Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/1136/2025 du 14.10.2025 sur JTAPI/525/2025 ( PE ) , REJETE
En droit
| RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/1179/2025-PE ATA/1136/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 14 octobre 2025 2ème section |
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dans la cause
A______ recourante
contre
OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé
_________
Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 mai 2025 (JTAPI/525/2025)
A. a. Par décision du 28 février 2025, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a refusé d’octroyer à A______, ressortissante de la République de Moldavie née le ______ 1964, une autorisation de séjour.
B. a. Par acte du 31 mars 2025, A______ a recouru auprès de Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision.
b. Par courrier recommandé du 4 avril 2025, le TAPI a imparti à A______ un délai échéant le 5 mai 2025 pour le paiement d’une avance de frais de CHF 500.-, sous peine d’irrecevabilité.
c. Ce courrier a été distribué à A______ le 8 avril 2025.
d. L’avance de frais n’a pas été effectuée dans le délai imparti.
e. Par jugement du 19 mai 2025, le TAPI a déclaré le recours irrecevable.
C. a. Par acte déposé au greffe le 19 juin 2025, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à ce que le délai pour payer l’avance de frais lui soir restitué. À titre préalable, l’audition de B______ et de C______ devait être ordonnée.
Elle avait confié à son beau-fils, B______, la tâche de payer l’avance de frais. Il s’était acquitté de cette tâche en ordonnant le paiement via l’e‑banking de sa banque RAIFFEISEN.
Il était convaincu que la transaction avait été effectuée correctement et avait été, comme elle, très choqué par la décision d’irrecevabilité.
Ils savaient qu’une « erreur ou une défaillance technique » était survenue au niveau de la banque. B______ s’était rendu à la banque RAIFFEISEN de D______ où il avait été reçu par C______, qui lui avait confirmé que « ce genre de problème » pouvait arriver.
b. Le 18 juillet 2025, l’OCPM s’en est rapporté à justice.
c. La recourante n’a pas produit de réplique dans le délai imparti au 22 août 2025.
d. Le 28 août 2025, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).
2. À titre préalable, la recourante conclut à l’audition de son beau-fils et d’une employée de la banque RAIFFEISEN de D______.
2.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_157/2021 du 7 juillet 2021 consid. 3.1). Le droit d’être entendu n'implique pas une audition personnelle de l'intéressé, celui-ci devant simplement disposer d'une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l'issue de la cause (art. 41 LPA ; ATA/242/2023 du 14 mars 2023 et les références citées).
2.2 En l’espèce, ainsi qu’il sera vu plus loin, la recourante ne rend pas vraisemblable qu’elle aurait sans sa faute été empêchée de payer l’avance de frais dans le délai. Elle n’allègue en particulier aucun fait précis qu’un témoignage pourrait confirmer. L’audition des témoins n’est ainsi pas utile à la solution du litige.
Il ne sera pas donné suite à la demande d’actes d’instruction.
3. Est litigieuse l’irrecevabilité du recours formé devant le TAPI pour non-paiement de l’avance de frais dans le délai imparti.
3.1 L'exigence de l'avance de frais et les conséquences juridiques en cas de non‑paiement de celle-ci relèvent du droit de procédure cantonal. Les cantons sont libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d'organiser cette matière à leur guise (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1080/2024 du 10 septembre 2024 consid. 2.1).
3.2 En vertu de l'art. 86 LPA, la juridiction invite le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables ; elle fixe à cet effet un délai suffisant (al. 1). Si l'avance n'est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (al. 2).
3.3 À rigueur de texte, l'art. 86 LPA ne laisse aucune place à des circonstances extraordinaires qui justifieraient que l'avance de frais n'intervienne pas dans le délai imparti (ATA/1043/2021 du 5 octobre 2021 consid. 3b ; ATA/1080/2024 précité consid. 2.2).
3.4 Le moment déterminant pour constater l'observation ou l'inobservation du délai est celui auquel la somme a été versée en faveur de l'autorité à la Poste suisse (que ce soit au guichet d'un bureau de poste ou lors d'un transfert depuis l'étranger) ou celui auquel l'ordre de paiement en faveur de l'autorité a été débité du compte postal ou bancaire du recourant ou de son mandataire (ATF 139 III 364 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_884/2017 du 22 février 2018 consid. 3.1.1 et les arrêts cités ; ATA/1170/2019 du 19 juillet 2019 consid. 3b).
3.5 Selon la jurisprudence constante, il convient d'appliquer par analogie la notion de cas de force majeure de l'art. 16 al. 1 LPA afin d'examiner si l'intéressé a été empêché sans sa faute de verser l'avance de frais dans le délai fixé (ATA/184/2024 du 6 février 2024 consid. 2.2 et les arrêts cités).
3.6 Tombent sous la notion de force majeure les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s'imposent à lui de façon irrésistible (ATA/807/2024 du 9 juillet 2024 consid. 4.4 ; ATA/160/2019 du 19 février 2019 consid. 2b). Les conditions pour admettre un empêchement sont très strictes. Ce dernier doit être imprévisible et sa survenance ne doit pas être imputable à faute à l'administré (arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.2 et la jurisprudence citée ; ATA/807/2024 précité consid. 4.4).
3.7 Que le retard dans le paiement de l'avance de frais soit imputable au plaideur, à son mandataire ou à la banque chargée du paiement, le comportement fautif doit être imputé à la partie recourante elle-même (ATF 114 Ib 67 consid. 2 et 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_21/2022 du 11 novembre 2022 consid. 3.4).
3.8 Il n'y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d'une avance de frais dans un délai déterminé. Il faut cependant que son auteur ait été averti de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le paiement et des conséquences de l'inobservation de ce délai (ATF 133 V 402 consid. 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_135/2024 du 7 mai 2024 consid. 3.2). La gravité des conséquences d'un retard dans le paiement de l'avance sur la situation du recourant n'est pas pertinente (arrêts du Tribunal fédéral 2C_703/2009 du 21 septembre 2010 consid. 4.4.2 ; 2C_645/2008 précité consid. 2.2).
3.9 En l’espèce, la recourante expose avoir chargé son beau-fils du paiement de l’avance de frais. Elle ajoute que celui-ci s’était acquitté de sa tâche en ordonnant le paiement à sa banque via l’e-banking. Elle invoque une « erreur ou une défaillance technique » de la banque dans l’exécution de l’ordre.
Elle n’indique toutefois pas quel jour l’ordre de paiement aurait été donné, pour quelle date d’exécution, ni si le paiement a finalement été exécuté, et à quelle date. Elle ne produit aucun document.
Quoi qu’il en soit, même si un retard dû à une défaillance imputable à la banque de son beau-fils devait être établi, la recourante devrait en subir les conséquences et ne pourrait se prévaloir d’un cas de force majeure, en application de la jurisprudence précitée.
C’est ainsi de manière conforme au droit et sans excès ni abus de son pouvoir d’appréciation que le TAPI a déclaré le recours irrecevable.
Mal fondé, le recours devant la chambre de céans sera rejeté.
4. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).
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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 19 juin 2025 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 mai 2025 ;
au fond :
le rejette ;
met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;
dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;
communique le présent arrêt à A______, au Tribunal administratif de première instance, à l'office cantonal de la population et des migrations ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.
Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Claudio MASCOTTO, juges.
Au nom de la chambre administrative :
| la greffière-juriste :
M. MICHEL
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| la présidente siégeant :
F. KRAUSKOPF |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
| Genève, le
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| la greffière :
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Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html
| Recours en matière de droit public | Recours constitutionnel subsidiaire |
| Art. 82 Principe Le Tribunal fédéral connaît des recours : a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ; … Art. 83 Exceptions Le recours est irrecevable contre : … c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent : 1. l’entrée en Suisse, 2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit, 3. l’admission provisoire, 4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi, 5. les dérogations aux conditions d’admission, 6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ; d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues : 1. par le Tribunal administratif fédéral, 2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ; … Art. 89 Qualité pour recourir 1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque : a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ; b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification. … Art. 95 Droit suisse Le recours peut être formé pour violation : a. du droit fédéral ; b. du droit international ; c. de droits constitutionnels cantonaux ; d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ; e. du droit intercantonal. Art. 100 Recours contre une décision1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète. ______________________________________________ | Art. 113 Principe Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89. Art. 115 Qualité pour recourir A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque : a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée. Art. 116 Motifs de recours Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels. Art. 100 Recours contre une décision 1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète. ___________________________________________
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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)
1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.
2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.
3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.