Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/912/2024 du 12.09.2024 ( LCI ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 12 septembre 2024
|
dans la cause
Mesdames et Messieurs A______, B______, C______, D______, E______, F______, G______, H______, I______, J______, K______ et L______
contre
DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC
M______ AG
N______ S.A.
1. Par requête du 3 octobre 2022, adressée au département du territoire (ci-après : le DT ou le département) et enregistrée sous n° DD 1______, N______ SA (ci-après : N______) a sollicité une autorisation de construire portant sur la mise en place d’une nouvelle installation de communication mobile sur le bâtiment sis sur la parcelle n° 2______ de la commune de O______, située en zone 1, propriété de M______ SA.
L’installation en question se compose d’un groupe de cinq antennes (dont trois antennes adaptatives) fixées sur la superstructure du bâtiment sis rue P______ 3______, O______, sur la parcelle précitée.
2. Dans ce cadre, elle a joint la fiche de données spécifique au site du 3 octobre 2022 (ci-après : FDSS), laquelle indiquait les mesures suivantes :
- lieu à utilisation sensible (ci-après : LUS) n° 2 (habitation) : intensité de champ électrique = 5.94 V/m, valeur limite de l’installation (ci-après : VLInst) = 6.0 V/m ;
- LUS n° 3 (habitation) : intensité de champ électrique = 5.03 V/m, VLInst = 6.0 V/m ;
- LUS n° 4 (habitation) : intensité de champ électrique = 5.98 V/m, VLInst = 6.0 V/m ;
- LUS n° 5 (habitation) : intensité de champ électrique = 5.96 V/m, VLInst = 6.0 V/m ;
Il était encore précisé que la VLInst était respectée pour tous les LUS précités et que la distance maximale pour pouvoir former opposition était de 259.57 m.
3. Cette requête a été publiée dans la Feuille d'avis officielle (ci-après : FAO) du ______ 2022 et le département a débuté une mise à l’enquête publique le ______ 2022.
4. Par courrier du 7 novembre 2022, sous la plume de Madame K______, plusieurs opposants ont formulé des observations à l’encontre de ce projet.
5. Lors de son instruction, plusieurs instances de préavis ont été sollicitées, notamment :
- Le 10 novembre 2022, la Ville de O______ (ci-après: la ville) a émis un préavis défavorable, précisant qu'elle appliquait un moratoire à toute demande de modification d'installation existante ou de pose de nouvelles installations de téléphonie mobile ;
- le 7 octobre 2022, le service des monuments et des sites (ci-après : SMS) a indiqué ne pas être concerné ;
- le 7 octobre 2022, l’office de l’urbanisme (ci-après : OU) a rendu un préavis favorable, sans observation ;
- le 10 octobre 2022, l’office des autorisations de construire (ci-après : OAC) a rendu un préavis favorable, sans observation ;
- le 21 octobre 2022, le service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisants (ci-après : SABRA) sur la base de la FDSS du 3 octobre 2022, a rendu un préavis favorable, posant les conditions suivantes :
mesurages de contrôle aux LUS 2, 3, 4 et 5 ; intégration des antennes de cette installation dans son système d’assurance qualité (ci-après : SAQ) qui permet de surveiller les données d’exploitation ; les parties accessibles pour l’entretien où la valeur limite d’immission
(ci-après : VLI) est épuisée doivent être dûment protégées.
Selon le descriptif, les cinq antennes prévues étaient susceptibles de produire des immissions dépassant la VLInst dans une surface de rayon de 39 m. Selon le cadastre des installations de téléphonie mobile, les antennes concernées n’étaient pas associées à un autre groupe d’antennes préalablement autorisé. Cette installation comportait des antennes adaptatives.
Il n’y avait aucun lieu normalement accessible où la VLI était épuisée. Les parties de la superstructure accessible pour l’entretien où les VLI étaient épuisées devaient être dûment protégées.
L’opérateur avait évalué les immissions sur les bâtiments voisins et la VLInst y était respectée. Cependant, sur les points d’évaluation n° 2 (rue P______ 3______, n° 3 (rue P______ 4______, n° 4 (place Q______ 5______ et n° 5 (place Q______ 11______), les immissions étaient supérieures à 80% de la VLInst dans des directions proches du rayon principal. Dans ce cas, conformément à la recommandation d’exécution de l’ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant du 23 décembre 1999 (ORNI - RS 814.710), chapitre 2.1.8 (office fédéral de l’environnement [ci-après : OFEV] 2002), l’exploitant devait effectuer, lors de la réception, des mesurages à ses frais et conformément aux recommandations en vigueur.
L’installation sise sur le site R______ était conforme à l’ORNI et au règlement K 1 70.07. L’opérateur s’engageait à intégrer les antennes de cette installation dans son SAQ qui permettait de surveiller les données d’exploitation conformément au document publié par l’OFEV ; : « antennes adaptatives : le complément du 23 février 2021 à la recommandation d’exécution de l’ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant (ORNI) concernant les stations de base pour téléphonie mobile et raccordement sans fil (WLL), OFEFP, 2002 ».
6. Par décision du ______ 2023, le département a délivré l'autorisation de construire sollicitée, laquelle a été publiée le même jour dans la FAO, précisant que les conditions figurant dans le préavis du SABRA du 21 octobre 2022 devaient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de l’autorisation.
7. Par acte du 10 février 2023, Mesdames et Messieurs, A______, B______, C______, D______, E______, F______, G______, H______, I______, J______, K______ et L______ ont interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, principalement, à sa réformation en ce sens que l’autorisation était refusée, et, subsidiairement à son annulation, sous suite de frais et dépens. Préalablement, l’effet suspensif du recours devait être constaté ou accordé.
Des mesures d'instruction étaient par ailleurs nécessaires, à savoir ordonner une expertise judiciaire indépendante, aux frais de l’intimée, afin de mesurer les valeurs réelles d’atténuation de la maçonnerie pour chaque pièce de tous les appartements regroupés par LUS sur la valeur d’atténuation la plus faible relevée parmi toutes les pièces ; compléter l’inventaires des LUS omis, vérifier l’exactitude des calculs effectués par la constructrice et si les normes applicables étaient toujours respectées ; permettre uniquement la mise en place d’antennes non adaptatives, dont les émissions étaient mesurables sur site et limitées à une VLInst de 5 V/m sans calculs théoriques pour en déduire l’émission, ni dépassement lissé sur moyenne.
Tous domiciliés à l'intérieur du périmètre d’opposition de 260m selon la FDSS, ils disposaient de la qualité pour recourir.
Sur le fond, leur droit d'être entendu avait été violé, car ni le propriétaire du fonds, ni l'opérateur, ni les autorités administratives cantonales ou communales n'avaient donné d'informations à la population sur ce projet, contrairement à ce que prévoyait la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700).
L'autorisation litigieuse violait en outre l'obligation de planifier. En effet, dans un premier temps, plus de vingt-six milles installations de téléphonie mobile de nouvelle génération avaient été prévues sur le territoire, puis ce nombre avait été ramené à sept mille cinq-cents. Cela démontrait un manque total de coordination et une prolifération d'un nombre bien trop important d'antennes, qui excédait de loin la couverture réseau requise pour la population suisse.
L’emplacement de l’installation litigieuse bénéficiait déjà d’une couverture S______ dont la puissance était maximale (signal à 100%), avec une vitesse descendant à 600 Mbps et ascendante de 120 Mbps, soit ce qui se faisait de mieux actuellement. Le périmètre délimité par la distance d’opposition comptait à lui seul plus d’une cinquantaine d’antennes (selon la carte synoptique OFCOM), à seulement 35 m pour la plus proche, 52 m pour la seconde et 58 m pour la troisième, mettant en évidence le niveau de saturation du réseau existant. Cela démontrait que la mise en place d’installations de téléphonie mobile se faisait de manière totalement désorganisée, sans tenir compte du besoin réel de la population en ouverture réseau. La guerre commerciale des opérateurs était contre-productive et provoquait une saturation des ondes par des antennes trop nombreuses. Pour toutes ces raisons, une planification, coordination et pesée des intérêts en présence était indispensable.
L’autorisation litigieuse violait également le principe de précaution. Dans la FDSS, la constructrice obtenait une valeur de 5.96 V/m pour le LUS n° 5, respectivement de 5.98 V/m pour le LUS n° 4 pour les appartements les plus éloignés à 30 m, séparés par de la maçonnerie, alors que les appartements en vis-à-vis direct (rue T______ 6______, 6ème), sans maçonnerie n’étaient pas mentionnés dans les LUS. Ils se trouvaient pourtant à mi-distance, soit seulement 15 m (12 m pour les balcons), et avec une inclinaison plus faible que le balcon mentionné dans le LUS n° 2. A ce stade, ces manquements à l'établissement de la FDSS, permettaient de douter des chiffres fournis concernant le respect du champ électrique. Les valeurs fournies se trouvaient à la limite de la légalité (marge négligeable de 0.3%), et n’étaient pas basées sur des mesures en situation réelle, mais des projections mathématiques. Par conséquent, il était déjà prévisible que la limite estimée puisse être dans la pratique rapidement dépassée et en constant dépassement (moyenne supérieure) dans certains endroits des logements. A cela s'ajoutait qu'il était déjà arrivé que l'autorité qui procède au contrôle des valeurs obtenues par l'opérateur dans la FDSS, obtienne des valeurs plus élevées que celles figurant dans ladite fiche. Il était malheureusement déjà arrivé que près de 20 % des antennes rayonnent au-delà des valeurs autorisées, avec des pics mesurés à 23.79 V/m. De telles lacunes étaient inadmissibles. En effet, dans l'hypothèse où les calculs aux LUS seraient inexacts, la vie d'êtres humains serait mise en danger ce qui était évidemment inacceptable et contraire à la Cst. ainsi qu'à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101). Dans ces conditions, ces mesures devaient être effectuées par une entité indépendante et une expertise judiciaire devait être mise en œuvre pour s’assurer du respect des normes applicables. Ils se réservaient en outre le droit de compléter leur critique du calcul effectué par la constructrice, lorsqu'ils auraient pris connaissance du résultat de ladite expertise.
Il résultait par ailleurs de ce défaut de planification que la pesée des intérêts en présence ne pouvait avoir lieu de sorte que ces installations étaient mises en place en faisant fi d’intérêts prépondérants comme le droit à la vie et à l’intégrité physique et psychique des riverains ainsi que la sauvegarde du patrimoine bâti et de la nature. Les droits garantis par les art. 10 al. 1, 10 al. 2 et 11 al. 1 Cst. (RS 101) et 13 al. 2 de la loi fédérale sur la protection de l’environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01). Du fait du manque de données fiables et de recul, cette installation mettait en danger le voisinage, en particulier les enfants. En tant qu'habitants, résidant à quelques mètres de ces futures antennes, ils n’acceptaient pas cette mise en danger quotidienne de leur santé. L'intérêt - soutenu par la constructrice - à ce que la population soit desservie en couverture réseau de téléphonie mobile ne pouvait conduire à ignorer la santé des êtres humains et autres espèces vivantes.
L’autorisation querellée violait en outre les principes de la légalité (art. 5 Cst) et de séparation des pouvoirs. En particulier, concernant le développement de la 5G en Suisse, l'attribution des nouvelles fréquences (700 MHZ, 1400 MHZ et 3500 MHZ) par la Commission fédérale de la communication (ci-après : ComCom) avait été effectuée après que le Parlement ait, par deux reprises, refusé de relever les VL fixées dans l'ORNI, bien que dans le même temps, il était de notoriété publique que le déploiement de cette nouvelle technologie ne pourrait de facto se faire que moyennant une augmentation tout à fait significative desdites VL. Conformément à l'art. 5 Cst., il aurait été nécessaire que ce soit le législateur qui pose le cadre du déploiement de la 5G. IL aurait ainsi pu effectuer une réelle pesée des intérêts commandée par le principe de proportionnalité en prenant le temps d’évaluer les avantages et les risques de cette nouvelle technologie.
Le principe de la séparation des pouvoirs avait également été violé dans la mesure où le Conseil fédéral et l'administration fédérale avaient excédé leurs compétences en empiétant sur les prérogatives du législateur, notamment en contournant le refus du Parlement d'augmenter les VL en matière de rayonnement non ionisant par l'adoption d'une aide à l'exécution et l'introduction subséquente de la modification de l'Annexe 1 de l'ORNI, tout en privant les personnes concernées de la possibilité de s'y opposer.
L'autorisation litigieuse était de plus non conforme au droit du système des valeurs de correction. En février 2021, l'OFEV avait publié un rapport explicatif à ce sujet en relevant qu'en raison de la définition du mode d'exploitation, il pouvait arriver que la puissance émettrice déterminante soit dépassée durant une courte période, le facteur de correction ne pouvant être appliqué que si les antennes adaptatives étaient dotées d'une limitation automatique de la puissance. En l'occurrence, la fiche de donnée spécifique au site ne fournissait aucune explication quant à l'existence d'un éventuel système de limitation automatique. Une telle carence ne permettait donc pas l’utilisation du facteur de correction prévu par l’OFEV.
À cela s'ajoutait qu'un rapport d'expertise de l'Université de Fribourg récemment publié mettait en exergue le fait que le mode d'exploitation recommandée par l'OFEV avait pour conséquence qu'il s'agissait en réalité d'une modification de l'ORNI, qui entraînait un calcul de la puissance émettrice sur une moyenne des six dernières minutes, alors que jusque-là, les VLInst devaient être respectées en permanence dans les LUS. Par conséquent, la volonté initiale exprimée par le Conseil fédéral lors de l'adoption de l'ordonnance n'était plus respectée. Au surplus, la modification partielle de l'ORNI, entrée en vigueur le 1er janvier 2022, ne changeait rien aux développements qui précédaient. Il ne s'agissait que d'une codification de l'aide à l'exécution publiée par l'OFEV le 23 février 2021. En particulier, les valeurs limites et le niveau de protection demeuraient inchangés. Par ailleurs, le 24 février 2021, la Tribune de Genève avait publié un article intitulé « Les nouvelles antennes pour la 5G ne seraient pas sûres ». Dans cet article, les Médecins en faveur de l'environnement (MfE) mettaient en avant le fait que les nouvelles antennes adaptatives qui devaient permettre l'extension du réseau 5G en Suisse ne garantissaient pas un niveau de protection suffisant pour l'être humain. Cette crainte procédait du fait que, temporairement, les antennes adaptatives pouvaient dépasser plus de dix fois la puissance autorisée et même davantage. Comme déjà mentionné, la nouveauté de ces antennes était que la VLI devait être déterminée en six minutes, ce qui constituait une augmentation des valeurs limites par voie détournée, selon ces médecins. Plus grave encore, la justification fondant l'augmentation des valeurs de crête des antennes adaptatives reposait sur des études de simulation, des mesures test uniques ainsi que sur des bases de calcul qui n'emportaient en aucun cas la preuve que le niveau de protection des riverains était conservé. En lien avec ces développements, le Tribunal administratif de première instance du canton de Zürich avait rendu le 15 janvier 2021 un jugement (VB.2020.00544), dans lequel il avait considéré que le rayonnement non ionisant provenant d'une antenne adaptative pouvait en réalité atteindre des valeurs supérieures à celles indiquées par la constructrice dans la fiche des données spécifiques au site. Plus récemment, une étude publiée par le magazine « Bon à Savoir » avait révélé que de très nombreuses antennes dépassaient par moments les valeurs limites fixées dans l'ORNI, parfois de manière très importante. Au gré de ces éléments, il existait un intérêt certain à appliquer le principe de précaution de manière stricte et partant, de procéder à un contrôle juridictionnel de l’ORNI à la lumière de ce principe ancré dans le droit suisse.
Enfin, une absence de SAQ et de contrôle des valeurs limite sur le long terme était à déplorer. Une récente évaluation technique réalisée par un ingénieur alémanique, Monsieur U______, permettait en outre de douter de la véracité des valeurs arrêtées dans les fiches de données spécifiques établies par les opérateurs de téléphonie mobile en relation avec les antennes adaptatives et donc, de leur respect des valeurs limites de l'ORNI pour les LUS en particulier. Les opérateurs semblaient reconnaître que le cadre légal actuellement en vigueur en Suisse n'était pas adapté au déploiement du réseau 5G. Le fabricant chinois ______ l’avait expressément relevé dans le cadre de la « Consultation sur l’attribution de nouvelles fréquences de téléphonie mobile » en ocotbre 2017 (en annexe). En outre, une présentation réalisée par N______ SA avait reconnu que l'introduction, respectivement le déploiement du réseau 5G nécessitaient pour le moins un doublement des valeurs limites dans les LUS. L'article publié par le magazine « Bon à Savoir » le 1er décembre 2021 mentionnait, à ce sujet, que les entreprises de télécommunication demandaient depuis des années un assouplissement des limites inscrites dans l'ORNI, afin de pouvoir déployer la technologie 5G. Au final, pour permettre le développement du réseau 5G en Suisse, les opérateurs avaient besoin soit d'une hausse des valeurs limites consacrées par l'ORNI, soit d'une méthode de calcul qui, par le biais de divers facteurs de réduction, permettrait de parvenir aux valeurs limites telles qu'actuellement consacrées par l'ORNI.
En outre, le fait que les valeurs mesurées dans le cadre du fonctionnement des antennes adaptatives 5G dépassaient largement la limite autorisée, rendait d'autant plus indispensable un SAQ et un contrôle à long terme qui soit fiable et dans les mains d’une entreprise tierce, sans conflit d’intérêts.
Selon l’entreprise V______, leader de mesures professionnelles des antennes de téléphonie mobile, le champ électrique des antennes adaptatives ne pouvait être mesuré correctement à cause du trop grand nombre d'éléments intervenant dans la propagation des ondes. Le calcul était donc basé sur une extrapolation des signaux « au repos » (canaux pilotes / signalisation). En conclusion, il n'existait à ce jour pas de moyen technique pour vérifier le respect réel de la valeur limite par des mesures en situation et la mise en place d'un tel dispositif de mesure serait trop faramineux (annexe fourni de Gigahertz.ch).
En conclusion, compte tenu des valeurs plus que limites aux LUS no 4 et no 5, de l'omission d'autres LUS à la moitié de la distance en visuel direct et de l'impossibilité de mesures effectives des antennes adaptatives, de telle valeurs limites ne pouvaient suffire et ne pourraient pas être respectées compte tenu de l'impossibilité de les mesurer en action.
8. Dans ses observations du 10 mars 2023, N______ a conclu au rejet du recours, sous suite de frais.
Sur le fond, elle se rapportait à la jurisprudence du tribunal qui s’était déjà prononcé à diverses occasions de manière claire et complète sur les arguments invoqués par les recourants.
Ses arguments seront examinés ci-après en droit, dans la mesure utile.
9. Le 26 avril 2023, le DT a transmis son dossier au tribunal, accompagné de ses observations. Il s'en rapportait à justice quant à la recevabilité du recours et concluait pour le surplus à son rejet et à la confirmation de sa décision.
Ses arguments seront examinés ci-après en droit, dans la mesure utile.
10. Par réplique du 31 mai 2023, les recourants ont transmis une « Analyse de conformité ORNI de la station de bas R______ de N______ » effectuée par Monsieur W______, ingénieur auprès du Laboratoire de mesure du rayonnement non ionisant à X______ (NE). Cette analyse permettait de documenter un certain nombre de points avancés dans le recours initial et constituait ainsi un document indispensable dans lequel des « manquements décisifs » étaient mis en lumière.
Les observations du DT ne répondaient pas aux incohérences principales relevées dans le recours, notamment les LUS manquants. De plus, la mesure « réelle » des antennes 5G en fonction n'était pas possible. Les nouvelles antennes projetées allaient par ailleurs détériorer le rendement du site où le signal atteignait déjà 100% et où se trouvaient déjà trois autres sites d'antennes dans un rayon de 35 m, 52 m et 58 m, selon la carte synoptique des antennes de l'OFCOM.
Le DT mentionnait à tort un « remplacement de trois antennes », alors qu’il s'agissait d'une nouvelle installation. Il indiquait en outre que le rayon du périmètre d'antenne était de 96 m, alors qu'il n’était que de 39,16 m selon la FDSS. Ce même rayon aurait été examiné par le SABRA dans le cadre du projet, alors qu'en prenant compte uniquement le rayon des 39 m (et non celui de 96 m), on relevait déjà deux chevauchements de périmètres d'installation. En effet, la carte map.sitg.ch, utilisée par le SABRA indiquait une superposition pour le LUS n°5 avec le périmètre autorisé de l'installation rue P______ 8______ Or, dans le calcul de LUS, N______ ne semblait pas en faire mention.
Après avoir insisté auprès du SABRA pour avoir des détails sur l'installation de N______ sise au quai Y______ 9______ il s'avérait que le périmètre d'installation dudit site était bien différent de celui indiqué sur la carte synoptique des antennes SITG, mais surtout qu'il englobait l'intégralité de leurs LUS, sans que cela ne soit mentionné dans la FDSS. Ces observations confirmaient les mesures qu’ils avaient effectuées sur le terrain avec un appareil amateur, lesquelles méritaient confirmation avec un appareil officiel.
Le SABRA se basant sur une carte incomplète, il était possible que le rayon d'installation de la rue P______ 8______ diffère de celui publié sur le SITG. De même il était plausible que le rayon d'installation de la place Z______ 13______ puisse atteindre certains LUS.
De plus, au sujet du calcul des LUS, quelques degrés d'écart sur les diagrammes d'antennes verticaux pouvaient considérablement changer les valeurs obtenues. Ainsi, les habitations sises rue T______ 12______, non incluses dans les LUS, dépasseraient les 6 V/m à huit degrés près (sans tenir compte des antennes existantes). Il était donc primordial de pouvoir vérifier l'exactitude des diagrammes d'antennes englobant avant et après facteur de correction. Pour ce faire, ils souhaitaient avoir accès au mode d'emploi de chaque type d’antenne prévu, ainsi qu’à leurs fiches techniques, et par la même occasion, intégrer cette adresse dans les LUS, afin d'inclure le contrôle d'exposition de cet emplacement une fois en service.
Il résultait en outre de l’analyse du diagramme directionnel vertical, que la puissance en périphérie des antennes directionnelles n’était inférieure que pour les antennes non directionnelles, alors que c'était précisément le rôle des antennes adaptatives. La puissance en périphérie au-dessus de l'horizontale était supérieure à angle égal au-dessous, alors qu'elles étaient légèrement inclinées pour précisément orienter le faisceau plutôt vers le bas. Dans ce cas, elles seraient montées dans le sens inverse de leurs efficacités, ce qui posait question.
Avec de tels manquements, il était indispensable qu’un tiers puisse accéder à la source du SAQ en toute transparence, indispensable pour un sujet aussi sensible.
En conclusion au vu de ces nombreuses « négligences », il convenait de déclarer la FDSS irrecevable, d’exiger un accès irrévocable aux données sources de puissance de contrôle en exploitation, de demander les FDSS des antennes environnantes (y compris celle de la place Z______ 13______) et de faire vérifier le respect des valeurs en fonction par un organisme indépendant.
11. Par duplique du 13 juin 2023, N______ a fait valoir qu’elle contestait l’analyse de conformité ORNI produite par les recourants, tout en précisant que cette expertise correspondait à une simple déclaration de partie et qu'elle n'avait pas la valeur de preuve. Elle était contestée dans tous les cas, seul le préavis (positif) du SABRA en sa qualité d'autorité spécialisée étant déterminant.
En date du 1er mars 2023 était entré en vigueur le nouveau Règlement genevois sur la protection contre le rayonnement non ionisant des installations stationnaires (RPRNI), qui ne définissait plus à juste titre les balcons et les terrasses comme des LUS. Or, en l’espèce, bien que la fiche de données fut antérieure à la révision du RPRNI précitée, la terrasse avait tout de même été calculée comme LUS, bien qu'il s'agisse d'un lieu de séjour momentané (LSM),
Le LUS n° 2 se trouvait effectivement en contrebas sur la terrasse et il n'y avait pas de vue directe sur les antennes des secteurs 2 et 3. Une atténuation de 15 dB était donc pertinente, d'autant plus que le "LUS" devrait se trouver à la porte d'accès de la terrasse et non pas sur la terrasse. De plus, après la mise en service de l'installation, une mesure serait réalisée notamment au LUS n° 2, conformément au préavis du SABRA. En cas d'éventuels dépassements, des mesures d'assainissement devraient être prises par l'opérateur. Enfin, en considérant une terrasse comme un LUS, N______ s’était pénalisée, car cela restreignait la puissance de son site.
Il était évident que refaire un calcul avec des diagrammes dont la provenance était incertaine et dont la source était anonyme (selon l'auteur de l'analyse) pouvait amener à des valeurs dont l'exactitude était sujette à caution. Pour effectuer des calculs selon les spécifications en vigueur, N______ utilisait toutefois les diagrammes d'antennes originaux fournis par les fabricants d'antennes, qui pouvaient être vérifiés par l'autorité en tout temps.
La règle du périmètre était clairement définie au ch. 62 al. 3 de l'Annexe 1 ORNI et dans la Recommandation d'exécution de l’ORNI. Or, cette règle n'était pas applicable in casu, puisque l'antenne située à l'adresse de la place Q_____ 5_____ était une microcellule dont la puissance était inférieure à 6 W et la distance avec le site R______ supérieure à 5 m.
Pour le surplus, la fiche complémentaire 1 de la FDSS indiquait qu'il n'y avait pas d'autres antennes dans le rayon du périmètre de 39.16 m.
La FDSS devait documenter les trois LUS où le rayonnement était le plus élevé, ce que reconnaissaient d'ailleurs les recourants. Bien que le calcul d'un LUS sur la parcelle n° 10_____ ne soit pas mentionné dans la FDSS définitive, cela ne voulait pas dire que la parcelle en question n'avait pas été prise en considération. En l’occurrence, pour arriver au calcul final, vingt-deux LUS avaient été analysés pour le présent site - et finalement seuls les quatre LUS aux valeurs les plus élevées avaient été retenus dans le calcul final.
En conclusion, l’"analyse de conformité" produite présentait de graves lacunes (méconnaissance des règles applicables, analyse approximative, interprétation subjective, etc.).
12. Par duplique du 23 juin 2023, le DT a persisté dans ses conclusions prises le 26 avril 2023.
En substance, l’analyse effectuée par M. W______ n’était pas de nature à remettre en cause la décision litigieuse, l'avis d'un "expert" mandaté par des recourants constituant un simple allégué de partie, conformément à la jurisprudence fédérale.
L'amortissement du LUS n° 2 n’avait été pris en compte que pour l'antenne n° 2 qui émettait des rayonnements en direction du Sud-Est, soit une direction différente de celle du LUS n° 2 ou de l'appartement sis à la rue T______. En outre, il était tout à fait légitime de prendre en compte l'amortissement du bâtiment, étant donné que le rayonnement, (avant d'arriver au LUS n° 2) devait traverser l'immeuble. En contrepartie, il était possible de constater que, selon la FDSS, aucun amortissement n'avait été retenu pour le bâtiment de l'antenne no 1 qui émettait en direction du LUS n° 2. Par conséquent, tous les amortissements avaient été considérés en fonction de la topologie de l'immeuble et de l'antenne, et l'expertise privée produite par les recourants n'était pas de nature à invalider l'autorisation.
La mention de « remplacement de trois antennes » en lieu et place d'une « nouvelle installation », était une erreur de plume qui ne portait pas à conséquence, puisque dans le cadre de l'instruction, les instances spécialisées avaient analysé le projet en tant que nouvelle installation. Il en allait de même du périmètre de l'antenne (96 m au lieu de 39 m) puisque le SABRA avait vérifié les données en prenant en compte les bonnes distances.
Au sujet des LUS prétendument manquants, soit plus spécifiquement du fait que l'appartement sis rue T______ 6______ au 6e étage, n'aurait pas été choisi comme LUS, le Tribunal fédéral avait récemment confirmé que l'autorité pouvait choisir les LUS à mesurer en tenant compte des motifs techniques et de son expérience. De plus, selon l'art. 11 al. 2 let. c ORNI, la FDSS devait contenir des informations sur les trois LUS où le rayonnement était le plus fort, et sur tous les LUS où la VLInst était dépassée Or, en l’occurrence, N______ avait choisi et pris des mesures dans quatre LUS au rayonnement le plus fort. Ces LUS déterminants avaient été examinés et validés par le SABRA et leur respect faisait partie intégrante de l'autorisation de construire querellée. De plus, le LUS n° 2 était le plus exposé au vu de sa situation sur le bâtiment accueillant l'antenne elle-même. Enfin, comme déjà dit, il n'existait aucune obligation légale d'intégrer l'appartement à la rue T______ aux LUS. Ainsi, aucun manquement ne pouvait être constaté dans le cadre de l'établissement de la FDSS en lien avec le fait que ledit appartement n'avait pas été considéré comme un LUS.
Concernant la remarque des recourants selon laquelle la réelle mesure des antennes 5G n’était pas possible, il ressortait de renseignements pris auprès du SABRA, que la mesure se faisait par rapport à un canal spécifique qui émettait à une puissance constante d'émission. Un calcul permettait ensuite d'extrapoler ces données à la puissance maximale de l'antenne. Cette manière de procéder permettait de ne pas être influencé par le trafic effectif sur l'antenne et d'obtenir une moyenne des données représentative de la réalité.
Quant à l’argument relatif à la saturation du réseau du fait de la présence de trois autres antennes à proximité, il était exact que les nouvelles antennes litigieuses se situaient dans le périmètre d'un autre site mais pas réciproquement. En effet, le périmètre de la nouvelle antenne prévue ne contenait aucune autre antenne d'un autre site. Partant, les conditions de proximité spatiale définies par l’ORNI (art. 62 al. 3 Annexe 1) n’étaient pas remplies et aucune autre antenne ne devait être prise en compte dans le cadre de l'évaluation du site litigieux. De ce fait, aucune saturation du réseau ni violation de l’obligation de planifier ne pouvait être retenue in casu.
Enfin, s’agissant de la remarque sur le diagramme directionnel vertical, ces diagrammes ne définissaient pas les puissances en périphérie des antennes mais uniquement les rapports entre l'angle d’émission et la puissance autorisée. De manière générale, les antennes émettaient de façon optimisée dans une direction, ce qui était parfaitement représenté sur le diagramme d'émission vertical des antennes directionnelles. L'argument quant au sens de montage des antennes relevait de la pure appréciation des recourants, qui n'était basée sur aucun élément concret. En tout état, dans le cadre de la mise en œuvre de l'installation, l'opérateur monterait les antennes dans le sens autorisé.
13. Par courrier du 8 septembre 2023, les recourants ont indiqué au tribunal avoir sollicité la documentation technique de chaque antenne auprès du SABRA mais que ce dernier leur avait répondu, par courriel du 21 août 2023, que, dans la mesure où une procédure judiciaire était en cours, c’était au tribunal de déposer une telle demande.
Ils sollicitaient dès lors du tribunal qu’il procède en ce sens.
14. Par courrier du 26 septembre 2023, le tribunal a répondu aux recourants que le dossier du DT se trouvait à leur disposition pour consultation au greffe du tribunal.
15. Par courrier du 3 octobre 2023, les recourants ont indiqué au tribunal que le dossier en sa possession et la FDSS ne contenaient pas les diagrammes d’antenne, mais une approximation (facteur de correction). Pour les vérifier, ils avaient besoin de la documentation originale du constructeur (fiche d’antenne d’AH______ contenant les « diagrammes d’antenne originaux fabriquant »).
Ils invitaient dès lors le tribunal à requérir cette documentation auprès du SABRA avant de rendre son jugement.
16. Par courrier du 20 octobre 2023, le DT a informé le tribunal que le SABRA lui avait indiqué ne pas être en possession des documents requis, de même que le OAC. Seule N______ était en mesure de fournir ces pièces, selon la demande des recourants.
17. Par courrier du 26 octobre 2023, le tribunal a imparti à N______ un délai au 10 novembre 2023 pour verser à la procédure les modes d’emploi et la documentation technique de chaque modèle d’antennes autorisé par la DD 1______ querellée.
18. Par pli du 6 novembre 2023, N______ a fait parvenir au tribunal deux fiches techniques relatives aux antennes autorisées. L’antenne de secteur AB_____, ainsi que l’antenne du secteur 2 AC_____ était de type « AD_____ » alors que l’antenne du secteur 3 AE_____ était de type « AF_____ ».
19. Le 8 novembre 2023, le tribunal a transmis ces pièces aux autres parties.
20. Par courrier du 14 novembre 2023 adressé au tribunal, les recourants ont sollicité la mise à disposition de la documentation du fabriquant des antennes concernées. Pour vérifier l’exactitude du projet, ils avaient en effet besoin d’avoir accès - pour chaque antenne - aux diagrammes d’antennes AH______, aux modes d’emploi/précaution & préparation de site AH______ et aux fiches de sécurité AH______.
21. La demande d’obtention de ces documents AH______ dans leur intégralité était indispensable pour que le tribunal puisse rendre un « jugement en connaissance de cause ».
22. Par courrier du 17 novembre 2023, le tribunal a imparti à N______ un délai au 4 décembre 2023 pour se déterminer sur les écritures des recourants du 14 novembre 2023.
23. Par écritures du 27 novembre 2023, N______ a fait valoir en substance que les recourants n’avaient ni les outils ni les connaissances pour utiliser les diagrammes à bon escient et, en particulier, pour reproduire le diagramme du « worst case » établi par l’opérateur. En outre, le Tribunal fédéral avait déjà eu l'occasion de confirmer le bien-fondé des diagrammes d'antennes enveloppants fournis par les opérateurs avec la FDSS, et que les mesures de réception faisaient foi pour vérifier le respect des VLInst fixées dans l'ORNI (arrêt 1C_100/202du 14 février 2023), d’où l’inutilité de mettre les diagrammes du fabricant à disposition des recourants.
Si le tribunal devait estimer cette production nécessaire, il convenait de préciser si une clé USB était suffisante ou si les diagrammes devaient être fournis sous forme papier (plus de 7000 pages). En tout état, il appartenait aux recourants de supporter les frais de ce travail considérable.
Enfin, concernant les « autres documents requis », elle ignorait de quoi il s’agissant et invitait les recourants à s’adresser directement à AH______.
24. Le 29 novembre 2023, le tribunal a informé les parties que la cause était gardée à juger.
25. Par courrier du 3 décembre 2023, les recourants ont répété au tribunal que les diagrammes AH______ étaient l’unique moyen de démontrer l’exactitude des diagrammes d’antennes RNI utilisés par N______.
Ils sollicitaient donc à nouveau qu’il soit demandé à N______ de produire dans son intégralité le fichier original PDF au format numérique comprenant les diagrammes d’antennes AH______ concernées (une clé USB vierge était jointe à cette fin) ainsi qu’une autorisation d’accès à la documentation technique en question et « un point de contact AH______ ».
26. Par courrier du 18 janvier 2024 adressé au tribunal, les recourants ont encore fait valoir que rien ne justifiait que la documentation du constructeur fut gardée confidentielle envers des ingénieurs d’ondes radio.
Si le tribunal devait toutefois renoncer à leur demande, il devait être rendu attentif au fait que les diagrammes d'antenne verticaux présentaient des aspects « surprenants » (davantage d'émission vers le ciel que vers le sol et hauteur des diagrammes). Ils souhaitaient vérifier leur pertinence, mais cela n’était pas possible sans les diagrammes du constructeur. De plus, sur le site en question, la direction principale pourrait ne pas correspondre à la direction principale horizontale du diagramme vertical fourni dans les calculs, en raison de la proximité des antennes N______ environnantes, le faisceau le plus horizontal possible se trouvant en dessous de la moyenne théorique considérée. Il résultait un dépassement de 0.20v/m du LUS 4 et 0.35v/m du LUS n°5 en déplaçant respectivement les LUS de 70 cm et 50 cm.
De plus, la ligne directrice du 12 décembre 2022 n’était pas une documentation technique et ne provenait pas du fabricant des antennes de ce projet, AH______.
Enfin, en pratique, la valeur serait supérieure de 1v/m des valeurs de LUS projetées, car la mesure se concentrait uniquement sur les antennes de l'installation (admissible en général), mais vu la densité de couverture de ce site, trois sites d'antennes environnant contribuaient, de façon cumulée, à augmenter la valeur de 1v/m, sans pour autant qu'aucune ne soit suffisamment proche pour légalement être considérée par le périmètre d'antenne.
En conclusion, à défaut de digrammes d’antennes du constructeur produits, il convenait de déclarer la FDSS non recevable.
27. Par courrier du 31 janvier 2024, le tribunal a imparti au SABRA un délai au 22 février 2024 pour se déterminer de manière circonstanciée sur « l’analyse de conformité » du 4 avril 2023 effectuée par M. W______ et sur les problématiques mises en évidence dans cette dernière, notamment la question de l’amortissement par le bâtiment. Il était également invité à se prononcer la pertinence des pièces requises par les recourants.
28. Sur demande du SABRA, ce délai a été prolongé au 22 mars 2024.
29. Par pli du 20 mars 2024, le SABRA a fait parvenir ses déterminations sur l’analyse de la conformité ORNI du 4 avril 2023 effectuée par M. W______.
Il s’est déterminé comme suit :
Concernant le ch. 8 : Les LUS calculés étaient représentés sur le plan cadastral puis identifiés clairement dans la fiche de données pour chaque LUS (fiche complémentaire 4a) par l'adresse, les coordonnées relatives au mat et la hauteur au-dessus du sol. Ces informations étaient suffisamment précises pour permettre leur identification. Par « manque de contact visuel » (page 4 de la FDSS), il fallait comprendre que le LUS était positionné dans le cas le plus défavorable impliquant un contact visuel avec l'antenne, ce qui permettait de ne pas tenir compte de l’amortissement du bâtiment. Il s’agissait ainsi d’un « worst case scenario » en ce qui concernait le point de calcul.
Ch. 10 : La VLI du lieu de séjour étant respectée, il était légitime de ne pas clôturer l’installation.
Ch.13 : Les amortissements du bâtiment étaient consignés (en p. 25ss) dans la recommandation d'exécution de l’ORNI : Stations de base pour téléphonie mobile et raccordements sans fil publiée par l'OFEV en 2002.
Il existait trois amortissements différents, en fonction du type de matériau traversé, définis comme suit:
Matériau | Amort. par le bâtiment en dB | Coef. d'amortissement |
Béton armé Façade métallique Briques Bois Toit de tuiles Verre (p.ex. fenêtre) | 15 15 5
| 32 32 3.2 1 1 1 |
Ch. 14 à 17 : D'une part, la fiche complémentaire 4a pour le « LUS n°2 » prenait correctement en compte l'amortissement du bâtiment. Les émissions dues aux antennes des secteurs 2 et 3 vers le LUS n°2 traversaient la toiture de façon évidente. D'autre part, le LUS n°2 était ici un balcon, aujourd'hui considéré comme un lieu de séjour momentané (voir. ATF 128 Il 378). Ainsi ce « LUS » était en réalité un LSM. La VLI y était ainsi largement respectée. Dans l'hypothèse où le LUS n° 2 serait déplacé à l'intérieur du bâtiment, une atténuation de 15 dB serait alors à rajouter sur les émissions des antennes du secteur 1 conduisant à une valeur plus faible pour le champ électrique.
Ch. 18 : L’antenne identifiée à proximité était déclarée, sur le site de l'Office fédéral de la communication, comme picocell. Sa puissance était donc très faible, de l'ordre de l.7 W, et n'avait aucune influence sur le champ électrique du LUS n°4. De plus, conformément à l’ORNI, celle-ci ne devait pas être prise en considération de par sa très faible puissance et la distance supérieure à 5m du site R______.
Ch. 19 : Le LUS n° 2 était plus exposé au rayonnement de l'antenne que celui sis rue T______ 12______, ce qui justifiait l'absence de fiche complémentaire 4a pour celui-ci. La VLInst est respecté pour le LUS n°2, ce qui induisait qu'elle était respectée pour le LUS situé à la rue T______ 12______.
Ch. 20 : la fiche de donnée démontrait la conformité de la fiche à l’ORNI.
Ch. 21 : les diagrammes d’antennes fournis correspondaient aux données transmises par N______ dans le cadre de la procédure d'autorisation de construire.
La recommandation pour l’exécution de l’ORNI (p. 24ss) prévoyait que « Les caractéristiques émettrices des antennes sont décrites par le diagramme d'antenne. Ce dernier fournit des renseignements quantitatifs sur l'effet directionnel d'une antenne (intensité du rayonnement en fonction de l'angle par rapport à la direction principale de propagation). En général, le fabricant d'antennes fournit deux diagrammes d'antenne, l'un pour le plan horizontal et l'autre pour le plan vertical. Les diagrammes d'antenne existent sous forme graphique et aussi sous forme de tableau. On indique l'atténuation directionnelle par rapport à la direction principale de propagation, généralement exprimée en dB ».
Ces diagrammes n’étaient pas remis en cause par le SABRA.
Ch. 22 : Aucune des remarques techniques concernant la fiche de données et présentées dans le rapport de M. W______ n'était justifiée. Ce point n’amenait pas d'autre commentaire
Concernant la pertinence des pièces requises par les recourants, le SABRA se conformait aux directives fédérales précitées et ne tenait compte que des informations de l'opérateur. Ces diagrammes n’étaient pas vérifiés par le SABRA. Toutefois, il n'y avait pas de raison de les remettre en cause. Les lobes secondaires (en dehors du lobe principal) du diagramme vertical étaient pris en considération dans les calculs, conformément à la recommandation de l’OFEV. Il n'y avait en l'espèce pas de raison, par exemple liée à une malfaçon identifiable, qui justifierait la demande des diagrammes de rayonnement au constructeur.
Enfin, le SABRA ne comprenait pas la remarque des recourants concernant la direction principale. L'intervalle de variation de l'angle du faisceau principale était indiquée dans la fiche de données. Pour chaque LUS, l'angle le plus défavorable était pris en compte pour calculer le cas le plus défavorable de la valeur du champ électrique dans le LUS. D'autre part, la valeur de réglage de l'angle était contrôlée et transmise au SABRA tous les deux mois, dans le cadre des rapports d'assurance qualité transmis par les opérateurs.
30. Le 4 avril 2024, les recourants se sont déterminés sur l’analyse du SABRA.
Ce dernier avait admis qu’il ne vérifiait pas les diagrammes et cela signifiait qu’il s’en remettait entièrement à l’opérateur alors que ce point était précisément la base du calcul de LUS. Cela confirmait la nécessité d’obtenir les diagrammes constructeurs. La population concernée devait avoir la possibilité de les consulter pour comprendre les diagrammes produits par l’opérateur. S’ils avaient pu y avoir accès, la vérification aurait été faite depuis un an et les doutes quant à la capacité des antennes de suivre réellement ces diagrammes auraient pu être levés.
Enfin, concernant la remarque du SABRA qui avait déclaré ne pas comprendre l’argumentaire de la proximité des antennes voisines de N______, ils proposaient de l’expliquer de manière approfondie et sollicitaient un délai à fin avril 2024 pour ce faire.
31. Par pli du 15 avril 2024, les recourants ont encore fait valoir que, selon une expertise 2024 effectuée par M. U______, ingénieur EPF indépendant, les antennes AH______ utilisées par N______ avaient une inclinaison (down tilt), mentionnée dans les diagrammes du constructeur, qui n’était pas reprise dans les diagrammes moyens verticaux fournis par N______. Ceci avait pour effet d’autoriser dans les faits un signal plus fort en direction des LUS, car l’atténuation accordée était de facto plus forte. Ce rapport de M. U______ pouvait être mis à disposition du tribunal.
Le seul et l'unique moyen de relever une telle anomalie passait par les diagrammes du constructeur. Or, légalement, l'opérateur était tenu de mettre à disposition lesdits diagrammes. De plus, l'argument des mesures d'assurance qualité de l'opérateur mentionnées par le SABRA (§2) était caduc, car les mesures étaient interprétées via le fameux diagramme d'antenne. Si ce diagramme permettait une atténuation erronée plus forte, les valeurs mesurées seraient également atténuées en conséquence, en restant fidèle à l'erreur initiale.
32. M______ AG n’a pas produit d’observations ni dupliqué.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).
2. Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 63 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).
3. Pour qu’un recours soit recevable, encore faut-il que son auteur ait la qualité pour recourir.
4. En matière d'installation de téléphonie mobile, ont qualité pour recourir toutes les personnes qui habitent dans un rayon en dehors duquel est produit un rayonnement assurément inférieur à 10 % de la VL de l'installation. Elles ne sont pas uniquement habilitées à se plaindre d'un dépassement des émissions ou des VL de l'installation sur leur propriété mais peuvent en général également remettre en question la légalité du projet de construction (ATF 133 II 409 consid. 1.3 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.112/2007 du 29 août 2007 consid. 2 ; ATA/694/2012 du 16 octobre 2012 ; ATA/235/2008 du 20 mai 2008 ; Monika KOLZ, La loi fédérale sur la protection de l'environnement, jurisprudence de 2000 à 2005, DEP 2007 p. 247 ss, 321-322).
5. En l'espèce, les recourants sont domiciliés à l'intérieur du périmètre d'opposition mentionné dans la FDSS. Ils disposent dès lors de la qualité pour recourir et le recours est ainsi également recevable de ce point de vue.
6. Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.
7. Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).
8. Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).
9. Les arguments formulés par les parties à l'appui de leurs conclusions respectives ainsi que le contenu des pièces versées aux dossiers seront repris et discutés dans la mesure utile (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_72/2017 du 14 septembre 2017 consid. 4.1 ; 1D_2/2017 du 22 mars 2017 consid. 5.1 et les arrêts cités).
10. A titre préalable, les recourants sollicitent une expertise judiciaire indépendante tendant à vérifier les valeurs réelles d’atténuation de la maçonnerie pour chaque pièce de tous les appartements regroupés par LUS sur la valeur d’atténuation la plus faible relevée parmi toutes les pièces, de compléter l’inventaires des LUS omis. Ils demandent à ce que soit vérifié l’exactitude des calculs effectués par la constructrice et si les normes applicables étaient toujours respectées. Ils sollicitent par ailleurs la production des diagrammes de constructeur et un accès aux données sources de la puissance du rayonnement en exploitation de la part du constructeur afin de vérifier de façon indépendante le respect des valeurs limite de radiation.
11. Garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recourant sur le fond (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 et les références).
Il comprend notamment le droit, pour l'intéressé, de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités).
Toutefois, le juge peut renoncer à l’administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l’authenticité n’est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsqu’il parvient à la conclusion qu’elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu’elles ne pourraient l’amener à modifier son opinion. Ce refus d’instruire ne viole le droit d’être entendu des parties que si l’appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a ainsi procédé, est entachée d’arbitraire (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2021 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; 2C_946/2020 du 18 février 2021 consid. 3.1 ; 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1).
12. Les résultats issus d'une expertise privée réalisée sont soumis au principe de la libre appréciation des preuves et sont considérés comme des simples allégués de parties (ATF 142 II 355 consid. 6 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_507/2022 du 13 juin 2022 consid. 3.2).
13. Dans une procédure similaire à la présente cause, où les recourants avaient sollicité la production des documents techniques du fabricant des antennes, soit l’ensemble des diagrammes des installations du site litigieux ainsi que des facteurs de tolérance, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) a retenu que la production de telles pièces n’étaient pas de nature à influencer l’issue du litige, le LUS retenu par l’expert privé ne pouvant être suivi et le SABRA ayant confirmé le caractère standard du diagramme concerné (ATA/622/2024 du 21 mai 2024 consid. 3 et 7.7.1).
14. En l'espèce, le tribunal considère qu’il dispose d’un dossier complet lui permettant de trancher le présent litige en toute connaissance de cause. En particulier, le SABRA, en sa qualité d’instance spécialisée, a rendu un préavis détaillé après analyse de la FDSS présentée par l'opérateur mobile. Il s’est également prononcé de manière circonstanciée sur l’expertise de M. W______ et les recourants ont pu se déterminer sur ses observations. Pour le surplus, conformément à la jurisprudence fédérale précitée, l'avis d'un ingénieur civil mandaté par une partie recourante ne constitue qu'un simple allégué de partie et ne saurait à lui seul rendre insoutenable l'appréciation des preuves opérée par l'instance spécialisée. Dans ces circonstances, le tribunal, procédant à une appréciation anticipée des preuves, considère que l'expertise judiciaire sollicitée par les recourants ne serait pas de nature à influer sur l’issue du litige. En conséquence, cette mesure d'instruction, en soi non obligatoire, ne sera pas ordonnée.
De même, comme retenu par la chambre administrative dans son arrêt précité (ATA/622/2024), rien ne justifie de donner suite à la requête des recourants d’obtenir les diagrammes des antennes aux fins de pouvoir vérifier que leur superposition soit correcte et les facteurs de tolérance, le SABRA ayant confirmé le caractère standard desdits diagrammes qu’il n’a pas remis en question. Pour le surplus, comme relevé à juste titre par N______ dans ses écritures du 27 novembre 2023, le Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion de confirmer le bien-fondé des diagrammes enveloppants fournis par les opérateurs avec la FDSS, ce qui confirme encore l’inutilité de les mettre à disposition des recourants (cf. arrêt 1C_100/2021 du 14 février 2023).
Au vu de ce qui précède, il ne sera pas fait droit aux demandes d’actes d’instruction complémentaires formulées par les recourants.
15. Sur le fond, les recourants font tout d'abord valoir un grief de nature formelle lié à la violation de leur droit d'être entendu, dont le contenu a été rappelé ci-dessus.
16. A titre préalable, il sera relevé qu’il ressort des pièces du dossier que la mention de « remplacement de trois antennes » en lieu et place d'une « nouvelle installation », constitue une erreur de plume qui ne porte pas à conséquence, puisque dans le cadre de l'instruction, les instances spécialisées ont analysé le projet en tant que nouvelle installation. Au demeurant, la requête en autorisation de construire indiquait bien « nouvelle installation ». Il en va de même du périmètre erroné de l'antenne (96 m au lieu de 39 m) évoqué par le DT dans ses observations, puisque le SABRA a pu vérifier les données en prenant en compte les bonnes distances.
17. Selon les art. 3 al. 1 LCI et 17 al. 1 du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI – L 5 05.01), les demandes d'autorisation sont rendues publiques par une insertion dans la FAO. Pendant un délai de trente jours à compter de la publication, chacun peut consulter les demandes d'autorisation et les plans au département et lui transmettre ses observations par une déclaration écrite (art. 3 al. 2 LCI et 18 al. 1 RCI). Les autorisations sont publiées dans la FAO. Il est fait mention, le cas échéant, des dérogations accordées. Les personnes qui ont fait des observations en sont informées par simple avis (art. 3 al. 4 LCI).
18. En l'occurrence, la requête relative au projet querellé a été publiée dans la FAO le ______ 2022 et mise à l’enquête publique le ______ 2022. Les recourants ont ainsi été dûment informés, selon les modalités prévues par la loi, du dépôt de la requête, de la possibilité de consulter le dossier y relatif et enfin de la possibilité d'adresser des observations au département dans un délai de trente jours, ce qu’ils ont d’ailleurs fait le 7 novembre 2022, sous la plume de Mme K______.
Il ne découle ni du droit d'être entendu au sens de l'art. 29 al. 2 Cst., ni des dispositions précitées de la LCI, qu'en sus, il eût appartenu au département d'organiser des séances d'information.
Certes, l'art. 11 al. 1 RPRNI, reprenant en substance la teneur de l'ancien art. 15 RPRNI, abrogé suite à la refonte dudit règlement, laquelle est entrée en vigueur le 8 mars 2023, prévoit que les habitants concernés vivant au voisinage sont informés, de manière appropriée, par l'exploitant ou le propriétaire de la mise en place d'installations stationnaires de téléphonie mobile et des modifications apportées à des installations existantes, sur l'immeuble. Il convient cependant de souligner que cette obligation incombe à l'exploitant ou au propriétaire, et non à l'autorité qui rend la décision d'autorisation. Par conséquent, en tant qu'il est dirigé contre cette décision, le grief de violation du droit d'être entendu s'avère infondé et sera rejeté. En tout état, l'expression « de manière appropriée » employée dans la disposition susmentionnée ne signifie pas que l'information doive être portée individuellement et personnellement à la connaissance de chaque habitant vivant dans le voisinage d'une future installation.
En outre, l’autorité intimée a dûment tenu compte de cette obligation d’information de l’exploitant ou propriétaire puisque l’autorisation litigieuse elle-même la rappelle et exige que les occupants des LUS du voisinage de l’installation soient informés de la mise en place de celle-ci (ch. 10).
19. Les recourants se plaignent ensuite d'une violation de l'obligation de planifier.
Notamment, le périmètre délimité par la distance d’opposition comptait à lui seul plus d’une cinquantaine d’antennes (selon la carte synoptique OFCOM), à seulement 35 m pour la plus proche, 52 m pour la seconde et 58 m pour la troisième, mettant en évidence le niveau de saturation du réseau existant.
20. La LAT a pour but d'assurer une utilisation mesurée du sol tenant compte d'une part des besoins naturels et d'autre part des besoins de la population, en tendant tout à la fois, notamment, à protéger les bases naturelles de la vie, telles que le sol, l’air, l’eau, la forêt et le paysage, et à créer et maintenir un milieu bâti harmonieusement aménagé et favorable à l’habitat et à l’exercice des activités économiques (art. 1 al. 1 et 2 let. a et b LAT).
21. Selon l’art. 2 al. 1 LAT, pour celles de leurs tâches dont l'accomplissement a des effets sur l'organisation du territoire, la Confédération, les cantons et les communes établissent des plans d'aménagement en veillant à les faire concorder.
22. Le Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion de relever qu’une antenne pour la téléphonie mobile, même lorsqu’elle n’est pas conforme à la zone, n’est en principe pas sujette à une obligation de planifier en vertu du droit fédéral, notamment de l’art. 2 LAT (ATF 142 I 26 consid. 4.2, JdT 2017 I 226, p. 234 ss). En particulier, les effets qui en découlent sur l’aménagement du territoire ne sont pas si importants qu’ils imposeraient une modification de la planification (cf. arrêts du TF 1A.140/2003 du 18 mars 2004, c. 3.2, in: ZBl 107/2006 pp. 193 ss; 1A.148/2002 du 12 août 2003, c. 2.2; 1A.316/2000 du 21 septembre 2001, c. 5a et 1A.62/2001 du 24 octobre 2001, c. 6a; Heinz AEMISSEGGER, Die bundesgerichtliche Rechtsprechung zu Standortgebundenheit und Standortplannung von Mobilfunkanlagen, Raum & Umwelt 2/2008 pp. 10 ss; Alexandra GERBER, Téléphonie mobile dans la jurisprudence du Tribunal fédéral: aspects de droit public, DEP 2004 pp. 739 ss). Déterminer dans quelle zone les constructions d’infrastructures sont généralement admises ou ne peuvent être admises qu’exceptionnellement fait en principe partie des facultés du droit cantonal, respectivement communal, et de la planification des zones (art. 22 al. 2 let. a et 23 LAT; ATF 141 II 245 c. 2.1, JdT 2016 I p. 300; ATF 138 II 173 c. 5.3, JdT 2013 I p. 299).
23. Selon le principe de la séparation entre les zones constructibles et non constructibles, les installations destinées à urbaniser et à desservir le territoire bâti doivent en principe être réalisées à l’intérieur des zones à bâtir et non en dehors. Dans ces zones, les infrastructures nécessaires à une zone déterminée sont conformes à celle-ci dans la mesure, s’agissant de leur emplacement et de leur configuration, où elles se trouvent dans un rapport fonctionnel direct avec le lieu où elles doivent être érigées et couvrent principalement le territoire constructible. La conformité à la zone de telles installations peut également être admise lorsqu’elles servent l’entier de la zone constructible et non seulement la partie spécifiquement en question (ATF 138 II 173 c. 5.3, JdT 2013 I p. 299; ATF 133 II 321 c. 4.3 et 4.3.2, JdT 2008 I p. 665). Des considérations liées à la proportionnalité et de nature technique ne permettent en effet pas d’exiger que les rayonnements des antennes de téléphonie mobile s’arrêtent à la limite de chaque zone, ce qui serait déjà impossible du point de vue de la physique (ATF 138 II 173 c. 5.4, JdT 2013 I p. 299). Il n’est par ailleurs pas exclu qu’une antenne située en zone constructible approvisionne un périmètre important en zone non constructible (cf. ATF 141 II 245 c. 2.2 et 2.4, JdT 2016 I p. 300).
24. Par nature, une installation de téléphonie mobile relève de l'infrastructure, au même titre qu'un mât d'éclairage, un transformateur électrique, une conduite de transport de fluides, etc. Elle est donc admissible, s'agissant de sa destination, dans n'importe quelle zone constructible (arrêt du Tribunal fédéral 1A.280/2004 du 27 octobre 2005 consid. 3.7.1 ; ATA/24/2014 du 14 janvier 2014 consid. 8a ; ATA/117/2011 du 15 février 2011 ; ATA/595/2007 du 20 novembre 2007. Elle doit d'ailleurs être installée en priorité en zone constructible (ATF 138 II 173 consid. 5).
25. Dans le cadre de leurs compétences propres en matière d’aménagement du territoire et des constructions, les communes et les cantons peuvent prendre des mesures d’aménagement et adopter des dispositions également en ce qui concerne les antennes pour la téléphonie mobile. Elles peuvent ainsi influencer leur emplacement, pour autant que les limites découlant du droit fédéral sur les télécommunications et sur la protection de l’environnement soient respectées (ATF 133 II 64 c. 5.3 p. 321 c. 4.3.4 et 4.3.5 p. 353, c. 4.2 p. 360, JdT 2008 I p. 662). À ce sujet, on peut imaginer une planification négative (interdiction de principe des antennes de téléphonie mobile dans certains secteurs déterminés dignes de protection ou sur certains objets protégés), des mesures de planification positives (les antennes de téléphonie mobile sont assignées à certaines zones spécifiques, dans des emplacements particulièrement adaptés et qui permettent un approvisionnement suffisant de la part de tous les opérateurs téléphoniques). Ceci étant, le respect des VL prévues par l’ORNI pose des limites strictes à une concentration des points de transmission à l’intérieur d’un territoire d’urbanisation (cf. ch. 62 al. 1er de l’annexe 1 ORNI selon lequel toutes les antennes qui émettent dans des conditions de proximité spatiale comptent comme une installation et doivent respecter ensemble la VLInst). Dans tous les cas, une base légale dans le droit communal ou cantonal est nécessaire pour de telles mesures de planification. De plus, les règles relatives aux installations de téléphonie mobile ne doivent pas être réduites à des parties distinctes et limitées du territoire communal, mais doivent en principe être élaborées sur la base d’une évaluation globale des problèmes pertinents. Des mesures de protection isolées en faveur de certains objets à protéger sont réservées (ATF 138 II 173 c. 6.3; ATF 133 II 321 c. 4.3.4).
26. Parmi les autres mesures de planification, on peut également envisager un modèle en cascade, qui admettrait en priorité les antennes de téléphonie mobile dans des zones destinées aux activités, là où celles-ci se prêtent au service de téléphonie mobile pour la commune, ensuite en zone mixte et enfin dans les zones destinées à l’habitation (ATF 138 II 173 c. 6.4 à 6.6, JdT 2013 I p. 299; ATF 141 II 245 c. 2.1, JdT 2016 I p. 300). Il est par ailleurs admissible que de telles installations soient soumises à l’obligation de respecter les dispositions communales sur l’esthétique et l’intégration dans le paysage (ATF 141 II 245 c. 7.1 et 7.4, JdT 2016 I p. 300).
27. Dans tous les cas exposés ci-dessus, les réglementations en matière de construction et de planification applicables aux installations pour la téléphonie mobile ne peuvent cependant en aucune manière rendre vaine ou compliquer à l’excès la réalisation des tâches d’approvisionnement de l’opérateur de téléphonie mobile en vertu de la loi fédérale sur les télécommunications du 30 avril 1997 (LTC – RS 784.10). Celle-ci tend en effet à garantir à tous les cercles de la population, dans toutes les parties du pays, un service universel de télécommunication fiable et à prix accessible, ainsi qu’à rendre possible une concurrence efficace dans la fourniture des services de télécommunication (art. 1 al. 2 let. a et c LTC ; ATF 141 II 245 c. 7.1, JdT 2016 I p. 300 ; ATF 133 II 64 c. 5.3 p. 321 et c. 4.3.4 p. 328, JdT 2008 I p. 662). L’obligation de garantir le service public de téléphonie à l’ensemble de la population et dans tout le pays est par ailleurs confirmée dans les concessions délivrées aux opérateurs (art. 92 Cst., art. 14 al. 1 et 16 al. 1 let. a LTC ; ATF 138 II 570 c. 4.2). Les mesures de planification dont il a été question ci-dessus ne sauraient ainsi violer ces intérêts publics concrétisés dans la LTC; elles doivent par ailleurs être adéquates sous l’angle du droit de la planification du territoire et respecter les conditions d’une limitation des droits fondamentaux des citoyens (cf. ATF 133 II 321 c. 4.3.5 p. 330, JdT 2008 I p. 665; Benjamin WITTWER, Bewilligung von Mobilfunkanlagen, 2e éd. 2008, pp. 92 ss).
28. En outre, dans la zone à bâtir, l'opérateur n'a aucune obligation fondée sur le droit fédéral d'établir un besoin et une pesée des intérêts n'entre pas en considération ; c'est à lui seul qu'il incombe de choisir l'emplacement adéquat de l'installation de téléphonie mobile (arrêt du Tribunal fédéral 1A.140/2003 du 18 mars 2004 consid. 3.1, 3.2). Il appartient ainsi à chaque opérateur de décider du déploiement de son réseau et de choisir les sites appropriés en zone à bâtir. Le devoir de la Confédération et des cantons se limite donc à garantir la coordination et l'optimisation nécessaire des sites de téléphonie mobile et à veiller à ce que les intérêts de l'aménagement du territoire, de l'environnement, de la nature et du paysage soient dûment pris en compte dans les procédures de concession et d'autorisation (arrêt du Tribunal fédéral 1A.162/2004 du 3 mai 2005 consid. 4 ; ATA/24/2014 précité consid. 8b ; ATA/117/2011 précité).
29. S'agissant du cumul des émissions, le ch. 62 de l'annexe 1 ORNI prévoit que les groupes d'antennes émettant dans des conditions de proximité spatiale comptent comme une seule installation, indépendamment de l'ordre dans lequel ils ont été construits ou modifié (al. 2). Deux groupes d'antennes émettent dans des conditions de proximité spatiale lorsqu'au moins une antenne de chaque groupe se trouve dans le périmètre de l'autre groupe (al. 3).
30. En l’occurrence, l'installation de l’ouvrage litigieux est prévue en zone 1, soit en zone constructible. Par conséquent, il convient de retenir que cette installation est conforme à la zone dans laquelle elle est destinée à prendre place. Il est en outre manifeste que ni le canton de Genève ni la commune concernée n'ont fait usage de la compétence pour définir des zones spécifiques d'implantations des antennes de télécommunications mobiles. Pour le surplus, ce type d'installations figure dans le cadastre répertoriant l'ensemble des installations existantes ou autorisées, librement accessible sur le site du Système d’Information du Territoire à Genève (SITG) depuis le lien internet suivant : (https://map.sitg.ch/app/?portalresources=SPBR_
ANTENNE_TELEPHONIE_PUBLIC) et qui permet d'obtenir une vue d'ensemble de la situation y relative. En conclusion, il n'apparaît pas qu'il existe dans le présent cas une obligation de planification.
S’agissant des trois antennes déjà présentes à proximité du site concerné, le département a relevé à juste titre que, s’il n’était pas contesté que les nouvelles antennes litigieuses se situaient dans le périmètre d’un autre site, la réciproque n’était pas vraie. En effet, le périmètre de l’installation prévue par le projet ne contient aucune autre antenne dans un autre site. Partant, les conditions de proximité spatiale définie par le ch. 62 al. 3 ORNI ne sont pas remplies et aucune autre antenne ne doit être pris en compte dans le cadre de l’évaluation du site litigieux. De plus, pour que la VLI puisse être dépassée dans un LUS donné, il faudrait que plus de cent stations émettent en épuisant les valeurs limites de l'installation (VLInst) sans se trouver dans un rapport spatial étroit. Un tel scénario serait totalement irréaliste, tant actuellement qu'à l'avenir (cf. dans ce sens, arrêt du TF 1C-693/2021 du 3 mai 2021, consid. 5.3).
Pour le surplus, les recourants se contentent d'exposer les raisons pour lesquelles une planification serait à leur avis nécessaire (à savoir en raison d'une prolifération désordonnée des installations de téléphonie mobile), mais n'indiquent pas les bases légales sur lesquelles une telle obligation serait fondée, hormis l'art. 2 LAT. Or, la teneur très générale de cette disposition n'implique en aucun cas une obligation spécifique de planification pour les antennes liées au réseau de télécommunication mobile. Il découle au contraire de la jurisprudence du Tribunal fédéral, citée par le département dans ses observations, que les installations de communication mobile n'ont en principe pas besoin de faire l'objet d'une planification spéciale, en particulier lorsqu'elles sont érigées en zone constructible (ATF 142 I 26 consid. 4.2 ; ATF 138 II 173 consid. 5), comme in casu.
Compte tenu de ce qui précède, aucune saturation du réseau ou violation de l’obligation de planifier ne peut être retenue.
Mal fondé, ce grief sera rejeté.
31. Les recourants se plaignent ensuite d’une violation du principe de précaution. En particulier, la constructrice avait obtenu une valeur de 5.96 VM pour le LUS n° 5, respectivement de 5.98 VM pour le LUS n° 4, pour les appartements les plus éloignés situés à 30 m séparés par de la maçonnerie, alors que les appartements en vis-à-vis direct (rue T______ 6______, 6ème), sans maçonnerie, n’étaient pas mentionnés dans les LUS. Or, il se trouvaient à 15 m (12 m pour les balcons) et avec une inclinaison plus faible que le balcon mentionné dans le LUS n° 2. Si les calculs aux LUS, dont certains n’étaient pas mentionnés, étaient inexacts, cela mettrait potentiellement en danger la vie d’êtres humains, ce qui était inacceptable et contraire à la Cst et la CEDH.
Ils relèvent également la non-conformité au droit du système des facteurs de correction et le fait que la décision querellée ne contiendrait pas d'indication sur la manière de garantir le respect de la puissance émettrice à long terme. Leurs arguments reviennent ainsi à critiquer le système global d'implantation d'une telle installation, ce qui justifie de les examiner en même temps.
32. Le développement du réseau de téléphonie mobile 5G s’inscrit dans un climat de tension entre intérêts publics contradictoires : d’un côté, la mise à disposition de la population d’un réseau mobile performant, et de l’autre, la protection de la santé de la population contre les rayonnements non ionisants (Joel DRITTENBASS, Risk-Based Approach als Konkretisierungsvariante des umweltschutzrechtlichen Vorsorgeprinzips : Angewendet am neuen 5G-Mobilfunkstandard, DEP 2021, p. 134 ss, p. 139 s.).
33. En droit fédéral, la protection contre les effets nocifs ou gênants causés notamment par les rayonnements non ionisants issus des antennes de téléphonie mobile est régie par la loi fédérale sur la protection de l’environnement du 7 octobre 1983 (loi sur la protection de l’environnement, LPE - RS 814.01) et les ordonnances qui en découlent (cf. ATF 138 II 173 consid. 5.1 ; arrêt 1C_97/2018 du 3 septembre 2019 consid. 3.1 ; Joël DRITTENBASS, op.cit., p. 140).
34. Selon l'art. 1 al. 1 LPE, cette loi a pour but de protéger l'homme, les animaux et les plantes, leurs communautés biotiques et leurs habitats contre les atteintes nuisibles ou incommodantes et de préserver à long terme les bases naturelles de la vie. Les impacts qui pourraient devenir nuisibles ou gênants doivent être limités à un stade précoce par mesure de précaution (art. 1 al. 2 LPE). L'émission de rayonnements est limitée par des mesures à la source (art. 11 al. 1 LPE), notamment par l'édiction de valeurs limites d'émission dans les ordonnances (art. 12 al. 1 let. a et al. 2 LPE).
35. Pour l'évaluation des effets nocifs ou gênants, le Conseil fédéral fixe par voie d'ordonnance des VLI. Selon l’art. 14 let. a LPE, les VLI doivent être fixées de telle manière que des immissions inférieures à ces valeurs ne mettent pas en danger l’homme, les animaux et les plantes, leurs communautés biotiques et leurs habitats selon l’état de la science ou l’expérience. Bien que la disposition précitée se réfère à la pollution atmosphérique, elle s’applique également en règle générale à d’autres immissions, notamment celles causées par les rayonnements non ionisants (ATF 146 II 17 consid. 6.5 ; 126 II 399 consid. 4b ; 124 II 219 consid. 7a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_579/2017 du 18 juillet 2018 consid. 5.5 ; 1C_450/2010 du 12 avril 2011 consid. 3.3).
36. Sur la base de la délégation de compétence de l'art. 13 al. 1 LPE, le Conseil fédéral a édicté l'ORNI pour protéger les personnes contre les rayonnements non ionisants nocifs ou gênants provenant de l'exploitation d'installations fixes (art. 1 ORNI). Cette ordonnance règle les limites d'émission ainsi que les limites d'immissions pour les émetteurs de radiocommunication mobile et les raccordements d'abonnés sans fil (cf. art. 2 al. 1 let. a, et annexe 1 ch. 6, ainsi que l'annexe 2 de l'ORNI ; ATF 138 II 173 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_97/2018 du 3 septembre 2019 consid. 3.1). Pour se protéger contre les effets thermiques scientifiquement fondés du rayonnement des installations de radiocommunication mobile, l'ORNI prévoit des VLI qui doivent être respectées partout où des personnes peuvent être présentes (art. 13 al. 1 et annexe 2 ORNI ; ATF 126 II 399 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_627/2019 du 6 octobre 2020 consid. 3.1).
37. En outre, le Conseil fédéral a fixé des VLInst pour concrétiser le principe de précaution en vertu de l’art. 11 al. 2 LPE (art. 4 al. 1 ainsi que l’annexe 1 ch. 64 ORNI). Les VLInst ne sont pas directement liées à des dangers avérés pour la santé, mais ont été fixées en fonction de la faisabilité technique et opérationnelle ainsi que de la viabilité économique afin de minimiser le risque d’effets nocifs, dont certains ne sont que soupçonnés et pas encore prévisibles (ATF 126 II 399 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_627/2019 du 6 octobre 2020 consid. 3.1). Avec les VLInst, le Conseil fédéral a créé une marge de sécurité par rapport aux dangers avérés pour la santé (ATF 128 II 378 consid. 6.2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_627/2019 du 6 octobre 2020 consid. 3.1 ; 1C_576/2016 du 27 octobre 2017 consid. 3.5.1). Dans les LUS, les installations de radiocommunication mobile doivent toujours respecter la VLInst d’une installation donnée (art. 3, 4 al. 1, 6 et annexe 1 ch. 65 ORNI ; ATF 128 II 378 consid. 6.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_627/2019 du 6 octobre 2020 consid. 3.1).
38. L’annexe 1 ORNI traite de la limitation préventive des émissions, notamment pour les stations émettrices pour téléphonie mobile et raccordements téléphoniques sans fil (ch. 6).
39. Par antennes émettrices adaptatives, on entend les antennes émettrices exploitées de sorte que leur direction d’émission ou leur diagramme d’antenne est adapté automatiquement selon une périodicité rapprochée (ch. 62 al. 6 annexe 1 ORNI).
40. Le ch. 63 de l’annexe 1 ORNI traite du mode d’exploitation déterminant. Par mode d’exploitation déterminant, on entend le mode d’exploitation dans lequel un maximum de conversations et de données est transféré, l’émetteur étant au maximum de sa puissance (ch. 63 al. 1 annexe 1 ORNI).
41. Selon le ch. 63 al. 2 annexe 1 ORNI, s’agissant des antennes émettrices adaptatives qui possèdent au moins huit sous‑ensembles d’antennes commandés séparément (sub arrays), un facteur de correction KAA peut être appliqué à l’ERP maximale lorsque les antennes émettrices sont équipées d’une limitation de puissance automatique.
42. Cette limitation vise à garantir que, durant l’exploitation, l’ERP moyenne sur une durée de six minutes ne dépasse pas l’ERP corrigée (ch. 63 al. 2 annexe 1 ORNI).
Les facteurs de correction KAA suivants s’appliquent :
Nombre de sub arrays | Facteur de correction KAA |
64 et plus | ≥ 0,10 |
32 à 63 | ≥ 0,13 |
16 à 31 | ≥ 0,20 |
8 à 15 | ≥ 0,40 |
(ch. 63 al. 3 annexe 1 ORNI).
Si un facteur de correction KAA est appliqué aux antennes émettrices adaptatives existantes, le détenteur de l’installation remet à l’autorité compétente une fiche de données spécifique au site adaptée (ch. 63 al. 4 annexe 1 ORNI).
43. Dans un arrêt du 9 janvier 2024, la chambre administrative a retenu qu’en l’absence d’application du facteur de correction KAA au sens de l'art. 63 al. 2 et 3 annexe 1 ORNI pour une fiche datant d’avant le 1er janvier 2022, l’ERP validée par le SABRA dans son préavis correspondait à une ERPmax. Dans ces circonstances correspondant au scénario du pire (« worst case »), le SABRA n’avait pas à vérifier la réalisation de la condition préalable à l’application dudit facteur de correction, posée par l'art. 63 al. 2 annexe 1 ORNI et confirmée par les directives fédérales précitées, consistant à s’assurer du fonctionnement en bonne et due forme du système de limitation automatique de puissance (ATA/11/2024 du 8 janvier 2024 consid.8,2, la cause étant actuellement pendante devant le Tribunal fédéral).
44. L’annexe 1 ch. 64 ORNI prévoit que la VLInst à respecter est de 4 V/m pour les installations qui émettent exclusivement dans la gamme de fréquence autour de 900 MHz ou dans des gammes de fréquence plus basses (let. a), 6 V/m pour les installations qui émettent exclusivement dans la gamme de fréquence autour de 1800 MHz ou dans des gammes de fréquence plus élevées (let. b) et de 5 V/m pour toutes les autres installations (let. c).
45. Ainsi, les VLI et VLInst de l’ORNI sont principalement adaptées à la protection de l’homme (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_579/2017 du 18 juillet 2018 consid. 5.4 ; 1C_254/2017 du 5 janvier 2018 consid. 9.2 ; 1C_450/2010 du 12 avril 2011 consid. 3.2). La doctrine a au surplus relevé que les valeurs limites prévues dans l’ORNI était dix fois plus strictes que celles recommandées par la Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants (Joel DRITTENBASS, op. cit., p. 138).
46. Les valeurs limites spécifiées dans l’ORNI pour la protection contre les rayonnements non ionisants (RNI) fondées sur des résultats scientifiquement étayés concernant les risques pour la santé liés aux antennes de radiotéléphonie mobile. Le Conseil fédéral ou son autorité spécialisée, l’OFEV, suit en permanence l’évolution de la science avec un groupe consultatif d’experts (BERENIS) et doit, si nécessaire, adapter les valeurs limites à l’état de la science ou de l’expérience (art. 11 al. 2 LPE ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_518/2018 du 14 avril 2020 consid. 5.1.1 ; 1C_348/2017 du 21 février 2018 consid. 4 ; 1C_118/2010 du 20 octobre 2010 consid. 4.2.3). Cela étant, vu la marge de manœuvre dont dispose le Conseil fédéral s’agissant de l’établissement des valeurs limites, seuls de solides éléments démontrant de nouvelles connaissances fondées scientifiquement justifient de les remettre en cause (arrêts du Tribunal fédéral 1C_518/2018 du 14 avril 2020 consid. 5.1.1 ; 1C_323/2017 du 15 janvier 2018 consid. 2.5). À cet égard, le Tribunal fédéral a encore récemment confirmé qu’en l’état des connaissances actuelles, il n’existait pas d’indices en vertu desquels ces valeurs limites devraient être modifiées (arrêts 1C_518/2018 du 14 avril 2020 consid. 5.1.1 ; 1C_348/2017 du 21 février 2018 consid. 4.3; 1C_323/2017 du 15 janvier 2018 consid. 2.5). La doctrine relève également que si des incertitudes scientifiques existent, le volume des études scientifiques permettant d’apprécier les effets des antennes de téléphonie mobile sur le corps humain a fortement augmenté et leurs conclusions emportent le constat qu’aucun effet du rayonnement de la téléphonie mobile sur la santé n’a pu être prouvé de manière cohérente en dessous des valeurs limites de l’ORNI (Martin RÖÖSLI, Gesundheitsgefährdungsabschätzung: Auswirkungen von nicht-ionisierender Strahlung auf den Menschen, DEP 2021, p. 117-133, p. 127 ss). Sans indice concret indiquant que ces valeurs limites devraient être modifiées, le Tribunal fédéral a jugé, à diverses reprises, que les valeurs limites fixées dans l’ORNI étaient conformes à la Constitution et à la loi (cf. arrêts 1C_375/2020 du 5 mai 2021 consid. 3.2.5 ; 1C_518/2018 du 14 avril 2020 consid. 5.1.1 ; 1C_348/2017 du 21 février 2018 consid. 4.3 ; 1C_323/ 2017 du 15 janvier 2018 consid. 2.5). Le Tribunal fédéral en a tiré qu’il existe une présomption de respect du principe de prévention si les valeurs limites prévues par l’ORNI sont respectées (arrêt 1C_518/2018 du 14 avril 2020 consid. 5.3).
47. De jurisprudence constante, le principe de prévention est réputé respecté en cas de conformité de la VLInst dans les LUS où cette valeur s'applique (ATF 126 II 399 consid. 3c ; ATF 133 II 64 consid. 5.2 ; arrêt 1A.68/2005 du 26 janvier 2006 consid. 3.2 in SJ 2006 I 314). Cela étant, vu la marge de manœuvre dont dispose le Conseil fédéral quant à l'établissement des VL, seuls de solides éléments démontrant de nouvelles connaissances fondées scientifiquement justifient de remettre en cause ces valeurs (arrêt du Tribunal fédéral 1C_323/2017 du 15 janvier 2018 consid. 2.5). À cet égard, le Tribunal fédéral a encore récemment confirmé qu'en l'état des connaissances, il n'existait pas d'indices en vertu desquels ces VL devraient être modifiées (arrêts du Tribunal fédéral 1C_296/2022 du 7 juin 2023 consid. 2,1 ; 1C_375/2020 du 5 mai 2021 consid. 3.2.5 ; 1C_518/2018 du 14 avril 2020).
48. Selon le rapport de novembre 2019 du groupe de travail « Téléphonie et rayonnement » mandaté par le DETEC, qui prend en considération les rapports d'évaluation publiés depuis 2014, aucun effet sanitaire n'a été prouvé de manière cohérente en dessous des valeurs limite fixées dans l'ORNI pour les fréquences de téléphonie mobile utilisées actuellement. Le groupe de travail a constaté que les éléments de preuves demeuraient insuffisants (DETEC, Rapport « Téléphonie mobile et rayonnement » du 18 novembre 2019, p. 8-9).
49. Par ailleurs, la Cour européenne des droits de l’homme a en particulier confirmé, sous l’angle de l’art. 8 CEDH, que tant que la nocivité des antennes pour la population n’était pas prouvée scientifiquement, elle restait dans une large mesure spéculative, de sorte qu’on ne pouvait imposer à la Confédération l’obligation d’adopter des mesures plus amples (ACEDH, Luginbühl c. Suisse du 17 janvier 2006 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_518/2018 précité consid. 5.1.1).
50. De surcroît, le 24 mai 2022, l’OFEV a publié un rapport fédéral relatif aux mesures d’exposition aux rayonnements non ionisants occasionnés par les antennes 5G (Mesures d’exposition aux rayonnements non ionisants, Rapport annuel 2021, Consortium de projet SwissNIS ; ci-après : le rapport annuel 2021 sur la 5G). Ce rapport décrit, d’une part, le concept de base et le mode de collecte des données et présente, d’autre part, les premiers résultats des mesures effectuées. Il en ressort que les valeurs mesurées sont nettement inférieures aux valeurs limites, déterminantes en ce qui concerne les effets sur la santé (p. 58).
51. Dans le domaine du rayonnement non ionisant, la limitation dite préventive - qui doit être ordonnée en premier lieu, indépendamment des nuisances existantes - est reprise à l’art. 4 al. 1 ORNI. Cette limitation fait l’objet d’une réglementation détaillée à l’annexe 1 de l’ORNI (par renvoi de l’art. 4 al. 1 ORNI), laquelle fixe notamment, pour les stations émettrices pour téléphonie mobile et raccordements téléphoniques sans fils (ch. 6 annexe 1 ORNI), les VLInst mentionnées plus haut (ch. 64 annexe 1 ORNI).
52. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l’étendue de la limitation préventive des émissions selon l’art. 4 al. 1 ORNI est déterminée de manière exhaustive avec l’édiction des VLInst, raison pour laquelle les autorités appliquant la loi ne peuvent pas exiger une limitation supplémentaire dans des cas individuels sur la base de l’art. 12 al. 2 LPE (ATF 133 II 64 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1A_251/2002 du 24 octobre 2003 consid. 4 ; 1A.10/2001 du 8 avril 2002 consid. 2.2 ; Joel DRITTENBASS, op. cit., p. 141-142).
53. Au sens de l’art. 12 al. 2 ORNI, pour vérifier si la VLInst, au sens de l’annexe 1, n’est pas dépassée, l’autorité procède ou fait procéder à des mesures ou à des calculs, ou se base sur des données provenant de tiers. L’OFEV recommande des méthodes de mesure et de calcul appropriées.
54. Sur cette base, l’OFEV a publié le 23 février 2021 un document intitulé « Explications concernant les antennes adaptatives et leur évaluation selon l’ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant (ORNI) »
(ci-après: explications OFEV). Il y est expressément indiqué (p. 3) que l’ORNI s’applique aussi bien à la technologie de téléphonie mobile de type 2G (GSM), 3G (UMTS), 4G (LTE) ou 5G (New Radio).
55. Au sujet de la limitation automatique de la puissance des installations adaptatives, il y est précisé qu'il s'agit d'une application logicielle implémentée sur l’antenne qui détecte en permanence la puissance totale de l’antenne adaptative émise dans un secteur radio. Si, sur de courtes périodes, des pics de puissance supérieurs à la puissance d’émission se produisent, la puissance est réduite de telle sorte que la puissance émettrice moyenne sur une période de six minutes ne dépasse pas la puissance d’émission déclarée. S’il est prévisible que cette moyenne puisse dépasser la puissance autorisée, la puissance est réduite de telle sorte que la valeur moyenne reste sûrement en dessous du seuil spécifié. Les pics de puissance de courte durée peuvent atteindre au maximum une valeur ERPmax,n correspondant à la puissance d’émission autorisée ERPn multipliée par la réciproque du facteur de correction. Avec un facteur de correction de 0,1, la valeur de pointe de la puissance émettrice peut être au maximum dix fois supérieure à la valeur déclarée.
56. Également le 23 février 2021, l’OFEV a publié un complément à la recommandation d’exécution de l’ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant concernant les stations de base pour téléphonie mobile et raccordements sans fil (WLL) de 2002 (ci-après: le complément).
57. Avant la publication du complément, des antennes adaptatives avaient été autorisées sur la base du scénario du pire. Le complément définit désormais comment les paramètres techniques des antennes adaptatives doivent être déclarés dans la fiche de données spécifique au site et comment leur contribution à l'intensité du champ électrique de l'installation de téléphonie mobile doit être calculée. Il indique en outre comment les antennes adaptatives doivent être contrôlées dans les SAQ utilisés par les opérateurs (complément, p. 6).
58. Il y est aussi précisé que, conformément à l’annexe 1 ch. 63 de l’ORNI révisée, le mode d’exploitation déterminant pour les antennes adaptatives correspond également au mode d’exploitation dans lequel un maximum de conversations et de données est transféré, l’émetteur étant au maximum de sa puissance. En raison des propriétés spécifiques des antennes adaptatives, la variabilité des directions d’émission et des diagrammes d’antenne doit également être prise en considération. Concrètement, il faut aussi tenir compte du fait que les antennes adaptatives ne peuvent pas émettre en même temps à la puissance d'émission maximale possible dans toutes les directions, ce qui correspond au scénario du pire. Dans la réalité, la puissance d'émission est répartie pour les signaux qui sont émis dans différentes directions. En outre, conformément à l'annexe 1 ch. 64 ORNI, dans un LUS, la preuve par calcul du respect de la VLInst est fournie comme auparavant au moyen de la fiche complémentaire 4a de la fiche de données spécifique au site (complément, p. 7 ss).
59. Une nouvelle installation de radiocommunications mobiles et son exploitation ne peuvent être approuvées que si, sur la base d'une prévision mathématique, il est assuré que les valeurs limites fixées par l'ORNI peuvent probablement être respectées (art. 4 ss ORNI). La base de ce calcul est la fiche de données spécifique au site que doit remettre le propriétaire de l'installation projetée (art. 11 al. 1 ORNI). Celle-ci doit contenir les données techniques et opérationnelles actuelles et prévues de l'installation, dans la mesure où celles-ci sont déterminantes pour l'émission de rayonnements (art. 11 al. 2 let. a ORNI). Cela inclut notamment la puissance ERP (art. 3 al. 9 ORNI), y compris la direction du faisceau principal des antennes, et si l'antenne fonctionne en mode adaptatif ou non. Les données correspondantes servent de base pour le permis de construire et sont contraignantes pour l'opérateur ; toute augmentation de l'ERP au-delà de la valeur maximale autorisée et toute direction de transmission au-delà du domaine angulaire autorisé est considérée comme un changement de l'installation, ayant pour conséquence qu'une nouvelle fiche de données spécifique au site doit être présentée (annexe 1 ch. 62 al. 5 let. d et e ORNI ; ATF 128 II 378 [arrêt du Tribunal fédéral 1A.264/2000 du 24 septembre 2002] consid. 8.1, non publié). La fiche de données du site doit également contenir des informations sur le lieu accessible où ce rayonnement est le plus fort, sur les trois LUS où ce rayonnement est le plus fort, et sur tous les LUS où la VLInst au sens de l’annexe 1 est dépassée (art. 11 al. 2 let. c ORNI).
60. Il est vrai que la prévision calculée qui doit être faite sur la base de ces informations est sujette à certaines incertitudes, car elle prend en compte les principaux facteurs d'influence mais ne tient pas compte de toutes les subtilités de la propagation du rayonnement. Cependant, le Tribunal fédéral a précisé que, dans ce calcul, l'incertitude de mesure ne doit être ni ajoutée ni déduite. Seules les valeurs mesurées doivent être prises en compte (arrêts du Tribunal fédéral 1C_653/2013 du 12 août 2014 consid. 3.4; 1C_132/2007 du 30 janvier 2008 consid. 4.4-4.6 in RDAF 2009 I 536). En effet, c'est pour prendre en compte cette incertitude que des mesures de réception doivent être effectuées après la mise en service de l'installation si, selon la prévision calculée, 80 % de la VLInst est atteinte à un LUS (complément recommandation OFEV, ch. 2.1.8 ; Benjamin WITTWER, Bewilligung von Mobilfunkanlagen, 2e éd., Zurich 2008, p. 61 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 1A.148/2002 du 12 août 2003 consid. 4.3.1 s.). Si, sur la base de ces mesures, il s'avère que la VLInst est dépassée lors du fonctionnement, la puissance d'émission maximale admissible doit être redéfinie et le respect des valeurs prescrites doit être démontré par des mesures supplémentaires (cf. arrêt du tribunal fédéral 1C_681/2017 du 1 décembre 2019 consid. 4.5). De surcroît, le risque d'un pronostic erroné est supporté par le maître d'ouvrage dans la mesure où il peut encore être amené à prendre des mesures pour assurer le respect des valeurs limites ultérieurement, c'est-à-dire après la mise en service de l'installation (cf. ATF 130 II 32 consid. 2.4).
61. De surcroît, il sied d'ajouter qu'au printemps 2005, le Tribunal fédéral avait estimé qu'il fallait mieux contrôler l'exploitation des antennes de téléphonie mobile, afin de garantir en particulier que les puissances émettrices et les directions d'émission autorisées soient respectées. Sur cette base, l'OFEV a mis en place un SAQ prévoyant que pour chaque antenne, les valeurs correspondant à la direction et à la puissance émettrice maximale sont enregistrées dans une banque de données et comparées quotidiennement aux valeurs autorisées. Ce système est examiné périodiquement et certifié par un organe indépendant. SWISSCOM a mis en place un tel système de sécurité, dont les nouveaux paramètres relatifs aux antennes adaptatives ont été validé par l'OFCOM en date du 23 juin 2021 (Validierungszertifikat QSS Swisscom, accessible à l'adresse https://www.bafu.admin.ch/bafu/fr/home/themes/ electrosmog/ info-specialistes/ mesures-contre-l-electrosmog/assurance-de-la-qualite-en-ce-qui-concerne-le-respect-des-valeur.html ; consulté le 10 novembre 2021).
62. Le Tribunal fédéral a reconnu le SAQ comme un instrument de contrôle performant et n'a pas considéré nécessaire de recourir à un contrôle par des mesures de construction (arrêt du Tribunal fédéral 1C_282/2008 du 7 avril 2009 consid. 3.5). A teneur de la jurisprudence récente, il n’y a pas lieu de douter de la fiabilité des SAQ, y compris pour les antennes adaptatives (arrêts du Tribunal fédéral 1C_45/2023 du 16 janvier 2024 consid. 6.3 ; 1C_296/2022 du 7 juin 2023 consid. 2.7 ; 1C_693/2021 du 3 mai 2023 consid. 6. 1 et 6. 2 ; ATA 622/2024 du 21 mai 2024, consid. 7.7.1).
63. Il en découle qu'en l'état actuel des connaissances scientifiques, il n'est pas possible d'invoquer le principe de prévention pour s'opposer à la technologie 5G, dès lors que les valeurs limite prévues par l'ORNI sont concrètement respectées (ATA/415/2022 du 26 avril 2022 consid. 6).
64. Les valeurs limites sont fixées par le Conseil fédéral conformément aux critères de l'art. 11 al. 2 LPE que sont l'état de la technique, les conditions d'exploitation ainsi que le caractère économiquement supportable, sans référence directe aux dangers pour la santé prouvés ou supposés, avec toutefois la prise en compte d'une marge de sécurité (arrêt 1A.134/2003 du 5 avril 2004 consid. 3.2, in DEP 2004 p. 228).
65. Dans sa jurisprudence récente, le Tribunal fédéral a nié une violation du principe de précaution au sens du droit de l’environnement, relevant que les prévisions du rayonnement établies de manière arithmétique n’étaient pas critiquables et que tant la méthode de mesure recommandée par la Confédération que le SAQ s’avéraient appropriés. Par ailleurs, le Tribunal fédéral a eu l’occasion de confirmer le bien-fondé des diagrammes d'antennes enveloppants fournis par les opérateurs avec la FDSS, et que les mesures de réception faisaient foi pour vérifier le respect des VLInst fixées dans l'ORNI (arrêts du Tribunal fédéral 1C_153/2022 du 11 avril 2023 ; 1C_100/2021 du 14 février 2023).
66. L’autorité peut choisir les LUS à mesurer en tenant compte des motifs techniques et de son expérience. Les balcons et les toitures-terrasses ne sont pas des lieux à utilisation sensible au sens de l'art. 3 al. 3 ORNI pour lesquels les VLInst doivent être respectées. Cette interprétation n'est pas contraire aux art. 1 et 11 LPE (cf. ATF 128 II 378 cons. 6).
67. Selon une jurisprudence bien établie, le tribunal de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci. Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/332/2022 du 29 mars 2022 consid. 4b ; ATA/1098/2019 du 25 juin 2019 consid. 2e).
68. En l'espèce, d'après la FDSS du 3 octobre 2022, la VLInst à respecter est celle prévue à l’art. 64 let. b annexe 1 ORNI, soit 6.0 V/m, ce que ne contestent pas les recourants. Or, s'agissant du rayonnement dans les LUS les plus chargés, soit les LUS nos 2 à 5, toutes les mesures présentent une intensité de champ électrique inférieure à la VLInst fixée à 6.0 V/m. Ces mesures ont été vérifiées par le SABRA, autorité spécialisée compétente, sans que celle-ci n'ait mis en doute leur véracité, tant au stade de l'instruction qu'après l'interpellation du tribunal. En l'absence d'éléments indiquant le contraire, il n'y a pas lieu de les remettre en cause, étant rappelé que, conformément à la jurisprudence mentionnée ci-dessus, il appartient au tribunal d’observer une certaine retenue afin d’éviter de substituer sa propre appréciation à celle des instances spécialisées lorsque l’autorité inférieure a suivi l’avis de celles-ci, ce qui est le cas en l’espèce, et que, hormis la ville de Genève qui applique un moratoire de principe à l’installation d’antennes 5G, l’ensemble des autres instances spécialisées consultées s’est également prononcé favorablement au projet.
Concernant la critique selon laquelle l’intensité du champ électrique de 5.98 V/m du LUS n° 4, sis dans la mansarde de la place Q______ 5______, serait dépassée du fait de la présence d’une autre antenne à cette adresse, tant N______ que le SABRA ont expliqué que l’antenne identifiée à proximité était déclarée, sur le site de l'OFCOM, comme picocell. Placée à une distance de plus de 5m et d’une puissance très faible, de l'ordre de l.7 W (soit moins de 6 W), celle-ci n'avait aucune influence sur le champ électrique du LUS n° 4. Les recourants n’ont pas fait valoir d’éléments qui permettraient de remettre en cause ces explications. Compte tenu de ces éléments, la règle du périmètre définie à l’art. 62 al. 3 annexe1 ORNI (ainsi que dans la recommandation d’exécution de l’ORNI) n’est donc pas applicable in casu et il doit être retenu que le LUS n° 4 respecte la VLInst de l’art. 64 let. b annexe 1 ORNI.
S’agissant du fait que l’appartement du 6ème étage de l’immeuble sis rue T______ 6______ n’aurait, à tort, pas été retenu comme LUS, pour rappel, conformément à la jurisprudence fédérale précitée, l’autorité est libre de choisir les LUS à mesurer en tenant compte des motifs techniques et de son expérience. Il en découle que la seule proximité physique est insuffisante pour critiquer le choix d'un LUS par l'opérateur et le SABRA, à condition que les exigences de l'art. 11 al. 2 ORNI notamment, soient respectées. Or, en l’occurrence, la requérante a choisi les quatre LUS où le rayonnement était le plus fort, en conformité avec l’art. 11 al. 2 ORNI. Pour le surplus, le SABRA, soit l'instance spécialisée, a confirmé, tant dans le cadre de l'instruction que suite à l'interpellation du tribunal, que les LUS retenus dans la fiche de données spécifique au site étaient conformes au droit. Par ailleurs, il ressort des explications de l'opérateur que, que si seuls quatre LUS ont été retenus dans la fiche de données spécifique au site, en réalité, vingt-deux LUS ont été examinés dans le cadre du projet, lesquels présentaient des valeurs prévisionnelles inférieures, de sorte qu'ils avaient été écartés. Rien ne laisse ainsi penser que l'opérateur n'aurait pas pris en compte un LUS déterminant, ce d'autant que l'autorité spécialisée n'a émis aucune réserve à ce sujet. Dans cette mesure, l’absence de mention de l’appartement précité en tant que LUS dans la FDSS ne contrevient pas aux exigences de l'ORNI ni à la jurisprudence du Tribunal fédéral rendue à ce sujet. Il ressort en outre du dossier et des explications du SABRA que la fiche complémentaire pour le « LUS n° 2 » prend correctement en compte l'amortissement du bâtiment, les émissions dues aux antennes des secteurs 2 et 3 vers le LUS n° 2 traversant la toiture. D'autre part, le LUS n° 2 étant un balcon, aujourd'hui considéré comme un lieu de séjour momentané (LSM), selon la jurisprudence précitée, la VLI y est largement respectée. Si le LUS n° 2 était déplacé à l'intérieur du bâtiment, une atténuation de 15 dB serait alors à rajouter sur les émissions des antennes du secteur 1, conduisant à une valeur plus faible pour le champ électrique. Enfin, le SABRA a justement rappelé que le LUS n° 2 était plus exposé au rayonnement de l'antenne que celui sis rue T______ 6______, ce qui justifiait l'absence de fiche complémentaire pour celui-ci. En effet, dans la mesure où la VLInst était respectée pour le LUS n° 2, elle l’était également pour le LUS prétendument manquant situé à la rue T______.
Globalement, à la lumière des données de la FDSS, l’autorisation de construire garantit ainsi le respect des valeurs limites pertinentes, notamment par le biais des conditions associées comprises dans le préavis du SABRA, en particulier une mesure de contrôle aux LUS nos 2 à 5 et une intégration de cette installation dans le SAQ de l'opérateur.
À toutes fins utiles, le tribunal rappellera encore que la jurisprudence du Tribunal fédéral est claire : la limitation préventive des émissions prévues par l'ORNI est déterminée de manière exhaustive avec l'édiction des VLInst, sans que le département ne puisse exiger une limitation supplémentaire dans un cas individuel.
Concernant le grief de non-conformité au droit des valeurs de correction, le préavis du SABRA mentionne la Recommandation OFEFP 2002, notamment son chapitre 2.1.8 relatif au contrôle de l’installation ainsi que son complément, laquelle rappelle qu’avant la mise en service de l’installation, le rayonnement ne peut qu’être calculé, et non mesuré. En exigeant que des mesures soient effectuées aux LUS nos 2, 3, 4 et 5, l’autorité intimée pose la condition de s’assurer que la VLInst sera conforme à l’ORNI. « Si, contre toute attente, la VLInst est dépassée lorsque l’installation fonctionne à la puissance émettrice autorisée, l’autorité ordonne une réduction de la puissance émettrice ou une autre adaptation de l’installation » (Recommandation OFEFP 2002, p. 20). En conséquence, non seulement il ne ressort pas des calculs prévisionnels de dépassement de la VLInst au LUS nos 2, 3, 4 et 5 mais encore, le préavis du SABRA a posé la condition nécessaire pour que le contrôle, une fois l’installation en fonction, puisse être effectué et des mesures, si nécessaire, prises. Le Tribunal fédéral a rappelé qu’en amont de la réalisation de l’installation, comme en l’espèce, ce sont les valeurs prévisionnelles calculées selon les méthodes prescrit par les directives qui font foi (arrêt du Tribunal fédéral 1C_518/2018 du 14 avril 2020 consid. 7.2.2.). Par ailleurs, le SABRA a posé comme autres conditions l’intégration des antennes de cette installation dans son SAQ qui permet de surveiller les données d’exploitation. Ce faisant, l’autorité intimée a posé une cautèle permettant d’assurer le respect des valeurs limites, étant précisé, comme il sera vu ci-après qu’à teneur de la jurisprudence récente du Tribunal fédéral, il n’y a pas lieu de douter de la fiabilité des SAQ, y compris pour les antennes adaptatives (arrêts du Tribunal fédéral 1C_45/2023 du 16 janvier 2024 consid. 6.3 ; 1C_296/2022 du 7 juin 2023 consid. 2.7 ; arrêt précité 1C_693/2021 consid. 6. 1 et 6. 2 ; ATA/880/2024 du 23 juillet 2024).
69. Pour le surplus, les parties ne contestent pas que l’évaluation des antennes a été effectuée, sur la base d’un fonctionnement en mode adaptatif, en fonction du trafic maximal et de la puissance d’émission maximale selon un diagramme enveloppant tenant compte du gain maximal possible de l’installation pour chaque direction d’émission, sans facteur de correction (worst case scenario). Or, dans ces circonstances correspondant au scénario du pire, et conformément à la jurisprudence précitée (ATA/11/2024), le SABRA n’avait pas à vérifier la réalisation de la condition préalable à l’application du facteur de correction, posée par l'art. 63 al. 2 annexe 1 ORNI, consistant à s’assurer du fonctionnement en bonne et due forme du système de limitation automatique de puissance.
Ainsi, en octroyant l'autorisation de construire sur la base de la prévision que l'installation respecterait les VLInst, moyennant les réserves émises dans le préavis du SABRA, et vu l'examen opéré a posteriori par cette instance de la FDSS dans le cadre de l'instruction de la présente procédure, la décision du département apparaît conforme au droit fédéral.
70. Concernant le grief d’absence d'un SAQ de contrôle des valeurs limite sur le long terme, il n’y a pas lieu de présumer, malgré l’incertitude des mesures, au demeurant admise par la jurisprudence, que les conditions de l’autorisation de construire ne seront pas respectées au moment de la mise en service. En effet, l’autorisation implique que des mesures soient effectuées à ce moment-là, et, en cas de dépassement, il appartiendra à l’intimée de modifier l’installation afin qu’elle soit conforme. Par ailleurs, conformément à la jurisprudence récente du Tribunal fédéral, et comme développé ci- après, il n’y a pas lieu de remettre en cause l’adéquation des SAQ.
L’allégation des recourants selon laquelle la puissance maximale à laquelle les antennes adaptatives concernées pourraient émettre serait inconnue dans la mesure où elle ne serait pas limitée, ne saurait conduire à une autre conclusion. Il est certes possible que la puissance d'émission maximum puisse être dépassée sur une très courte période, le système mis en place par l'ORNI réduit toutefois le risque d'atteinte, au vu du facteur de correction et de la limitation automatique de la puissance. Par ailleurs, dans les LUS, les installations doivent toujours respecter la VLInst. Il ressort des développements qui précèdent que les valeurs fixées par les dispositions légales et réglementaires applicables, dont le bien-fondé a été confirmé par la jurisprudence fédérale, sont remplies dans le cas d'espèce. S’agissant des études citées par la recourante, elles ne permettent pas de remettre en cause l'autorisation délivrée, dans la mesure où, conformément à la jurisprudence exposée ci-dessus, le Tribunal fédéral a considéré qu’il n’existait, en l’état, pas d’indices suffisants permettant de retenir que l’utilisation d’antennes adaptatives conformément au cadre légal et réglementaire en vigueur présenterait un risque pour la santé.
Quant aux inquiétudes des recourants au sujet des effets des antennes 5G sur le corps humain, ces derniers entendent en substance démontrer que les ondes électromagnétiques induites par les antennes téléphoniques litigieuses présentent un risque pour la santé. Or, il est constant que le corps humain est sensible aux champs électromagnétiques, la question étant de savoir quelle intensité d’exposition peut être jugée acceptable, notamment pour les enfants. Par conséquent, les généralités sur les effets des champs électromagnétiques induits par les antennes de téléphonie mobile - aussi pertinentes soient-elles - n’apportent rien au débat sur la valeur probante - même relative - des nombreuses études scientifiques menées jusqu’ici et ne délégitiment pas les valeurs limites fixées par l’ordonnance, ce d’autant plus que les valeurs mesurées sont inférieures aux valeurs limites, déterminantes en ce qui concerne les effets sur la santé.
Enfin, le SABRA a indiqué durant la procédure que le diagramme produit avait été vérifié et qualifié de standard. En outre, le Tribunal fédéral a confirmé le bien-fondé des diagrammes d'antennes enveloppants fournis par les opérateurs avec la FDSS, et que les mesures de réception faisaient foi pour vérifier le respect des VLinst fixées dans l'ORNI. Dans ces conditions, aucun élément objectif ne permet de remettre en cause le diagramme, jugé standard par le service spécialisé.
Partant, compte tenu du fait que les VLInst sont, comme vu supra, respectées dans le présent cas, il convient de retenir que le principe de précaution n'a pas été violé. La décision n'est pas davantage lacunaire, dès lors qu'elle reprend les conditions imposées par le SABRA, relatives à l'exécution de mesure de contrôle et d'intégration au SAQ de l’intimée.
71. Le recourants remettent également en cause la fiabilité du SAQ.
72. Le Tribunal fédéral a récemment rappelé que pour tenir compte des antennes adaptatives, une modification de l’ORNI avait été adoptée le 17 avril 2019. « Le ch. 62 al. 6 de l’annexe 1 ORNI définit les antennes émettrices adaptatives comme des "antennes émettrices exploitées de sorte que leur direction ou leur diagramme d’antenne est adapté automatiquement selon une périodicité rapprochée". La modification de l’ORNI définit le mode d’exploitation déterminant pour ce type d’antennes (art. 63 al. 2 et 3 annexe 1) avec des facteurs de correction (KAA) permettant de tenir compte du fait que la puissance d’émission maximale n’est pas atteinte dans toutes les directions simultanément, de sorte que l’exposition globale au rayonnement est plus faible. L’objectif est que les antennes adaptatives ne soient ni avantagées ni désavantagées par rapport aux antennes conventionnelles et que le niveau de protection existant contre le rayonnement soit maintenu. Pour diverses raisons, l’OFEV n’a toutefois pas été en mesure de publier une aide à l’exécution correspondante dès l’entrée en vigueur de la révision de l’ordonnance. Dans des courriers du 17 avril 2019 et du 31 janvier 2020, il a donc recommandé aux cantons que, dans l’attente de la recommandation définitive, le rayonnement des antennes adaptatives soit évalué, comme pour les antennes non adaptatives, en fonction du trafic maximal de communications et de données à la puissance d’émission maximale, c’est-à-dire en se basant sur des diagrammes d’antenne qui tiennent compte du gain maximal possible de l’antenne pour chaque direction d’émission (considération dite du "pire des cas", worst case). Les antennes adaptatives sont donc considérées, comme pour les antennes conventionnelles, en supposant que la puissance maximale est émise simultanément dans toutes les directions possibles, selon un diagramme dit "enveloppant". Cela permet de garantir que l’évaluation pour la population concernée par le rayonnement d’une station de téléphonie mobile reste sûre et que l’exposition à long terme soit maintenue à un niveau bas dans tous les cas, compte tenu du principe de précaution et en raison des questions techniques qui restaient alors encore ouvertes » (arrêt du Tribunal fédéral précité 1C_693/2021 consid. 4. 2 et les nombreuses références citées).
73. La prise en compte de la variabilité des directions d’émission et des diagrammes d’antenne doit permettre de compenser le fait que la puissance d’émission maximale ne peut pas être émise simultanément dans toutes les directions et que l’exposition aux rayonnements dans l’environnement de l’antenne est donc globalement plus faible, le calcul des émissions selon la méthode applicable aux antennes conventionnelles, soit sur la base du scénario le plus défavorable, garantit que la puissance maximale d’émission est prise en compte pour toutes les directions lors de l’examen du respect des VLInst. Cette évaluation est directement fondée sur le principe de précaution et les recourants ne sauraient ainsi prétendre qu’elle serait dénuée de base légale (arrêt du Tribunal fédéral 1C_100/2021 du 14 février 2023 consid. 6.2.2 ; 1C_ 693/2021 précité consid. 4. 3).
74. De surcroît, dans des arrêts plus récents, le Tribunal fédéral a rappelé que le contrôle effectué par les SAQ peut être faussé en cas d’informations erronées fournies par les opérateurs de téléphonie mobile. Comme il existe un besoin de clarification à cet égard, l’OFEV a été invité en 2019 par le Tribunal fédéral à faire effectuer ou à coordonner à nouveau un contrôle du bon fonctionnement des SAQ dans toute la Suisse (arrêt 1C_97/2018 du 3 septembre 2019 consid. 8.3). L’OFEV est actuellement en train de procéder à cette vérification et a informé le public de son état intermédiaire le 14 octobre 2022 (OFEV, Systèmes d’assurance qualité pour les installations de téléphonie mobile : état intermédiaire de la vérification et des contrôles sur place, <https://www.bafu.admin.ch> [visité le 17 juillet 2024]). Dans l’arrêt 1C_527/2021 du 13 juillet 2023, l’OFEV a de nouveau été rendu attentif au fait que le contrôle des SAQ qualité à l’échelle nationale, déjà exigé en 2019, devait maintenant être effectué rapidement (arrêt 1C_527/2021 du 13 juillet 2023 consid. 7.9 avec renvois). Il convient d’attendre les résultats définitifs de cet examen.
75. Pour l’heure, selon le Tribunal fédéral, il n’y a aucune raison de nier le fonctionnement des SAQ (arrêts 1C_45/2023 du 16 janvier 2024 consid. 6.3 ; 1C_481/2022 du 13 novembre 2023 consid. 4.6 avec renvois).
76. Le 2 avril 2024, l'OFEV a rendu un rapport intitulé le « Système d’assurance de la qualité pour les installations de téléphonie mobile : projet pilote relatif aux contrôles sur site 2022 », consultable à l'adresse https://www.bafu.admin.ch/
bafu/fr/home/themes/electrosmog/info-specialistes/mesures-contre-l-electrosmog/assurance-de-la-qualite-en-ce-qui-concerne-le-respect-des-valeur.html #1715320828, visité le 17 juillet 2024. Il en ressort que le transfert des données autorisées vers le SAQ fonctionne de manière générale correctement. La vérification des paramètres structurels des 76 installations a permis de constater que 37% d'entre elles présentent des écarts au-delà des tolérances. Les écarts les plus fréquents concernent l’azimut et la hauteur d’antenne autorisés. Pour les installations présentant des écarts au-delà des tolérances, il a fallu procéder à une nouvelle évaluation du rayon non ionisant (calcul fondé sur la fiche de données spécifique au site) afin de déterminer la variation de l’exposition des LUS par rapport à l’état autorisé. Ces calculs ont montré que, du fait des défauts constatés, l’exposition est plus importante dans 32% des LUS, moins importante dans 29% des LUS et identique dans 39% des LUS. Ces écarts n’ont entraîné aucun dépassement des VLInst de l’ORNI. Une augmentation de l'intensité du champ électrique dans les LUS a généralement été observée lorsque les antennes ont été installées trop bas ou avec une mauvaise orientation (azimut). L'augmentation de l'intensité du champ électrique a été, dans la plupart des cas, de 0.1 V/m ou moins. Seulement dans quelques cas isolés, une augmentation de 0.3 V/m à 0.6 V/m a été constatée. Le fait qu’un écart entraîne une augmentation de l’exposition dépend en particulier de l’emplacement des LUS et de la distance entre les LUS et les antennes. Globalement, les résultats du projet pilote confirment l’importance de contrôler les paramètres structurels des installations de téléphonie mobile. Inclure des contrôles sur site dans l’assurance de la qualité est d’une importance cruciale pour s’assurer que les stations émettrices sont construites et exploitées conformément à l’autorisation octroyée et que les valeurs limites de l’ORNI sont respectées à tout moment
77. Enfin, le récent arrêt du Tribunal fédéral (1C_506/2023 du 23 avril 2024 destiné à publication) impose une autorisation de construire en cas d’application du facteur de correction KAA aux antennes adaptatives, évaluées précédemment selon le scénario du worst case.
78. En l’espèce, le fait qu’il y ait un dépassement du 80 % de la VLInst pour quatre LUS, identifiés par la FDSS et confirmés par le préavis du SABRA, n’est pas problématique au stade du calcul de la prévision, vérifié lors de la procédure d’autorisation, dans la mesure où N______ est tenue d’effectuer, lors de la réception, des mesurages à ses frais conformément aux recommandations fédérales en vigueur. Cette exigence a été posée par le SABRA dans son préavis et est reprise dans la décision litigieuse de sorte que, sur ce point, le département n’a pas violé la réglementation en matière de RNI.
Il ressort en outre de ce qui précède que, contrairement à ce que soutiennent les recourants, il n'y a pas lieu, en l'état, de douter de manière générale de la fiabilité des SAQ, y compris pour les antennes adaptatives, ni de nier leur fonctionnement. Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de le confirmer et les informations les plus récentes issues de l'OFEV démontrent que ce système fonctionne de manière générale correctement. Il n'y a donc pas lieu d'y revenir.
Ce grief sera dès lors également rejeté.
79. Les recourants soulèvent encore les griefs de violation du principe de la légalité et du principe de séparations de pouvoirs, faisant valoir qu’il aurait été nécessaire que ce soit le législateur qui pose le cadre du déploiement de la 5G alors que ce dernier aurait selon eux été effectué de manière anarchique, sous la pression du lobby des opérateurs et en échappant à tout contrôle démocratique. Il en découlait une violation du principe de la proportionnalité, dès lors que des alternatives moins nocives auraient pu être envisagées par le législateur.
80. En droit suisse, et comme déjà mentionné, la protection contre le rayonnement non ionisant (RNI) est régie par la LPE - adoptée démocratiquement - dont l’art. 1 al. 2 prévoit que cette loi a pour but de protéger l'homme, les animaux et les plantes, leurs communautés biotiques et leurs habitats contre les atteintes nuisibles ou incommodantes et de préserver à long terme les bases naturelles de la vie.
Les impacts qui pourraient devenir nuisibles ou gênants doivent être limités à un stade précoce par mesure de précaution (art. 1 al. 2 LPE). L'émission de rayonnements est limitée par des mesures à la source (art. 1 1, al. 1 LPE), notamment par l'édiction de valeurs limites d'émission dans les ordonnances (art. 12 al. 1 let. a, et al. 2 LPE). Pour l'évaluation des effets nocifs ou gênants, le Conseil fédéral fixe par voie d'ordonnance des VLI (art. 13 al. 1 LPE).
81. Pour rappel, les ordonnance d’exécution sont par définition des ordonnances dépendantes, c’est-à-dire qu’elles ne peuvent exister sans la loi, l'arrêté ou le traité que, précisément, elles sont chargées d'exécuter. Comme elles doivent se limiter à exécuter les lois, elles doivent rester dans le cadre tracé par celles-ci. Les ordonnances d'exécution concrétisent donc les règles qui figurent dans la loi et précisent les modalités pratiques de son application (Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. 1, 2006, Droit constitutionnel suisse, volume l, p. 523).
Comme déjà dit supra, conformément à cette délégation de compétence (art. 164 al. 2 Cst), le Conseil fédéral a édicté l’ORNI dont le but est de protéger les personnes contre les rayonnements non ionisants nocifs ou gênants provenant de l’exploitation d’installations fixes. Elle règle notamment les limites d’émission ainsi que les limites d'immissions pour les émetteurs de radiocommunication mobile et les raccordements d'abonnés sans fil (art. 2 al. 1 let. a, ORNI, ainsi que son annexe 1 [ch. 6 et 2]. Pour se protéger contre les effets thermiques scientifiquement fondés du rayonnement des installations de radiocommunication mobile (ATA/415/2022 du 26 avril 2022, consid. 4c, et les références citées), cette ordonnance prévoit des VLI qui doivent être respectées partout où des personnes peuvent être présentes (art. 13 al. 1 ORNI).
82. En outre, le Conseil fédéral a fixé des VLInst pour concrétiser le principe de précaution en vertu de l'art. 11 al. 2 LPE (art. 3 al. 6 et art. 4 al. 1, Annexe 1 ch. 64 ORNI). Celles-ci ne sont pas directement liées à des dangers avérés pour la santé, mais ont été fixées en fonction de la faisabilité technique et opérationnelle, ainsi que de la viabilité économique afin de minimiser le risque d'effets nocifs, dont certains ne sont que soupçonnés et pas encore prévisibles (ATF 126 II 399 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_627/2019 du 6 octobre 2020 consid. 3.1). Avec les VL d'installation, le Conseil fédéral a créé une marge de sécurité par rapport aux dangers avérés pour la santé (ATF 128 II 378 consid. 6.2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_627/2019 du 6 octobre 2020 consid. 3.1 ; 1C_576/2016 du 27 octobre 2017 consid. 3.5.1). Dans les LUS, les installations de radiocommunication mobile doivent toujours respecter la VLInst d'une installation donnée (art. 3 al. 3 et al. 6, art. 4 al. 1 et annexe 1 ch. 65 ORNI ; ATF 128 II 378 consid. 6.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_627/2019 du 6 octobre 2020 consid. 3.1).
83. Pour rappel, la doctrine a relevé que les valeurs limite prévues dans l'ORNI étaient dix fois plus strictes que celles recommandées par la Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants (Joel DRITTENBASS, Risk-Based Approach als Konkretisierungsvariante des umweltschutzrechtlichen Vorsorgeprinzips : Angewendet am neuen5G-Mobilfunkstandard, DEP 2021-2 p. 138).
84. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'étendue de la limitation préventive des émissions selon l'art. 4 al. 1 ORNI est déterminée de manière exhaustive avec la fixation des VL d'installation, raison pour laquelle les autorités appliquant la loi ne peuvent pas exiger une limitation supplémentaire dans des cas individuels sur la base de l'art. 12 al. 2 LPE (ATF 133 II 64 consid. 5.2 ; 126 II 399 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 1A_251/2002 du 24 octobre 2003 consid. 4 ; 1A.10/2001 du 8 avril 2002 consid. 2.2 ; Joel DRITTENBASS, op. cit., p. 141-142).
85. En conclusion, le Conseil fédéral s'est appuyé sur une base légale valable (notamment l’art. 13 al.1. LPE) pour édicter par voie d'ordonnance des VLI applicables à l'évaluation des atteintes nuisibles ou incommodantes. Contrairement à ce qu'avancent les recourants, les principes de la légalité et de la séparation des pouvoirs n'ont donc pas été violés en l’espèce et ces griefs doivent également être écartés.
86. Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.
87. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 1’500.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.
N'ayant pas fait appel à un mandataire externe, aucune indemnité de procédure ne sera allouée à N______ (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 10 février 2023 par Mesdames et Messieurs, A______, B______, C______, D______, E______, F______, G______, H______, I______, J______, K______ et L______ contre la décision du département du territoire du ______ 2023 ;
2. le rejette ;
3. met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 1’500.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Siégeant : Marielle TONOSSI, présidente, Diane SCHASCA et Carmelo STENDARDO, juges assesseurs
Au nom du Tribunal :
La présidente
Marielle TONOSSI
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.
Genève, le |
| La greffière |