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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/856/2024

ATA/1476/2024 du 17.12.2024 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/856/2024-AIDSO ATA/1476/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 décembre 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre

HOSPICE GÉNÉRAL intimé

_________



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1982, est de nationalité suisse.

b. Il a bénéficié de prestations d’aide financière de l’Hospice général (ci-après : l’hospice) du 1er mai 2012 au 31 mai 2021. Il a d’abord été aidé seul, puis avec son épouse et leurs quatre enfants jusqu’en juin 2020, date de la séparation du couple. Dès le mois de juillet 2020, il a à nouveau été aidé seul, la mère ayant la garde des enfants.

c. Il a, notamment les 5 avril 2017, 7 août 2019 et 2 octobre 2020, signé le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l’Hospice général », confirmant avoir pris acte de la subsidiarité des prestations d’aide financière versées par l’hospice à toute autre ressource provenant du travail, de la famille, de la fortune et de prestations sociales, s'engager à tout mettre en œuvre pour améliorer sa situation sociale et financière, s'engager à donner immédiatement et spontanément à l’hospice tout renseignement et toute pièce nécessaire à l’établissement de sa situation personnelle, familiale et économique, tant en Suisse qu’à l’étranger, s'engager à informer immédiatement et spontanément l’hospice de tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant de ses prestations d’aide financière, notamment de toute modification de sa situation personnelle, familiale et économique tant en Suisse qu’à l’étranger, et s'engager à rembourser à l’hospice toute prestation exigible perçue indûment, prendre acte qu'en cas de violation de la loi et en particulier de ses engagements, l'hospice se réservait le droit de réduire ou de supprimer les prestations d'aide financière accordées et, le cas échéant, de déposer une plainte pénale à leur encontre.

B. a. Le 24 avril 2017, A______ a complété et signé le document intitulé « Demande de prestations d’aide sociale financière » dans lequel il a indiqué avoir une formation de menuisier, avoir été par la suite vendeur, ne pas avoir d’activité salariée ou indépendante et n’être titulaire que d’un seul compte bancaire auprès de la Banque cantonale de Genève (ci-après : BCGe).

b. En juin 2020, à la suite d’un changement de centre d’action social (ci-après : CAS) consécutif à la séparation susmentionnée, A______ a déclaré à son nouvel assistant social qu’il avait le projet de devenir indépendant et de créer pour ce faire une entreprise de menuiserie. Son assistant social l’a informé des conséquences que cela aurait sur l’aide financière qu’il percevait, à savoir que celle‑ci serait limitée à trois mois.

c. En juillet et août 2020, A______ s’est adressé à plusieurs reprises à l’hospice en vue de trouver un financement pour son activité indépendante. Une demande de fonds en ce sens a été déposée auprès d’une fondation privée mais n’a pas abouti, ce dont A______ a été informé par une assistante sociale de l’hospice.

d. A______ a informé son assistante sociale qu’il allait prochainement lancer son activité indépendante. Toutefois, par la suite, il n’a plus du tout évoqué ce projet aux différents assistants sociaux en charge de son dossier.

e. Le 22 avril 2021, le service des enquêtes et conformités (ci-après : SEC) de l’hospice, saisi en lien avec des interrogations de l’hospice quant à l’évolution de la situation des enfants du recourant, a émis un « rapport de contrôle terrain ».

Le logement de A______ était composé de trois chambres. La première était occupée par ses deux filles aînées et la deuxième par lui-même, son fils et sa fille cadette. Il a indiqué que la troisième chambre était occupée par sa cousine, qui lui « donnait un coup de main » avec ses quatre enfants, mais il a refusé d’ouvrir la porte de la chambre. Dans sa salle de douche étaient entreposés des outils de menuiserie ; interrogé par le contrôleur, A______ a déclaré ne pas travailler dans le domaine, mais uniquement bricoler.

f. Le 30 avril 2021, A______ a transmis à l’hospice une copie du procès‑verbal de l’audience de comparution personnelle des parties s’étant tenue le 24 novembre 2020 devant le Tribunal civil. Il avait à cette occasion déclaré avoir une société d’agencement intérieur en raison individuelle, y travailler seul et avoir ouvert un compte professionnel un mois et demi plus tôt.

g. Lors d’un entretien de suivi, le 11 mai 2021, A______ a confirmé ses dires au sujet de son appartement. Sa cousine y occupait une chambre et ne payait pas de loyer. Il n’avait pas voulu montrer la chambre à l’enquêteur car elle dormait. Il a par contre admis avoir une activité indépendante. Il n’en tirait que peu de revenus et n’était pas inscrit au registre du commerce.

h. Le lendemain, A______ a expliqué par téléphone à l’assistante sociale avoir eu une unique entrée de CHF 3'000.- sur son compte professionnel, qui n’était toutefois pas un bénéfice car il s’agissait de matériel dont il pouvait fournir les factures. Il a transmis des extraits de son compte professionnel BCGe (pour les mois d’octobre 2020 à mars 2021, sauf janvier 2021 qui manquait).

i. Par décision du 1er juin 2021, le centre d’action sociale (ci-après : CAS) B______a mis fin au versement de prestations d’aide financière à A______, avec effet au 31 mai 2021.

j. Le 3 juin 2021, l’intéressé a formé opposition contre cette décision. Il avait annoncé à ses assistants sociaux le fait qu’il était en train de se mettre à son compte. S’agissant du « contrôle terrain », il avait donné les raisons pour lesquelles il n’avait pas ouvert la porte de la chambre de sa cousine.

k. Par décision du 24 août 2021, le directeur de l’hospice a rejeté l’opposition. Si l’intéressé avait bien annoncé vouloir se lancer dans une activité indépendante, il n’avait jamais déclaré avoir effectivement commencé celle-ci, pas plus qu’il n’avait donné d’informations sur les revenus qu’il en avait tirés, et il n’avait pas annoncé l’ouverture de son compte bancaire professionnel, ouvert à tout le moins depuis le 22 octobre 2020 et sur lequel avaient été crédités au moins quatre montants correspondant à des travaux effectués pour différentes personnes. Lors du contrôle à son domicile, A______ avait indiqué que les outils de menuiserie n’étaient pas destinés à un usage professionnel.

Cette décision n’a pas été contestée.

l. En août et septembre 2021, A______ a demandé à nouveau l’aide financière, disant avoir renoncé à son activité d’indépendant. Il a pu en bénéficier à partir du 1er mars 2022.

m. Par décision du 22 mars 2023, le CAS B______a demandé à A______ la restitution de CHF 28'029.70 correspondant aux prestations versées par l’hospice d’octobre 2020 à mai 2021. Si l’hospice avait été informé de son activité indépendante de menuisier et des revenus perçus dans ce cadre, A______ n’aurait pas eu droit à l’aide financière durant cette période.

C. a. Le 2 mai 2023, A______ a formé opposition contre la décision précitée. Il ne comprenait pas la décision car son assistant social – qui avait été en arrêt maladie pendant près d’une année et avait été remplacé par d’autres personnes – devait l’aider à se mettre à son compte. L’hospice devait favoriser la réinsertion professionnelle. Sa situation financière était enfin des plus précaires, notamment car il allait bientôt devoir s’occuper de ses quatre enfants.

b. Par décision du 20 février 2024, le directeur de l’hospice a rejeté l’opposition.

A______ avait reçu des prestations d’aide financière sans déclarer des éléments importants relatifs à sa situation financière, en particulier le fait d’avoir commencé une activité indépendante comme menuisier et d’avoir ouvert un compte d’entreprise au plus tard au mois d’octobre 2020, enregistré au nom de son entreprise en raison individuelle « C______» et sur lequel il percevait des revenus provenant de cette activité indépendante. Ladite activité avait été déployée du mois d’octobre 2020 au mois de mai 2021 à tout le moins, A______ ne pouvait être mis au bénéfice de prestations d’aide financière – ordinaire comme exceptionnelle – durant toute cette période. Ayant gravement violé son devoir d’information, il était tenu à restitution des montants indûment perçus. Un plan de remboursement pouvait être convenu.

D. a. Par acte posté le 11 mars 2024, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur opposition précitée, sans prendre de conclusions.

Comme indiqué dans son opposition, il voulait bien « rembourser une partie, mais pas la totalité, et [il pouvait] tout prouver ».

b. Le 14 mars 2024, le juge délégué a écrit au recourant. Son acte de recours ne contenait aucun motif précis, ni conclusions claires puisqu’il suggérait ne pas contester la totalité du montant réclamé. Un délai lui était imparti pour dire clairement ce qu’il demandait, indiquer le plus précisément possible sur quels aspects et pourquoi il contestait la décision attaquée et fournir les preuves dont il disait disposer.

c. Le 11 avril 2024, A______ a répondu à la chambre administrative, sans joindre aucune pièce. Il n’était pas d’accord avec la décision attaquée car au moment où il avait touché l’argent de ses clients, il n’était pas aidé par l’hospice. Il renvoyait aux documents et comptes bancaires qui pouvaient « tout prouver ».

d. Le 16 mai 2024, l’hospice a conclu au rejet du recours, en précisant l’état de fait et la motivation de sa décision sur opposition.

Étaient notamment joints les extraits du compte professionnel du recourant pour les mois d’octobre à décembre 2020 ainsi que de février 2021 à la clôture du compte le 2 août 2021.

e. Le juge délégué a fixé aux parties un délai au 21 juin 2024 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

f. Le 4 juin 2024, l’hospice a indiqué ne pas avoir de requêtes ni d’observations complémentaires à formuler.

g. Le recourant ne s’est quant à lui pas manifesté.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 52 de la loi sur l’insertion et l’aide sociale individuelle du 22 mars 2007 - LIASI - J 4 04).

2.             L’acte expédié par le recourant contre la décision litigieuse, pas plus que le complément de recours demandé par la chambre de céans, ne comporte de conclusions formelles.

2.1 L’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (art. 65 al. 1 LPA). Il contient également l’exposé des motifs, ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. À défaut, la juridiction saisie impartit un bref délai au recourant pour satisfaire à ces exigences, sous peine d’irrecevabilité (art. 65 al. 2 LPA).

La jurisprudence se montre assez large lorsqu’elle apprécie la réunion des diverses conditions que doit respecter le mémoire de recours. Toutefois, la volonté de recourir doit ressortir de l’acte de l’administré, sans qu’il soit exigé que le terme de « recours » y figure expressément (ATA/398/2024 du 19 mars 2024 consid. 2.1 ; ATA/966/2020 du 29 septembre 2020 consid. 3).

2.2 En l’espèce, le complément de recours mentionne que le recourant n’était pas d’accord avec la décision attaquée « car au moment où il avait touché l’argent de ses clients, il n’était pas aidé par l’hospice ». Il apparaît ainsi qu'il entend remettre en cause cette décision sur opposition ou, du moins, voir ses effets annulés, si bien qu'il sera entré en matière sur le recours.

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de restitution de CHF 28'029.70.

3.1 La LIASI a pour but de prévenir l’exclusion sociale et d’aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1). Elle vise à garantir à ceux qui se trouvent dans la détresse matérielle et morale des conditions d’existence conformes à la dignité humaine (art. 1 al. 2 2e phr.). Avec le règlement d’exécution de la LIASI du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01), elle concrétise les art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 39 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00 ; ATA/256/2020 du 3 mars 2020 consid. 4b).

3.2 Aux termes de l'art. 8 LIASI, ont droit à des prestations d'aide financière les personnes majeures qui ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien ou à celui des membres de la famille dont ils ont la charge (al. 1).

3.3 L'art. 9 al. 1 LIASI prévoit ainsi que les prestations d'aide financière versées sont subsidiaires à toute autre source de revenus, aux prestations découlant du droit de la famille, ainsi qu'à toute autre prestation à laquelle le bénéficiaire et les membres du groupe familial ont droit, en particulier aux prestations d'assurances sociales fédérales et cantonales, et aux prestations communales, à l'exception des prestations occasionnelles. Conformément à l'art. 9 al. 2 LIASI, le bénéficiaire et les membres du groupe familial doivent faire valoir sans délai leurs droits auxquels l'aide financière est subsidiaire et doivent mettre tout en œuvre pour améliorer leur situation sociale et financière.

La personne dans le besoin doit avoir épuisé les possibilités d'auto-prise en charge, les engagements de tiers et les prestations volontaires de tiers (ATA/1148/2024 du 1er octobre 2024 consid. 6.1 ; ATA/1116/2024 du 24 septembre 2024 consid. 2.1). L'aide est subsidiaire, de manière absolue, à toute autre ressource, mais elle est aussi subsidiaire à tout revenu que le bénéficiaire pourrait acquérir par son insertion sociale ou professionnelle (art. 9 al. 1 LIASI ; ATF 146 I 1 consid. 8.2.1 ; ATA/649/2024 du 28 mai 2024 consid. 3.2 ; ATA/417/2024 du 26 mars 2024 consid. 3.8 ; MGC 2005-2006/I A p. 259).

3.4 En vertu de l’art. 11 al. 4 LIASI, le Conseil d’État fixe par règlement les conditions d’une aide financière exceptionnelle, qui peut être inférieure à l’aide financière ordinaire et/ou limitée dans le temps, en faveur notamment des personnes exerçant une activité lucrative indépendante (let. d). Peut être mise au bénéfice de prestations d’aide financière ordinaire, à l’exception des prestations à caractère incitatif, la personne qui exerce une activité lucrative indépendante (art. 16 al. 1 du règlement d’exécution de la LIASI du 25 juillet 2007 - RIASI - J 4 04.01). Jusqu'au 31 décembre 2021, l’aide financière était accordée pour une durée de trois mois et, pour une durée maximale de six mois en cas d’incapacité de travail du bénéficiaire, (art. 16 al. 2 RIASI, dans son état avant le 1er janvier 2022). Depuis le 1er janvier 2022, cette durée maximale a été portée à, respectivement, six et neuf mois.

Selon les travaux préparatoires de la LIASI, entrée en vigueur le 19 juin 2007, le versement de prestations financières aux personnes indépendantes était nouveau, bien que cette modification soit une inscription formelle d'une pratique qui existait déjà partiellement. L'hospice leur accordait en effet une aide maximale d'une durée limitée, à l'échéance de laquelle elles ne pouvaient prétendre à une aide financière régulière que si elles renonçaient à leur activité indépendante et répondaient aux autres conditions de la loi (MGC 2005-2006/I A 260).

Ces dispositions ont codifié la pratique de la chambre de céans, retenant qu'il était conforme au but d'intérêt public inhérent au système des prestations sociales de préserver les deniers publics, lesquels ne sauraient servir à rémunérer des activités indépendantes non viables. Cette pratique répondait au principe de subsidiarité en vertu duquel la personne qui ne peut, par son travail indépendant, subvenir à ses besoins, doit faire valoir les droits qui sont les siens, notamment auprès de l'assurance-chômage, et auxquels l'assistance publique est subsidiaire (ATA/194/2006 du 4 avril 2006 consid. 6 et les références citées ; plus récemment ATA/398/2024 précité consid. 3.4).

3.5 Le fait qu'une société soit inactive ou ne procure aucun bénéfice à son associé gérant président avec signature individuelle est sans incidence sur le statut d'indépendant dudit associé (ATA/398/2024 précité consid. 3.5 ; ATA/117/2015 du 27 janvier 2015 consid. 8).

La chambre administrative a confirmé cette jurisprudence en rappelant que la question de savoir si la société en question était « dormante » ou non n’était pas pertinente. L’obligation du recourant consiste à informer l’hospice de tous ses éléments de fortune et de toute activité indépendante, sans égard à la valeur ou rentabilité de celles-ci. En effet, il appartient à l’hospice d’examiner l’éventuelle prise en compte de ces éléments dans le calcul du droit aux prestations et non au bénéficiaire des prestations, de sorte qu’à défaut, celui-ci doit se voir reprocher une violation de son devoir de renseigner (ATA/1099/2022 du 1er novembre 2022 consid. 6 ; ATA/42/2019 du 15 janvier 2019 consid. 3).

3.6 Selon l’art. 32 al. 1 LIASI, le demandeur ou son représentant légal doit fournir gratuitement tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d’aide financière. Le bénéficiaire doit immédiatement déclarer à l’hospice tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d’aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression (art. 33 al. 1 LIASI).

Le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l’Hospice général » concrétise l’obligation de collaborer et de renseignement. Le bénéficiaire ou son représentant légal doit immédiatement déclarer à l’hospice tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d’aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression (art. 33 al. 1 LIASI ; ATA/1263/2024 du 29 octobre 2024 consid. 4.3 ; ATA/971/2024 du 20 août 2024 consid. 2.7). Il atteste notamment du fait que le bénéficiaire a été informé du caractère subsidiaire des prestations d’aide financière exceptionnelle et du fait que des prestations sociales ou d’assurances sociales ne peuvent se cumuler avec les prestations d’aide financière dont elles doivent être déduites (ATA/1231/2022 du 6 décembre 2022 consid. 4c).

Les sommes figurant sur les comptes bancaires et postaux d'un bénéficiaire sont considérées comme lui appartenant, ce indépendamment des explications qu'il peut donner. Ainsi, dès lors qu’une somme est versée sur le compte d’un bénéficiaire, n'étant ni individualisée, ni individualisable et mélangée avec ses avoirs, elle doit être considérée comme lui appartenant (ATA/690/2023 du 27 juin 2023 consid. 2.8 ; ATA/405/2021 du 13 avril 2021 consid. 5).

3.7 L'art. 35 al. 1 LIASI décrit six cas dans lesquels les prestations d'aide financière peuvent être réduites, suspendues, refusées ou supprimées. Tel est notamment le cas lorsque la personne bénéficiaire ne répond pas ou cesse de répondre aux conditions de la loi (let. a) ou lorsqu'elle ne s'acquitte pas intentionnellement de son obligation de collaborer telle que prescrite par l'art. 32 (let. c) ou qu'elle refuse de donner les informations requises au sens des art. 7 et 32, donne des indications fausses ou incomplètes ou cache des informations utiles (let. d). Conformément à l’art. 35 al. 2 LIASI, l’hospice rend alors une décision écrite et motivée, avec les voies de droit (al. 2).

La suppression ou la réduction des prestations d'assistance doit être conforme au principe de la proportionnalité, imposant une pesée de l'ensemble des circonstances. Il faut alors prendre en considération la personnalité et la conduite du bénéficiaire des prestations, la gravité des fautes qui lui sont reprochées, les circonstances de la suppression des prestations ainsi que l'ensemble de la situation de la personne concernée (ATF 122 II 193 consid. 3b, in JdT 1998 I 562 ; ATA/1662/2019 du 12 novembre 2019 consid. 7).

3.8 Sous le titre « Prestations perçues indûment », l'art. 36 LIASI dispose qu'est considérée comme étant perçue indûment toute prestation qui a été touchée sans droit (al. 1). Par décision écrite, l'hospice réclame au bénéficiaire, à sa succession ou à ses héritiers qui l'ont acceptée, le remboursement de toute prestation d'aide financière perçue indûment par la suite de la négligence ou de la faute du bénéficiaire (al. 2). Le remboursement des prestations indûment touchées peut être réclamé si le bénéficiaire, sans avoir commis de faute ou de négligence, n'est pas de bonne foi (al. 3). L’action en restitution se prescrit par cinq ans, à partir du jour où l’hospice a eu connaissance du fait qui ouvre le droit au remboursement. Le droit au remboursement s’éteint au plus tard dix ans après la survenance du fait (al. 5).

De jurisprudence constante, toute prestation obtenue en violation de l'obligation de renseigner l'hospice est une prestation perçue indûment (ATA/1263/2024 précité consid. 4.4 ; ATA/595/2024 du 14 mai 2024 consid. 3.5).

Celui qui a encaissé des prestations pécuniaires obtenues en violation de son obligation de renseigner est tenu de les rembourser selon les modalités prévues par la LIASI, qui concrétisent tant le principe général de la répétition de l’enrichissement illégitime que celui de la révocation, avec effet rétroactif, d’une décision administrative mal fondée, tout en tempérant l’obligation de rembourser en fonction de la faute et de la bonne ou mauvaise foi du bénéficiaire (ATA/597/2024 du 14 mai 2024 consid. 4.7).

4.             En l'espèce, le recourant, quand bien même il a à un moment indiqué à son assistant social avoir l’intention de commencer une activité indépendante, a omis de déclarer le début effectif de celle-ci, accompagnée de l’ouverture d’un compte bancaire professionnel et d’un site Internet. Les extraits de ce compte bancaire figurant au dossier montrent en outre, contrairement à ce que prétend le recourant, que des clients ont versé des sommes au recourant pendant la période considérée, ce qui n’est toutefois pas déterminant puisque même une activité indépendante ne procurant pas de bénéfice empêche, selon la jurisprudence citée plus haut, de bénéficier de l’aide sociale financière. Lors du contrôle effectué le 22 avril 2021, le recourant a déclaré posséder des outils de menuiserie uniquement pour bricoler. L’exercice d’une activité indépendante en tant que menuisier ressort enfin des propres déclarations du recourant devant le Tribunal civil lors d’une audience s’étant tenue le 24 novembre 2020.

Compte tenu de ces circonstances, le fait que l'autorité intimée ait considéré que le recourant exerçait, depuis le mois d’octobre 2020, une activité indépendante propre à exclure le versement des prestations d'aide sociale ne prête pas le flanc à la critique. Le recourant n’a communiqué à la chambre de céans aucune pièce propre à démontrer le contraire.

La suppression des prestations d'aide sociale se justifiait enfin en raison des manquements au devoir de collaboration reprochés au recourant, qui ont du reste été constatés dans la décision sur opposition du 24 août 2021, entrée en force. C'est donc à bon droit que l'autorité intimée a réclamé, après avoir mis fin au versement de l’aide, le remboursement du montant de CHF 28'029.70 perçu indument.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu la nature du litige, aucun émolument sera perçu (art. 87 al. 1 LPA et art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée, le recourant succombant (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 mars 2024 par A______ contre la décision sur opposition de l’Hospice général du 20 février 2024 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Catherine TAPPONNIER, Patrick CHENAUX, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. MICHEL

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :