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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3339/2025

JTAPI/1068/2025 du 08.10.2025 ( MC ) , ADMIS PARTIELLEMENT

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION;MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS);PROLONGATION
Normes : LEI.79; LEI.80.al6.leta
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3339/2025 MC

JTAPI/1068/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 8 octobre 2025

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Orianna HALDIMANN, avocate

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______ est né le ______ 1974.

2.             Arrivé en Suisse en 1990, il a déposé une demande d'asile le 28 septembre 1990, qui a été rejetée le 21 juillet 1992 par l’autorité fédérale compétente (actuellement le secrétariat d’État aux migrations, (ci-après : SEM). Cette décision, entrée en force le 24 novembre 1993, était assortie d’une mesure de renvoi. La prise en charge et l’exécution du renvoi du requérant étaient confiées au canton de Genève.

3.             Le 6 novembre 2000, M. A______ a sollicité son admission provisoire en Suisse, ce qui lui a été refusé par décision du 15 décembre 2000.

4.             Le 25 janvier 2001, l'office cantonal de la population (devenu depuis lors l'office cantonal de la population et des migrations, (ci-après : OCPM) a demandé le soutien du SEM en vue de l'exécution du renvoi de M. A______, en particulier afin que celui-ci, démuni de tout document d'identité, soit identifié.

5.             Entre 2001 et 2018, cette demande de soutien a été interrompue, puis réactivée à cinq reprises en raison de disparitions successives de M. A______, constatées entre 2003 et 2016.

6.             Le 13 mai 2016, le SEM a informé l'OCPM que seul le retour volontaire pour l'Éthiopie était possible actuellement.

7.             Selon l’extrait de son casier judiciaire suisse, M. A______ a été condamné à 24 reprises entre le 31 janvier 2015 et le 10 mars 2025, notamment pour brigandage, lésions corporelles simples, vol, dommages à la propriété, violation de domicile, opposition aux actes de l'autorité, délits et contraventions contre la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121), infraction à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et rupture de ban.

8.             L'intéressé a fait l'objet de trois décisions d'expulsion judiciaire de Suisse, soit le 27 novembre 2018 prononcée par le Tribunal de police (ci-après : TdP) pour une durée de 5 ans, le 26 mai 2020 par la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice, pour une durée de 3 ans et le 10 mars 2025, par le TdP pour une durée de 20 ans.

Il ressort du jugement du TdP du 27 novembre 2018 que M. A______ avait déclaré être ressortissant d'Éthiopie et être né le ______ 1974 à B______ (Ethiopie). Il était célibataire et père d'un enfant de 18 ans, qui vivait en Allemagne avec sa mère. Il n'avait plus de nouvelles de sa famille depuis 1998. Il n'avait pas de moyens de subsistance, ne disposait pas de documents d'identité et n'avait aucune famille en Suisse. Arrivé en 1990, il n'avait jamais quitté la Suisse depuis lors. Sa demande d'asile avait été rejetée. Il ne souhaitait pas retourner en Éthiopie, parce qu'il n'y connaissait plus personne. Il ne savait pas si son père, ses frères et ses sœurs y vivaient encore. Il avait peur pour sa vie et sa santé en cas de retour dans ce pays.

9.             Il a également fait l'objet de trois interdictions de pénétrer au centre-ville de Genève, prononcées par le commissaire de police, respectivement le 27 novembre 2014 pour une durée de 6 mois, le 27 janvier 2016 pour une durée de 12 mois, et le 16 août 2017 pour une durée de 12 mois.

10.         Le 7 septembre 2019, libéré par les autorités pénales, il a été remis entre les mains des services de police en vue de son refoulement.

Par jugement du 10 septembre 2019, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) a confirmé l'ordre de mise en détention qui avait été pris à son encontre pour une durée de trois mois. La chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a confirmé ce jugement par arrêt du 26 septembre 2019.

11.         Le 13 novembre 2024, M. A______ a à nouveau été incarcéré à la prison de Champ-Dollon en exécution de peines pénales.

12.         Dans le cadre de l'audition effectuée par la Brigade migration et retour (ci-après : BMR) le 17 mars 2025, M. A______ a déclaré avoir pris connaissance de son expulsion de Suisse pour une durée de 20 ans. Il n'avait pas de papiers d'identité mais était d'accord de collaborer avec les autorités suisses pour en obtenir auprès de l'ambassade d'Éthiopie. Il ne pouvait pas encore se déterminer s'il était d'accord de se rendre en Éthiopie, étant précisé qu'il avait quitté ce pays longtemps auparavant. Au sujet de sa situation personnelle, il a déclaré avoir un fils en Allemagne de 25 ans avec lequel il n'avait pas de liens, loger à Genève dans des foyers, ne pas travailler, suivre un traitement médical à base de méthadone, Treticot et Temesta.

13.         Le 1er mai 2025, le SEM a informé les autorités genevoises que M. A______ avait été reconnu comme ressortissant éthiopien par les autorités de ce pays.

14.         Le 9 mai 2025, M. A______ a été libéré de sa détention pénale.

15.         Le même jour, à 17h30, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de trois mois. Les démarches relatives à l'organisation de son refoulement en Éthiopie étaient en cours.

Au commissaire de police, le précité a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi en Éthiopie, dans la mesure où cela faisait 35 ans qu'il vivait à Genève et qu'il n'avait pas de famille en Éthiopie. Il avait un fils de 25 ans qui vivait en Allemagne. Il ne pouvait pas retourner en Éthiopie en raison de la guerre entre l'Érythrée et l'Éthiopie.

16.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au tribunal le même jour.

17.         Entendu le 13 mai 2025 par le tribunal, M. A______ a déclaré qu’il n’était pas d’accord de retourner en Éthiopie. Il était né en Éthiopie mais ses parents étaient érythréens. Il avait quitté l’Éthiopie à l’âge de 16 ans, en 1990. L’Érythrée avait été indépendante en 1991 et il pensait que sa famille s’y trouvait, soit son père, sa mère, ses deux frères et ses deux sœurs. Il n’avait plus de contacts avec eux depuis 1998. Il préférait retourner en Érythrée pour voir ses parents. Il pouvait obtenir un passeport érythréen. Il allait faire toutes les démarches pour obtenir son passeport auprès de la représentation diplomatique érythréenne. Lorsqu’il n’était pas en prison, il dormait à l’C______ où il recevait également à manger. Il recevait CHF 340.- par mois du service social. Il n’avait pas de famille en Suisse, mais il avait des amis. Il avait également un fils de 25 ans en Allemagne : il avait perdu contact avec lui, mais tentait de le renouer. Il n’avait jamais quitté le territoire suisse depuis qu’il y était arrivé. Il devait se faire opérer le 6 juin 2025 d’une hernie aux Hôpitaux Universitaires de Genève (ci-après : HUG). Il n’avait pas encore reçu la convocation. Son avocat a versé différentes pièces à la procédure, notamment des rapports sur la situation en Éthiopie.

La représentante du commissaire de police a versé à la procédure le procès-verbal d’entretien de départ de M. A______ du 9 mai 2025, transmis au SEM le 10 mai 2025. Ils attendaient que le service médical de Favra complète la demande de rapport médical, puis le rapport d’OSEARA. Une fois qu’ils seraient en possession du rapport d’OSEARA, ils réserveraient un vol en faveur de l’intéressé et demanderaient le laissez-passer aux autorités éthiopiennes. Ces démarches pouvaient prendre plusieurs semaines, et au minimum un mois.

18.         Par jugement du 13 mai 2025, le tribunal a confirmé l’ordre de mise en détention administrative pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 8 août 2025 inclus.

Les conditions légales de la détention administrative étaient réalisées. L'intéressé faisait l’objet de trois expulsions pénales de Suisse, l’une en cours prononcée par le TdP le 10 mars 2025 pour une durée de 20 ans. Malgré ces décisions, il était resté sur le territoire suisse. Il avait par ailleurs fait l’objet de nombreuses condamnations, notamment pour brigandage et vol, soit des infractions qualifiées de crime. Sans attaches avec Genève, il n'avait ni domicile ni lieu de résidence fixe et ne disposait d’aucune source de revenu. Vu les nombreuses infractions commises et les déclarations de l’intéressé quant à son refus d’être renvoyé dans son pays d'origine, préférant un renvoi vers l'Érythrée, pays dont il prétendait posséder la nationalité, l'assurance de son départ effectif répondait à un intérêt public certain.

M. A______ indiquait suivre un traitement médical à base de méthadone, Treticot et Temesta. Ce suivi pouvait être poursuivi dans son pays d'origine et ne pouvait pas faire opposition à son renvoi, l'intéressé n'étant pas exposé à un risque grave et concret de déclin dans sa santé s'il recouvrait son pays d'origine. Par ailleurs, il échouait à démontrer qu'il subirait un traitement dégradant et inhumain en cas de renvoi en Éthiopie ou qu'il y serait mis concrètement en danger, les pièces que son conseil avait transmises à l'audience faisant état de généralités, essentiellement dans la partie nord du pays.

19.         Une place à bord d’un avion a été réservée le 16 juin 2025. Le vol a toutefois dû être annulé, M. A______ ayant dû être hospitalisé après avoir avalé des piles.

20.         Par requête du 20 juin 2025, M. A______ a déposé une demande de mise en liberté, sans motivation. Il a conclu principalement, à la levée de sa détention, subsidiairement, à ce que l'illicéité de sa détention soit constatée.

Il a produit un chargé de pièces dont une décision de non-report de l'expulsion judiciaire de cinq ans du 7 septembre 2019, avec la mention que les services de police étaient mandatés pour procéder à son expulsion à destination de l'Éthiopie dès que possible, un certificat médical du 19 juin 2025 établi par le docteur D______ attestant qu'il avait ingéré des piles le 16 juin 2025, que ce geste était symptomatique de l'angoisse ressentie à l'idée d'un renvoi en Éthiopie et que d'autres actes auto-dommageables pouvaient survenir à l'avenir lors de prochaines tentatives de renvoi, ainsi qu’un extrait d’un passeport érythréen valable du 9 novembre 2004 au 8 novembre 2009 et établi en faveur de « A______ », né le « ______ 1974 ».

21.         Par courriel du 26 juin 2025, le commissaire de police a apporté certaines précisions, notamment que, le 16 mai 2025, la section consulaire de la Mission permanente de l’Éthiopie auprès de l’ONU à Genève avait émis un laissez-passer en faveur de l’intéressé, valable jusqu’au 15 novembre 2025. Un vol avait été confirmé pour le 16 juin 2025 mais il avait dû être annulé car M. A______ avait avalé des piles et avait dû être hospitalisé la veille. Les services de police étaient en train d'organiser un vol à destination de l’Éthiopie avec escorte policière en faveur de l'intéressé.

L’Extranet du SEM précisait que l’entrée en Érythrée n’était possible qu’avec un passeport valable. En l’absence d’un tel document, un laissez-passer était nécessaire. Actuellement, aucun document n’était délivré par le Consulat d'Érythrée à Genève sur demande des autorités fédérales. L’intéressé qui souhaitait retourner volontairement dans son pays d'origine devait se rendre personnellement et de manière autonome auprès du Consulat d'Érythrée à Genève afin de se faire délivrer un laissez-passer. Il devait entreprendre lui-même toutes les démarches nécessaires pour l’obtenir et confirmer ne plus avoir de document de voyage et vouloir rentrer de son plein gré. Actuellement, seuls des retours volontaires étaient possibles vers l’Érythrée.

Il a produit un chargé de pièces dont une attestation du 25 juin 2025 du médecin conseil du SEM attestant que M. A______ était apte à voyager en avion.

22.         Lors de son audition du 1er juillet 2025 devant le tribunal, l’intéressé a déclaré qu’il avait déposé une demande de mise en liberté car il était érythréen. Ce pays n'était pas stable et il ne voulait pas y retourner. La copie de son passeport érythréen se trouvait à Frambois. Cela faisait huit mois qu’il était en détention. Il n'était pas en bonne santé et ne se sentait pas bien. Cela faisait 35 ans qu'il vivait en Suisse. Il avait passé les trois quarts de sa vie ici. Si la situation le lui permettait, il voudrait bien retourner en Érythrée, mais cela n'était pas le cas aujourd'hui. Il avait obtenu son passeport érythréen lorsqu'il avait reconnu son fils en Allemagne, en 2004. Celui-ci se trouvait avec la mère de son enfant jusqu'alors. Il s'excusait pour tous les délits qu'il avait commis en Suisse. Il aurait du mal à retourner vivre en Afrique. Il était d'accord de retourner en Érythrée, mais uniquement lorsque la situation se serait calmée. Même s'il obtenait un passeport érythréen valable, il n'était pas d'accord d'y retourner actuellement car la situation n'y était pas stable. L'Éthiopie n'était pas chez lui. Il n'était pas d'accord de s'y rendre.

Son conseil a déposé un chargé de pièces complémentaire dont une attestation d'hébergement de F______ datée du 27 juin 2025 attestant qu’il pouvait bénéficier d'une place d'hébergement au sein de la structure « E______ » gérée par l'C______ dès le 1er juillet 2025.

Le représentant du commissaire de police a expliqué que la date du vol avec escorte policière n'était pas encore confirmée mais qu'il devrait avoir lieu en août 2025. Il ne souhaitait pas communiquer le créneau des dates possibles, car l'intéressé avait fait échouer son dernier vol en avalant des piles. Son passeport érythréen était échu depuis 2009. Si ce dernier voulait retourner en Érythrée, il lui appartenait d'effectuer seul les démarches afin d'obtenir un passeport valable. S’il avait un nom de famille différent sur ses documents d'identité érythréen et éthiopien, c'était certainement car il s'agissait de deux pays différents. Comme seul était envisagé un départ pour l'Éthiopie, seules les informations indiquées sur le laissez-passer éthiopien faisaient foi.

23.         Par jugement (JTAPI/734/2025) du 2 juillet 2025, le tribunal a rejeté la demande de mise en liberté formée le 20 juin 2025 et confirmé en tant que de besoin la détention administrative de M. A______ jusqu’au 8 août 2025 inclus.

L’intéressé était originaire d’Éthiopie. Bien qu’il prétendît posséder la nationalité érythréenne, les autorités suisses étaient en possession d'un laissez-passer en sa faveur délivré par les autorités éthiopiennes, pays où il était né et qui l'avait reconnu comme son ressortissant. Un vol spécial afin de le renvoyer en Éthiopie était en cours d'organisation, de sorte que son renvoi vers ce pays était non seulement possible, mais prévisible. Il n'existait dès lors aucun motif valable de le libérer afin d'attendre qu'il veuille bien obtenir un passeport des autorités érythréennes pour se rendre en Érythrée de son plein gré, alors qu'il avait affirmé, à plusieurs reprises, qu'il n'avait aucunement l'intention de le faire. L’étranger en possession de plusieurs nationalités ne pouvait pas choisir dans quel pays il devait être renvoyé si les autorités ne pouvaient matériellement que le renvoyer vers l'un d'entre eux, comme en l'espèce et pour autant que l’intéressé possédait réellement la nationalité érythréenne, ce qui n’était pas prouvé en l'espèce au vu de son passeport échu en 2009.

Selon l'attestation du médecin conseil du SEM du 25 juin 2025, soit après avoir avalé des piles, l’intéressé était apte à voyager en avion. Aucun élément objectif ne permettait de remettre en cause cette appréciation et comme le retenait la jurisprudence, il appartenait à ses médecins traitants de le préparer à la perspective de son retour en Éthiopie.

Enfin, s’opposant fermement à son renvoi, n'ayant aucun moyen de subsistance et ayant été condamné à de très nombreuses reprises, seule la détention était apte à assurer son renvoi.

24.         Ce jugement a été confirmé par arrêt (ATA/808/2025) du 24 juillet 2025 de la chambre administrative.

Le tribunal avait procédé à une appréciation correcte des preuves pertinentes en retenant que le recourant était d’origine éthiopienne, même si l’on ne pouvait exclure qu’il disposait également de la nationalité érythréenne. Dans ces conditions, son renvoi en Éthiopie ne contrevenait nullement à l’art. 83 al. 2 LEI et, dans la mesure où les autorités éthiopiennes lui avaient accordé un laissez-passer jusqu’au 15 novembre 2025, son renvoi n’était pas impossible. Pour le reste, en substance, l’intérêt public à l’exécution de l’éloignement du recourant était certain, les autorités avaient fait preuve de la célérité voulue et la difficulté liée à son éloignement n’était due qu’à son opposition, étant rappelé que selon le médecin conseil du SEM, il était apte à prendre l’avion sous certaines conditions. Enfin, la durée de la mise en détention, d'une durée de trois mois était conforme à l'art. 79 LEI.

25.         Par requête motivée du 28 juillet 2025, l’OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois, expliquant qu’un vol avec escorte policière (DEPA), à destination de son pays d’origine, était en cours d’organisation et devrait aboutir dans le délai du terme de la prolongation demandée.

26.         Devant le tribunal, lors de l'audience du 5 août 2025, M. A______ a indiqué être toujours opposé à son renvoi en Ethiopie car il était érythréen. Si, un jour, la situation se stabilisait dans ce pays, il serait d’accord d’y retourner. À ce stade, il n’avait rien d’autre à ajouter. Sur question de son conseil, il a indiqué avoir entamé une grève de la faim depuis le 25 juillet 2025, soit après avoir pris connaissance de l’arrêt de la chambre administrative. Il se sentait très faible. Il s’agissait du seul moyen qu’il avait à disposition pour montrer son opposition à son renvoi en Éthiopie. Il trouvait la situation injuste car il ne comprenait pas sur quels éléments, notamment visuels, la délégation éthiopienne s’était fondée pour le reconnaître comme un ressortissant de son pays. Il confirmait ses déclarations s’agissant de ce qui l’attendait en Éthiopie, à savoir qu’il n’y avait plus personne et risquait la torture. Si son renvoi devait néanmoins se faire, il souhaitait que ce soit en Érythrée, où il avait sa famille, et pas en Éthiopie. Il aimerait que ce cauchemar s’arrête.

Le représentant de l’OCPM a indiqué avoir obtenu une place sur un vol de ligne à destination de l’Éthiopie pour M. A______. Le vol était confirmé mais il ne souhaitait pas communiquer sa date en audience, ceci afin d’éviter un incident tel que celui survenu la dernière fois où ils avaient réservé un vol. Il remettait toutefois ce jour une enveloppe scellée au tribunal avec toutes les informations utiles y relatives, précisant qu’il s’agissait de pièces confidentielles. Le laissez-passer était toujours valable jusqu’au 15 novembre 2025 et ils n’avaient pas d’autres informations à communiquer à ce stade. Sur question du conseil de M. A______, le renvoi pourrait être finalisé dans le délai de prolongation de la détention requis. Il ne pouvait pas être plus précis et, en particulier, indiquer le mois durant lequel il était prévu. La non-communication de la date du vol afin d’éviter tout incident, notamment d’atteinte à son intégrité corporelle, n’était pas contradictoire avec leur obligation d’exécuter le refoulement de M. A______ en Éthiopie. Ils avaient connaissance de la grève de la faim entamée par ce dernier et étaient en communication, par échanges téléphoniques, avec le service médical de Frambois à ce sujet. C’était une situation qu’ils observaient et qui était sous contrôle. En ce moment, plusieurs détenus administratifs genevois avaient entamé une grève de la faim et la direction des établissements de détention administrative était attentive à leur état de santé. Ce constat découlait d’entretiens téléphoniques, lors desquels ils abordaient la situation de plusieurs contraints et, en particulier, celle de
M. A______, et de ses expériences passées. Il a conclu à la prolongation de la détention administrative pour une durée de deux mois, nécessaire en vue du refoulement de l’intéressé.

Le conseil de M. A______ a produit un chargé de pièces, pour l’essentiel déjà à la procédure. Elle a plaidé et conclu, principalement, au rejet de la prolongation de la détention administrative de son client et à sa mise en liberté immédiate et, subsidiairement, à ce que la prolongation de la détention administrative soit limitée à la fin du mois d’août. Le renvoi de M. A______ était impossible pour des raisons tant matérielles que juridiques, à savoir son absence de nationalité éthiopienne, son impossibilité d’obtenir des documents d’identité érythréens, son état de santé et le risque d’auto-agression en cas de refoulement. Elle a enfin conclu au versement d’une indemnité de CHF 875.- en application de l’art. 87 al. 2 LPA.

27.         Par jugement du 5 août 2025, le tribunal a prolongé la détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois, soit jusqu'au 8 octobre 2025 (JTAPI/834/2025).

Les circonstances qui avaient conduit le tribunal, dans ses jugements des 13 mai et 2 juillet 2025, puis la chambre administrative dans son arrêt du 24 juillet 2025 à retenir que les conditions de la détention de M. A______ étaient remplies quant à son principe étaient toujours d’actualité. Faute d’éléments nouveaux et en l’absence d’un quelconque changement de circonstance pertinent depuis, il n’y avait en particulier pas lieu de remettre en cause les constats effectués par la chambre administrative, soit que le précité était de nationalité éthiopienne, que son renvoi en Éthiopie ne contrevenait pas à l’art. 83 al. 2 LEI et qu’il n’était pas impossible. Par conséquent, sur ces points, il était renvoyé aux motifs de son arrêt.

L'assurance du départ effectif de M. A______ répondait toujours à un intérêt public certain et, vu son refus maintes fois répété de retourner en Ethiopie, aucune autre mesure moins incisive ne pouvait être envisagée pour garantir sa présence jusqu'à l'exécution de son refoulement. Enfin, son renvoi n'apparaissait ni improbable ni impossible, au vu des dernières pièces versées au dossier.

S’agissant de l’état de santé de M. A______, et en particulier de la grève de la faim qu’il avait entamée, vraisemblablement en relation avec l’imminence de son renvoi, elle ne saurait, à ce stade, faire obstacle à son maintien en détention administrative. Pour rappel, l'objectif de cette dernière était de permettre l'exécution du renvoi ou de l'expulsion. Elle se faisait dans un établissement qui satisfaisait aux exigences légales de l'art. 81 LEI en matière de respect des personnes détenues administrativement et qui bénéficiait d'un service médical approprié, pourvoyant aux soins ambulatoires et d'urgence (cf. art. 18 al. 2 du Concordat sur l'exécution de la détention administrative à l'égard des étrangers du 4 juillet 1996 - CEDA - F 2 12), susceptible de lui porter assistance. Le représentant de l’OCPM avait de plus indiqué, lors de l’audience, avoir été informé de la situation de l’intéressé par l’équipe médicale de Frambois, laquelle suivait la situation de près et, rien ne permettait de douter que si l’état de santé de l’intéressé devait nécessiter un examen avant son renvoi, celui-ci serait effectué. La détention respectait par conséquent toujours le principe de proportionnalité.

La durée de la prolongation de deux mois sollicitée par l'OCPM respectait enfin également ledit principe et apparaissait justifiée et adéquate en vue de la finalisation du renvoi de l’intéressé. Elle porterait sa détention administrative à cinq mois au total, ce qui n'atteignait de loin pas la durée totale de 18 mois que pouvait atteindre une détention administrative selon l'art. 79 al. 1 et 2 LEI.

28.         Le 9 septembre 2025, M. A______, par l’intermédiaire de son conseil, a adressé une demande de reconsidération de la décision de non-report de l’expulsion à l’OCPM et a requis l’octroi de mesures super provisionnelles et provisionnelles visant à suspendre son expulsion judiciaire.

29.         Le vol spécial prévu le 16 septembre 2025 à destination de l’Éthiopie a été annulé à la demande de l’OCPM.

30.         Le 17 septembre 2025, l’OCPM a suspendu provisoirement l’exécution de l’expulsion judiciaire de M. A______ dans l’attente de la détermination du SEM.

31.         Le 18 septembre 2025, l’OCPM a soumis deux demandes d’avis au SEM en application de l’art. 32 al. 2 de l’ordonnance 1 sur l’asile relative à la procédure (OA1 - règlement fixant le statut des membres du corps enseignant primaire, secondaire et tertiaire ne relevant pas des hautes écoles du 12 juin 2002 (RStCE - B 5 10.04) 142.311).

32.         Par requête motivée du 26 septembre 2025, l’OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de quatre mois. Cette mesure constituait l’unique moyen afin de mener à terme le rapatriement de l’intéressé à destination de son pays d’origine. Une durée de quatre mois ne violait par ailleurs pas le principe de proportionnalité eu égard au comportement adopté jusqu’ici par l’intéressé.

33.         À la demande du tribunal, l’OCPM a transmis, le 1er octobre 2025, copie des deux demandes faites au SEM.

34.         Par courrier du même jour, le conseil de M. A______ a demandé des mesures d’instruction complémentaire, soit la transissions de diverses informations de la part de l’OCPM, informations transmises le même jour par ce dernier.

35.         Devant le tribunal, lors de l'audience du 7 octobre 2025, M. A______ a déclaré qu’il n’avait entrepris aucune démarche auprès des autorités érythréennes. Il était titulaire d’un passeport érythréen échu. S’il était remis en liberté, il souhaitait rester en Suisse et demander un permis humanitaire. Sur question de son conseil, il a indiqué aller bien même s’il était un peu anxieux. Il avait arrêté la grève de la faim, qu’il avait entamée le 25 juillet 2025, le 21 août 2025, du fait que, malgré elle, il avait quand même été amené à l’aéroport en vue de son renvoi : une grève de la faim ne servait donc à rien. Il n’était pas être d’accord d’être renvoyé en Éthiopie car il n’y avait personne, sa famille habitant en Érythrée, et parce qu’il était érythréen. Dès son arrivée en Suisse, il avait dit qu’il était né en Éthiopie, mais qu’il était érythréen. Il n’avait jamais eu de nationalité éthiopienne.

Le conseil de l’intéressé a précisé que, pour obtenir un passeport érythréen, son client devrait signer un document dont le contenu ressortait de la pièce produite. Elle a déposé un nouveau bordereau de pièces. Il était exact que son client contestait être éthiopien mais s’opposait aux démarches en vue d’obtenir un passeport érythréen. C’était pour cette raison qu’elle avait déposé la demande de reconsidération de la décision de non-report de l’expulsion judiciaire. À la demande du tribunal, elle a déposé copie du courriel du 29 août 2025 mentionné dans le dernier courriel de l’OCPM du 1er octobre 2025 : elle estimait que la réponse de l’OCPM du 2 septembre 2025 au courriel de l’ambassade d’Érythrée du 29 août 2025 ne répondait pas aux attentes de cette dernière et pourrait créer un incident diplomatique. Le conseil de M. A______ a plaidé et conclu au rejet de la demande de prolongation de la détention administrative et à la mise en liberté immédiate de son client. Elle a également sollicité une indemnité.

Le représentant de l’OCPM a indiqué qu’ils avaient fait deux demandes auprès du SEM, une auprès de la section médicale et l’autre auprès de la section politique. Il avait reçu vendredi dernier la réponse de la section politique et il attendait encore la seconde réponse. Le contenu de ces réponses serait indiqué dans la décision qui sera prise dans le cadre de la procédure de reconsidération. Sur questions du conseil de M. A______, il a indiqué qu’il n’avait pas d’informations sur le délai de réponse à leurs questions de la part au secteur médical du SEM mais, comme il l’avait déjà indiqué, ce service avait été informé que M. A______ était en détention administrative ; il a confirmé qu’ils n’allaient pas encore entreprendre de démarches en vue du renouvellement du laissez-passer étant donné la procédure relative à l’exécution de l’expulsion judiciaire, que le laissez-passer était encore valable un mois et demi et qu’il pensait qu’un renouvellement prenait moins de temps que sa délivrance. Il n’était pas exclu que l’OCPM prononçât une décision du report de ladite exécution. Ils n’avaient pas de preuves qu’un vol spécial serait organisé dans le délai de quatre mois de la demande de prolongation de la détention. Ils allaient d’abord recevoir les informations de la section médicale puis rendre une décision sur la demande de reconsidération de la décision de non-report de l’expulsion. Si l’OCPM décidait de ce report, M. A______ serait remis en liberté. Si le report n’était pas prononcé, ils inscriraient M. A______ sur un prochain vol spécial dont il ne connaissait pas les délais d’organisation. Il n’était pas de sa compétence de se prononcer sur les relations entre la Suisse et l’Érythrée, étant précisé que le SEM était au courant de toutes leurs démarches. Il a conclu à la confirmation de la demande de prolongation de la détention administrative pour une durée de quatre mois.

36.         Au terme de l’audience, la cause a été gardée à juger.

37.         Le contenu des pièces sera repris dans la partie « En droit » dans la mesure utile.

 

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour prolonger la détention administrative en vue de renvoi ou d'expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. e de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             S'il entend demander la prolongation de la détention en vue du renvoi, l'OCPM doit saisir le tribunal d'une requête écrite et motivée dans ce sens au plus tard huit jours ouvrables avant l’expiration de la détention (art. 7 al. 1 let. d et 8 al. 4 LaLEtr).

3.             En l'occurrence, le 26 septembre 2025, le tribunal a été valablement saisi, dans le délai légal précité, d'une requête de l'OCPM tendant à la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de quatre mois.

4.             Statuant ce jour, le tribunal respecte le délai fixé par l'art. 9 al. 4 LaLEtr, qui stipule qu'il lui incombe de statuer dans les huit jours ouvrables qui suivent sa saisine, étant précisé que, le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l’étranger.

5.             La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l’art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et de l’art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu’elle repose sur une base légale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_584/2012 du 29 juin 2012 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).

6.             Selon l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, renvoyant à l’art. 75 al. 1 LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'une décision de première instance d'expulsion au sens des art. 66a ou 66abis du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée notamment lorsqu'elle a été condamnée pour crime, par quoi il faut entendre une infraction passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (let. h) (cf. art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a).

7.             L'autorité compétente peut également placer la personne concernée en détention administrative notamment si des éléments concrets font craindre qu'elle ne se soustraie au renvoi ou à l'expulsion, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (art. 76 al. 1 let.b ch. 3 LEI) et si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités compétentes (ch. 4).

8.             Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l’accord de l’autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l’obtention des documents nécessaires au départ auprès d’un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI). Concrètement, dans ces deux circonstances, la détention administrative peut donc atteindre 18 mois (cf. not. arrêt du Tribunal fédéral 2C_560/2021 du 3 août 2021 consid. 8.1).

9.             La détention administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., qui se compose des règles d'aptitude - exigeant que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/189/2015 du 18 février 2015 consid. 7a).

10.         Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEI ; « principe de célérité ou de diligence »). Il s'agit d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/88/2010 du 9 février 2010 ; ATA/644/2009 du 8 décembre 2009 et les références citées).

11.         Selon l'art. 80 al. 4 LEI, l'autorité judiciaire qui examine la décision de détention de maintien ou de levée tient compte de la situation familiale de la personne détenue et des conditions d'exécution de la détention.

Celle-ci doit en particulier être levée lorsque son motif n'existe plus ou si, selon l'art. 80 al. 6 let. a LEI, l'exécution du renvoi s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles ou qu'elle ne peut être raisonnablement exigée, cette dernière disposition légale renvoyant à l'art. 83 al. 1 à 4 LEI.

Selon ces dispositions, l'exécution n'est pas possible lorsque l'étranger ne peut pas quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans l'un de ces États (al. 2), n'est pas licite lorsque le renvoi de l'étranger dans son État d'origine, dans son État de provenance ou dans un État tiers est contraire aux engagements de la Suisse relevant du droit international (al. 3) et ne peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (al. 4).

L'impossibilité peut être juridique (refus de l'État d'origine de reprendre la personne ; ATF 125 II 217 consid. 2 = RDAF 2000 I 811) ou matérielle (état de santé grave et durable ne permettant pas de transporter la personne). La jurisprudence fédérale exige qu'un pronostic soit établi dans chaque cas. Si l'exécution dans un délai prévisible paraît impossible ou très improbable, la détention doit être levée (ATF 127 II 168 consid. 2c = RDAF 2002 I 390 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.312/2003 du 17 juillet 2003 ; ATA/92/2017du 3 février 2017 consid. 5b).

12.         Le juge de la détention administrative doit en principe seulement s'assurer qu'une décision de renvoi existe, sans avoir à vérifier la légalité de cette dernière. Ce n'est que lorsque la décision de renvoi apparaît manifestement inadmissible, soit arbitraire ou nulle, que le juge de la détention peut, voire doit, refuser ou mettre fin à la détention administrative (ATF 129 I 139 consid. 4.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1177/2013 du 17 janvier 2014 consid. 2.2).

13.         La détention doit être levée notamment si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles (art. 80 al. 6 let. a LEI). Dans ce cas, la détention dans l'attente de l'expulsion ne peut en effet plus être justifiée par une procédure d'éloignement en cours; elle est, de plus, contraire à l'art. 5 par. 1 let. f CEDH (cf. ATF 130 II 56 consid. 4.1.1 et les arrêts cités; arrêts 2C_955/2020 précité consid. 5.1 et l'arrêt cité). Les raisons juridiques ou matérielles doivent être importantes (« triftige Gründe »), l'exécution du renvoi devant être qualifiée d'impossible lorsque le rapatriement est pratiquement exclu, même si l'identité et la nationalité de l'étranger sont connues et que les papiers requis peuvent être obtenus (arrêt 2C_672/2019 du 22 août 2019 consid. 5.1 et les arrêts cités). Tel est par exemple le cas lorsqu'un État refuse explicitement, ou du moins de manière clairement reconnaissable et cohérente, de reprendre certains de ses ressortissants (cf. ATF 130 II 56 consid. 4.1.3; 125 II 217 consid. 2 et la référence et l'arrêt cités; arrêts 2C_768/2020 du 21 octobre 2020 consid. 5.1; 2C_473/2010 du 25 juin 2010 consid. 4.1). Le facteur décisif est de savoir si l'exécution de la mesure d'éloignement semble possible dans un délai prévisible respectivement raisonnable avec une probabilité suffisante (arrêts 2C_955/2020 précité consid. 5.1; 2C_635/2020 précité consid. 6.1; 2C_597/2020 du 3 août 2020 consid. 4.1). La détention viole l'art. 80 al. 6 let. a LEI, ainsi que le principe de proportionnalité, lorsqu'il y a de bonnes raisons de penser que tel ne pourra pas être le cas (ATF 130 II 56 consid. 4.1.3 et les arrêts cités). Sous l'angle de l'art. 80 al. 6 let. a LEI, la détention ne doit être levée que si la possibilité de procéder à l'expulsion est inexistante ou hautement improbable et purement théorique, mais pas s'il y a une chance sérieuse, bien que mince, d'y procéder (cf. ATF 130 II 56 consid. 4.1.3; arrêts 2C_955/2020 précité consid. 5.1; 2C_597/2020 précité consid. 4.1).

Savoir si un renvoi, exclu au moment où l'autorité de la détention statue, est possible dans un délai prévisible et donc réalisable, suppose que l'autorité ou le juge dispose d'indications suffisamment concrètes à ce sujet, indications qui sont en particulier fournies par le SEM (cf. arrêt 2C_597/2020 précité consid. 4.1 et les nombreux arrêts cités). À défaut, force est d'admettre qu'il n'y a pas de perspective sérieuse d'exécution de la décision de renvoi et le détenu doit être libéré. La vague possibilité que l'obstacle au renvoi puisse être levé dans un avenir prévisible ne suffit pas à justifier le maintien en détention (cf. ATF 125 II 217 consid. 3b/bb; arrêt 2C_955/2020 précité consid. 5.1 et les arrêts cités).

14.         En l'espèce, les circonstances qui ont conduit le tribunal, dans ses jugements des 13 mai, 2 juillet et 5 août 2025, et la chambre administrative dans son arrêt du 24 juillet 2025 à retenir que les conditions de la détention de M. A______ étaient remplies quant à son principe sont toujours d’actualité, ce que M. A______ ne conteste pas. Le fait que, dans le cadre de la demande de reconsidération de la décision de non-report de l’expulsion judiciaire déposée par M. A______ le 9 septembre 2025, l’OCPM ait, sur mesures provisionnelles, suspendu l’exécution de l’expulsion judicaire n’y change rien.

M. A______ indique être érythréen et non éthiopien et que son renvoi serait impossible.

Le tribunal rappellera que l’intéressé a été reconnu par les autorités éthiopiennes comme étant un de leurs ressortissants et que ces dernières ont délivré un laissez-passer afin que son renvoi puisse être effectué à destination de l’Éthiopie. Contrairement à ce qu’il a déclaré lors de l’audience du 13 mai 2025, M. A______ n’a entrepris aucune démarche auprès des autorités érythréennes afin d’obtenir des documents d’identité. Il a précisé, lors de l’audience du 8 octobre 2025, qu’il n’allait jamais entamer de démarches en ce sens car il ne voulait pas signer une déclaration de repentir, document obligatoire, selon les informations en sa possession dans le cadre de telles démarches. N’ayant ainsi pas amené de nouveaux éléments concernant sa nationalité érythréenne, le tribunal ne peut que renvoyer au développement tenu par la chambre administrative dans son arrêt du 24 juillet 2025, laquelle avait conclu que le tribunal avait procédé à une appréciation correcte des preuves pertinentes en retenant que le recourant était d’origine éthiopienne et que son renvoi ne contrevenait pas à l’art 83 al. 2 LEI (ATA/808/2025 consid. 4.4 et 6.6). Il n’apparaît pas impossible au sens de l’art. 80 al. 6 let. a LEI.

L'assurance du départ effectif de M. A______ répond toujours à un intérêt public certain et, vu son refus maintes fois répété de retourner en Éthiopie, aucune autre mesure moins incisive ne peut être envisagée pour garantir sa présence jusqu'à l'exécution de son refoulement.

Par ailleurs, l’OCPM poursuit les démarches nécessaires afin de concrétiser le renvoi de M. A______, ayant sollicité le SEM pour des informations complémentaires tant de nature politique que médicale, lesquelles n’ont pas encore été toutes transmises. Il est par ailleurs en possession d’un laissez-passer valable encore plus d’un mois en faveur de l’intéressé et a indiqué que ce dernier sera inscrit sur le prochain vol spécial si le non-report de l’expulsion judicaire était confirmé.

S’agissant de l’état de santé de M. A______ et en particulier de la poursuite de ses traitements médicamenteux en Ethiopie, il sera rappelé qu’au moment où le renvoi pourra être concrétisé, il sera envisageable que M. A______ parte avec une réserve de médicaments. Il pourra, par ailleurs, durant sa détention, continuer à bénéficier des soins prodigués par le service médical de son lieu de détention. Enfin, les informations qui seront transmises par le secteur médical du SEM permettront d’avoir une meilleure vision de la situation.

15.         En ce qui concerne la durée de la demande de prolongation de quatre mois, sollicitée par l'OCPM, elle parait disproportionnée du fait que la situation de M. A______ risque de se modifier prochainement dès lors que l’OCPM doit statuer sur la demande de reconsidération de la décision de non-report de son expulsion judiciaire : cette décision pourrait avoir une influence sur la suite de la détention de l’intéressé. Une prolongation de la détention de six semaines parait dès lors plus adéquate - étant souligné que la durée totale de 18 mois que peut atteindre une détention administrative selon l'art. 79 al. 1 et 2 LEI ne sera pas atteinte.

16.         Au vu de ce qui précède, la demande de prolongation de la détention administrative de M. A______ sera admise pour une durée de six semaines, soit jusqu'au 19 novembre 2025.

17.         Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée.

18.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et à l’OCPM. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable la demande de prolongation de la détention administrative de Monsieur A______ formée le 26 septembre 2025 par l’office cantonal de la population et des migrations ;

2.             prolonge la détention administrative de Monsieur A______ pour une durée de six semaines, soit jusqu'au19 novembre 2025 ;

3.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnités ;

4.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.


Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, à l’office cantonal de la population et des migrations et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière