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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3113/2021

ATA/1339/2021 du 07.12.2021 sur JTAPI/1077/2021 ( LCI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3113/2021-LCI ATA/1339/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 7 décembre 2021

3ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 22 octobre 2021 (JTAPI/1077/2021)


EN FAIT

1) Par décision du 15 juillet 2021, le département du territoire a délivré à la société B______ une autorisation de construire DD 1______ portant sur six villas contiguës et l'abattage d'arbres sur la parcelle n° 2______ de la commune de C______.

2) Par acte du 14 septembre 2021, Monsieur A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

3) Par lettre recommandée du 17 septembre 2021, le TAPI lui a imparti un délai échéant le 18 octobre 2021 pour procéder au paiement d’une avance de frais de CHF 1'200.-, sous peine d’irrecevabilité de son recours. Il était aussi précisé qu'en cas de ressources insuffisantes, il était possible de solliciter l'assistance juridique au moyen d'un formulaire disponible auprès de son greffe ou en ligne.

4) Selon le suivi des envois de la Poste (« Track & Trace »), un avis de retrait a été distribué à M. A______ le 20 septembre 2021 et le pli réexpédié le 28 septembre suivant.

Ce pli a été reçu en retour au TAPI le 1er octobre 2021 avec la mention « non réclamé » et une étiquette portant la mention « délai 27.09 ».

5) L’avance de frais n’a pas été effectuée dans le délai imparti.

6) Par jugement du 22 octobre 2021, le TAPI a déclaré le recours irrecevable pour défaut de paiement de l’avance de frais dans le délai imparti.

M. A______ était réputé avoir reçu le pli contenant la demande d'avance de frais le 27 septembre 2021. Le délai continuant à courir pour s'acquitter de l'avance demandée demeurait raisonnable. Il connaissait l'existence de la procédure qu'il avait initiée et devait s'attendre à recevoir une telle invitation du TAPI dans les jours suivant le dépôt de son recours. Il n'indiquait pour le surplus pas avoir été victime d'un empêchement non fautif l'ayant empêché de prendre les dispositions nécessaires pour avoir connaissance en temps utile des communications éventuelles du TAPI.

M. A______ n'a pas retiré le pli contenant ce jugement, lequel a été reçu en retour au TAPI le 8 novembre 2021 avec les mentions « non réclamé » et « délai 01.11 ».

7) Par courrier dactylographié non signé expédié le 15 novembre 2021 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), M. A______ a indiqué avoir fait recours pour un projet immobilier proche de chez lui. Il était malheureusement à l'étranger et n'avait donc pas pu retirer son courrier, dont le recommandé du TAPI. Il s'adressait donc à la chambre administrative pour « réactiver » la procédure en cours.

Il a joint à ce courrier l'original de la lettre que le TAPI lui a adressée par pli simple le 9 novembre 2021 (à laquelle était annexé en copie le jugement du 22 octobre 2021) ainsi que copie de l'enveloppe ayant contenu l'original du jugement.

8) La chambre administrative a, par courrier recommandé du 16 novembre 2021, invité M. A______ à lui renvoyer, d'ici au 25 novembre suivant, un exemplaire dûment signé de son recours, sous peine d'irrecevabilité. Son acte du 15 novembre 2021 n'était par ailleurs pas conforme aux exigences de l'art. 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10). Il était dès lors invité à exposer ses motifs et moyens de preuve dans le délai de recours, délai qui n'était pas susceptible d'être prolongé, à nouveau sous peine d'irrecevabilité de son recours.

9) Par courrier expédié le 16 novembre 2021, M. A______ a « renvo[yé] » copie du jugement attaqué ainsi qu'un exemplaire de son recours au TAPI du 14 septembre 2021. Comme expliqué précédemment, il n'avait pas pu retirer son courrier dans la mesure où il se trouvait à l'étranger. Il souhaitait toutefois aller de l'avant contre le projet « mentionné ».

10) Le 19 novembre 2021, la cause a été gardée à juger sur la recevabilité du recours, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est de ces deux points de vue recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. b LPA).

2) a. L’exigence de la motivation au sens de l’art. 65 al. 2 LPA a pour but de permettre à la juridiction administrative de déterminer l’objet du litige qui lui est soumis et de donner l’occasion à la partie intimée de répondre aux griefs formulés à son encontre. Elle signifie que le recourant doit expliquer en quoi et pourquoi il s’en prend à la décision litigieuse. L’exigence de la motivation est considérée comme remplie lorsque les motifs du recours, sans énoncer les conclusions formelles, permettent de comprendre aisément ce que le recourant désire (ATA/1076/2015 du 6 octobre 2015 consid. 2c et les références citées).

b. En l’espèce, le recourant explique, brièvement, ne pas avoir pu faire l'avance de frais en temps utile car il n'avait pas reçu le courrier du TAPI dans la mesure où il se trouvait à l'étranger. On comprend de la sorte le grief formé contre le jugement entrepris, quand bien même son acte ne contient pas de conclusions formelles.

Le recours est par conséquent recevable de ce point de vue également.

3) Le litige porte sur la conformité au droit du jugement du TAPI du 22 octobre 2021 déclarant irrecevable le recours du 14 septembre 2021 contre une décision du département du territoire du 15 juillet 2021.

4) a. L'exigence de l'avance de frais et les conséquences juridiques en cas de non-paiement de celle-ci relèvent du droit de procédure cantonal. Les cantons sont libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d'organiser cette matière à leur guise (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1262/2017 du 5 septembre 2017 consid. 2a et les références citées).

b. En vertu de l'art. 86 LPA, la juridiction invite le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables ; elle fixe à cet effet un délai suffisant (al. 1). Si l'avance n'est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (al. 2).

À rigueur de texte, l'art. 86 LPA ne laisse aucune place à des circonstances extraordinaires qui justifieraient que l'avance de frais n'intervienne pas dans le délai imparti. La référence au « délai suffisant » de l'al. 1 de cette disposition laisse une certaine marge d'appréciation à l'autorité judiciaire saisie (ATA/184/2019 du 26 février 2019 consid. 3c ; ATA/916/2015 du 8 septembre 2015 consid 2c ; ATA/881/2010 du 14 décembre 2010 consid. 4a).

c. Selon la jurisprudence constante, il convient d'appliquer par analogie la notion de cas de force majeure de l'art. 16 al. 1 LPA afin d'examiner si l'intéressé a été empêché sans sa faute de verser l'avance de frais dans le délai fixé (ATA/158/2020 du 11 février 2020 ; ATA/38/2020 du 14 janvier 2020 ; ATA/636/2017 du 6 juin 2017 consid. 4b et les références citées).

d. A été considéré comme un cas de force majeure donnant lieu à restitution de délai le fait qu'un détenu, qui disposait d'un délai de recours de trois jours, n'ait pu expédier son recours dans ce délai, du fait qu'il ne pouvait le poster lui-même et qu'en outre ce pli avait été soumis à la censure de l'autorité (ATA/515/2009 du 13 octobre 2009 consid. 6). Il en allait de même du recourant qui se voyait impartir, par pli recommandé, un délai de quinze jours pour s'acquitter d'une avance de frais alors que le délai de garde pour retirer le pli en question était de sept jours, de sorte qu'il ne restait qu'une semaine au justiciable pour s'exécuter (ATA/477/2009 du 20 septembre 2009 consid. 5).

En revanche, le fait d'avoir été absent ou en vacances pendant la période de distribution ne constitue pas une telle circonstance. La maladie ne constitue un motif d'excuse que si elle empêche le recourant d'agir par lui-même ou de donner à un tiers les instructions nécessaires pour agir à sa place (ATA/50/2009 du 27 janvier 2009 consid. 3c). Dès lors qu'un administré a déposé un recours, il se doit de prendre toutes les dispositions utiles afin de réceptionner les communications qui vont immanquablement lui parvenir en rapport avec ce contentieux. Il lui incombe d'avertir l'autorité de son absence, ou de prendre des dispositions pour faire réceptionner son courrier de façon à être averti de l'arrivée, pendant cette période, d'une décision le concernant. Dans ce sens, un ordre de retenue du courrier à la poste n'est pas suffisant, dans la mesure où, malgré cela, à l'échéance du délai de dépôt de l'avis de pli recommandé, la décision est malgré tout considérée comme notifiée à l'échéance du délai de garde. Si le recourant a omis de prendre les dispositions nécessaires pour que les envois postaux lui soient transmis, il ne peut se prévaloir de son absence lors de la tentative de notification d'une communication officielle à son adresse habituelle s'il devait s'attendre, avec une certaine vraisemblance, à recevoir une telle communication (ATF 134 V 49 consid. 4 ; 130 III 396 consid. 1.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_549/2009 du 1er mars 2010 consid. 3.2.1 et les références citées ; ATA/177/2015 du 6 octobre 2015 ; ATA/2653/2010 du 20 avril 2010).

e. Lorsque la législation applicable ne prévoit pas elle-même des principes particuliers en matière de notification, il faut appliquer les principes découlant de la jurisprudence (Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2015, p. 375).

Une communication par lettre recommandée ou déposée dans une case postale est réputée notifiée, si elle n'est pas remise au destinataire, dans un délai de sept jours après son enregistrement au bureau de poste responsable de la distribution (ATF 134 V 49 consid. 4 ; 123 III 492 consid. 1).

f. Il n'y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d'une avance de frais dans un délai déterminé. Il faut cependant que son auteur ait été averti de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le paiement et des conséquences de l'inobservation de ce délai (ATF 133 V 402 consid. 3.3 ; 104 Ia 105 consid. 5 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_54/2020 du 4 février 2020 consid. 8.2). La gravité des conséquences d'un retard dans le paiement de l'avance sur la situation du recourant n'est pas pertinente (arrêts du Tribunal fédéral 2C_734/2012 du 25 mars 2013 consid. 3.1 ; 2C_703/2009 du 21 septembre 2010 consid. 4.4.2).

Le Tribunal fédéral a récemment confirmé l'application stricte, dans la jurisprudence genevoise, de l'art. 86 al. 2 LPA et des conséquences légales d'un non-paiement de l'avance de frais dans le délai imparti (arrêt du Tribunal fédéral 1C_339/2020 du 20 octobre 2020 consid. 2.4 et les références citées).

5) En l'espèce, il n'est pas contesté que le recourant a été valablement atteint par la communication du TAPI lui impartissant un délai au 18 octobre 2021 pour effectuer le paiement de l'avance de frais, quand bien même le pli a été retourné « non réclamé » à son expéditeur. Le TAPI l'a expédié à l'adresse fournie par le recourant, de sorte qu'il incombait à ce dernier de prendre toutes dispositions utiles pour en avoir connaissance à temps. Le recourant ne soutient à juste titre pas que le TAPI aurait dû chercher à attirer par un autre moyen son attention sur l'exigence du paiement de l'avance de frais, respectivement sur les conséquences d'un non-paiement.

Il apparaît, par ailleurs, que le délai fixé, de trente jours, constitue un délai suffisant. Il n'est pas non plus contesté que l'avance de frais n'a pas été acquittée dans le délai imparti.

Le recourant fait valoir un séjour à l'étranger. Toutefois, de jurisprudence constante, le fait d'avoir été absent ou en vacances pendant la période de distribution ne constitue pas un motif valable.

Le paiement du montant de CHF 400.- à titre d'avance de frais dans le cadre de la procédure de recours de la chambre de céans n'est pas de nature à réparer les conséquences de l'absence du paiement de l'avance de frais litigieuse dans le délai que le TAPI avait imparti.

Dans ces circonstances, la chambre de céans ne peut que constater que, l'avance de frais n'ayant pas été acquittée dans le délai imparti, le TAPI était fondé à déclarer le recours irrecevable, conformément à l'art. 86 al. 2 LPA.

6) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui ne peut se voir allouer une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 novembre 2021 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 22 octobre 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, au département du territoire-oac, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Lauber, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. Poinsot

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :