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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1227/2015

ATA/486/2015 du 20.05.2015 ( TAXIS ) , ACCORDE

Recours TF déposé le 26.06.2015, rendu le 07.01.2016, IRRECEVABLE, 2C_547/2015
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1227/2015-TAXIS

" ATA/486/2015

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 20 mai 2015

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

A______ GMBH
et B______ HOLDING B.V
représentées par Me Marcel Dietrich, avocat

contre

SERVICE DU COMMERCE



Attendu, en fait, que :

1) A______ GmbH (ci-après : A______ GmbH) est une société à responsabilité limitée, inscrite au registre du commerce de Zurich avec adresse dans ce canton. Son but social est de soutenir des entreprises, en particulier celles du groupe C______, dans l’offre de prestations de services de transport par le biais de la téléphonie mobile ou de la communication en ligne et de fournir toutes les prestations directes ou indirectes y relatives. Elle est entièrement détenue par B______ Holding B.V. (ci-après : B______ Holding), société ayant son siège à Amsterdam (Hollande), qui en est également l'associée, sans pouvoir de signature.

2) Depuis septembre 2014, A______ GmbH déploie également ses activités dans le canton de Genève où elle dispose de locaux, actuellement à l’avenue de Champel.

3) La chambre civile de la Cour de justice, saisie d’un contentieux en matière de concurrence déloyale opposant des centrales de taxis et des chauffeurs de taxis indépendants à A______ GmbH a résumé l’organisation générale des activités du groupe C______ et celle mise en place spécifiquement à Genève, dans le cadre d’un arrêt du 27 février 2015 rendu sur mesures provisionnelles (ACJC/230/2015). Selon les faits constatés dans cet arrêt et admis par les parties recourantes ou qui ressortent des pièces versées à la procédure, les activités du groupe C______ peuvent être résumées ainsi :

a. Le groupe C______ dispose d’un site Internet « www.C______.com » à partir duquel il propose, d’une part, à une personne désireuse de se déplacer par véhicule automobile dans des villes (ci-après : l’utilisateur) différentes solutions de transport et d’autre part à une personne disposée à prendre en charge son transport moyennant rémunération (ci-après : le transporteur), la possibilité de proposer leurs services. Cette mise en relation se fait par le biais d’une application téléchargeable, accessible via le site internet précité, combinant les possibilités données par la géolocalisation et par la communication électronique (ci-après : l’application). Le groupe C______ propose cette prestation dans de nombreux pays, suivant différents modèles mis en œuvre en fonction des conditions spécifiques au pays (E______X, F______ Pop, G______ Van, etc.).

b. Selon les conditions d'utilisation relatives à la Suisse (version du 8 décembre 2014), « applicables à toute visite et utilisation du site web, au service et à l'application, ainsi qu'à toutes informations, recommandations et/ou services fournis directement ou indirectement par le site web, le service et l'application », le cocontractant est B______ Holding.

c. En utilisant l’application ou le service, l’utilisateur entre en relation contractuelle avec B______ Holding. Il doit s’inscrire chez cette dernière en communiquant ses données personnelles, son numéro de téléphone mobile et les données de sa carte de crédit. Si son inscription est acceptée, B______ Holding lui octroie une licence et lui fournit un compte personnel auquel il peut accéder informatiquement au moyen d’un mot de passe. Les prestations de transport offertes peuvent être sollicitées par le biais de l'utilisation de l’application C______, téléchargée et installée par les soins de l’utilisateur sur son téléphone portable. Celle-ci permet à ce dernier d'envoyer une demande de service à un transporteur. Le récepteur GPS (qui doit être installé sur le téléphone portable sur lequel l’utilisateur a téléchargé l'application) détecte l’emplacement de celui-ci et envoie ses données de localisation de l’utilisateur au transporteur concerné. Le transporteur est libre d’accepter ou de refuser toute demande de service de transport. Il est par ailleurs libre de décider d'utiliser ou non l'application pour recevoir les requêtes générées par le biais de l'application. Si le transporteur accepte une demande, l'application en avertit l’utilisateur et lui communique des informations au sujet du véhicule qui va effectuer la course (y compris sa marque, le numéro d'immatriculation du véhicule et l'évaluation de son service à la clientèle), ainsi que la possibilité de le contacter par téléphone. L'application lui permet aussi de suivre la progression du véhicule vers le lieu de prise en charge, en temps réel.

Pour l’utilisateur, l'application est gratuite. Les tarifs pratiqués par le transporteur sont indiqués sur le site Web et peuvent être consultés par le biais de l'application à l’issue de la course. À l’issue de la course, B______ Holding facture à l’utilisateur les services fournis par le transporteur, pour le compte de ce dernier, en faisant appel à un système de paiement tiers pour associer le compte de carte de crédit de l’utilisateur à l’application et au service. L’utilisateur doit accepter de payer tous les services de transport qu’il a achetés et reconnaître qu'C______ peut en débiter le prix du compte de carte de crédit communiqué lors de son inscription. S'il le souhaite, le client peut indiquer à l’avance son lieu de destination et obtenir une estimation du prix de la course, qu'il peut accepter ou refuser. La course effective ne peut être facturée à un montant supérieur à celui figurant sur l'estimation.

d. Le transporteur qui désire utiliser l’application pour son activité passe un contrat de partenariat avec B______ Holding à l’aide d’un formulaire téléchargeable. Le conducteur qui fournit le service de transport peut différer du transporteur et n’être que l’employé de
celui-ci. Vis-à-vis d’B______ Holding, c’est le partenaire qui assume la responsabilité du service de transport.

Selon les conditions contractuelles de partenariat, lorsque le transporteur est en exercice, B______ Holding fournit des informations au conducteur par l'intermédiaire de l'application en indiquant l'emplacement de l’utilisateur désigné comme « client ». Celui-ci informe le conducteur de sa destination.

Le montant TTC que le transporteur peut facturer au client pour le trajet est mentionné dans le site, sur l'application, ou peut être communiqué à tout moment au partenaire par B______ Holding. Les prix communiqués sont des prix plafonds recommandés. La TVA doit être acquittée par le partenaire. Celui-ci est libre de facturer un prix inférieur au client. Il est responsable de tout préjudice lié au paiement par carte de crédit.

e. B______ Holding perçoit une commission par trajet, convenue contractuellement. Cette commission est calculée sous forme de pourcentage du prix de la course et communiquée au conducteur quel que soit le prix inférieur payé par le client. Le prix payé par ce dernier est perçu par B______ Holding pour le compte du partenaire. La commission due est retenue sur le montant payé au partenaire. B______ Holding adresse un reçu au client pour le compte du partenaire, dont celui-ci reçoit une copie.

f. Dans les documents contractuels qui la lient à l’utilisateur ou au partenaire, B______ Holding précise qu’elle n'est ni un fournisseur de services de transport, ni une entreprise de transport. Elle n’agit qu’en tant qu'intermédiaire entre le transporteur et l’utilisateur. La prestation de services par le transporteur est donc régie par le contrat conclu entre l’utilisateur et le partenaire, auquel elle ne sera jamais partie et pour lequel elle n’encoure aucune responsabilité.

4) Dans le canton de Genève, le groupe C______ met à disposition des utilisateurs depuis le mois de septembre 2014, la possibilité de solliciter l’intervention de transporteurs par recours à la prestation de services E______X, soit celle de véhicules conduits par des chauffeurs indépendants ou des employés de sociétés, tous au bénéfice de cartes professionnelles.

Seuls peut devenir partenaire d’B______ Holding un chauffeur détenteur d'un permis de conduire suisse pour le transport professionnel de personnes avec la mention D______ et d'une carte de chauffeur professionnel de limousine ou de taxi du canton de Genève ; lorsqu’il utilise un véhicule immatriculé à Genève, celui-ci doit être immatriculé en plaques professionnelles et équipées d'un tachygraphe. La marque et le modèle doivent être communiqués.

Les candidats qui disposent des autorisations légales nécessaires sont invités à transmettre à A______ GmbH leur permis de conduire, leur carte de chauffeur professionnel, leur carte de dirigeant d'entreprise de transport de personnes, leur carte d'identité, un extrait du Registre du commerce et leur permis de circulation. Il leur est également demandé de suivre une formation en ligne et de passer un test de connaissances de la ville en cliquant sur les liens mentionnés. Ceux qui satisfont aux conditions requises sont invités à un entretien avec un « représentant d'C______ », dans les locaux de l'avenue de Champel, pour une séance de formation sur le fonctionnement de l'application, qui dure deux à trois heures.

Selon le « guide du partenaire pour Genève », qui est passé en revue à cette occasion et qui leur est remis lors de cette séance :

-         les détenteurs de plaques de taxi doivent enclencher leur compteur au moment de démarrer la course et l'arrêter à la fin de la course ; ils doivent expliquer aux passagers que c’est le prix figurant sur leur smartphone via l'application C______ qui doit être payé, et non celui inscrit au compteur, lequel n’a qu’un rôle de référence ; techniquement, le prix de la course sera forcément inférieur à celui du compteur, car il a été paramétré à cette fin ;

-         pour les « plaques limousines », au début de chaque course le prix est fixé à travers la fonction «estimation du prix» sur l'application. Si le prix à la fin de la course est supérieur au prix maximal indiqué lors de l'estimation, le prix sera ajusté en contactant C______.

Dans la « présentation aux partenaires-octobre 2014 », qui est projetée aux chauffeurs lors de l'entretien précité, ou lors de leur formation en ligne, leur attention est attirée sur le fait qu'ils sont des professionnels et qu'ils doivent respecter les heures légales de travail, ainsi que les temps de pause applicables dans le canton de Genève.

C’est à l’issue de ce processus que le chauffeur est sélectionné, que son compte est activé et qu’il peut utiliser l'application pour recevoir des commandes.

La commission prélevée par C______ est de 20 %. C______ fournit un téléphone portable par voiture. Au titre des avantages, il est notamment fait mention d'une équipe C______ locale, offrant un support rapide et de qualité (ajustement, questions et problèmes gérés de manière locale) et fournissant les efforts marketing à la place des chauffeurs. De même, un mécanisme permettant d'augmenter le prix des courses aux heures de fortes demandes, afin d’optimiser les revenus sur ces périodes permet l’octroi d’une prime. Ce mécanisme est justifié par le fait que seuls les partenaires et les chauffeurs de premier ordre sont acceptés sur la plate-forme, ceux qui performent le mieux étant récompensés.

5) En août 2014, les responsables d’A______ GmbH se sont entretenus avec la direction du service du commerce (ci-après : SCOM) dépendant du département de la sécurité et de l’économie (ci-après : le département) pour exposer la nature des activités qu’ils entendaient déployer. A______ GmbH a été mise en garde par cette autorité sur le caractère illégal de ses activités, eu égard aux exigences de la législation cantonale en matière de transport de personnes mais ses représentants lui ont fait savoir qu’ils entendaient les déployer sans attendre, considérant qu’elles n’étaient pas soumises à un contrôle étatique. Elle a effectivement mis en œuvre ses activités en septembre 2014.

6) Après avoir invité A______ GmbH à se déterminer préalablement, droit qu’elle exercé le 4 mars 2015, le SCOM lui a notifié le 30 mars 2015 une décision de la teneur suivante :

-         « constate qu’ A______ GmbH, respectivement B______ Holding B.V. exerce une activité de centrale d’ordre de courses de taxis soumise à autorisation au sens de l’art. 9 al. 1 let. d de la loi sur les taxis et limousines (transport professionnel de personnes au moyen de voitures automobiles) du 21 janvier 2005 - LTaxis - H 1 30 ;

-         interdit à A______ GmbH, respectivement B______ Holding B.V., avec effet immédiat l’exercice son activité de transport professionnel de personnes sur le canton de Genève ;

-         dit que l’interdiction sera levée dès qu’une autorisation d’exploiter au sens de l’art. 9 LTaxis aura été délivrée ;

-         inflige à A______ GmbH une amende de CHF 35'000.-, payable dans les 30 jours dès sa notifications au moyen du bulletin de versement annexé ;

-         assortit la présente décision de la menace de la peine d’amende prévue à l’art. 292 du Code pénal suisse (CP) du 21 décembre 1937 qui prévoit que celui qui ne se sera pas conformé à une décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue au présent article, par une autorité ou un fonctionnaire compétents sera puni d’une amende ;

-         dit que la présente décision est exécutoire nonobstant recours au sens de l’art. 66 al. 1 LPA. »

A______ GmbH déployait des activités relevant de la centrale d’ordres de courses au sens de l’art. 13 LTaxis.

Elle disposait d’une flotte de chauffeur composée de taxis de service public, de taxis de services privés et de limousines. Son application mettait en relation des chauffeurs privés indépendants et des clients. Le fait que cette seule mise en relation se fasse par le biais d’une application Internet, et non par une centrale téléphonique n’était pas déterminant. Seuls les moyens utilisés différaient. Même si dans les informations fournies aux utilisateurs ou aux transporteurs, le groupe C______ prétendait l’inverse, c’était par le biais de relations contractuelles tissées avec l’une ou l’autre des sociétés du groupe que les uns et les autres entraient relation. C’était A______ GmbH qui, à partir des locaux de Genève, contrôlait le recrutement des chauffeurs, leur remettait un téléphone intelligent sur lequel était configurée l’application utilisée pour recevoir les instructions relatives aux courses et les formait à cette utilisation. Une commission était perçue par une des sociétés du groupe pour toutes les courses effectuées, à l’instar des primes d’affiliation prélevées par les centrales d’ordres de course. C’était l’une d’elles qui percevait le prix des courses et le redistribuait aux chauffeurs. De même, elle arrêtait les tarifs pratiqués par les chauffeurs, incitant les transporteurs à fournir plus de prestations en prévoyant un système de bonus lié au nombre de courses effectuées. En outre, A______ GmbH proposait un service 365 jours par année, 24 heures sur 24 et disposait d’un service de récupération d’objets perdus/trouvés, à l’instar des compagnies de taxis. Non seulement A______ GmbH ne disposait pas d’autorisation, mais l’organisation de son activité n’était pas transparente. Elle était donc susceptible de générer des problèmes de protection des consommateurs, dans la mesure où elle contrevenait à l’interdiction de la mixité des catégories de transport, qu’il y avait un risque que les chauffeurs dépêchés ne soient pas titulaires de cartes professionnelles ou qu’il y ait des risques d’erreur dans le calcul du prix des courses, induits par l’utilisation de l’application en lieu et place du taximètre. Bien que l’illégalité de son activité lui ait été signalée par l’autorité, A______ GmbH avait persisté à l’exercer et refusé de se régulariser.

Une copie de cette décision a été communiquée par pli recommandé et pli simple à B______ Holding.

7) Par acte posté le 14 avril 2015, A______ GmbH et B______ Holding ont interjeté recours contre la décision du 30 mars précitée. Elles concluaient principalement à l’annulation de la décision entreprise après instruction, sollicitant que différents actes de procédure soient ordonnées. À titre préalable, elles sollicitaient la restitution de l’effet suspensif au recours.

La décision avait été adressée à A______ GmbH et B______ Holding sans que cette dernière soit visée par la décision. L’activité du groupe à Genève n’était pas contraire à la LTaxis. Les contacts entre les chauffeurs et les clients se faisaient directement entre eux par l’accès à la technologie du groupe C______, de manière automatisée, sans intervention, ni contrôle exercés par les recourantes. Le groupe C______ n’acceptait pas les commandes de clients et ne les transmettait pas aux chauffeurs. A______ GmbH ne disposait pas de personnel qui agirait comme intermédiaire entre les chauffeurs et les clients. Son activité se limitait à des prestations auxiliaires de services dans le domaine de la promotion et du marketing. Cette société n’était pas partenaire avec les chauffeurs. Elle n’intervenait pas dans le processus de perception ou de redistribution du prix payé. Quant à B______ Holding, elle n’avait aucune activité en Suisse. Il s’agissait d’une pure société financière sans employé.

La décision attaquée violait leurs droits procéduraux car elle n’avait pas eu accès à l’ensemble du dossier. Elle était nulle pour ce motif, dès lors qu’il s’agissait d’une procédure en matière pénale. Elle était nulle à l’égard d’B______ Holding qui n’avait pas été informée de l’ouverture de la procédure, qui avait reçu la décision en copie sans en être la destinataire et sans que celle-ci lui ait été valablement notifiée.

Elle devait être annulée car elle contrevenait aux art. 2 et 3 de la loi fédérale sur le marché intérieur du 6 octobre 1995 (LMI - RS 943.02) en interdisant toute prestation de services dispensées par A______ GmbH dans le canton de Genève.

En outre, elle reposait sur un état de fait erroné et interprétait de manière inexacte les dispositions pertinentes de la LTaxis, laquelle ne s’appliquait pas.

De plus, elle violait la liberté économique des recourantes, dès dès lors qu’elle interdisait leur activité sans base légale, ne reposait pas sur un intérêt public et ne respectait pas le principe de la proportionnalité.

L’effet suspensif devait être restitué parce que telle était la règle dans la procédure de recours en matière administrative. Ce principe devait d’autant plus être respecté dans le cas d’une décision prononçant une sanction. D’une manière générale, pour retirer l’effet suspensif à une décision, ce qui réduisait la protection juridique due au justiciable, l’autorité devait démontrer qu’une atteinte concrète et grave à un intérêt public important imposait l’exécution immédiate de la décision.

Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral avait restitué l’effet suspensif à un recours formé par un voiturier contre une décision de l’aéroport de Genève lui interdisant avec effet immédiat d’opérer sur son site. La chambre administrative avait refusé de le faire, mais le Tribunal fédéral avait considéré que permettre à une entreprise de continuer à opérer ses activités de voiturier sur le site de, ne vidait pas de son sens la procédure au fond, même si sa finalité était de déterminer si cette entreprise pouvait continuer à exercer ses activités en dehors de toute procédure d’autorisation ou de concession. Un raisonnement similaire s’imposait. Il s’agissait de savoir si les deux recourantes étaient soumises à autorisation dans le canton de Genève. Le prononcé de mesures provisionnelles leur permettrait la poursuite provisoire de l’activité dans le canton durant la procédure de recours, ce qui ne viderait pas de sens la décision sur le fond.

Dans la pesée des intérêts en présence qui s’imposait, devaient prévaloir l’intérêt financier et économique des recourantes, gravement mis en péril si toute activité leur était immédiatement interdite, les risques de dommages de réputation pouvant atteindre ses activités dans le canton de Zurich, mais également les intérêts économiques des chauffeurs partenaires. Devait également être pris en compte l’intérêt public à une concurrence efficace dans le domaine du transport de personnes, protégé constitutionnellement, de même que l’intérêt des consommateurs genevois. Face à ces intérêts publics et privés, on ne concevait pas quel intérêt public pourrait l’emporter. Les problèmes de transparence et de protection des consommateurs invoqués étaient inexistants. Les transporteurs respectaient la loi et notamment les dispositions de la LTaxis. Personne dans le public ne s’était plaint des activités d’C______.

La permission aux recourantes de poursuivre leur activité durant la procédure pouvait passer soit par la restitution de l’effet suspensif, soit par le biais du prononcé de mesures provisionnelles au sens de l’art. 21 LPA. En effet, la chambre administrative devait non seulement tenir compte de l’urgence et du préjudice irréparable, mais des réelles chances de succès du recours face à une décision fondée, non seulement,sur une appréciation erronée des faits et qui formulait des reproches sans consistance, mais qui appliquait faussement le droit. L’activité du groupe C______ dans le canton de Genève, dont A______ Gmbh ne jouait qu’un rôle de société de services, ne pouvait être assimilée à celle d’une centrale d’ordres de courses qui était une entreprise recevant et transmettant ceux-ci au moyen d’un numéro téléphonique d’appel général. Non soumises aux règles de la LTaxis, les activités du groupe C______ étaient protégées par les dispositions garantissant l’exercice de la liberté économique et par celles de la LMI. En outre, la décision attaquée résultant d’une procédure pénale, son caractère exécutoire contrevenait à l’article 6 CEDH.

8) Parallèlement à la décision dont est recours, le SCOM a notifié à A______ GmbH, le 30 mars 2015 également, une seconde décision par laquelle elle lui intimait l’ordre dans un délai imparti, de déposer une demande autorisation d’exploiter une centrale d’ordre de taxi. A______ GmbH a également interjeté recours auprès de la chambre de céans contre cette deuxième décision.

9) Le 16 avril 2015, les recourants ont transmis un exemplaire d’une communication émanant du département, à teneur de laquelle celui-ci envisageait de modifier la législation pour permettre à C______ d’exercer ses activités.

10) Dans ses observations du 30 avril 2015, le SCOM conclut au rejet de la requête, que celle-ci vise la restitution de l’effet suspensif ou le prononcé d’autres mesures provisionnelles. A______ GmbH ni aucune autre société du groupe C______ n’avait jamais essayé de se conformer à la réglementation genevoise sur les transports de personnes, ou de coopérer avec le SCOM. Le groupe C______ entretenait un flou délibéré sur le rôle de diverses entités du groupe intervanant dans le canton de Genève. Il n’y avait aucun doute que les deux recourantes étaient impliquées, A______ GmbH y ayant des locaux et des collaborateurs, B______ Holding détenant la première et s’occupant de la gestion et du financement des sociétés. Les activités du groupe C______ étaient sans aucun doute soumises à la LTaxis, ce qui impliquait une autorisation, car elles devaient être assimilées à celle d’une centrale d’ordres de courses. Même si on devait considérer que ce cadre n’était pas exactement applicable aux recourantes, elles restaient soumises à la LTaxis en vertu de l’art. 2 al. 5 de cette loi qui avait pour vocation de réglementer exhaustivement tout type d’activités ayant trait au transport professionnel de personnes dans le canton. Compte tenu de ce constat, le SCOM était fondé à prendre la décision attaquée. Celle-ci avait un contenu négatif car elle refusait une prestation à une personne qui jusque-là n’y avait jamais eu droit. La décision avait été prise dans le respect du droit d’être entendues des recourantes, lesquelles avaient toutes deux pu faire valoir leurs moyens. Le groupe C______ jouait habilement, dans l’organisation de ses activités, d’une division des rôles qui lui permettait de créer un écran de fumée.

L’effet suspensif ne pouvait être restitué car les activités des recourantes menaçaient les intérêts publics protégés par les dispositions de la LTaxis, soit la sécurité publique, la loyauté dans les transactions commerciales et l’utilisation adéquate du domaine public. Il résultait des conditions de partenariat entre C______ et les transporteurs que ni A______ Gmbh, ni aucune autre entité du groupe n’exerçait un contrôle réel sur les activités des chauffeurs, l’état des véhicules ou l’existence de contrats d’assurances en cas de survenance de dommages. Il y avait en particulier un risque que ceux-ci puissent ainsi mettre leur smartphone à disposition de tiers non habilités à conduire un véhicule de transport de personnes. Le fait que les sociétés du groupe C______ soient exemptées de toute responsabilité s’écartait de manière significative de ce que la réglementation genevoise imposait aux centrales dans de course y compris dans la coopération avec les autorités. La loyauté dans les transactions n’était pas non plus garantie car le système de tarification utilisé dans l’application n’avaient pas fait l’objet d’un contrôle approfondi et certifié quant à sa fiabilité. L’autorité intimée pouvait citer le cas d’une course effectuée en utilisant l’application C______, qui avait pourtant été facturée à un prix de de CHF 16.-, sans que le véhicule ne se déplace.

En outre, pour effectuer ses courses, C______ faisait appel à des véhicules de toutes les catégories de taxis et de limousine confondues, sans que le consommateur soit informé de cette mixité, ce qui était contraire à la loi. Même si la protection des finances publiques dépassait le cadre des objectifs poursuivis par la réglementation relative au transport de personnes, on ne pouvait passer sous silence le fait que 20 % du prix des courses effectuées par les chauffeurs C______ était transmis aux Pays-Bas, si bien que ce montant échappait à l’impôt genevois. Le fait que les autorités politiques envisagent de modifier la loi pour prendre en considération l’évolution des technologies ne signifiait pas qu’il y avait un intérêt public à autoriser le groupe à déployer ses activités sans attendre l’issue de la procédure. Aucun intérêt privé ne pouvait être allégué, qui justifiait de donner suite aux mesures provisionnelles sollicitées.

11) Les recourantes ont répliqué le 6 mai 2015, persistant dans les conclusions en restitution de l’effet suspensif à leur recours. Aucune base légale ne permettait de leur interdire le déploiement de leurs activités dans le canton de Genève. Il n’y avait aucun intérêt public à retirer l’effet suspensif au recours. En effet, les activités du groupe ne présentaient aucun risque pour la sécurité publique ou pour les consommateurs. L’exemple cité par le SCOM n’avait pas de valeur probante car il émanait d’une situation provoquée par leurs concurrents, qui ne correspondait pas à la façon dont l’application était ordinairement utilisée. L’utilisation du domaine public n’était pas plus menacée par les chauffeurs C______ que par les chauffeurs traditionnels. L’intérêt public à la sauvegarde des finances genevoises était irrelevant. Pour le surplus, elles se référaient à leurs écritures précédentes.

12) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

Considérant, en droit, que :

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est, prima facie, recevable dans son principe (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (art. 66 al. 1 LPA).

Lorsqu’aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (art. 66 al. 3 LPA).

3) L’autorité peut d’office ou sur requête ordonner des mesures provisionnelles en exigeant au besoin des sûretés (art. 21 al. 1 LPA).

4) La restitution de l’effet suspensif ou l’ordonnance d’autres mesures provisionnelles est du ressort du président de la chambre administrative (art. 7 al. 1 du règlement de la chambre administrative du 21 décembre 2010).

5) Les mesures provisionnelles – au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif (Philippe WEISSENBERGER/Astrid HIRZEL, Der Suspensiveffekt und andere vorsorgliche Massnahmen, in Isabelle HÄNER/Bernhard WALDMANN [éd.], Brennpunkte im Verwaltungsprozess, 2013, 61-85, p. 63) – ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/566/2012 du 21 août 2012 consid. 4 ; ATA/248/2011 du 13 avril 2011 consid. 4 ; ATA/197/2011 du 28 mars 2011 ; ATA/248/2009 du 19 mai 2009 consid. 3 ; ATA/213/2009 du 29 avril 2009 consid. 2). Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités). Ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HAENER, Vorsogliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess, RDS 1997 II 253-420, p. 265).

6) L'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3 = RDAF 2002 I 405).

7) Parmi les différents types de mesures provisionnelles, l’effet suspensif vise à maintenir une situation donnée. Il n’a pas pour objectif de créer un état correspondant à celui découlant du jugement au fond. Il ne peut donc que concerner une décision administrative positive, soit une décision qui impose une obligation à l’administré, qui le met au bénéfice d’une prérogative ou qui constate l’existence ou l’inexistence d’un de ses droits de l’une de ses obligations (Cléa BOUCHAT, L’effet suspensif en procédure administrative, 2015, p.104 n. 278). En procédure administrative, cela correspond à une décision au sens de l’art. 4 al. 1 let. a ou b LPA.

8) En revanche, l’effet suspensif est inopérant lorsque le recours est dirigé contre une décision à contenu négatif, soit contre une décision qui rejette ou déclare irrecevable une demande tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou des obligations, soit une décision au sens de l’art. 4 al. 1 let. c LPA. Ainsi que la doctrine et la jurisprudence le rappellent, la fonction de l’effet suspensif est de maintenir un régime juridique prévalant avant la décision contestée. Si, sous le régime antérieur, le droit ou le statut requis n’existait pas, l’effet suspensif ne peut être restitué en cas de refus car cela reviendrait à accorder au recourant d’être mis au bénéfice d’un régime juridique dont il n’a jamais bénéficié (ATF 127 II 132 ; 126 V 407 ; 116 Ib 344 ; ATA/354/2014 du 14 mai 2014 consid. 4 ; ATA/87/2013 du 18 février 2013 ; Ulrich HÄFELIN/ Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 6ème éd., 2010, n. 1800 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2010, n. 5. 8. 3. 3 p. 814). Dans cette dernière hypothèse, le règlement de la situation pendant la durée de la procédure ne pourrait être réglé que par le seul octroi de mesures provisionnelles, aux conditions cependant restrictives de l’art. 21 LPA (ATA/70/2014 du 5 février 2014 consid. 4b ; ATA/603/2011 du 23 septembre 2011 consid. 2 ; ATA/280/2009 du 11 juin 2009 et ATA/278/2009 du 4 juin 2009).

9) Une décision imposant une obligation à son destinataire ou constituant une injonction à son égard, ou lui interdisant d’adopter un certain comportement, ou lui retirant une prérogative à laquelle il ne peut plus prétendre, ou supprimant une relation juridique, constitue, non pas une décision négative, mais une décision positive défavorable à ce dernier. Un recours contre une telle décision déploie donc un effet suspensif automatique en vertu de l’art. 66 al. 1 LPA, à moins que l’autorité administrative ait décidée de le retirer (Cléa BOUCHAT, op. cit., p. 106 n. 282).

10) Lorsque l'effet suspensif a été retiré ou n'est pas prévu par la loi, l'autorité de recours, lorsqu’elle est saisie d’une requête en restitution de celui-ci, doit, en vertu de l’art. 66 
al. 3 LPA, effectuer une pesée des intérêts, soit examiner si les raisons pour exécuter immédiatement la décision entreprise sont plus importantes que celles justifiant le report de son exécution. Elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire. Elle n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les arrêts cités).

La restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l’absence d’exécution immédiate de la décision ou de la norme (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1).

11) Dans le canton de Genève, l’exercice des professions de transport de personnes au moyen de voitures automobiles, ainsi que l’exploitation des services de taxi et de limousines sont soumises à la loi, dans un but d’assurer la sécurité publique, la moralité publique, le respect de l’environnement et la loyauté dans les transactions commerciales ainsi que les règles relatives à l’utilisation du domaine public (art. 1 al. 1 et art. 2 al. 1 LTaxis). Dans la réglementation et la gestion de cette activité, il est tenu compte de la fonction complémentaire des taxis et limousines, par rapport aux transports individuels et collectifs, et de leur rôle en matière de tourisme (art. 1 al. 2 LTaxis). En outre, le Conseil d’État a la tâche de veiller à ce que, par leur organisation et leur exploitation, les services de taxis et de limousines répondent aux objectifs du plan directeur des transports et aux besoins de la population et des personnes de passage (art. 1 al. 3 LTaxis).

12) Le service de transport est exercé par des voitures désignées comme taxis et à défaut comme limousines, dont l’activité est soumise à l’autorisation préalable du département (art. 2 al. 2 LTaxis). Les conditions auxquelles un transport est soumis à la loi parce qu’il est considéré comme effectué à titre professionnel et s’exercer sur le territoire du canton de Genève sont rappelés à l’art. 2 al. 3 et 4 LTaxis.

D’une manière générale, l’exercice d’une activité professionnelle consistant à favoriser, organiser ou exploiter le transport professionnel de personnes est soumis à la Ltaxis, lorsque les conditions des al. 3 et 4 sont réalisées (art. 2 al. 5 LTaxis).

13) Celui qui veut conduire un taxi ou une limousine à titre d’employé, exploiter une entreprise de taxi ou de limousine à titre d’indépendant ou diriger une entreprise de taxi ou de limousine, doit être titulaire d’une carte professionnelle l’autorisant à le faire et correspondant à sa catégorie, dont les conditions sont fixées aux art. 6 à 12 LTaxis (art. 5 LTaxis).

14) L’exploitation d’un service de transport de personnes est subordonnée à la délivrance de l’une ou l’autre des autorisations listées à l’art. 9 al. 1 let. a à f LTaxis. La possibilité de cumuler de telles autorisations est strictement réglementé (art. 9 al. 2 LTaxis).

À teneur de l’art. 13 al. 1 LTaxis, une centrale d’ordres de course de taxis est soumise à autorisation l’exploitation, aux conditions définies dans cette disposition légale. La centrale doit notamment disposer à son siège d'une adresse fixe et d'un numéro téléphonique d'appel général (let. e) et disposer de l'infrastructure suffisante et des moyens techniques adéquats pour gérer le trafic des taxis qui lui sont affiliés, ainsi que pour recevoir et leur transmettre des ordres de course (let. g). L'autorisation confère la faculté d'exploiter une centrale d'ordres de courses de taxis de service privé ou de service public (art. 13 al. 2 LTaxis). La même centrale ne peut avoir pour affiliés des exploitants de taxis de service privé et des exploitants de taxis de service public (art. 13 al. 3 LTaxis).

15) Les situations dans lesquelles la loi ne s’applique pas sont énoncées restrictivement à l’art. 4 LTaxis, il s’agit du transport par ambulance, du transport de personnes dans le cas d’une concession de trafic de ligne, du transport de travailleurs et auxiliaires d’une entreprise par un chauffeur de celle-ci, du transport occasionnel de personnes sans rémunération, du transport professionnel de personnes handicapées (art. 4 al. 1 let. a à e LTaxis).

16) Les recourantes contestent au nom de l’exercice de leur liberté économique et du droit de pratiquer dans toute la Suisse une activité économique dès lors qu’elle a été autorisée dans l’un de ses cantons, l’interdiction qui leur est faite, avec effet immédiat et sous la menace des peines de droit, d’exercer leur activité de transport professionnel de personnes sur le canton de Genève. Elles contestent également l’amende qui leur a été infligée, dont elle devrait s’acquitter dans les 30 jours, sanction également exécutoire nonobstant recours.

Le traitement de ces deux volets de la décision attaquée doit être distingué.

17) Concernant le premier de ceux-ci, les recourantes considèrent que ni l’une ni l’autre ne déploie dans le canton de Genève des activités tombant sous le coup de la LTaxis, dès lors qu’elles ne sont pas impliquées dans les rapports entre les utilisateurs et les transporteurs, ainsi que cela résulte de leurs conditions générales. Ne constituant qu’un intermédiaire non impliqué dans les rapports entre ces derniers, elles auraient donc librement le droit d’exercer les activités qui leur sont interdites.

Un examen prima facie de la situation juridique sur la base des pièces du dossier, met en évidence que le groupe C______ a commencé à déployer ses activités dans le canton de Genève, dès le mois de septembre 2014, ceci par le biais des deux recourantes, l’une ayant son siège en Suisse ainsi qu’un bureau à Genève et l’autre basée en Hollande. La première constitue l’interlocutrice directe des transporteurs partenaires à Genève tandis que la seconde prend en charge la gestion informatique ou contractuelle des rapports que le groupe entretient avec les transporteurs partenaires ou les utilisateurs de son application, ainsi que la gestion de la facturation ou de l’encaissement des courses réalisées par ce biais.

Les activités que ces sociétés développent visent à mettre en rapport des personnes désireuses d’être transportées par des voitures automobiles conduites par un chauffeur avec des transporteurs, moyennant rémunération de la course à ce dernier après prélèvement d’une commission représentant le 20 % de la course. Les recourantes proposent, à l’attention d’utilisateurs et de transporteurs, des services de gestion du trafic pour des activités de taxis, moyennant une adhésion à une organisation mise en place autour de l’application mise à disposition, dans le cadre d’une infrastructure et par recours à des moyens techniques permettant ladite gestion. Or de telles activités sont à tout le moins susceptibles de correspondre à celles d’une centrale d’ordres de taxi au sens de l’art. 13 LTaxis. Certes, l’activité qu’elles déploient n’utilise pas un numéro téléphonique d’appel général comme le requiert l’art. 13 let. d LTaxis, mais les moyens technologiques utilisés mis à disposition par l’évolution de la télécommunication et de la géolocalisation, peuvent a priori être assimilés à ceux d’une centrale dont ils permettent de remplir les fonctions de mise en contact des clients et des prestataires de transport.

La question de la nature des activités des recourante sera tranchée de manière complète dans le cadre de l’examen du fond du recours, mais à ce stade de la procédure, le dossier soumis à la chambre administrative ne lui permet pas de retenir, comme le soutiennent les recourantes, que, d’évidence, l’activité combinée des deux sociétés n’est pas soumise à la LTaxis. Ainsi, constatant l’existence dans le canton de Genève, d’activités structurées susceptibles d’être soumises à cette loi, le SCOM, chargé par le département de prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect des buts fixés par la loi (art. 1 al. 2 règlement d’exécution de la loi sur les taxis et limousines (transport professionnel de personnes au moyen de voitures automobiles – RTaxis – H 1 30.01) et qui n’a jamais été saisi d’aucune requête pour l’exercice de ces activités était à première vue légitimée à intervenir vis-à-vis de leurs organisateurs pour les faire cesser, sous la menace des peines de droit.

Pour les recourantes, la décision attaquée contrevient à la liberté économique garantie constitutionnellement et contrevient également aux dispositions de la LMI qui garantit aux acteurs économiques un libre exercice de leurs activités dans tous les cantons. Ces questions feront l’objet d’un examen au fond. À priori, le régime mis en place dans le canton de Genève pour régir le transport professionnel de personnes est fondé sur une base légale suffisante dont le contenu a été rappelé ci-dessus. Les restrictions qu’il engendre ont été prises dans un but d’intérêt public et ne sont pas contraires aux autres conditions de l’art. 36 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101). En outre, un régime soumettant à autorisation toute activité liée au transport professionnel de personnes dans le canton de Genève pour les raisons rappelées à l’art. 1 al. 1 LTaxis, n’est a priori pas contraire à l’art. 2 al. 1 LMI dès lors que les cantons restent habilités à mettre en place d’une réglementation restreignant l’accès au marché pour des motifs d’intérêt public prépondérants lorsqu’elles respectent les critères de l’art. 3 LMI. Or, en l’espèce, ces conditions sont a priori réalisées vu les buts d’un intérêt public poursuivis par la LTaxis et le fait que celles-ci s’appliquent de la même façon aux offreurs locaux (art. 3 al. 1 let. a et b LMI).

18) Il reste à déterminer s’il y a lieu ou non de restituer l’effet suspensif au recours comme demandé par les recourantes en fonction de la pesée des intérêts requise par l’art. 66 al. 3 LPA, cas échéant de prononcer des mesures provisionnelles au sens de l’art. 21 al. 1 LPA.

En l’occurrence, si la chambre administrative accédait à la demande des recourantes, cela reviendrait à les autoriser à reprendre leurs activités pendant la durée de la procédure, en dehors de toute autorisation, alors que l’une des questions litigieuses à trancher concerne l’assujettissement de leurs activités à la LTaxis. Ils obtiendraient le plein de leurs conclusions sans attendre l’issue du recours, ce qui n’est pas compatible avec les principes régissant les art. 21 et 66 LPA. Un intérêt privé des recourantes à poursuivre leur activité économique peut certes leur être reconnu. Toutefois, celui-ci ne constitue aucunement un intérêt prépondérant, en comparaison de l’intérêt public au respect de la loi régissant actuellement le transport professionnel de personnes dans le canton de Genève par l’ensemble des acteurs pratiquant cette activité. Une telle appréciation des intérêts en présence s’impose d’autant plus que de nombreux éléments permettent de considérer que l’activité déployée par celles-ci est effectivement susceptible d’être soumise à la LTaxis et qu’elle ne devrait pas être exercée sans autorisation.

19) Les recourantes se prévalent de l’arrêt du Tribunal fédéral du 27 février 2014 (2C_1161/2013) dans lequel celui-ci a restitué l’effet suspensif à èun recours déposé par un voiturier exerçant des activités de valet de parking, interjeté contre une décision de l’aéroport international de Genève (ci-après : AIG) de qui lui interdisait accéder au site aéroportuaire pour y exercer quelque activité que ce soit. Selon le Tribunal fédéral, la chambre de céans avait arbitrairement refuser la restitution de l’effet suspensif en ne retenant pas, lors de la pesée des intérêts, l’intérêt économique essentiel de la recourante, qui était menacé de faillite, à poursuivre une activité qu’elle avait commencée à développer en 2012 et en retenant sans autre que l’activité en question mettait en péril la sécurité de l’aéroport ou occasionnait une gêne permettant de justifier l’exécution immédiate de l’interdiction prononcée (consid. 5.5.2 et 5.5.3).

La situation qui prévaut en l’espèce n’est en aucun cas comparable. Les recourantes ont certes un intérêt économique à développer, comme dans d’autres villes, leurs activités dans le canton de Genève. Toutefois, elles appartiennent toutes deux à un grand groupe, dont la puissance économique les mettrait à l’abri de la faillite si leurs activités étaient suspendues jusqu’à droit jugé définitif. Leur décision de s’implanter dans le canton de Genève, en faisant fi de toute procédure d’autorisation, résulte de la stratégie de ce groupe. C’est nanties de cette puissance financière qu’elles ont pris l’option de débuter leurs activités sur le marché du transport professionnel de personnes, au prix, si cela s’avérait nécessaire, d’une épreuve de force avec l’autorité chargée de les surveiller. De son côté, la position du SCOM, qui est chargé de garantir l’application uniforme de la LTaxis, n’est en rien comparable avec celle de l’AIG dans l’arrêt précité, dont la décision, de portée restreinte, s’inscrivait dans le cadre de l’exploitation de cet établissement public. En l’occurrence, aucun élément tiré de la situation des recourantes ou de la nature des intérêts publics à protéger dans le cas d’espèce ne permettrait de restituer l’effet suspensif au recours, par une reprise des motifs retenus par le Tribunal fédéral dans l’arrêt précité.

20) Au vu de ce qui précède, la chambre administrative refusera de restituer l’effet suspensif au recours ou de prononcer d’autres mesures provisionnelles concernant cette partie de la décision du SCOM, relative à l’exercice des activités des recourantes dans le canton de Genève.

21) S’agissant du volet de la décision relatif au prononcé d’une amende de CHF 35'000.-, la chambre administrative admettra de restituer l’effet suspensif en application de l’art. 66 al. 3 LPA. L’octroi de l’effet suspensif à un recours est la règle en matière d’amendes administratives. La décision de retirer celui-ci à cette partie du dispositif de la décision attaquée n’est guère compréhensible. Elle contrevient à la présomption d’innocence garantie par l’art. 6 CEDH. Au demeurant, une telle mesure s’impose dès lors qu’il n’y a aucune urgence et aucun intérêt public à ce que cette sanction entre en force immédiatement sans attendre l’issue du recours formé à son encontre.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

 

restitue l’effet suspensif au recours interjeté par  A______ GmbH et par B______ Holding B.V. contre la décision du service du commerce du 30 mars 2015 en tant qu’elle prononce une amende de CHF 35'000.- à l’encontre de ces deux sociétés ;

rejette la requête en restitution de l’effet suspensif, respectivement refuse de prononcer d’autres mesures provisionnelles, pour le surplus ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Me Marcel Dietrich, avocat du recourant ainsi qu'à service du commerce.

 

 

Le président :

 

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :