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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/16796/2025

ACPR/906/2025 du 04.11.2025 sur OTMC/3074/2025 ( TMC ) , REFUS

Descripteurs : RISQUE DE FUITE;RISQUE DE COLLUSION
Normes : CPP.221

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/16796/2025 ACPR/906/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 4 novembre 2025

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de Champ-Dollon, représenté par Me B______, avocat,

recourant,

 

contre l’ordonnance de prolongation de la détention provisoire rendue le 3 octobre 2025 par le Tribunal des mesures de contrainte,

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9,
1204 Genève, case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.           Par acte expédié le 16 octobre 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 3 octobre 2025, notifiée le 6 suivant, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a prolongé sa détention provisoire jusqu’au 5 janvier 2026.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l’annulation de cette ordonnance et à sa mise en liberté immédiate, assortie, le cas échéant, des mesures de substitution qu’il propose.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______ a été interpellé le 24 juillet 2025 et sa mise en détention provisoire ordonnée par le TMC le 27 juillet 2025, prolongée ensuite jusqu'au 5 octobre 2025.

b. L’intéressé est prévenu de viol aggravé (art. 190 ch. 2 et 3 CP), contrainte sexuelle aggravée (art. 189 ch. 2 et 3 CP), contrainte (art. 181 CP) ainsi que d'injure (art. 177 CP) pour avoir, dans la nuit du 16 au 17 juillet 2025, à son domicile sis chemin 1______ no. ______, [code postal] C______ [GE] :

- empêché D______, née en 1998, de quitter l'appartement, en se positionnant devant la porte de celui-ci, puis l'avoir embrassée de force, étant relevé qu'elle avait expressément déclaré vouloir partir et qu'ils n'entretiendraient pas de rapport sexuel, ce qu'elle a répété à réitérées reprises au cours des événements;

- serré le cou de l’intéressée avec les deux mains en l'étranglant, en serrant au point qu'elle ne puisse plus émettre de son et suffoque, l'amenant dans la chambre, puis la plaquant contre le lit, ne relâchant brièvement la pression que pour lui permettre de respirer;

- déshabillé la jeune femme, puis lui avoir imposé une pénétration pénienne vaginale, sans préservatif;

- giflé celle-ci à plusieurs reprises pendant le rapport, tout en continuant à serrer son cou d'une main;

- retourné l’intéressée et lui avoir donné de nombreuses et violentes fessées, tout en continuant à la pénétrer;

- à nouveau retourné celle-ci, puis avoir posé ses genoux sur ses clavicules, avant de mettre son pénis dans sa bouche et la contraindre à lui prodiguer une fellation, en la tenant par les cheveux, afin qu'elle fasse des « va-et-vient », puis avoir enfoncé son pénis violemment et profondément dans sa gorge, la faisant vomir, étant relevé qu'il l'a contrainte à avaler son vomi en plaçant sa main devant sa bouche;

- après s'être retiré, s'être masturbé et avoir éjaculé sur elle;

- traité la jeune femme de « salope », de « bitch » et de « whore »;

étant précisé qu'à la suite de ces faits, D______ a présenté de multiples lésions constatées par le médecin légiste et qu'elle a déposé plainte pénale pour ces faits.

c.a. À teneur du rapport d'arrestation et des déclarations d’D______ à la police, celle-ci avait rencontré le prévenu le jour des faits, à un concert au parc de la Grange. Ils avaient ensuite continué la soirée [à l’établissement] E______, où ils avaient bu un verre et rencontré d’autres personnes avec lesquelles ils avaient discuté. Ensuite, tout le groupe avait continué la soirée au domicile du prévenu, sur proposition de ce dernier. La plaignante a expliqué qu'au bout d'une heure environ, tout le monde avait commencé à se dire qu’il fallait rentrer et s’était mis en mouvement. Elle s'était toutefois retrouvée seule avec le prévenu car elle cherchait sa cigarette électronique, qu'elle avait égarée. À ce moment-là, elle avait exprimé son souhait de partir. Au moment où elle allait lui dire au revoir, le prévenu lui avait demandé si elle voulait qu'ils demeurassent en contact, ce à quoi elle avait répondu qu’elle n’était pas intéressée à le revoir, ce que celui-ci avait pris à la rigolade. Il l’avait alors embrassée par surprise et l’avait empêchée de sortir de chez lui, d'abord en faisant mine de plaisanter, puis en l'empêchant vraiment de sortir. Elle l’avait repoussé lorsqu’il eut tenté encore une fois de l’embrasser avec la langue. Il avait alors commencé à l’étrangler et elle avait eu l’impression que cela l’excitait. Il l’avait ensuite emmenée de force dans la chambre, sans relâcher son étreinte, lui serrant le cou. Il avait relâché la pression lorsqu'il avait vu ses yeux exorbités, puis avait resserré à nouveau, et ce plusieurs fois de suite. Il l’avait alors pénétrée, frappée au visage et sur les fesses, et lui avait appuyé avec ses genoux sur ses clavicules pour lui enfoncer son pénis violemment et profondément dans la bouche, la tenant par les cheveux pour lui faire faire des va-et-vient. Elle avait vomi et il l’avait forcée à ravaler son vomi en obstruant sa bouche avec sa main pour l'empêcher de recracher. Enfin, il avait éjaculé sur le haut de son corps et son visage.

D______ a présenté à la suite de ces faits de multiples lésions constatées par le médecin légiste, soit des ecchymoses au niveau de la joue gauche, au cou, à la mandibule et sur les deux fesses, compatibles avec son récit. Elle a également fait l'objet d'un constat de lésions traumatiques.

Il ressort en outre du rapport d'arrestation que le prévenu a fait l'objet d'une main courante déposée en juin 2021 par une ex-compagne, qui avait expliqué qu’il n'avait pas accepté leur rupture, l'avait menacée en lui disant que des personnes allaient venir la frapper, et avait fait en sorte de pouvoir géolocaliser son téléphone portable afin de pouvoir la croiser « par hasard », étant précisé qu'elle n'avait finalement pas déposé plainte.

c.b. Entendu par la police, le prévenu a reconnu avoir entretenu avec D______ un rapport sexuel consenti avec violence, notamment étranglements, gifles et frappes sur les fesses, soutenant avoir agi à la demande de la plaignante, lui-même n'étant pas coutumier de ces pratiques.

c.c. Lors de son audition par le Ministère public, le prévenu a maintenu ses précédentes déclarations, émettant l'hypothèse que la partie plaignante avait déposé plainte pénale de peur qu'il ne le fasse lui-même, car il avait trouvé le rapport « anormal ».

Lorsqu’il était au [quartier de] F______ avec la plaignante, ils n’avaient rencontré personne et personne d’autre qu’elle n’était venu à son domicile le soir en question.

d. Lors de l'audience de confrontation du 22 août 2025, D______ a maintenu ses déclarations et fourni le nom des proches auprès desquels elle s'était confiée immédiatement après les faits.

e. L’ex-compagne du prévenu a également été entendue par la police, sur mandat du Ministère public. Elle a notamment expliqué que, au terme de leur relation, l’intéressé avait changé de comportement, l’avait géolocalisée de manière à feindre des rencontres fortuites, s'étant même vraisemblablement déplacé jusque dans le sud de la France pour la voir, l’avait menacée d’envoyer des « mecs de G______ [France] » pour lui casser les jambes car elle ne voulait pas se remettre avec lui, et l’avait « tellement traumatisée durant cette période », qu’elle avait eu peur de lui et de ses accès de colère. Elle a toutefois indiqué que leurs rapports sexuels n’avaient pas été violents, qu’il n’avait jamais été violent physiquement ni ne lui avait manqué de respect.

f. L’analyse du téléphone du prévenu a mis en lumière trois vidéos contenant des actes pouvant potentiellement être caractérisés comme violents et une photo sur laquelle on peut voir une main d’adulte à proximité des parties génitales d’une jeune enfant (cf. rapport de renseignements du 29 août 2025 et clé USB figurant au dossier).

g.a. À teneur d’une conversation téléphonique du 24 août 2025, soumise à la censure, entre le prévenu et son frère I______, traduite par un interprète, le prévenu « veut que le frère aille voir l'avocat B______ afin d'examiner avec lui tous les détails. Le prévenu souhaite aussi que son frère discute à sa manière avec toute autre éventuelle personne, proche de… (NDIP: le prévenu ne précise pas) car à ses yeux, on essaye de lui coller une sale et grave affaire ».

g.b. À l’audience du 29 août 2025 devant le TMC – en lien avec une demande de mise en liberté formulée par le prévenu – ce dernier a indiqué, sur question de son conseil, avoir demandé à son frère d’aller voir son avocat pour qu’il lui explique ce qui l’attendait. Il souffrait énormément de sa détention. Sa mère était très malade à cause de lui et il voulait que son avocat puisse la rassurer.

h. À l’audience du 10 octobre 2025, le Ministère public a entendu comme témoins J______ et K______.

Le premier, qui a entretenu des relations intimes avec la plaignante, a indiqué que cette dernière ne lui avait jamais demandé de sexe violent. Selon lui, elle n’aurait jamais pu mentir sur le déroulement des faits, ce qu’a confirmé le second témoin.

À l’issue de l’audience, A______ a été prévenu de pornographie (art. 197 CP) pour avoir détenu une image à caractère pédopornographique montrant une main à proximité du sexe d’une enfant prépubère.

i. Par ordonnance du 17 octobre 2025, le TMC a rejeté la demande de mise en liberté provisoire du prévenu, au motif que les charges étaient graves et suffisantes, que le risque de fuite était concret, que le risque de collusion demeurait tangible vis-à-vis de la plaignante et des témoins, qu’il existait un risque de récidive et qu’aucune mesure de substitution n’était propre à pallier ces risques.

j. Le prévenu, né en 1994 à H______ (Liban), est ressortissant libano-suisse et est célibataire. Il n’a pas d’antécédents judiciaires connus en Suisse.

Il a indiqué travailler depuis une année et quelques mois comme technicien à L______ [institution internationale], à un taux de 30 à 40%, pour un salaire de CHF 300.- à 700.- par mois, et percevoir l'aide de l'Hospice général, qui lui verse CHF 1'200.- par mois et lui paie son assurance-maladie et son loyer.

C.            Dans son ordonnance querellée, le TMC considère que les charges sont graves et suffisantes, eu égard aux déclarations circonstanciées et crédibles de la plaignante et au constat médical indiquant qu'elle présentait des lésions compatibles avec sa version des faits. Les explications du prévenu selon lesquelles il aurait agi ainsi à la demande de la plaignante n'emportaient pas conviction, étant rappelé que les parties venaient de se rencontrer, que la plaignante n'avait aucun motif de l'accuser faussement et qu’elle avait maintenu sa version des faits lors de l’audience de confrontation. Même à supposer que la plaignante ait fait part au prévenu de son intérêt pour du sexe violent – ce qui ne ressortait pas du dossier –, cela ne saurait justifier le déchaînement de violence d'une intensité très importante auquel s'était livré le prévenu sur elle. Les dénégations du prévenu n’étaient pas crédibles, en particulier sa version selon laquelle la partie plaignante avait déposé plainte pénale de peur qu'il ne le fasse lui-même. Que l'ex-compagne du prévenu n’ait pas mentionné de violences physiques lors des rapports sexuels entretenus n’affaiblissait pas les charges à l’égard du prévenu, étant précisé qu’elle avait surtout indiqué avoir été traumatisée au moment de leur séparation et qu’elle avait peur de lui et de ses accès de colère. L’instruction n’avait pas amoindri les charges, au contraire, dans la mesure où une image à caractère pédopornographique avait été découverte dans le téléphone portable du prévenu. Ainsi, une reconsidération en faveur du prévenu de la suffisance des charges ne se justifiait pas.

L’instruction se poursuivait, le Ministère public devant entendre le prévenu afin d’éclaircir les propos qu’il avait tenus à son frère. Le Ministère public devait également entendre, le 10 octobre 2025, les proches auprès desquels la partie plaignante s’était confiée immédiatement après les faits (soit les témoins J______, K______, M______ et N______). Il devait déterminer si des personnes s’étaient rendues au domicile du prévenu avec les parties et, le cas échéant, les identifier et les auditionner. Il était en outre dans l’attente du constat de lésions traumatiques établi à la suite de la consultation de la partie plaignante aux urgences gynécologiques ainsi que des données des ordinateurs et autres appareils électroniques saisis au domicile du prévenu, eu égard à la découverte d’une image pédopornographique dans son téléphone. Enfin, il devrait déterminer la suite de la procédure, notamment si une expertise psychiatrique devait être ordonnée.

Le risque de fuite était concret, en dépit du fait que le prévenu était de nationalité suisse et domicilié à Genève, où vivaient également ses parents, deux de ses frères et une de ses sœurs, dès lors que celui-ci, également de nationalité libanaise, avait vécu au Liban jusqu'en 2018 (pays qu'il avait quitté cette année-là en raison de la situation difficile du pays) et avait trois sœurs vivant à l'étranger, de sorte qu'il pourrait être tenté de fuir la Suisse pour se rendre au Liban ou dans un autre pays, considérant l'ampleur de la peine menace et concrètement encourue pour les faits, très graves, qui lui sont reprochés.

Le risque de collusion ne pouvait être exclu vis-à-vis de la partie plaignante, quand bien même l’audience de confrontation avait eu lieu, au vu des dénégations du prévenu et de leurs versions diamétralement contradictoires, sous forme de pressions destinées à influencer ses futures déclarations. En dehors de la question du consentement, le risque de collusion perdurait sur la question de la présence, ou non, de personnes au domicile du prévenu juste avant les faits, élément important dès lors qu'il permettrait de vérifier la crédibilité des parties. Il existait un risque de collusion à l’égard de ces tiers, mais aussi vis-à-vis des premières personnes ayant recueilli les déclarations de la partie plaignante, étant précisé qu'il serait aisé au prévenu d'obtenir leurs coordonnées en consultant le dossier. Ce risque était d'autant plus concret que le prévenu avait sollicité de son frère qu’il aille parler « à sa manière » à des personnes, le Ministère public devant prochainement tenter de déterminer si ces propos étaient destinés à influencer des personnes à entendre. Enfin, le risque de collusion existait en lien avec les éléments qui pourraient découler de l'analyse du contenu des appareils électroniques du prévenu, qui était en cours et pourrait justifier d’autres auditions, comme celles de certaines partenaires sexuelles du prévenu.

Il existait un risque de récidive concret de nouveaux actes de violence physique et sexuelle envers autrui, eu égard aux faits gravissimes et inexplicables reprochés au prévenu dans la présente affaire. Quand bien même l’intéressé n’avait aucun antécédent, il avait été signalé à la police par son ex-compagne en 2021 pour un comportement harcelant, dans un contexte de séparation qu'il n'acceptait pas, ce qui tendait à corroborer une tendance chez lui à vouloir passer outre le refus d'une femme. Aucun élément allant dans le sens d’une diminution de ce risque n’était intervenu depuis la dernière ordonnance du TMC. Enfin, au vu de la nature des faits reprochés au prévenu et de la présence d'une image pédopornographique dans son téléphone, il convenait d'attendre le résultat de l'analyse de ses appareils électroniques afin de pouvoir affiner cas échéant l'appréciation de ce risque.

La caution de CHF 4'000.- proposée par le prévenu pour pallier le risque de fuite était largement insuffisante. L’autorité ne disposait au demeurant pas d'informations suffisantes sur la situation personnelle et patrimoniale de l’intéressé qui lui permettraient de déterminer si le versement d'une caution pourrait constituer une mesure de substitution à la détention, et, le cas échéant, pour quel montant. L'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif, l'obligation de déposer ses papiers d'identité, l'obligation de porter un bracelet électronique et les assignations à une zone déterminée et à résidence n’étaient pas des mesures aptes à pallier suffisamment le risque de fuite, à ce stade de l'instruction. Par ailleurs, il était notoire qu’il n'y avait nullement besoin d'être porteur d'un passeport ou d'une carte d'identité pour quitter le territoire suisse par voie terrestre. Enfin, une interdiction de contact, de quelque manière que ce soit, avec D______ et d’autres personnes n'était pas suffisante pour pallier le risque de collusion, vu son intensité à ce stade de l'instruction, l'engagement du prévenu en ce sens ne présentant aucune garantie particulière et ne pouvant concrètement être vérifié.

Enfin, la durée de la prolongation de la détention provisoire respectait le principe de la proportionnalité au vu des faits reprochés au prévenu et de la peine concrètement encourue en cas de condamnation.

D.           a. À l’appui de son recours, A______, s’il déclare contester les charges, considère que cette question peut rester ouverte, dès lors que les risques de fuite, collusion et réitération devaient être écartés.

S’agissant du risque de fuite, il était de nationalité suisse et n’avait aucun lien avec un autre pays, étant précisé qu’il avait quitté le Liban en raison de sa situation politique, laquelle n’avait fait que se détériorer depuis lors. Le Liban n’était pas un pays limitrophe de la Suisse, de sorte qu’une simple inscription sur des registres internationaux suffiraient à pallier le risque qu’il puisse matériellement se rendre dans ce pays. Ce risque était exclu compte tenue de la réalité du pays. Ses deux frères et ses parents vivaient en Suisse, tandis que ses trois sœurs – avec lesquelles il n’avait pas une relation de proximité aussi étroite qu’avec les prénommés – vivaient à l’étranger, dans un pays dans lequel il ne pourrait bénéficier d’aucune protection. Il n’existait aucun indice concret qu’il aurait pour projet de quitter la Suisse pour se soustraire à la procédure pénale, étant précisé qu’il avait collaboré à l’enquête en fournissant les codes d’accès de tous ses appareils électroniques et aiguillé les enquêteurs sur les dispositifs de vidéo-surveillance installés à son domicile [aucun élément n’en résultant n’a toutefois pu être recueilli et exploité par la police]. Subsidiairement, ce risque pouvait être pallié par le dépôt de ses documents d’identité et une inscription au RIPOL par exemple. Il propose par ailleurs une caution de CHF 10'000.-, qu’il pourrait réunir grâce à ses proches, sa situation financière étant précaire.

Enfin, il propose l’obligation de déférer à toute convocation, l’obligation de se présenter à un poste de police une fois par semaine, l’interdiction de quitter le territoire suisse, l’assignation dans une zone déterminée et l’obligation de se présenter régulièrement à un service administratif.

S’agissant du risque de collusion, ni le Ministère public ni le TMC ne relevaient un quelconque comportement de sa part propre à suggérer qu’il pourrait entraver l’instruction, hormis la retranscription d’une conversation téléphonique avec son frère. Or, il avait indiqué au TMC, le 29 août 2025, qu’il souhaitait que son conseil puisse rassurer sa mère. Il ne voulait aucun mal à la plaignante et faisait confiance à la justice pour « démêler le vrai du faux ». Une interdiction de contact suffirait, le cas échéant, à pallier ce risque. Des témoins avaient été auditionnés le 10 octobre 2025 et seraient tout à fait capables, à l’instar de la plaignante, de s’adresser à la police au cas où il chercherait à les contacter. Enfin, son ex-compagne avait été entendue et il était excessif de le maintenir en détention au motif que d’éventuelles autres partenaires sexuelles devraient être entendues.

S’agissant du risque de réitération, il n’avait aucun antécédent judiciaire. Le comportement harcelant à l’égard de son ex-compagne était contesté et, au demeurant, ne mettait pas en évidence une attitude violente de sa part, au contraire. Le fait qu’il aurait soi-disant eu du mal à tourner la page ne démontrait pas le moindre risque de passage à l’acte de viols aggravés. Enfin, la présomption d’image à caractère pédopornographique était arbitraire, l’image en question ne permettant pas de déterminer si la personne, dont on ne voyait que le bassin, était mineure.

Les actes d’instruction à accomplir ne nécessitaient pas la prolongation de sa détention provisoire et il ne voyait pas comment il pourrait les influencer d’une quelconque manière. Il voyait mal comment le Ministère public pourrait identifier des individus dont la plaignante disait qu’ils n’étaient connus ni d’elle ni de lui et dont lui-même niait l’existence. Quant aux personnes ayant recueilli les déclarations de la plaignante, elles n’étaient que des témoins indirects. La plaignante avait déjà été entendue à deux reprises, par la police et le Ministère public, de sorte que des témoignages indirects ne sauraient justifier sa détention. Enfin, l’expertise psychiatrique pouvait s’effectuer de manière ambulatoire.

Sous l’angle de la proportionnalité, sa détention impactait très négativement sa santé et son avenir professionnel.

b. Dans ses observations, le Ministère public conclut au rejet du recours. Les témoins entendus à ce stade corroboraient les dires de la plaignante. L’audition de K______ allait se poursuivre prochainement et d’autres témoins seraient entendus courant novembre 2025. Une expertise psychiatrique du prévenu serait également ordonnée. Il se référait au surplus à l’ordonnance du TMC du 17 octobre 2025. Enfin, la détention subie par le prévenu était très largement inférieure à la peine menace concrètement encourue.

c. Le TMC maintient les termes de son ordonnance, sans autre remarque.

d. Dans sa réplique, A______ constate que le Ministère public se réfère quasiment exclusivement à l’ordonnance du TMC du 17 octobre 2025, laquelle est précisément discutée dans son recours. Il persiste au surplus dans les conclusions de celui-ci.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant ne discute pas la suffisance des charges, quand bien même il déclare les contester. Partant, il n’y a pas lieu d’y revenir.

3.             Il conteste le risque de fuite.

3.1.       Conformément à l'art. 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire peut être ordonnée s'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite. Selon la jurisprudence, le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier le placement ou le maintien en détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 145 IV 503 consid. 2.2; 143 IV 160 consid. 4.3).

3.2.       En l’espèce, le recourant est de nationalités libanaise et suisse et réside à Genève depuis 2018 selon ses dires. Ses parents et ses deux frères, dont il se dit proche, vivent également ici. Si l’éventualité d’un départ du prévenu vers le Liban apparaît assez improbable, vu la situation géopolitique de ce pays, il n’apparaît pas totalement exclu qu’il cherche néanmoins à se soustraire à la justice en quittant la Suisse pour un pays tiers, eu égard à la gravité des charges pesant à son encontre et à la perspective d’une lourde condamnation, si les accusations dont il faisait l’objet devaient être retenues par l’autorité de jugement. Ses trois sœurs vivent à l’étranger, dans un pays que l’intéressé ne mentionne pas, de sorte qu’il n’est pas possible d’exclure une fuite vers celui-ci et d’apprécier si une inscription au RIPOL serait envisageable pour la pallier le cas échéant. Le prévenu, qui est principalement à la charge de l’Hospice général, est de surcroît célibataire et sans charges de famille, et donc particulièrement mobile. Qu’il soutienne enfin avoir collaboré avec la justice, preuve en était qu’il avait fourni ses codes informatiques, et faire confiance à celle-ci, n’y change rien.

Partant, il existe un risque de fuite concret qu’aucune mesure de substitution n’est propre à pallier.

La caution de CHF 10'000.- désormais proposée par le prévenu apparaît clairement insuffisante au regard de la gravité des faits et ce, quand bien même elle serait fournie par ses proches, étant relevé que la situation financière de ses derniers est inconnue et qu’on ignore même s’ils seraient enclins à verser un tel montant.

L’obligation de déférer à toute convocation, le dépôt de son passeport en mains de l’autorité, l’obligation de se présenter hebdomadairement à un poste de police, l’interdiction de quitter le territoire suisse, l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif et l’assignation à une zone déterminée ne sont pas non plus des palliatifs suffisants pour contrer efficacement le risque de fuite à ce stade, étant relevé que ces mesures n’empêcheraient pas la fuite de l’intéressé mais permettraient seulement de la constater a posteriori.

Aucune autre mesure de substitution ne saurait par ailleurs entrer en ligne de compte.

4.             Le recourant conteste le risque de collusion.

4.1.       Conformément à l'art. 221 al. 1 let. b CPP, la détention provisoire ne peut être ordonnée que lorsque le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit et qu'il y a sérieusement lieu de craindre qu'il compromette la recherche de la vérité en exerçant une influence sur des personnes ou en altérant des moyens de preuve. Pour retenir l'existence d'un risque de collusion, l'autorité doit démontrer que les circonstances particulières du cas d'espèce font apparaître un danger concret et sérieux de manœuvres propres à entraver la manifestation de la vérité, en indiquant, au moins dans les grandes lignes et sous réserve des opérations à conserver secrètes, quels actes d'instruction doivent être encore effectués et en quoi la libération du prévenu en compromettrait l'accomplissement. Dans cet examen, entrent en ligne de compte les caractéristiques personnelles du détenu, son rôle dans l'infraction ainsi que ses relations avec les personnes qui l'accusent. Entrent aussi en considération la nature et l'importance des déclarations, respectivement des moyens de preuve susceptibles d'être menacés, la gravité des infractions en cause et le stade de la procédure. Plus l'instruction se trouve à un stade avancé et les faits sont établis avec précision, plus les exigences relatives à la preuve de l'existence d'un risque de collusion sont élevées (ATF 137 IV 122 consid. 4.2; 132 I 21 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_577/2020 du 2 décembre 2020 consid. 3.1).

4.2. En l’occurrence, le risque de collusion avec les témoins restants ayant recueilli les confidences de la plaignante est ténu, s’agissant de témoignages indirects. Il l’est également vis-à-vis d’éventuelles partenaires sexuelles du prévenu autres que son ex-compagne, en tant que leur identité n’est même pas établie à ce stade, tout comme vis-à-vis du groupe d’individus qui se serait rendu chez le prévenu avec la plaignante pour finir la soirée, l’identité de ces personnes n’étant connue ni de cette dernière ni du prévenu.

Le risque demeure par contre concret avec la partie plaignante, quand bien même elle a déjà été entendue et confrontée au prévenu. En effet, il existe un risque que ce dernier, compte tenu de la gravité des faits qui lui sont reprochés, cherche à user de pressions sur elle pour l’amener à modifier sa version des faits en sa faveur. Les déclarations de son ex-compagne à teneur desquelles il n’a pas hésité, au terme de leur relation, à la géolocaliser, à la suivre et à la menacer d’envoyer des « mecs de G______ [France] » pour lui casser les jambes, l’effrayant de la sorte, ne sont en effet pas de nature à rassurer sur les moyens que l’intéressé pourrait mettre en œuvre pour faire triompher sa cause et contraindre ainsi la plaignante à revenir sur ses déclarations. Dans cette optique, on peut aisément imaginer aussi que la plaignante, par crainte, n’aille alors pas voir la police.

L’interdiction de contact avec elle proposée apparaît, à cette aune, insuffisante, et on ne voit pas quelle autre mesure de substitution pourrait entrer en ligne de compte.

Enfin, il ressort d’une conversation téléphonique entre le prévenu et son frère qu’il a sollicité ce dernier pour qu’il aille parler « à sa manière » à des personnes que visiblement lui seul et son frère connaissent, ce qui laisse craindre qu’il ne cherche, par ce biais, à exercer des pressions sur des tiers et altérer ainsi la manifestation de la vérité.

5.             L’admission de ces deux risques, indiscutables, dispense l'autorité de recours d'examiner si un risque de réitération – alternatif – existe également (arrêts du Tribunal fédéral 7B_144/2025 du 24 mars 2025 consid. 3.3; 7B_188/2024 du 12 mars 2024 consid. 6.3.1 et 1B_197/2023 du 4 mai 2023 consid. 4.5).

6.             6.1. À teneur des art. 197 al. 1 et 212 al. 3 CPP, les autorités pénales doivent respecter le principe de la proportionnalité lorsqu'elles appliquent des mesures de contrainte, afin que la détention provisoire ne dure pas plus longtemps que la peine privative de liberté prévisible. Selon une jurisprudence constante, la possibilité d'un sursis, voire d'un sursis partiel, n'a en principe pas à être prise en considération dans l'examen de la proportionnalité de la détention préventive (ATF 133 I 270 consid. 3.4.2 p. 281-282; 125 I 60; arrêts du Tribunal fédéral 1B_750/2012 du 16 janvier 2013 consid. 2, 1B_624/2011 du 29 novembre 2011 consid. 3.1 et 1B_9/2011 du 7 février 2011 consid. 7.2).

6.2. En l’espèce, la durée de la détention provisoire ordonnée jusqu’au 5 janvier 2026 demeure proportionnée à la peine menace et concrète encourue si le prévenu devait être reconnu coupable des faits graves qui lui sont reprochés, étant précisé que l’instruction se poursuit en particulier avec l’analyse de ses appareils électroniques.

Que sa détention prétérite son avenir professionnel est inhérent à toute détention. Quant à l’impact de celle-ci sur sa santé, il ne constitue pas en lui-même un motif s'opposant à sa détention, les établissements pénitentiaires ayant à disposition des unités hospitalières en cas de besoin médical avéré.

7.             Le recours s'avère ainsi infondé et sera rejeté.

8.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03). En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

9.             Le recourant plaide au bénéfice d'une défense d'office.

9.1.       Selon la jurisprudence, le mandat de défense d'office conféré à l'avocat du prévenu pour la procédure principale ne s'étend pas aux procédures de recours contre les décisions prises par la direction de la procédure en matière de détention avant jugement, dans la mesure où l'exigence des chances de succès de telles démarches peut être opposée au détenu dans ce cadre, même si cette question ne peut être examinée qu'avec une certaine retenue. La désignation d'un conseil d'office pour la procédure pénale principale n'est pas un blanc-seing pour introduire des recours aux frais de l'État, notamment contre des décisions de détention provisoire (arrêt du Tribunal fédéral 1B_516/2020 du 3 novembre 2020 consid. 5.1).

9.2.       En l'occurrence, quand bien même le recourant succombe, on peut admettre que l'exercice du présent recours ne procède pas d'un abus.

L'indemnité du défenseur d'office sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Admet l’assistance judiciaire pour le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Madame Françoise SAILLEN AGAD, juge, et Monsieur Raphaël MARTIN, juge suppléant; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/16796/2025

ÉTAT DE FRAIS

 

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

900.00

 

 

Total

CHF

985.00