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Décisions | Chambre civile

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C/2420/2021

ACJC/1307/2022 du 04.10.2022 sur JTPI/3613/2022 ( SDF ) , MODIFIE

Normes : CC.176.al3; CC.273ss
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2420/2021 ACJC/1307/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MARDI 4 OCTOBRE 2022

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______[GE], appelante d'un jugement rendu par la 18ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 21 mars 2022 et intimée, comparant par Me Stéphane REY, avocat, rue Michel-Chauvet 3, case postale 477, 1211 Genève 12, en l'Etude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié c/o Résidence C______, ______, intimé et appelant, comparant par Me Lida LAVI, avocate, Lavi Avocats, Grand-Rue 8, 1204 Genève, en l'Etude de laquelle il fait élection de domicile.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/3613/2022 du 21 mars 2022, reçu par les parties le 24 mars 2022, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a autorisé les époux A______ et B______ à vivre séparés (chiffre 1 du dispositif).

Il a attribué à A______ la garde des enfants D______, née le ______ 2013, et E______, née le ______ 2016 (ch. 2) et a réservé à B______ un droit de visite sur les enfants, s'exerçant d'entente entre les parties, mais, à défaut, à raison de deux jours par semaine, un week-end sur deux sans la nuit tant qu'aucune solution de relogement ne serait trouvée et durant la moitié des vacances scolaires (ch. 3).

Il a fixé l'entretien convenable de chacune des enfants à 620 fr. jusqu'à l'âge de 10 ans révolus, puis à 820 fr. (coûts directs, hors contribution de prise en charge), dont à déduire les allocations familiales (ch. 4 et 5).

Il a constaté qu'en l'état B______ n'était pas en mesure de verser de contributions d'entretien en faveur de ses filles (ch. 6) et dit que les allocations familiales versées en faveur des enfants revenaient à la mère (ch. 7).

Le Tribunal a instauré une curatelle d'organisation et de surveillance du droit de visite au bénéfice des enfants au sens de l'art. 308 al. 2 CC (ch. 8), transmis le jugement au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant pour désignation du curateur et instruction dans le sens des considérants (ch. 9) et dit que les coûts éventuels de la curatelle seraient pris en charge par les parents à raison de la moitié chacun (ch. 10).

Il a attribué à A______ la jouissance exclusive du domicile conjugal sis 1______[GE], avec les droits et les obligations résultant du contrat de bail portant sur ce logement (ch. 11).

Il a enfin invité les parties à poursuivre le travail de coparentalité entrepris (ch. 12), prononcé les mesures pour une durée indéterminée (ch. 13), statué sur les frais (ch. 14 et 15), condamné les parties à respecter et à exécuter les dispositions du jugement (ch. 16) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 17).

B. a. Par acte déposé le 1er avril 2022 au guichet universel du Pouvoir judiciaire, A______ a formé appel contre les chiffres 6 et 17 du dispositif du jugement précité, dont elle a requis l'annulation. Elle a conclu, principalement, à la condamnation de son époux à lui verser, par mois et d'avance, allocations familiales en sus, à titre de contribution d'entretien pour chacune de leurs filles, la somme de 620 fr., les frais judiciaires devant être partagés par moitié et chaque partie devant assumer ses propres dépens. Subsidiairement, elle a conclu au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision, le sort des frais judiciaires et dépens de première instance devant être réservé. Elle a allégué des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles.

B______ a conclu au rejet des conclusions d'appel de son épouse, avec suite de frais. Il a allégué des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles.

A______ a répliqué le 12 mai 2022; elle a allégué des faits nouveaux et déposé des pièces nouvelles.

b. Par acte expédié le 4 avril 2022, B______ a formé appel contre les chiffres 2, 3, 7 et 11 du dispositif du jugement du 21 mars 2022, dont il a requis l'annulation. Il a conclu, principalement, à ce que la Cour lui attribue la garde des deux enfants, réserve à la mère un droit de visite s'exerçant d'entente entre les parents, mais, à défaut, à raison de chaque mercredi dans la journée et d'un week-end sur deux sans les nuits tant qu'une solution de relogement n'est pas trouvée, ainsi que durant la moitié des vacances scolaires, constate que A______ n'est pas en mesure de verser des contributions d'entretien en faveur des enfants, dise que les allocations familiales reviennent au père, lui attribue la jouissance exclusive du domicile conjugal, avec les droits et obligations résultant du bail, partage par moitié les frais de justice et dise qu'il n'est pas alloué de dépens. Subsidiairement, il a conclu au renvoi de la cause au Tribunal, les frais de justice devant être partagés par moitié et chacune des parties devant assumer ses propres dépens. Il a allégué des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles.

A______ a conclu au rejet des conclusions d'appel de son époux, les frais judiciaires devant être partagés par moitié et chaque partie devant assumer ses propres dépens. Elle a allégué des faits nouveaux.

c. Par arrêt du 11 avril 2022, la Cour a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, la requête de B______ tendant à la suspension du caractère exécutoire du jugement attaqué et dit qu'il serait statué sur les frais dans la décision rendue sur le fond.

d. Par décision du 14 avril 2022, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: le Tribunal de protection) a désigné F______, intervenante en protection de l'enfant auprès du Service de protection des mineurs (ci-après: SPMi), aux fonctions de curatrice des mineures D______ et E______.

e. Les parties ont été informées le 7 juin 2022 de ce que la présente cause était gardée à juger.

f. La Cour a tenu une audience le 22 septembre 2022. Elle a entendu F______ comme témoin, puis procédé à l'interrogatoire des parties. Les déclarations recueillies seront reprises ci-après dans la mesure utile.

B______ a déposé des pièces nouvelles (pièces 16 à 19).

Les parties ont renoncé à plaider et ont persisté dans leurs précédentes conclusions.

La Cour a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier soumis à la Cour:

a. A______, née le ______ 1983, de nationalité algérienne, et B______, né le ______ 1967, originaire de Genève, se sont mariés le ______ 2012 à G______ (H______, Algérie).

Ils sont les parents de D______, née le ______ 2013, et E______, née le ______ 2016.

b. Par acte du 10 février 2021, A______ a requis du Tribunal le prononcé de mesures protectrices de l'union conjugale. Elle a conclu à ce que les parties soient autorisées à vivre séparées, à l'attribution en sa faveur de la jouissance du domicile conjugal et de la garde des enfants, à la réserve d'un droit de visite en faveur de B______ s'exerçant un week-end sur deux et durant la moitié des vacances scolaires, à la fixation de l'entretien convenable de chacune des filles à 372 fr. et à ce qu'il soit dit qu'aucune contribution d'entretien n'était due "entre les parties".

Elle a allégué que les parties étaient "aidées financièrement par l'Hospice général depuis le 1er juillet 2014 à hauteur d'environ CHF 2'976.- par mois".

Elle n'a formé aucun allégué au sujet de la capacité de son époux d'exercer une activité lucrative.

c. Lors de l'audience du Tribunal du 30 mars 2021, B______ a revendiqué la garde des enfants. Il a déclaré que la mère n'était pas apte à l'exercer, en se référant aux pièces qu'il avait produites "en ce sens".

Il avait déposé le 23 mars 2021 deux attestations du 4 décembre 2020 dont il résulte que D______ et E______ avaient bénéficié d'un suivi pédopsychiatrique à la Guidance infantile du 19 juillet 2017 au 18 octobre 2019, respectivement du 21 février au 18 septembre 2020 (pièce 6), ainsi qu'un rapport adressé le 17 mars 2021 par le Service d'accueil et d'urgences pédiatriques des HUG à la Dre I______ du Groupe médical de P______ (pièce 7). Il résulte de ce rapport que le 16 mars 2021 B______ s'est rendu audit Service avec D______: le père demandait "un constat de coup"; l'enfant aurait "avoué à son père que sa maman l'aurait frappée hier soir avec une bouteille en aluminium au niveau du visage". D______ a indiqué au Service que sa mère avait lancé vers elle une bouteille vide en aluminium, qu'elle l'avait reçue sur le menton et qu'elle avait ressenti une douleur juste après l'impact. D______ était asymptomatique, hormis une légère douleur à la palpation du menton, limitée à l'angle gauche. Le Service a posé le diagnostic de "ecchymose/contusion".

A l'issue de l'audience, le Tribunal a ordonné l'établissement d'un rapport par le Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale (ci-après SEASP).

d. Le SEASP a rencontré séparément les parents le 10 mai 2021, puis a eu des échanges téléphoniques avec eux, ainsi qu'avec les enseignantes des enfants à l'école primaire J______, la psychiatre de la mère et la psychologue de E______. Il a entendu D______ le 2 juin 2021.

Il ressort du rapport d'évaluation sociale du SEASP, daté du 14 juillet 2021, que la relation parentale est "très difficile" et que "les parents s'en imputent mutuellement la responsabilité". Ces derniers vivant encore sous le même toit, les enfants n'étaient pas préservées du conflit; les deux filles du couple évoluaient très favorablement; les parents étaient tous les deux impliqués auprès de leurs filles, lesquelles leur étaient attachées, et avaient une disponibilité totale. Selon le SEASP, si l'un des parents parvenait à trouver un nouveau logement suffisamment spacieux et à une distance maximale de trente minutes de l'école actuelle des enfants, une garde alternée pouvait être instaurée.

Dans la situation actuelle, il n'était pas possible "de dire quel parent [était] le plus à même de s'occuper principalement des enfants et en quoi cela constituerait un meilleur équilibre pour elles".

Il était nécessaire que les parents entreprennent un travail de coparentalité afin de travailler sur leur communication et les modalités de la garde alternée. L'inquiétude qui perdurait quant à la mise en place de ce mode de prise en charge était la relation parentale, notamment le dénigrement du père envers la mère.

d.a L'enseignante de D______, à l'époque en 3ème primaire à l'école J______, a indiqué au SEASP que les enseignantes avaient été majoritairement en contact avec le père et que la collaboration avec les parents était très bonne. Selon l'enseignante de E______, à l'époque en 1ère primaire à la même école, les deux parents étaient investis dans la collaboration avec les enseignants.

Les deux filles allaient bien à l'école et étaient bien intégrées auprès des camarades.

d.b La pédopsychiatre en charge du suivi de E______ depuis février 2020 a indiqué que la demande initiale avait été "portée" par le père, qui avait évoqué une violente altercation familiale à fin 2019 à laquelle les enfants auraient assisté. Le père accompagnait régulièrement la fille aux consultations, auxquelles il pouvait participer de manière active. La mère, bien que n'ayant pas de demande, avait sollicité la pédopsychiatre pour se tenir informée du travail en cours. Cette dernière avait suivi D______ de juillet 2017 à octobre 2019; la demande de soin avait été "portée" par le père. Le développement psycho-affectif des filles était tributaire de la capacité de l'environnement à les protéger du conflit de couple des parents et à trouver un mode de garde clair, régulier, prévisible et sécurisant.

d.c La psychiatre de A______ a indiqué au SEASP qu'elle suivait celle-ci, qui lui avait été adressée par sa précédente psychiatre, depuis décembre 2016. La patiente, alors qu'elle était enceinte de son deuxième enfant, avait des pensées négatives, des angoisses, de la fatigue et craignait qu'il arrive malheur à sa fille aînée. Elle souffrait de dépression; elle prenait un antidépresseur et occasionnellement un anxiolytique. Elle allait beaucoup mieux depuis plusieurs mois. Le suivi thérapeutique actuel était davantage un soutien dans les conflits de couple. Ces difficultés relationnelles au sein du couple étaient récurrentes depuis le début des consultations. Les médicaments pris par A______ n'avaient pas d'incidence négative sur ses capacités parentales. Elle abordait régulièrement son rôle de mère lors de rendez-vous et semblait soucieuse du bien-être de ses filles. La psychiatre avait eu l'occasion de rencontrer B______ à une reprise en décembre 2019. Lors de cet échange, celui-ci s'était montré "rabaissant envers son épouse".

d.d D______ a exposé au SEASP que ses parents se disputaient tous les jours et durant longtemps; ils levaient la voix. Ils ne mangeaient jamais ensemble et s'évitaient souvent. Depuis longtemps, sa mère dormait au salon. Son père fermait sa chambre à clé, afin que sa mère ne puisse pas y accéder. Il y cachait des bonbons, qu'il donnait à sa sœur et à elle-même.

e. Entendus le 14 octobre 2021 par le Tribunal, les parents ont déclaré qu'ils avaient essayé de mettre en pratique les propositions du SEASP relatives à une garde alternée. Les filles passaient ainsi deux jours et demi avec leur mère, puis deux jours et demi avec leur père, ainsi qu'un jour du week-end avec chacun des parents.

B______ a précisé ne pas avoir trouvé un autre logement, raison pour laquelle lorsqu'il n'avait pas la garde des filles, il allait dormir chez des amis. Il a évoqué des problèmes de vue pour solliciter l'attribution du domicile conjugal, au sein duquel il avait ses repères.

Il a produit notamment un courrier adressé le 7 octobre 2021 par le Centre ophtalmologique de K______ à l'OCAS Genève, dont il résulte qu'il n'a pas de vision stéréoscopique en raison de la perte de son œil droit et de l'évolution défavorable par rapport à un problème rétinien à son œil gauche. Une cataracte avançait lentement sur son œil unique (œil gauche). Vu l'absence de fonction oculaire droite, il avait un champ visuel rétréci du côté droit et une partie de vision stéréoscopique. Il avait été conseillé au patient de prendre soin de son œil gauche avec des contrôles annuels et de protéger cet œil avec des lunettes protectrices lorsqu'il travaillait et lors de l'utilisation d'outils (pièce 11).

A l'issue de l'audience, les parties se sont déclarées d'accord de prendre rendez-vous avec l'assistant social de l'Hospice général en charge de leur dossier, afin de trouver une solution de relogement pour l'un d'entre eux.

La démarche n'ayant pas été faite, lors de l'audience du 18 novembre 2021, d'accord avec les parties, le Tribunal a renvoyé la cause à une audience ultérieure de plaidoiries pour leur laisser une seconde opportunité de prendre contact avec l'assistant social de l'Hospice général.

f. Lors de l'audience du Tribunal du 22 février 2022, les parties ont confirmé avoir commencé une thérapie. Aucune solution de relogement n'avait été trouvée.

B______ a produit notamment un certificat d'incapacité de travail établi par le Centre ophtalmologique de K______ le 14 janvier 2022 et attestant qu'il avait été totalement incapable de travailler du 14 au 28 janvier 2022 "pour des raisons médicales" (pièce 13).

A l'issue de l'audience, les parties ont plaidé et, à teneur du procès-verbal, ont persisté dans leurs conclusions. Il résulte du jugement attaqué que chacune des parties a revendiqué la garde exclusive des enfants et l'attribution du logement conjugal, s'accordant sur le fait que compte tenu de leur situation financière, il devait être renoncé à la fixation d'une contribution d'entretien.

D. La situation personnelle et financière des parties et de leurs enfants se présente comme suit.

a. Selon ses déclarations à la Cour, B______ a suivi en Algérie une formation d'électromécanicien et obtenu un certificat d'aptitude. En Suisse depuis 1991, il a travaillé d'abord pour des agences temporaires. Il a obtenu un certificat de monteur en ascenseur à L______, puis travaillé pour M______ et pour N______. Il a connu ensuite des périodes de chômage. En raison de son affection à l'œil, il a dû arrêter l'activité précitée et s'est reconverti dans la vente en 2002. Il a travaillé dans ce domaine jusqu'en 2006. Par la suite, il a effectué des missions temporaires dans différents domaines, notamment dans l'électricité. En 2011, il a été employé par O______ SA. Au moment du mariage il était au chômage. Ensuite, il a encore fait quelques missions temporaires. Depuis 2014, il ne travaille plus et perçoit l'aide de l'Hospice général.

A______ a admis devant la Cour qu'à l'époque du mariage, son mari était au chômage. De 2012 à 2014, il n'avait pas travaillé. Selon ce qu'elle avait compris, il avait par la suite été "placé par l'Hospice général" pour des durées limitées (une semaine). Il avait également travaillé comme chauffeur-livreur à la pharmacie de P______ durant quelques mois. Par la suite, il n'avait plus travaillé.

b. En Algérie, A______, titulaire d'un bac +3 en littérature anglaise, a travaillé dans le domaine de l'imagerie médicale durant trois ans. Elle est arrivée en Suisse en décembre 2012 et n'a jamais exercé d'activité lucrative durant le mariage.

c. Le jugement attaqué n'est pas critiqué en tant qu'il retient ce qui suit:

- les charges mensuelles de A______ comprennent 661 fr. de loyer, charges comprises et allocation de logement déduite (70% de 945 fr.), 182 fr. de prime d'assurance-maladie, subside déduit (selon décompte de l'Hospice général) et 1'350 fr. de base mensuelle OP;

- les charges mensuelles de B______ comprennent 1'200 fr. (loyer estimé), 95 fr. de prime d'assurance-maladie LAMal, subside déduit (selon décompte de l'Hospice général) et 1'200 fr. de base mensuelle OP;

- les charges mensuelles de D______ et de E______ se montent à 619 fr. chacune dès l'âge de 10 ans, puis à 810 fr. chacune (minimum vital 400 fr. jusqu'à
10 ans, puis 600 fr., de 142 fr. de participation au loyer de leur mère (1/2 de 30%), 32 fr. de prime d'assurance-maladie, subside déduit, et 45 fr. de frais de transports publics, dont à déduire les allocations familiales, de 300 fr. par enfant.

d. Avec ses écritures d'appel, B______ a produit notamment les pièces suivantes:

- un compte-rendu d'une consultation du 17 septembre 2020, établi par le Centre ophtalmologique et ORL de P______, faisant état d'une baisse d'acuité visuelle à son œil gauche par rapport à un contrôle effectué en février 2019; ce changement pouvait être expliqué par une cataracte en formation; un traitement chirurgical de la cataracte avait été envisagé (pièce 2);

- une attestation du 19 janvier 2022 du Centre ophtalmologique de K______, indiquant qu'il s'était présenté en urgence à ce Centre le 14 janvier 2022; il avait subi "une attaque de glaucome aiguë à l'OD" et a été traité par laser le jour même. Un arrêt de travail lui avait été prescrit pour une durée de deux semaines à partir du 14 janvier 2022 (pièce 3);

- une demande de prestations AI qu'il avait déposée le 16 avril 2021 à l'OCAS Genève (pièce 12a);

- une attestation datée du 1er avril 2022, par laquelle Q______, domicilié 2______, attestait que B______ "ne pourrait plus retourner chez [lui] même ponctuellement" (pièce 13).

e. B______ a quitté le domicile conjugal, sis 1______[GE], le 6 mai 2022. Il a été logé par l'Hospice général à l'hôtel R______ du 12 mai au 18 juin 2022 et au Centre d'hébergement collectif S______ du 14 juillet au 6 septembre 2022.

Il habite depuis le 6 septembre 2022 à la résidence sociale C______, route 3______, à T______. Il a déclaré à la Cour qu'il dispose d'une grande chambre, avec un grand lit à deux places et un lit pliable et que la résidence comprend une cuisine à chaque étage. Il estime qu'il est en mesure de recevoir ses deux filles dans des conditions adéquates.

Le SPMi a programmé une visite au domicile actuel du père au 26 septembre 2022.

E. Les éléments suivants résultent en outre de l'audition de la curatrice d'organisation et de surveillance du droit de visite.

a. La collaboration des deux parents avec le SPMi est bonne. Ils se rendent toujours disponibles pour les rendez-vous et échangent avec le Service également par messagerie électronique. En revanche, la collaboration entre eux est difficile, ce qui se manifeste lors des entretiens communs aux SPMi. Leurs discussions restent centrées sur le conflit conjugal. La curatrice a donc décidé de les recevoir dorénavant séparément, pour faciliter la recherche de solutions.

b. Le père informe le SPMi à l'avance lorsque, pour des raisons de santé, il ne peut pas exercer son droit de visite. Il a pu exprimer que son épouse lui faisait "porter beaucoup de choses" et l'empêchait de parler au téléphone avec les filles. Il avait un discours de reproche plutôt négatif envers la mère. La curatrice n'avait jamais constaté que la mère faisait obstacle aux organisations mises sur pieds. Au contraire, elle avait toujours accepté les changements dictés par l'état de santé du père. A______ admettait toutefois qu'elle avait dû parfois mettre un terme aux conversations téléphoniques père/filles, au motif qu'elle estimait que son époux abordait le conflit conjugal. Le père le contestait et faisait les mêmes reproches à son épouse.

La situation s'était quelque peu détendue durant les deux dernières semaines. Les appels téléphoniques père/filles se passaient mieux.

c. Du 26 mai au 17 juin 2022, le père a vu les enfants du jeudi après l'école jusqu'à 18h au retour au domicile ainsi que du vendredi après l'école jusqu'à 20h (repas du soir compris). Il n'y avait pas eu de weekends, en raison des conditions de logement et de l'état de santé du père. Après le 17 juin 2022, le père avait informé le SPMi qu'il ne pouvait pas prendre les filles. Il devait se rendre en Algérie. Il avait été convenu que le père aurait la première partie des vacances d'été et la mère la deuxième. Le père a demandé à permuter, ce que la mère a accepté. Ainsi, les filles sont restées avec leur mère du 2 au 26 juillet 2022, puis avec le père, tous les jours de 10h à 18h, du 27 juillet au 21 août 2022. A______ n'avait pas fait obstacle à l'exercice du droit de visite durant cette période. Le 22 août 2022, la curatrice avait rencontré les parents pour établir un calendrier. Il avait été décidé d'appliquer les modalités prévues dans le jugement attaqué, sans les nuits. Le père devait contacter le SPMi pour indiquer si son état de santé le permettrait. Le 24 août 2022, il a écrit au Service par mail qu'il ne pouvait pas s'occuper des filles pour des raisons de santé. Il devait indiquer quand une reprise serait possible. Il envoyait au SPMI des certificats d'arrêt-maladie. Depuis lors, B______ tenait au courant le SPMI de semaine en semaine en envoyant des documents par mail. Ainsi, le père n'avait plus vu les filles depuis le 24 août 2022. En revanche, il avait des contacts téléphoniques avec elles.

Le 21 septembre 2022, la curatrice avait eu un contact téléphonique avec les deux parents, afin de faire le point de situation. La mère avait exprimé des inquiétudes quant à l'état de santé de son mari. Vu la complexité de la situation, la curatrice s'interrogeait sur l'opportunité de reprendre immédiatement les visites comme prévu par le Tribunal. A son avis, il faudrait s'assurer que l'état de santé du père permettra d'introduire les nuits, sans craindre un retour en arrière.

De manière générale, la mère indiquait au SPMI que les filles étaient très heureuses de parler et de voir leur père, que tout se passait bien et que le père et les filles partageaient beaucoup d'activités. En revanche, chaque parent était convaincu que l'autre tenait un discours négatif sur lui avec les filles.

d. La curatrice a eu un échange avec la thérapeute de couple (U______), qui suivait les parents depuis décembre 2021. Celle-ci les recevait soit ensemble, soit séparément. Le suivi était difficile. Les deux n'étaient pas du tout dans un travail de coparentalité. Il y avait peu d'évolution. Tant que les parties étaient en procédure il était difficile d'avancer. De part et d'autre, c'était compliqué. C'était peut-être plus difficile avec le père qui était plus pris dans le conflit conjugal et parvenait moins à se décentrer. La curatrice admettait cependant que la situation était peut-être plus difficile pour le père, vu ses problèmes de logement et de santé.

e. La curatrice a également échangé avec la pédopsychiatre des filles (Dresse V______). Actuellement, les deux filles étaient suivies. Elles avaient chacune un rendez-vous par semaine. Il y avait un gros impact du conflit sur les filles. Elles étaient prises dans un conflit de loyauté. D______ était très angoissée et désorganisée. E______ aussi était préoccupée par la situation. Les deux filles montraient des difficultés de régulation émotionnelle. D______ se posait beaucoup de questions (qui avait tort et qui avait raison). La Dresse V______ restait inquiète sur l'état psycho-affectif des parents. Les deux somatisaient beaucoup et déversaient beaucoup sur les filles. La Dresse V______ s'interrogeait sur la nécessité d'une expertise familiale. Elle n'avait pas exprimé d'inquiétudes sur l'état psychologique de la mère. Plus précisément, elle n'avait pas plus d'inquiétudes sur la situation de la mère que sur celle du père.

EN DROIT

1. 1.1 Les deux appels sont recevables pour avoir été interjetés auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), dans le délai utile de dix jours (art. 271 et 314 al. 1 CPC) et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 CPC) à l'encontre d'une décision sur mesures provisionnelles (art. 308 al. 1 let. b CPC; ATF 137 III 475 consid. 4.1) rendue dans une affaire non pécuniaire dans son ensemble, puisque portant notamment sur l'attribution de la garde des enfants des parties (cf. notamment arrêt du Tribunal fédéral 5A_983/2019 du
13 novembre 2020 consid. 1).

Par économie de procédure, ils seront traités dans le même arrêt (cf. art. 125 let. c CPC) et par souci de simplification l'épouse, requérante en première instance, sera désignée comme l'appelante et l'époux comme l'intimé.

1.2 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). Les mesures protectrices de l'union conjugale étant ordonnées à la suite d'une procédure sommaire (art. 271 let. a CPC), sa cognition est toutefois limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 138 III 636 consid. 4.3.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_812/2015 du 6 septembre 2016 consid. 5.2; 5A_937/2014 du 26 mai 2015 consid. 6.2.2).

Compte tenu des points litigieux en appel, les maximes inquisitoire illimitée et d'office sont applicables (art. 296 al. 1 et 3 CPC).

La maxime inquisitoire ne dispense toutefois pas les parties de collaborer activement à la procédure et d'étayer leurs propres thèses; il leur incombe de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuve disponibles (ATF 128 III 4.11 consid. 3.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_762/2013 du 27 mars 2014 consid. 4.1 et la référence citée).

La Cour ne revoit la cause que dans la limite des griefs suffisamment motivés qui sont formulés (arrêts du Tribunal fédéral 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 5; 5A_89/2014 du 15 avril 2011 consid. 5.3.2).

2. Les parties produisent des pièces nouvelles et allèguent des faits nouveaux.

2.1 A teneur de l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

Dans les causes concernant les enfants mineurs, les parties peuvent cependant présenter des nova en appel même si les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC ne sont pas remplies (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

2.2 Ainsi, les allégations et pièces nouvelles des parties, qui concernent la situation des enfants mineures, sont en l'espèce recevables.

3. L'intimé fait grief au Tribunal d'avoir arbitrairement attribué la garde exclusive des enfants à la mère.

3.1

3.1.1 En vertu de l'art. 176 al. 3 CC, relatif à l'organisation de la vie séparée, lorsque les époux ont des enfants mineurs, le juge ordonne les mesures nécessaires d'après les dispositions sur les effets de la filiation (cf. art. 273 ss CC); il peut notamment attribuer la garde à un seul des parents et statuer sur les relations personnelles (art. 298 al. 2 CC).

La règle fondamentale pour attribuer la garde est le bien de l'enfant, les intérêts des parents devant être relégués au second plan. (ATF 142 III 617 consid. 3.2.3; 141 III 328 consid. 5.4; 131 III 209 consid. 5; arrêt du Tribunal fédéral 5A_739/2020 du 22 janvier 2021 consid. 2.1). Au nombre des critères essentiels, entrent en ligne de compte les relations personnelles entre parents et enfant, les capacités éducatives respectives des parents, leur aptitude à prendre soin de l'enfant personnellement, à s'en occuper, ainsi qu'à favoriser les contacts avec l'autre parent, l'âge de l'enfant et son appartenance à une fratrie ou à un cercle social ainsi que le souhait exprimé par ce dernier s'agissant de sa propre prise en charge; il faut choisir la solution qui, au regard des données de l'espèce, est la mieux à même d'assurer à l'enfant la stabilité des relations nécessaires à un développement harmonieux des points de vue affectif, psychique, moral et intellectuel (ATF 142 III 617 consid. 3.2.3-3.2.4; 136 I 178 consid. 5.3; 115 II 206 consid. 4a; arrêts du Tribunal fédéral 5A_415/2020 du 18 mars 2021 consid. 4.1; 5A_739/2020 du 22 janvier 2021 consid. 2.1; 5A_539/2020 du 17 août 2020 consid. 4.1.2).

Bien que l'autorité parentale conjointe soit désormais la règle et qu'elle comprenne le droit de déterminer le lieu de résidence de l'enfant, elle n'implique pas nécessairement l'instauration d'une garde alternée. L'autorité compétente doit néanmoins examiner, nonobstant et indépendamment de l'accord des parents quant à une garde alternée, si celle-ci est possible et compatible avec le bien de l'enfant (ATF 142 III 612 consid. 4.2, 617 consid. 3.2.3).

3.1.2 Des changements trop fréquents en matière de garde sont en principe considérés comme préjudiciables à l'enfant (arrêts du Tribunal fédéral 5A_401/2021 du 3 mars 2022 consid. 3.2 et les références citées).

3.1.3 Pour trancher le sort des enfants, le juge peut avoir recours aux services de protection de l'enfance ou de la jeunesse pour demander un rapport sur la situation familiale, une enquête sociale pouvant avoir son utilité en cas de situation conflictuelle et de doute sur la solution adéquate pour les enfants (ATF 142
III 617 consid. 3.2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_512/2017 du 22 décembre 2017 consid. 3.4.1).

Le juge n'est pas lié par les conclusions du SEASP. Le rapport de ce service est soumis, à l'instar des autres preuves, au principe de la libre appréciation consacré par l'art. 157 CPC (ACJC/372/2017 du 28 mars 2017 consid. 5.1; ACJC/1681/2016 du 15 décembre 2016 consid. 5.1.2 et la doctrine citée). Cependant, une portée particulière peut être conférée au rapport d'évaluation sociale, qui prend en compte toute une série d'éléments objectifs, basés sur les déclarations d'intervenants scolaires, médicaux ou sociaux; il contient également des appréciations subjectives, lesquelles dénotent souvent une grande expérience en la matière, mais ne sauraient remplacer le pouvoir de décision du juge (ACJC/1311/2017 du 11 octobre 2017 consid. 3.1.2; ACJC/993/2017 du 10 août 2017 consid. 5.1; ACJC/372/2017 du 28 mars 2017 consid. 5.1).

3.2 En l'espèce, si chacun des parents dispose de capacités éducatives, ceux-ci ne parviennent pas à coopérer et ne communiquent que par les biais de la curatrice d'organisation et de surveillance du droit de visite. Une garde alternée est ainsi exclue, compte tenu des mesures organisationnelles et de la transmission régulière d'informations que nécessite ce mode de garde.

Les enfants sont scolarisées à proximité du domicile conjugal, où elles ont continué à résider avec la mère après le départ du père le 6 mai 2022. En octobre 2021, les parents s'étaient déclarés d'accord d'examiner avec l'Hospice général si une possibilité de relogement pouvait être trouvée pour l'un d'eux. Une solution durable a pu finalement être trouvée pour le père, qui est logé de manière stable dans une résidence sociale à T______ depuis le 6 septembre 2022. L'intimé estime qu'il est en mesure de recevoir les enfants de manière adéquate dans ce logement. Vu l'âge des enfants, il y a toutefois lieu de privilégier leur appartenance à un cercle social et de maintenir le statu quo.

Le jugement attaqué sera donc confirmé en tant qu'il attribue la garde des enfants à la mère.

Par conséquent, les allocations familiales doivent revenir à la mère.

Quant à l'attribution de la jouissance du domicile conjugal, le critère de l'utilité en lien avec la garde des enfants doit primer tout autre critère (cf. par exemple arrêt du Tribunal fédéral 5A_768/2019 du 21 mars 2022 consid. 5.2), ce qui n'est pas contesté par les parties.

Au vu de ce qui précède, les chiffres 2, 7 et 11 du dispositif du jugement attaqué, contestés par l'époux, seront confirmés.

4. Restent à fixer les relations personnelles entre le père et les deux filles.

4.1 Aux termes de l'art. 273 al. 1 CC, le parent qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde ainsi que l'enfant mineur ont réciproquement le droit d'entretenir les relations personnelles indiquées par les circonstances. Le droit aux relations personnelles est considéré comme un droit de la personnalité de l'enfant qui doit servir en premier lieu l'intérêt de celui-ci (ATF 131 III 209 consid. 5; 127 III 295 consid. 4a; 123 III 445 consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral 5A_184/2017 du 9 juin 2017 consid. 4.1 et les références); dans chaque cas, la décision doit donc être prise de manière à répondre le mieux possible à ses besoins (ATF 117 II 353 consid. 3; 115 II 206 consid. 4a et 317 consid. 2), l'intérêt des parents étant relégué à l'arrière-plan (ATF 130 III 585 consid. 2.2.1 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 5A_459/2015 du 13 août 2015 consid. 6.2.1). Le droit de visite est aussi une composante du droit au respect de la vie familiale selon l'art. 8 § 1 CEDH (ATF 107 II 301 consid. 6).

4.2 En l'espèce, il n'est pas contesté que durant la vie commune l'intimé s'occupait régulièrement des enfants. Il est par ailleurs admis que les filles sont très heureuses de voir leur père et partagent diverses activités avec lui. Toutefois, depuis la séparation, l'intimé n'a vu les enfants que du 26 mai au 17 juin 2022, du jeudi après l'école jusqu'à 18h au retour au domicile ainsi que du vendredi après l'école jusqu'à 20h (repas du soir compris), puis, du 27 juillet au 21 août 2022, tous les jours de 10h à 18h. Depuis cette dernière date, il n'a plus été en mesure de s'occuper de ses filles pour des raisons de santé. A ce jour, l'on ignore quelles sont ses nouvelles conditions de logement et son état de santé. Ces éléments doivent être vérifiés par le SPMI, en tout cas avant que les filles passent des nuits au nouveau domicile du père.

Au vu de ce qui précède, les modalités des relations personnelles décidées par le Tribunal (ch. 3 du dispositif du jugement attaqué) - lesquelles ne sont d'ailleurs pas contestées par l'appelante - seront confirmées, avec la précision que les nuits seront introduites, y compris pour les vacances scolaires, lorsque la curatrice estimera que les conditions de logement et de santé du père le permettront. Il appartiendra à la curatrice, dès que les conditions favorables à l'élargissement seront réunies, d'en informer le Tribunal de protection.

5. L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir considéré que son époux n'était pas en mesure de contribuer à l'entretien des enfants. A son avis, il y a lieu de lui imputer un revenu hypothétique.

5.1 Lorsqu'il entend tenir compte d'un revenu hypothétique, le juge doit examiner deux conditions cumulatives. Il doit déterminer d'une part si l'on peut raisonnablement exiger d'une personne qu'elle exerce une activité lucrative ou augmente celle-ci, eu égard, notamment, à sa formation, à son âge et à son état de santé; il s'agit d'une question de droit. Le juge doit d'autre part établir si la personne a la possibilité effective d'exercer l'activité ainsi déterminée et quel revenu elle peut en obtenir, compte tenu des circonstances subjectives susmentionnées, ainsi que du marché du travail; il s'agit d'une question de fait (ATF 143 III 233 consid. 3.2; 137 III 102 consid. 4.2.2.2). Les circonstances concrètes de chaque cas sont déterminantes. Les critères dont il faut tenir compte sont notamment l'âge, l'état de santé, les connaissances linguistiques, la formation (passée et continue), l'expérience professionnelle, la flexibilité sur les plans personnel et géographique, la situation sur le marché du travail, etc. (ATF 147 III 308 consid. 5.6; arrêts du Tribunal fédéral 5A_29/2022 du 29 juin 2022 consid. 5.1; 5A_191/2021 du 22 février 2022 consid. 5.1.2; 5A_645/2020 du 19 mai 2021 consid. 5.2.1).

5.2 En l'espèce, il est admis que, depuis 2014, l'époux n'exerce plus d'activité lucrative, à part des missions temporaires très limitées, et que la famille perçoit l'aide de l'Hospice général. L'intimé souffre de troubles oculaires: il ne voit pas de son œil droit et l'état de son œil gauche évolue défavorablement. Le certificat médical du 14 janvier 2022, même s'il ne couvre qu'une période limitée, les attestations médicales des 17 septembre 2020, 7 octobre 2021 et 19 janvier 2022, le dépôt le 16 avril 2021 d'une demande de prestations de l'AI, ainsi que le fait que depuis la rentrée scolaire l'état de santé de l'intimé l'empêche de s'occuper de ses filles, permettent de retenir, au stade de la vraisemblance, qu'il ne peut être exigé du père, âgé de 55 ans, qu'il exerce une activité lucrative. L'appelante l'admettait d'ailleurs implicitement devant le Tribunal, puisqu'elle ne réclamait aucune contribution d'entretien en première instance.

Le chiffre 6 du dispositif du jugement attaqué, contesté par l'épouse, sera donc confirmé.

6. 6.1 Les parties ne critiquent à juste titre ni la quotité ni la répartition des frais de première instance (art. 31 RTFMC; art. 106 al. 2 et 107 al. 1 let. c CPC). Les chiffres 14 et 15 du dispositif du jugement attaqué seront donc confirmés.

6.2 Les frais judiciaires de la procédure d'appel seront fixés à 1'800 fr. (art. 31 et 35 RTFMC).

Compte tenu de la nature et de l'issue du litige, ainsi que des conclusions concordantes des parties à ce sujet, lesdits frais judiciaires seront répartis à parts égales entre elles et chaque partie supportera ses propres dépens d'appel (art. 106 al. 1 et 107 al. 1 let. c CPC).

Dans la mesure où les parties plaident au bénéfice de l'assistance juridique, leurs frais judiciaires seront provisoirement supportés par l'Etat de Genève (art. 122 al. 1 let. b CPC), étant rappelé que le bénéficiaire de l'assistance juridique est tenu au remboursement des frais judiciaires mis à la charge de l'Etat dans la mesure de l'art. 123 CPC (art. 19 RAJ).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevables les appels interjetés le 1er avril 2022 par A______ contre les chiffres 6 et 17 et le 4 avril 2022 par B______ contre les chiffres 2, 3, 7 et 11 du dispositif du jugement JTPI/3613/2022 rendu le 21 mars 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/2420/2021-18.

Au fond :

Annule le chiffre 3 du dispositif du jugement attaqué et, statuant à nouveau sur ce point:

Réserve à B______ un droit de visite sur ses filles D______ et E______, lequel s'exercera, sans les nuits, à raison de deux jours par semaine, un week-end sur deux et durant la moitié des vacances scolaires, à défaut d'accord contraire du curateur d'organisation et de surveillance du droit de visite.

Dit que les nuits seront introduites avec l'accord du curateur d'organisation et de surveillance du droit de visite, dès que les conditions de logement et de santé du père le permettront.

Confirme le jugement attaqué pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Transmet copie du présent arrêt au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant et au Service de protection des mineurs.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'800 fr. et les met à la charge de chacune des parties par moitié.

Dit que les frais judiciaires d'appel sont provisoirement supportés par l'Etat de Genève.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.