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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1617/2024

JTAPI/755/2024 du 06.08.2024 ( OCPM ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : RECONSIDÉRATION;MOTIF DE RÉVISION;MODIFICATION DES CIRCONSTANCES;NOUVEAU MOYEN DE FAIT
Normes : LPA.48.al1.letb; LPA.80.letb
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1617/2024

JTAPI/755/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 6 août 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Pierre OCHSNER, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1979, est ressortissant du Brésil.

2.             Par décision du 11 janvier 2022, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a refusé d’octroyer une autorisation de séjour à M. A______ et a prononcé son renvoi de Suisse.

En substance, l’intéressé n’avait pas prouvé de manière satisfaisante un séjour ininterrompu en Suisse au cours des dix dernières années. Sa situation ne répondait ainsi pas aux critères de l’opération « Papyrus ». Les conditions du cas de rigueur n’étaient pas non plus remplies, M. A______ n’ayant pas démontré une très longue durée de séjour en Suisse, ni aucun élément permettant de déroger à cette exigence. Ainsi, il n’avait pas prouvé une intégration socioculturelle particulièrement remarquable.

3.             Par jugement du 11 juillet 2022 (JTAPI/721/2022), le Tribunal administratif de première instance (ci‑après : le tribunal) a rejeté le recours interjeté par M. A______ contre la décision précitée, retenant notamment que, même s’il fallait admettre que l’intéressé avait séjourné en Suisse de manière plus ou moins ininterrompue entre 2008 et 2013, il s’était ensuite absenté durant deux longues périodes, de décembre 2013 à avril 2014, puis de septembre 2015 à mai 2016.

Ce jugement n’a pas été contesté, de sorte que la décision de l’OCPM du 11 janvier 2022 est entrée en force.

4.             Par courrier du 16 novembre 2022, l’OCPM a imparti à M. A______ un nouveau délai de départ au 16 décembre 2022 pour quitter le territoire.

5.             Par courriers datés des 7 août 2023 et 5 février 2024 et réceptionnés par l’OCPM le 8 février 2024, M. A______ a demandé la reconsidération de la décision du 11 janvier 2022.

Les justificatifs de son séjour en Suisse produits dans le cadre de sa demande initiale, en particulier pour la période de juillet 2012 à mai 2014, avaient été négligés, alors qu’ils suffisaient à eux seuls à prouver un séjour continu. Les nouveaux éléments apportés ainsi que le contexte global permettaient de démontrer la continuité de son séjour et justifiaient ainsi l’octroi d’une autorisation de séjour en sa faveur.

Étaient notamment joints une attestation des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) datée du 22 janvier 2024 mentionnant un suivi depuis le 4 novembre 2014 au sein du service de médecine de premier recours, ainsi que des décomptes de salaire pour les mois de juillet à septembre 2023.

6.             Par décision du 12 avril 2024, l’OCPM a refusé d’entrer en matière sur cette demande.

Les éléments invoqués à l’appui de la demande de reconsidération, à savoir la prise en compte des justificatifs de séjour en Suisse transmis au moment du dépôt de la demande initiale en septembre 2018, ainsi que la nouvelle attestation des HUG ne sauraient être considérés comme des faits nouveaux dans la mesure où la situation était déjà connue au moment de la décision de refus. De plus, l’attestation des HUG ne précisait pas les dates exactes des consultations depuis sa prise en charge en novembre 2014 et aucune autre preuve de séjour n’avait été transmise pour les années de séjour entre les mois de juillet 2012 et mai 2014. Enfin, selon le jugement du tribunal du 11 juillet 2022, M. A______ était arrivé en Suisse pour la première fois en 2010 pour repartir à destination du Brésil à une date inconnue. Il était revenu en Suisse en juin 2016 pour y résider de manière continue depuis. Ainsi, il paraissait vraisemblable qu’il avait séjourné en Suisse de manière plus ou moins ininterrompue entre 2008 et 2013 pour ensuite s’absenter durant deux longues périodes entre 2013 et mai 2016. Il ne pouvait donc prétendre à un séjour continu en Suisse que depuis mai 2016.

Les arguments invoqués ne pouvaient pas être pris en considération dans la mesure où les circonstances ne s’étaient pas modifiées de manière notable depuis la décision de refus et que les conditions de l’art. 48 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10) n’étaient pas réunies.

Dès lors, l’intéressé était tenu de quitter la Suisse et de rejoindre le pays dont il possédait la nationalité ou tout autre pays où il était légalement admissible dans les 30 jours suivants l’entrée en force de la décision.

7.             Par acte du 13 mai 2024, sous la plume de son conseil, M. A______ a recouru contre cette décision auprès du tribunal en concluant principalement à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour en sa faveur. Préalablement, il sollicitait son audition, ainsi que celle de Monsieur B______ et de Madame C______. Il concluait également à la restitution de l’effet suspensif.

Il existait un intérêt privé prépondérant à la restitution de l’effet suspensif, dès lors qu’il avait passé plus de quinze ans en Suisse et ne pouvait « déraciner sa vie » au simple prétexte que l’OCPM ne tenait pas suffisamment compte de son séjour et de sa situation.

Au fond, les circonstances s’étaient modifiées de manière notable : son séjour s’était prolongé et son intégration également. Les nouvelles pièces présentées à l’OCPM justifiaient d'entrer en matière sur sa demande de reconsidération. Séjournant de manière continue en Suisse depuis 2007, soit depuis plus de quinze ans, les conditions du cas de rigueur étaient remplies et sa demande initiale aurait dû être traitée sous l’égide de « l’opération Papyrus ». L’audition de M. B______ et de Mme C______ permettraient de confirmer le contenu des attestations qu’ils avaient rédigées en sa faveur. Enfin, un renvoi de Suisse était inexigible compte tenu de la présente procédure et de la restitution de l’effet suspensif sollicitée. Une telle mesure était également disproportionnée et violait sa liberté personnelle au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

À l’appui de son recours, il a notamment produit les attestations établies par M. B______ en août 2013 et par Mme C______ le 26 septembre 2018, indiquant qu’ils avaient fait appel à ses services pour des périodes couvrant les mois de septembre à décembre 2012, février à juillet 2013 et juillet à décembre 2013, ainsi que des documents concernant une procédure pénale (P/1______) dont il faisait l’objet pour séjour et exercice d’une activité lucrative sans les autorisations nécessaires pour la période du 18 août 2022 au 2 novembre 2023, faits qu’il avait reconnus.

8.             Dans ses observations du 23 mai 2024, l’OCPM, s’est opposé à la restitution de l’effet suspensif et a conclu au rejet du recours. Il a produit son dossier.

Le recourant, qui faisait l’objet d’une décision de refus d’autorisation de séjour et de renvoi entrée en force de chose jugée, ne bénéficiait d’aucun statut légal en Suisse. Il n’avait en outre pas démontré d’intérêt privé prépondérant justifiant l’octroi de mesures provisionnelles, étant rappelé que la durée du séjour et l’évolution professionnelle résultaient notamment du fait qu’il ne s’était pas conformé à son obligation de quitter la Suisse fixée au 16 décembre 2022.

Sur le fond, le recourant se fondait une nouvelle fois sur un document, établi au nom de Mme C______, produit dans le cadre de la procédure initiale et discuté par le tribunal. Quant à l’attestation des HUG, force était de constater que ce document ne constituait pas un fait nouveau dans la mesure où il aurait pu (et dû) être apporté dans le cadre de la demande initiale.

9.             Par courrier du 31 mai 2024, le recourant a persisté dans ses conclusions, soulignant que l’objet du recours était de constater que les titres produits dans le cadre de sa demande initiale avaient été refusés et que son séjour avait donc mal été calculé. L’effet suspensif se justifiait pour analyser l’entrée en matière sur sa demande de reconsidération et pour préserver ses intérêts privés en Suisse.

10.         Par décision du 13 juin 2024, le tribunal a constaté que la demande d’effet suspensif était sans objet, dès lors que le délai de départ imparti au recourant n’était pas défini par un terme fixe, mais ne commencerait à courir qu’une fois la décision litigieuse entrée en force (DITAI/350/2024).

11.         Invité à répliquer sur le fond, le recourant n’a pas donné suite dans le délai imparti par le tribunal.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l’office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d’étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Le recourant sollicite son audition et celle de deux témoins, à savoir M. B______ et Mme C______, afin qu’ils confirment le contenu des attestations qu’ils ont rédigées en sa faveur, produites dans le cadre de la procédure initiale pour prouver son séjour en Suisse.

4.             Tel que garanti par les art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 484 consid. 2.1 ; 138 I 154 consid. 2.3.2 ; 137 I 195 consid. 2.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_472/2014 du 3 septembre 2015 consid. 4.1 ; ATA/80/2016 du 26 janvier 2016 consid. 2 ; ATA/134/2015 du 3 février 2015 ; ATA/66/2015 du 13 janvier 2015).

Ce droit ne s’étend toutefois qu’aux éléments pertinents pour décider de l’issue du litige et le droit de faire administrer des preuves n’empêche pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3 ; 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_842/2014 du 17 février 2015 consid. 6.2 ; 2C_597/2013 du 28 octobre 2013 consid. 5.3 ; 1C_272/2010 du 16 mars 2011 consid. 2.5 ; ATA/158/2016 du 23 février 2016 consid. 2a).

Par ailleurs, ce droit ne confère pas celui d’être entendu oralement, ni celui d’obtenir l’audition de témoins (art. 41 in fine LPA ; ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1 ; 125 I 209 consid. 9b ; 122 II 464 consid. 4c ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_901/2014 du 27 janvier 2015 consid. 3 ; 8C_8/2012 du 17 avril 2012 consid. 1.2).

5.             En l’espèce, comme il sera vu ci-dessous, les faits que le recourant entend prouver par l’audition des témoins ne sont pas pertinents pour l’issue du litige. Pour le surplus, le tribunal estime que le dossier contient les éléments suffisants et nécessaires, tels qu’ils ressortent des écritures des parties, des pièces produites et du dossier de l’autorité intimée, pour statuer sur le litige, de sorte qu’il n’apparaît pas utile de procéder à l’audition du recourant, lequel a eu la possibilité de faire valoir ses arguments dans le cadre de son recours et de produire tout moyen de preuve utile en annexe à ses écritures.

Par conséquent, les mesures d’instructions sollicitées, en soi non obligatoires, seront rejetées.

6.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

7.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

8.             L’objet du litige concerne la décision prise par l’autorité intimée le 12 avril 2024, refusant d’entrer en matière sur la demande par laquelle le recourant a sollicité la reconsidération de la décision rendue par cette même autorité le 11 janvier 2022.

9.             Selon l’art. 48 al. 1 LPA, les demandes en reconsidération de décisions prises par les autorités administratives sont recevables lorsqu’un motif de révision au sens de l’article 80 let. a et b LPA existe (let. a) ou lorsque les circonstances se sont modifiées dans une mesure notable depuis la première décision (let. b).

Aux termes de l’art. 80 LPA, auquel renvoie l’art. 48 al. 1 let. a LPA, il y a lieu à révision d’une décision judiciaire lorsqu’il apparaît, dans une affaire réglée par une décision définitive, que la décision a été influencée par un crime ou un délit établi par une procédure pénale ou d’une autre manière (let. a), ou qu’il existe des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (let. b).

10.         L’art. 80 let. b LPA, vise uniquement les faits et moyens de preuve qui existaient au moment de la première procédure, mais n’avaient alors pas été soumis au juge (faits nouveaux « anciens » ; ATA/539/2020 du 29 mai 2020 consid. 5b). Sont « nouveaux » au sens de cette disposition les faits qui, survenus à un moment où ils pouvaient encore être allégués dans la procédure principale, n’étaient pas connus du requérant malgré toute sa diligence (ATF 134 III 669 consid. 2.2 ; 134 IV 48 consid. 1.2). Ces faits nouveaux doivent en outre être importants, c’est-à-dire de nature à modifier l’état de fait qui est à la base de l’arrêt entrepris et à conduire à un jugement différent en fonction d’une appréciation juridique correcte (ATF 134 III 669 consid. 2.2 ; 134 IV 48 consid. 1.2 ; 118 II 199 consid. 5). Les preuves, quant à elles, doivent servir à prouver soit des faits nouveaux importants qui motivent la révision, soit des faits qui étaient certes connus lors de la procédure précédente, mais qui n’avaient pas pu être prouvés, au détriment du requérant. Si les nouveaux moyens sont destinés à prouver des faits allégués antérieurement, le requérant doit aussi démontrer qu’il ne pouvait pas les invoquer dans la précédente procédure. Une preuve est considérée comme concluante lorsqu’il faut admettre qu’elle aurait conduit l’autorité administrative ou judiciaire à statuer autrement, si elle en avait eu connaissance, dans la procédure principale. Ce qui est décisif, c’est que le moyen de preuve ne serve pas à l’appréciation des faits seulement, mais à l’établissement de ces derniers (ATF 134 IV 48 consid. 1.2 ; ATA/1335/2015 du 15 décembre 2015 consid. 3c ; ATA/866/2015 du 25 août 2015 consid. 6b ; ATA/294/2015 du 24 mars 2015 consid. 3c).

11.         Quant à l’art. 48 al. 1 let. b LPA, il faut que la situation du destinataire de la décision se soit notablement modifiée depuis la première décision. Il faut entendre par là des faits nouveaux « nouveaux » (vrais nova), c’est-à-dire survenus après la prise de la décision litigieuse, qui modifient de manière importante l’état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l’autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause (ATA/1620/2019 du 5 novembre 2019 consid. 3a ; ATA/159/2018 du 20 février 2018 consid. 3a). Pour qu’une telle condition soit réalisée, il faut que survienne une modification importante de l’état de fait ou des bases juridiques, ayant pour conséquence, malgré l’autorité de la chose jugée rattachée à la décision en force, que cette dernière doit être remise en question (ATA/1239/2020 du 8 décembre 2020 consid. 3b ; ATA/539/2020 du 29 mai 2020 consid. 4b ; ATA/1244/2019 du 13 août 2019 consid. 5 ; ATA/159/2018 du 20 février 2018 consid. 3a).

12.         L’existence d’une modification notable des circonstances au sens de l’art. 48 al. 1 let. b LPA doit être suffisamment motivée, en ce sens que l’intéressé ne peut pas se contenter d’alléguer l’existence d’un changement notable de circonstances, mais doit expliquer en quoi les faits dont il se prévaut représenteraient un changement notable des circonstances depuis la décision entrée en force ; à défaut, l’autorité de première instance n’entre pas en matière et déclare la demande irrecevable (ATA/573/2013 du 28 août 2013 consid. 4). De plus, la charge de la preuve relative à l’existence d’une situation de réexamen obligatoire d’une décision en force incombe à celui qui en fait la demande. Cela implique qu’il produise d’emblée devant l’autorité qu’il saisit les moyens de preuve destinés à établir les faits qu’il allègue (ATA/291/2017 du 14 mars 2017 consid. 4).

13.         Saisie d’une demande de réexamen, l’autorité doit procéder en deux étapes : elle examine d’abord la pertinence du fait nouveau invoqué, sans ouvrir d’instruction sur le fond du litige, et décide ou non d’entrer en matière. Un recours contre cette décision est ouvert, le contentieux étant limité uniquement à la question de savoir si le fait nouveau allégué doit contraindre l’autorité à réexaminer la situation (ATF 117 V 8 consid. 2a ; 109 Ib 246 consid. 4a ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_172/2013 du 21 juin 2013 consid. 1.4 ; 2C_504/2013 du 5 juin 2013 consid. 3 ; 2C_349/2012 du 18 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1239/2020 du 8 décembre 2020 consid. 3d). Ainsi, dans la mesure où la décision attaquée ne porte que sur la question de la recevabilité de la demande de réexamen, le recourant ne peut que contester le refus d’entrer en matière que l’autorité intimée lui a opposé, mais non invoquer le fond, à savoir l’existence des conditions justifiant l’octroi d’une autorisation de séjour, des conclusions prises à cet égard n’étant pas recevables (cf. ATF 126 II 377 consid. 8d ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_115/2016 du 31 mars 2016 consid. 5 ; 2C_172/2013 du 21 juin 2013 consid. 1.4 ; 2C_504/2013 du 5 juin 2013 consid. 3).

Si la juridiction de recours retient la survenance d’une modification des circonstances, elle doit renvoyer le dossier à l’autorité intimée, afin que celle-ci le reconsidère (cf. Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, n. 2148), ce qui n’impliquera pas nécessairement que la décision d’origine sera modifiée (cf. Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1429 p. 493).

Ainsi, ce n’est pas parce qu’il existe un droit à un nouvel examen de la cause que l’étranger peut d’emblée prétendre à l’octroi d’une nouvelle autorisation. Les raisons qui ont conduit l’autorité à révoquer, à ne pas prolonger ou à ne pas octroyer d’autorisation lors d’une procédure précédente ne perdent pas leur pertinence. L’autorité doit toutefois procéder à une nouvelle pesée complète des intérêts en présence, dans laquelle elle prendra notamment en compte l’écoulement du temps. Il ne s’agit cependant pas d’examiner librement les conditions posées à l’octroi d’une autorisation, comme cela serait le cas lors d’une première demande d’autorisation, mais de déterminer si les circonstances se sont modifiées dans une mesure juridiquement pertinente depuis la révocation de l’autorisation, respectivement depuis le refus de son octroi ou de sa prolongation (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_203/2020 du 8 mai 2020 consid. 4.3 ; 2C_176/2019 du 31 juillet 2019 consid. 7.2 ; 2C_883/2018 du 21 mars 2019 consid. 4.4 ; 2C_556/2018 du 14 novembre 2018 consid. 3 ; 2C_198/2018 du 25 juin 2018 consid. 3.3).

14.         Selon la jurisprudence rendue en matière de police des étrangers, le simple écoulement du temps entre les décisions des autorités ne constitue pas un motif justifiant une reconsidération (arrêts du Tribunal fédéral 2C_38/2008 du 2 mai 2008 consid. 3.4 ; 2A.180/2000 du 14 août 2000 consid. 4c ; cf. aussi arrêt 2A.271/2004 du 7 octobre 2004 consid. 5 et 6; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-1545/2008 du 8 juillet 2008 consid. 5 ; C-7483/2006 du 19 juin 2007 consid. 6 ; C-1798/2006 du 15 juin 2007 consid. 6 ; C-273/2006 du 25 avril 2007 consid. 5.3). Autrement dit, on ne saurait voir dans le simple écoulement du temps et dans une évolution normale de l’intégration en Suisse une modification des circonstances susceptibles d’entraîner une reconsidération de la décision incriminée (cf. not. arrêts du Tribunal administratif fédéral F-5003/2019 du 6 avril 2020 consid. 4.3 ; F-2581/2017 du 3 septembre 2018 consid. 3.4 ; F-2638/2017 du 9 novembre 2017 consid. 5.3). Le fait d’invoquer des faits nouveaux résultant pour l’essentiel de l’écoulement du temps, que le recourant a largement favorisé, peut d’ailleurs être reconnu comme un procédé dilatoire (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2A.271/2004 du 7 octobre 2004 consid. 3.3).

Ainsi, bien que l’écoulement du temps et la poursuite d’une intégration socio-professionnelle constituent des modifications des circonstances, ces éléments ne peuvent pas être qualifiés de notables au sens de l’art. 48 al. 1 let. b LPA, lorsqu’ils résultent uniquement du fait que l’étranger ne s’est pas conformé à une décision initiale malgré son entrée en force (ATA/1239/2020 du 8 décembre 2020 consid. 3b ; ATA/539/2020 précité consid. 4b ; ATA/1244/2019 13 août 2019 consid. 5b). Le fait d’invoquer des faits nouveaux résultant pour l’essentiel de l’écoulement du temps, que le recourant a largement favorisé, peut d’ailleurs être reconnu comme un procédé dilatoire (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2A.271/2004 du 7 octobre 2004).

15.         En l’espèce, il convient de rappeler que la décision querellée constitue un refus d’entrer en matière sur la demande de reconsidération du recourant. Le contrôle juridictionnel effectué par le tribunal porte donc seulement sur la question de savoir si c’est à juste titre que l’autorité intimée a estimé ne pas être en présence d’une modification notable des circonstances au sens de l’art. 48 al. 1 let. b LPA ou d’un motif de révision au sens de l’art. 80 let. b LPA, de sorte qu’il ne saurait entrer en matière sur la conclusion du recourant tendant à l’octroi d’une autorisation de séjour en sa faveur.

En l’occurrence, s’agissant des nouvelles circonstances qui seraient intervenues depuis la décision du 11 janvier 2022 refusant de lui octroyer une autorisation de séjour pour cas de rigueur – y compris sous l’angle de l’opération « Papyrus » – et le renvoyant de Suisse, le recourant met en avant le fait que son séjour en Suisse, de même que son intégration se sont poursuivis. Or, ces éléments sont uniquement dus à l’écoulement du temps et au non-respect de la décision de refus et de renvoi prononcée à son encontre le 11 janvier 2022, devenue exécutoire après avoir été contestée en vain devant le tribunal de céans.

Le recourant se prévaut également des justificatifs de séjour transmis dans le cadre de sa demande initiale et de moyens de preuve nouveaux censés démontrer la longue durée de son séjour en Suisse. S’agissant des premiers documents, et en particulier les attestations établies par M. B______ et par Mme C______, ils ont déjà été examinés par le tribunal dans son jugement du 11 juillet 2022 (JTAPI/721/2022), lequel, procédant à une appréciation d’ensemble des éléments du dossier, a retenu que même s’il fallait admettre que l’intéressé avait séjourné en Suisse de manière plus ou moins ininterrompue entre 2008 et 2013, il s’était ensuite absenté durant deux longues périodes, de décembre 2013 à avril 2014, puis de septembre 2015 à mai 2016 (cf. consid. 15 du jugement précité), de sorte qu’il pouvait prétendre à un séjour continu en Suisse que depuis mai 2016. Le tribunal relèvera à cet égard que l’audition de M. B______ et de Mme C______ n’aurait pas permis d’infirmer ce qui précède, dès lors que les périodes couvertes par les attestations qu’ils ont rédigées sont antérieures aux deux périodes d’absence susmentionnées. S’agissant de l’attestation des HUG du 22 janvier 2024, comme le relève l’autorité intimée, si elle indique que le recourant est suivi au service de médecine de premier recours depuis le 4 novembre 2014, elle ne précise pas les dates des consultations depuis cette date. Ce document est donc insuffisant à établir la présence du recourant à Genève durant la période concernée. Au demeurant, il ne s’agit pas là d’un fait nouveau dès lors qu’il aurait pu être invoqué dans le cadre de la procédure initiale. Quant à la procédure pénale pour séjour illégal et travail sans autorisation ouverte à l’encontre du recourant, laquelle concerne une période postérieure à la précédente procédure, le tribunal ne voit pas en quoi elle constituerait un fait important commandant un réexamen obligatoire de la situation de ce dernier, étant relevé que cette procédure a fait l’objet d’une ordonnance de classement.

Le recourant invoque encore le fait que l’exécution de son renvoi serait inexigible, disproportionnée et contraire à la CEDH. Il ne fait valoir toutefois pas de motif de révision ni de changement notable de la situation qui ferait obstacle audit renvoi, respectivement qui serait de nature à modifier l’appréciation juridique du dossier à laquelle ont procédé l’OCPM puis le tribunal.

16.         Au vu de ce qui précède, le tribunal retient qu’il n’existe pas de motif de révision ni modification notable des circonstances depuis le prononcé de la décision du 11 janvier 2022. Il en résulte que, sauf à aboutir à un résultat qu’il s’agit d’éviter, à savoir permettre à un justiciable de remettre sans cesse en cause une décision entrée en force, l’autorité intimée était fondée à refuser d’entrer en matière sur la demande de reconsidération formée par le recourant.

17.         Le recours sera ainsi rejeté.

18.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 700.-, qui tient compte notamment de la décision incidente rendue dans la présente procédure ; il est partiellement couvert par l’avance de frais de même CHF 500.- versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

19.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d’État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 13 mai 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 12 avril 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 700.-, lequel est partiellement couvert par l’avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d’État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière