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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/15036/2018

AARP/249/2022 du 05.08.2022 sur JTDP/1493/2021 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : VIOLATION D'UNE OBLIGATION D'ENTRETIEN;FIXATION DE LA PEINE
Normes : CP.217
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/15036/2018 AARP/249/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 5 août 2022

 

Entre

A______, domicilié ______ [GE], comparant en personne,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/1493/2021 rendu le 29 novembre 2021 par le Tribunal de police,

 

et

 

Le SCARPA, rue Ardutius-De-Faucigny 2, case postale 3429, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 29 novembre 2021, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de violation d'une obligation d'entretien (art. 217 du code pénal [CP]), l'a condamné à une peine privative de liberté de 90 jours, a révoqué le sursis octroyé le 19 novembre 2013 par le Ministère public de Genève (MP) à la peine de 120 jours-amende à CHF 100.- et a renvoyé la partie plaignante à agir par la voie civile. Le TP a condamné A______ au paiement des frais de la procédure, fixés à CHF 1'786.-, y compris CHF 300.- d'émolument de jugement et CHF 600.- d'émolument complémentaire de jugement.

A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant en substance à son acquittement, subsidiairement à l'atténuation de sa peine en raison de sa détresse profonde et à l'abandon de la révocation du sursis, ainsi qu'à la remise ou à une réduction des frais d'instruction et de première instance.

b. Selon l'acte d'accusation du 21 octobre 2020, il est reproché à A______ d'avoir, entre le 1er octobre 2015 et le 31 juillet 2019, omis de verser en les mains de B______ la contribution d'entretien due à l'entretien de ses filles, C______, née le ______ 1996, et D______, née le ______ 2005.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Par jugement du 24 juin 2011, le Tribunal de première instance de Genève (TPI) a donné acte à A______ de son engagement à verser au titre de contribution d'entretien des enfants, par mois, d'avance et par enfant, allocations familiales non comprises, les montants suivants:

- CHF 550.- jusqu'à la majorité, voire au-delà, pour C______ ;

- CHF 500.- par mois, allocations familiales non comprises jusqu'à l'âge de 12 ans révolus, puis CHF 550.- par mois jusqu'à la majorité, voire au-delà, pour D______.

Par convention du 1er juin 2018, la mère des enfants a cédé sa créance au Service cantonal d'avance et de recouvrement des pensions alimentaires.

b. Entendu par le MP, le TP et la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR), A______ a admis n'avoir jamais versé de pensions alimentaires à son ex-épouse et avoir seulement à une ou deux reprises remis leur équivalent au SCARPA pendant la période pénale. Depuis son divorce, il n'avait pas réussi à équilibrer sa situation financière et n'avait pas les moyens de s'acquitter des contributions d'entretien.

Il ne se souvenait pas précisément de son activité professionnelle durant la période pénale. Il avait créé la société E______ SA en 2018 pour l'exploitation d'un restaurant mais elle ne rentrait pas dans ses frais et il n'était pas arrivé à se verser de salaire. Il avait été au chômage pendant un an et demi, mais ne se rappelait plus de la période. À la fin de ses droits, il avait commencé à travailler pour une société de distribution de journaux à raison de 30 à 40 %, faute d'avoir pu trouver un emploi dans la restauration, et à chercher du travail sur internet. Il effectuait parfois des déménagements, pour lesquels il était payé de "main à main". Son revenu s'était monté à environ CHF 2'000.- nets par mois. À la CPAR, il a expliqué qu'entre octobre 2015 et juillet 2019, il parvenait à obtenir un salaire allant de CHF 2'500.- à CHF 3'000.- maximum, juste assez pour vivre.

Durant la période pénale, ses charges comprenaient son loyer (CHF 800.- [MP] ou CHF 850.- [CPAR]), l'électricité, ses primes d'assurance maladie mais également des amendes de stationnement, car, habitant au centre-ville, il trouvait de moins en moins de places de parking. Il avait remboursé des emprunts réalisés auprès de connaissances. Il avait des dettes auprès des impôts qu'il ne parvenait pas à rembourser.

Après un an et demi, voire deux ans de concubinage, il avait épousé sa nouvelle compagne en octobre ou novembre 2018. Son épouse travaillait à un taux de 50 %, pour un salaire de CHF 1'500.- par mois, et supportait la moitié des frais du ménage. Lors de la seconde audition devant le MP, il a indiqué qu'elle gagnait environ CHF 2'000.- par mois et qu'il payait seul le montant du loyer, vu qu'elle ne percevait pas un "grand salaire". Il a plus tard précisé qu'elle recevait des prestations de l'assurance-accident. Devant la CPAR, il a annoncé sa séparation, puis expliqué que sa seconde épouse n'avait pas d'emploi et ne bénéficiait pas de l'aide sociale.

Il pensait pouvoir, à partir de la première audience devant le MP, commencer à verser une certaine somme mensuellement, quitte à travailler plus pour le faire.

Il cherchait régulièrement un emploi, en mettant des annonces sur des sites internet, dans tous les domaines, soit non seulement la restauration mais aussi le déménagement. Il était cependant difficile à son âge de trouver du travail. Il n'avait pas pu en faire davantage pour s'acquitter des contributions d'entretien et n'avait pas eu d'autres moyens pour gagner quelque chose. Il n'avait initié aucune démarche pour modifier le montant de la contribution.

Au sujet de ses revenus actuels, il a d'abord expliqué au MP qu'il travaillait dans la distribution de journaux à hauteur de 60 à 80 %, pour un salaire compris entre CHF 2'700.- et CHF 2'800.-. À la fin de l'audience, il a avoué avoir démissionné de cette société, ne plus y travailler depuis un ou deux mois et toucher CHF 1'000.- à CHF 1'200.- de salaire de sa propre société. Il était parvenu à verser certaines sommes au SCARPA malgré ce salaire en empruntant de l'argent à des amis. À l'audience au TP, il a déclaré gagner un salaire de CHF 2'600.- par mois et devant la CPAR, un montant oscillant entre CHF 1'700.- et CHF 3000.-.

c. A______ a versé à la procédure une lettre de motivation non datée et sans destinataire, ainsi que son curriculum vitae. Il a également produit son bail datant du 1er novembre 2013, faisant état d'un loyer mensuel de CHF 750.-, charges comprises, pour un logement meublé, ainsi que ses primes d'assurance-maladie pour l'année 2018, qui s'élevaient à CHF 623.-.

d. Depuis sa première audition devant le MP, A______ s'est acquitté, en mains du SCARPA, des montants de CHF 350.- le 15 juillet 2019 et de CHF 300.- le 11 octobre 2019. Entre avril 2020 et août 2021, il lui a versé mensuellement CHF 300.-, puis à nouveau à compter de novembre 2021. Depuis le mois de mai 2022, il comptait augmenter ses versements mensuels à CHF 600.-. Au jour de l'audience d'appel, l'arriéré s'élevait à CHF 29'727.-.

C. a. À l'audience devant la CPAR, A______ a persisté dans ses conclusions et s'est référé à sa déclaration d'appel motivée du 8 décembre 2021.

La pension alimentaire d'un montant total de CHF 1'110.- était devenue un fardeau trop lourd à porter et devait être réduite. Depuis son divorce, il se trouvait dans un état dépressif mais ne pouvait être en arrêt maladie, car il bataillait pour sauver ses entreprises de la faillite. Il négociait un nouvel arrangement au SCARPA, auprès duquel il payait "assez régulièrement" ses pensions. Il était de bonne foi et demandait une ultime chance afin de payer ses dettes. Son état de profonde détresse devait être pris en compte et sa peine atténuée. Au regard de son endettement, les frais fixés par le TP étaient trop élevés et devaient être réduits voire remis.

b. Le MP et le SCARPA concluent au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris.

D. A______ est né le ______ 1970, en Turquie. Il est divorcé et père de deux enfants. Ses revenus ont été résumés supra. Son loyer est de CHF 980.-. En l'état, il ne parvient pas à payer ses primes d'assurance maladie et cherche à trouver un arrangement avec son assurance. Ses dettes se montent à plusieurs milliers de francs.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, A______ a été reconnu coupable à deux reprises de violation d'une obligation d'entretien et condamné :

-          le 19 novembre 2013 par le MP à une peine pécuniaire de 120 jours-amende à CHF 100.- l'unité, avec sursis, délai d'épreuve de trois ans, prolongé d'un an ;

-          le 14 septembre 2015 par le MP à une peine pécuniaire de 120 jours-amende à CHF 30.- l'unité.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. L'art. 217 al. 1 CP punit celui qui n'aura pas fourni les aliments ou les subsides qu'il doit en vertu du droit de la famille, quoi qu'il en eût les moyens ou pût les avoir.

L'obligation d'entretien est violée, d'un point de vue objectif, lorsque le débiteur ne fournit pas, intégralement, à temps et à disposition de la personne habilitée à la recevoir, la prestation d'entretien qu'il doit en vertu du droit de la famille. Pour déterminer si l'accusé a respecté ou non son obligation d'entretien, il ne suffit pas de constater l'existence d'une obligation d'entretien résultant du droit de la famille, mais il faut encore en déterminer l'étendue. La capacité économique de l'accusé de verser la contribution d'entretien se détermine par analogie avec le droit des poursuites relatif au minimum vital (art. 93 LP ; ATF 121 IV 272 consid. 3c p. 277).

On ne peut reprocher à l'auteur d'avoir violé son obligation d'entretien que s'il avait les moyens de la remplir, ou aurait pu les avoir (arrêt du Tribunal fédéral 6B_739/2017 du 9 février 2018 consid. 2.1). Par-là, on entend celui qui, d'une part, ne dispose certes pas de moyens suffisants pour s'acquitter de son obligation, mais qui, d'autre part, ne saisit pas les occasions de gain qui lui sont offertes et qu'il pourrait accepter (ATF 126 IV 131 consid. 3a p. 133 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_787/2017 du 12 avril 2018 consid. 6.1 ; 6B_1017/2016 du 10 juillet 2017 consid. 2.2). Il incombe en effet à celui qui doit assurer l'entretien de sa famille de se procurer de quoi satisfaire à son obligation. Le cas échéant, il doit changer d'emploi ou de profession, pour autant qu'on puisse l'exiger de lui. Le droit de choisir librement son activité professionnelle trouve ses limites dans l'obligation du débiteur alimentaire d'entretenir sa famille (ATF 126 IV 131 consid. 3a/aa p. 133 = JT 2001 IV 55). Il n'est pas nécessaire que le débiteur ait eu les moyens de fournir entièrement sa prestation, il suffit qu'il ait pu fournir plus qu'il ne l'a fait et qu'il ait, dans cette mesure, violé son obligation d'entretien (ATF 114 IV 124 consid. 3b p. 124 s. ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_787/2017 du 12 avril 2018 consid. 6.1 ; 6B_1017/2016 du 10 juillet 2017 consid. 2.4).

Lorsque la quotité de la contribution d'entretien a été fixée dans le dispositif d'un jugement civil valable et exécutoire, le juge pénal appelé à statuer en application de l'art. 217 CP est lié par ce montant (ATF 106 IV 36 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_787/2017 du 12 avril 2018 consid. 6.1 ; 6B_608/2017 du 12 avril 2018 consid. 4.1 ; 6B_739/2017 du 9 février 2018 consid. 2.1 ; 6B_519/2017 du 4 septembre 2017 consid. 3.2 ; 6B_1017/2016 du 10 juillet 2017 consid. 2.2).

En revanche, la question de savoir quelles sont les ressources qu'aurait pu avoir le débiteur d'entretien doit être tranchée par le juge pénal s'agissant d'une condition objective de punissabilité au regard de l'art. 217 CP. Il peut certes se référer à des éléments pris en compte par le juge civil. Il doit cependant concrètement établir la situation financière du débiteur, respectivement celle qui aurait pu être la sienne en faisant les efforts pouvant raisonnablement être exigés de lui (arrêts du Tribunal fédéral 6B_787/2017 du 12 avril 2018 consid. 6.1 ; 6B_739/2017 du 9 février 2018 consid. 2.1 ; 6B_1017/2016 du 10 juillet 2017 consid. 2.1 ; 6B_496/2016 du 5 janvier 2017 consid. 1.2 et les références ; 6B_573/2013 du 1er octobre 2013 consid. 1.1).

Sur le plan subjectif, l'infraction réprimée par l'art. 217 CP doit être commise intentionnellement (ATF 70 IV 166, p. 169). L'intention suppose que l'auteur a connu les faits qui fondent son obligation d'entretien ou qu'il en a accepté l'éventualité. L'intention de ne pas payer le montant dû sera en règle générale donnée si l'obligation a été fixée dans un jugement ou une convention car elle sera alors connue du débiteur. En revanche, l'intention du débiteur sera plus difficile à établir en l'absence de toute décision et de tout accord ; il n'en reste pas moins que le juge pourra prouver l'intention au moins dans les cas patents, notamment lorsque le débiteur n'aura rien payé ou aura versé seulement un montant dérisoire alors qu'il disposait de ressources non négligeables (ATF 128 IV 86 consid. 2b p. 90).

2.2. En l'espèce, il est établi qu'en vertu du jugement rendu par le TPI le 24 juin 2011, l'appelant était débiteur d'une contribution d'entretien mensuelle de CHF 550.- jusqu'à la majorité, voire au-delà, pour C______, et CHF 500.- par mois, jusqu'à l'âge de 12 ans révolus, puis CHF 550.- par mois jusqu'à la majorité, voire au-delà, pour D______. Durant la période pénale, l'appelant ne s'est acquitté qu'à une ou deux reprises de ses dettes. Aucun recours n'a été formé contre ce jugement, ni demande de modification, de sorte que l'arriéré accumulé s'élève à CHF 29'727.-. C'est le lieu de préciser qu'une modification de ce jugement civil ne peut être effectuée par le juge pénal et qu'il convient de s'adresser aux juridictions civiles pour ce faire.

Les revenus réels de l'appelant pendant la période pénale sont difficiles à établir, au regard du flou qu'il a entretenu à ce sujet. Selon lui, ses revenus avaient oscillé pendant la période pénale entre CHF 2'500.- et CHF 3'000.- nets et provenaient du chômage, d'une société de distribution de journaux (bien que l'on ignore quand il a débuté cette activité) et d'activité de déménageur non déclarée. Il a déclaré de façon crédible, même si on ignore pour quelles raisons il est revenu sur ses déclarations devant la CPAR, qu'il partageait les frais du ménage avec son épouse, qui travaillait lors des faits reprochés et réalisait un salaire mensuel compris CHF 1'500.- et CHF 2'000.-. Les revenus du ménage ont dès lors pu osciller entre CHF 4'000.- et CHF 5'000.- durant la période pénale. Le minimum vital de l'appelant durant cette période s'est élevé à CHF 1'848.-, à savoir CHF 850.- (minimum d'un couple en concubinage selon les normes d'insaisissabilité de l'Office des poursuites, réduit à la moitié), CHF 375.- (moitié du loyer, estimé d'après le bail produit) et CHF 623.- (assurance maladie). Au regard de la quotité disponible, qui a pu varier selon certains mois, l'appelant aurait pu s'acquitter d'au moins une partie de la contribution d'entretien due à chacune de ses filles.

Il convient au surplus de relever que son salaire n'a depuis la fin de la période pénale et jusqu'à ce jour pas grandement évolué. Pourtant, depuis le début de la procédure, il est parvenu à s'acquitter d'une certaine somme au SCARPA, ce qui montre qu'il aurait aussi pu fournir cet effort auparavant. Il a affirmé avoir réglé d'autres dettes pendant la période pénale, sans préciser lesquelles, mais également des amendes de stationnement, alors que les contributions d'entretien de ses enfants étaient prioritaires.

L'appelant ne s'est en outre durant la période en cause pas donné les moyens de respecter son obligation d'entretien. Sa lettre de motivation et son curriculum vitae produits dans la procédure ne viennent pas étayer ses affirmations, au demeurant fort vagues, selon lesquelles il aurait recherché un emploi mieux rémunéré comme il en avait le devoir, et qui lui aurait permis de payer ne serait-ce qu'en partie la contribution d'entretien mise à sa charge.

Il apparaît objectivement que sur la base des seuls éléments figurant au dossier, dont il ressort clairement qu'ils ne sont pas complets, l'appelant aurait eu, pendant la période pénale, les moyens de payer à tout le moins une partie de la contribution d'entretien due. Au vu de ses obligations d'entretien, dont il avait manifestement parfaitement conscience, l'appelant ne pouvait demeurer sans source de revenus suffisants pour les satisfaire. Sa pleine capacité de travail à cette période n'est au demeurant pas remise en cause. L'appelant ne saurait ainsi être suivi lorsqu'il soutient ne pas avoir été en mesure de s'acquitter de ses obligations alimentaires durant les années visées sans faute de sa part.

Compte tenu des faits qui précèdent, durant la période pénale visée, l'appelant aurait pu être en mesure de verser un montant à titre de contribution à l'entretien de ses filles, à tout le moins partiellement.

Au vu du jugement civil rendu le 24 juin 2011 et la quasi absence de versements durant la période pénale visée, l'appelant a agi en toute connaissance de cause.

Partant, les éléments constitutifs objectifs et subjectifs de la violation d'une obligation d'entretien sont réalisés et le verdict de culpabilité rendu à l'encontre de l'appelant du chef d'infraction à l'art. 217 al. 1 CP, pour les faits reprochés dans l'acte d'accusation, doit être confirmé.

3. 3.1.1. La violation de l'obligation d'entretien est passible d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (art. 217 CP).

3.1.2. Le 1er janvier 2018, sont entrées en vigueur des nouvelles dispositions sur le droit des sanctions. Il découle de l'art. 2 al. 1 et 2 CP que l'on applique en principe la loi en vigueur au moment où l'acte a été commis, à moins que la nouvelle loi ne soit plus favorable à l'auteur (principe de la non-rétroactivité de la loi pénale et exception de la lex mitior ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_496/2012, 6B_503/2012 du 18 avril 2013 consid. 8.1). Cependant, lorsqu'une nouvelle loi entre en vigueur pendant l'exécution d'un délit continu, il convient de prendre en compte le nouveau droit uniquement (AARP/124/2020 du 24 mars 2020, consid. 2.1 ; M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI, Code pénal, Petit Commentaire, Bâle 2017, n. 19 ad art. 2 et les références citées ; voir aussi arrêt du Tribunal fédéral 6B_196/2012 du 24 janvier 2013 consid. 1.3).

Il convient donc d'appliquer le nouveau droit des sanctions en l'espèce, le délit continu commis par l'appelant s'étant déroulé sur une période pénale s'étendant jusqu'au 31 juillet 2019.

3.2.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

3.2.2. D'après l'art. 41 al. 1 CP, le juge peut prononcer une peine privative de liberté à la place d’une peine pécuniaire si une peine privative de liberté paraît justifiée pour détourner l’auteur d’autres crimes ou délits, ou s'il y a lieu de craindre qu’une peine pécuniaire ne puisse pas être exécutée.

3.2.3. Sauf disposition contraire, la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur (art. 34 al. 1 CP). En règle générale, le jour-amende est de CHF 30.- au moins et de CHF 3'000.- au plus. Il peut exceptionnellement, si la situation personnelle et économique de l'auteur l'exige, être réduit jusqu'à CHF 10.-. Le juge en fixe le montant selon la situation personnelle et économique de l'auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d'assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (art. 34 al. 2 CP).

Au sens de l'art. 40 al. 1 CP, la durée minimale de la peine privative de liberté est de trois jours; elle peut être plus courte si la peine privative de liberté est prononcée par conversion d’une peine pécuniaire (art. 36) ou d’une amende (art. 106) non payées.

3.2.4. Selon l'art. 46 CP, si, durant le délai d'épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu'il y a dès lors lieu de prévoir qu'il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel (alinéa 1, première phrase). S'il n'y a pas lieu de prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation. Il peut adresser au condamné un avertissement et prolonger le délai d’épreuve de la moitié au plus de la durée fixée dans le jugement (alinéa 2). Cette limite vaut même s’il y a plusieurs prolongations (CR CP I-KUHN/VUILLE, 2 e éd. 2021, n. 9 ad art. 46 CP). Si la prolongation intervient après l’expiration du délai d’épreuve, elle court dès le jour où elle est ordonnée (art. 46 al. 2 in fine CP).

La commission d'un crime ou d'un délit durant le délai d'épreuve n'entraîne pas nécessairement une révocation du sursis. Celle-ci ne se justifie qu'en cas de pronostic défavorable, à savoir lorsque la nouvelle infraction laisse entrevoir une réduction sensible des perspectives de succès de la mise à l'épreuve. Par analogie avec l'art. 42 al. 1 et 2 CP, le juge se fonde sur une appréciation globale des circonstances du cas d'espèce pour estimer le risque de récidive. En particulier, il doit prendre en considération l'effet dissuasif que la nouvelle peine peut exercer, si elle est exécutée (ATF 134 IV 140 consid. 4.4 et 4.5 p. 143 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_879/2016 du 22 juin 2017 consid. 3.1).

Lors de l'appréciation des perspectives d'amendement, le juge doit prendre en considération l'effet dissuasif que la nouvelle peine peut exercer, si elle est exécutée Il peut parvenir à la conclusion que l'exécution, le cas échéant, de la nouvelle peine aura un effet dissuasif suffisant, justifiant de renoncer à la révocation du sursis antérieur. L'inverse est également admissible: si le sursis précédent est révoqué, l'exécution de la peine qui en était assortie peut conduire à nier l'existence d'un pronostic défavorable pour la nouvelle peine et, partant, à assortir cette dernière du sursis (ATF 134 IV 140 consid. 4.5 p. 144).

L'existence d'un pronostic défavorable quant au comportement futur du condamné, bien qu'elle soit une condition aussi bien du sursis à la nouvelle peine que de la révocation d'un sursis antérieur, ne peut pas faire l'objet d'un unique examen, dont le résultat suffirait à sceller tant le sort de la décision sur le sursis à la nouvelle peine que celui de la décision sur la révocation du sursis antérieur. Le fait que le condamné devra exécuter une peine - celle qui lui est nouvellement infligée ou celle qui l'avait été antérieurement avec sursis - peut apparaître suffisant à le détourner de la récidive et, partant, doit être pris en considération pour décider de la nécessité ou non d'exécuter l'autre peine. Il constitue donc une circonstance nouvelle, appelant un réexamen du pronostic au stade de la décision d'ordonner ou non l'exécution de l'autre peine (arrêt du Tribunal fédéral 6B_291/2020 du 15 mai 2020 consid. 2.3).

3.2.5. Conformément à l'art. 48 let. a ch. 2 CP, le juge atténue la peine si l'auteur a agi dans un état de détresse profonde.

Il y a détresse profonde au sens de l'art. 48 let. a ch. 2 CP lorsque l'auteur est poussé à transgresser la loi pénale par une situation proche de l'état de nécessité, c'est-à-dire que, sous la pression d'une détresse particulièrement grave, il croit ne pouvoir trouver d'autre issue que la commission de l'infraction (ATF 147 IV 249 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1431/2020 du 8 juillet 2021 consid. 4.2).

3.3. En l'espèce, la faute de l'appelant est loin d'être négligeable. Il n'a pas versé la contribution due pour l'entretien de ses filles durant presque quatre ans, alors même qu'il aurait pu être en mesure de le faire, à tout le moins partiellement.

Quand bien même l'appelant pouvait anticiper ses difficultés à s'acquitter de ses obligations alimentaires, il n'a entrepris aucune démarche pour modifier la contribution d'entretien due. Il semble cependant avoir réalisé au cours de la présente procédure qu'il devait prendre ses responsabilités et a trouvé un arrangement avec le SCARPA. Il a versé régulièrement les montants dus, même s'ils n'atteignent pas encore la somme exigible. S'il a pu agir avec égoïsme, en ce sens qu'il a agi par pure convenance personnelle au détriment des intérêts de ses propres enfants, il a entamé un changement. Sa collaboration n'est pas bonne, dans la mesure où il a varié sur ses revenus et a entretenu le flou à leur sujet. Sa prise de conscience semble entamée, mais doit encore évoluer au vu de sa propension à minimiser sa responsabilité. La situation personnelle de l'appelant, certes difficile, ne saurait toutefois justifier ses agissements.

Il a deux antécédents judiciaires spécifiques.

Au vu de ses efforts réalisés au cours de la procédure, une peine privative de liberté ne paraît pas justifiée. Une quotité de peine de 90 jours-amende paraît adéquate au regard de sa faute. Le montant du jour-amende arrêté à CHF 20.- tient compte de sa situation personnelle et économique, d'autant plus qu'il s'agit de ne pas saper les efforts financiers que l'appelant réalise depuis avril 2020. S'il a certes débuté à prendre ses responsabilités, elles arrivent très tardivement et après deux condamnations pénales. L'appelant paraît également se maintenir dans une position passive et ne semble pas déterminé à se remettre à flots pour contribuer à l'entretien de ses filles. Il présente un pronostic défavorable, la peine ordonnée sera donc ferme.

Le fait que l'appelant devra exécuter cette peine peut apparaître suffisante à le détourner de la récidive et sera partant pris en considération dans la décision de ne pas révoquer le sursis antérieur (pour mémoire : octroyé le 19 novembre 2013 par le MP à la peine de 120 jours-amende à CHF 100.-), qui aurait un effet dévastateur sur les finances du prévenu, alors qu'il est souhaité qu'il continue à payer ses contributions d'entretien. En revanche, il sera adressé à l'appelant un nouvel avertissement et le délai d'épreuve sera prolongé, compte tenu du fait qu'il l'a déjà été d'un an, de six mois (à compter du jour où la prolongation est ordonnée, cf. art. 46 al. 2 in fine CP), afin de s'assurer qu'il continue à assumer ses obligations.

La détresse profonde plaidée ne ressort aucunement de ses déclarations ou de son attitude. Il ne peut être établi que l'appelant se serait trouvé sous la pression d'une détresse particulièrement grave, de sorte qu'il ne pouvait croire trouver d'autre issue que la commission de l'infraction. La peine ne sera partant pas atténuée en vertu de l'art. 48 CP.

Le jugement entrepris sera réformé quant à la peine prononcée.

4. L'appelant demande à ce que les frais de première instance soient revus à la baisse, voire entièrement remis, en raison de son endettement. Or son manque de collaboration ne permet pas d'établir sa situation financière au sens de l'art. 425 CPP. Il n'a en effet aucunement cherché à démontrer ses dettes, ne serait-ce qu'en produisant un extrait du registre des poursuites. Aucune remise ou réduction des frais de la procédure ne sera ordonnée, étant précisé que l'appelant pourra demander des facilités de paiement au Service des contraventions, qui se chargera du recouvrement des frais de la procédure.

5. L'appelant obtient partiellement gain de cause. Il supportera dès lors la moitié des frais de la procédure d'appel, qui comprendront un émolument de décision de CHF 800.- (art. 428 al. 1 CPP ; art. 14 al. 1 let. e RTFMP). Dans cette même proportion, il ne supportera que la moitié des émoluments complémentaires de jugement fixés à CHF 600.- par le TP.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1493/2021 rendu le 29 novembre 2021 par le Tribunal de police dans la procédure P/15036/2018.

L'admet partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable de violation d'une obligation d'entretien (art. 217 CP).

Le condamne à une peine pécuniaire de 90 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Renonce à révoquer le sursis octroyé le 19 novembre 2013 par le Ministère public de Genève et prolonge le délai d'épreuve de six mois (art. 46 al. 2 CP).

Adresse un avertissement formel à A______.

Renvoie la partie plaignante à agir par la voie civile (art. 126 al. 2 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure d'instruction et de première instance, qui s'élèvent à CHF 1'186.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.-, ainsi qu'à la moitié de l'émolument complémentaire de jugement qui s'élève à CHF 600.- (art. 426 al. 1 CPP)

Laisse le solde de ces frais à la charge de l'État.

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'015.-, qui comprennent un émolument de décision de CHF 800.-.

Met la moitié de ces frais, soit CHF 507.50, à la charge de A______ et laisse le solde de ces frais à la charge de l'État.


 


Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police et à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

La greffière :

Yaël BENZ

 

Le président :

Gregory ORCI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'486.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

80.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

60.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

800.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'015.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

2'201.00