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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/11591/2021

AARP/281/2025 du 29.07.2025 sur JTDP/215/2024 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : ESCROQUERIE;COMMERCE DE STUPÉFIANTS;LIBÉRATION CONDITIONNELLE;EXPULSION(DROIT PÉNAL)
Normes : LStup.19.al1.letc; CP.146; CP.89.al4; CP.51; CP.66a bis; CPP.408
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/11591/2021 AARP/281/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 29 juillet 2025

 

Entre

A______, domicilié c/o B______, ______, comparant par Me C______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/215/2024 rendu le 19 février 2024 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/215/2024 du 19 février 2024, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a acquitté d'escroquerie (art. 146 al. 1 du Code pénal [CP]) pour les faits visés sous chiffre 1.1. let. e de l'acte d'accusation, mais l'a déclaré coupable de cette infraction pour les faits visés sous chiffre 1.1. let. a), b), c) et d), ainsi que de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP), d'infraction simple à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19 al. 1 let. c LStup) et de contravention à cette même disposition (art. 19 al. 1 let. d cum 19a ch. 1 LStup). Le TP a révoqué la libération conditionnelle de la mesure institutionnelle pour jeunes adultes accordée le 17 décembre 2019 par le Tribunal d'application des peines et des mesures (TAPEM) (art. 62a al. 1 CP), a condamné A______ à une peine privative de liberté d'ensemble de 16 mois, sous déduction de la détention subie avant jugement (art. 40 et 62a al. 2 CP), ainsi qu'à une amende de CHF 200.- (art. 106 CP et 19a ch. 1 LStup), avec peine privative de liberté de substitution de deux jours, a ordonné son expulsion de Suisse pour une durée de trois ans (art. 66abis CP), et l'a condamné aux frais de la procédure.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant, à titre préjudiciel, à sa libération des fins de la poursuite pour les faits objet du classement prononcé par ordonnance du Ministère public (MP) du 28 juin 2023, laquelle porterait selon lui sur les faits visés par l'acte d'accusation et, au fond, à son acquittement du chef d'escroquerie, au classement de la procédure en ce qui concerne les faits qui pourraient être constitutifs de violation de l'art. 19 al. 1 let. c LStup, subsidiairement à son acquittement de cette infraction, à la non-révocation de la libération conditionnelle de la mesure accordée le 17 décembre 2019 par le TAPEM, au prononcé d'une peine n'excédant pas la durée de la détention subie, subsidiairement d'une peine d'ensemble assortie du sursis partiel dont la partie ferme n'excèderait pas la durée de la détention déjà subie. Il s'oppose également au prononcé de son expulsion.

b.a. Selon l'acte d'accusation du 28 juin 2023, il est encore reproché à A______ d'avoir :

- à Genève, entre une date indéterminée à la mi-avril 2021 et le 30 mai 2021, de concert avec D______ et E______, conclu un nombre indéterminé de contrats portant sur des abonnements téléphoniques avec remise d'appareils et de cartes de crédit, sur présentation de faux certificats de salaire, induisant de la sorte astucieusement en erreur leurs cocontractants sur leurs véritables capacités financières, que les cocontractants ne pouvaient vérifier autrement, et ce sans n'avoir jamais eu l'intention d'honorer le paiement des mensualités et/ou le remboursement de quelque montant que ce soit, et d'avoir de la sorte réussi en particulier à obtenir (ch. 1.1. de l'acte d'accusation) :

a) auprès de F______ [point de vente d'opérateur mobile] : trois téléphones G______/1______ [marque/modèle];

b) auprès de H______ [point de vente d'opérateur mobile] : quatre téléphones G______/1______, trois paires d'écouteurs G______/2______ et une tablette électronique G______/3______ ;

c) auprès de I______ [point de vente d'opérateur mobile] : un téléphone G______/1______ ;

d) auprès de J______ [commerce] : une carte de crédit avec un plafond compris entre CHF 2'000.- et CHF 3'000.-, laquelle a servi à l'acquisition d'un ordinateur portable G______/4______ et d'écouteurs G______/2______.

- à Genève, courant avril-mai 2021, participé à un trafic de stupéfiants, de concert avec D______ et E______, en remettant à crédit à ce dernier, un total de 1.2 kilogramme de haschich, représentant une valeur marchande de CHF 10'350.-, ce afin qu'il revende cette marchandise sur le territoire suisse pour son compte et celui de D______, soit en particulier :

a) 100 grammes de haschich "normal", à CHF 800.- ;

b) 100 grammes de haschich "trois fois filtré", à CHF 2'050.- ;

c) 1 kilo de haschich "normal", à CHF 7'500.-,

étant précisé que E______ a ensuite revendu 1'135 grammes de ces substances à des consommateurs de la région de K______ [VS], réalisant un chiffre d'affaires de CHF 13'100.- pour un bénéfice de CHF 3'237.50 et remis une partie de l'argent des ventes, soit les sommes de CHF 400.-, CHF 470.-, CHF 5'000.- et CHF 1'400.-, à A______ et D______ (ch. 1.3. de l'acte d'accusation).

b.b. Il était encore reproché à A______ d'avoir commis une rupture de ban pour avoir pénétré sur le territoire suisse le 1er juin 2021, alors qu'il faisait l'objet d'une expulsion judiciaire prononcée le 9 octobre 2020 par le TP pour une durée de 3 ans, et d'avoir commis une contravention à la LStup pour avoir détenu de la cocaïne (1,3 grammes) lors de son arrestation en Suisse le 1er juin 2021, étant précisé que ces faits ne sont plus contestés en appel, de sorte qu'il sera renvoyé au jugement de première instance concernant leur développement (art. 82 al. 4 du Code de procédure pénale [CPP]).

B. Les faits encore pertinents au stade de l'appel sont les suivants :

a. Selon les déclarations faites par E______, ce dernier a fait la connaissance de A______, surnommé L______, à Genève en avril 2021 par l'intermédiaire d'une amie commune prénommée M______ (identifiée par la suite comme étant la dénommée M______), qui les a mis en relation après que E______ lui a fait part de ses problèmes financiers.

Au cours de leur première rencontre, A______ l'a interrogé quant à sa motivation à travailler, ce à quoi il lui a répondu être "très motivé à [s]e faire de l'argent". Son interlocuteur a été satisfait de la réponse puisqu'il lui a rétorqué que c'est "exactement le profil qu'il recherchait". Avant de se quitter, ils ont échangé leurs coordonnées SNAPCHAT.

A______ l'a contacté quelques jours plus tard, lui indiquant qu'il pourrait gagner de l'argent en concluant un grand nombre d'abonnements téléphoniques ainsi que des cartes de crédit. Il lui a expliqué que "des personnes au-dessus allaient tout supprimer, qu'il n'y aurait plus de trace", sans donner plus d'explications. Ainsi, E______ a conclu plusieurs contrats de téléphonie avec remise d'appareils à Genève, soit :

-          trois abonnements auprès de F______ pour lesquels il a obtenu trois G______/1______ ;

-          deux abonnements auprès de H______ ou I______ pour lesquels il a obtenu deux G______/1______ ;

-          trois abonnements auprès de H______ pour lesquels il a obtenu trois G______/1______, trois paires [d'écouteurs sans fil] 2______ et [une tablette] 3______.

Il a ensuite remis les appareils à A______, qui l'attendait à l'extérieur, étant précisé que ce dernier a payé les frais de mise en service des cartes SIM.

Dans la mesure où il n'a toutefois pas réussi à obtenir de cartes de crédit, lors de son premier passage au sein des magasins J______ et N______, faute de disposer de fiches de salaire, D______ a fabriqué de fausses fiches de salaire au nom de E______. Ils sont ensuite retournés chez J______ où E______ a cette fois-ci pu obtenir une carte de crédit avec laquelle il a acheté un [ordinateur portable] 4______ et des [écouteurs sans fil] 2______ pour la somme de CHF 2'969.90 en date du 4 mai 2021. Il a procédé de la même manière à la N______ où il a pu acquérir un [téléphone] G______/1______ en date du 14 mai 2021 pour CHF 999.10. Ils sont enfin allés chez I______ pour contracter deux nouveaux abonnements téléphoniques portant sur deux G______/1______ supplémentaires. A______ et D______ ont gardé l'ensemble du matériel électronique.

Outre l'activité sus-décrite, A______ avait remis à E______, en deux fois et à crédit, 1.2 kilogramme de haschisch à revendre, afin d'étendre son réseau en Valais. Les deux transactions s'étaient déroulées de la même manière : A______ avait passé commande auprès de son fournisseur à Genève, puis ils s'étaient rendus ensemble dans cette ville pour y récupérer la drogue.

La première remise a eu lieu à Genève à la fin du mois d'avril 2021. A______ lui a confié une plaquette de 100 grammes de haschich normal et une de 100 grammes de "3x filtré". Il lui a annoncé qu'il escomptait un revenu de l'ordre de CHF 800.- pour la marchandise de qualité ordinaire et de CHF 2'050.- pour la seconde. E______ a pris possession de la drogue et a procédé à sa vente à K______.

La deuxième remise, qui a porté sur dix plaquettes de haschich "normal" de 100 gr. chacune, s'est quant à elle déroulée à Genève à la mi-mai 2021, voire un peu plus tard. A______ l'a averti de ce qu'il s'attendait à recevoir la somme de CHF 7'500.- en contrepartie. E______ a pris la drogue et l'a conditionnée en de plus petites quantités, avant de la vendre.

Il a versé les sommes de CHF 400.-, CHF 470, CHF 5'000.- et CHF 1'400.- à A______, provenant des ventes de haschich, étant précisé que le dernier montant a été payé le 28 mai 2021. Le lendemain, A______ lui a envoyé des messages SNAPCHAT lui réclamant encore la somme de CHF 1'000.- à remettre le jour suivant, en lui disant de ne pas "jouer au con".

b. Le 29 mai 2021, E______ s'est rendu au poste de gendarmerie de K______ pour déposer plainte contre A______ des chefs de menaces et contrainte. Pour contextualiser ses craintes de représailles, il a expliqué avoir vendu du haschich en Valais pour le compte de A______, soulignant qu'il n'est pas en mesure de lui remettre les sommes exigées en contrepartie. Il a également admis avoir conclu de nombreux contrats portant sur des appareils électroniques.

Il a produit une copie d'un contrat de travail à son nom estampillé du logo de la société O______ et daté du 1er mai 2020, ainsi que trois fiches de salaire au nom du même employeur pour les mois de février à avril 2021.

En ce qui concerne la conclusion des abonnements téléphoniques, il a précisé que A______ lui a demandé de conclure le plus de contrats possible à son propre nom et de lui remettre ensuite les appareils nouvellement acquis prétextant qu'un banquier à P______ [France] se chargerait "d'effacer toute trace de ses achats et contrats (…) Ce banquier allait ensuite additionner la valeur de tous les appareils pour établir un soi-disant contrat. Je vous donne un exemple : si je ramenais pour CHF 10'000.- d'appareils, le soi-disant contrat allait grimper à CHF 100'000.-. Sur cette somme, le banquier allait garder CHF 50'000.- et les autres CHF 50'000.- étaient partagés entre L______, D______ et moi. Après réflexion, je m'aperçois que c'était vraiment n'importe quoi, mais j'avais tellement besoin d'argent que je me suis laissé convaincre".

c. Le 29 mai 2021, la police a procédé au séquestre du téléphone portable de E______, ainsi qu'à la saisie de 65 grammes de haschich, une balance électronique et des sachets en plastique servant à conditionner la drogue.

d.a. Entendu par la police en qualité de prévenu pour la vente de produits stupéfiants, E______ a expliqué être connu de la police valaisanne notamment pour consommation et vente de produits cannabiques.

La drogue saisie correspond au solde de la drogue obtenue à crédit auprès de "[s]es fournisseurs franco-genevois". Il s'est déplacé seul en voiture à Genève pour en prendre possession. Au total, il a écoulé, durant le mois de mai 2021, 1'135 grammes de haschich et remis à ses fournisseurs la somme de CHF 7'270.- en quatre versements de CHF 400.-, 470.-, 5'000.- et 1'400.-, de sorte qu'il est encore débiteur d'environ CHF 3'000.-, dans la mesure où il leur doit un total de CHF 10'350.-.

d.b. Entendu préalablement par la police valaisanne dans le cadre d'une autre procédure pénale, E______ a admis que les fiches de salaire comportant l'en-tête O______ sont fausses, qu'il n'a jamais travaillé pour cette entreprise et que c'est un ami qui les a créées pour qu'il puisse les montrer à sa copine et lui faire croire qu'il a un emploi.

Il s'est également déterminé sur la conclusion d'abonnements téléphoniques, indiquant s'être rendu chez Q______ [commerce] à Genève pour y conclure deux contrats I______ comprenant l'acquisition d'un téléphone pour chacun d'eux. Ces abonnements ont été souscrits à son propre nom, mais pour le compte "d'amis" à Genève. Il a été prévu que ces derniers lui donneraient de l'argent en espèces pour payer les mensualités. Il n'a pas été rémunéré pour la conclusion de ces contrats.

e. Les demandes d'informations auprès des divers opérateurs de téléphonie en Suisse ont permis d'établir que E______ a souscrit cinq abonnements téléphoniques, soit :

- deux auprès de [l'opérateur] I______ le 29 avril 2021 ;

- un auprès de [l'opérateur] R______ le 4 mai 2021 ;

- deux auprès de [l'opérateur] F______ les 29 avril et 5 mai 2021.

f. L'analyse du téléphone de E______ a permis de découvrir notamment les éléments suivants :

- plusieurs vidéos et photos le montrant en possession de plaquettes de haschich et les proposant à la vente ;

- une capture d'écran où il propose du haschich à la vente avec la légende suivante : "Plaquettes de jaune ; Plaquettes de filtré x3 ; Dispo ; Dm pour affaires" ;

- plusieurs messages SNAPCHAT entre l'intéressé, S______, son ex-compagne, et T______, son oncle, à teneur desquels il fait notamment part du fait qu'il est endetté et qu'il craint pour son intégrité physique et celle de sa famille ;

- une capture d'écran d'une fiche de salaire à son nom, à l'entête de l'employeur O______, avec le commentaire suivant : "Si seulement c'était une vraie fiche de salaire" ;

- une capture d'écran affichant un document émis par J______ où il est mentionné le plafond "AC______" avec le commentaire suivant : "Et merci je peux me servir pour 3000.- à J______" ;

- un message SNAPCHAT de A______ du 17 mai 2021 qui dit "200CHF et kill a 6" et auquel il répond par "2000*" ;

- un message SNAPCHAT à A______ du 20 mai 2021 par lequel il lui transmet sa date de naissance et son adresse personnelle, auquel ce dernier répond par l'envoi d'une capture d'écran d'une recherche GOOGLE sur U______ [transfert d'argent international] ;

- un échange de messages SNAPCHAT entre D______ et l'intéressé qui a la teneur suivante :

- "Au moins 1500 poto j'ai des affaires a faire"

- "Je vais f[a]ire ce que je peux"

- "Jcomtpe sur toi. Amene déjà les 1500. On ta dit c bon. Arrete de t'excuser on ta dit c bon tt va bien. Tu te cache pas ta fait de ton mie[u]x. Juste appelle A______ comme sa il voit un solution pr lui. Il part mardi. Et les 1500 que ta deja recup amene les stp ajd (…)"

(…)

- "Ah merde parce qu'il me répond pas je dois lui faire un U______. Mais jsp comment on fait. Et à qui j'envoie."

- "A______ mais att ki rep pr taper le nom bien juste (…)" ;

- un message vocal du profil SNAPCHAT "M_______V______" utilisé par M______ ayant le contenu suivant :

"J'ai parlé avec D______ et L______ là, et heu les sous tu leur donne plus à eux tu me donnes à moi, et tranquille.. (…) il va me faire les calculs il va me dire combien tu dois à D______ et combien tu dois à L______ et tu fais ça tranquille (…) dès que tu as 500, mille balles, tu me ramène et (…) de toute manière eux ils comptent tout. Ils m'ont dit, pas de pression rien".

g.a. S______ a confirmé que E______ craint pour son intégrité physique. Ce dernier lui a expliqué devoir de l'argent à des personnes pour qu'il vende du "shit". Il lui a également confié avoir été contraint de souscrire des abonnements téléphoniques chez I______. E______ lui a aussi parlé de location de voitures, mais elle n'en sait pas plus.

g.b. T______ a expliqué que E______ lui a fait part de problèmes rencontrés avec ses fournisseurs de drogue à qui il devait de l'argent. Ce dernier lui a confié avoir contracté une dizaine d'abonnements téléphoniques car il était "sous pression". E______ a loué des voitures pour son propre compte. Il ne lui a pas parlé de l'existence d'une quelconque entreprise.

g.c. W______ a d'abord prétendu ne pas connaître "L______" avant d'avouer que ce dernier l'a contacté pour obtenir des "informations" sur E______ après que ce dernier s'est rendu à la police. Il a servi d'intermédiaire pour A______ : "(…) cela provient des stups. E______ doit de l'argent à L______. Je crois qu'il s'agit de la somme de CHF 6'000.-". Les stupéfiants provenaient de Genève, E______ les a "ramené[s]".

E______ s'est rendu à la police, alors même que c'est lui qui a fait toutes ces choses : "Ils ne l'ont pas forcé à faire ça. C'est lui qui a fait les abonnements et tout", E______ le lui a dit. Ce dernier devait leur donner ces téléphones, mais il ignore ce qu'il se passait ensuite. Au début il allait bien, mais après un moment, "quand il a commencé à s'embêter, il a commencé à ne pas être bien", sans pouvoir dire s'il a peur ou non. "Ça apprendra à L______ avec qui il fait affaire et pour E______, cela lui servira aussi de leçon. Il n'est pas fait pour les affaires".

g.d. M______ a expliqué avoir présenté A______ à E______, mais pas dans le but qu'ils fassent affaire ensemble. Lors de leur première rencontre, les intéressés n'ont pas parlé de location de voitures, ni de conclusion d'abonnements téléphoniques. En revanche, lors d'une seconde entrevue, elle a entendu A______ dire qu'il allait acheter des voitures et les louer, ce à quoi E______ a répondu qu'il est "grave chaud".

E______ est débiteur d'une somme d'argent envers A______, elle ignore toutefois la nature de cette dette. Elle a appelé une fois E______ à ce sujet, à la demande de


A______, qui lui a dit de lui "mettre la pression". Après un premier message à l'intention de E______, elle lui a rappelé, lorsqu'elle l'a vu, qu'il devait de l'argent à A______. Il lui semblait que celui-ci et D______ ont une entreprise ensemble.

E______ lui a dit avoir contacté la police en raison de l'argent qu'il devait à A______ ; il lui a tendu un "guet-apens". Ni E______ ni A______ ne sont fiables.

h. Interpellé le 1er juin 2021 et entendu le même jour par la police, A______ a expliqué avoir fait la connaissance de E______ environ un mois et demi plus tôt, à une soirée au cours de laquelle ils avaient échangé leurs numéros de téléphone ainsi que leurs contacts SNAPCHAT. E______ lui avait demandé s'il avait des "plans pour faire de l'argent". Ils avaient évoqué l'idée d'une affaire de location de voitures. Dans la mesure où il faisait l'intermédiaire pour un ami dans ce domaine, il avait dit à E______ pouvoir lui trouver des clients si son interlocuteur trouvait un véhicule, ce qui avait suscité l'intérêt du précité. Ce dernier lui avait également demandé s'il "avai[t] un plan" pour du cannabis, ce à quoi il avait répondu par la négative.

Depuis, ils s'étaient vus à trois ou quatre reprises à AF______ [France]. Le 28 mai 2021, E______ lui avait amené une voiture qu'il avait obtenue en leasing. Comme il n'avait trouvé aucun client pour la louer et que E______ restait injoignable, il s'était rendu à K______ le 1er juin 2021 pour la lui restituer et avait tenté de le contacter une nouvelle fois après que W______ lui avait dit que le précité entendait se rendre à la police pour dénoncer le vol de son véhicule.

Il avait discuté de location de voitures avec E______, mais ce n'était pas M______ qui les avait mis en relation. E______ devait de l'argent à l'un de ses amis à qui il avait loué un véhicule sans s'acquitter des frais de location. Dans la mesure où il n'arrivait plus à le joindre, il était passé par M______, mais ne lui avait pas demandé de récolter de l'argent pour son compte.

Il savait que E______ avait contracté des abonnements téléphoniques, mais il n'avait rien à voir avec cela. E______ avait besoin d'argent, était prêt à tout pour en gagner et avait agi de sa propre initiative. Le prévenu ne s'adonnait pas non plus au trafic de stupéfiants, ayant déjà été condamné pour cela, et contestait l'ensemble des accusations proférées par E______.

i. L'exploitation du téléphone de A______ a notamment permis de découvrir les éléments suivants :

- une note datée du 20 mai 2021, complétée le 24 suivant, dont la teneur était la suivante :

"E______.

1000 CHF – 260 - 500

3250 CHF me

4250 CHF me

New 1 jaune 6500 CHF gang" ;

-          plusieurs messages échangés avec E______ ont été retrouvés dans l'application SNAPCHAT, soit notamment les messages suivants :

"7500 Chf" (message de A______ du 19 mai 2021)

"Oklm carré. J'ai déjà détaillé (…)." (réponse de E______ du même jour) ;

"Frère je te jure que j'ai fait ce que je pouvais je me suis endetté et tout j'ai pas pu faire mieux je te jure que je me suis plié en 4 mais 3500 francs en deux jours je pouvais pas c'était impossible y'a pas un moment où j'essayais pas de trouver une solution je veux pas de représailles j'ai vraiment fait tout ce que j'ai pu… j'ai essayé de carot des gens tout mais je suis arrivé à 1480.- au total… je vais encore essayer de trouver des solutions avant ce soir j'aurai un peu plus mais pas bcp sauf si je trouve des carottes… et si jamais c'est pas que j'ai plus de shit et que y'a pas d'argent parce que ce que je vous dois j'ai tout la à côté de moi en packs mais fr[s] 3500.- en détail c'est impossible en 2 jours je suis dsl frr… laissez-moi plus de temps et je vous ramène tout en même temps comme ça y'a pas de galère svp ou si vous voulez je ramène 2000.- de packs déjà fait et vous avez sûrement quelqu'un qui peut faire partir ça vite a Genève?" (message de E______ daté du 28 mai 2021) ;

"Ok c bn. Mais vien mtn" (réponse de A______ au message précédent) ;

"Je dois me faire de l'argent L______ jtj ça me fait chier. Mais frr. Des tarros comme ça. Je peux pas" ;

"Tkt. La prochaine. Jdesends. Ta ma parole. Cmbien. Tu vx toi. On oublions pas c pousser" ;

"Non mais tkt ça me dérange pas de venir je veux pas faire d'histoire je suis chaud à taffer avec toi. Moi on me pousse à 4.5 frr je te mens pas vie de ma mère. Mais 5 ou 5.5 ça me dérange pas" ;

"Ok prends cette fois si. 6. La prochaine 5.5."

(…)

"Toute façon je te fais confiance frr jtj j'ai trop envie de faire affaire avec toi. Mais frr je suis obligé tu comprends. Donc carré. Et demain j'amène l'autre. (…)." (échange entre E______ et A______ non daté).

j. Une mesure de surveillance rétroactive des télécommunications a été ordonnée sur l'appareil de A______ pour la période allant du 8 avril au 1er juin 2021, ce qui a permis d'établir que des antennes du canton de Genève ont été activées à plusieurs reprises les 28, 29 avril et 5 mai 2021 dans les secteurs du X______ et du centre-ville de Genève.

k.a. Entendu en confrontation par le MP, les protagonistes ont, en substance, confirmé leurs précédentes déclarations tout en y apportant les modifications suivantes.

k.b. E______ a expliqué avoir vendu la première quantité de drogue de son plein gré dans le but de gagner de l'argent et obtenu CHF 3'000.- de ses ventes. Lorsque A______ et D______ lui avaient remis un kilo de haschich, il avait d'abord refusé car les tarifs qu'ils fixaient étaient trop élevés et "cela allait mal finir". La drogue était commandée en Suisse depuis AF______ ou Y______. Ils se rendaient ensuite ensemble sur le territoire helvétique pour la récupérer.

La drogue lui était remise directement en mains propres par un tiers, sans passer par A______ et/ou D______. Il a également indiqué avoir été seul lors de la souscription des abonnements téléphoniques à Genève, soulignant toutefois qu'il existait une "pression générale, une ambiance". Il remettait ensuite les appareils et la documentation administrative liée aux abonnements à A______ et D______.

L'explication donnée par A______ sur leurs relations d'affaires dans le cadre de location de voitures ne lui disait rien.

Il avait eu peur que A______ s'en prenne à lui physiquement. Ce dernier ne l'avait jamais blessé mais avait élevé la voix ; A______ lui avait en effet parlé de manière très sèche et avait adopté toute sorte de comportements. Il l'avait en outre menacé par écrit ; lui disait de ne pas jouer "au con", précisant connaître son adresse. Il avait craint qu'il vienne chez lui. Bien qu'il savait qu'il aurait des problèmes, il s'était rendu à la police.

k.c. A______ a persisté à contester toute implication dans le trafic de stupéfiants et dans la souscription d'abonnements téléphoniques, précisant, s'agissant de sa présence en Suisse, s'être rendu à cinq ou six reprises à Genève pour s'occuper de son fils mineur qui y vit avec sa mère. E______ mentait et changeait sans cesse de version.


 

l. Figurent encore à la procédure :

- un extrait bancaire Z______ relatif à une transaction de CHF 999.10 effectuée à la N______ (AA______ [GE]) le 14 mai 2021 au moyen du compte dont le titulaire est AB______@gmail.com ;

- une facture AC______ relative à un achat de CHF 2'969.90 effectué chez J______ (AA______) le 4 mai 2021 ;

- une facture F______ pour le raccordement +41_5______ pour la période du 29 avril au 31 mai 2021 comprenant la mensualité pour un G______/1______.

m. Par ordonnance pénale rendue le 15 novembre 2021, E______ a été condamné par le Ministère public du canton du Valais, notamment pour délit à la LStup (art. 19 al. 1 LStup) pour avoir aliéné à K______, en mai 2021, 1'135 grammes de haschich, réalisant un bénéfice de CHF 3'237.50.

n. Par courrier du 20 octobre 2022, E______ a retiré sa plainte dirigée contre A______ "par gain de paix", se disant las des reports d'audience (sic).

o.a. Par pli du 28 octobre 2022, le MP a informé le prévenu, par avis de prochaine clôture, qu'un acte d'accusation serait prochainement rédigé pour les infractions reprochées, à l'exception de celles de menaces et/ou contrainte, lesquelles feraient l'objet d'une ordonnance de classement partiel, au vu du retrait de plainte de E______.

o.b. Le 28 juin 2023, le MP a notifié, simultanément, une ordonnance de classement partiel et son acte d'accusation.

o.c. Le classement partiel était motivé par le retrait de plainte de E______, lequel représentait un empêchement de procéder pour l'infraction de menaces. Il était encore précisé, au terme de cette ordonnance, certes dans le volet "frais et indemnisation", qu'un acte d'accusation était adressé au TP en parallèle.

p. A______ ne s'est pas présenté devant le juge de première instance, bien que valablement convoqué. La procédure a suivi sa voie par défaut.

C. a.a. Convoqué aux débats d'appel le 12 décembre 2024, A______ a, une nouvelle fois, fait défaut à l'audience, sans être excusé. Le témoin E______ ne s'est pas non plus présenté.

Au vu des circonstances, les débats ont été renvoyés à une date ultérieure et le témoin B______, qui s'était présenté à l'audience, a été informé qu'il serait convoqué ultérieurement.

a.b. Par courrier du 17 février 2025, A______ a présenté ses excuses à la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) pour son absence, expliquant avoir été empêché de se rendre à l'audience en raison d'un problème de transport.

b. Les débats d'appel se sont finalement tenus le 4 mars 2025. Aucun des témoins convoqués ne s'y est présenté.

c.a. À titre préjudiciel, A______ a demandé qu'il soit constaté l'empêchement de procéder eu égard à l'entrée en force de l'ordonnance de classement partiel rendue par le MP le 28 juin 2023, le classement implicite de l'infraction de contrainte et sa libération des chefs d'accusation des chiffres 1.1. et 1.3. de l'acte d'accusation en vertu du principe ne bis in idem.

c.b. La CPAR a rejeté la question préjudicielle au bénéfice d'une brève motivation orale, renvoyant pour le surplus au présent arrêt (infra au consid. 2).

d. Le MP a produit un échange de courriels avec le Centre de coopération policière et douanière (CCPD) du 25 février 2025, dont il résulte que A______ est notamment connu pour usage illicite de stupéfiants (octobre 2022), ainsi que pour "menace de mort ou atteinte aux biens dangereuse pour les personnes à l'encontre d'une personne exerçant une activité privée de sécurité" et vol à l'étalage (septembre 2024).

e. A______ a confirmé les déclarations faites au cours de la procédure et persisté à nier toute implication dans les faits dénoncés par E______.

Il avait bien "fait des affaires" avec ce dernier, mais uniquement dans le domaine de la location de voitures. E______ avait probablement mélangé les choses dans la mesure où il faisait affaire avec d'autres personnes. Il ne comprenait pas pourquoi ce dernier l'incriminait pour des faits de menaces, contrainte et trafic de stupéfiants. W______ n'avait rapporté que des ouï-dire, qui étaient faux. A______ n'avait participé à aucun trafic de drogue. E______ lui avait demandé des informations sur les stupéfiants, soit notamment sur les tarifs pratiqués et il lui avait répondu, mais il ne lui en avait jamais vendu, que ce soit directement ou par le biais d'un intermédiaire. E______ ne lui avait par ailleurs jamais remis de matériel électronique.

Il lui avait demandé de l'argent, mais cela concernait une ancienne dette que E______ avait contractée pour la location d'un véhicule, qu'il avait endommagé. C'était également dans ce contexte que M______ était intervenue. A______ était venu en Suisse le 1er juin 2021, sur demande de W______, afin de récupérer l'argent de ladite location.

Les notes trouvées dans son téléphone ne concernaient pas les stupéfiants.

Après sa mise en liberté, il était retourné à P______ pour changer de vie et se concentrer sur son avenir. Il avait rompu les liens avec son passé et les personnes qu'il fréquentait. Son fils venait passer les vacances scolaires auprès de lui et il s'était lui-même rendu à Genève après que la mesure d'expulsion avait pris fin. Ils se contactaient également par téléphone.

Il avait été arrêté en 2022, alors qu'il sortait de prison, pour avoir détenu un joint sur lui. En 2024, un membre de la sécurité d'un magasin l'avait soupçonné d'un vol qu'il n'avait pas commis. Le ton était monté et cette personne avait porté plainte contre lui. La procédure était toujours en cours en France.

f. Par la voix de son conseil, A______ persiste dans ses conclusions. Il n’a formulé aucune conclusion en indemnisation, quand bien même la teneur des art. 429 et 436 CPP lui avait été rappelée.

g. Le MP conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris, tout en précisant s'en rapporter à justice quant à la révocation de la libération conditionnelle, ainsi que sur la mesure de l'expulsion.

h. Les arguments plaidés seront examinés, dans la mesure de leur pertinence, au fil des considérants qui suivent.

D. A______ est né le ______ 1990 à P______ en France, pays dont il a la nationalité. Il a un frère et deux sœurs. Il est père d'un enfant né le ______ 2013, lequel vit à Genève avec sa mère, dont il est séparé.

Il est arrivé en Suisse à l'âge de six ans et a suivi sa scolarité obligatoire à Genève, AD______ [VD] et P______. Entre 2009 et 2010, il a exercé différents emplois à P______, dont un de vendeur, avant de venir rejoindre sa famille en Suisse. Il a effectué un an de réinsertion professionnelle dans le domaine du bâtiment-jardinage avant de trouver une place d'apprentissage dans une station-service d'où il a été licencié après deux mois. En 2013, il s'est inscrit à l'Hospice général et au chômage après avoir travaillé quatre à cinq mois chez AE______. En juin 2014, il a trouvé un emploi avec l'aide du Service de probation et d'insertion, mais a été licencié.

Il a été placé en détention le 16 octobre 2015 jusqu'à son placement au Centre éducatif fermé de Pramont le 8 mai 2017 où il est resté jusqu'à son transfert, le 2 avril 2019, à l'Etablissement ouvert Le Vallon, d'où il a été libéré conditionnellement de la mesure le 17 décembre 2019. Son permis d'établissement a été révoqué en 2019. Il a à nouveau été placé en détention le 10 juin 2020 jusqu'à sa mise en liberté le 8 avril 2021, date à laquelle il a été reconduit à la frontière au poste de douane de Thônex-Vallard.

Il a derechef été placé en détention le 1er juin 2021 pour les faits objet de la présente procédure, jusqu'au 3 mars 2022.

Il a ensuite travaillé en France comme agent d'accueil pendant un an et demi, avant de fonder sa propre société en 2024 et d'y travailler en qualité de coach sportif. Ses revenus s'élèvent à environ EUR 2'500.- par mois. Il essaie de verser une pension alimentaire mensuelle à son fils de l'ordre EUR 200-250.-. Il vit avec sa nouvelle compagne, laquelle attend leur premier enfant.

À teneur de l'extrait du casier judiciaire suisse, A______ a été condamné à neuf reprises, en dernier lieu les :

- 25 novembre 2016 par la CPAR, à une peine privative de liberté de quatre ans et demi suspendue au profit d'une mesure pour jeunes adultes au sens de l'art. 61 CP, ainsi qu'à une peine pécuniaire de 40 jours-amende à CHF 30.- le jour, pour viol, brigandage, lésions corporelles simples, escroquerie, tentative d'escroquerie, vol, recel d'importance mineure, violation de domicile, dommages à la propriété, faux dans les certificats, injure, violence ou menace contre les autorités ou les fonctionnaires, violation grave des règles de la circulation routière et infractions à la loi fédérale sur la circulation routière, ainsi qu'à une amende de CHF 300.- pour contravention à la LStup.

Par décision du 17 décembre 2019, le TAPEM a ordonné la libération conditionnelle de la mesure thérapeutique institutionnelle prononcée le 25 novembre 2016 et fixé la durée du délai d'épreuve à deux ans dès la libération effective, assortie de règles de conduite.

- 9 octobre 2020 par le TP à une peine privative de liberté de 10 mois, ainsi qu'à une expulsion pour une durée de trois ans (du 8 avril 2021 au 8 avril 2024) pour infraction à l'art. 19 al. 1 let. b LStup commis le 10 juin 2020. Aux termes de ce jugement, le juge a renoncé à révoquer la libération conditionnelle susmentionnée.

Par décision du 24 septembre 2021, le TAPEM a jugé qu'il appartiendra à la juridiction du fond en charge de la P/11591/2021 de se prononcer cas échéant sur une éventuelle réintégration dans le solde de peine à exécuter découlant des procédures P/6______/2010 et P/7______/2014, soit 171 jours.

E. Me C______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 11 heures d'activité de chef d'étude, hors débats d'appel, lesquels ont duré au total 4h10 (temps effectif décompté pour les audiences des 12 décembre 2024 et 4 mars 2025), dont neuf heures d'étude de dossier.

Ledit défenseur d'office a été rémunéré pour 46h10 d'activité en première instance.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2. 2.1. L'appelant soutient, à titre préjudiciel, que l'ordonnance de classement partiel rendue par le MP le 28 juin 2023 – entrée en force – porterait sur l'intégralité des faits dénoncés par E______, de sorte qu'il existerait un empêchement de procéder conformément au principe du ne bis in idem.

2.2. Ce principe est ancré dans la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst. ; art. 8 al. 1), ainsi qu'à l'art. 4 al. 1 du Protocole n° 7 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et à l'art. 14 al. 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il figure également, depuis le 1er janvier 2011, à l'art. 11 al. 1 CPP. Ce principe, qui est un corollaire de l'autorité de chose jugée, interdit qu'une personne soit pénalement poursuivie deux fois pour les mêmes faits. L'interdiction de la double poursuite suppose la présence de deux procédures : une première, par laquelle l'intéressé a été condamné ou acquitté par un jugement définitif, doté à ce titre de l'autorité de la chose jugée et non passible de remise en cause selon les voies de recours ordinaires, et une seconde, ultérieure, au cours de laquelle il aura été à nouveau poursuivi ou puni (arrêt du Tribunal fédéral 6B_496/2012 du 18 avril 2013 consid. 7.1).

2.3. La motivation de l'ordonnance de classement partiel est explicite quant au fait que l'empêchement de procéder pour l'infraction de menaces découle du retrait de plainte de E______. Si l'on peut se demander si le MP a également classé implicitement les faits relatifs à l'infraction de contrainte, poursuivie d'office, il n'en demeure pas moins que ladite décision porte uniquement sur les infractions dont E______ se prétendait victime. Les faits en lien avec les abonnements téléphoniques, les cartes de crédit et le trafic de stupéfiants ont été évoqués dans l'ordonnance de classement partiel uniquement dans le but de contextualiser le dépôt de plainte de E______ et les menaces dont il se disait victime.

En outre, et contrairement à ce qu'a plaidé la défense, il est expressément mentionné dans l'ordonnance de classement qu'un acte d'accusation était dressé en parallèle de cette décision, certes sous le chapitre "frais et indemnisation". Toujours contrairement à ce qui a été soutenu, le MP avait informé l'appelant, par pli du 28 octobre 2022 déjà, qu'un acte d'accusation serait prochainement rédigé, à l'exception des infractions de menaces et/ou contrainte qui feraient l'objet d'une ordonnance de classement partiel au vu du retrait de plainte de E______.

Dans ces circonstances, il ne fait aucun doute que l'ordonnance de classement partiel était clairement circonscrite aux infractions de menaces et/ou contrainte et qu'il n'existe aucun empêchement de procéder pour les faits visés dans l'acte d'accusation.

La question préjudicielle a donc été rejetée.

3. 3.1.1. Le principe in dubio pro reo découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 CEDH et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 Cst. et 10 al. 3 CPP. Il concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; 127 I 28 consid. 2a).

3.1.2. Ce principe signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes sérieux et irréductibles quant à l'existence de ce fait, une certitude absolue ne pouvant toutefois être exigée (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 ; 127 I 38 consid. 2a).

3.1.3. Le juge du fait dispose d'un large pouvoir dans l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 4b). Confronté à des versions contradictoires, il forge sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents. Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (ATF 129 I 8 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_324/2017 du 8 mars 2018 consid. 1.1).

3.1.4. L'appréciation des preuves est dite libre, car le juge peut par exemple attribuer plus de crédit à un témoin – même prévenu dans la même affaire – dont la déclaration va dans un sens qu'à plusieurs témoins soutenant la thèse inverse ; il peut fonder une condamnation sur une chaîne ou un faisceau d'indices ; en cas de "parole contre parole", il doit déterminer laquelle des versions est la plus crédible, de même qu'en cas de versions successives du prévenu (notamment de rétractation d'aveux), ou de déclarations contradictoires de co-prévenus. En d'autres termes, ce n'est ni le genre ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (J.-M. VERNIORY, in Y. JEANNERET / A. KHUN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd., Bâle 2019, n. 34 ad art. 10 CPP).

3.2.1. Selon l'art. 146 al. 1 CP, se rend coupable d'escroquerie quiconque, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, induit astucieusement en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou la conforte astucieusement dans son erreur et détermine de la sorte la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.

3.2.2. L'escroquerie consiste à tromper la dupe. Pour qu'il y ait escroquerie, une simple tromperie ne suffit cependant pas ; il faut qu'elle soit astucieuse. Il y a tromperie astucieuse, au sens de l'art. 146 CP, lorsque l'auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manœuvres frauduleuses ou à une mise en scène, mais aussi lorsqu'il donne simplement de fausses informations, si leur vérification n'est pas possible, ne l'est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l'auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu'elle renoncera à le faire en raison d'un rapport de confiance particulier (ATF 143 IV 302 consid. 1.3 ;
142 IV 153 consid. 2.2.2 ; 135 IV 76 consid. 5.2).

3.2.3. Pour que le crime d'escroquerie soit consommé, l'erreur dans laquelle la tromperie astucieuse a mis ou conforté la dupe doit avoir déterminé celle-ci à accomplir un acte préjudiciable à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.

Celui qui promet une prestation sans avoir l'intention de l'exécuter agit astucieusement parce qu'en promettant, il donne le change sur ses véritables intentions, ce que sa victime est dans l'impossibilité de vérifier (ATF 118 IV 359 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1141/2017 du 7 juin 2018 consid. 1.2.1). Une tromperie sur la volonté affichée n'est cependant pas astucieuse dans tous les cas, mais seulement lorsque l'examen de la solvabilité n'est pas exigible ou est impossible et qu'il ne peut par conséquent être tiré aucune conclusion quant à la volonté de l'auteur de s'exécuter (ATF 125 IV 124 consid. 3a).

3.2.4. L'escroquerie n'est en outre consommée que s'il y a un dommage (arrêts du Tribunal fédéral 6B_130/2016 du 21 novembre 2016 consid. 2.1 et 6B_552/2013 du 9 janvier 2014 consid. 2.3.2 ; B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, n. 32 ad art. 146 CP).

3.2.5. Sur le plan subjectif, l'escroquerie est une infraction intentionnelle, l'intention devant porter sur tous les éléments constitutifs de l'infraction, le dol éventuel étant suffisant. L'auteur doit en outre agir dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime (ATF 134 IV 210 consid. 5.3).

3.2.6. En l'espèce, il est établi et non contesté par les parties, que l'appelant et E______ se sont rencontrés au mois d'avril 2021 et ont discuté de projets professionnels.

Il est également admis que E______ a conclu plusieurs contrats à son nom, portant sur l'obtention d'appareils de téléphonie mobile et des cartes de crédits, dans le but de générer un gain financier rapide et facile.

L'appelant conteste toute participation à la conclusion des abonnements téléphoniques et aux achats électroniques prétendument commis avec E______.

L'enquête de police (fouille du téléphone et analyse des données rétroactives) n'a pas mis en évidence d'élément concret permettant de relier l'appelant à la conclusion desdits contrats, étant souligné que le bornage du téléphone de l'intéressé n'a pas permis de corroborer les déclarations de E______ selon lesquelles il l'avait accompagné devant les différents magasins à Genève lors de la conclusion des divers contrats. La présence de l'appelant au centre-ville de Genève le 29 avril 2021 n'est pas suffisante à elle seule pour l'incriminer, sans autres indices allant dans le sens d'une culpabilité d'une éventuelle infraction d'escroquerie, étant relevé qu'il paraît peu probable qu'il ait accompagné E______ à une reprise, mais renoncé à l'y conduire les 4, 5 et 14 mai 2021, dates auxquelles E______ a effectué d'autres achats, notamment pour CHF 2'969.90 (J______) et CHF 999.10 (N______), et A______ n'était pas localisé au centre-ville de Genève.

Les déclarations de E______, outre le fait qu'elles ne sont corroborées par aucun élément au dossier, apparaissent peu crédibles dans la mesure où il s'est contredit sur de nombreux éléments pourtant essentiels à l'appréciation de la cause, soit notamment sur le but de la conclusion de ces contrats et sur les personnes pour lesquelles il les avait conclus. De plus, les fausses fiches de salaire, utilisées pour obtenir des cartes de crédit, n'ont pas été établies ni même remises par le prévenu, de l'aveu même de E______.

En outre et d'après les propos rapportés par E______ à la police, les soi-disant affirmations de l'appelant ne permettraient pas de retenir que celui-ci aurait élaboré un échafaudage de mensonges ingénieux pour le déterminer à conclure des contrats de téléphonie mobile et de cartes de crédit dans le but de porter préjudice à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers. En effet, lors de son audition, E______ a concédé que les explications qu'il était en train de donner à la police n'avaient aucun sens et qu'il aurait dû s'en rendre compte immédiatement. Il a même reconnu avoir été aveuglé par son besoin pressant d'argent. Au vu de ce qui précède, force est de constater qu'il n'y a aucune tromperie astucieuse commise par A______.

Enfin, l'on ignore ce qui est advenu du matériel électronique et si certaines des factures ont pu être honorées par la suite, de sorte qu'une éventuelle infraction d'escroquerie ne peut être établie à ce stade.

Au vu de ce qui précède, l'appelant sera acquitté du chef d'infraction d'escroquerie et le jugement de première instance réformé sur ce point.

3.3.1. L'art. 19 al. 1 let. c LStup réprime le comportement de celui qui, sans droit, aliène ou prescrit des stupéfiants, en procure de toute autre manière à un tiers ou en met dans le commerce. Cette disposition appréhende tout acte qui a pour effet la remise d'un stupéfiant à autrui.

3.3.2. Il ressort du dossier que A______ a échangé plusieurs messages téléphoniques SNAPCHAT avec E______ entre les 17 et 28 mai 2021, à teneur desquels ils évoquent un prix, une quantité et la répartition de divers montants entre eux. Qui plus est, le message rédigé le 28 mai 2021 par E______ à son attention est explicite et fait directement référence à la vente de stupéfiants, le premier précisant qu'il a encore du shit, mais qu'il n'est pas en mesure de tenir les délais fixés au vu du tarif que l'appelant lui demande de pratiquer sur ses ventes.

Le prévenu n'a pas été en mesure de donner des explications crédibles sur les échanges précités ou sur la nature de la dette contractée par E______ à son égard, étant relevé que rien, à teneur du dossier, ne permet de corroborer ses déclarations selon lesquelles le précité serait débiteur d'une dette envers l'un de ses amis pour une location dont il ne se serait pas acquitté du prix. Du reste, W______ a également précisé que E______ devait de l'argent à l'appelant en lien avec les stupéfiants.

Au vu de ce qui précède, les déclarations de E______ au sujet d'un trafic de stupéfiants mis en œuvre avec le concours de l'appelant apparaissent crédibles, ce d'autant plus qu'il s'est spontanément présenté à la police pour se dénoncer et qu'il a été condamné pour ces faits, ce qui vient renforcer sa crédibilité.

L'appelant a ainsi effectivement participé à un trafic de stupéfiants, en fournissant du haschich à E______, lequel était chargé de le détailler et de le vendre pour son compte sur le territoire suisse, et plus précisément dans le canton du Valais.

Contrairement à ce que soutient l'appelant, les autorités suisses sont compétentes (art. 8 al. 1 CP) pour poursuivre et juger le trafic de stupéfiants, dans la mesure où les parties étaient convenues, à tout le moins, que le résultat de l'infraction se produise en Suisse, plus précisément dans le canton du Valais. En outre, l'appelant a remis, voire fait remettre par un tiers, les produits stupéfiants à E______ sur le territoire genevois afin que ce dernier les vende en Valais.

C'est dès lors à raison que le premier juge a retenu que l'appelant avait participé à un trafic de stupéfiants au sens de l'art. 19 al. 1 let. c LStup. L'appel est rejeté sur ce point et le jugement sera confirmé.

4. 4.1. La LStup réprime l'infraction à l'art. 19 al. 1 let. c d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. La rupture de ban, que l'appelant ne conteste pas en appel, est passible d'une peine identique (art. 291 al. 1 CP). La consommation de stupéfiants (art. 19a ch. 1 LStup) est quant à elle sanctionnée par une amende.

4.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

4.3. Le juge doit d'abord déterminer le genre de la peine devant sanctionner une infraction, puis en fixer la quotité. Pour déterminer le genre de la peine, il doit tenir compte, à côté de la culpabilité de l'auteur, de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (ATF 147 IV 241 consid. 3.2 p. 244 ss).

4.4. La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

4.5. Bien que la récidive ne constitue plus un motif d'aggravation obligatoire de la peine (art. 67 aCP), les antécédents continuent de jouer un rôle très important dans la fixation de celle-ci (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1202/2014 du 14 avril 2016 consid. 3.5 ; M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER [éds], Basler Kommentar Strafrecht I : Art. 1-136 StGB, Jugendstrafgesetz, 4e éd., Bâle 2019, n. 130 s. ad art. 47 CP). En général, la culpabilité de l'auteur est amplifiée du fait qu'il n'a pas tenu compte de l'avertissement constitué par la précédente condamnation, et sa rechute témoigne d'une énergie criminelle accrue (L. MOREILLON / A. MALACUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS [éds], Code pénal I : art. 1-100 CP, 2e éd., Bâle 2021, n. 54 ad art. 47 CP).

4.6. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.

4.7. Une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation suppose que le tribunal ait fixé (au moins de manière théorique) les peines (hypothétiques) de tous les délits (ATF 144 IV 217 consid. 3.5.3).

S'il a, dans sa jurisprudence publiée, édicté la règle selon laquelle cette disposition ne prévoit aucune exception et que le prononcé d'une peine unique dans le sens d'un examen global de tous les délits à juger n'est pas possible (ATF 145 IV 1 consid. 1.4 ; 144 IV 313 consid. 1.1.2), le Tribunal fédéral est revenu sur cette interprétation stricte dans plusieurs arrêts non publiés ultérieurs. Ainsi, lorsque plusieurs infractions sont étroitement liées entre elles, tant sur le plan temporel que matériel, et qu'une peine pécuniaire n'est envisageable pour aucune de ces infractions, notamment pour des motifs de prévention spéciale, une peine privative de liberté d'ensemble globale (Gesamtfreiheitsstrafe) peut être prononcée (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1135/2023 du 19 février 2025 consid. 3.3.2 ; 6B_246/2024 du 27 février 2025 consid. 2.5.4 ; 6B_432/2020 du 30 septembre 2021 consid. 1.4 ; 6B_141/2021 du 23 juin 2021 consid. 1.3.2).

4.8. Le juge suspend en règle générale l’exécution d'une peine pécuniaire ou d’une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu’une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l’auteur d’autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 CP).

Si, durant les cinq ans qui précèdent l’infraction, l’auteur a été condamné à une peine privative de liberté ferme ou avec sursis de plus de six mois, il ne peut y avoir de sursis à l'exécution de la peine qu’en cas de circonstances particulièrement favorables (art. 42 al. 2 CP).

4.9. Aux termes de l’article 89 CP, si, durant le délai d’épreuve, le détenu libéré conditionnellement commet un crime ou un délit, le juge qui connaît de la nouvelle infraction ordonne sa réintégration dans l’établissement (al. 1). Si, malgré le crime ou le délit commis pendant le délai d’épreuve, il n’y a pas lieu de craindre que le condamné ne commette de nouvelles infractions, le juge renonce à la réintégration (al. 2). Toutefois, la réintégration ne peut plus être ordonnée lorsque trois ans se sont écoulés depuis l’expiration du délai d’épreuve (al. 4).

La réintégration ou les mesures de substitution de l'art. 89 al. 2 CP doivent pouvoir être ordonnées lorsque les motifs de révocation sont connus ou découverts moins de trois ans après l'expiration du délai d'épreuve (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI, Code pénal, Petit Commentaire, Bâle 2017, n. 10 ad art. 89 et les références citées).

Aucune norme du Code pénal ne prévoit que ce délai cesse de courir après un jugement de première instance (arrêt du Tribunal fédéral 6B_114/2013 consid. 7 in SJ 2014 I p. 258).

4.10. Si la juridiction d’appel entre en matière, elle rend un nouveau jugement qui remplace le jugement de première instance (art. 408 al. 1 CPP).

4.11. En l'espèce, la faute de l'appelant est importante. Il s'est adonné une nouvelle fois à un trafic de stupéfiants, alors même qu'il avait déjà été condamné pour une telle infraction par le passé. Il a également persisté à pénétrer sur le territoire suisse, malgré l'expulsion dont il faisait l'objet, ignorant les interdits en vigueur. De plus il s'est à nouveau rendu coupable de consommation de stupéfiants. Il s'en est ainsi pris à différents biens juridiques importants, en particulier à la santé et à l'autorité publiques.

L'appelant a agi pour des mobiles égoïstes, par appât du gain facile et pure convenance personnelle.

Sa collaboration à la procédure ne peut être qualifiée de bonne. Il a certes reconnu la rupture de ban et la consommation de stupéfiants, qu'il ne pouvait que difficilement contester, vu sa présence sur le territoire suisse et la détention de drogue dans la poche de son pantalon, au moment de son arrestation. Il a en revanche persisté à nier son implication dans un trafic de stupéfiants tout au long de la procédure, malgré les éléments à charge.

Sa situation personnelle ne justifie pas son comportement. Ses nombreux antécédents judiciaires auraient dû le maintenir éloigné de la délinquance. Cet échec témoigne d'une absence de prise de conscience du caractère répréhensible de ses actes et de son imperméabilité aux sanctions prononcées jusqu'alors à son encontre.

Il y a concours d'infractions, motif d'aggravation de la peine (art. 49 al. 1 CP).

4.12. Vu les nombreux antécédents de l'appelant et le fait que l'exécution de plusieurs peines privatives de liberté n'a pas suffi à le dissuader de récidiver, seule une peine privative de liberté entre en compte pour sanctionner l'infraction à la LStup et la rupture de ban, hormis l'amende réprimant la consommation de stupéfiant, laquelle a été fixée à CHF 200.- par le premier juge et qui sera confirmée dans la mesure où elle sanctionne adéquatement cette contravention.

Le délit à la LStup, infraction abstraitement la plus grave, justifie à lui seul le prononcé d'une peine privative de liberté de six mois. À cela devront s'ajouter trois mois de peine privative de liberté pour l'infraction de rupture de ban (peine hypothétique de six mois).

Il ressort de l'extrait du casier judiciaire du prévenu qu'une libération conditionnelle a été ordonnée par le TAPEM le 17 décembre 2019, assortie d'un délai d'épreuve de deux ans, soit jusqu'au 17 décembre 2021. Le délai de trois ans, prévu à l'art. 89 al. 4 CP, commence à courir dès cette date, et arrive à échéance le 17 décembre 2024. Le présent arrêt de la CPAR se substituant à celui de l'autorité de première instance (cf. art. 408 CPP), le délai de trois ans est à présent échu, dans la mesure où aucune norme du Code pénal ne prévoit que ce délai cesse de courir après le prononcé d'un jugement de première instance (arrêt du Tribunal fédéral 6B_114/2013 consid. 7 in SJ 2014 I p. 258). En conséquence, la révocation, qui était possible au moment du prononcé du premier jugement du 19 février 2024, ne l’est plus en appel. Il convient dès lors de renoncer à la réintégration du prévenu dans un établissement de détention pour l'exécution du solde de peine de 171 jours.

Il s’ensuit que le jugement doit être réformé sur ce point, quand bien même il avait été valablement prononcé par le premier juge.

La peine prononcée sera ferme dans la mesure où l'appelant ne saurait prétendre à être mis au bénéfice du sursis, même partiel, vu sa condamnation à une peine privative de liberté de 10 mois, prononcée le 9 octobre 2020, soit durant les cinq ans qui précèdent ces nouvelles infractions, sans préjudice de ce que le pronostic quant à son comportement futur est défavorable au vu de ses antécédents spécifiques et des précédentes libérations conditionnelles, dont il n'a pas su tirer profit.

4.13. Selon l'art. 51 CP, le juge impute sur la peine la détention avant jugement subie par l'auteur dans le cadre de l'affaire qui vient d'être jugée ou d'une autre procédure (dans ce dernier cas, cf. ATF 133 IV 150 consid. 5.1 p. 155 s.). Un jour de détention correspond à un jour-amende ou à quatre heures de travail d'intérêt général.

Tout comme les règles régissant la fixation de la peine, l'art. 51 CP doit être appliqué d'office, l'imputation étant obligatoire et inconditionnelle (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1033/2018 du 27 décembre 2018 consid. 2.4 ; 6B_772/2020 du 8 décembre 2020 consid. 3.2).

L'appelant a subi 276 jours de détention avant jugement, dont 273 jours (9 mois) doivent être imputés sur la peine fixée. Sur les trois jours restants, deux jours seront déduits de la peine privative de liberté de substitution assortissant l'amende et le solde ne sera pas indemnisé, dès lors que le prévenu a renoncé à toute indemnisation (art. 429 CPP).

5. 5.1. Conformément à l'art. 66abis CP, le juge peut expulser un étranger du territoire suisse pour une durée de trois à 15 ans si, pour un crime ou un délit non visé à l'art. 66a, celui-ci a été condamné à une peine ou a fait l'objet d'une mesure au sens des art. 59 à 61 ou 64 CP. Il s'agit d'une norme potestative ; le juge est donc libre, sans autre justification, de renoncer à l'expulsion facultative (AARP/216/2022 du 22 juillet 2022 consid. 3.1.1 ; AARP/197/2022 du 16 juin 2022 consid. 5.1.2 ; AARP/92/2022 du 24 mars 2022 consid. 3.1).

La jurisprudence du Tribunal fédéral reconnaît, en matière de drogue, l'existence d'intérêts publics importants à l'expulsion, compte tenu en particulier des ravages qu'elle provoque dans la population, alors que la Cour européenne des droits de l'homme (CourEDH) admet pour sa part que les autorités sont fondées à faire preuve d'une grande fermeté à l'encontre des personnes qui contribuent à la propagation de ce fléau (cf. arrêts CourEDH K.M. c. Suisse du 2 juin 2015 [requête n° 6009/10], § 55 ; Dalia c. France du 19 février 1998, Recueil CourEDH 1998-I 76 § 54 ; aussi arrêts du Tribunal fédéral 6B_93/2021 du 6 octobre 2021 consid. 5.2 ; 6B_40/2021 du 29 septembre 2021 consid. 7.3).

5.2. Comme toute décision étatique, le prononcé d'une expulsion non obligatoire doit respecter le principe de la proportionnalité ancré aux art. 5 al. 2 et 36 al. 2 et 3 Cst.. Il convient ainsi d'examiner si l'intérêt public à l'expulsion l'emporte sur l'intérêt privé de la personne à demeurer en Suisse. Le juge doit faire une pesée des intérêts entre celui public à l'éloignement et la situation personnelle du condamné (G. FIOLKA / L. VETTERLI, Landesverweisung nach Art. 66a StGB als strafrechtliche Sanktion, cahier spécial, Plädoyer 5/16, p. 87 ; K. KÜMIN, Darf eine Aufenthaltsbewilligung widerrufen werden, nachdem von einer Landesverweisung abgesehen wurde ?, Jusletter 28 novembre 2016, p. 14). Une telle pesée des intérêts répond également aux exigences découlant de l'art. 8 par. 2 CEDH concernant les ingérences dans la vie privée et familiale (arrêt du Tribunal fédéral 6B_371/2018 du 21 août 2018 consid. 3.2). S'agissant d'un étranger arrivé en Suisse à l'âge adulte, l'examen de la proportionnalité suppose une prise en compte de la nature et de la gravité de la faute, du temps écoulé depuis la commission de l'infraction, du comportement de l'auteur durant cette période, de la durée de son séjour en Suisse, de la solidité des liens sociaux, culturels et familiaux avec le pays hôte et avec le pays de destination (ATF 139 I 145 consid. 2.4 p. 149 ; 139 I 31 consid. 2.3.3 p. 34 ss ; 135 II 377 consid. 4.3 p. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_607/2018 du 10 octobre 2018 consid. 1.4.1).

5.3. L'intégration de l'intéressé doit être examinée, indépendamment de la durée du séjour, au regard certes de l'enracinement linguistique, culturel, religieux et personnel en Suisse, mais aussi des obstacles que ce dernier rencontrerait pour sa réintégration, selon les mêmes critères, en cas de retour dans son pays d'origine. D'ordinaire, il faut que la resocialisation dans le pays d'origine paraisse en pratique impossible ou au moins nettement plus difficile qu'en Suisse. Cependant, dans le contexte d'une expulsion facultative d'un étranger pour lequel la clause de rigueur s'appliquerait, le risque de mauvaise resocialisation dans le pays d'origine pèse plus lourd dans l'analyse : des chances de resocialisation plus favorables en Suisse peuvent donc faire la différence (M. BUSSLINGER / P. UEBERSAX, op. cit., p. 98 et 102 ; AARP/216/22 du 22 juillet 2022 consid. 3.1.2).

5.4. En l'espèce, il existe un intérêt public important à l'expulsion de l'appelant, déjà condamné à neuf reprises avant la présente affaire, pour des infractions portant atteinte à de multiples biens juridiques. Ces diverses condamnations ne l'ont pas empêché de récidiver, malgré les peines privatives de liberté exécutées et les libérations conditionnelles octroyées et assorties d'un délai d'épreuve. Il est ainsi resté imperméable à la sanction et à l'effet dissuasif attendu des peines prononcées à son encontre, dont une de quatre ans et six mois.

L'intérêt de l'appelant à ne pas être expulsé est relatif. Il est certes arrivé en Suisse à l'âge de six ans mais n'a pas effectué sa scolarité obligatoire de manière continue dans ce pays, indiquant avoir étudié tant à Genève et AD______ [VD] qu'à P______ [France]. Il n'a jamais exercé d'emploi stable en Suisse, ayant été licencié après quelques mois. À partir du 16 octobre 2015, son parcours a été émaillé de nombreux placements en détention jusqu'au 17 décembre 2019, puis à nouveau dès le 10 juin 2020 jusqu'au 8 avril 2021, date à laquelle il a été expulsé du territoire suisse et reconduit à la frontière. Enfin il a encore été détenu, dans le cadre de la présente procédure, du 1er juin 2021 au 2 mars 2022, date de sa libération provisoire. Il ne possède aucun titre de séjour, son permis d'établissement ayant été révoqué en 2019. Il n'a tissé aucun lien dans le pays, hormis la présence de son fils mineur né le ______ 2013. Il s'est installé en France, pays dont il est ressortissant, où il a fondé sa propre société de coaching sportif, générant un revenu mensuel d'EUR 2'500.-, duquel il verse EUR 200.- / 250.- à son fils, à titre de pension alimentaire. Il a une nouvelle compagne avec laquelle il vit et qui est enceinte de ses œuvres. Son fils lui rend régulièrement visite à P______ pendant les vacances scolaires et ils se parlent par téléphone. Ainsi, la vie de l'appelant est désormais établie en France, sa situation apparaissant bien plus favorable dans ce pays qu'en Suisse.

Au vu des intérêts en jeu, l'intérêt public à l'expulsion de l'appelant l'emporte sur son intérêt privé, relatif, à pouvoir pénétrer et séjourner en Suisse. Une durée d'expulsion de trois ans – soit la durée minimale prévue à l'art. 66abis CP – paraît adéquate et proportionnée compte tenu de la gravité des faits en cause.

L'appelant ayant la nationalité française, il n'y a pas lieu d'ordonner l'inscription au SIS.

6. 6.1. L'appelant, qui obtient partiellement gain de cause supportera 50% des frais de la procédure d'appel envers l'État, y compris un émolument d'arrêt de CHF 1'500.- (art. 428 al. 1 CPP).

6.2. La même répartition sera appliquée aux frais de la procédure préliminaire et de première instance pour tenir compte de l'acquittement prononcé pour le chef d'escroquerie (art. 426 al. 1 et 428 al. 3 CPP).

7. 7.1. Considéré globalement, l'état de frais produit par Me C______, défenseur d'office du prévenu satisfait les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale, sous réserve du taux forfaitaire qui sera réduit à 10%, étant rappelé que ce taux est fixé à 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3).

7.2. La rémunération de Me C______ sera partant arrêtée à CHF 3'823.20 correspondant à 15.167 heures d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 3'033.40) plus la majoration forfaitaire de 10% (CHF 303.35), plus deux vacations à CHF 100.- chacune (CHF 200.-), et la TVA à 8.1% (CHF 286.45).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement rendu le 19 février 2024 par le Tribunal de police dans la procédure P/11591/2021.

L'admet partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ d'escroquerie (art. 146 al. 1 CP).

Déclare A______ coupable de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP), d'infraction simple à la LStup (art. 19 al. 1 let. c LStup) et de contravention à la LStup (art. 19 al. 1 let. d LStup cum art. 19a ch. 1 LStup).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 9 mois, sous déduction de 273 jours de détention avant jugement (art. 40 et 51 CP).

Condamne A______ à une amende de CHF 200.-, sous déduction de CHF 200.- correspondant à deux jours de détention avant jugement (art. 19a ch. 1 LStup ; art. 106 CP ; art. 51 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de trois ans (art. 66abis CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Renonce à ordonner le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) (art. 20 de l'ordonnance N-SIS; RS 362.0).

Prend acte que A______ a renoncé à toute indemnisation (art. 429 CPP).

Prend acte de ce que le Tribunal de police a arrêté les frais de la procédure préliminaire et de première instance CHF 5'365.-, y compris un émolument de jugement de CHF 1'000.-, et met 50% de ces frais, soit CHF 2'682.50, à la charge de A______, le solde étant laissé à la charge de l'État (art. 426 al. 1 et 428 al. 3 CPP).

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'915.-, y compris un émolument d'arrêt de CHF 1'500.-, et met 50% de ces frais, soit CHF 957.50, à la charge de A______, le solde étant laissé à la charge de l'État (art. 428 al. 1 CPP).

Prend acte de ce que l'indemnité de procédure due à Me C______, défenseur d'office de A______, a été fixée à CHF 12'022.35 pour la procédure préliminaire et de première instance (art. 135 CPP).

Arrête à CHF 3'823.20, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me C______, défenseur d'office de A______ pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, à l'Office cantonal de la population et des migrations et au Secrétariat d'Etat aux migrations.

 

 La greffière :

Sonia LARDI DEBIEUX

 

La présidente :

Sara GARBARSKI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète
(art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

5'365.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

180.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

160.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'915.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

7'280.00