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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/19575/2022

ACPR/456/2024 du 17.06.2024 sur ONMMP/790/2024 ( MP ) , ADMIS/PARTIEL

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;MENACE(DROIT PÉNAL);CONTRAINTE(DROIT PÉNAL);INJURE
Normes : CPP.310; Cst; CP.180; CP.181; CP.177

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/19575/2022 ACPR/456/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 17 juin 2024

 

Entre

A______,

B______,

représentés tous deux par Me C______, avocat,

recourants,

contre les ordonnances de non-entrée en matière rendues les 15 et 16 février 2024 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 4 mars 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 15 février 2024, notifiée le 22 suivant, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte du 7 septembre 2022.

Elle conclut, sous suite de frais et dépens, à l’annulation de l'ordonnance querellée, au constat de la violation de son droit d'être entendue en tant que cette décision ne couvre pas l'intégralité des faits reprochés à D______, E______ ainsi que toute autre personne pouvant être impliquée dans les faits dénoncés (ordonnances de non-entrée en matière implicites), à ce que lesdites ordonnances de non-entrée en matière implicites soient annulées et, cela fait, à ce que la cause soit renvoyée au Ministère public pour instruction et renvoi en jugement des intéressés, pour menaces, contrainte, injures, voies de fait, voire tentative de lésions corporelles simples, voire graves.

b. Par acte expédié le 4 mars 2024, le fils de A______, B______, recourt contre l'ordonnance du 16 février 2024, notifiée le 22 suivant, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte du 7 septembre 2022.

Il prend des conclusions identiques à celles de sa mère.

c. Les recourants ont chacun versé les sûretés en CHF 800.-, soit CHF 1'600.- au total, qui leur étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ et son fils, B______, gèrent le commerce F______ sis no. ______, rue 1______ à Genève, situé à côté du café-bar G______, lequel fait l'angle avec la rue 2______.

b.a. Le 7 juillet 2022 à 19h16, D______ est entré dans le magasin de tabac précité et a effrayé A______, qui refusait de lui remettre un paquet de cigarette à crédit, lui disant notamment "tu vas voir demain", "on rigolera quand on se reverra, tu ne pourras même pas vendre un paquet de cigarettes".

b.b. Pour ces faits, la précitée a déposée plainte le jour-même et D______ a été condamné par ordonnance pénale du 18 juillet 2022 (P/3______/2022), décision qui n'a pas été contestée.

c. Une procédure pénale a en outre été ouverte sous la référence P/4______/2022, dans le cadre de laquelle D______ a déposé plainte contre B______.

Il est notamment reproché à B______ d'avoir, à Genève, le 15 juillet 2022, vers 22h55, dans les alentours de la rue 1______ no. ______, tiré dans l'œil droit de D______, au moyen d'un pistolet au poivre, lui crevant l'œil, soit une lésion corporelle grave.

d. Le 7 septembre 2022, A______ et B______ ont déposé plainte contre D______ et "inconnu" pour menaces, contrainte, injures, voies de fait, tentative de lésions corporelles simples, voire graves, laquelle a été traitée dans le cadre de la présente procédure.

d.a. Les plaignants ont exposé que depuis quelques mois, les relations avec l'exploitant du café-bar G______ ainsi que son épouse s’étaient fortement dégradées.

d.b. Le 7 juillet 2022 vers 18h00, "E______" [prénom] – identifié plus tard comme étant E______ –, client régulier du bar précité, était entré dans le bureau de tabac alors que A______ s’y trouvait seule. Elle avait refusé de lui remettre un paquet de cigarettes à crédit, malgré son insistance. Il était revenu avec D______, qui l'avait invectivée. Elle avait persisté dans son refus de remettre un paquet de cigarettes à crédit qui aurait été destiné à ce dernier, lequel lui avait répondu "mais wallah t’es méchante, j’vais enculer ton magasin, wallah rappelle-toi bien de ma gueule, inch’allah demain t’as un problème je vais te regarder, wallah inch’allah demain t’as un problème regarde comment ça va se passer", sur un ton agressif. Elle s’était sentie menacée par la présence de ces deux hommes mais avait su rester calme face à leurs intimidations.

Quelques minutes plus tard, D______ était revenu dans le tabac et avait insisté pour parler à son fils, disant qu’il resterait devant son magasin jusqu’à son arrivée. Il avait fait des allers-retours à l’intérieur et devant le commerce ajoutant, en haussant le ton "je suis pire que la police, moi, je suis plus que la police (…) il y a personne qui va rentrer aujourd’hui". Lorsqu’elle avait dit, pour le décourager, qu’elle enregistrait les images par caméras de vidéosurveillance, il s’était mis à crier "je m’en bats les couilles de ton crédit, je t’achète toi et ton magasin ; moi je veux parler avec ton fils, je veux pas parler avec toi, calme-toi, dégage, allez casse-toi, dégage, je suis pas j’sais pas qui moi, j’vais te montrer moi, je suis qui moi, j’habite en Suisse, j’me bats les couilles moi, wallah, j’vais t’éteindre la gueule moi, wallah, sur la tête de ma mère, si je veux ton magasin je le ferme tout de suite, il y a plus personne qui rentre, tu veux jouer avec moi ? Appelle tout de suite, qui tu veux, wallah, je vais te montrer tu parles avec qui wallah". Elle s’était sentie intimidée par cet individu particulièrement virulent et menaçant. Ensuite, E______ et D______ s’étaient postés devant le commerce et avaient arrêté les clients qui souhaitaient y entrer.

d.c. À 18h22, D______ avait joint B______ par téléphone pour lui dire que sa mère lui avait manqué de respect. B______ s’était rendu à G______ pour discuter, mais D______ avait refusé et dit "si je veux, je brûle tout, toi, ton magasin". B______, à la vue des images de vidéosurveillance, avait craint pour sa sécurité et celle de sa mère; il avait appelé la police, qui avait interpellé D______. Ce dernier leur avait alors dit "vous aller voir, vous n’avez pas bien fait de porter plainte contre moi. Il faut assumer, vous ne me connaissez pas, je viens de sortir de prison". Ils avaient eu peur de représailles.

d.d. Les jours suivants, D______ et E______ étaient venus quotidiennement aux abords du bureau de tabac, faisant les cent pas sur le trottoir devant la vitrine, en adressant des signes menaçant à A______, par exemple celui d’allumer des briquets. Ils quittaient en général les lieux lorsque B______ rejoignait sa mère en fin de journée.

d.e. Le 15 juillet 2022 vers 20h30, B______ avait aperçu E______ dans la rue et en avait déduit que D______ devait également se trouver aux abords du magasin. Au vu du comportement "étrange et menaçant" des intéressés durant les dernières semaines, B______ avait appelé la police municipale pour lui indiquer qu'il craignait pour sa sécurité ainsi que celle de sa mère. La police lui avait toutefois répondu ne rien pouvoir faire tant que E______ et D______ n'étaient pas "passés à l'action". Vu la tension "ambiante" et craignant de se faire agresser, B______ avait mis un des deux appareils de défense ("H______ [pistolet au poivre]") dans sa poche, objets qu'il gardait au magasin pour se protéger en cas d'"attaque".

Vers 22h30, D______ et E______ s’étaient postés aux abords du véhicule de B______ qui déchargeait de la marchandise. Il leur avait demandé ce qu’ils faisaient là, ce à quoi D______ avait répondu "tu vas voir, tu vas assumer, tu n’aurais jamais dû porter plainte contre nous ; tu dois assumer ça". Voyant que le ton montait, A______ avait rejoint son fils. D______ les avait insultés et avait commencé à gesticuler de manière "étrange". Ils avaient craint que ce dernier ne s’en prenne à eux, ce d'autant qu'il était convaincu que D______ était "armé". De plus, blessé aux talons, B______ n'aurait pas pu fuir et sa mère ne pouvait courir vu son âge. B______, en état d’alerte extrême, avait disposé sa main sur le pistolet spray qu'il portait sur lui. Il avait actionné son appareil de défense lorsque D______ avait dirigé sa main vers sa sacoche. Les deux individus étaient partis en courant, E______ ayant préalablement donné un coup de pied à B______ dans le bas des jambes.

d.f. Les 16 et 29 juillet 2022, deux hommes étaient venus au magasin pour les mettre en garde sur la dangerosité de D______ et E______ en leur disant de "faire gaffe à leur maison" et que ceux-ci savaient où ils habitaient. Ils avaient en outre appris que D______ avait perdu un œil à la suite de l'altercation du 15 juillet 2022.

d.g. Le 8 août 2022, ils avaient aperçu des amis d'une serveuse de G______ se regrouper devant de leur magasin. Ils avaient appelé la police.

d.h. Depuis ces événements, ils se sentaient surveillés et vivaient dans la peur de représailles. B______ n’osait plus laisser sa mère tenir seule le commerce; à présent, ils étaient toujours deux en soirée. Il avait acquis un gilet pare-balles qu’il portait lorsqu’il travaillait au magasin, en particulier durant la nuit. A______ était suivie régulièrement par un psychologue et devait prendre des médicaments pour calmer ses angoisses. B______, qui avait reçu, fin août 2022, une interdiction de pénétrer dans G______, vivait dans la crainte que les personnes visées par la plainte s'en prennent à lui sur le chemin de son domicile, qu'il savait désormais connu des intéressés.

Ils sollicitaient qu'une interdiction d'approcher soit prononcée contre D______ et E______, que leurs adresses privées soient gardées confidentielles, l'apport des mains courantes ou rapports de police en lien avec les faits, leur audition par le Ministère public de même que l'audition de deux serveuses de G______.

d.i. À l'appui de leurs déclarations, les plaignants ont notamment produit des extraits de vidéosurveillance de leur magasin de tabac, avec son pour ce qui est filmé à l'intérieur, non horodatés (pièces 3 à 25, 27 à 31).

e. Les pièces 3 à 18 portent l'intitulé "7 juillet 2022":

·         Les pièces 3 à 10 comprennent les extraits en lien avec l'altercation survenue entre D______ et A______, montrant le premier faire des allers-retours entre l'extérieur et l'intérieur du commerce. On entend notamment D______ tenir les propos rapportés dans la plainte de la prénommée (cf. B.d.b). Dans l'intervalle, des clients entrent dans le magasin pour y faire des achats [pièces 5 à 7]. Puis [pièces 11 à 15], on aperçoit E______ échanger quelques mots avec une cliente à l'entrée du magasin. Celle-ci entre et demande à A______ si elle le connait puis rapporte que cet homme lui a dit de ne pas entrer car le magasin était fermé ce à quoi elle lui avait répondu que cela n'avait pas l'air d'être le cas. Dans les extraits suivants [pièces 16 et 17], D______ se tient devant le magasin: il discute ensuite avec un homme et manipule son téléphone. Dans la séquence suivante [pièce 18], D______ discute avec une personne sur le trottoir. L'on aperçoit, sur les images, les mains des deux intéressés gesticuler. Deux clientes entrent dans le magasin et demandent à A______ ce qu'il se passe et si son fils est énervé. L'on en déduit que la personne discutant avec D______ est B______. Sur question de A______, les clientes lui confirment que personne ne leur a dit de ne pas entrer dans le bureau de tabac.

Les pièces 19 à 25 portent l'intitulé "12 au 15 juillet 2022":

·         Dans les extraits sous pièces 19 et 21, on aperçoit D______ passer devant le tabac alors qu'il est au téléphone. L'on voit aussi un individu portant des vêtements identiques à la photographie produite sous pièce 26 – sur laquelle les plaignants ont identifié E______ –, s'approcher de lui pour prendre une cigarette dans sa pochette.

·         Les autres extraits [pièces 20, 23 à 25] comportent des similitudes avec des extraits du "7 juillet 2022", à savoir les vêtements portés par D______ [pièces 3 à 18] et le véhicule noir de marque I______ stationné devant le magasin [pièces 3 à 17]. Par ailleurs l'apparence d'un client visible dans l'extrait sous pièces 23 du "12 au 15 juillet 2022" correspond à celui qui figure dans l'extrait sous pièce 5 du "7 juillet 2022"; il en va de même de la personne discutant avec D______ dans les extraits sous pièce 24 "12 au 15 juillet 2022" et sous pièce 16 du "7 juillet 2022".

·         Enfin, il ressort en substance des séquences sous pièces 27 à 30 intitulées "16 juillet 2022", qu'un homme entre dans le magasin. Il dit avoir assisté à l'altercation de la veille, ayant passé la soirée à G______. Il demande ce qui s'est passé et dit souhaiter que les problèmes se règlent. Sur question de B______, le client affirme ne pas connaitre les intéressés et ne pas venir de leur part. À teneur de l'extrait sous pièce 31, intitulé "29 juillet 2022", au cours d'une discussion avec un client sur l'altercation du 15 juillet 2022, ce dernier dit à B______ qu'ils "savent où il habite". Il dit ne pas connaitre D______ mais son frère.

C. a. Dans l'ordonnance querellée du 15 février 2024, le Ministère public a rappelé que les menaces proférées le 7 juillet 2022 par D______ à A______ en lien avec son refus de lui remettre un paquet de cigarettes à crédit avaient fait l’objet de l’ordonnance pénale du 18 juillet 2022, entrée en force (cf. B.b.b. supra). Les allers-retours de D______ sur le trottoir, devant le bureau de tabac, en attendant l'arrivée de son fils, n’étaient pas constitutifs d'une menace ou d'une quelconque autre infraction pénale. Elle n'avait d'ailleurs pas indiqué en quoi ce comportement l’aurait effrayée sur le moment et tout individu était autorisé à marcher dans la rue. Les images de vidéosurveillance démontraient qu'il n'y avait eu aucun acte de violence, ni menace de la part de D______ et de E______ en vue d'empêcher les clients d'entrer dans son magasin, qui d’ailleurs continuaient à y entrer. Les éléments constitutifs d'une contrainte, voire d'une tentative de contrainte n’étaient manifestement pas réalisés.

Il ressortait des images et des échanges verbaux enregistrés que D______ lui avait parlé sur un ton colérique et peu aimable, la traitant de "méchante" et répétant qu'il voulait parler avec son fils et non avec elle, propos non constitutifs d'injures. À supposer qu'une atteinte à l'honneur ait été ressentie par le ton et le vocabulaire alors employé, elle ne relevait "pas d'une gravité suffisante au sens de l'art. 52 CP".

S'agissant des injures que D______ aurait proférées le 15 juillet 2022, aucun élément de preuve ne figurait à la procédure et A______ ne les décrivait pas.

En lien avec des menaces et autres intimidations survenues les 16 et le 29 juillet 2022, les individus s’étaient adressés à son fils, de sorte qu'elle n’était pas visée par leurs propos.

Enfin, il n'existait pas de soupçons suffisants d'une infraction commise à son encontre le 8 août 2022.

b. Dans l'ordonnance du 16 février 2024, le Ministère public a retenu qu'après le refus de la mère de B______ de remettre à D______ un paquet de cigarettes à crédit le 7 juillet 2022, il ressortait des images de vidéosurveillance qu'il (B______) avait eu avec celui-là une discussion animée sur le trottoir, dont la teneur n'était pas connue. Ce comportement n'était constitutif d'aucune infraction pénale.

Ces images démontraient qu'il n'y avait eu ni acte de violence, ni menace de la part D______ et de E______ en vue d'empêcher les clients d'entrer dans le tabac. Les éléments constitutifs d'une contrainte, voire d'une tentative de contrainte n’étaient manifestement pas réalisés.

Il ne ressortait pas des images produites que D______ aurait fait des signes menaçants lorsqu'il marchait aux abords du bureau de tabac entre le 12 et le 15 juillet 2022. De tels signes n'auraient pas revêtu la gravité suffisante pour être constitutifs de menaces.

Aucun élément objectif ne permettait de supposer que les individus venus au bureau de tabac les 16 et 29 juillet 2022 auraient été des "messagers" venus diffuser une quelconque menace. Au contraire, leur attitude était plutôt bienveillante au vu de la gravité des faits survenus.

Enfin, il n'existait pas de soupçons suffisants quant à une infraction commise à son encontre le 8 août 2022.

D. Par pli du 16 février 2024, le Ministère public a informé B______ que les "faits mentionnés dans sa plainte du 7 septembre 2022 apport[aient] un éclairage supplémentaire sur les faits survenus le soir du 15 juillet 2022". Le Ministère public avait décidé de faire un apport de la présente procédure dans la P/4______/2022, afin que la légitime défense voire l'état de nécessité, éventuellement putatif, soient examinés.

E. a. Dans son recours, A______ reproche au Ministère public de ne pas avoir pris en considération l'intégralité des faits dénoncés. Ainsi, il n'avait tenu compte ni des menaces proférées par D______ contre elle et son fils le 7 juillet 2022 ainsi que les jours suivants, ni des faits constitutifs de contrainte reprochés à D______ et E______ (s'être posté devant le magasin de tabac et avoir empêché les clients d'y entrer le 7 juillet 2022 et d'avoir vagabondé des heures devant la vitrine durant les jours suivants). La motivation de l'ordonnance querellée était ainsi lacunaire.

En application du principe in dubio pro duriore, le Ministère public aurait dû ouvrir une instruction, d’autant plus que les faits en cause étaient graves.

Le 7 juillet 2022, D______ avait tenu des propos graves et menaçants envers son fils. Le nombre important d'altercations ainsi que l'attitude des intéressés avaient eu pour conséquence que les sentiments de peur et d'angoisse étaient allés crescendo. Il en allait de même des faits du 8 août 2022, dès lors qu'elle avait craint que ces personnes, qui avaient un lien direct avec G______, s'en prennent à eux ou encore lorsque D______ lui avait dit "vous n'avez pas bien fait de porter plainte contre moi. Il faut assumer, vous ne me connaissez pas, je viens de sortir de prison" lors de son interpellation le 7 juillet 2022. Enfin, les visites des 16 et 29 juillet 2022 visant à les mettre en garde sur les risques encourus ensuite de l'altercation du 15 juillet 2022 s'apparentaient à des "pratiques d'intimidation connues dans le monde criminel", ce qui avait accru leur sentiment d'insécurité. Le nombre élevé d'appels à la police et de main courantes – qu'elle produit, au nombre de huit entre le 7 juillet et le 15 août 2022 – témoignaient de la peur et de l'angoisse ressenties.

Le comportement de D______ et E______ visant à empêcher des clients d'entrer dans le magasin le 7 juillet 2022 avait porté atteinte à son avenir économique et à sa réputation auprès de la clientèle. Les menaces proférées contre eux et l'attitude de D______ les avaient entravés dans leur liberté d'action. Ils s'étaient sentis surveillés et avaient vécu dans la peur constante de représailles. Ils avaient modifié leur comportement et elle avait dû entamer un suivi psychologique. Les faits étaient établis par leurs déclarations claires ainsi que les éléments objectifs (images de vidéosurveillance et attestation de suivi).

Enfin, le Ministère public aurait dû instruire afin de s'enquérir du contenu des insultes prononcées à son encontre le 15 juillet 2022.

A______ souhaitait être entendue par le Ministère public. Elle sollicitait l'audition de son fils, celle des témoins cités dans sa plainte ainsi qu'une audience de confrontation avec D______ et E______. La police devait identifier les deux individus venus les mettre en garde ensuite de l'altercation du 15 juillet 2022.

b. Dans son recours, B______ reproche au Ministère public de ne pas avoir traité des faits dénoncés, à savoir:

-          les menaces proférées par D______ contre lui le 7 juillet 2022,

-          la réception, à son domicile, d'une lettre datée du 29 août 2022 lui interdisant de pénétrer dans G______, ce qui démontrait que "son adresse était connue",

-          les faits du 15 juillet 2022 au soir, à savoir que D______ lui avait dit "tu vas voir, tu vas assumer, tu n'aurais jamais dû porter plainte contre nous; tu dois assumer ça", l'avait insulté et avait dirigé sa main vers sa sacoche tout en gesticulant dans sa direction,

-          le coup de pied que lui avait donné E______ à cette occasion au niveau des jambes.

En application du principe in dubio pro duriore, le Ministère public aurait dû ouvrir une instruction, d’autant plus que les infractions en cause étaient graves.

Les propos tenus par D______ les 7 et 15 juillet 2022 étaient constitutifs de menaces. Celle de brûler le magasin avait été renforcée par l'attitude du précité et de E______ les jours suivants, durant lesquels ils avaient fait les cent pas durant des heures devant son commerce et adressé des signes menaçants à sa mère, à laquelle le premier s'en était déjà pris. Le nombre d'altercations et l'attitude des mis en cause avaient eu pour conséquence que leur sentiment de peur était allé crescendo. Ceci valait aussi pour l'évènement du 8 août 2022, lors duquel plusieurs personnes, en lien direct avec G______, s'étaient regroupées devant le magasin. Les deux hommes venus au magasin pour le "mettre en garde" de la dangerosité des précités avaient accru son sentiment d'insécurité, une menace pouvant être le fait d'un intermédiaire. La connaissance de son lieu de vie par les mis en cause s'était concrétisée par la réception de l'interdiction de pénétrer dans G______. Le nombre d'appels à la police et de mains courantes attestaient de la peur et de l'angoisse ressentie.

Le fait d'empêcher des clients d'entrer dans le magasin le 7 juillet 2022 devait être qualifié de contrainte, tout comme le comportement de D______ visant à se faire remettre un paquet de cigarettes à crédit par sa mère puis à le forcer à se présenter au magasin. Il n'était pas nécessaire que les mis en cause aient été violents ou aient usé de menaces. Sa mère et lui s'étaient sentis surveillés et avaient vécu dans la peur constante de représailles. Il n'avait d'ailleurs plus osé laisser sa mère gérer seule le magasin et avait acquis un gilet pare-balles pour leur protection. Il jetait en outre systématiquement un œil en direction du bar avant de sortir de son magasin, ce qui démontrait qu'ils avaient modifié leur comportement à la suite de ces évènements.

Il sollicite la mise en œuvre des mêmes actes d'instruction que sa mère.

c. Le Ministère public conclut au rejet du recours de A______, sous suite de frais.

La plainte du 7 juillet 2022 ne visait pas nommément E______. Cela étant, les faits visant ce dernier avaient été abordés dans l'ordonnance litigieuse. Il en allait de même des autres faits dénoncés, de sorte qu'une violation du droit d'être entendu était exclue.

d. Le Ministère public conclut au rejet du recours de B______, sous suite de frais.

S'agissant des menaces du 7 juillet 2022, B______ avait accompagné sa mère, en qualité de personne de confiance, lors du dépôt de plainte contre D______. À cette occasion, il n'avait pas lui-même déposé plainte pour les faits survenus ce jour-là, ce qui "en disait long" sur la peur qu'il avait ressentie. Les paroles proférées par D______ lors de son interpellation visaient uniquement la mère du recourant. Ainsi, les menaces du 7 juillet 2022 avaient été traitées dans le cadre de l'ordonnance pénale rendue le 18 juillet 2022. Les autres menaces qui auraient été proférées le 7 juillet 2022 n'étaient étayées par aucun élément de preuve objectif et ne semblaient, en tout état, pas avoir effrayé le recourant.

S'agissant des menaces dénoncées les jours suivants, elles n'étaient documentées par aucun élément de preuve objectifs. En outre, E______, qui avait été entendu le 11 mars 2024 dans le cadre de la P/4______/2022 sur les faits survenus le 15 juillet 2022, avait indiqué ne pas avoir entendu de menaces proférées par D______. Il en allait de même du témoin entendu le 31 mai 2023.

Il n'avait pas traité dans l'ordonnance querellée du coup de pied qu'aurait asséné E______ à B______ le 15 juillet 2022, de sorte qu'il entendait réparer la violation du droit d'être entendu du recourant dans le cadre de ses observations. Ainsi, de telles voies de fait n'étaient démontrées par aucun élément objectif et E______, entendu le 11 mars 2024, avait expliqué ne pas se souvenir d'avoir donné un coup de pied à B______. Vu l'insignifiance dudit coup, lequel n'avait occasionné aucune lésion, il se justifiait de ne pas entrer en matière sur ce point (art. 8 CPP cum 52 CP et 310 CPP), ce d'autant qu'aucun autre acte d'enquête ne paraissait envisageable. Pour le surplus, il avait traité de l'intégralité des faits dénoncés, de sorte qu'une violation du droit d'être entendu était exclue. Il avait en outre procédé à l'apport de la P/19575/2022 dans le cadre de la P/4______/2022.

Le Ministère public produit une copie de la P/5______/2022 et les procès-verbaux susmentionnés issus de la P/4______/2022.

e. A______ et B______ répliquent.

B______ ajoute que, bien que la présente procédure ait fait l'objet d'un apport dans le cadre de la P/4______/2022, il n'avait eu l'occasion de s'exprimer que sur les faits qui lui étaient reprochés le 15 juillet 2022, et non sur ceux qu'il avait dénoncés.

EN DROIT :

1.             En tant qu'ils ont été interjetés contre deux actes au contenu similaire et ont trait au même complexe de faits, les deux recours seront joints et la Chambre de céans statuera par un seul et même arrêt.

2.             2.1. Les recours ont été déposés selon la forme et dans le délai prescrits (art. 90 al. 2, 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP) et concernent des décisions sujettes à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP).

2.2.1. Se pose toutefois la question de savoir si les recourants ont qualité pour recourir au sens de l’art. 382 al. 1 CPP, ce qui doit être examiné d’office par l’autorité pénale, toute partie recourante devant s’attendre à ce que son recours soit examiné sous cet angle, sans qu’il n’en résulte pour autant de violation de son droit d’être entendue (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1207/2013 du 14 mai 2014 consid. 2.1 et 6B_194/2014 du 5 août 2014 consid. 2.2).

2.2.2. Selon l'art. 382 al. 1 CPP, toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision a qualité pour recourir contre
celle-ci. Tel est, en particulier, le cas du lésé qui s'est constitué demandeur au pénal (art. 104 al. 1 let. b cum 118 al. 1 CPP). La notion de lésé est définie à l'art. 115 CPP. Il s'agit de toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction. Est atteint directement dans ses droits le titulaire du bien juridique protégé par la norme, même si ce bien n'est pas unique. Il suffit, dans la règle, que le bien juridique individuel dont le lésé invoque l'atteinte soit protégé secondairement ou accessoirement, même si la disposition légale protège en première ligne des biens juridiques collectifs. En revanche, celui dont les intérêts privés ne sont atteints qu'indirectement par une infraction qui ne lèse que des intérêts publics, n'est pas lésé au sens du droit de procédure pénale (ATF 145 IV 491 consid. 2.3 et 2.3.1). Pour être directement touché, le lésé doit en outre subir une atteinte en rapport de causalité directe avec l'infraction poursuivie. Les personnes subissant un préjudice indirect ou par ricochet n'ont donc pas le statut de lésé et sont des tiers n'ayant pas accès au statut de partie à la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 1B_576/2018 du 26 juillet 2019 consid. 2.3).

Le bien juridiquement protégé par l'art. 181 CP (contrainte) est la liberté d'action, plus particulièrement la libre formation et le libre exercice de la volonté
(ATF 141 IV 1 précité, consid. 3.3.1 et les références citées).

Les biens juridiquement protégés par l'art. 180 CP sont les sentiments de paix intérieure et de sécurité.

2.3. En l'espèce, dans la mesure où, à l'appui de la violation de l'infraction de menaces (art. 180 CP), la recourante invoque des propos qu'aurait émis le mis en cause à l'attention de son fils le 7 juillet 2022 ["Si je veux, je brûle tout, toi, ton magasin"], seul ce dernier est titulaire du bien juridique protégé, étant le seul éventuel lésé par le comportement reproché.

De même, seule la recourante apparait lésée par les menaces qui auraient été proférées à son encontre entre les 12 et 15 juillet 2022 au magasin de tabac en l'absence de son fils.

Enfin, la question de savoir qui aurait été directement touché par les actes de contraintes dénoncés ou les menaces des 16 et 29 juillet 2022 peut être laissée ouverte, compte tenu des considérations qui suivent.

Pour le surplus, les recours sont recevables.

3.             Les pièces nouvelles sont aussi recevables, la jurisprudence admettant la production de faits et moyens de preuve nouveaux en deuxième instance (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2022 du 17 novembre 2022 consid. 2.1).

4.             À titre liminaire, la Chambre de céans constate que la recourante ne remet pas en cause la non-entrée en matière en tant qu'elle vise des injures proférées par D______ le 7 juillet 2022 ou d'éventuelles voies de fait, voire lésions corporelles commises, dès lors qu'aucun argument visant à démontrer la réalisation de ces infractions n'est développé. Ces points n'apparaissant plus litigieux, ils ne seront pas examinés plus avant dans le présent arrêt (art. 385 al.1 let. a CPP).

5.             Les recourants se plaignent d'une violation de leur droit d'être entendus, reprochant au Ministère public de ne pas avoir traité de l'intégralité des faits dénoncés dans leur plainte du 7 septembre 2022.

5.1. Le droit d'être entendu, garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et afin que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. L'autorité doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause
(ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3 p. 46; 142 I 135 consid. 2.1).

La motivation peut également être implicite et résulter des différents considérants de la décision. Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté, même si la motivation présentée est erronée (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1).

Tel n'est toutefois pas le cas en matière de classement implicite, l'absence de décision formelle constituant une atteinte grave aux droits procéduraux des parties, singulièrement à celui d'obtenir un acte motivé. Une telle violation ne peut être guérie dans la procédure de recours stricto sensu; la pratique de la Chambre de céans veut, en pareilles circonstances, que la cause soit renvoyée à l’instance précédente pour qu’elle rende une ordonnance (arrêts du Tribunal fédéral 6B_819/2018 du 25 janvier 2019 consid. 3.8 et 6B_84/2020 du 22 juin 2020 consid. 2.1.2; ACPR/824/2022 du 23 novembre 2022 consid. 4.3.2; ACPR/261/2022 du 21 avril 2022 consid. 4.4 in fine).

5.2.1. Le recourant reproche au Ministère public d'avoir rendu une ordonnance de non-entrée en matière implicite s'agissant des faits commis à son encontre le 15 juillet 2022, entre 20h30 et 22h30, à savoir, de la part de D______, des menaces verbales et gestuelles, des insultes ainsi qu'un geste en direction de sa sacoche, de sorte que lui-même avait cru que l'intéressé allait en sortir une arme, et, de la part de E______, un coup de pied dans les jambes.

Or, le Ministère public a effectivement omis de traiter ces faits dans l'ordonnance querellée, tant en ce qu'ils concernent D______ que E______, alors qu'ils ressortaient clairement de la plainte du recourant du 7 septembre 2022.

Selon le pli du Ministère public du 16 février 2024 et ses observations sur recours, la présente procédure a été versée (apport) à la P/4______/2022, dirigée contre le recourant. Dans cette seconde procédure, le recourant a été mis en prévention pour avoir, le 15 juillet 2022 vers 22h55, tiré dans l'œil droit de D______, au moyen d'un pistolet au poivre, ce qui a crevé cet organe. Or, si le Ministère public a indiqué vouloir examiner la légitime défense, voire l'état de nécessité, en lien avec le comportement ainsi reproché au recourant, il n'en demeure pas moins que, dans la présente procédure, il n'est pas entré en matière sur les faits dont le recourant s'estime avoir été victime le 15 juillet 2022 et ce, sans expliquer pour quel motif dans l'ordonnance querellée.

Il en va de même du coup de pied que le recourant dit avoir reçu, lors de ce même épisode, de la part de E______.

Le grief d'une violation du droit d'être entendu doit donc être admis. Il ne saurait être retenu que le Ministère public l'aurait réparée dans le cadre de la procédure de recours, à l'aide d'actes de procédure diligentés a posteriori, qui plus est dans le cadre d'une autre procédure dans laquelle le recourant est prévenu.

Le recours doit être admis sur ce point et la cause renvoyée au Ministère public pour qu'il se prononce, dans le cadre de la présente procédure, sur les faits dénoncés par le recourant contre D______ et E______ le 15 juillet 2022 dans la soirée.

5.2.2. Ce constat vaut également pour la lettre d'interdiction de pénétrer dans G______ datée du 29 août 2022 que le recourant indique avoir reçue à son domicile, faits qu'il considère être constitutifs de menace.

5.2.3. S'agissant en revanche des autres faits (menaces proférées par D______ le 7 juillet 2022 à l'encontre des recourants et les jours suivants à l'égard de la recourante; contrainte du 7 juillet 2022 reprochée à D______ et E______ pour s'être postés devant le magasin de tabac et avoir empêché les clients d'y entrer, puis d'avoir, les jours suivants durant des heures, "vagabondé" devant la vitrine), il ressort des décisions querellées que le Ministère public les a traités en intégralité. La motivation relative aux menaces survenues entre le 12 et le 15 juillet 2022 à l'encontre de la recourante ressort certes de l'ordonnance de non-entrée en matière adressée à son fils, laquelle a toutefois été notifiée à leur conseil commun. La recourante en a donc eu connaissance par ce biais et a pu valablement faire valoir devant la Chambre de céans – qui jouit d'un plein pouvoir de cognition en droit et en fait (art. 393 al. 2 CPP) (ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 p. 197; arrêt du Tribunal fédéral 1B_524/2012 du 15 novembre 2012 consid. 2.1.) – les arguments et faits qu'elle considérait déterminants.

Le Ministère public a ainsi exposé les motifs qui l'ont guidé pour rendre les décisions querellées, à savoir que les menaces du 7 juillet 2022 proférées dans la soirée par D______ contre la recourante avaient fait l’objet de l'ordonnance pénale du 18 juillet 2022 entrée en force, et que les autres faits dénoncés n’étaient pas constitutifs d’infractions ni ne relevaient d’une gravité suffisante pour être poursuivis. Une telle motivation est suffisamment claire et compréhensible, étant précisé que les recourants ont compris la portée de ces décisions et ont été en mesure de les contester dans le cadre de leurs recours.

Pour le surplus, il appert que les recourants reprochent en réalité à l'autorité précédente son appréciation des éléments du dossier, laquelle sera discutée ci-après.

Partant, les griefs seront rejetés.

6.             La recourante reproche à D______ de l'avoir menacée le 7 juillet 2022.

6.1. Le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s’il ressort de la dénonciation ou du rapport de police qu’il existe un empêchement de procéder (art. 310 al. 1 let. b CPP).

La chose jugée en est un, en tout cas en l'absence de faits nouveaux, au sens de l'art. 323 CPP (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 17 ad art. 310).

6.2. En l'espèce, la recourante explique elle-même que sa plainte du 7 septembre 2022 vise, pour partie, les mêmes faits que sa plainte du 7 juillet 2022, qui a fait l'objet de la procédure P/5______/2022 à l'issue de laquelle D______ a été condamné pour menaces, ensuite de l'altercation survenue en raison de son refus de lui remettre un paquet de cigarettes à crédit. Que dans sa plainte ultérieure la recourante ait ajouté des propos qui auraient été tenus par le précité à cette occasion n'y change rien, dès lors que la décision portant sur les menaces proférées ce jour-là, qui n'a pas été contestée, est à ce jour définitive et exécutoire.

Partant, c'est à bon droit que le Ministère public a retenu un empêchement de procéder s'agissant des menaces du 7 juillet 2022 à l'encontre de la recourante.

7.             Les recourants reprochent au Ministère public de ne pas être entré en matière sur d’autres faits dénoncés dans leur plainte.

7.1. Le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis (art. 310 al. 1 let. a CPP).

Conformément à cette disposition, la non-entrée en matière est justifiée lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction, ou encore lorsque les conditions à l'ouverture de l'action pénale font clairement défaut. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont manifestement pas réalisés que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé. En revanche, si le rapport de police, la dénonciation ou les propres constatations du ministère public amènent à retenir l'existence d'un soupçon suffisant, il incombe en principe à ce dernier d'ouvrir une instruction (art. 309 al. 1 let. a CPP). Cela implique que les indices de la commission d'une infraction soient importants et de nature concrète, ce qui n'est pas le cas de rumeurs ou de suppositions. Le soupçon initial doit reposer sur une base factuelle plausible, laissant apparaître la possibilité concrète qu'une infraction ait été commise (ATF 141 IV 87 consid. 1.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 3.1). Dans le doute, lorsque les conditions d'une non-entrée en matière ne sont pas réalisées avec une certitude absolue, l'instruction doit être ouverte (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1; ATF 138 IV 86 consid. 4.1, arrêt 6B_196/2020 précité).

7.2.1. L'art. 180 al. 1 CP réprime le comportement de quiconque, par une menace grave, alarme ou effraie une personne.

7.2.2. Sur le plan objectif, cette disposition suppose la réalisation de deux conditions. Premièrement, il faut que l'auteur ait émis une menace grave, soit une menace objectivement de nature à alarmer ou à effrayer la victime. On tient compte de la réaction qu'aurait une personne raisonnable, dotée d'une résistance psychologique plus ou moins normale, face à une situation identique (ATF 122 IV 97 consid. 2b; ATF 99 IV 212 consid. 1a; arrêt du Tribunal fédéral 6B_578/2016 du 19 août 2016 consid. 2.1). L'exigence d'une menace grave doit conduire à exclure la punissabilité lorsque le préjudice évoqué apparaît objectivement d'une importance trop limitée pour justifier la répression pénale. En second lieu, il faut que la victime ait été effectivement alarmée ou effrayée, peu importe que les menaces lui aient été rapportées de manière indirecte par un tiers. Elle doit craindre que le préjudice annoncé se réalise (arrêts du Tribunal fédéral 6B_578/2016 du 19 août 2016 consid. 2.1 ; 6B_871/2014 du 24 août 2015 consid. 2.2.2 ; 6B_820/2011 du 5 mars 2012 consid. 3).

7.3.1. Quiconque, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux, ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'oblige à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte se rend coupable de contrainte (art. 181 CP).

7.3.2. La contrainte peut notamment être réalisée par la somme de plusieurs comportements distincts de l'auteur, par exemple lorsque celui-ci importune sa victime par sa présence de manière répétée pendant une période prolongée – plus d'un an – (cf. au sujet de la notion de stalking ou harcèlement obsessionnel : ATF 141 IV 437 consid. 3.2.2; 129 IV 262 consid. 2.3-2.5; arrêt du Tribunal fédéral 6B_251/2020 du 17 novembre 2020, consid. 1.2). Toutefois, en l'absence d'une norme spécifique réprimant de tels faits en tant qu'ensemble d'actes formant une unité, l'art. 181 CP suppose, d'une part, que le comportement incriminé oblige la victime à agir, à tolérer ou à omettre un acte et, d'autre part, que cet acte amène la victime à adopter un comportement déterminé (ATF 129 IV 262 consid. 2.4). Si le simple renvoi à un "ensemble d'actes" très divers commis sur une période étendue par l'auteur, respectivement à une modification par la victime "de ses habitudes de vie" ne suffit pas, faute de mettre en évidence de manière suffisamment précise quel comportement a pu entraîner quel résultat à quel moment (ATF 129 IV 262
consid. 2.4), l'intensité requise par l'art. 181 CP peut néanmoins résulter du cumul de comportements divers ou de la répétition de comportements identiques sur une durée prolongée (cf. ATF 141 IV 437 consid. 3.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 6B_568/2019 du 17 septembre 2019 consid. 4.1).

Sur le plan subjectif, il faut que l'auteur ait agi intentionnellement, c'est-à-dire qu'il ait voulu contraindre la victime à adopter le comportement visé en étant conscient de l'illicéité de son comportement; le dol éventuel suffit (ATF 120 IV 7 consid. 2c).

7.4. Se rend coupable d'injure quiconque qui aura, par la parole, l'écriture, l'image, le geste ou par des voies de fait, attaqué autrui dans son honneur (art. 177 al. 1 CP).

8.             8.1. Le recourant reproche à D______ de l'avoir menacé le 7 juillet 2022.

Il allègue tout d'abord que ce dernier lui aurait dit "si je veux, je brûle tout, toi, ton magasin".

Il est établi que le jour des faits, les intéressés ont eu une discussion animée sur le trottoir, devant le magasin de tabac. Que les propos tenus à cette occasion ne soient pas audibles sur les images de vidéosurveillance ne permet pas d'exclure que ceux-ci aient été tenus, ce d'autant qu'aucun élément ne permet, à ce stade de la procédure, de dénier d'emblée et sans équivoque, tout crédit aux allégations du recourant.

Or, les termes utilisés, s'ils sont avérés, sont à l'évidence menaçants, qui plus est compte tenu du contexte dans lequel ceux-ci auraient été tenus, étant rappelé que le mis en cause a reconnu des agissements similaires à l'encontre de la recourante s'agissant d'une altercation survenue plus tôt dans la journée, faits pour lesquels il a d'ailleurs été condamné par ordonnance pénale du 18 juillet 2022. Que le recourant se soit contenté d'accompagner sa mère à la police le 7 juillet 2022 pour qu'elle dépose plainte, sans faire de même, ne permet pas de retenir d'emblée, comme le fait le Ministère public, qu'il n'aurait pas été lui-même effrayé.

Pour les mêmes raisons, l'on ne peut d'emblée dénier le caractère pénalement répréhensible des propos qui auraient été tenus par le mis en cause après son interpellation le 7 juillet 2022 ["vous n'avez pas bien fait de porter plainte contre moi. Il faut assumer, vous ne me connaissez pas, je viens de sortir de prison"], lesquels visaient manifestement aussi le recourant.

Ainsi, la décision du Ministère public parait prématurée à ce stade. Il lui appartiendra de procéder aux actes d'enquête utiles à clarifier la situation, tels que l'audition du mis en cause et des policiers ayant procédé à l'arrestation de ce dernier, dès lors que lesdits policiers semblent avoir assisté, à tout le moins en partie, aux faits dénoncés (menaces proférées par D______ après son interpellation).

8.2. Les recourants allèguent que D______ et E______ se seraient rendus coupables de contrainte pour avoir empêché des clients d'entrer dans le bureau de tabac le 7 juillet 2022.

Il n'apparait toutefois pas que le moyen utilisé par les mis en cause revêtirait une intensité suffisante au sens de la jurisprudence précitée. En effet, il ressort des images produites que seul E______ a tenté de dissuader une cliente d'entrer dans le magasin, prétextant que celui-ci aurait été fermé, ce qui n'a toutefois pas empêché cette dernière de le faire. Les autres extraits montrent au contraire que des personnes continuaient à entrer dans le magasin pour effectuer leurs achats et deux clientes ont expressément démenti que de tels propos auraient été tenus par les mis en cause avant qu'elles n'entrent (cf. B.e. pièces 5 à 7 et 18).

Faute de réalisation des éléments constitutifs de l'infraction dénoncée, la décision de non-entrée en matière du Ministère public est donc justifiée sur ce point. Aucun des actes d'enquête proposés ne parait dès lors propre à modifier les considérations qui précèdent.

8.3. La recourante soutient avoir fait l'objet de menaces de la part de D______ durant les jours suivant le 7 juillet 2022, lui reprochant de s'être rendu quotidiennement aux abords du tabac pour faire les cent pas et de lui avoir adressé, à ces occasions, des signes menaçants.

En l'occurrence, si les faits dénoncés ne ressortent pas directement des extraits de vidéo produits, l'on ne peut d'emblée exclure que le mis en cause, qui se rendait régulièrement si ce n'est quotidiennement au bar se trouvant à proximité immédiate du commerce tenu essentiellement par la recourante en journée, l'aurait effrayée par son comportement, ce d'autant plus au vu du contexte précité (cf. 8.1.). Depuis lors, elle ne restait plus seule le soir dans le magasin. Dès lors, si les signes dénoncés – et non les va-et-vient devant le commerce, comportement qui ne remplit pas les éléments constitutifs de menace – devaient être établis, ils pourraient revêtir une intensité suffisante pour être constitutifs de l'infraction de menaces.

Ainsi, sans autre acte d'instruction, la décision de non-entrée en matière parait ici aussi prématurée. Il appartiendra donc au Ministère public de procéder aux actes d'enquête utiles à clarifier la situation, tels que l'audition du mis en cause voire des personnes présentes à ces occasions.

8.4. Les recourants soutiennent que ces faits seraient également constitutifs de contrainte.

En l'occurrence, bien que la recourante dise avoir été effrayée par l'attitude de D______ et avoir, par conséquent, modifié son comportement en ce sens qu'elle n'osait notamment plus tenir le commerce seule le soir, il n'apparait pas que les faits dénoncés, qui se concentrent sur une tranche horaire limitée et portent sur une période de quelques jours seulement, revêtent l'intensité requise par la jurisprudence pour être qualifiés de contrainte sous la forme de "stalking".

Faute de réalisation des éléments constitutifs de l'infraction dénoncée, la décision de non-entrée en matière du Ministère public est donc justifiée sur ce point. Aucun des actes d'enquête proposés ne parait dès lors propre à modifier les considérations qui précèdent.

8.5. La recourante allègue avoir été injuriée par le mis en cause le 15 juillet 2022, sans toutefois détailler, ni dans sa plainte, ni dans la procédure de recours, les faits incriminés.

Or, la maxime de l'instruction d'office (art. 6 CPP) ne la dispensait pas de fournir aux autorités de poursuites pénales les éléments pertinents pour fonder le soupçon d'injures qu'elle dénonce, en particulier les termes proférés.

Partant, la non-entrée en matière est justifiée sur ce point.

8.6. Les recourants se plaignent de menaces survenues les 16 et 29 juillet 2022 au sein de leur bureau de tabac, indirectement, par la voix de tiers.

En l'occurrence, il ne ressort nullement des extraits produits que les propos tenus par les clients en cause avaient pour but d'intimider les recourants. Au contraire, à les entendre sur la bande son, les intéressés semblent s'inquiéter des conséquences de l'altercation survenue le 15 juillet 2022 avec le mis en cause. Que l'un des intéressés ait dit au recourant que D______ connaissait son lieu de résidence ne permet pas de modifier les considérations qui précèdent, en l'absence d'autre élément.

En tout état, rien ne permet d'établir que le mis en cause ait mandaté les intéressés, qui affirment d'ailleurs ne pas le connaitre. Ainsi, le lien de causalité entre ces visites et les agissements imputés au mis en cause fait défaut.

Aucun autre acte d'enquête ne parait propre à modifier les considérations qui précèdent. En particulier, l'identification desdites personnes n'y changerait rien, ces derniers ayant déjà dit, au moment des faits, ne pas connaître le mis en cause. Partant, la décision de non-entrée en matière est justifiée sur ce point.

8.7. Les recourants considèrent que le regroupement de plusieurs personnes ayant un lien "direct" avec G______ autour du magasin le 8 août 2022, serait constitutif de menaces.

Le simple fait que des personnes, fussent-elles en lien avec G______, se soient regroupées autour du magasin de tabac, n'est pas de nature à susciter la crainte exprimée par les recourants, ce d'autant que le bar en question se trouve à proximité immédiate du magasin. Dit comportement n'atteint donc pas le degré de gravité que les recourants voudraient lui prêter. En tout état, leur ressenti à cet égard ne saurait se substituer aux circonstances objectives sus-décrites.

Aucun des actes d'enquête proposés ne parait propre à modifier les considérations qui précèdent. Les recourants n'exposent d'ailleurs pas en quoi ceux-ci seraient pertinents en l'occurrence. Au vu de ce qui précède, c'est donc à bon droit que le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur ce point.

9.             En définitive, le recours s'avère partiellement fondé. Les ordonnances querellées seront par conséquent annulées en tant qu'elles concernent les faits du 15 juillet 2022 dans la soirée (cf. 5.2.1.), du 29 août 2022 (cf. 5.2.2.) ainsi que les infractions de menaces (cf. 8.1. et 8.3.), et la cause renvoyée au Ministère public pour l'ouverture d'une instruction. Pour le surplus, elles seront confirmées.

10.         Les recourants ayant obtenu partiellement gain de cause, ils seront dispensés des frais de procédure dans cette mesure (art. 428 al. 1 CPP). Compte tenu des autres griefs soulevés, pour lesquels ils succombent, il se justifie de les condamner solidairement à la moitié des frais de procédure, fixés en totalité à CHF 2'000.- (art. 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03), soit
CHF 1'000.-. Ce montant sera prélevé sur les sûretés versées (CHF 1'600.-) et le solde (CHF 600.-) restitué.

Le solde des frais sera laissé à la charge de l'État (art. 428 al. 4 CPP).

11.         Les recourants, parties plaignantes, assistés d'un avocat chef d'étude, sollicitent le versement d'une juste indemnité pour la procédure de recours, qu'ils chiffrent chacun à CHF 1'702.58.- TTC, correspondant à 4 heures 30 minutes de travail au tarif horaire de CHF 350.-, soit un total de CHF 3'405.16.

Ils ont certes droit à une juste indemnité pour leurs dépens, dans la mesure toutefois où ceux-ci se rapportent à l'activité pour laquelle ils obtiennent gain de cause devant la Chambre de céans (art. 433 al. 1 let. a cum 436 al. 1 CPP). Vu l'ampleur de leurs écritures, 4 heures 30 minutes de travail consacrées à la procédure de recours, y compris des brèves répliques dont la teneur est très similaire, paraissent adéquates. Compte tenu de l'admission partielle de leur recours, il se justifie de réduire cette indemnité dans la même mesure que ce qui a été décidé s'agissant des frais de la procédure, soit à la moitié. C'est donc une indemnité de CHF 1'702.60 TTC au total qui sera accordée aux recourants – représentés par le même conseil – pour la procédure de recours (1/2 de CHF 3'405.16).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Joint les recours interjetés par A______ et B______.

Les admet partiellement, dans la mesure de leur recevabilité.

Annule l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 15 février 2024 par le Ministère public en tant qu'elle concerne l'infraction de menaces pour les faits du 12 au 15 juillet 2022.

Annule l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 16 février 2024 par le Ministère public en tant qu'elle concerne les faits des 7 et 15 juillet ainsi que du 29 août 2022.

Renvoie la cause au Ministère public pour qu'il procède au sens des considérants.

Rejette les recours pour le surplus.

Condamne A______ et B______, conjointement et solidairement, à la moitié des frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 2'000.-, soit au paiement de CHF 1'000.-, l'autre moitié étant laissée à la charge de l'État.

Dit que ce montant (CHF 1'000.-) sera prélevé sur les sûretés versées (CHF 1'600.-).

Invite les services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer CHF 600.- à A______ et B______.

Alloue à A______ et B______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 1'702.60 (TVA 8.1% incluse) pour la procédure de recours (art. 433 CPP).

Notifie le présent arrêt, en copie, aux recourants, soit pour eux leur conseil, et au Ministère public.


 

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Valérie LAUBER et
Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Selim AMMANN, greffier.

 

Le greffier :

Selim AMMANN

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/19575/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

1'915.00

Total

CHF

2'000.00