2022)


Vu le recours interjeté le 31 août 2022 par Mesdames A______ et G______, Madame et Monsieur B______, Monsieur C______, Madame D______ et Monsieur E______, contre le jugement du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) du 28 juin 2022 ; qu’ils ont conclu à son annulation ainsi qu’à celle de l’autorisation de construire DD 1______, objet du litige ; qu’ils étaient voisins de la construction ; que l’autorisation précitée concernait la surélévation de quatre immeubles, en créant un étage supplémentaire au n° ______, trois étages supplémentaires au n° ______ et deux étages au n° ______ et au n° ______ bis ; que cela représentait une augmentation de 32,604 % de la surface existante ; qu’il ne s’agissait donc pas d’une dérogation mineure au plan localisé de quartier (ci-après : PLQ) adopté par le Conseil d’État le 17 juillet 1991 n° 28'313 concernant notamment les immeubles en question ; qu’ainsi l’art. 21 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700) avait été violé ainsi que plusieurs dispositions cantonales ; que de surcroît l’autorité de première instance avait été mal composée, l’un des juges ne s’étant pas récusé ; que leur droit d’être entendus avait été violé, les préavis n’étant pas suffisamment motivés ; qu’aucun des quatre blocs ne respectait les gabarits légaux et que l’axe de la route n’avait pas été pris comme référence, violant les art. 11 et 26 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) ; que les ratios des places de stationnement prévus par la loi n’étaient pas respectés ; qu’enfin, la surélévation projetée provoquerait une perte d’ensoleillement d’une heure et demie au moins sur la propriété de Mmes A______ et G______ ;

 

qu’ils sollicitaient, à titre préalable, la restitution de l’effet suspensif au recours ; que, dans leurs préavis, tant l’office cantonal de l’urbanisme que la direction des autorisations de construire avaient reconnu que le projet de surélévation n’était pas conforme au PLQ ; que l’augmentation de 32,604 % de surface brute de plancher (ci-après : SBP) était importante ; que le recours n’était pas dépourvu de chances de succès ; que, si les travaux devaient commencer immédiatement, l’intimée pourrait soutenir par la suite que la démolition des étages supplémentaires serait disproportionnée ; qu’il en résulterait un dommage irréparable pour les requérants qui ne pourraient dès lors plus contester valablement le bien-fondé de l’autorisation de construire ; que, par décision du 1er décembre 2021, le TAPI avait restitué l’effet suspensif au recours retenant que la surélévation projetée présentait une divergence marquante avec le PLQ au regard de l’image générale de celui-ci, du nombre d’étages prévus et de l’augmentation de la SBP ;

 

que le département du territoire (ci-après : DT) s’en est rapporté à justice sur la requête de restitution d’effet suspensif ;

 

que l’intimée a conclu à son rejet ; qu’elle contestait l’existence d’une divergence importante entre le PLQ et l’autorisation querellée ; que, de jurisprudence constante, l’augmentation de la SBP ne constituait pas un critère unique pour juger de l’importance d’une dérogation ; que les dimensions visées étaient quasiment identiques à celles des constructions voisines ; que tous les préavis avaient été favorables ; que, comme l’avait tranché le TAPI dans son jugement au fond, la substance et le principe du PLQ étaient respectés ;

 

que les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif ;

 

Considérant, en droit, l'art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) du 26 mai 2020, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par la présidente de ladite chambre, respectivement par le vice-président, ou en cas d'empêchement de ceux-ci, par un juge ;

 

qu'aux termes de l'art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsqu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3) ;

 

que selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/795/2021 du 4 août 2021 ; ATA/1043/2020 du 19 octobre 2020 ; ATA/303/2020 du 19 mars 2020) ;

 

qu'elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, 265) ; que, par ailleurs, l'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3) ;

 

que l’art. 146 al. 2 LCI constitue une disposition légale contraire au sens de l’art. 66 al. 1 LPA ; qu’il prévoit que lorsqu'il est dirigé contre une autorisation définitive précédée notamment d'un PLQ en force, le recours n'a pas d'effet suspensif à moins qu'il ne soit restitué sur requête du recourant ; que l'art. 146 al. 2 LCI constituant une exception au régime général, expressément voulue par le législateur, il n'y a en principe pas lieu de s'écarter de cette volonté (ATA/1275/2017 du 12 septembre 2017 consid. 5 et les références citées) ; que la jurisprudence pose comme condition à la restitution de l’effet suspensif le fait de rendre vraisemblable l'existence de divergences importantes entre le PLQ et l'autorisation délivrée ; que cela constitue une mise en œuvre à la fois du principe de la proportionnalité, prévu à l'art. 5 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), et des principes dégagés par la jurisprudence rendue au fond relativement aux art. 146 al. 1 LCI et 3 al. 4 de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35 ; ATA/291/2011 du 10 mai 2011 consid. 4 et 5 ; ATA/143/2011 du 8 mars 2011, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_188/2011 du 23 septembre 2011) ;

 

que dans l'hypothèse où le recourant sollicite la restitution de l'effet suspensif, l'autorité de recours doit examiner si les raisons pour exécuter immédiatement la décision entreprise sont plus importantes que celles justifiant le report de son exécution ; qu’elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire ; que pour effectuer la pesée des intérêts en présence, elle n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les références citées) ; que les chances de succès du recours n'influencent la pesée des intérêts que si elles peuvent être déterminées prima facie sur la base du dossier et qu'elles ne font aucun doute (arrêt du Tribunal fédéral 2C_356/2007 du 18 septembre 2007 consid. 3) ;

qu’à teneur de l’art. 3 LGZD, les projets de construction établis selon les normes d’une zone de développement doivent être conformes aux PLQ adoptés en application de l’art. 2 ; que toutefois, lors du contrôle de conformité des requêtes en autorisation de construire avec le PLQ, le DT peut admettre que le projet s’écarte du plan, pour autant que l’indice d’utilisation du sol et l’indice de densité soient respectés et, dans la mesure où la mise au point technique du dossier ou un autre motif d’intérêt général, notamment la construction de logements supplémentaires, le justifie (al. 5) ; que sont réputés conformes au PLQ au sens de l’al. 5, les projets de construction prévoyant des implantations différentes de bâtiments, places extérieures ou garages souterrains à construire, mais respectant les aires d’implantation visées à l’al. 1 let. a et e, ou prévoyant des accès aux places de parcage et aux garages souterrains différents de ceux pouvant figurer sur le plan, mais situées dans les secteurs d’accès aux places de parcage et aux garages souterrains. Il en va de même des modifications des espaces libres jouxtant l’implantation des bâtiments et compris à l’intérieur de l’aire d’implantation (al. 6) ; qu’est réputée de peu d’importance et constitutive d'un motif d'intérêt général ou technique au sens de l'al. 5, justifiant que le projet de construction s'écarte d'un PLQ, la diminution du nombre de places de parcage pour tenir compte d’écarts des projets de construction par rapport au plan ou d’éventuelles modifications du règlement relatif aux places de stationnement sur fonds privés du 16 décembre 2015 (RPSFP - L 5 05.10), en particulier des ratios de stationnement en matière de logements d’utilité publique, survenues postérieurement à l’adoption de ce plan (al. 7) ;

que la juridiction de céans a considéré que constituaient des modifications mineures, notamment,  la surélévation d’un étage, permettant d’obtenir treize logements d’utilité publique supplémentaires (ATA/874/2015 du 25 août 2015) ; la création d’un étage supplémentaire comportant deux logements et induisant un dépassement du gabarit prévu par le PLQ de 2,70 m dans le cadre de la réalisation d’une construction à haut standard énergétique (ATA/583/2010 du 31 août 2010) ; un projet comportant un attique de 51,50 m2 affecté à une cuisine, un séjour et une véranda non chauffée et n’excédant pas les 10 % de SBP supplémentaires autorisés en application du bonus Minergie (ATA/55/2012 du 24 janvier 2012) ; un écart de SBP de 3 %, qualifié de peu important, compte tenu de la SBP totale du projet en cause (ATA/505/2007 du 9 octobre 2007) ;

 

qu’ont, au contraire, été considérées comme importantes une surélévation de deux étages (le projet litigieux prévoyant une construction de huit niveaux alors que le PLQ prévoyait des constructions de six, la surélévation entrainant une augmentation de 40 % des SBP (ATA/39/2014 du 21 janvier 2014) ; une surélévation de deux étages de deux immeubles, afin d’aménager huit logements au total, représentant une SBP de 932 m2, les immeubles étant inclus dans un ensemble érigé dans les années 1950, et pour lequel le PLQ prévoyait plusieurs restrictions très spécifiques (ATA/515/2013 du 27 août 2013) ;

 

qu’en l’espèce, les travaux en lien avec la DD 1______ seront importants, s’agissant de surélever quatre immeubles de un à trois étages ; que les intérêts des voisins seraient en conséquence gravement menacés si les travaux de construction devaient débuter et que le recours doive finalement être admis ; que les raisons pour commencer immédiatement les travaux sont moins importantes que celles justifiant d’attendre que la chambre de céans ait pu examiner le litige au fond et le trancher ; que les recourants ont rendu vraisemblable, au vu de la jurisprudence précitée, que ces surélévations constituaient, prima facie, une divergence importante avec le PLQ s’agissant de quatre surélévations, allant jusqu’à un ajout de trois niveaux de différence par rapport à ce qui était prévu dans le PLQ adopté par le Conseil d’État ; que les raisons justifiant le report de l’exécution doivent dès lors primer ; que la requête en restitution de l’effet suspensif sera admise ;

 

qu’il sera statué ultérieurement sur les frais du présent incident.

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

restitue l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de croit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision à Me Paul Hanna, avocat des recourants, à
Me Jean-François Marti, avocat de F______, au département du territoire-oac ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

 

 

 

La juge :

 

 

V. Lauber

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :