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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3593/2024

JTAPI/1086/2024 du 05.11.2024 ( MC ) , ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3593/2024 MC

JTAPI/1086/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 5 novembre 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Mehdi ABASSI CHRAÏBI, avocat

 

contre

 

 

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1979, est ressortissant algérien.

2.             Il se trouve en situation irrégulière en Suisse depuis 2007 à tout le moins.

3.             Le 28 avril 2009, l'intéressé a été reconnu par les autorités algériennes.

4.             A teneur de son extrait du casier judiciaire suisse, il a été condamné à seize reprises entre le 19 novembre 2013 et le 15 mars 2024, soit :

-          le 19 novembre 2013, par le Tribunal de police de Genève (ci-après : TPEN), pour contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup − RS 812.121) (art. 19a ch. 1 LStup) et séjour illégal, infraction commise à réitérées reprises, au sens de l'art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (RS − 142.20), à une amende de CHF 100.-, ainsi qu'à une peine privative de liberté ferme de quatre mois, sous déduction de quatre jours de détention avant jugement, peine complémentaire se rapportant au jugement du 24 juin 2013 du Ministère public du canton de Genève (ci-après : Ministère public) ;

-          le 24 septembre 2014, par le Ministère public, pour séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 30.-, sous déduction de deux jours de détention avant jugement ;

-          le 11 novembre 2014, par le Ministère public, pour opposition aux actes de l'autorité au sens de l'art. 286 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP – RS 311.0), séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) et contravention à la LStup (art. 19a ch. 1 LStup), à une amende de CHF 300.-, à une peine privative de liberté ferme de 60 jours, ainsi qu'à une peine-pécuniaire de dix jours-amende à CHF 30.-, sous déduction de trois jours de détention avant jugement ;

-          le 6 janvier 2015, par le Ministère public, pour recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP), appropriation illégitime (art. 137 ch. 2 CP), contravention à la LStup (art. 19a ch. 1 LStup) et séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), à une amende de CHF 200.-, ainsi qu'à une peine privative de liberté ferme de quatre mois, sous déduction d'un jour de détention avant jugement ;

-          le 10 septembre 2015, par le Ministère public, pour séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) et contravention à la LStup (commissions répétées), à une peine privative de liberté ferme de deux mois, ainsi qu'à une amende de CHF 200.-, sous déduction d'un jour de détention avant jugement ;

-          le 28 septembre 2015, par le Ministère public, pour entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI), contravention à la LStup (art. 19a ch. 1 LStup), vol simple (art. 139 ch. 1 CP) et séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), à une peine privative de liberté ferme de trois mois, ainsi qu'à une amende de CHF 200.-, sous déduction de deux jours de détention avant jugement ;

-          le 2 octobre 2015, par le Ministère public, pour non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 LEI) et contravention à la LStup (art. 19a ch. 1 LStup), à une peine privative de liberté ferme de trois mois, ainsi qu'à une amende de CHF 200.-, sous déduction d'un jour de détention avant jugement ;

-          le 8 octobre 2015, par le Ministère public, pour non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 LEI) et contravention à la LStup (art. 19a ch. 1 LStup), à une peine privative de liberté ferme de trois mois, ainsi qu'à une amende de CHF 200.-, sous déduction de deux jours de détention avant jugement ;

-          le 20 avril 2017, par le Ministère public, pour séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) et délit contre la LStup (art. 19 al. 1 let. c LStup), à une peine privative de liberté ferme de 60 jours, sous déduction d'un jour de détention avant jugement ;

-          le 20 décembre 2017, par la Chambre pénale d'appel et de révision de Genève (ci-après : CPAR), pour violation de domicile (art. 186 CP), vol simple (art. 139 ch. 1 CP), dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP), à une peine privative de liberté ferme de six mois, sous déduction de 215 jours de détention avant jugement. La CPAR a en outre ordonné l'expulsion de l'intéressé de Suisse pour une durée de 5 ans (art. 66a CP) ;

-          le 10 juillet 2018, par le TPEN, pour délit contre la LStup (art. 19 al. 1 let. d LStup), rupture de ban (art. 291 al. 1 CP) et non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 LEI), à une peine privative de liberté ferme de huit mois, sous déduction de 98 jours de détention avant jugement ;

-          le 23 juillet 2019, par le TPEN, pour lésions corporelles simples par négligence (art. 125 al. 1 CP), vol simple (tentative) (art. 139 ch. 1 CP cum art. 22 al. 1 CP), violence ou menace contre les autorités ou les fonctionnaires (art. 285 ch. 1 CP), contravention à la LStup (art. 19a ch. 1 LStup), rupture de ban (art. 291 al. 1 CP) et injure (art. 177 al. 1 CP), à une peine privative de liberté ferme de sept mois, à une peine pécuniaire de 20 jours-amende à CHF 10.-, ainsi qu'à une amende de CHF 200.-, sous déduction de 94 jours de détention avant jugement. Le TPEN a en outre ordonné l'expulsion de l'intéressé de Suisse pour une durée de 7 ans (art. 66abis CP) ;

-          le 3 février 2021, par la CPAR, pour rupture de ban (art. 291 al. 1 CP), à une peine privative de liberté ferme de sept mois, sous déduction de 118 jours de détention avant jugement ;

-          le 4 juin 2021, par le Ministère public, pour rupture de ban (art. 291 al. 1 CP), à une peine-pécuniaire de 180 jours-amende à CHF 10.-, sous déduction d'un jour de détention avant jugement ;

-          le 21 août 2023, par le TPEN, pour rupture de ban (commission répétée) (art. 291 al. 1 CP), à une peine privative de liberté ferme de cinq mois, sous déduction de 58 jours de détention avant jugement ;

-          le 15 mars 2024, par le TPEN, pour rupture de ban (art. 291 al. 1 CP) et non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 LEI), à une peine privative de liberté ferme de sept mois, sous déduction de 33 jours de détention avant jugement.

5.             M. A______ fait en outre l'objet de deux procédures pénales en cours, toutes deux pendantes par-devant le TPEN, la première pour rupture de ban (art. 291 al. 1 CP) et infraction à la LEI (art. 115 LEI), la seconde pour rupture de ban (art. 291 al. 1 CP).

6.             M. A______ a fait l'objet d'une première interdiction d'entrée en Suisse prise le 2 juillet 2009 par le Secrétariat d'Etat aux migrations (ci-après : SEM), valable jusqu'au 1er juillet 2014, laquelle a été prolongée le 2 juillet 2014 et est désormais valable pour une durée indéterminée.

7.             Il a été interpellé le 20 mai 2017. Entendu par la police, il a déclaré se trouver en Suisse depuis onze ans en situation illégale. Il n'avait ni famille ni attaches particulières en Suisse. N'ayant pas de domicile fixe, il dormait dans la rue. Il était démuni de moyens de subsistance.

8.             Le 13 février 2018, l'intéressé s'est vu notifier une décision de non-report d'expulsion judiciaire avec une carte de sortie, lui octroyant un délai au 20 février 2018 pour quitter la Suisse.

9.             N'ayant pas respecté ce délai, M. A______ a été inscrit au RIPOL le 26 février 2018.

10.         Le 8 avril 2018, l'intéressé a été appréhendé par les services de police à la rue Bautte 6, 1201 Genève, et prévenu d'infractions à la LStup (vente d'héroïne) et de séjour illégal. Auditionné, il n'avait jamais bénéficié d'autorisation de séjour en Suisse et n'avait entrepris aucune démarche visant à son retour dans son pays d'origine. Il ne souhaitait pas obtenir les coordonnées d'un organisme d'aide au retour et refusait de prendre l'engagement de contacter l'ambassade ou le consulat de son pays d'origine afin de rendre possible son retour dans ce pays. S'agissant de sa situation personnelle, il était démuni de moyens de subsistance. Il n'avait ni famille, ni attache particulière en Suisse.

11.         Par jugement du 10 septembre 2018, le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM) a refusé la libération conditionnelle de M. A______.

12.         Le 16 novembre 2018, l'intéressé s'est vu notifier une décision de non-report d'expulsion judiciaire, prise le 14 novembre 2018, rendant celle-ci exécutable dès sa libération.

13.         A sa sortie de prison, le 3 décembre 2018, M. A______ a été remis en mains des services de police, étant précisé qu'un vol avec escorte policière était prévu pour le 17 janvier 2019 au départ de Genève.

14.         Par décision du 3 décembre 2018, le commissaire de police a ordonné la mise en détention administrative de l'intéressé, sur la base de l'article 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, en vue de l'exécution de son expulsion de Suisse.

15.         Par jugement du 6 décembre 2018 (JTAPI/1188/2018), le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) a confirmé l'ordre de mise en détention administrative précité pour une durée de deux mois, soit jusqu'au 3 février 2019.

16.         Le 17 janvier 2019, M. A______ a été pris en charge par les services de police et conduit à l'aéroport en vue de la prise du vol qui lui avait été réservé. Vu l'attitude de l'intéressé, son refoulement n'a pas pu se concrétiser.

17.         Par décision du commissaire de police du 17 janvier 2019, l'intéressé a été maintenu en détention administrative, cette fois sur la base de l'article 78 al. 1 LEI, pour un durée d'un mois, ordre confirmé par jugement du tribunal du 21 janvier 2019 (JTAPI/57/2019).

18.         Par décision du 30 janvier 2019, l'OCPM a ordonné la mise en liberté de M. A______ dès le 1er février 2019, tout en lui rappelant qu'il faisait l'objet d'une mesure d'expulsion judiciaire et qu'il était tenu de quitter la Suisse, faute de quoi il s'exposerait à une condamnation pour rupture de ban.

19.         Le 12 août 2019, une injonction d'exécuter a été délivrée par le Ministère public concernant le jugement du TPEN du 23 juillet 2019.

20.         Le 14 août 2019, les services de police ont procédé à la réservation d'un vol avec escorte policière en vue de l'exécution de la nouvelle expulsion judiciaire prononcée à l'encontre de l'intéressé. Ce vol a été confirmé pour le 20 janvier 2020, à 14h45, au départ de Genève.

21.         Par jugement du 6 septembre 2019, le TAPEM a une nouvelle fois refusé la libération conditionnelle de l'intéressé.

22.         A sa sortie de prison, le 20 novembre 2019, l'intéressé a été entendu par l'OCPM et une décision de non-report d'expulsion judiciaire lui a été notifiée.

23.         M. A______ a ensuite été remis en mains des services de police, chargés de l'exécution de son expulsion judiciaire. Il a été placé en détention administrative pour une durée de trois mois.

24.         Le 22 novembre 2019, le tribunal a confirmé la mise en détention administrative de l'intéressé, pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 20 février 2020 (JTAPI/1033/2019).

25.         Le 27 novembre 2019, M. A______ a saisi la chambre administrative de la Cour de justice d'un recours contre le jugement précité.

26.         Par arrêt du 6 décembre 2019, la chambre administrative de la Cour de justice a rejeté le recours de M. A______ (ATA/1763/2019).

27.         Le 20 janvier 2020, M. A______ n'a pas embarqué sur le vol de ligne qui lui avait été réservé. Il s'est en particulier opposé physiquement à son renvoi en tentant de se frapper la tête pendant qu'il était en cellule.

28.         Par décision du commissaire de police du 23 janvier 2020, l'intéressé a été placé en détention administrative pour insoumission sur la base de l'art. 78 al. 1 LEI pour une durée d'un mois.

29.         Par jugement du 24 janvier 2020 (JTAPI/80/2020), le tribunal a confirmé l'ordre de mise en détention administrative précité pour une durée d'un mois, puis prolongé la détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois par jugement du 18 février 2020 (JTAPI/179/2020).

30.         Le 2 mars 2020, l'intéressé a refusé de partir à bord du vol DEPA qui lui avait été réservé.

31.         Par décision du 25 mars 2020, l'OCPM a ordonné la mise en liberté immédiate de M. A______.

32.         L'intéressé a ensuite été incarcéré. A sa sortie de prison le 24 novembre 2023, il a été remis en mains des services de police et s'est vu notifier une interdiction de pénétrer dans le canton de Genève pour une durée de 24 mois.

33.         Le 16 février 2024, les autorités genevoises ont demandé au SEM de relancer la demande de soutien relative à la délivrance de documents de voyage en faveur de M. A______ dès lors que ce dernier était détenu.

34.         Le 5 juin 2024, l'intéressé a été conduit à Berne et présenté aux auditions consulaires algériennes, au cours desquelles le consul a confirmé la délivrance d'un laissez-passer en faveur de M. A______.

35.         Un vol a été réservé en faveur de l'intéressé pour le 7 octobre 2024 à 11h40 au départ de Genève.

36.         Par requête du 23 août 2024 déposée depuis la prison de Champ-Dollon, notifiée au SEM le 9 septembre 2024, M. A______ a formé une demande d'asile.

37.         À sa sortie de prison le 11 septembre 2024, M. A______ a été remis en mains des services de police, chargés de l'exécution de son expulsion judiciaire.

38.         Le 11 septembre 2024, à 9h30, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de deux mois.

Devant le commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi en Algérie, sans en expliquer les raisons. Il n'était pas en bonne santé et suivait actuellement un traitement médical et psychiatrique. Il ne souhaitait aviser personne de sa situation.

39.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au tribunal le même jour.

40.         Entendu le 13 septembre par le tribunal, M. A______ a déclaré qu'il était arrivé en Suisse en 2008-2009. Il ne savait pas ce qu'il faisait en Suisse, mais il y restait néanmoins. Il avait mal au genou et souffrait du cœur. Depuis 2005, il suivait un traitement. Il avait vu plusieurs médecins à l'hôpital. Il avait de la tension. Il comprenait qu'il faisait l'objet de deux mesures d'expulsion judiciaire, la dernière, ordonnée le 23 juillet 2019, pour une durée de sept ans. Il était encore en Suisse, car il y avait son médecin et son psychiatre. Il avait eu un accident à la tête. Il restait ici pour se soigner. Il avait déposé une demande d'asile le 23 août 2024. Il ne pouvait pas être soigné en Algérie, car il y avait des problèmes là-bas. Il n'arrivait pas à expliquer quels étaient ces problèmes. Il ne consommait plus d'héroïne. Il consommait de l'alcool. Il voyait un psychiatre auquel il expliquait ses problèmes. Il consommait des médicaments, notamment du Rivotril. Il prenait également des médicaments pour sa tension et pour dormir, prescrits par ses médecins. Il avait pris du Tramal contre les douleurs, mais il avait arrêté. Il lui était arrivé de travailler au noir, comme peintre, en Suisse. Il gagnait alors CHF 50.- ou CHF 100.- par jour. Il n'avait pas de famille en Suisse. Il y avait des amis. Il dormait à B______, à C______. Il n'avait pas de famille. Il ne prendrait pas le vol qui lui avait été réservé le 7 octobre 2024.

41.         Le 13 septembre 2024, le tribunal a confirmé l’ordre de mise en détention administrative du Commissaire de police pour une durée de deux mois, soit jusqu'au 10 novembre 2024 inclus (JTAPI/916/2024).

42.         Le 23 septembre 2024, le vol confirmé pour le 7 octobre 2024 a été annulé par la Brigade migration et retour (BMR) à la demande du SEM.

43.         Le 3 octobre 2024, l'OCPM a reçu l'information du SEM que l'audition concernant la demande d'asile déposée par l'intéressé aurait lieu le 4 novembre 2024.

44.         Par requête motivée du 30 octobre 2024, l’OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois.

45.         Par courriel du 1er novembre 2024, le conseil de M. A______ a sollicité la production de l'entier du dossier de l'OCPM de son mandant, notamment le rapport médical attestant de son aptitude au voyage et à ce qu'il soit ordonné aux HUG de produire l'entier de son dossier médical.

46.         Par courriel du 4 novembre 2024, l'OCPM a répondu qu'étant donné que les démarches en vue du renvoi de Suisse de M. A______ étaient suspendues vu sa demande d'asile, ce document serait transmis lorsqu'un vol pourrait à nouveau être réservé en sa faveur.

47.         Par retour de courriel du même jour, le conseil de M. A______ a confirmé souhaiter l'entier du dossier de l'OCPM, sans toutefois en indiquer les motifs.

48.         Devant le tribunal, lors de l'audience du 5 novembre 2023, M. A______ a indiqué ne pas être d'accord de retourner en Algérie car il y avait beaucoup de problèmes. Il était menacé par une famille dont le fils avait été tué et on le lui reprochait. S'il rentrait en Algérie, il ferait beaucoup d'années de prison. Il subissait une injustice car il n'était ni violent ni méchant. Il était toujours trainé devant les tribunaux et la police. Depuis sa dernière audition devant le tribunal, le 12 septembre 2024, sa situation médicale était restée inchangée. Il était cardiaque, avait de l'hypertension, était cassé, avait une double fracture au genou et avait été opéré plusieurs fois. Il ne se sentait pas bien. Il prenait des médicaments contre le stress et les douleurs et était suivi par un médecin pour soigner ses addictions. S'il avait déposé une demande d'asile c'est car il souhaitait rester en Suisse pour continuer à y être soigné. Il se sentait bien en Suisse et ne voulait pas repartir. Le jour où il trouverait quelque chose qui lui conviendrait, il quitterait la Suisse.

La représentante du commissaire de police a indiqué que M. A______ avait été auditionné la veille dans le cadre de sa procédure d'asile. Ils attendaient des nouvelles du SEM, à savoir la décision de l'intéressé sur sa demande d'asile. En cas de refus, ils réserveraient un nouveau vol, avec accompagnement policier, pour M. A______. C'était uniquement en cas de refus et lorsqu'ils débuteraient les démarches pour le renvoi de l'intéressé, qu'ils solliciteraient un certificat médical afin de savoir s'il était apte au renvoi. En cas d'acceptation de la demande d'asile, M. A______ serait libéré. Elle a plaidé et conclu à la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 10 février 2025.

Le conseil de M. A______ a plaidé et conclu à la mise en liberté immédiate de son mandant et au rejet de la prolongation de la détention administrative de ce dernier. A titre préliminaire, il a conclu à ce que la cause soit suspendue dans l'attente de l'apport du dossier médical de son client.

EN DROIT

1.             Le tribunal est compétent pour prolonger la détention administrative en vue de renvoi ou d'expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. e de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             S'il entend demander la prolongation de la détention en vue du renvoi, l'OCPM doit saisir le tribunal d'une requête écrite et motivée dans ce sens au plus tard huit jours ouvrables avant l’expiration de la détention (art. 7 al. 1 let. d et 8 al. 4 LaLEtr).

3.             En l'occurrence, le 30 octobre 2024, le tribunal a été valablement saisi, dans le délai légal précité, d'une requête de l'OCPM tendant à la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois.

4.             Statuant ce jour, le tribunal respecte le délai fixé par l'art. 9 al. 4 LaLEtr, qui stipule qu'il lui incombe de statuer dans les huit jours ouvrables qui suivent sa saisine, étant précisé que, le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l’étranger.

5.             A titre liminaire, M. A______ sollicite l'entier de son dossier OCPM ainsi que le dossier médical le concernant en mains des HUG.

6.             Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes et d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1).   Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1).

7.             En l’espèce, le tribunal ne donnera pas suite à la demande de production de documents. En effet, le dossier qui lui est soumis comporte les éléments pertinents pour pouvoir statuer en toute connaissance de cause. Particulièrement, on ne voit pas en quoi la production de l'entier du dossier le concernant en mains de l'OCPM serait de nature à influer le sort de la cause et M. A______ ne s'en explique d'ailleurs pas. S'agissant de sa situation médicale, il sera pertinent d'obtenir le rapport médical attestant de son aptitude au voyage une fois établi sans qu'il ne soit nécessaire de solliciter l'apport de l'entier son dossier médical aux HUG. En tout état, il pourrait très bien le produire par lui-même s'il l'estime nécessaire.

8.             Dans la mesure où les réquisitions de preuves sont rejetées, point n'est besoin de suspendre la procédure dans l'attente de la réception des documents sollicités, étant relevé que les conditions des art. 14 et 78 LPA ne sont pas remplies. Partant, la demande de suspension sera rejetée.

9.             Reste à examiner les conditions de la détention administrative de M. A______.

10.         La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l’art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et de l’art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu’elle repose sur une base légale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_584/2012 du 29 juin 2012 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).

11.         Selon l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, en lien avec l'art. 75 al. 1 let. h LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'une décision de première instance d'expulsion au sens des art. 66a ou 66abis CP, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée lorsqu'elle a été condamnée pour crime, par quoi il faut entendre une infraction passible d’une peine privative de liberté de plus de trois ans (cf. art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a).

12.         La détention administrative est aussi possible si des éléments concrets font craindre que ladite personne entende se soustraire à son refoulement, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEI).

13.         Ces deux dernières dispositions décrivent toutes deux des comportements permettant de conclure à l’existence d’un risque de fuite ou de disparition, de sorte que les deux éléments doivent être envisagés ensemble (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).

14.         Selon la jurisprudence, un risque de fuite - c’est-à-dire la réalisation de l’un des deux motifs précités - existe notamment lorsque l'étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité, qu'il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine. Comme le prévoit expressément l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI, il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.2).

15.         Lorsqu’il existe un risque de fuite, le juge de la détention administrative doit établir un pronostic en déterminant s’il existe des garanties que l’étranger prêtera son concours à l’exécution du refoulement, soit qu’il se conformera aux instructions de l’autorité et regagnera son pays d’origine le moment venu, c’est-à-dire lorsque les conditions seront réunies ; dans ce cadre, il dispose d’une certaine marge d’appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 3.3 ; 2C_806/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 2C_400/2009 du 16 juillet 2009 consid. 3.1).

16.         L’art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI permet par ailleurs à l’autorité de mettre en détention la personne concernée pour les motifs cités à l’art. 75 al. 1 let. a, b, c, f, g, h ou i LEI.

17.         L’art. 75 al. 1 let. f LEI prévoit qu’afin d’assurer l’exécution d’une procédure de renvoi ou d’expulsion ou d’une procédure pénale pouvant entraîner une expulsion obligatoire au sens des art. 66a ou 66abis CP, l’autorité cantonale compétente peut ordonner la détention pendant la préparation de la décision sur le séjour, pour une durée de six mois au plus, d’une personne qui n’est pas titulaire d’une autorisation de courte durée, de séjour ou d’établissement, si elle séjourne illégalement en Suisse et dépose une demande d’asile dans le but manifeste d’empêcher l’exécution d’un renvoi ou d’une expulsion ; tel peut être le cas notamment lorsque le dépôt de la demande d’asile aurait été possible et raisonnablement exigible auparavant et que la demande est déposée en relation chronologique étroite avec une mesure de détention, une procédure pénale, l’exécution d’une peine ou la promulgation d’une décision de renvoi.

18.         En l’espèce, M. A______ fait l'objet d'une mesure d'expulsion judiciaire, prononcée le 23 juillet 2019 pour une durée de sept ans. Il a en outre été condamné à 31 reprises par les autorités pénales suisses depuis son arrivée en Suisse. Il fait par ailleurs l'objet de deux procédures pénales en cours.

19.         Au vu de ce qui précède, sa détention administrative se justifie donc sous l'angle des art. 75 al. 1 let. h et 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, ce motif permettant à lui seul le prononcé d'une telle mesure (ATA/180/2016 du 25 février 2016 consid. 7).

20.         De surcroît, M. A______, qui, depuis 2008, n'a eu de cesse de commettre des infractions pénales, s'obstine à s'opposer à son départ en Algérie. Dépourvu de tout document d'identité, il n'a ni ressources financières, ni liens avec la Suisse. Concernant la demande d'asile qu'il a déposée, aucun élément au dossier ne permet de retenir que les chances de succès seraient réelles, bien au contraire vu les déclarations de M. A______ qui affirme avoir déposé sa demande d'asile uniquement dans le but de se soigner en Suisse. Il apparaît ainsi hautement vraisemblable que cette demande n'ait pour seul but que d'empêcher l'exécution de son renvoi. Dès lors, il existe des indices concrets faisant craindre que s'il était remis en liberté, M. A______ disparaîtrait dans la clandestinité dans le but de se soustraire à son expulsion, situation visée par les art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI.

21.         La détention administrative en matière de droit des étrangers doit dans tous les cas respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst. et art. 80 et 96 LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Il convient en particulier d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi ou d'une expulsion constitue une mesure appropriée et nécessaire (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 134 I 92 consid. 2.3 et 133 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_624/2011 du 12 septembre 2011 consid. 2.1) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi ou de l'expulsion de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées ; cf. aussi ATF 130 II 425 consid. 5.2).

22.         En l'espèce, les autorités sont dans l'attente de l'issue de la procédure d'asile après que l'intéressé ait été auditionné le 4 novembre 2024. L'intérêt public au départ de l'intéressé n'a pas disparu et aucune mesure moins incisive que la détention administrative n'est susceptible d'assurer son renvoi dans son pays d'origine. La détention respecte par conséquent le principe de la proportionnalité.

23.         Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi doivent être entreprises sans tarder par l'autorité compétente (art. 76 al. 4 LEI). Il s'agit, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/88/2010 du 9 février 2010).

24.         En l’espèce, le 28 août 2024, alors que l'intéressé était encore détenu pénalement, les services de police ont procédé à la réservation d'un vol DEPA en sa faveur prévu le 7 octobre 2024. Le principe de célérité posé par l'art. 76 al. 4 LEI est ainsi respecté. Par ailleurs, c'est à juste titre que l'OCPM attend l'issue de la procédure d'asile pour solliciter une évaluation de l'aptitude au renvoi de M. A______ et lui réserver un billet d'avion à destination de l'Algérie. En effet, s'il avait déjà sollicité l'évaluation médicale, celle-ci ne serait plus d'actualité au moment de l'exécution du renvoi de M. A______, de sorte que ladite évaluation devra être requise lorsque le renvoi de ce dernier apparaîtra imminent.

25.         Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention en vue du renvoi ou de l'expulsion ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l’accord de l’autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l’obtention des documents nécessaires au départ auprès d’un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).

26.         Dans tous les cas, la durée de la détention doit être proportionnée par rapport aux circonstances d'espèce (arrêts du Tribunal fédéral 2C_18/2016 du 2 février 2016 consid. 4.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 2.3).

27.         En l'espèce, la durée de détention respecte le cadre légal et n'apparaît pas disproportionnée, étant précisé que la détention de M. A______ prendrait fin s'il accepter de coopérer et de prendre un vol à destination de l'Algérie.

28.         Le dossier ne laisse apparaître aucun élément donnant à penser que le renvoi ne serait, en l’état, pas possible, pas licite ou pas raisonnablement exigible au sens de l'art. 80 al. 6 LEI.

29.         Enfin, l'état de santé de M. A______ n'apparaît pas de nature à empêcher son renvoi vers l'Algérie. En effet, même s'il devait être établi qu'il souffre d'hypertension, de problèmes cardiaques et d'affections au genou suite à une double fracture, rien n'indique qu'il ne pourrait pas voyager ni qu'il ne puisse pas poursuivre son traitement médical dans son pays d'origine. Au contraire, il apparaît, à première vue, que le suivi contre les addictions ainsi que la prise de médicaments contre le stress et les douleurs pourraient très bien être effectués en Algérie et n'empêche pas un transport par avion.

30.         Au vu de ce qui précède, la demande de prolongation de la détention administrative de M. A______ sera admise pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 10 février 2024.

31.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et à l’OCPM. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au SEM.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable la demande de prolongation de la détention administrative de Monsieur A______ formée le 30 octobre 2024 par l’office cantonal de la population et des migrations ;

2.             prolonge la détention administrative de Monsieur A______ pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 10 février 2024;

3.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, à l’office cantonal de la population et des migrations et au secrétariat d'État aux migrations.

 

 

 

Genève, le 5 novembre 2024

 

Le greffier